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_ ee MIERIQUE : A C| Als oct-dec. 1982 li ap il PROLETARISATION DES FAMILLES UN CAS SINGULIER: LA GUYAN¢ HISTOIRE ET SENS D’UNE NATIONALISATION BANCAIRE qu leticamecanz4ay ments ae a4 rg ie 2 10438 frag LATINE ET LE TIERS MONDE AIVIERIQUE LATINE n 12 oct.- dec. 1982 Editorial : / 1d, une fe brise de La Guyane : un département frangais comme les autres ? Prolétarisation familiale en République Dominicaine A inche T Les enjeux de la politique énergétique brésilienne. Le Plan National Alcool DOSSIER : Cultures cachées : fragments La vie quotidienne en régime autoritaire Memoires de nuit et brouillard Problémes et perspectives de l'indianité péruvienne le point de vue d'un témoin privilégié, José Maria Arguedas La trace des Indiens d’Amazonie dans la littérature brésilienne Le concert baroque de la musique latino américaine Dix raisons pour aimer ou détester le cinéma mexicain et pour exclure toute différence Des troubles de I’identité chez les exilés ? Ana Vasqui Le Conférencier (conte) Rail Bernal Meza Poames: Felipe Navarrc La crise économique au Mexique José Manuel Quijano Relire Haya de la Torre, De l'identité culturelle a Videntité politique Hugo Neira Notes bibliographiques Argentine, Vendettement du Tirs monde, La politique des USA Nouvelles recherches sur I'indianité ioe Bibliographie ? coawae incase iets 39F. 90 01 97 105 109 DES TROUBLES DE L'IDENTITE CHEZ LES EXILES ? ‘Ana VASQUEZ” «Je perds mon identité », « on m'a demandé «qu latino-américains 5 risque qui les menace tas et je n'ai pas su répondre... », les exilés uiétent, se plaignent souvent de ne plus se sentir « eux-mémes », ils parlent du ls seraient en train de perdre leur identité nationale, les enfants d'alleurs nt déj& commencé ce processus, surtout les petits qui ne parleraient méme plus le castillan.. Peut-on perdre effectivement son identité ? Existetil une identité nationale permettant de dis- ‘tingver, par exemple, les Argentins des Uruguayens ? Y a-til une identité culturelle chilienne qu'on ourrait « perdre » aprés plusieurs années d'exil ? Dans cet article, je me propose de présenter d’abord une synthése des caractéristiques attribuées & Fidentité individuelle et culturelle, pour analyser ensuite I’Acculturation-Transculturation, proces- ‘sus qui s@ trouve en amont des troubles de lidentité culturele. Je finirai enfin par une présentation e la situation des exilés du Cone Sud d’Amérique latine en ce qui concerne ces problémes. identité (Changement et unité : Erikson, dans les années 80, dans Adolescence at crise. La quéte de l'identité, a proposé le concept d'identité pour expliquer les conflits qu'il retrouvait aussi bien chez les adolescents qu’en ‘étudiant les problémes de certains de ses patients d'origine indienne, ‘Trente ans aprés, lors du colloque sur ce théme (Toulouse 79) on constate, au-deld de la diversité des travaux présentés, que les orientations générales envisagées par Erikson restent toujours valables. ILy a, en effet, un certain consensus pour considérer que 'identité personnelle est un systime de sentiments et de représentations de soi, « l'ensemble des caractristiques physiques, psychologiques, ‘morales, juridiques, sociales et culturelles & partir desqueles la personne peut se détinir se presenter, se connaitre et se faire connaitre, ou & partir desquelles autrui peut la définir, la situer ou la recon, naltre. Lidentité c'est ce par quoi lindividu se sent exister en tant que personine, dans tous ses lee ft toutes ses fonctions, se sent accepté et reconnu comme tel par autrul, par son groupe ou sa culture appartenance »! Le sentiment didentité s'élabore et se développe des la naissance, s'appuyant sur deux processus ‘en interaction 1. Le développement du moi, ou 1a mémoire joue un role essentiel en rendant possible le senti- d'unité de l'expérience. L’unité du moi se maintient méme si, crescent tt ater ie ear i are Bropeinviduitt comme int au ban cue sublet constant dans ft pouty 2 continu ere ce gus aint irc quis sont aujour hl et e in Tout en