I) L’équation d’onde
1) Mise en évidence de l’équation d’onde
Pour mettre en évidence la structure mathématique du phénomène ondulatoire, nous allons étudier le
système constitué d’une chaîne infinie d’oscillateurs identiques composés de masses m et de ressorts
de raideurs K montés en série (Figure 1). Nous supposerons dans un premier temps que les masses ne
peuvent se mouvoir que dans la direction longitudinale. Nous supposerons également que les
longueurs d’ondes des vibrations sont “grandes” par rapport à l’espacement moyen entre les masses.
En notant a la longueur naturelle de chaque ressort à l’équilibre, et Xn l’écart de la masse numéro n par
rapport à sa position d’équilibre, on peut établir l’équation du mouvement de la masse numéro n qui
interagit uniquement avec les premiers proches voisins :
On constate que l’équation du mouvement pour la masse n implique la position de la masse n à travers
la fonction et sa dérivée seconde . Cependant, cette équation différentielle contient
aussi une dépendance par rapport aux positions des masse voisines à travers les fonctions et
. Les équations différentielles régissant l’évolution des masses sont donc
couplées. Il est donc nécessaire de découpler ces équations.
Adoptons à présent les notations indiquées sur la Figure 2 :
La fonction X est désormais une fonction continue dépendant des deux variables x et t, et nous
l’échantillonnons aux positions x-a et x+a et à l’instant t. On prendra donc garde à remplacer les
dérivées simples par rapport au temps t par des dérivées partielles.
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On a supposé que a est “petit”, ce qui permet d’effectuer les développements limités suivants:
Grâce à ces développements limités, on est maintenant capable de relier les positions des masses
voisines à travers une unique fonction X :
Avec
Cette équation aux dérivées partielles est l’équation d’onde ou équation de d’Alembert. Cette équation
relie la dérivée seconde par rapport au temps (t) et la dérivée seconde par rapport à la variable
d’espace (x). Le fait que la fonction X (position d’une masse située en x au cours du temps t) vérifie
cette équation signifie que X possède une structure d’onde. En d’autres termes, la perturbation X se
propagere dans l’espace au cours du temps, et varie en fonction du temps en tout point fixe de
l’espace. Il en va de même pour la force, la vitesse, l’accélération : toutes ces fonctions, qui sont
reliées à X ou à ses dérivées, ont une structure d’onde. Le paramètre c est homogène à une vitesse :
c’est la célérité de l’onde. En rappelant que est la pulsation propre de l’oscillateur
élémentaire, on trouve que .
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2) Ordres de grandeurs :
On peut évaluer l’ordre de grandeur de la célérité des ondes dans le modèle de la chaîne d’atomes et la
comparer avec l’ordre de grandeur de la célérité des ondes sonores dans les solides qui vaut
typiquement quelques milliers de mètres par seconde.
Pour estimer la raideur K, on suppose que l’ordre de grandeur de l’énergie de liaison par atome est
l’eV donc de l’ordre de 10-19 J et que cette énergie est de la forme élastique où
. On trouve . Avec , on obtient :
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où est la position courante de la masse numéro n le long de l’axe (Ox). Si l’on note sa position
d’équilibre, on a : En d’autres termes, est une perturbation de la position .
Puisque ; on a : , et :
On en déduit :
D’où :
Cette manipulation a permis de modifier l’équation décrivant l’OPPH (équation (**)) de telle sorte que
celle-ci ne dépend plus de la variable continue x mais plutôt de la variable discrète na. Cela équivaut à
considérer que la fonction continue décrite dans l’équation (**) doit être échantillonnée tous les
xn = na afin de trouver la position courante de la masse numéro n par rapport à sa position d’équilibre.
La conséquence immédiate de cette manipulation, qui découle de la nature discrète du système, est que
les longueurs d’ondes inférieures à l’espacement a entre deux masses successives (hautes fréquences)
seront trop petites pour pouvoir être décrites par le système, et ne pourront être distinguées de
longueurs d’ondes beaucoup plus grandes que a, de plus basses fréquences (Figure 3).
Cette dernière équation relie (au carré près) le vecteur d’onde k et la pulsation Elle permet d’aboutir
à la relation de dispersion :
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Dans ces conditions, la propagation sans absorption d’une onde pour k réel n’est possible que si
. Le système présente donc un comportement de type passe-bas : les oscillations dont la
pulsation excède la pulsation propre de l’oscillateur élémentaire ne peuvent pas se propager au sein du
système sous la forme d’une onde. Cette propriété découle directement du comportement passe-bas de
l’oscillateur élémentaire.
Par ailleurs, on constate que, du fait de la périodicité en au sein de la relation de dispersion :
Pour
Par conséquent, pour toute onde produite par un valeur quelconque de k’, il est possible de retrouver
un mouvement relatif identique des masses les unes par rapport aux autres pour un unique k dans
l’intervalle . Cet intervalle est appelé la première zone de Brillouin. Il suffit de restreindre
l’étude des fonctions (k) ou à cette intervalle de valeurs de k pour décrire complètement le
comportement de la chaîne d’oscillateurs pour tout type d’oscillations.
