propos de l’auteur
Je montre les techniques de dessin qui fonctionnent, et j’informe les lecteurs sur
les mauvaises habitudes à ne pas prendre.
Je m’efforce d’aider en premier lieu les débutants, mais aussi les amateurs qui
stagnent dans leur niveau de dessin depuis des années sans trop savoir pourquoi
(et vous êtes nombreux dans ce cas, d’ailleurs je l’étais aussi il y a quelques
années !).
Même si ce livre numérique se suffit à lui-même pour que vous fassiez vos
premiers pas dans l’apprentissage du dessin, il est fortement recommandé de
s’intéresser à la formation vidéo qui l’accompagne: la formation théorie des
couleurs (lien).
Il vous sera possible de vous exercer en même temps que je dessine à vitesse
réelle. Si vous avez commandé votre livre numérique AVANT d’avoir commandé
la formation vidéo, veuillez me contacter à cette adresse (lien), je pourrai alors
vous donner un coupon de réduction afin d’acquérir la formation complète.
Remarque: Pour s’améliorer en dessin, c’est comme pour tout, il est impératif de
coupler pratique et théorie. Je vous conseille donc de dessiner et de suivre la
formation-vidéo en même temps. C’est la répétition des exercices qui va vous
faire progresser.
Si vous sautez les étapes, vous allez rapidement vous décourager ou croire que
le dessin n’est pas fait pour vous, et VOUS AURIEZ TORT ! !
Faites-moi confiance sur ce point. Tout le monde peut apprendre à dessiner. En
réalité, on peut apprendre les bases du dessin en quelques jours, avec une bonne
méthode et un bon prof.
Le piège est de se limiter à des solutions de facilité, en contournant
systématiquement des notions essentielles comme la perspective ou la
simplification des formes dans l’espace.
En sachant ça, autant vous y mettre sérieusement une bonne fois pour toutes…
vous me remercierez plus tard! ;)
Sommaire
Introduction
Pas de couleur sans lumière (FTC-01-01)
Les familles de couleurs (FTC-01-02)
L’émotion dans les couleurs (FTC-02-01)
Technique analytique (FTC-02-02)
Les Maîtres de la couleur (FTC-03-01)
Harmonie (FTC-04-02)
Radiosité (FTC-06-02)
Introduction
Que ce soit dans les musées, dans les galeries ou encore dans la nature, on a
tous notre propre perception de la couleur.
Cela commence par la vision et la perception de notre cerveau par rapport au
signal visuel que l’on a. Tout est déterminé par la lumière et la couleur des objets.
Sans vous faire un cours d’anatomie pour autant, je devrai quand même vous en
parler, car il faut comprendre physiquement comment notre œil réagit et comme
cela est perçu par notre cerveau.
Je n’ai jamais accepté le fait d’oublier les couleurs. Elles me passionnaient trop,
tout comme la lumière, les rendus réalistes, la BD.
Vous pouvez voir ci-dessous une peinture de Van Gogh qui était lui-même
daltonien et qui avait tendance à rester dans les valeurs jaunes et bleues.
Le plus amusant dans la situation d’un daltonien est le fait de voir le monde
autour de soi évoluer. À partir du moment où j’ai été diagnostiqué comme
daltonien, les différentes personnes autour de moi venaient me tester sur les
couleurs. Si au début, j’avais l’impression d’être une bête curieuse, le fait que ma
pathologie soit officialisée m’a permis d’avancer un peu malgré tout pour arriver à
un déclic plus tard.
L’outil digital m’a également beaucoup aidé pour contrôler plus facilement les
couleurs du début à la fin. Évidemment avec un daltonisme de type achromate
(absence totale de perception des couleurs), la situation est encore différente,
bien que l’artiste puisse quand même s’exprimer en noir et blanc voire même de
rajouter de la couleur pour s’amuser.
Dans mon cas, j’arrive quand même à apprécier une image et à reconnaître les
schémas utilisés sur la roue chromatique. Je suis conscient de mes difficultés à
saisir les nuances, mais je suis plus sensible à la lumière que d’autres personnes.
On peut donc affirmer que j’ai plus de facilités que la plupart des gens pour la
composition, car je serai plus à même de voir les schémas en niveau de gris et
donc à percevoir la lumière. Ces facilités concernent aussi la perception des
motifs s’appliquant sur une composition et la compréhension du sens de lecture.
Même à celles et ceux qui perçoivent sans difficulté les couleurs, je recommande
de les désaturer quand ils peuvent disposer de l’outil digital. Cela permet
d’optimiser la concentration sur les valeurs et sur la lecture de l’image.
Si vous me montrez une image comme celle qui est ci-dessous (issue du test
d’Ishihara), je vais vous détester. Si vous êtes capable d’apercevoir le chiffre,
personnellement, je ne le peux pas.
Donc oui, le fait que je vous enseigne la couleur peut paraître incongru. Mais
croyez-moi, la pratique et la compréhension des couleurs peuvent amener bien
plus loin que ce que le commun des mortels pourrait accomplir naturellement.
Pour le moment, oui vous percevez mieux les couleurs qu’un daltonien. Par
contre, vous ne les maîtrisez pas spécialement mieux qu’un daltonien entraîné.
On va remédier à celà dès à présent!
Sans la lumière, les couleurs sont invisibles. Si comme entrée en matière, cela
peut vous paraître stupide, cela devrait prendre plus de sens par la suite.
En effet, quand vous observez une scène, vous ne vous interrogez pas sur le type
et la qualité de l’éclairage. Vous vous contentez de penser que vous voyez telle
ou telle couleur, plus ou moins intense.
À aucun moment, il ne vous viendra à l’esprit le fait qu’il y a en réalité un schéma
derrière cette scène et qu’une logique régit ses couleurs. La complexité de la
scène va prendre le dessus dans votre cerveau.
On pense alors que chaque schéma coloré est unique, ce qui est en partie vrai.
Pourtant, avec l’aide de la logique et des connaissances, on serait tout à fait
capable de reproduire cette ambiance.
Mais avant cela, il faut se concentrer sur la lumière et les valeurs, passage
obligatoire.
Avec un décor comme ci-dessus, on peut se demander comment on y est arrivé
en partant du noir. Évidemment, certains vont se dire que cela vient du soleil.
Mais pas seulement. Il y a aussi le ciel, qui est une source secondaire de
lumière grâce au soleil et à l’atmosphère. Cette dernière (comme les nuages) fait
office de filtre: elle diffuse la lumière sur la terre et y module les ombres. Ainsi, la
lumière sera plus ou moins diffuse selon les conditions lumineuses et selon
l’heure de la journée.
Ce que je peux vous dire sur la lumière du soleil de midi ou sur celle diffusée par
les nuages, c’est qu’il s’agit en gros d’une lumière blanche. Partons de ce principe
de neutralité de la lumière.
Plus on avance dans la journée et plus on tend vers le jaune puis l’orange et
enfin, vers le rouge au moment où le soleil se couche. Cela va aussi définir la
couleur de la plupart des objets ou du ciel étant donné la puissance de la lumière
du soleil.
En gros, la couleur perçue dépend fondamentalement de trois choses :
• La couleur locale.
• La couleur de la lumière.
• Le complexe oeil-cerveau.
Pour la lumière blanche, c’est relativement simple. Elle contient la majorité des
ondes électromagnétiques donc des couleurs finalement.
Les scientifiques s’en sont aperçus grâce à un prisme.
Les autres, comme nous les artistes, peuvent s’en rendre compte grâce à la
diffraction de la lumière dans les gouttes d’eau.
Cette cascade en est un bon exemple. On peut voir un arc-en-ciel complet avec
toutes ses couleurs.
Ainsi, on constate que la lumière blanche transmet toutes les longueurs d’onde de
la lumière.
Concernant les couleurs locales, la lumière blanche va révéler leur vraie nature.
Voici maintenant Audrey. Si vous avez suivi ma formation portrait, vous l’avez
déjà vue.
Si je vous présente cette photo, c’est pour vous montrer qu’en une image on peut
résumer la théorie des couleurs. Il faut comprendre qu’une surface blanche va
refléter presque toute la lumière qui lui arrive dessus.
La photo a été prise en fin de journée, le soleil est orangé. On retrouve ce signal
orangé sur le pull blanc au niveau du bas de l’avant-bras droit.
À l’inverse, le signal bleuâtre du ciel est situé au niveau du bras gauche.
D’autres reflets sont également visibles au niveau du col, sûrement générés par la
peau d’Audrey.
Le pull blanc va vraiment être ici notre surface de référence pour savoir quelle
est la couleur de la lumière reçue par la surface. Toute surface blanche renvoie la
lumière qu’elle reçoit sans trop la dénaturer.
