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Module 4 - Génétique –Santé & bien-être

Bien-être des volailles (chair et ponte)

1- Pourquoi s’intéresser au bien-être animal ?

1-1 Qu’est-ce que c’est concrètement ?


A ce jour, 5 grands principes permettent de définir le bien-être animal et servent de références
mondiales. Le bien-être animal se définit par des animaux qui ne doivent pas souffrir de faim
ou de soif prolongées ; qui doivent être élevés dans un environnement adapté avec des abris
et des zones de repos confortables ; être en bonne santé ; avoir la possibilité d’exprimer leurs
comportements naturels ; et être élevés dans des conditions non stressantes. Le principe lié
à la santé sera traité dans le module relatif à la santé des animaux.

1 - Ne pas souffrir
de faim et de soif

5 - Être protégé de
2 - Ne pas souffrir
la peur et de la
5 grands d'inconfort
détresse
principes
du bien-
être animal

4 - Avoir la liberté 3 - Être indemne de


d'exprimer des douleurs, de
comportements blessures et de
naturels maladies

Figure 1 - Les 5 grands principes du bien-être animal

1-2 Le bien-être animal : une préoccupation sociétale qui prend de l’importance


Depuis les années 90, le bien-être animal est de plus en plus au cœur des préoccupations
sociétales. Les médias, les associations de défense animale et les avancées en termes de
recherches scientifiques ont poussé les citoyens à se poser de nouvelles questions : comment
sont élevés les poulets ? dans quelles conditions sont produits les œufs que j’achète au
supermarché ? …
Tout ceci a engendré, entre autres, une évolution des achats. Si on prend l’exemple des œufs,
la diversité des systèmes de production offre aux consommateurs un choix relativement large.
C’est ainsi qu’en 2016, les ventes d’œufs produits en cages ont diminué de 7% en France.
L’offre en effet évolue. Les ventes d’œufs produits en plein air et biologiques ont augmenté de
9 et 13%. Plusieurs enseignes de la grande distribution et de l’industrie agro-alimentaire, pour
des raisons d’image et de communication positive, cessent de commercialiser les œufs
produits en cages, et ce à plus ou moins courte échéance.
Les éleveurs, qui veillent au bien-être de leurs animaux au quotidien, doivent donc s’adapter
à ces évolutions.

Cette préoccupation sociétale s’est légitimement accompagnée d’une évolution de la


réglementation en vigueur.

1-3 Des textes réglementaires pour protéger les volailles


Au niveau mondial, les volailles sont protégées par des textes élaborés par l’organisation
mondiale de la santé animale (OIE) et repris dans la normalisation internationale (ISO). A
l’échelle Européenne, tous les pays sont soumis aux mêmes textes de lois qui sont ensuite
transcrits en droit national par chaque pays.

Pour élever des poules pondeuses, les éleveurs sont tenus de respecter un arrêté publié le 1er
février 2002 et qui vise à assurer aux poules un niveau minimum de bien-être.
Depuis l’application de ce texte, les poules élevées en cages ont davantage d’espace et
bénéficient de certains aménagements inexistants jusqu’alors (perchoirs et grattoirs
notamment). Ceci assure une meilleure prise en compte de leur bien-être puisque les nids
permettent aux poules de pondre dans un espace spécifique, aspect primordial pour ces
dernières.

Les éleveurs de poulets de chair doivent également respecter les dispositions fixées par un
arrêté paru le 28 juin 2010. Cet arrêté fixe par exemple l’obligation d’éteindre toutes les
lumières des bâtiments pendant au moins 6 heures par jour. Il limite également la densité des
animaux.
Par ailleurs, une formation et un certificat professionnel individuel d’éleveur de poulets de chair
sont exigés pour les professionnels titulaires de l’exploitation ou en charge directe du soin et
de l’entretien des poulets. Ce certificat justifie d’un niveau de connaissance relatif au bien-être
animal acquis lors de la formation.

Le respect du bien-être animal est donc une thématique qui prend de l’importance. Les textes
réglementaires s’attachent en ce sens à assurer un meilleur bien-être des volailles en
respectant au mieux les grands principes présentés précédemment.
En vue de s’assurer que les poules et poulets sont élevés dans de bonnes conditions, il semble
indispensable de pouvoir évaluer le bien-être de ces derniers. Mais comment est-ce possible
en pratique ?

