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I-1 Q6
RR
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LE DOSSIER MÉDICAL,
l’information du malade, le secret médical
Dr Caroline Rey-Salmon, Dr Cyril Boraud
Unité médico-judiciaire, hôpital Armand-Trousseau, 75012 Paris, France
caroline.rey@htd.aphp.fr
Cas des mineurs et des majeurs sous tutelle Mineur et majeur sous tutelle
En dehors du cadre des soins confidentiels, les parents sont Le consentement du mineur ou du majeur sous tutelle doit être
destinataires de l’information concernant leur enfant. Il est précisé systématiquement recherché s’il est apte à exprimer sa volonté
que le mineur a le droit de recevoir lui-même une information et à participer à la décision.
adaptée à son degré de maturité.
Les droits des majeurs sous tutelle sont exercés par le tuteur. Dossier médical
Les intéressés ont le droit de recevoir eux-mêmes une informa-
tion adaptée à leurs facultés de discernement. Le dossier médical est le support de l’ensemble des informations
recueillies à l’occasion de la prise en charge du patient. Il permet
Exécution du devoir d’information le partage des informations entre les différents acteurs de soins.
La charge de la preuve de l’information incombe au médecin et
non au patient. La preuve peut résulter d’un ensemble de pré- Contenu
somptions et être rapportée par tout moyen. Les juges tiennent Un dossier médical est constitué pour chaque patient hospita-
compte des mentions dans le dossier médical (comptes rendus, lisé ou consultant dans un établissement de santé public ou
échanges de courriers…), du temps de réflexion laissé au patient, privé. Son contenu est précisé (CSP, art. R. 1112-2 à R. 1112-3).
du nombre d’entretiens avec le médecin… 1. Informations formalisées (consultations externes, accueil
aux urgences, admission, séjour hospitalier)
Consentement aux soins Ce sont :
– la fiche d’identification du patient comportant le cas échéant
Le devoir de respect de l’intégrité corporelle du patient a pour l’identité de la personne de confiance et celle de la personne à
corollaire l’obligation de rechercher son consentement préalable- prévenir ;
ment à la mise en œuvre des soins. – la lettre du médecin à l’origine de la consultation ou de l’admis-
sion ;
Caractères du consentement – les motifs d’hospitalisation ;
Il suppose une compréhension de la situation, des enjeux et de – la recherche d’antécédents et de facteurs de risque ;
la thérapeutique proposée et une autonomie dans la décision : – les conclusions de l’évaluation clinique initiale ;
– le consentement est libre : le patient peut refuser les soins et – le type de prise en charge prévue et les prescriptions effectuées
n’a pas à justifier les raisons de son refus ; à l’entrée ;
– le consentement est révocable à tout moment ; – la nature des soins dispensés et les prescriptions établies lors
– le consentement est éclairé : il fait suite à une information médi- de la consultation externe ou le passage aux urgences ;
cale complète ; – les informations relatives à la prise en charge en cours d’hospi-
– le consentement est exprès, c’est-à-dire explicite et spécifique talisation : état clinique, soins reçus, examens paracliniques,
pour chaque étape du traitement ou des investigations. notamment d’imagerie ;
– les informations sur la démarche médicale établie dans le res-
Actes soumis à un consentement écrit pect des règles du consentement aux soins ;
Ce sont : – les éléments d’information spécialisés lorsque la prise en
– l’interruption volontaire de grossesse ; charge l’exige : dossier anesthésique, compte rendu opéra-
– l’assistance médicale à la procréation ; toire, compte rendu d’accouchement, dossier transfusionnel,
– la recherche sur les embryons conçus in vitro ; fiche de traçabilité des médicaments dérivés du sang et éven-
– la stérilisation à visée contraceptive ; tuellement fiche d’incident transfusionnel et consentement
– la recherche biomédicale ; écrit du patient lors de situations particulières ;
– la recherche génétique ; – les éléments relatifs à la prescription médicale, à son exécution
– le prélèvement d’organes sur un majeur vivant en vue d’un don ; et aux examens complémentaires ;
– le prélèvement d’organes sur un mineur ou un majeur sous – le dossier de soins infirmiers ;
tutelle à des fins thérapeutiques ou scientifiques ; – les informations relatives aux soins dispensés par les autres
– le prélèvement de moelle osseuse sur un mineur. professionnels ;
– les correspondances échangées entre professionnels de santé.