La peau, par contre, reflète la lumière différemment. Ainsi, chaque surface (mate
ou réflective) dispose de ses propres propriétés.
Mais pour le moment, considérons uniquement les surfaces mates. La peau est
ici légèrement transparente, mais voyons-la aussi comme mate.
La peau renvoie une lumière orangée, car elle est elle-même orangée et dispose
de beaucoup de capillaires sanguins. Cela sature la couleur.
Cette couleur de peau est néanmoins faussée. Reprenons notre modèle Audrey
sous une autre lumière.
Il s’agit ici de la lumière d’un ciel nuageux. Ce dernier génère des ombres très
diffuses.
D’ailleurs, on peut voir que cette photo est très peu ombrée.
Revenons sur la peau d’Audrey et sa couleur locale, on constate une différence.
Ici, c’est sa couleur de peau naturelle.
Si vous avez l’occasion de voir des surfaces sous différentes sources de lumière,
faites-vous plaisir en réalisant des expériences. Avec un temps changeant par
exemple, prenez plusieurs photos et vous verrez l’évolution des couleurs.
On retrouve notre surface de calibration qui est son t-shirt. On voit toutes les
couleurs qui sont absorbées. Ces dernières seront plutôt bleuâtres et grisâtres à
cause du ciel gris et de l’environnement peu coloré.
À partir du moment où les couleurs locales ne sont pas intenses, le reste sera
également terne.
Tous ces signaux se mélangent pour former notre signal blanc à l’œil nu.
Ajoutons une surface (peu importe sa couleur).
La lumière est ici diffuse, car elle va sur l’objet de façon très peu contrastée. On
va voir apparaître une sorte d’ombre d’occlusion, comme si l’on avait utilisé une
lumière blanche d’une très faible intensité venant du haut.
Augmentons l’intensité de cette lumière diffuse (une lumière très large par rapport
à l’objet), mais sans couleur. Restons, en effet, focalisés sur les valeurs avec une
lumière blanche sur des surfaces grises.
Si je vous avais demandé de dessiner une sphère comme celle-ci sans référence,
il y a fort à parier que beaucoup d’entre vous auraient représenté le haut de la
sphère de manière plus blanchâtre comme ci-dessous.
Rappelez-vous que la lumière blanche contient toutes les couleurs de l’arc-en-
ciel. Si l’objet est rouge comme ici, il va absorber tous les signaux lumineux
colorés qui sont différents de lui et va renvoyer ceux qui lui ressemblent.
La lumière blanche lui ressemble, car elle contient toutes les couleurs. L’objet va
en réalité filtrer les différents signaux colorés et les transformer en chaleur. Toutes
les teintes rouges seront renvoyées vers l’observateur.
Cette dernière représentation n’est pas si fausse que ça. Il aurait juste fallu que
l’œil humain soit différent ou que la surface soit plus réflective éventuellement.
Ainsi, sur une surface mate, la lumière n’a pas l’avantage sur l’objet.
Voyons cette fois-ci le même objet éclairé par une source de lumière jaune.
En envoyant une deuxième source de lumière vers les parties sombres, bien
évidemment, cela va les éclaircir, mais il y aura également une saturation de
couleurs.
Si par contre, on envoie de la lumière jaune, la sphère va vraiment s’éclaircir (le
jaune étant plus proche du rouge sur la roue chromatique).
Voici une des versions du cercle (ou roue) chromatique. Cette version contient
toutes les familles de teintes (12 au total).
Cette version est d’ailleurs ma préférée, car elle contient toutes les informations
utiles :
• La teinte qui est la famille de couleurs comme vert, bleu, jaune, orange… etc.
• La saturation qui permet de savoir si une couleur est forte ou si elle
s’approche d’un gris.
• La luminosité (ou valeur). Cela permet de déterminer si une couleur est claire
ou sombre.
Cette roue chromatique contient des intermédiaires (par exemple orange, jaune-
orange, jaune) et offre 360 degrés de teintes.
Voici une autre version. Celle-ci est complètement numérique avec les mêmes
familles de couleur, mais avec des possibilités infinies. Notre cerveau n’a pas
besoin d’autant de possibilités.
Notre première roue est plus pratique pour trouver les familles de couleur et
pour rester dans des schémas relativement simples. Elle permet de
segmenter et de simplifier.
On peut représenter une horloge sur notre roue chromatique. Un bon moyen pour
se souvenir du nombre de familles de teintes.
Dans ces familles, on retrouve les 3 couleurs primaires : rouge, jaune et bleu.
Sur cette roue, elles forment un triangle, un autre moyen pour se souvenir où se
situent les autres familles.
Il y a aussi 3 couleurs secondaires (violet, orange et vert) qui forment un triangle
inversé.
Ces 6 couleurs dessinent une étoile sur cette roue chromatique.
Il est alors possible de placer les teintes restantes dans les intervalles créés par
ces 6 couleurs.
Comme je vous le disais, il existe 3 dimensions pour les couleurs :
• La valeur (du blanc ou du noir complet)
• La famille de teintes que l’on vient d’étudier
• La saturation
Si l’on sature justement cette roue, on obtient ce résultat.
À l’inverse, si l’on désature pour être plus subtil dans les valeurs de gris, on
obtient les autres roues.
Ce genre de roue permet d’anticiper les réactions des couleurs quand on les
mélange. Par exemple, du vert et du rouge donneront du gris (le centre de la
roue).
Tandis que si c’est le rouge et le jaune qui se mélangent, on obtient une nuance
plus désaturée comprise entre l’orange et le jaune-orangé.
Rappelez-vous aussi qu’une perte de lumière se produit. Si l’on envoie une
lumière rouge sur une surface rouge, les deux ont tendance à se compléter tandis
que si l’on projette une couleur complémentaire comme une lumière bleue-verte,
la surface rouge ne pourra plus renvoyer le signal rouge, celui-ci n’étant pas (ou
très peu) présent dans cette lumière à la teinte opposée.
Pour vous illustrer un plus en 3 dimensions de la roue chromatique, il existe la
version de Munsell. Ce dernier l’a inventé après avoir réfléchi sur les roues
chromatiques déjà existantes à son époque.
Il a bien compris qu’il y avait 3 axes pour la couleur : valeur, teinte et saturation
encore une fois. Saturation qui, je le répète, est la teneur en teinte dans une
couleur.
Sur cette sphère, on constate que les parties extérieures sont très saturées à
l’inverse de l’intérieur. L’intérieur faisant office de nuancier de gris.
Si vous souhaitez obtenir par exemple une scène éclairée par un jaune très
puissant tel un soleil de 16 heures, il vous faudra nettement décontraster la
scène, car vous allez très vite vous retrouver avec du blanc. C’est pour cela que
les peintres n’utilisent pas trop le blanc et le noir. Ils préfèrent rester dans des
valeurs qui sont colorées, pour finaliser par les valeurs les plus foncées ou
claires.
Ces valeurs colorées commencent à partir de 2 sur 10 et jusqu’à 7 sur 10
environ (si 10 sur 10 pour le noir et 0 sur 10 pour le blanc).
C’est ce que je vous conseille de faire dans vos illustrations, quelle que soit la
technique utilisée. Essayez de naviguer dans cette fourchette de valeurs
colorées. Le blanc et le noir sont vraiment à garder pour la fin de la création, car
on ne peut aller au-delà ni “donner” de la couleur à du noir ou du blanc.
Si vous êtes en aquarelle, il vous faudra utiliser le blanc du papier comme valeur
la plus claire en travaillant des valeurs des plus claires aux plus foncées.
Vous devrez réfléchir sur votre média et l’adapter en fonction de ce que vous
voulez obtenir des couleurs, mais le principe reste les même.
Il est tout à fait possible de faire vos études et compositions uniquement avec des
niveaux de gris. Vous pouvez y intégrer de la couleur par la suite. Mieux vaut
travailler dans cet ordre d’ailleurs quand on est débutant. Restez analytique
dans votre approche, en apprenant une chose à la fois, est une des meilleures
façons de progresser.
D’autant que lorsque l’on est amateur, on ne réfléchit pas forcément en termes de
température. Celle-ci n’est qu’une histoire de comparaison entre deux couleurs.
Génériquement pour déterminer sur la roue chromatique si une valeur est chaude
ou froide, on peut séparer la roue en deux parties égales passant par l’axe vert-
jaune et rouge-violet.
Alors, toutes les couleurs à gauche sont dites « chaudes » et à droite, « froides ».
Présenté comme cela, tout a l’air simple. En réalité, pas tant que ça.
En effet, notre cerveau va nous jouer des tours et nous montrer des choses que
l’on ne devrait pas voir théoriquement. Un signal peut ne pas être intégré comme
il le devrait dans notre cortex visuel et certaines couleurs vont apparaître comme
plus « chaudes » ou plus « froides », selon le contexte dans lequel on se trouve.