ressentant une unité dans s2 propre histoire, individu ssit qu'il est constamment en train de changer sur tous les plans. Quand ces modifications se produisent gradueliement, il peut es intégrer dans les représentations qu'il se fait de luieméme, mais certains changements importants OU soudsins risquent d'entrainer une désintégration de Image de soi. Cela peut se produire & certaines tapes dela vie oU cet changements sont plus évidents (adolescence, vieilissement), lors d'une modi fication profonde des réles (mariage, meterité), ou comme conséquence d'accidents ou mutilations aqui troublent image du corps propre. Il est possible que le refus de soi et tout spéeialement du corps) qu'on trouve chez certains anciens prisonniers qui ont subi des tortures particulgrement vio- lentes, pulsse s'expliquer dans ce contexte 2. Le développement de I'unité du moi reste cependant étroitement ié & ("influence d’autrui (famille, groupes ¢'appartenance, milieu social, culturell, si bien que le moi est également un reflet des autres. C'est ainsi que, tout en étant soiméme, ce qu’est un individu est indissociable des in- fluences de sa famille, des différents milieux sociaux od il a évolué, ainsi que de l'ensemble de normes at valeurs qui constituent sa culture? . Identité et différence : On retrouve également dans le processus d’élaboration de lidentité, deux mouvements contra dictoires dont Codet* souligne la relation dialectique : L’image de soi est en fait, selon Codol, une image sociale de s0i, si bien que, tout au long de sa vie, individu élabore et re-élabore son identité dans ses rapports ® son milieu social et culturel ; d'une certaine fagon, chaque individu se sent soli- daire, s‘identifie aux autres membres de sa culture et de sa classe sociale’. Mais tout en se sentant semblable & ses pairs, tout individu a le sentiment de sa différence et se percoit comme objet unique. Mais si le sentiment de la différence est essentiel & la prise de conscience de soi, il est inhérent & la vie sociale elle-méme, carla différence n'apparalt que par rapport aux autres. Crises et pathologie Le modelage social-culturel est tellement profond que, méme quand ‘individu affronte, au cours de s2 vie, des crises d’identité, la facon de réagir & ces crises et méme les comportements patholo- ques (les maladies) qui en résultent, se mettent en place d'une fagon qui est culturellement déter- minée*. C'est ainsi que des comportements d'agressivité ou des expressions de délire sont interprétés dans certains groupes socio-culturels comme les seules réponses valables 8 des situations de stress, tandis que dans d'autres sociétés ces comportements seraient considérés comme de Ia folie. Est-ce qu'un individu peut « perdre » son identité ? Les chercheurs (Devereux, Erikson) éta- blissent une distance entre les crises d‘identité que chaque individu peut retrouver dans le parcours dde #2 vie et des troubles de I'identité qui sont plus rares et atteignent le noyau du moi. Ces derniers impliquent une déstructuration des fonctions psychologiques et configurent des tableaux patholo- siques assez graves. Lidentité sociale-culturelle : Nous venons de dire que lidentité est & le fois personnel et sociale, elle se construit part confrontation de Videntique et de la diférence, dans une dynamique oi se confondentIidéal du moi ‘tes aspirations du groupe. Cheque individu est qui il est par rapport au regard des autres : la reconnaissance et la valori tion de son passé (ce qu'il a 6té ou ce qu'il a fait) ou de son avenir (ce qu'il deviendra par rapport aux ‘qusltés qu'on lui attribue) sont indispensables pour que la personne puisseelleméme se reconnattre eenimer, Dans det sociétés complexes, chaque individu peut sidentifer « & », et se différencier cides plusieurs groupes et models, de tele fagon qu'un individu n'a pas une seule identité sociale, mais une pluralité didentités’. En d'autres termes, chaque individu dispose de plusieurs groupes Je. nda Pat, Prva, 1980p. 29-82. esc. Une sproehecognitne du sertiment iden sénération, parti politique.) 