2- Comment évaluer le bien-être animal en pratique ?

2-1 Contexte général


A ce jour, les textes réglementaires sont avant tout basés sur des obligations de moyens. Les
éleveurs doivent par exemple procurer aux animaux certains équipements et leur offrir une
surface de vie minimale.
Cependant, l’enjeu actuel est de développer des indicateurs de bien-être (ou de mal-être)
mesurables directement sur les animaux, afin d’évaluer le niveau réel de bien-être de ces
derniers, quelles que soient les conditions d’élevage. On pourrait par exemple chercher à
évaluer la prévalence de certains comportements (le toilettage par exemple) ou de certains
troubles sanitaires (les boiteries par exemple). Le développement de ce type d’indicateurs
pourrait contribuer à faire évoluer les textes européens et nationaux visant à protéger les
animaux, en les recentrant sur des obligations de résultats plutôt que sur des obligations de
moyens comme c’était le cas jusqu’à présent.

2-2 Concrètement, ça donne quoi ?


Plusieurs outils existent à ce jour afin d’évaluer le bien-être des volailles via l’observation, entre
autres, d’indicateurs directement mesurables sur l’animal.

2-2-1 L’outil européen Welfare Quality®


La méthode Welfare Quality® a ainsi été développée en 2009 dans le cadre d’un projet
européen pour évaluer, entre autres, le bien-être des poulets de chair et des poules
pondeuses.
Environ 30 indicateurs, pour la plupart directement mesurables sur les animaux, sont évalués.
Ces derniers sont regroupés au sein de 12 critères, eux-mêmes regroupés au sein de 4 grands
principes, qui reprennent la définition du bien-être présentée précédemment, et qui permettent
de classer les fermes dans diverses catégories : excellente, mauvaise, …

Cet outil, bien que validé scientifiquement, n’est que très peu utilisé à ce jour en raison de son
manque de praticité. Par exemple, 3 à 4 heures d’évaluation sont nécessaires en élevage
suivies de 1 à 2 heures en abattoir pour évaluer le bien-être des poulets en suivant cette
méthode, ce qui est trop long pour être réalisé en routine.

2-2-2 L’outil européen AWIN


La méthode AWIN a quant à elle été développée en 2015 dans le cadre d’un projet européen
et se base sur les travaux menés précédemment. Un protocole d’évaluation est disponible à
ce jour pour les élevages de dindes et de poulets de chair.
A la différence de l’outil développé dans le cadre du projet Welfare Quality®, l’outil AWIN est
focalisé sur des indicateurs en lien avec la douleur tels que les lésions ou les boiteries et fait
l’impasse sur les autres dimensions du bien-être. En vue d’être accepté par les éleveurs et
utilisable dans les élevages commerciaux, cet outil, outre sa praticité et sa fiabilité, se veut
bien moins chronophage que celui développé via le projet Welfare Quality®.

2-2-3 L’outil national EBENE


Plus récemment, la méthode EBENE, conçue par l’institut technique de l’aviculture, permet
d’évaluer de manière pratique le bien-être des volailles et des lapins. Cette méthode se base
sur de nombreux indicateurs pour la plupart directement mesurables sur les animaux et se
distingue des outils précédemment cités, puisqu’elle permet d’évaluer toutes les dimensions
du bien-être de façon simple, pratique et rapide (1 heure maximum). L’évaluation se fait à
l’aide une application smartphone qui permet de collecter facilement les données et de les
synthétiser immédiatement sous forme de résultats.
Dans la méthode EBENE, l'éleveur recueille lui-même la majorité des données, en routine. Il
peut ainsi noter si le bien-être de ses animaux s’améliore et pourquoi. Des techniciens sont
également à sa disposition pour l’aiguiller vers un changement de pratiques si besoin.

En bilan, on peut dire que l'amélioration des conditions d'élevage des animaux nécessite dans
un premier temps de réaliser un état des lieux : c'est ce que proposent les outils d’évaluation
existant à ce jour. Dans un second temps, il semble intéressant pour les éleveurs de pouvoir
se comparer à des moyennes nationales et d’être guidés (pistes de progrès) en vue
d’améliorer leurs pratiques si cela est nécessaire.