Si vous êtes en intérieur avec une lumière jaune, bleuâtre ou verdâtre, les objets
semblent les premiers temps tendre vers la même couleur que celle de la lumière.
Et petit à petit, vous allez voir la couleur locale des objets. Cela veut dire que le
cerveau humain adapte la lumière d’ambiance aux couleurs locales pour nous
permettre de distinguer la couleur des objets même si la couleur de la lumière est
dominante.
De manière plus générale, le cerveau s’adapte en fonction des situations. Dans
un lieu sombre, le cerveau va demander à la pupille de s’ouvrir davantage et sous
un soleil d’été, il va faire se refermer au maximum cette même pupille. C’est un
phénomène d’adaptation neurologique.
C’est le même principe pour les caméras, appareils photo…etc.
Mais comment classer le vert-jaune et le rouge violet ? Difficile à dire, car on est à
la limite entre deux mondes.
Tout va être comparatif. En fonction de la saturation ou non d’une couleur, des
différentes teintes et du positionnement à proximité d’une autre couleur, nous
allons percevoir différemment cette même couleur.
Il suffit de prendre un gris coloré pour le mettre à côté d’une autre couleur et il
semblera aussi chaud voire plus qu’une couleur. Ou l’inverse. Tout dépendra du
positionnement des couleurs sur la roue chromatique.
Les couleurs qui environnent une autre couleur jouent également un rôle
dans l’interprétation « chaud-froid ».
Par exemple, prenons un jaune désaturé et un autre saturé. Le saturé semble
plus chaud que le jaune désaturé.
Si maintenant, on recommence avec le bleu, le bleu désaturé est plus chaud que
le bleu saturé.
Si ensuite, on positionne les couleurs les unes à côté des autres tout en se
donnant plusieurs variations dans les gris, vous allez rapidement vous rendre
compte que rien n’est gravé dans le marbre.
Notre cerveau voyant alors des choses assez saugrenues en raison des
nombreuses illusions d’optique qui peuvent se produire en comparant les
couleurs.
Après, tout dépend de la culture aussi. Les significations dont on vient de parler
vont concorder avec la vision occidentale.
Pour les cultures plus orientales ou autres, cela va vraiment changer.
Donc, ne prenez pas cette classification pour argent comptant étant donné les
variantes d’une civilisation à une autre.
Dans notre monde occidental, on peut également se servir de la roue que je viens
de vous présenter en ouverture de ce chapitre. Celle-ci résume de façon assez
générique quelques panels d’émotions. On peut avoir d’autres significations, tout
dépend du contexte. En effet, là aussi, ce n’est pas à prendre au pied de la lettre.
• Jaune : la créativité et l’optimisme
• Vert-jaune : la vitalité et l’admiration
• Vert : la jalousie et la sécurité
• Bleu-vert : la stabilité et l’ennui
• Bleu qui est la couleur la plus froide : la confiance et la tristesse
• Bleu-violet : les remords et la sagesse
• Violet : le surnaturel et l’intuition
• Rouge-violet : la déduction et le contentement
• Rouge : la colère et le courage
• Rouge-orangé : le danger et la force
• Orange : l’excitation et la joie
• Jaune-orangé : la vigilance et l’enthousiasme.
Le jaune-orangé et le jaune sont des couleurs que l’on rencontre beaucoup dans
la vie de tous les jours.
Pour vous illustrer le fait qu’il ne faut pas prendre systématiquement au premier
degré ce genre de roue, on peut avoir une scène avec énormément de bleu, par
exemple, une scène de plongée sous-marine. Il y aura alors beaucoup de bleu,
pourtant, il ne s’agit ni de confiance ni de tristesse.
Pour le rouge, j’ai retenu la colère ou le courage. Mais cette couleur peut aussi
symboliser la vie ou le danger. Or, ce dernier est sur la roue, dédié au rouge-
orangé.
Tout dépend de ce que vous faites de votre dessin ; du contexte qu’il y a derrière.
Vous pouvez très bien créer une palette plus complexe qui servira tout aussi bien
l’histoire de votre illustration.
Il y a une quantité importante de dénominations de couleurs ; on pourrait en
rajouter encore plein. Les marrons font aussi partie d’une famille de teintes, le
jaune-orangé en l’occurrence.
Pour vous le démontrer, il suffit de diminuer la luminosité de ce cercle
chromatique. Le panel d’émotion va changer et trouver d’autres couleurs dans la
même gamme.
On constate déjà un réel impact de la lumière sur la couleur. Les valeurs vont
également jouer sur l’émotion dans les couleurs juste en baissant la luminosité.
Les gris colorés au centre semblent même plus colorés qu’au départ. C’est lié au
fait que le cerveau compare les valeurs, les unes par rapport aux autres, trouvant
ainsi plus de teintes selon la valeur dans laquelle on se situe dans un cas précis.
C’est souvent dans les valeurs moyennes que l’on trouvera le plus de teneur en
teinte (donc en couleurs, en pigments). Plus on va vers les extrémités et moins il
y aura de couleurs.
Encore une fois, on peut voir que la lumière affecte les couleurs. On se retrouve
avec beaucoup moins de teneur, car l’exposition de chaque couleur a été
augmentée. On s’approche alors de l’extrême clair de la roue chromatique de
Munsell que l’on a vue dans le chapitre précédent.
Sur la partie extérieure de la roue, on a encore des teneurs très fortes en couleur,
car on est dans des valeurs proches d’un 3 ou 4 sur 10 comme des gris moyens.
Mais plus on se rapproche du centre de la roue, plus on tend vers le 1 sur 10.
Ainsi, les couleurs sont plus difficilement distinguables.
Si je devais peindre sur une toile, je ferais d’abord des petites études en couleur
en parallèle des études en niveaux de gris.
Les études en couleur permettent de se formater à la palette restreinte de
couleurs que l’on va vouloir utiliser.
En digital, c’est plus simple. Je n’ai ici qu’à superposer les couleurs par rapport à
la valeur.
Je vais souvent comparer une valeur en niveau de gris sur le cercle chromatique.
Si vous travaillez en digital, je ne vous conseille pas d’utiliser la pipette pour aller
piquer les couleurs sur la photo d’origine. Vous pouvez en effet améliorer la
couleur par rapport à la référence, amélioration impossible si vous utilisez la
pipette.
Pour tous les éléments de cette scène, j’ai juste déterminé la famille de teintes et
la saturation.
Ces éléments ne sont alors que des silhouettes.
Et une fois que j’ai la couleur locale de toutes ces silhouettes simples, je travaille
l’ombre et la lumière. Il me suffit d’avoir 3 valeurs différentes pour pouvoir
suggérer la profondeur, l’effet 3 dimensions et ainsi donner du réalisme à la
création.
Chaque fois que je dois peindre, je tente de rester le plus simple possible pour
que la création reste agréable à l’œil. Dans cette optique, j’utilise aussi des gris
colorés.
Si vous travaillez en digital painting, vous pouvez retrouver la construction de ce
temple sur ma chaîne YouTube (lien).
Mais peu importe votre outil, il est toujours préférable de réfléchir à ce que l’on
va faire avant de passer au grand format. Et donc pour cela, je vous conseillerai
toujours de passer par une étape vignette et d’avoir déterminé votre palette.
En effet, le fait de réfléchir sur une vignette, à ce que l’on voudra faire, permet
d’ajuster la palette pour le grand format.
Si vous êtes un habitué du digital, vous pouvez commencer en balançant des
couleurs dans tous les sens. C’est alors une recherche par le hasard.
Mais si vous êtes en technique traditionnelle, la réflexion et l’étude
environnementale devront être plus importantes et peut-être même s’inspirer de
photos.
Car partir de zéro et inventer ses propres couleurs sans compétence
d’observation est très risqué. On peut alors refaire les mêmes erreurs à
répétition pour ne jamais évoluer.
N’oubliez pas qu’il y a plus de couleurs dans la réalité que sur une photo.
Perceptuellement, vous avez la possibilité de copier ce qu’il y a autour de vous.
Même si cela peut vous sembler répétitif de faire une peinture de décor, de votre
jardin ou autre en extérieur, je peux vous assurer que votre sensibilité à la couleur
sera plus importante.
Ce sera toujours plus difficile que de rester à la maison et de recopier une photo,
mais plus instructif.
Le peintre français Eugène Delacroix a été l’un des premiers à utiliser les
couleurs pour sublimer le réalisme des scènes visuelles.
Il a remarqué que les couleurs complémentaires pouvaient être utilisées pour
amplifier l’effet du clair-obscur plutôt que d’utiliser de la peinture blanche et de
la peinture noire.