1972, 272p. Del. et Niestié, Neuchatel, 1972. sebpertenance (« nous ») et d'exclusion (« eux ») qui peuvent dailleurs étre les mémes*, car ces identités se constituent et reconstituent selon les desis de Ju et les modifications du contexte Four illustrer ce qu'on vient de dire, on peut imaginer un jeune Argentin, fils d'exilé. Son identté Cente sents, es Atgentins », mais elie peut aussi étre « nous, les exilés », ou « nous, les fils Tearits » ce qui entrelne des groupes d'excluson, des « eux » différents. Selon les crconstances, son fener aut tre également definie comme « homme » (et le groupe dexclusion est « elles », les {Gunes comme « iycéen », « habitat d'un quartir»,« tranger », ete. Ces idetités possibles ont oie UP aspect commun, individu qui les fat sienes les valoise ou valoise certains de leurs attrbuts De cette facon, méme en ne quittant jamais son pays, ce jeune Argentin de exemple se rata Feral 8 Plusieurs groupes d'sppartenance et d‘exciusion il jouerait sur plusieurs identtés & Iinté- Tour clidemtités cutturelies plus larges. Mais, dans cette multiplicité et mobilité identités auxquelles gore che Un individu concret, peuton parler d'une identité nationale ? Peut-on dire que ce jeune Sargon a une identité d’Argentin ? On ne Peut pas oublier, d’une part, que le concept de nation ne Se UPerBose as a celui de culture ;Videntité culturelle est & la fois plus large que Videntité natio Talent ute culture latinoaméricaine et une cuture du Céne Sud du continent) et plus restreinte {identité urbsine/paysanne, identites régionales : les Andes, la Pampa, etc). Lidée d'une identiténa- Tenals, Saute part, 2 &18 historiquement empioyée par des dictatures (Touraine, 80) comme une feson d'effacer des contradictions de classe, ou avec le but de réunir la population autour d'un pro: ‘framme ou d'un chet. L’identité nationale est un concept chargé d'implicites idéologiques dont, nous le verrons, les exilés eux-mémes se méfient. Pourtant, on retrouve des exilés & parler de leur identité nationale, & se plaindre de ne plus se ‘sentir Chiliens ou Uruguayens, et on retrouve également ce sentiment de manque, de dépossession ‘chez les travailleurs immigrés, et tout spécialement chez les jeunes dits de la « deuxiéme génération » Gertains spécialistes tendent & considérer qu'on retrouve des problémes chez les groupes et personnes éplacts qu'on peut expliquer par une « perte » de Iidentité nationale. II apparait alors qu‘on ne per. Soit I'existence d'une éventuelle identité nationale que quand on ale sentiment de V'avoir « perdue ». Le processus sous-jacent, |'Acculturation ? \Certains chercheurs ont fait recours & la notion d’Accu/turation comme arriére-plan, cause des conflits et contexte oi ils se déroulent. Dans le cas des travailleurs immigrés, on expliquersit les di cultés quils éprouvent par I'écart entre la culture d'origine et celle du pays d'accueil, D'autres cher. ‘cheurs utilisent des indicateurs censés mesurer le « degré » dacculturation de ces individus, pour en @tabilir des rapports avec les troubles déja mentionnés En 1935, le Social Science Research Council détinit acculturation par « les phénoménes qui ré- sultent du contact direct et continu entre des groupes d‘individus de culture différente, avec des mo. difications uitéreures qui affectent les types culturels originaux des groupes impliqués >. D'apres Malinowski”, dans ce processus, des « désadaptations » seraient possible, résultant d' incompeth, Dilités » cutturelles. Selon cet auteur, Vobservation de la réalté cuturelle devrait sutfire au cherene ce engage dans I’étude de I'acculturation, Dans les années 60, les études sur acculturation ont recy un nouvel éan, mais elles se sont cen trées sur étude «autres populations. Plusiurs centres de recherches amricains ont commence & Grudier les mécanismes d‘adaptation mis en place par les migrants qui se rndaien, aux Eats Uric Le probléme que se possient alors les chercheurs état celui d'expliquer les processus de cha socioculturl avs bien chet les Indians que che les grands grouper immigrants alg