Limites du consentement aux soins Chaque pièce du dossier est datée et comporte l’identité du
Si le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté (inconscient, patient (nom, prénom, date de naissance ou numéro d’identifica-
dément), aucune intervention ou investigation ne peut être faite, sauf tion) ainsi que l’identité du professionnel de santé. Les prescrip-
urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance dési- tions médicales sont horodatées et signées ; le nom du médecin
gnée par le patient, la famille ou un des proches n’ait été consultée. signataire doit être lisible. Les décisions thérapeutiques, et leurs
réflexion de 48 heures a été observé. Ce délai de communication Une fois ces conditions réunies, l’ayant droit a accès à l’en-
est porté à 2 mois lorsque les informations médicales datent de plus semble des informations formalisées. Le refus éventuel de com-
de 5 ans au moment où l’information médicale a été constituée. munication doit être motivé. Ce refus ne fait pas obstacle, le cas
2. Aux ayants droit échéant, à la délivrance d’un certificat médical, dès lors que
Le médecin s’assure : celui-ci ne comporte pas d’informations couvertes par le secret
– de l’absence d’opposition préalable du défunt ; médical.
– de l’identité du demandeur et de son statut d’ayant droit ; 3. Au patient hospitalisé sous contrainte
– de la justification de la demande d’accès afin de s’assurer Les patients hospitalisés en psychiatrie, y compris ceux ayant
qu’elle correspond à l’une des 3 situations prévues par le légis- été hospitalisés sans leur consentement, ont un accès direct
lateur : connaître les causes de la mort, défendre la mémoire du aux informations de santé recueillies dans le cadre de leur
défunt ou faire valoir leurs droits. hospitalisation.
QUESTION N° 3 QUESTION N° 7
Le patient, dans la crainte Malgré les soins et traitements
d’informations dissimulées, demande instaurés, le patient décède
l’accès à son dossier médical. Pouvez- quelques jours plus tard. Retrouvez toutes les réponses
vous vous y opposer ? Le défunt ayant contracté et les commentaires sur
une assurance-vie, son fils www.larevuedupraticien.fr
QUESTION N° 4 se présente à l’hôpital. Il souhaite onglet ECN
Si vous lui permettez l’accès, quels accéder au dossier médical. OK
conseils pouvez-vous donner ? Quelle doit être votre position ?
Dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation d’infor- 2. Personne de confiance
mations, le médecin n’encourt pas de sanctions au titre de la vio- « Toute personne majeure peut désigner une personne de
lation du secret professionnel. confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin trai-
1. Dérogations obligatoires tant et qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d’état
Ce sont : d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information nécessaire à
– la déclaration de naissance et celle de décès ; cette fin. Cette désignation est faite par écrit. Elle est révocable à
– la déclaration anonyme des maladies contagieuses (excepté tout moment. Si le malade le souhaite, la personne de confiance
celle de suspicion de maladie de Creutzfeldt-Jakob, qui est l’accompagne dans ses démarches et assiste aux entretiens
nominative) ; médicaux afin de l’aider dans ses décisions... » (CSP, art.
– le certificat de vaccinations obligatoires ; L.1111-6).
– la déclaration anonyme des maladies vénériennes ; 3. Autres professionnels participant aux soins du patient
– le certificat d’internement psychiatrique sous contrainte ; Le secret partagé est toléré dans le cadre d’une collaboration
– le signalement d’alcooliques présumés dangereux ; diagnostique ou thérapeutique concernant directement le patient.
– la mesure de protection juridique des incapables majeurs ; Il doit se limiter aux données médicales objectives nécessaires,
– les accidents du travail et les maladies professionnelles ; pertinentes et non excessives, chaque soignant restant tenu au
– les pensions civiles et militaires ; respect du secret professionnel.
– l’indemnisation des personnes contaminées par le VIH à 4. Médecins-conseils de la Sécurité sociale
l’occasion d’une transfusion ; Les médecins de la Sécurité sociale n’ont accès aux données
– la déclaration du dopage des sportifs ; de santé à caractère personnel que si elles sont strictement
– le certificat d’examen prénuptial ; nécessaires à l’exercice de leur mission, dans le respect du
– les certificats de santé de l’enfant (8 jours, 9 mois, 24 mois) ; secret médical.
– le certificat du médecin requis par l’autorité judiciaire et des Le patient peut s’opposer à la transmission des informations
médecins experts. au médecin-conseil, ce qui peut entraîner un refus de versement
2. Principales dérogations facultatives des prestations.
Ce sont : 5. Médecin du travail
– les mauvais traitements sur mineur de 15 ans ou sur personne Le médecin traitant ne peut communiquer des informations au
incapable de se protéger en raison de son âge ou de son état médecin du travail qu’avec l’accord de son patient et doit se limi-
physique ou psychique ; ter aux données médicales indispensables.