Couleurs complémentaires qui sont à l’opposé sur le cercle chromatique, comme
le rouge et le vert.
Donc sur un objet rouge, il rajoutait une touche de vert dans ses ombres par
exemple. Cela amplifie l’effet de profondeur. Technique que l’on peut appliquer
dans de nombreux cas.
En plus de sa maîtrise de la théorie des couleurs, il a aussi utilisé les
connaissances théoriques produites par des scientifiques comme Isaac Newton
ou Michel-Eugène Chevreul.
L’utilisation des complémentaires à bon escient fait que la peau, les vêtements,
les ombres et la lumière bénéficient d’un meilleur rendu et sont plus vibrants.
Ensuite, les impressionnistes comme Monet, Renoir ou Pissarro se sont
grandement inspirés du travail de Delacroix pour en faire des illustrations encore
plus vibrantes grâce à leurs techniques d’impressionnisme.
Ils ont compris comment faire vibrer les couleurs comme dans cette illustration de
Renoir.
Un autre exemple de Monet. Les silhouettes sont relativement simples, mais les
couleurs sont extrêmement riches.
Il sait très précisément ce qu’il fait, comment les couleurs interagissent et nous
laissent une empreinte dans la rétine.
Toile qui lui a demandé du temps pour réfléchir sur les couleurs et les comparer
entre elles. Sans compter qu’il a dû les mélanger directement sur la toile pour les
faire vibrer directement sur leur support.
Ci-dessous, il s’agit d’une reproduction pas forcément très fidèle, mais regardez
comme les aplats ont tendance à être disséminés de part et d’autre de la toile
pour donner cette impression de vie.
Maintenant une œuvre de Paul Gauguin qui utilise aussi les couleurs de la même
façon. Toujours des aplats de couleur, en restant dans des valeurs raisonnables,
mais avec un jeu de couleurs qui a été recherché dans le but de provoquer
l’émotion.
On est presque dans des couleurs quasi arbitraires. Il est difficile de savoir s’il
s’agit de couleurs réelles ou non.
Toutes ces expérimentations artistiques ont donné naissance à des styles divers
et variés.
Vous pouvez voir ci-dessous une peinture d’Henry Hensche. Création que
j’apprécie particulièrement. Les couleurs sont vraiment éclatantes au grand jour.
Pas besoin de mettre beaucoup de couleurs saturées pour en mettre plein la vue.
Le fait de varier entre couleurs désaturées et gris colorés est important pour
reposer l’œil.
Les gris colorés sont vraiment le ciment de la peinture. Sans eux, il est difficile de
faire illusion en matière de maîtrise des couleurs.
En tout cas, merci à ces peintres qui ont pu faire toutes ces expérimentations
avant nous et ainsi nous montrer le chemin vers une liberté infinie concernant les
couleurs.
Il est possible que, comme moi, vous cherchez un mélange entre le figuratif et
l’abstraction afin d’en faire quelque chose d’original sans forcément être trop
réaliste.
Je sais que certains d’entre vous ne jurent que par le réalisme, mais peut-être
qu’avec le temps vos goûts évolueront, qui sait, on n’est jamais à bout de nos
surprises.
C’est en tout cas ce qui se passe pour beaucoup d’artistes qui commencent par
du réalisme pour évoluer vers des choses plus simples par la suite.
Et cette simplification donne toute leur richesse aux formes et aux couleurs. Sans
compter que ces dernières doivent pousser l’histoire en lui apportant la
composante émotionnelle dont l’image a besoin.
Vous allez également remarquer que plus les formes sont fines et plus ce
phénomène s’applique.
Autre situation. De près comme de loin, les lignes ne semblent pas parallèles et
pourtant, elles le sont.
Encore une expérience intéressante. Fixez sans cligner des yeux pendant un bon
moment le rond rouge.
Vous allez voir autour de la forme se créer un halo plus clair.
Puis, quand ce cercle rouge est supprimé, la complémentaire va apparaître d’un
coup. Cette empreinte de couleur complémentaire est cyan.
Maintenant, choisissons un texte bleu-vert ainsi qu’un fond grisâtre.
Même si je décontraste l’image, l’effet perdure. Pas besoin des valeurs pour cela,
les couleurs, les teintes suffisent pour produire cet effet-là.
Rappelez-vous que ce sont les couleurs voisines qui jouent entre elles, qu’on va
les comparer d’une manière ou d’une autre, qu’on le veuille ou non.
Le cerveau va chercher quelque chose d’unique. Dans notre cas, il va chercher la
couleur du texte dans l’aplat bien plus imposant servant d’arrière-plan. Plus la
zone est fine et plus il va y avoir cette illusion de contraste des couleurs et de la
température.
Si les contrastes simultanés jouent sur les teintes, ils ont aussi un effet sur la
saturation des couleurs.
Jouons de nouveau avec le fond. La partie droite de l’écriture est plus grise
maintenant.
L’écriture est saturée alors que le fond ne l’est pas du tout. Ainsi, le cerveau
cherche automatiquement ce qui est rare donc ce qui est saturé.
Mais si l’on baisse l’intensité par rapport au modèle d’origine, cela aide à faire
ressortir le personnage, mais on perd en harmonie dans les couleurs.
On peut faire de même avec les bleus cette fois-ci en mettant en avant les
oranges. En baissant l’opacité peu à peu, les tons de peau sont alors mis en
valeur de façon très subtile.
Il en va de même dans la vie réelle. Si on voyait des légos de cette façon, rien ne
nous choquerait.
Jouons nous aussi avec la saturation (ou chroma chez les Anglo-saxons).
Si on analyse cette œuvre et que je passe la pipette de Photoshop, on constate
une low chroma (c’est-à-dire une saturation minime de moins de 50%) surtout
pour tout le personnage. Pour les fleurs, on arrive à 50% de saturation.
Les couleurs sont volontairement tamisées avec une mise en avant du bouquet.
Voici ensuite un middle chroma avec la photo d’origine et un high chroma qui
propose donc une saturation des couleurs bien plus intense. Néanmoins,
l’ensemble reste harmonieux même en regardant de loin.
En y ramenant les couleurs, on pourra observer le rôle des valeurs qui donnent
une composition relativement claire. Les couleurs vont, elles, avoir un impact sur
la vibration et sur la profondeur de l’image.
La différence est frappante, bien que les valeurs restent identiques. La couleur et
sa saturation jouent un rôle tout comme la température. Le cerveau s’occupe du
reste en faisant un travail de comparaison et en donnant plus de profondeur à
l’image
Revenons à une illusion d’optique. Regardez ces deux chiens et prêtez attention
aux contrastes simultanés tant dans les valeurs que dans les couleurs.
Si je ramène un fond blanc, on constate que ces chiens sont identiques. Cet
exemple montre parfaitement ce que fait subir le cerveau à un individu en
comparant les couleurs les unes aux autres.
Cela vous permettra d’isoler un peu mieux les couleurs. L’idéal est d’avoir un
support neutre et légèrement transparent.
Le reste ne doit pas trop flasher à l’œil, mais au contraire être apaisant à
regarder. Un seul trou peut également suffire si vous le déplacez dans votre
scène visuelle.
Avant de comparer ces 3 couleurs (A, B et C), je vous rappelle les dimensions :
• La teinte
• La saturation
• La luminosité, la valeur
• La température qui est un raccourci entre saturation et teinte.
Troisième question.
Je pense que « A » reste la couleur la plus saturée des trois. Cela étant dit, « B »
est relativement saturée et « C » beaucoup moins.
Si l’on enlève le cache, on se rend compte que « C » était dans une zone de
réflexion directe.
Cette réflexion directe est celle de ce qu’il y a sur la table et elle vient teinter
légèrement cette couleur orange désaturée.
En effet, ce qui est reflété doit être d’une couleur différente de la teinte principale
orange.
Dans le reflet, il doit sûrement y avoir une majorité de bleu. Rappelez-vous sur la
roue chromatique, on est alors à l’opposé du rouge orangé. Il va donc y avoir un
mélange et systématiquement, il y aura désaturation des couleurs.
Si on mélange à quantité égale, deux complémentaires, on obtient un gris. Avec
plus d’orange que de bleu, on retrouve de l’orange, mais désaturé, donc un gris
coloré.
Si vous êtes en peinture traditionnelle, c’est exactement la même chose. Il faut se
poser aussi 3 questions, car maintenant que les couleurs ont été comparées, on
est en droit de se demander quoi faire de ses tubes de peinture.
• Donc est-ce que le cadmium orange est plus chaud que « B » ? Pour moi, le
cadmium orange semble plus chaud. On s’approche donc plus de l’orangé, tandis
que « B » tend vers le rouge-orangé
• La couleur qui sort du cadmium orange est plus claire que « B ». C’est ici une
certitude.