nee Porto-ricains, mexicains, etc.) . S fasion Same his iat esac ae ones lors de | eitalemn seaman ae ee os are Sirens crete a on ers a 2 oa les implicites idéologiques d’un tel cadre explicatif. o Des travaux plus récents soulignent les limitations de ‘vont pas explicité les contraintes sociales, économiques et Alvidue « acoultrés», lew propre Ble anc» proces wer tee canvubrtantel 8 Veeapam lth Modalités de pere ou d'abandon de leurs codes de comportement consubstantiel 8 Facquisition de ceux du groupe culturel auquel, dans la plupart des cas, appartenait également le chercheur'? . De son cété, Jaulin discute 'emploi de certaines notions qui euraient une apparence sciantifique, mais qui introduisent des jugements de valur, car cest le chercheur qui dé ai ange catterel altuation comme Iacquistion d'une certane culture, tle processus corrlatit change culturel, implicite dans la définition de la Social Science Research Council, n’existersit pas ou ne ferait pas Vobjet d'études!" De nombreux travaux critiquent d'alleurs cette conception aseptisée de I'acculturation ; pour ceux, les phénoménes qui entrainent ‘acculturation se trouvent en amont. Ce serait, en effet, un pro- cessus d'expansion industrielle dans d'autres organisations économiques, notamment rurales, qui Uéclenche Vacculturation. Varese notamment, pense qu’une importante tendance de |'anthropologie 2 contribué a la formation d'une fausse image du processus d‘acculturation des populations indigenes, mettant surtout 'aecent sur les aspects culturels du processus et en passant sous silence ou en négli geant le fait qu'en aucun cas larrachement & (‘organisation et @ la culture traditionnelles n'a conduit 8 Finclusion de ces populations dans les classes ou segments de classes qui contrdlent le pouvoir éco: omique ou politique de la nouvelle culture od ils accédent, pour affirmer que « assimilation, incor- poration, intégration des sociétés indigenes a la société nationale signifient uniquement, dans nos pays, prolétarisation » interaction des rapports de pouvoir avec les classes sociales est, selon ces auteurs, un élément: clé dans explication des conflits que retrouvent les populations menes & s'c acculturer ». Cela fait que quand les groupes en question appartiennent aux classes ales, 'acculturation n'est méme pes envisagée ou apparait comme réussie, Ringon a étudié effet de Installation d’une minorite tran gaise 4 Tahiti"'. La minorité européenne ne semble pas adopter les codes culturels locaux, en fait elle n’éprouve pas le besoin de s'adapter & la majorité de la population, bien au contraire: les études de Guérin montrent comment leur installation & Tahiti a entrain la désintégration culturelie des au tochtones : le déetin de Vagriculture, la prolétarsation des paysans, un déséquilibre social et culture! crolssant'*. Si on envisage dautre part le processus qu‘ont subi les groupes d'immigrés européens instalés en Amérique du Sud, on voit dimportantes colonies étrangéres installées au Brésil et au Ve- nezuela, qui n’ont pas présenté des problémes ni des conflits d'acculturation, L’exemple le plus frap- pant est celui des immigrés d'origine portugaise : il y a plus de 800.000 immigrés portugeis en France'® constituant une des communautés immigrées qui éprouve le plus de difficulté d'« accultu- ration », leurs enfants ont un des plus grands taux déchec et de retard scolaire. En méme temps, et depuis les années 50, un important flux migratoire fait que la colonie portugaise est l'une des plus importantes communautés étrangéres au Venezuela (prés d'un million de personnes), elle controle te commerce alimentaire (gros et détail) et constitue un puissant groupe économique; les liens fami liaux et régionaux sous-tendent des comportements de soutien aux nouveeux venus : ces immigrés portugais ne semblent pas éprouver des difficult d's acculturation ». Pourtant, le groupe qui a émi: gré en France aussi bien que celui qui est allé sinstaller au Venezuela, sont tous les deux majorita rement d'origine paysanne, ils ont la méme méconneissance des codes culturels du pays d'accuei dans les deux cas ils doivent apprendre une langue étrangére. La seule différence est que le groupe qui fest en France se trouve dans une situation de dévalorsation, d'instabilité économique (et parfois légale = faux papiers, etc.) et de dévalorisation sociale, tendis que ceux qui sont au Venezuela ont un Certain pouvoir économique, peuvent imposer certaines tournures linguistiques et certains codes culturels; leur particularité culturelle est tolérée ou valorisée. Les uns ont des troubles de V'identité culturelle que les autres ne semblent pas avoir ; on peut bien penser que ce n’est pas Vdentité cultu- relle en soi mais une identité culturelle dévalorisée qui est a la source des troubles décrits par les cher- ee cent uals menue co ronan tenon eo ule ee can estar rh mr 8 car teu on este ‘vont pas été pergus (ou leur portée diminuée et leur sens dénaturé) : elle refléte la conception du pro- arpa paragon ene chm tan de cette notion et sur |'extension de son emploi & des probiématiques assez différentes. 10.P. MERCIER -« Anthropologie sociale » in Ethnol. Gén. Encyc. Pisiae, Gallimard, Pais, 1968, 11. JAULIN, De ethnocide. 1V Congrts Int. de la Fond. Fr. o'études norciques. Actes, Paris 1974, p. 66-67. 12.5. VARESE « Considérations c'anthropologle utopique » in Temps Modernes, vol. 29 n. 318, Paris 1972, p. 780-768. 13.€, RINGON ; « Une minorité européenne dans te Pacifique: Les Frangsis @ Tahiti » Sei, hum, Vol. 8,4, 1972, 9.41 14.0. GUERIN « Tahiti malade dela bombe » in Temps Maderes, vo. 29, n.318, Pris 1972, p, 786-811 15. Chitfres du Ministre ce F'inérieur. Cahiers Orstom. Série Le seul fait de désigner ce processus par ie mot « acculturation » témoigne deja de |ethnocen- ir premises, nai en esta 3 ame as 1¢ marque la direction ou le but & atteindr, signalant quil ait ¢'un process dont Yachiverant et Tacqustion ge cure dominant, au ev gare cole SeePee Cela sousentend que l'autre (culture) n’en est pas une. Ce n’est pas par hasard qu'on confons sowvant scculturation avec socialisation, car emploi du mot acculturation suppose I aequisition due ¢ sans tenr compte du fit que les indvius avaient dit socialists dans une culture autre, 2 Sea lorisation des cultures dorgine et de leur empreinte déforme la compréhension du process, Se Ya des itférencesessentilles etre acquéir une culture, processus développe par tout fre numain spécialement dans son enfance, et passer d'une culture 3 une autre, En fit, autour de ces nations Ges recherches qui les mettent en quvre 3 jue Une lutte idfolosique. La paeudo-cbictité des Dremidres notions es elleméme un instrument de cette lute il devient incispensabe e/a concer L’axe placé sur les conflits : la Transculturation Dans une recherche menée récemment, jai revu l'ensemble des publications des cix cerniéras ‘années (1972-1982, Fichier Francis du CNRS) en ethnologie et en sociologie concernant ce thine!” Sur les 853 publications recensées, prés de 50 % proposent une analyse centrée sur linteras classique de acculturation, telle qu'elle a été décrite plus haut, mais une proportion imo Pendant met en avant les aspects conffictuels, les rapports de domination et de pouvoir cations), 'ethnocide des populations autochtones. Sur la base de cette analyse de documents, et de mes propres recherches, i's! propose Is notion de Transcutturation définie comme les processus qui résultent du contlt décienché quand un groupe Cindividus établit/impose des rapports de pouvoir avec (sur) d'autres individus de culture (ou de sub culture) différente’” La Transculturation se déroule dans un contexte qui n'est nullement neutre mais conflicwwel et contient une dimension temporelle importante, en lui-méme et par rapport & histoire sociale glotale Les agents de la Transculturation analyse des documents montre importance de certaines institutions dans ce processus, dont institution religieuse qu'on ne fait que mentionner ici, parce qu'elle n’entre pas dans la probiéma- tique que nous voulons abordt (On trouve en revanche un certain consensus chez les chercheurs qui travaillent sur ce théme pour considérer que Vinstitution scolaire est un moyen privilégié de transmission de codes culturels. Plu sieurs auteurs analysent les dangers d'une institution scolaire calquée sur le modale de la culture do~ ‘ante, car le modelage scolaire ne tient pas compte des valeurs autochtones ou les sous-estime, de ‘elle facon que les enfants scolarisés doivent affronter une opposition entre les valeurs de l'écale et celles de leur environnement familialsocial. Les conflits culturels sont alors agrandis par Institution scolaire, provoquant une dichotomie entre deux modales. L’« acculturation » entamée par ("Seale rest pas neutre mais chargée d’un contenu idéologique™™. Dans la conservation de la culture autochtone, la langue d'origine joue un réle capital. Elle wast pas seulement un moyen de communication mais le substrat oU sinscrivent la culture at la mémeire Cesta-dive quelle est un des éléments structurants du groupe. Perissinotto montre comment les SSgonts chargés de la transculturation insistent sur la nécessité d'enseigner la langue de la culture do te pour accélérer le processus”. L’école apparait alors avec un dauble rdle, celui d'instrument Ge modelage des nouveaux codes de comportement et celui de moyen de transmission systématique de la langue. Les groupes en instance de transculturation pergoivent le poids de la langue dominante dans le processus qu'ls subissent, mais leur comportement est souvent ambigu. On ne peut pas cublier. "une part, quil sagit dindividus placés dans une situation de domination et d'exploitation économique 16. A. VASQUEZ : « Acculturation-Transculturation Une analyse critique» in Cultures, pub. privue, 9.3. 1983. 17 1aem, jap. TEISSERENC : « Miley urain et recherche dune sent culturale: Les Lychans de FortArchamoau Tere See rseh in Can EC Ate v0l 2,09, 1973, pe TSA. is = JRISSINOTTO : « La integracién Linguistica del incfgena . BS cee ace ‘34, n.4 1974, p. 95764, mexicano : Teorfa y prittice de la castilianice- (dans la plupart des cas), de telle tagon que, méme si 'acquisition de la langue éerangére ast cantlic: ‘weil, son appropriation est en méme temps ressentie comme un mayen esientie! pour scicier aut privilages qu'elle représente. Jinadu souligne que dans les pays qui ont récemment conquis aur ‘ dépendance, "usage de la langue coloniale reste un des principaux remparts de \a classe dominant autochtone™. | arrive souvent, d’autre part, que la langue d’origine n’est pas adactée & des échanges gconomiques ou techniques propres aux cultures hautement industrialisées. Simultanément, at dans ‘a mesure ol elles adoptent la langue du groupe dominant, ces populations ressantant une sere Berthelier a étudié les enfants et adolescents immigrés™. Selon cet auteur, ces jeunes éprouvent un conflit provogué par a situation de margialité ou is sont placés, ce qui les améne & sous-estimer fs modles culturels de leurs parents, Ils cherchent alors & adopter ies valeurs de la société francaise reprtseriée par \école, mais a culture du pays d'accueil implique également la ségrégation. Berthelier considare que ces jeunes peuvent alors présenter une cri didentité qui risque d'avoir des consé quences pour leur équilibre spychique. Dans une premitre étape, on trouve des manifestations dnsta Dilite psycho motrice, expression au niveau du corps des conflits que enfant est incapable d’exprimer verbalement, mals on peut trouver plus tard des réactions de type paranoide ou schizophréne analyse de Apfelbaum et Lubek montre comment ces troubles qui se présentent sous |'appa: rence d'une perte d'identité culturelle ne font que refléter le désarroi des individus qui ne se retrou: vent plus dans les traits assignés par la culture dominante. Du refus individuel au refus collectit, ‘ou le passage de la pathologie au politique Quand des individus isolés expriment leur malaise ou rejettent un processus imposé et dévalo- risant, leur comportement est considéré comme relevant de la pathologie, mais quand ces mémesin-

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