3 - Le bien-être animal au travers des divers systèmes de production : exemple des


poules pondeuses

3-1 Diversité des modes de production des œufs


En France, les systèmes de production d’œufs sont relativement diversifiés comme évoqué
précédemment. Certaines poules sont élevées en cages aménagées, d’autres au sol dans des
bâtiments clos ou avec accès au plein air (dont le Label Rouge) ou encore sous Agriculture
Biologique. Cela engage l’éleveur à respecter un cahier des charges bien spécifique. Elevées
sous le cahier des charges Label Rouge, les poules sont par exemple en plus petits groupes
qu’en élevages plein-air « classiques ».

On peut légitimement se questionner sur l’impact de ces différents systèmes sur le bien-être
des poules pondeuses. Est-ce que les poules qui ont accès à un parcours ont un niveau de
bien-être systématiquement jugé comme supérieur par rapport à celles qui sont élevées en
cages ? C’est à cette question que nous allons répondre dans la partie suivante.
3-2 Quel(s) impact(s) sur le bien-être des poules ?
Un projet européen a été mené afin d’étudier les impacts potentiels des divers systèmes
d’élevage sur le bien-être des poules pondeuses (LayWel). Toutes les composantes du bien-
être ont donc été étudiées afin de déterminer, pour chaque système de production, le risque
pour la poule d’y voir son bien-être compromis. Un code couleur a été mis en place : le rouge
correspond à un haut risque que le bien-être de la poule soit compromis et incite à la vigilance
pour les indicateurs concernés ; l’orange indique un risque variable et le vert un risque faible.
Des exemples de résultats sont résumés dans le Tableau 1.

Tableau 1 - Impacts des systèmes d'élevage sur divers indicateurs représentatifs de l'état de
bien-être des poules – En rouge : risque élevé que le bien-être soit compromis ;en orange :
risque variable ;en vert : risque faible ; et ce pour chaque indicateur considéré

Indicateur Cage aménagée Système alternatif Système alternatif


sans parcours avec parcours
Restriction
comportementale
Exploration
Mortalité

Les résultats de cette étude indiquent que les risques pour l’animal de voir son bien-être
détérioré sont différents d’un système à l’autre en fonction de l’indicateur considéré.
On remarque que les systèmes alternatifs avec parcours permettent aux poules d’exprimer
leurs comportements naturels plus librement que dans les autres systèmes. Les systèmes
plein-air présentent donc un intérêt non négligeable pour les poules. On remarque entre autre
que les possibilités d’exploration sont ainsi plus nombreuses et diversifiées en systèmes
alternatifs qu’en cages. On pourrait donc en conclure que les systèmes hors cage sont
meilleurs d’un point de vue du bien-être animal.
Cependant, une mortalité plus élevée est constatée en système hors cage, l’environnement
étant un peu plus difficile à contrôler.

Ainsi, il existe pour chaque système d’élevage des perspectives d’amélioration du bien-être
animal. Aucun système ne permet de satisfaire l’ensemble des grands principes du bien-être
et il n’existe donc pas de système « parfait » à ce jour.
Par ailleurs, pour éviter certains désordres en élevage, des interventions sont pratiquées sur
les animaux. Par exemple, l’épointage est réalisé sur la jeune poule, pour rendre le bec moins
pointu et éviter les lésions sur les congénères. Des travaux sont en cours pour proposer des
techniques d’élevage permettant de limiter les risques et d’éviter les interventions sur les
animaux.

Conclusion
Le bien-être animal est une préoccupation sociétale réelle qui prend de l’importance, aussi
bien à l’échelle nationale qu’à l’échelle mondiale.
En ce sens, de plus en plus de travaux sont menés en vue d’évaluer le bien-être des animaux
du point de vue de l’animal (indicateurs mesurables directement dur l’animal). Les conclusions
de ces travaux montrent entre autres que, bien que les conditions d’élevage en France soient
actuellement bonnes au regard du bien-être animal, il existe des marges de progrès pour
l’ensemble des systèmes de production existant à ce jour.

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