• Le cadmium orange semble plus saturé, mais il est difficile d’être affirmatif,
car « B » est une couleur relativement saturée.
Mais ce qui m’interpelle le plus, c’est que le cadmium orange est plus orangé que
« B ». Pour la saturation, elle est similaire.
Après selon la technique que vous utilisez (aquarelle, peinture à l’huile, acrylique),
le mélange des couleurs ne va pas être tout à fait pareil, car les pigments à
disposition ne sont pas les mêmes.
Vous remarquerez aussi que les pigments rouge-orangé, voir jaune sont plus
nombreux que les autres. Cela vient du fait que l’œil humain perçoit mieux ces
couleurs que celles plus froides.
Comme on l’a étudié juste avant, pour descendre en chroma il faudra y mélanger
une couleur opposée.
Ici, le Cobalt Blue semble être idéal pour descendre vers les neutres.
Pour obtenir un gris coloré ou quelque chose qui s’approche du gris (sans avoir à
prendre un tube de gris tout fait ou à mélanger le noir et le blanc), commencez
par mélanger deux couleurs complémentaires à quantité égale.
Il se produit alors une désaturation des couleurs pour arriver à un gris coloré.
Pour avoir des gris colorés qui tendent davantage vers le gris, on peut par
exemple prendre un gris de ”Payne” et le mélanger avec un des gris colorés que
l’on vient d’obtenir.
D’une manière générale, quand on mélange du blanc avec une couleur, cela va
refroidir cette dernière. À l’inverse, le jaune est utilisé pour la réchauffer.
Si, encore une fois, on voulait retrouver la couleur « B » du précédent chapitre, il
suffit de prendre la couleur qui s’en rapproche le plus (le cadmium orange) et de
prendre l’autre valeur de l’intervalle. En l’occurrence, il s’agit du cadmium rouge-
orangé.
En les mélangeant et selon le dosage, on tend véritablement vers « B ».
Puis on va utiliser la couleur complémentaire qui est ici plus sombre et qui va
aider à perdre en chroma. On obtient alors le mélange ci-dessous.
Si maintenant, la couleur ne convient pas, car trop sombre, mais avec une bonne
saturation et une bonne teinte ; il ne faudra pas rajouter du blanc.
On va certes éclaircir, mais la saturation va diminuer. Le jaune (ou une peinture
qui s’en rapproche) va permettre d’éclaircir le mélange sans toucher à la
saturation.
Dans la pratique hors numérique avec de vrais pigments, le résultat n’est pas
forcément aussi prévisible (cela dépend des pigments). Il faudra faire des essais
selon le médium.
En peinture à l’huile, vous allez trouver différents pigments ; certains vont se
ressembler, mais d’autres pas. Tout va dépendre des pigments et des marques
que vous utilisez.
Par contre, avoir une palette de couleur restreinte est une bonne chose pour
éviter par la suite de partir dans tous les sens. Votre création paraîtrait
éventuellement criarde ou kitsch.
Les gris colorés sont le fondement d’une illustration. Si vous ne les utilisez pas,
vous allez créer un sentiment d’oppression non désiré auprès de votre public.
Une erreur souvent commise est de tomber dans la symbolique du type « l’herbe
est verte, le ciel est bleu, le soleil est jaune ».
Mais comme on a pu le constater, les couleurs d’ambiance jouent beaucoup sur le
résultat final. En tant qu’artiste, on se doit de capter, de rajouter de la richesse à
ces couleurs (tout en comprenant ce que l’on fait évidemment).
Cela impose de savoir contrôler les couleurs sur notre palette, car sinon, on va
trop vouloir en rajouter et cela jusqu’à utiliser l’ensemble du cercle chromatique.
Sans compter la tentation de contraster au maximum avec les noirs et les blancs.
Sachez que si vous regardez vos images préférées (photos ou peintures), vous
allez vous rendre compte que rares sont les noirs et les blancs purs (y compris
sur les très anciennes peintures qui semblent plus sombres qu’elles ne le sont
vraiment, à cause des couleurs qui se ternissent avec le temps, plus l’effet
jaunissant des vernis).
Prenons le cas d’une création de John Singer Sargent.
Si vous connaissez le modèle original, vous vous rendez compte que j’ai
complètement changé les couleurs par rapport à ce dernier.
Même si mon travail est recevable, il ne reflète pas la vision de John Singer
Sargent qui doit être celle ci-dessous.
En effet, il s’agit d’une reproduction et on ne connaît jamais très bien les
modalités entre la vieillesse de l’illustration et les différentes reproductions
disponibles ici et là.
Néanmoins, je pense qu’elle est assez fidèle.
Les nuages sont relativement jaunâtres voire orangés.
En ce qui concerne l’arbre au premier plan à droite, on a l’impression de voir du
bleu sous les branches de gauche.
Si je vérifie avec Photoshop, je constate qu’il s’agit en réalité de gris-orangé. Et
plus on se déplace sur la gauche, plus cela va être saturé. Il y a un shift de
couleur qui se produit dans nos cerveaux.
Ce gris-orangé est bien plus froid que les nuages et la section de gauche.
Cette illusion est accentuée par la présence de bleu au milieu de l’arbre, entre les
branches. Il n’y a pas de dégradé de bleu, mais juste un gris coloré.
Cela démontre l’importance des gris colorés pour asseoir une illustration. C’est
d’ailleurs grâce à eux que la plupart des illustrations que l’on peut voir ici
fonctionnent.
Si je devais barbouiller cette œuvre avec quelque chose de plus saturé, les
couleurs n’auraient plus rien à voir et ne seraient plus harmonieuses du tout.
Pour l’ensemble du ciel, John Singer Sargent a utilisé non seulement des gris
colorés, mais aussi une palette de couleur restreinte. Il n’est pas trop allé dans les
bleus en se limitant à des bleus purs qui n’avoisinent même pas les 20 % de
saturation.
Ce n’est pas en contrastant fortement les valeurs et les couleurs que vous
allez produire une œuvre plus marquante.
Vous pouvez avoir une illustration avec une très belle ambiance et qui déborde
d’émotion juste en utilisant des couleurs tamisées, pas trop fortes et des
contrastes mesurés.
Dans la version qui vient, on peut voir les couleurs sans les valeurs. Les
variations des couleurs, des familles de teintes sur l’illustration sont alors visibles.
Toute la partie gauche du cercle chromatique va être utilisée et très peu celle de
droite (bleu). On reste avec des jaunes-orangés, des gris colorés y compris pour
l’herbe.
Donc ne croyez pas que vous allez devoir utiliser à chaque fois l’ensemble du
cercle chromatique, c’est tout le contraire.
Harmonie (FTC-04-02)
Parlons maintenant du concept d’harmonie des couleurs. Concept assez difficile
à définir, car c’est une notion perceptuelle, qui nous est propre.
Il y a donc harmonie quand l’image nous semble équilibrée au niveau des
couleurs, et qu’elle nous paraît presque « musicale ».
Différents types d’harmonie existent :
• Monochrome
• Analogue
• Triadique
• Complémentaire
• Complémentaire partagée
• Double complémentaire
Harmonie monochrome
Vous avez certainement tous entendu parler à un moment donné d’images
monochromes. En général, elles sont composées d’une seule couleur.
L’harmonie monochrome comprend un seul type de teinte et la palette est
vraiment restreinte. Les valeurs vont aussi jouer, un peu comme dans une étude
de valeurs avec des niveaux de gris colorisés.
Cela donne une ambiance comme celle qu’on peut voir sur cette image d’Alfred
Pages. On peut voir qu’il n’y a pas grand-chose d’autre que des rouges-orangés,
mais qu’il y a des changements de valeurs.
Harmonie analogue
L’harmonie analogue est le deuxième type que je voudrais aborder avec vous.
Sur cette peinture d’Anders Leonard Zorn, on constate que par rapport à tout à
l’heure, on est maintenant dans des gammes légèrement plus larges.
L’harmonie analogue est donc réalisée à partir de couleurs de même famille ou
voisines dans le cercle chromatique comme ici le jaune, l’orange et le rouge.
Harmonie triadique
Pour cette nouvelle harmonie, on va se retrouver dans la configuration d’un
triangle sur le cercle chromatique.
Les couleurs sont déjà très saturées, offrant alors un rendu peu agréable à l’œil.
On voit aussi un liseré se former entre ces deux couleurs.
Mais en travaillant la complémentaire de manière beaucoup plus silencieuse, il
est possible de trouver un compromis. Pour cela, il va falloir faire des essais en
changeant la luminosité, la teneur en saturation.
