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Françoise et Olivier Guisan

Rêver
Réaliser
Notre maison
Partager écologique

PUBLI•LIBRIS
ISBN : 2-940251-39-8
© Publi-Libris SA. Tous droits réservés.
Imprimé en Suisse.
www.publi-libris.com
Table des matières

Préface IX par Daniel Brélaz

En guise d’avant-propos XI citations de Théodore Monod et


d’Albert Jacquard

Introduction 2
3 L’écologie et nos motivations
Quelques mots sur les auteurs 6
7 Olivier Guisan, écologiste en toute
connaissance de cause
11 Françoise Guisan,
écologiste convaincue
15 Le couple et l’écologie
Période préparatoire 20
22 Avant-projets
24 Cahier des charges
26 Terrain
29 L’architecte
Projet 34
35 Démarrage du projet et
ses caractéristiques
38 Historique du projet
44 « Parcours du combattant » : jalons…
45 Nombreuses oppositions et
rares avis favorables
Construction 50
51 Chantier
53 Terrassement et fondations
60 Bois
69 Terre
72 Sanitaire et chauffage
73 Habillages extérieurs
79 Aménagements intérieurs
87 Interactions avec les corps
de métiers
Principes bioclimatiques 96
Aspects techniques 106
108 Eau de pluie
114 Retraitement des eaux usées
125 Toilettes à compost
131 Ventilation
139 Serres
151 Capteurs solaires thermiques, eau
chaude, chauffage et séchoir
166 Panneaux solaires photovoltaïques
174 Installation électrique et utilisation
rationnelle de l’électricité
179 Géobiologie
Expériences vécues 182
184 Harmonie et bien-être
189 Vie au quotidien
194 Vision familiale
202 Et si c’était à refaire
205 Aspects financiers et subventions
210 Et si vous voulez suivre nos traces…
Anecdotes 216
218 Françoise et Olivier se souviennent…
Conclusion 228
Postface 234
235 Intervenants
259 Visiteurs

Annexes 262
263 I-I Habitation écologique – Projet
FOG – Caractéristiques techniques
266 I-II Modifications et simplifications
appportées au projet FOG
267 II Installation PV, compléments
268 III Mesures géobiologiques
(installation électrique)
269 IV Entreprises, artisans et sociétés
271 V Sites Internet

Remerciements 272
Crédits 272
34

PROJET

Si nos idées ont beaucoup évolué durant la phase préliminaire – comme en témoignent les

esquisses d’Olivier – la réalisation finale de la Clé de Sol est très proche du dernier avant-

projet, qui a tenu lieu de cahier des charges. En effet, d’une part nos réflexions se sont

affirmées, ce qui nous a permis d’opter pour les solutions que nous jugions les plus

favorables, d’autre part notre architecte a su respecter nos choix tout en se réservant des

espaces où exprimer sa créativité.


35

Démarrage du projet et ses caractéristiques Photo-montage du projet FOG


(réalisé par Gilles Bellmann).

Au départ, il s’agissait d’examiner les différentes variantes


architecturales proposées par Gilles Bellmann. La forme semi-
circulaire qu’il avait dessinée à grands traits libres nous a tout de
suite séduits (contrairement aux propositions plus fouillées, mais
plus laborieuses, de ses collaborateurs). Elle avait, en effet, le
36

mérite de respecter les conditions définies dans le cahier des


charges. Non seulement nous l’avons adoptée mais elle est restée
quasi inchangée jusqu’à la réalisation finale.
Notre projet avait un caractère particulier, aussi les plans et le
descriptif du projet devaient-ils être soigneusement élaborés. En
effet, d’une part sa dimension écologique pouvait inspirer quelques

Premières esquisses de Gilles. inquiétudes à nos partenaires ou aux observateurs extérieurs,


d’autre part, nous voulions bâtir notre maison sur une grande
parcelle (constructible), ce qui impliquait la mise à l’enquête d’un
plan partiel d’affectation (PPA). Les autorités communales et
cantonales ont ainsi souhaité pouvoir disposer, pour le PPA, de
plans plus détaillés qu’exigés d’ordinaire pour une simple villa.
37

En ce qui concernait les aspects extérieurs (gabarit,


implantation, etc.), les premiers plans ont donc été élaborés dans
une version quasi définitive.
Il a également fallu conduire diverses études, plus ou moins
poussées, relatives à l’intégration des systèmes techniques dans la
construction, études impliquant aussi des choix sûrs.