La propagation peut donc être entièrement décrite par des valeurs de k comprises dans l'intervalle
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Pour de faibles valeurs de k, ces deux pentes ont une même limite . Dans cette zone,
correspondant à des longueurs d'onde grandes devant a, la dispersion est négligeable et
et sont confondus.
Lorsque, au contraire, k s'approche de π/a, limite de la zone de Brillouin, la vitesse de phase diminue
et la vitesse de groupe tend vers zéro. Pour k=π/a, ce qui correspond à une longueur d'onde de 2a,
deux éléments voisins vibrent en opposition de phase et l'onde devient une onde stationnaire.
De la relation précédente, on déduit la vitesse de phase :
On constate que la vitesse de phase n’est pas constante, mais dépend de , ce qui implique un
comportement dispersif du système : les ondes de différentes fréquences se propagent à des vitesses
distinctes.
La vitesse de groupe est donc bornée entre 0 et . Pour la vitesse de groupe varie
en fonction de : le régime est dispersif.
, résultat que nous avions déjà obtenu plus haut (régime non dispersif). Ce régime correspond
au comportement de la chaîne d’oscillateur lorsque celle-ci est traversée par une onde de très grande
longueur d’onde. L’onde “perçoit” la chaîne comme un milieu continu, et ne distingue pas les masses
les unes des autres. Le mode de vibration correspondant au passage d’une onde longitudinale pour
est une vibration acoustique. Puisque , on a :
En d’autres termes, ce passage à la limite indique que tous les éléments de la chaîne vibrent de
manière identique (en phase et dans le même sens), ce qui se traduit par une translation globale de la
chaîne.
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Puisque possède une structure d’OPPH, on peut relier sa drivée spatiale et sa dérivée
temporelle :
Avec
Si l’on considère un paquet d’ondes constitué de trois ondes de pulsations voisines initialement en
phase à une date t, on constatera au bout d’un temps t que (1) le paquet d’onde se sera élargi, et (2)
qu’il se sera propagé à une vitesse inférieure à la vitesse de sa composante la plus rapide (Figure 10).
Dès lors, puisque dépend de , on peut se poser la question suivante : quelle est la vitesse de
propagation “apparente” d’une paire d’ondes constituée de deux ondes de pulsations voisines ? Cette
question est particulièrement importante car en pratique il est très difficile de produire une onde
parfaitement monochromatique, c’est à dire contenant une fréquence absolument unique : les ondes
“réelles” se présentent souvent comme la superposition d’une série d’ondes de pulsations proches de
la pulsation de référence . On peut par exemple considérer que les pulsations sont continûment
réparties dans un petit intervalle de pulsations centré sur et de largeur ; autrement dit :
Pour deux ondes de même amplitude A0, de vecteurs d’ondes et voisins, de pulsations et
voisines et de même phase (nulle) à l’origine, l’onde résultante s’écrit :
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Recherchons les solutions pour lesquelles tous les éléments vibrent à une même fréquence :
xN+1=0 impose k(N +1)a = pπ avec p entier, ce qui détermine la valeur de k et du même coup la
fréquence, liée à k par la courbe de dispersion :
On trouve donc une série de modes propres caractérisés par un vecteur d'onde kp et une fréquence
propre
tels que :
étant une constante complexe quelconque qui caractérise la phase et l'amplitude. On constate sur
l'équation que le changement simultané de p en p' = -p et en
donne exactement le même mouvement. On peut donc restreindre l'étude aux valeurs de kp positives.
Les valeurs de kp étant par ailleurs limitées par la zone de Brillouin, p peut prendre N valeurs
distinctes 1..N (les valeurs 0 et N+1 donnant ). Il y a donc N modes propres distincts.
Le mouvement le plus général d'un élément quelconque n peut s'exprimer comme une combinaison
linéaire des mouvements correspondants à tous les modes propres :
Remarque : Les conditions aux limites déterminent N points régulièrement espacés sur la courbe de
dispersion, points à partir desquels on peut reconstruire par interpolation la courbe de dispersion de la
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chaîne infinie. L'étude d'un système avec un nombre fini d'éléments permet donc d'avoir des
informations sur le système infini, ce qui est beaucoup utilisé en calculs de simulation numérique.
5) Module d’Young
La propagation de l’onde dans un solide correspond à la propagation d’un allongement sous l’effet
d’une force exercée sur une section du solide.
La modélisation du milieu permet d’écrire, pour la zone de déformation élastique du milieu :
On nomme module d’Young E, exprimé en Pascal (Pa) la caractéristique du solide telle que, dans sa
Cas d’un réseau cubique simple : Considérons ce réseau soumis à une pression constante.
On considère une section S sur laquelle on exerce une force F.
Pour le réseau cubique de paramètre de maille a, la surface S contient atomes. On exerce
donc sur chaque atome une force :
D’autre part, l’allongement total de la chaine de ressort peut être relié à l’allongement de chaque
ressort : avec , ce qui donne :
Célérité de l’onde dans le solide : On peut alors regrouper les deux relations
Or pour la maille cubique simple, on a un atome par maille, donc pour une maille. On en déduit la
masse volumique pour la maille, et donc pour le milieu :
Célérité dans un solide : La célérité de l’onde dans le solide de masse volumique et de module