On va également tâtonner par rapport à la vignette qu’on se sera fixée au début.
Pensez bien à faire des vignettes en niveaux de gris et à comparer les couleurs
entre elles.
Vous pouvez aussi saturer les couleurs plus foncées et peut-être que vous
trouverez ce qu’il vous faut.
Il n’y a que de cette façon que vous pourrez vous rendre compte si une couleur
fonctionne par-dessus une autre.
On peut aussi reprendre notre rouge-orangé et le travailler à son tour un peu plus
pour le comparer aux autres échantillons. À un moment donné, vous allez trouver
ce qu’il vous faut.
Comme visuellement cela devient trop lourd, j’entoure la zone de recherche de
gris.
Et d’un coup, les couleurs à l’intérieur paraissent nettement plus vives et visibles
pour faire la comparaison.
Faites vos expériences, observez le monde ou les peintures des grands maîtres.
Mais si l’on devait éteindre toutes ces couleurs, il ne se passerait plus grand-
chose. Certaines silhouettes se détacheraient encore, mais beaucoup moins.
Les contrastes de température
Un des contrastes les plus intéressants que je peux connaître est celui de la
température.
Notez comme sur beaucoup de peintures, si la lumière semble chaude, les
ombres paraissent froides. Technique très employée pour les extérieurs.
Pour l’intérieur, on fera plutôt l’inverse avec une lumière froide et des ombres
chaudes.
Tout ce qui est protégé du soleil par cette ombrelle prend la couleur du ciel. C’est
le cas de la tunique.
Il y a même un rebond jaune qui vient en réalité du sol.
On constate aussi une différence de température sur la tunique du jeune garçon.
Voici à présent une œuvre de William Adolphe Bouguereau. Le schéma est ici
inversé.
La lumière est plutôt froide et les ombres sont chaudes.
Si vous rendez une lumière aussi chaude/froide que l’ombre, vous allez vers des
problèmes de composition, de lecture et votre création n’aura pas le même
impact.
Ce type de contraste est sûrement le plus important après les valeurs.
Les contrastes de saturation
Ici, dans cette peinture de Claude Monet, on voit rapidement que la saturation se
situe dans les fleurs par rapport au reste de la végétation. Elle est beaucoup plus
grisâtre et ne ressort pas trop.
Donc nous sommes non seulement en présence d’un contraste de teinte, mais
aussi d’un contraste de saturation.
En effet, il faudra vous interroger sur la place que chaque couleur choisie va
occuper dans une de vos illustrations. Cela dans le but de savoir quelle sera la
couleur dominante ou la couleur un peu plus mutée, mais aussi afin de doser
les saturations, surtout si, comme ici, vous avez plusieurs scènes à différencier.
Et revoilà la roue chromatique numérique. Sachez que tout ce que nous allons
voir vaut aussi pour la peinture traditionnelle.
Sur cette roue, j’ai appliqué un calque grisâtre afin de vous montrer quelle partie
de la roue je vais choisir.
Je choisis donc cette famille de teintes. Je serais alors obligé de piocher dans
cette zone.
Dès lors, il est possible de changer la luminosité pour avoir un aperçu de toutes
les couleurs que l’on peut utiliser. Souvenez-vous que plus on va vers les
extrémités et moins on aura de couleur.
Que vous sortiez vos couleurs de tubes ne change rien. Comme on l’a déjà vu, on
peut changer la luminosité des couleurs en utilisant des jaunes pour éclaircir
et apporter de la chaleur ou des blancs pour refroidir. Idem pour assombrir,
l’utilisation d’une complémentaire plus foncée fera tout aussi bien l’affaire.
Plus vous déterminerez une zone de travail large (comme quelque chose de
tétradique) et plus vous aurez du mal à choisir vos teintes. Dans le cas ci-
dessous, il faudrait beaucoup d’objets de différentes teintes sous une lumière
relativement blanche. Cela pourrait être adapté par exemple pour représenter une
kermesse avec des enfants portant des t-shirts tous différents, avec beaucoup
d’activités…etc.
Si vous n’avez rien qui soit éclairé par une lumière blanche et que la lumière est
plutôt jaunâtre, vous ne pourrez pas faire participer autant les couleurs et les
saturations. Il faudra sûrement se restreindre en restant dans les gris colorés et la
couleur dominante restera la famille des jaunes.
Encore une fois, ne négligez pas la luminosité et les valeurs. C’est grâce à elles
que vous allez pouvoir démarquer votre composition, décrire vos objets et la
profondeur d’une scène. Les teintes ne sont qu’un bonus.
Même dans le cas d’une création en traditionnel, j’utilise l’outil numérique pour
analyser les couleurs puis pour les reporter sur un support classique.
Nous allons ensuite élargir notre masque dans le cercle chromatique. Par
exemple, la façade de droite tend vers du blanc, du blanc-jaune ou du blanc
cassé. On y retrouve aussi du jaune-orangé.
L’artiste a dû peindre avec d’autres couleurs, car on y constate des variations de
saturation.
Pour les arbres, la dominante est le jaune-orangé également. Pour le bas de
l’image, on retrouve de l’orange. Le ciel est, quant à lui, extrêmement désaturé.
Donc après cette analyse, nous pouvons élargir notre palette de teinte et aller un
peu vers la complémentaire analogue. Nous obtenons ainsi notre palette d’étude
pour cette image.
Maintenant que nous avons notre saturation et nos teintes, nous allons chercher
les valeurs des bâtiments. Je vous conseille alors de désaturer l’image avec un
calque de teinte/saturation.
Dès lors, vous allez copier cette image dans l’une des 4 vignettes: utilisez de gros
pinceaux pour faire rapidement les niveaux de gris.
En plissant les yeux, je couvre les grosses surfaces en priorité. Je n’utilise pas la
pipette, uniquement la perception.
Passons à une deuxième étude, en couleurs cette fois-ci, mais sans utiliser la
pipette de Photoshop.
Je commence par le ciel en posant du gris et du bleu désaturé. Si dans un
premier temps, cela semble ne rien donner, quand je vais poser les couleurs
complémentaires, le ciel devrait prendre tout son sens.
Je passe aux marrons, mais en allant un peu plus loin dans les valeurs. Le
résultat étant satisfaisant, je l’applique sur toute la zone concernée.
Sur votre étude, vous pourriez faire autre chose comme exagérer les couleurs, en
rajouter d’autres si vous souhaitez améliorer l’image… Cela ne pose aucun
problème et ça peut vous permettre de faire vos propres expériences.
Maintenant, place à la troisième vignette sur laquelle nous allons opter pour
d’autres couleurs (les rouges en l’occurrence). La construction restera similaire.
Les teintes vont être insolites ; le plus difficile est de trouver une harmonie entre
ces couleurs.
Mais même en changeant de couleur, la zone la plus chaude de l’image reste la
même d’une étude à l’autre.
Pour la dernière étude, nous allons passer à un autre masque tout en gardant en
mémoire la toute première vignette en noir et blanc. En effet, elle nous permet de
garder des valeurs les plus justes possible.
De plus, je vais utiliser un contraste de couleur avec complémentaire pour le
personnage d’avant plan (entre ombre et lumière) afin qu’il devienne un point
focal.
Cette fois-ci, je souhaite obtenir une lumière chaude et des ombres froides.
Donc pour avoir ces ombres froides, le ciel doit être froid également. Pour cela, je
vais puiser dans les couleurs les plus froides de mon masque (sans piocher dans
la complémentaire).
Je suis conscient que la tentation d’utiliser rapidement les couleurs sur des sujets
complexes est forte. Néanmoins, je ne peux que vous conseiller de rester sur des
schémas de couleurs simples et de ne pas faire compliqué. Vous pourriez vous
perdre et vous frustrer. Travaillez sur une ou deux complémentaires pour débuter.
Comme on a pu le voir dans les peintures de grands maîtres, le fond a une réelle
importance. Nous allons donc tenter de faire de même en silhouettant ce vase.
On va jouer sur les contrastes de teintes, de valeurs et de températures.
Le sommet du vase est d’un jaune-orangé assez saturé. Sa valeur est de 2.5 sur
10 environ. Donc on sélectionne la teinte complémentaire d’une valeur de 7.5 sur
10.
Pour la saturation, le jaune-orangé était de 70%. La complémentaire sera alors de
30%.
En matière de teinte, de saturation et de température, on obtient exactement
l’opposé de ce jaune-orangé.
Tout en restant au niveau de la partie supérieure du vase, je redescends
néanmoins un peu et je reprends la procédure précédente… Etc. Je vais
systématiquement à l’opposé de la saturation pour générer le fond.
Si le vase avait été complètement jaune, il aurait été possible de travailler avec sa
complémentaire.
Si l’on rajoute trop de couleurs comme juste avant, toutes les couleurs à l’intérieur
du vase ne seront pas forcément mises en valeur. C’est aussi une question de
goût et de perception.
Avec ce genre d’objet, mais aussi de manière plus générale, il faut faire des
essais, faire des comparaisons tout en restant simple dans votre approche, et ce
même si vous avez un bon niveau de dessin.
Faire des essais permet aussi de voir ce qui fonctionne par rapport à la
composition que vous voulez créer et à l’histoire que vous voulez raconter dans
votre illustration. Si tous les objets sont mis en valeur dans votre création, alors il
n’y aura plus de rareté.
Donc pour créer ce point focal, il faut jouer sur les contrastes qu’ils soient de
teintes, de saturation, de valeurs, peu importe, à condition que cela guide le
regard.
Si le résultat ne vous semble plus convaincant lorsque vous revenez 2 ou 3 jours
plus tard sur votre illustration, apportez-y des corrections, voire même,
recommencez. Afin d’éviter une frustration trop grande si vous deviez tout
reprendre, lancez-vous sur de petits formats. Cela vous évitera bien des
déconvenues.
De plus, il suffit de 3 couleurs par objet. En effet, rappelez-vous qu’il vous suffit
de 3 valeurs seulement pour vous permettre de marquer les 3 dimensions. Il ne
reste alors qu’à choisir une teinte et une saturation. Vous pourrez aussi marquer
la vibrance par les couleurs si vous le souhaitez.
Selon ce que vous êtes en train de peindre et si une mise en valeur n’est pas
judicieuse pour une partie de votre sujet, décontrastez cette partie en teinte, en
température, en valeur ou en saturation.
Penchons-nous rapidement sur l’ombre que j’ai entourée en jaune. Cette ombre
est créée par une source de lumière en haut à gauche et qui frappe cette sphère.
Cette ombre est remplie par toutes les autres sources de lumière colorée qui sont
projetées sur la sphère et sur le sol.
À partir de l’ombre d’occlusion, il y a aussi un phénomène de multiplication des
ombres. Elles vont toutes s’additionner. Il est possible de répliquer cela avec le
mode « produit » sur Photoshop.
Suite à cette addition de valeurs, celle qui est la plus forte se situe à la base de
la sphère.
Radiosité (FTC-06-02)
Abordons maintenant un de mes sujets de prédilection : la radiosité.
En peinture, la radiosité peut être quelque chose de prononcé, d’exagéré. C’est
le meilleur moyen pour peindre des couleurs non seulement réalistes, mais
également « propres », dont vous pouvez être fiers.
La scène ci-dessous est éclairée du dessus par une source de lumière primaire,
en intérieur.
On retrouve également des sources secondaires (c’est-à-dire une surface qui
reflète la lumière primaire).
Mais sur ces sphères, les couleurs vont se mélanger au fur et à mesure que l’on
se promène sur la forme.
Prenons celle du centre. Au sommet, le gris y est plus clair à cause de la lumière
directe. Puis si l’on se déplace vers sa partie gauche, on tend alors vers le vert,
puis vers un mélange bleu-vert et enfin vers le bleu.
Vous aussi, essayez d’isoler les couleurs et amusez-vous à créer des calques en
mode « produit » sur Photoshop. Dans ces calques, on pourra y faire des trous et
ainsi comparer les couleurs qui en ressortent.
Ici, le cas de figure est un peu différent, car les sphères sont plus brillantes, plus
réflectives.
Ainsi, on commence à voir apparaître des réflexions directes. En fonction du
placement de l’observateur, il y aura plus au moins de réflexions des murs, mais
aussi des sphères. Il n’y aura pas forcément plus de radiosité. Cette dernière
pourra être confondue avec la réflexion directe.
La radiosité est une réflexion diffuse, qui ne bouge pas avec la position de
l’observateur. La réflexion directe va, à l’inverse, bouger avec la position de la
caméra.
Sur l’illustration qui suit, on peut observer une réflexion de la sphère verte sur la
rouge. La lumière est un peu bloquée, mais non seulement on va retrouver de la
radiosité, mais aussi de la réflexion directe.
Il est délicat à ce stade de différencier la radiosité des réflexions directes, car ces
dernières ne sont pas très marquées. Lorsque c’est le cas, les transitions de
valeurs sont alors beaucoup plus tranchées.
J’ai ensuite demandé à Arthur de recréer un effet plastique mat. Les réflexions
directes accentuent encore plus la sensation de radiosité, bien que cela ne soit
pas le cas dans la réalité.
L’entachement des couleurs les unes dans les autres est bien plus fort, idem
pour l’entachement des valeurs.
Gardez en tête ce phénomène pour vos peintures, car cela va vous permettre de
ne plus peindre des ombres grisâtres et non entachées par la radiosité.
L’harmonie des couleurs n’est pas spécialement au rendez-vous, mais ce qui est
intéressant c’est que sa palette de couleurs est complètement déjantée.
Et comme je le disais juste avant, la radiosité est utilisée à outrance pour un
résultat concluant.
Vous remarquerez aussi que les valeurs sont justes. C’est véritablement avec ce
genre d’illustrations que l’on peut se rendre compte de la grande importance des
valeurs dans une œuvre.
Quand les valeurs sont correctes, il est rare de se tromper dans les couleurs.
Imaginez-vous avec une étude faite en noir et blanc. Vous aurez alors moins de
difficultés pour passer aux couleurs si vous avez anticipé avec les valeurs.
Regardez aussi comment les couleurs interagissent entre elles dans l’illustration
qui suit. L’harmonie ne se situe pas forcément dans les rapports de couleurs,
mais dans leur utilisation.
On retrouve les mêmes couleurs malgré que l’on soit davantage dans une
situation de triade tétrade complètement parsemée dans le cercle chromatique.
Il se dégage une harmonie de contraste et c’est ce qui est original dans l’œuvre
de cet artiste.
Zhang Bin utilise également les palettes restreintes. Il peut se limiter à plusieurs
couleurs analogues ou complémentaires, mais il reste quand même consistant
dans les valeurs.
Regardez comment la radiosité joue sur les teintes de peau, on s’en rend bien
compte par rapport à la tunique du personnage.
Une dernière illustration pour conclure ce chapitre. On voit que les valeurs sont
bonnes et que les couleurs sont complètement déjantées. Pourtant on s’y
retrouve quand même.
La couleur d’ambiance tourne plutôt autour des jaunes-orangés et autour de
l’orange pour le bas.
On peut remarquer aussi comment Zhang Bin joue avec les couleurs
complémentaires et les complémentaires analogues.
On se retrouve avec tout un panel de couleurs, mais en fin de compte, on a
quand même une consistance dans l’ensemble de l’œuvre.
Cela peut être considéré comme une harmonie. On ne peut pas affirmer qu’il
s’agit d’une harmonie de balance des blancs, car les couleurs ne sont pas
consistantes en elles-mêmes, mais grâce aux contrastes qu’il a souhaité mettre
en valeur et aux points focaux au niveau du visage notamment.
Les plus grands contrastes de saturation et de valeurs se situent au niveau du
visage, c’est un choix de Zhang Bin. Et à partir du moment où il y a une intention
artistique, on peut dire qu’il y a de la créativité et de la technicité.
Avant de vous laisser vous lancer dans des palettes créatives, je vous conseille
de travailler en niveaux de gris dans un premier temps.
Encore une fois, restez petit en matière de format. Le but est de donner une
impression générale.
Mais la vignette doit être lisible. En effet, au premier coup d’œil, on doit
comprendre de quoi il s’agit. Il est envisageable de mettre un ou deux effets de
matière pour favoriser la suggestion, mais pas plus.
Sur cette vignette, je suis parti de valeurs moyennes pour ensuite élargir un peu
plus.
Ce n’est qu’une fois vos aplats posés que vous pouvez détailler un petit peu et
ajouter des nuances à l’intérieur. Les contrastes doivent guider l’œil.
Vous pouvez aussi améliorer certains aspects de la photo originale, sans trop en
faire non plus. Vous n’êtes en rien obligés de faire une copie conforme, cela ne
vous apporterait rien, surtout si vous le faites sans réfléchir.
Ici comme modification, j’ai réduit l’amplitude du feuillage afin qu’il ne se
superpose pas avec la montagne en arrière-plan. J’ai également donné plus de
relief au premier plan.
En ce qui concerne ensuite les ombres portées, il faut savoir que, pour une même
source de lumière, les valeurs les composant ne seront jamais plus claires que
celles des parties au soleil (comme l’herbe par exemple ici).
Je passe un peu de temps sur le feuillage de l’arbre qui est un des points focaux.
Il doit contraster avec le ciel, en termes de lumière puis de couleurs et de
température.