– les violences sexuelles présumées sur un adulte, avec l'accord 6. Médecin d’une compagnie d’assurances
de la victime ; Le médecin ne doit donner aucun renseignement à l’un de ses
– la dangerosité d’un patient détenteur d’une arme à feu ; confrères travaillant pour une compagnie d’assurances. En
– les mauvais traitements ou sévices infligés à une personne revanche, il peut délivrer un certificat médical au patient avec
privée de liberté, avec l’accord de la victime. la mention « remis en main propre » dont il fera l’usage qu’il
Le silence du médecin ne saurait justifier une attitude totale- souhaite.•
ment passive. Les dispositions de l’article 223-6 du code pénal
C. Rey-Salmon et C. Boraud déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts.
réprimant la non-assistance à personne en péril sont applicables
au médecin.
3. Le médecin cité en justice
Cité comme témoin, le médecin est tenu de comparaître et de
POUR EN SAVOIR
prêter serment. Il reste lié par le secret médical, hormis les cas Mathian A. Information, éducation thérapeutique et observance.
où la loi l’autorise à faire des révélations (mauvais traitements Rev Prat 2011;61(9):1265.
<http://www.larevuedupraticien.fr/search/apachesolr_search/information%20du
sur mineur…). %20malade?pagination=20&expression=1&tvid=0&taud=0&tphoto=0&tpdf=&t
Cette possibilité de témoigner est discrétionnaire. qui=&tarc=0>
Peyrebrune C, Génot-Pok I. Le secret médical pour le mineur.
Secret partagé Rev Prat 2009;59(10):1345-49.
1. Proches du patient Chabot JM. Les informations sur la qualité des soins et les patients.
Bien souvent, le patient souhaite que le médecin informe sa Rev Prat 2008;58(5):547-8.
<http://www.larevuedupraticien.fr/search/apachesolr_search/information%20du
famille sur son état de santé pour que celle-ci lui apporte aide et %20malade?pagination=20&expression=1&tvid=0&taud=0&tphoto=0&tpdf=&t
soutien. Mais le patient peut s’opposer à ce qu’un ou plusieurs qui=&tarc=0>
membres de sa famille soient avertis de son état. Le médecin doit Manaouil C, Jardé O, Fontaine MP. Dossier médical. Rev Prat Med Gen
suivre l’avis de son patient, y compris en cas d’aggravation et de 2007;762:277-82.
décès (le conjoint est considéré comme un proche).
a loi du 13 août 2004 relative à l’Assurance maladie a institué Parallèlement, dès 2004, un parcours de soins coordonné est
L le dispositif du médecin traitant, stipulant que : « Afin de favo-
riser la coordination des soins, tout assuré ou ayant droit âgé de
mis en place avec pour finalité d’améliorer l’accès aux soins et la
qualité des soins et de mieux utiliser les ressources. Le ticket
16 ans ou plus indique à son organisme gestionnaire de régime modérateur peut être majoré selon la modalité d’accès aux soins
de base d’Assurance maladie le nom du médecin traitant qu’il a ambulatoires choisie par le patient. Ce parcours prévoit, en effet,
choisi, avec l’accord de celui-ci. […]. Le médecin traitant choisi quatre types d’accès : accès coordonné, accès direct à certai-
peut être un généraliste ou un spécialiste. Il peut être un médecin nes spécialités (gynécologie, ophtalmologie, psychiatrie) sous
hospitalier… » (art. L. 162-5-3 du code de Sécurité sociale). Les condition, accès direct dérogatoire (urgence…) et accès libre
médecins d’une même spécialité exerçant au sein d’un même non coordonné (figure).
cabinet médical peuvent être conjointement désignés comme Dans ce dernier cas, le patient supporte un ticket modérateur
médecins traitants par le même patient. majoré (70 %).
ACCÈS
LIBRE TOUT MÉDECIN
}
PATIENT
Gynécologie
ACCÈS Pour certaines situations SOINS
DIRECT Ophtalmologie ITÉRATIFS
précisées par la convention
Psychiatrie
ALD
SPÉCIALISTES autres
affections
ACCÈS
ITÉRATIFS
ACCÈS
COORDONNÉ MÉDECIN TRAITANT HOSPITALIERS SANS
PASSER
PAR LE
MÉDECIN
TRAITANT
GÉNÉRALISTES
FIGURE Schéma du parcours de soins coordonnés. (art. L. 162-5-3, R. 322-1 et D. 162-1-6 du code de la Sécurité sociale). Convention nationale des médecins
généralistes et spécialistes du 3 février 2005 ; dispositions reconduites par le règlement arbitral du 3 mai 2010.