Enfin, nous avons dû dresser une liste complète des


caractéristiques techniques du projet (1994). Nous la reproduisons
telle quelle en annexe I-I car elle fournit une première description,
relativement précise, du projet FOG (nom formé des initiales des
auteurs, donné au projet au début et durant les travaux).
À quelques légères modifications et simplifications près, que nous
mentionnons dans l’annexe I-II, la réalisation finale sera très proche
de celle décrite sur cette liste.
38

Historique du projet

Pouvoir réaliser notre projet de maison écologique impliquait :


– l’élaboration d’un plan partiel d’affectation (PPA) ;
– l’approbation du PPA et l’obtention du permis de
construire ;
– la construction proprement dite.

L’aperçu historique « Parcours du combattant » : jalons…,


présenté en page 44, en détaille les étapes principales.
39

Première phase (élaboration du PPA)


Les autorités concernées étaient le Service de l’urbanisme de la
commune et le Service de l’aménagement du territoire du canton.
Les démarches ont débuté en février 1992 et se sont poursuivies,
sous forme de consultations et de révisions, jusqu’à l’obtention
d’un consensus quant à la teneur du PPA.
Cette façon de procéder a eu l’avantage de nous assurer le
soutien indéfectible des autorités communales et cantonales. Au vu
des difficultés que nous allions rencontrer par la suite, une telle
caution s’est révélée non seulement utile mais indispensable.
L’élaboration du PPA a duré trois ans. La succession de trois
chefs au Service de l’urbanisme et de deux municipaux à la
commune n’a pas facilité les choses, mais il y a eu d’autres
contretemps . Outre l’architecte Gilles Bellmann, nous avions, en

Maquettes d’architecte du projet


FOG (« brouillard », en anglais). Sa
réalisation a, en effet, eu quelque
peine à émerger de certaines
brumes administratives…
40

effet, sollicité le concours d’un second bureau d’architecture pour


le PPA (dans un souci d’impartialité vis-à-vis de la famille, encore
détentrice du terrain). Or ce deuxième bureau s’est révélé
incompétent, au point que nous avons dû renoncer à ses services
et demander à notre architecte de reprendre le PPA. Ce qu’il a fait,
avec une compétence qu’il n’a cessé de manifester par la suite.

Deuxième phase (approbation du PPA et obtention du


permis de construire)
Plan d’enquête. Les difficultés que nous avons rencontrées au cours de ces deux
mises à l’enquête étaient, pour la plupart, liées aux oppositions de
nos futurs voisins, alors propriétaires du domaine de La Doges,
situé en contrebas de notre terrain, et à quelques-unes de ses
connaissances et relations.
Courriers d’avocat, consultations et expertises multiples, avis
résultants, tentatives de conciliation non abouties, etc. : le dossier
correspondant remplit à lui seul plusieurs gros classeurs !
D’oppositions en recours, jusqu’à l’ultime récusation du tribunal
administratif, cette phase, réglée aussi vite que possible par la justice
et les services concernés, a tout de même duré, elle aussi, trois ans…
Après avoir épuisé trois avocats et toutes les possibilités de
blocage de notre projet aux niveaux communal et cantonal, notre
recourant n’a, heureusement, pas sollicité le niveau fédéral. S’il
avait poursuivi ses démarches, cela aurait pu contribuer à ruiner
41

Durant près de trois ans, nous


avons quotidiennement contemplé
ces gabarits en nous demandant si
et quand notre maison les
remplaçerait…

définitivement notre initiative, tout au moins à l’emplacement


prévu. Il nous aurait, en effet, été vraiment difficile d’attendre
plus longtemps.
Une volonté farouche d’aboutir, un soutien familial sans faille,
un avocat compétent et efficace, un architecte doué et persévérant,
et l’appui d’autorités communales et cantonales convaincues et
déterminées nous ont beaucoup aidés à ne pas renoncer et à
poursuivre jusqu’au bout notre « quête du Graal ».

Troisième phase
Soumissions, choix et décisions, ouverture du chantier en
juin 1998, travaux : franchir cette troisième étape, jusqu’à
l’occupation des lieux en octobre 1999, a pris deux ans.
42

Une manière de voir


l’encouragement à
la construction…
43

En conclusion, huit années de changements d’humeur, de


déceptions, d’enthousiasmes, d’incertitudes, de coups de gueule,
de ras-le-bol, de coups de fatigue, mais aussi de reprises de courage
et, finalement, de bonnes surprises.
Nous n’avions pas imaginé autant d’aléas – d’autant qu’aucune
des difficultés rencontrées n’était liée à une remise en cause de nos
options écologiques !

Signalons que la série de recours abusifs et injustifiés dont nous


avons parlé, outre les torts moraux et les coûts pécuniaires qu’elle
nous a valu, nous a également obligés à interrompre certaines
études techniques. En effet, ne sachant si nous allions pouvoir
construire ou non, nous les avons temporairement abandonnées.
Lorsque le PPA a été appprouvé, on nous a conseillé de procéder
dans les plus brefs délais à la mise à l’enquête pour l’obtention du
permis de construire. Aussi avons-nous repris ces études dans la
précipitation et n’avons pu approfondir certains aspects
techniques. Cela nous a conduits à commettre des erreurs au
moment de la construction, notamment lors de l’installation du
système de ventilation.
Tout cela n’a toutefois pas empêché la Clé de Sol de voir le jour.
Finalement, c’est là l’important.
44

«Parcours du combattant»: jalons…

17.02.1992 Première démarche auprès des 23.12.1996 22 oppositions


autorités communales 25.02.1997 Oppositions rejetées
1992-3-4 Mise au point projet et PPA en 18.03.1997 Recours au TA, Vaud
collaboration avec les autorités 30.06.1997 Récusation du juge et de ses
communales et cantonales assesseurs désignés par le TA
28.10.1994 Mise à l’enquête publique du PPA 17.09.1997 Récusation rejetée
28.11.1994 4 oppositions et 1 observation 24.10.1997 Recours au TA rejeté. Permis de
17.05.1995 PPA accepté par le Conseil construire validé
communal (79 oui, 0 non et 4 début 1998 Soumissions, choix des entreprises,
abstentions) études et décisions
07.07.1995 Recours auprès du Département juin 1998 Début du chantier
des travaux publics, de 04.09.1999 Première fête, pour notre fils
l’aménagement et des transports Antoine, dans la maison inachevée
(DTPAT), Vaud 06.09.1999 Deuxième fête, repas de fin de
20.03.1996 Recours rejeté chantier
11.04.1996 Recours au Tribunal administratif 12.10.1999 Entrée en jouissance des
vaudois (TA) propriétaires
28.08.1996 Recours rejeté fin 1999 Dernières finitions
11.11.1996 PPA approuvé par le DTPAT 01.02.2000 Obtention du permis d’habitation
03.12.1996 Mise à l’enquête publique pour le
permis de construire
45

Nombreuses oppositions et rares avis favorables Futur emplacement de la maison,


en bordure de zone urbaine.

Avec le recul, les oppositions suscitées à l’encontre du projet FOG


font sourire mais, sur le moment, elles ont sérieusement ralenti son
avancement et occasionné frais et soucis.
À titre informatif, voici quelques-unes des « perles » qui, dans
un contexte difficile, ont bien failli nous inciter à réaliser notre
projet dans un autre canton, voire un autre pays…
46

– « La vue de la maquette fait songer à une station


interplanétaire de bande dessinée. […] Écologie ne signifie
pas obligatoirement une enveloppe de soucoupe volante !
[…] Si ce prototype se réalise, La Tour-de-Peilz serait comme
une jolie fille en costume vaudois qui aurait troqué son
seyant chapeau de paille contre un capteur solaire… »
– « […] la beauté indéniable [de notre région] serait souillée
par ce bunker futuriste. »
– « Ce serait une très grave faute de goût de détruire [notre
paysage] par manque d’imagination, et irréparable pour des
raisons d’efficacité qui restent à prouver. Personne n’aurait
songé à mettre en exergue la maison du Corbusier à
Corseaux. Elle est plutôt cachée et discrète et, quoi qu’en
pensent certains inconditionnels, c’est bien ainsi. »
– «Je fais opposition à ce projet, véritable insulte à la déontologie
de la belle profession, je dirais vocation d’architecte dont le
souci premier est de composer en harmonie avec
l’environnement.»
– « Projet sans doute « intéressant ». […] Je considère que ce
n’est pas l’endroit pour y planter une « soucoupe volante », vu
l’harmonie des lieux. On n’a pas non plus implanté le Centre
Pompidou ou la Pyramide devant la cathédrale de Notre-
Dame de Paris. »
– «Il est inadmissible d’abîmer notre beau paysage aux fins
d’une telle expérience. »
47

La Presse Riviera, 7 janvier 1997.

– « Ce projet futuriste […] défigure les environs, typiquement


champêtres. »
– «L’extérieur de cette maison ressemble à une station d’épuration
et gâtera le paysage harmonieux que Rousseau aimait tant.»
– « Si les laideurs de la technique sont acceptables en cas de
nécessité, faisons un effort pour les dissimuler. »
– « Laisser construite une telle bâtisse créera un précédent. »

Heureusement, quelques voix encourageantes se sont aussi


exprimées:
– « Je suis navrée de lire toutes ces oppositions car je suis
favorable à ce projet qui prône de nombreuses idées
intéressantes. Il y a heureusement des gens qui osent, qui
cherchent, se posent des questions et se tournent vers
l’avenir. Il est temps de chercher à utiliser des énergies
48

renouvelables. D’autre part, au vu de la maquette exposée, le


projet s’inscrit fort bien dans les courbes de niveau du
terrain. »
– « C’est un projet d’avant-garde qui fera école et qu’il faut
soutenir. Bravo aux concepteurs pour leur courage, leurs
idées techniquement révolutionnaires et leur audace. »

Il semblerait, aux dires de nombreux témoins et visiteurs, que


ces derniers échos favorables soient ceux qui aient conservé, dix ans
après, une pertinence.
Quant aux opposants, quelques-uns ont tout de même eu le
courage, après-coup, d’admettre qu’ils s’étaient trompés…
49
50

CONSTRUCTION

Après avoir enfin obenu l’autorisation de construire, nous avons pu repartir de l’avant.

Quelques mois pour les soumissions, le choix des entreprises, la reprise des études

techniques, la recherche de solutions concrètes appropriées, et le chantier pouvait démarrer.


51

Chantier

Le chantier, qui devait durer douze mois, en a finalement demandé


quinze (en raison, notamment, de quelques « dérapages »
imprévus), sans compter trois mois de plus pour procéder aux
ultimes finitions.
52

Délimitation du chantier et de son


accès : une seule infraction !

Il n’est pas nécessaire de parler ici des étapes conventionnelles de


la construction. Nous évoquerons uniquement celles qui méritent
une attention ou des remarques particulières.
Les réunions de chantier (hebdomadaires) réunissaient Olivier,
Françoise, Gilles et Marco, qui secondait l’architecte (Marco a
passé des centaines d’heures sur place et s’est beaucoup entretenu
avec les contremaîtres des différentes entreprises concernées.)
« Conserver un chantier propre » figurait au rang de nos
conditions, clairement énoncées au moment des soumissions. Non
seulement cette condition a été respectée mais le chantier affichait
même une certaine beauté !
Des barrières délimitaient le « théâtre des opérations » afin que
l’exploitation agricole puisse se poursuivre sans dommages
alentour. Dans l’ensemble, les ouvriers ont bien joué le jeu.
53

Terrassement et fondations

Bien que le sous-sol de notre maison soit rocheux, le terrassement


n’a posé aucun problème et n’a pas nécessité l’usage d’explosifs.
Les moyens traditionnels ont suffi, même pour des profondeurs
allant jusqu’à 6 m pour la maison et 8 m pour les garages.
L’arrière du terrassement, toutefois, exigeait une consolidation
du terrain. En effet, le clivage des roches accuse une pente vers la
maison, d’où un risque de glissement.
Au départ, nous ne voulions pas recourir au béton armé,
matériau décidément trop difficile à recycler (alors que l’emploi de
béton ou de ciment sans fer ne nous gênait pas). Malgré nos
réticences, nous avons cependant dû nous résoudre à effectuer, à cet
endroit, un gunitage (la technique du gunitage consiste à forer des
trous de plusieurs mètres de profondeur, à y introduire des broches
métalliques, à les sceller puis à pulvériser du béton sur la face
exposée. Grâce à cela, tout reste en place).
Les matériaux rocheux extraits lors du terrassement, des pierres Photos des pages suivantes :
de bonne taille et de bonne qualité, ont été en bonne partie (gauche :) gunitage de la paroi
conservés afin de pouvoir servir, par la suite, à construire les murs arrière et des fondations.
d’aménagement extérieurs ainsi que le mur de fond protégeant (droite :) les murs sont constitués
l’arrière de la maison. Nous avons ainsi évité une grosse évacuation des pierres récupérées lors du
de matériaux – et avions une matière première à disposition. terrassement.
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Fondations et travaux annexes.

A gauche et en bas : les trois cuves


de décantation et de dégraissage
(dans ce qui sera la grande serre).
57

Le rez-de-chaussée.
58

Des couches de gravier de plus en


plus fin sont disposées entre les
murets de fondation.

La technique du gunitage a également, faute d’alternatives


valables, été employée pour une (petite) partie des fondations.
(Rappelons les deux fonctions essentielles des fondations : soutenir
la maison pour éviter qu’elle ne s’affaisse et empêcher
l’arrachement qui peut se produire sous l’effet de forces latérales
induites, par exemple, par des vents violents).
Au départ, ne pas recourir au béton armé posait un problème
à l’ingénieur. La solution qu’il nous a proposée : effectuer des
fouilles larges et profondes et poser des armatures en chêne noyées
dans le béton (du béton armé de bois, en quelques sortes). Cette
solution ne nous plaisait cependant qu’à moitié, le creusement de
fouilles étant susceptible de démolir le sous-sol rocheux, solide et
stable. Comme nous venions de terminer le gunitage du
terrassement arrière, Olivier a eu une idée : « Pourquoi ne pas poser
59

La dernière couche de gravier est


étalée et soigneusement nivelée en
prévision de la pose d’une mince
couche de ciment.

des fondations légères en béton – non armé – sur le rocher et les


compléter par un système d’ancrage, comme cela a été fait pour le
terrassement arrière ? » Il s’est trouvé que cette solution non
seulement était bonne mais aussi nettement moins chère et moins
agressive. De plus, seules les fondations de la cage d’escalier
nécessitaient des ancrages. Finalement, dix broches ont suffi.
Des travaux de sous-sol ont accompagné la réalisation des
fondations : pose de canalisations d’évacuation des eaux usées, de
cuves de décantation et de dégraissage en ciment, de diverses
conduites, de drainages ainsi que de graviers de La Sarraz (Vaud).
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Toilettes à compost

Il était très difficile, au début, étant donné le peu de publications


dont nous disposions et de réalisations effectuées jusqu’ici dans
le domaine des toilettes à compostage, de définir puis d’adopter
le bon système. Grâce aux judicieux conseils de notre ami Pierre
Lehmann, l’un des rares experts en la matière, nous avons pu
faire les choix appropriés.
Notre installation, inspirée de modèles nordiques, a été réalisée
par une petite entreprise vaudoise de thermoplastiques, déjà au
bénéfice de quelque expérience (cabanes de montagne, etc.).

Description
La cuve principale, située au rez-de-chaussée, accueille les
matières des deux toilettes (qui se trouvent, l’une, au premier étage,
l’autre, au second) ainsi que les divers déchets organiques de la
maison (épluchures, fleurs fanées, etc.). Ces derniers passent
d’abord par le broyeur, qui les réduit en petits morceaux (plus
rapidement compostables).
Les conduites sont verticales, lisses et larges, ce qui permet
d’éviter les dépôts et les éventuelles obstructions.
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Les sièges des toilettes, qui comprennent lunette et couvercle,


sont presque identiques à ceux des WC conventionnels.

Fonctionnement
Le compostage est une transformation naturelle aérobique.
La cuve est couplée à la ventilation de la maison (un apport
d’air est en effet indispensable au bon déroulement du processus
de compostage.) L’air, et, du coup, les odeurs indésirables sont
aspirés dans les conduites (au niveau des sièges), et ce, en
permanence. Ainsi, quel que soit le nombre d’utilisateurs, et même
si le lieu est très sollicité dans un temps réduit, il n’y a jamais
d’odeurs dans le local. Il s’agit là d’un avantage considérable au
regard des systèmes classiques. (Signalons que la ventilation du
compost s’effectue aussi à l’avant de la cuve, qui est munie de
deux entrées d’air complémentaires.)
Dans la cuve, les déchets s’accumulent sur un plan incliné ; les
liquides s’écoulent vers l’avant et rejoignent, par un trop-plein,
les eaux usées. Il reste toujours un peu de liquide (environ 1 cm) Toilettes, descente et broyeur.
au fond du bac, ce qui garantit l’humidité nécessaire au Cuve de compostage avec
compostage. descentes des premier et
Deux des parois internes sont reliées par des profilés en forme deuxième étages et du broyeur.
de V inversé qui assurent l’aération, à travers le tas de matière, et
permettent d’éviter une obstruction (il n’y a donc pas besoin de
brassage). Sur la paroi avant, deux plaques démontables
permettent l’évacuation du compost.
128

Très efficace, ce système permet la transformation des « matières


premières » en compost en un mois environ, un délai relativement
court.
Comme la cuve est grande, deux à trois vidanges annuelles
suffisent. Il s’agit alors de repousser au fond de la cuve les déchets
récents et d’extraire, par-devant et par-dessous, la moitié, environ,
du compost (la moitié restante permet au processus de compostage
de se poursuivre).
Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, cette opération
n’occasionne le dégagement d’aucune odeur ; le substrat extrait
fleure même bon le terreau de forêt ! Il se présente en mottes
humides , que l’on sèche ensuite au soleil, sur une bâche disposée
à l’extérieur, avant de les passer dans un broyeur de jardin. On
obtient alors une matière légère, fine et fluide : un engrais idéal
pour les fleurs, les petits fruits et les légumes.
Signalons encore que l’apport de bois, sous forme de gros
copeaux (que l’on jette dans la cuve, par poignée, à chaque
introduction de matière solide dans les toilettes), est indispensable.
Cet additif permet, en effet, de rétablir un équilibre carbone-azote .
Vidange du compost. Il a aussi un rôle structurant puisqu’il ménage, parmi les déchets,
des espaces propices à une bonne circulation de l’air.
Le papier-toilette se dégrade sans autre.
129

Entretien
L’entretien comprend :
– le nettoyage régulier des «cuvettes» des toilettes, avec un balai
mouillé, comme on le fait pour des toilettes ordinaires ;
– la vidange de la cuve (2 h / 2-3x/an) ;
– le séchage du compost (1 h / 2-3x/an) ;
– le broyage du compost (1 h / 2-3x/an) ;
Il demande donc, en tout et en moyenne, une dizaine d’heures
de travail par an.

Bilan
Le résultat est impressionnant et a dépassé toutes nos espérances:
– aucun emploi d’eau potable ;
– pas besoin de station d’épuration ;
– obtention d’un compost de qualité ;
– absence totale d’odeurs ;
– production de chaleur lorsque le compost « travaille » bien (la
ventilation de notre installation récupère cette chaleur, qui
contribue donc au chauffage, modestement il est vrai, mais
cela confirme la cohérence du système).
Pour bien des gens, vivre « écolo » signifie « revenir au Moyen
Âge ». Nombreux et erronés sont les préjugés de notre société. Le
fonctionnement extrêmement satisfaisant de nos toilettes à
compost montre à l’évidence que ceux qui vivent au « Moyen Âge »
ne sont pas ceux que l’on croit…
130

Un seul (petit) problème n’a pas trouvé sa solution. Nous avons


observé, surtout au cours des deux dernières années, la présence de
moucherons pendant les périodes chaudes. À ce jour, nos diverses
tentatives visant à éliminer cette manifestation inopportune n’ont
abouti qu’en partie. Mais nous allons certainement découvrir, d’ici
peu, le moyen de remédier à la situation; ce n’est qu’une question
d’expérience à acquérir.
Mentionnons encore que nous prévoyons, à l’avenir, de stériliser
le compost (en faisant monter sa température à 70° à l’aide d’un
capteur solaire ad hoc), ce qui permettra de neutraliser les graines
indésirables qui y restent logées. Saviez-vous, en effet, que lorsque
nous mangeons des tomates, par exemple, les graines résistent à nos
sucs gastriques et qu’on les retrouve intactes (et «actives»!) «à la
sortie», soit, en ce qui nous concerne, dans le compost?
139

Serres

Une serre est une sorte de « capteur solaire habitable ». C’est aussi
un bel espace de transition entre l’extérieur et l’intérieur. Il y règne
un climat privilégié.
Nos serres sont encastrées dans la maison, ce qui permet de
minimiser les déperditions thermiques. Des parois vitrées les séparent
de l’habitat. Nous bénéficions ainsi d’un bel éclairage naturel, de
gains solaires directs à l’intérieur, et d’une large visibilité sur le
magnifique paysage environnant. Tous les vitrages sont doubles et
isolants. Il s’agit de portes-fenêtres, de plain-pied, et, en hauteur,
d’éléments fixes ou de panneaux mobiles (permettant une évacuation
de chaleur en cas de surchauffe). Les poutraisons et les huisseries
extérieures, choisies en fonction des conditions climatiques parfois
rudes qui caractérisent notre région, sont en chêne.
Les sols sont en pleine terre, une option qui facilite la culture et
l’arrosage tout en favorisant l’inertie thermique. Des revêtements à
sec (dallages, caillebotis, gravier,…) nous laissent toute liberté
d’agencer à notre guise plates-bandes, passages et petits coins de
repos. Dans la grande serre, une fontaine en circuit fermé fait la joie
des plantes comme la nôtre. Deux panneaux photovoltaïques ad
hoc alimentent la pompe nécessaire à son fonctionnement.
140

On qualifie de « solaire passif »


les apports de chaleur procurés
par une serre et véhiculés par
thermocirculation naturelle. Nous
conservons ce qualificatif pour
notre serre, même si le recours
auxiliaire à des ventilateurs
correspond plutôt à un système
« actif ».
141
142

Fonctionnement hivernal de la grande serre


Au rez-de-chaussée, les vitrages extérieurs de la grande serre
sont verticaux ; au premier étage, ils présentent une inclinaison de
60°. La serre jouit ainsi d’une bonne réceptivité solaire en hiver.
Par beau temps, elle génère et emmagasine de l’air chaud qui,
grâce au principe naturel de thermocirculation, est acheminé dans
toutes les pièces de la maison. Il nous suffit d’ouvrir les portes, les
portes-fenêtres ou les clapets prévus à cet effet (au deuxième étage),
ainsi que les portes qui donnent sur la cage d’escalier pour assurer
le retour de cette circulation d’air.
En notre absence, deux ventilateurs transfèrent la chaleur dans
la cuisine d’où l’air chaud migre de lui-même dans le reste de
143

l’habitat, par les portes laissées ouvertes. Un thermostat situé dans


la serre, réglé à 20° environ, commande les ventilateurs.
Il va de soi qu’en hiver, les portes-fenêtres extérieures restent
toujours fermées et que nous n’ouvrons vitrages et clapets intérieurs
que lorsqu’il est possible de profiter des apports d’air chaud.
Rappelons aussi qu’une serre ne devrait pas être chauffée. Si
c’est le cas, de productrice d’énergie, elle devient grosse Les serres jouissent d’un climat
consommatrice . Lors d’occasions spéciales (fêtes, soirées…), on privilégié. Ainsi, notre bougainvillée
peut éventuellement l’ouvrir sur le reste de la maison, pour rose (de six mètres de haut) fleurit
bénéficier de plus d’espace, mais cela doit rester exceptionnel. dix mois sur douze, et notre
plumbago, de l’été jusqu’à Noël ;
Fonctionnement hivernal de la petite serre nos géraniums et nos hibiscus
La petite serre située à l’ouest fonctionne plus simplement mais restent en fleurs toute l’année. Il
obéit aux mêmes principes que la grande. Elle ne donne que dans nous est même arrivé de cueillir
la cuisine et ne dispose pas de ventilateurs, ses gains solaires étant des tomates au mois de mars.
plus limités.
Ci-dessous : clapet de serre au
Fonctionnement estival des deux serres deuxième étage.
En été, lorsqu’il s’agit de conserver la fraîcheur de la maison,
nous fermons tous les vitrages et les clapets intérieurs et ouvrons
les portes-fenêtres extérieures.
Quelques précautions supplémentaires ont été prises, par ailleurs,
afin qu’il n’y ait pas de surchauffe en été:
– un réseau de câbles, à l’extérieur, supporte et conduit des
plantes grimpantes à feuilles caduques, des kiwis, des
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clématites et de la vigne. La nature régule ainsi les apports du


soleil et nous offre, de surcroît, fleurs et fruits en abondance ;
– des rideaux intérieurs peuvent couvrir, au besoin, les vitrages
supérieurs (fixes) ;
– des ouvrants automatiques, disposés au sommet des serres et
au-dessous des capteurs photovoltaïques, assurent l’évacuation
des excédents d’air chaud (lorsque la température est trop
Page de droite, en bas à gauche : élevée, un fluide contenu dans un tube se dilate et pousse un
entrées d’air chaud et ouvrants de piston qui actionne les ouvertures). Ce dispositif simple et
la grande serre, au deuxième fiable – que l’on trouve fréquemment dans les serres
étage. horticoles – convient en tous points à ce type d’espace.
Ces précautions élémentaires sont indispensables, faute de quoi
Ci-dessous : l’échelle mobile facilite les serres peuvent devenir de véritables étuves, comme nous avons
le soin des plantes et les pu nous en rendre compte en d’autres lieux.
nettoyages.
Entretien
L’entretien de nos serres se limite à celui des huisseries en chêne
(un traitement à l’huile de lin, tous les 3-4 ans, suffit amplement),
ainsi qu’aux soins habituels de jardinage pour les plantes
intérieures et extérieures. A l’automne, nous profitons de la chute
des feuilles pour nettoyer les vitrages extérieurs. Plantes et fruits
engendrent en effet des salissures, comme les quelques oiseaux de
passage, vraisemblablement charmés par l’endroit !
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Bilan
Nos serres présentent un bilan très positif. Le chauffage « solaire
passif » est en effet beaucoup plus important et déterminant que
nous ne l’avions imaginé au départ (il couvre environ 40 % de
nos besoins en chauffage) et le système est très fiable.
Il est par ailleurs bien agréable, lors de jours d’hiver ensoleillés,
de ne pas avoir à chauffer au bois. Quant aux fleurs et aux fruits
hivernaux, ils constituent un enchantement perpétuel ! Nous
apprécions beaucoup, à cette saison, lorsque le soleil est au rendez-
vous, de prendre notre café ou de lire un bouquin confortablement
installés dans la serre alors que la neige recouvre encore le paysage !
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