Je tente ensuite d’être créatif dans les couleurs. Pour cela, je duplique la vignette
pour en faire 3 versions différentes. Encore une fois, avec l’outil numérique, cela
me permet de coloriser mes niveaux de gris plus facilement.
Les couleurs vont sembler un peu plates, mais on peut quand même s’amuser et
se donner des idées de rendus.
En règle générale, je détermine une couleur d’ambiance puis je joue avec les
contrastes de température. Puis, toujours avec cette couleur d’ambiance et la
couleur locale des éléments, il me sera possible de jouer et de remplir les ombres
portées et les ombres de formes avec la couleur d’ambiance. Je mixe le tout pour
que cela soit le plus harmonieux possible.
Donc, n’ayez pas peur de tenter, même si cela peut vous paraître laborieux. Cela
fait partie du processus d’apprentissage.
Une fois que vous avez fait une vignette-couleur qui vous convient, la palette va
pouvoir être complexifiée et vous pourrez faire vibrer les couleurs.
Pour la vibration, il faudra se concentrer sur la lumière d’ambiance. Par exemple
dans l’illustration ci-dessous, la couleur ambiante pourra être rajoutée dans les
ombres de forme et les ombres portées. Cette couleur ambiante est ici constituée
par le ciel, les nuages et les rayons lumineux rebondissant sur le sol pour revenir
sur le tronc d’arbre et les feuillages.
Vous pouvez prendre la couleur du soleil et travailler l’intérieur de ces ombres (ici
ombres portées de l’arbre) en les complexifiant, sans trop ajouter de valeur claire.
Cela va donc nécessiter de mélanger les couleurs.
Faites comme s’il y avait des formes à rehausser dans ces ombres pour donner
du relief. Si vous travaillez en peinture à l’huile et que celle-ci n’est pas sèche,
vous n’aurez qu’à rajouter de la couleur par-dessus.
Assez rapidement, l’impression de détails va se créer alors qu’il ne s’agit que de
quelques coups de pinceau.
Dans les grands aplats d’herbe, il faut également rajouter de la complexité sans
en faire un point focal pour autant. En numérique, on peut notamment utiliser des
pinceaux de type impressionniste, permettant d’ajouter plusieurs teintes. Pour le
ciel, je fais de même.
En traditionnel, il faudra mélanger plusieurs teintes comme le bleu et le vert (avec
un vert en faible quantité) en baissant plus ou moins les valeurs à chaque coup
de pinceau.
La radiosité va aussi jouer sur les ombres de formes. Le vert foncé du bas du
feuillage de l’arbre va se mélanger avec la lumière verte de l’herbe. Ainsi, sur ce
feuillage, on peut saturer ces zones foncées et les rendre plus claires.
Dans le feuillage, je rajoute aussi de la lumière. Cette dernière rebondit et sera de
teinte bleue, légèrement saturée.
Si je devais aller plus loin encore dans le travail de cette illustration, j’apporterais
encore des teintes différentes comme des jaunes plus saturés et des verts plus
foncés à certains endroits de l’herbe.
On pourrait aussi rajouter des jaunes-orangés. Cela ne posera pas de problème
si c’est fait avec parcimonie. Idem pour des gris colorés qui permettront à l’œil à
se reposer.
Je change aussi la lumière principale et je rajoute des valeurs froides.
Avec ces modifications, je perds en valeurs locales. Celle de l’arbre n’est plus
forcément verte.
Quelquefois, des ambiances colorées amènent à perdre complètement les
valeurs locales. Cela arrivera forcément en réalisant des essais, mais ce n’est pas
pour autant que le résultat ne sera pas satisfaisant.
Gardez cela dit en mémoire que les valeurs locales demeurent importantes pour
certaines scènes ; rappelez-vous la balance des blancs.
On peut aller loin dans les ambiances à condition de comprendre et de contrôler
ce que l’on fait. La chance ne suffit pas.
Osnat Tzadok a aussi tenté de faire vibrer les couleurs à chaque segment de la
toile
Ce travail d’abstraction se joue énormément dans les couleurs, mais aussi dans
les valeurs, car elles apportent de la consistance aux couleurs. Une couleur
peut vite devenir insipide, sans de bonnes valeurs.
C’est la variation entre les teintes, entre les températures qui va faire de cette
peinture une œuvre qui vibre. La saturation entre aussi en jeu évidemment.
L’outil digital vous aidera encore une fois à faire des essais de couleurs afin de
trouver lesquelles vibrent le mieux ensemble, pour faire des formes abstraites…
etc. Cela défoule un maximum et à moindres frais.
Aidez-vous en vous inspirant d’artistes
En allant sur Pinterest par exemple, tapez des mots comme « abstract painting »
et peut-être que vous tomberez sur des œuvres qui vont vous interpeller.
Cela peut vous suggérer des ambiances, des choses que vous avez vécues
par le passé. C’est aussi à cela que sert l’art abstrait.
Cet art apporte également des illustrations mi-figuratives, mi-abstraites.
Je vous encourage aussi à regarder le travail d’artistes comme Sergio Toppi,
grand Maître de l’encrage. Dans ses oeuvres, Il arrivait à combiner de manière
assez unique les couleurs, sans compter son travail d’encrage et de texture
(hachures, qualité de trait) avec la narration.
Ainsi, son travail était vraiment consistant et interpellait véritablement le
spectateur. Il était capable des mélanger formes abstraites globales et
figuratives. Artiste qui était vraiment capable de se laisser aller complètement et
surtout de se faire plaisir.
À titre personnel, la première fois que j’ai pu voir ses planches, j’ai été
impressionné par la combinaison entre le travail d’encrage, la narration, l’émotion,
l’abstraction, la suggestion. Plus que la technique, c’est ce délicat mélange qui
fait la qualité de son travail.
En effet, un artiste peut être techniquement très doué et dans le même temps,
ne pas savoir interpeller un public, car incapable de faire passer une émotion
dans son travail. Le public ne va alors pas s’interroger sur l’œuvre et ne rentrera
pas dans son monde.
Si une scène est esthétique, qu’elle suggère des choses et qu’elle laisse une
certaine liberté spirituelle à l’observateur, alors l’artiste est sur une bonne voie.
L’intention, l’idée et le symbole sont des pilliers qui ne seront jamais
remplaçables, que vous fassiez de la BD, de l’illustration ou de la peinture
abstraite.
Le fondement de la peinture abstraite est justement de donner une émotion à
travers les couleurs et les formes afin de parler à l’âme humaine.
Les couleurs n’ont pas besoin d’être saturées à outrance. Encore une fois, c’est le
rapport des couleurs entre elles qui donne un résultat accrocheur, ainsi que le
contexte.
Osnat Tzadok a choisi, pour son œuvre précédente, un fond blanc. Peut-être que
sur du gris, le résultat aurait été encore meilleur ou moins bon. Mais l’impression
aurait été différente. Cela va aussi dépendre de la nature et de la couleur du mur
sur lequel sera accroché ce genre de toile.
L’avantage d’une toile de ce type c’est d’être passe-partout, raison pour laquelle
elle a connu un réel succès.
Mais peu importe le style d’un artiste confirmé ou en herbe, l’art n’est jamais
parfait. Une œuvre est réalisée par une personne et c’est une tierce personne qui
ressent des émotions et l’analyse.
Le style d’une personne sera toujours apprécié quelque part (tout dépendra de
son exposition, de sa notoriété).
Tout est possible en couleur. Cela va dépendre de ce que vous souhaitez
exprimer. Mais il ne faut plus qu’elles vous effraient. Si vos valeurs de départ sont
correctes, vous ne pourrez pas vous tromper en matière de couleur.
Je vous conseille de vous constituer un dossier contenant vos 3 à 5 images
préférées parmi tout ce que vous avez pu voir jusqu’à maintenant. Et à partir de
ces images,, fixez-vous des objectifs comme « je veux arriver à produire des
couleurs du même type », « je veux que la narration de mes illustrations
ressemble à ça »…etc. En faisant cela, vous allez tendre vers ce que vous voulez
accomplir dans votre vie.
Maintenez à jour ce dossier au fur et à mesure que vos préférences évoluent
sans jamais conserver plus d’images qu’au départ.
Laissez-vous la liberté de faire ce que vous souhaitez avec les couleurs. Il ne
devra jamais y avoir de limite.
Et surtout, n’hésitez pas à ajouter votre touche personnelle. Évitez la copie pure
et dure, sauf éventuellement pour étudier les rapports de couleur dans une pièce
de Maître.
Mais si vous travaillez d’après référence, faites quelque chose de personnel et ne
copiez pas les couleurs. Je vous rappelle que les appareils photo et autres
photocopieurs travestissent la réalité.