Diabète* ❚ Nombre de patients diabétiques MT ayant eu un fond d’œil par an/nombre de patients diabétiques MT 65 %
* Indicateur n° 2 pour cette affection. MT : ayant choisi le praticien comme médecin traitant.
Le pivot de l’accès coordonné est le médecin traitant que entre autres, sur la prescription, la participation à des actions de
chaque assuré ou bénéficiaire de plus de 16 ans a choisi et dépistage et de prévention, à des actions destinées à favoriser la
déclaré à l’Assurance maladie. Le médecin traitant assure les continuité et la coordination des soins ou à des actions d’amélio-
soins de premier recours et la permanence des soins, il oriente et ration des pratiques. Ce contrat propose des contreparties finan-
suit son patient dans le parcours de soins coordonné. Il met à cières liées à l’atteinte d’objectifs.
jour régulièrement un dossier de suivi, assure les soins préventifs Ainsi, la Caisse nationale d’Assurance maladie des travailleurs
et l’éducation thérapeutique. Les médecins spécialistes libéraux salariés a lancé en 2009 un contrat d’amélioration des pratiques
ou hospitaliers auxquels le médecin traitant adresse ses patients individuelles (CAPI) destiné aux médecins traitants. Ce pro-
assurent un retour d’information vers le médecin traitant. gramme a pour objectif de promouvoir des actions de prévention
Le médecin traitant a un rôle essentiel dans le suivi de ses et le suivi d’affections chroniques et de favoriser l’optimisation
patients atteints d’une affection de longue durée ouvrant droit à des prescriptions médicales. Respectueux de la liberté d’adhé-
exonération du ticket modérateur (ALD 30). Il établit, en concer- sion et de résiliation du médecin, ce programme revêt la forme
tation avec les différents spécialistes impliqués dans le traite- d’un contrat entre le médecin et la caisse primaire d’Assurance
ment, le protocole de soins où sont portés les éléments de dia- maladie de son lieu d’exercice.
gnostic, les traitements prescrits, les consultations spécialisées Par ce contrat, conclu pour 3 ans, le médecin s’engage à
ou les examens paracliniques indispensables à la prise en charge conforter son action de promotion de la prévention auprès de
du patient. Le médecin traitant perçoit de l’Assurance maladie, ses patients (vaccination contre la grippe, dépistage du cancer
au titre de ce suivi, un forfait annuel de 40 euros par patient. du sein, iatrogénie médicamenteuse), à améliorer la prise en
La loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative charge de ses patients atteints de maladies chroniques (hyper-
aux patients, à la santé et aux territoires a consacré la notion de tension artérielle, diabète) et à établir des prescriptions moins
médecine de premier recours et défini les missions du médecin onéreuses à efficacité et sécurité comparables. Pour chaque
généraliste comme acteur de ce premier recours (art. L. 4130-1 thème sont définis au préalable des indicateurs et un objectif
du code de la santé publique). Les missions de ce médecin cible.
reprennent très largement celles du médecin traitant. Ainsi, le L’Assurance maladie s’engage de son côté à fournir au méde-
médecin généraliste doit «… contribuer à l’offre de soins ambula- cin les données nécessaires au suivi de son contrat et à lui verser
toire, en assurant pour ses patients la prévention, le dépistage, le une contrepartie financière annuelle tenant compte de la pro-
diagnostic, le traitement et le suivi des maladies ainsi que l’édu- gression et de l’atteinte des objectifs du contrat.
cation pour la santé…». Il doit orienter ses patients dans le sys- Début 2011, 15 110 médecins généralistes ont signé un contrat
tème de soins, assurer la coordination des soins, promouvoir les d’amélioration des pratiques individuelles.
actions de prévention et de dépistage et s’assurer de la bonne La mise en place du dispositif du médecin traitant et de l’accès
observance des protocoles de soins pour ses patients porteurs coordonné garantit aux patients des soins de qualité et des tarifs
d’une ALD. La loi enjoint aussi au médecin de premier recours de opposables. L’attribution d’une liste de patients à chaque méde-
participer à la mission de service public de la permanence des cin traitant lui permet de compléter sa rémunération à l’acte avec
soins et lui demande de contribuer à la formation des étudiants une part forfaitaire (suivi des patients en affection de longue
en médecine. durée), voire avec une rémunération subordonnée à l’atteinte
La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2008 a introduit d’objectifs sur sa patientèle (CAPI).•
la possibilité pour les organismes locaux d’Assurance maladie de
proposer aux médecins de souscrire un contrat comportant des
engagements individualisés. Ces engagements peuvent porter, J.P. Prieur, C. Cherrier et H. Allemand déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts.