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Mise à jour octobre 2012.

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RR
Cette question a fait l’objet d’une actualisation complète.

ÉTHIQUE ET DÉONTOLOGIE
MÉDICALE
Droit du malade ; problèmes liés au diagnostic,
au respect de la personne et à la mort
Dr Anne-Marie Duguet, Dr Pierre-André Delpla
Médecine légale et droit de la santé. Faculté de médecine Toulouse-III, 31000 Toulouse, France
aduguet@club-internet.fr

logie, décret en Conseil d’État signé du Premier ministre, dont


OBJECTIFS

EXPLIQUER les principes


notre code actuel, paru en 1995, est la quatrième version. La
de la déontologie médicale. déontologie s’entend étymologiquement comme un discours sur
EXPLIQUER les principes les devoirs, servant de référence aux instances juridictionnelles
de l’Ordre des médecins mais d’abord et avant tout de guide aux
d’une réflexion éthique médecins dans leur pratique quotidienne, au service des patients.
dans les décisions difficiles.
Des grands principes éthiques s’inscrivant
dans le cadre de la loi
humanité se construit pas à pas, mais la démarche L’éthique médicale

L’ épistémologique nous impose des repères. L’histoire


de la médecine ne fait pas exception en la matière.
Ainsi est-il communément admis que celle-ci s’enracine au
L’éthique est une réflexion sur l’action des hommes ; leurs actes,
attitudes, manières d’agir et d’être, qu’elle cherche à évaluer. Le
mot vient du grec ethos qui signifie comportement, mœurs, et
Ve siècle avant J.-C. dans la morale hippocratique, elle-même correspond au latin mor, mores, lequel a donné « morale » en
nourrie de l’ébullition intellectuelle, scientifique et artistique du français, qui peut donc étymologiquement s’employer en syno-
siècle de Périclès et en quelque sorte héritière de la sagesse nymie. Du point de vue philologique et de l’usage, cependant,
socratique et de la philosophie de son génial disciple, l’incontour- l’éthique a une acception plus concrète et moins dogmatique,
nable Platon. certains l’assimilant à une « morale situationnelle ou appliquée »
Si la médecine s’est donc émancipée – de la religion et du ou encore à une « morale en mouvement ». L’éthique est avant
sacré – avec Hippocrate et ses émules de l’école de Cos, elle tout un questionnement, une démarche visant à privilégier non
ne prend réellement son autonomie, en Occident du moins, pas un meilleur absolu – c’est l’idéal de la morale – mais un com-
qu’après une longue transition de plus de vingt siècles, marquée promis respectueux, autant que possible, des grands principes
par les empreintes successives et intriquées de la tradition galé- civilisationnels, et acceptable par le plus grand nombre. Ce n’est
nique, de la mainmise de l’Église et de l’obscurantisme qui en donc pas un système de règles normatives, c’est une réflexion
découla, jusqu’aux (re)découvertes de la Renaissance. Faisant rationnelle sur les situations qui suscitent des conflits de valeurs.
d’abord table rase du passé, la Révolution française accouche, L’éthique médicale est donc une réflexion sur l’acte de soigner et
avec le Premier Empire, du code pénal de 1810 qui consacre le sur la personne malade. Dans cette optique, elle nous interroge
secret médical et en fait un principe éthique inaliénable, inscrit sur le possible, le souhaitable et l’interdit. Elle nous incite à faire
désormais sous la bannière plus générale du secret profession- des choix, à prioriser les principes supérieurs qui les sous-tendent.
nel dans l’article 226-13 de notre code pénal actuel. Autrement dit, elle pose des questions : doit-on pratiquer un acte
En 1825, année de la parution en français de l’ouvrage du philo- parce que c’est possible, jusqu’où peut-on aller, qui doit décider
sophe utilitariste anglais Jeremy Bentham1, se profilait déjà ce qui
allait devenir la déontologie médicale, même s’il fallut attendre la
1. Essai sur la nomenclature et la classification des principales branches
Seconde Guerre mondiale pour que l’Ordre des médecins vît le de l’art et de la science, dans lequel on peut lire : « L’éthique a reçu le nom
jour et 1946 pour que fût promulgué le premier code de déonto- plus expressif de déontologie ».

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et sur quels critères ? L’éthique médicale suscite donc à la fois la morale ; elle correspond, selon lui, à l’immixtion du premier,
une délibération au sein du groupe social et un discernement l’ordre juridico-politique, dans le second, celui précisément de
personnel. La réflexion éthique est donc nécessairement pluri- l’éthique.
disciplinaire, elle doit aboutir à un consensus sur une hiérarchie Élaboré par les médecins eux-mêmes – représentés en l’oc-
commune de valeurs. currence par l’Ordre national des médecins (Cnom) – sous le
Elle s’appuie sur des textes devenus des références internatio- contrôle étroit du Conseil d’État et du gouvernement, chargés
nalement reconnues : de vérifier sa conformité avec les lois, le code de déontologie
– le serment d’Hippocrate, qui s’attache notamment à respecter médicale (CDM), promulgué sous forme de décret en Conseil
le patient, sa famille et son intimité, par le caractère absolu et d’État, est inséré dans le code de la santé publique. Il précise
intangible du secret médical (devenu à la fois une obligation ainsi les dispositions réglementaires concernant l’exercice pro-
déontologique et légale) ; fessionnel.
– le code de Nuremberg (1947), issu des procès du même nom – La déontologie est donc constituée par l’ensemble des règles
incluant celui des médecins nazis par un tribunal militaire inter- et des devoirs d’une profession. Le code de déontologie énu-
national – qui édicte pour la première fois dans l’histoire des mère les devoirs généraux des médecins, les devoirs du méde-
règles applicables à tous pour les expérimentations sur cin envers les patients, les rapports que doivent entretenir les
l’homme, qui seront reprises dans tous les textes postérieurs ; médecins entre eux et avec les autres professions de santé,
– des textes élaborés par l’Association médicale mondiale ainsi que les dispositions particulières réglant l’exercice de la
comme la déclaration d’Helsinski en 1964 (amendée à plu- profession.
sieurs reprises jusqu’en 20082) ou la Déclaration sur les droits Au-delà de l’exigence Hippocratique de confidentialité et de
des patients (Lisbonne 1981), ou la Convention pour la protec- probité4 (art. 3 et 4 du code de déontologie médicale), les obliga-
tion des droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à tions d’information – loyale, claire et appropriée – et de recueil
l’égard des applications de la biologie et de la médecine, dite d’un consentement – libre et éclairé – aux soins (art. 37 et 38 du
Convention d’Oviedo3. code de déontologie médicale), désormais considérées comme
Dans tous ces textes, on retrouve les principes essentiels qui des droits fondamentaux des malades (cf. loi Kouchner du 4
sont le respect de la dignité de la personne et l’autonomie. Cela mars 2002), sont désormais au centre de la relation médecin-
implique que tout acte médical soit pratiqué avec le consente- patient, dans un souci de plus en plus prégnant de respect de
ment libre et éclairé de la personne. C’est le consentement qui l’autonomie de la personne, venant primer en quelque sorte le
donne son sens à l’acte médical : on ne pratique pas un soin traditionnel principe de bienfaisance ou de non-malfaisance (pri-
parce que c’est possible mais parce que c’est souhaitable et que mum non nocere) longtemps privilégié par une médecine pater-
le patient y consent. Aucun acte médical (de traitement ou d’ex- naliste aujourd’hui révolue.
ploration) ne peut donc être entrepris sans le consentement du Parallèlement, l’exercice médical est devenu de plus en plus
patient. Le patient donne son consentement après avoir reçu technique et repose désormais sur un savoir exponentiel auquel
une information claire, adaptée et loyale. le praticien doit pourtant se référer – d’où l’importance de la for-
Le consentement est oral, sauf pour les cas d’assistance médi- mation médicale continue et de l’évaluation des pratiques profes-
cale à la procréation, de transplantation d’organes, d’interruption sionnelles – s’il veut continuer à délivrer des « soins consciencieux,
de grossesse, pour les recherches génétiques et pour la recherche dévoués et fondés sur les données acquises de la science... »
biomédicale (loi Huriet-Sérusclat de 1988). (article 32 du code de déontologie médicale).
L’acte thérapeutique relève donc d’abord des sciences biolo-
De l’éthique à la déontologie giques et médicales – les savoirs – avant d’être guidé par le
Ainsi d’abord constituée au niveau interpersonnel de ce que savoir-faire du praticien et de trouver toute sa force symbolique
l’on peut appeler « pacte de soins », l’éthique médicale se et sa portée relationnelle dans le savoir-être de ce dernier, don-
place, finalement, sous des normes qui l’élèvent au rang d’une nant à l’art médical ses réelles lettres de noblesse.
déontologie. En se référant, dans la tradition spinozienne, à la
distinction des ordres, le philosophe contemporain André Des enjeux individuels et collectifs
Comte-Sponville situe la déontologie à l’interface du droit et de Mais si les avancées récentes de l’art sont dues au progrès
scientifique – dont le mobile premier n’est pas la compassion
ou la sollicitude (alléger la souffrance) mais la curiosité et la maî-
2. 59e Assemblée de l’Association médicale mondiale, Séoul, octobre 2009. trise (connaître mieux l’organisme humain) –, le péril est alors
3. 4 avril 1997, STE n° 164 http://conventions.coe.int/Treaty/fr/Treaties/Html/164.htm que le centre de gravité de la logique médicale se déplace du
4. « Admis dans l’intérieur des maisons, mes yeux ne verront pas ce qui s’y passe,
savoir-faire et du savoir-être vers le savoir, du soin de la per-
ma langue taira les secrets qui me seront confiés et mon état ne servira pas à cor-
rompre les mœurs ni à favoriser le crime… » (serment d’Hippocrate, dit de Montpellier, sonne – en empathie avec elle – vers la gestion plus ou moins
adopté par le Cnom le 25 juin 1976). raisonnée de l’objet de laboratoire, en quelque sorte déshuma-

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Chaque accident de santé individuel constitue un risque pour
Éthique et déontologie médicale : droit du malade ; problèmes liés la population entière. Une politique de santé a pour premier
au diagnostic, au respect de la personne et à la mort
impératif de décider de quelle manière ce risque peut et doit être
partagé. Sur ce plan aussi, par conséquent, le fléau de la balance
POINTS FORTS À RETENIR
peut incliner du côté du concept et de la pratique de la santé
Les notions de morale, d’éthique et de déontologie sont publique, aux dépens du souci des personnes singulières,
définies et différenciées. insubstituables, irremplaçables. C’est faire œuvre de justice que
de « rendre justice » au concept premier de sollicitude pour la
Les grands principes éthiques et déontologiques qui souffrance, ultime vis-à-vis de l’acte médical. « Si l’éthique des
gouvernent l’exercice médical sont le respect de la personne, sciences de la vie et de la santé vise à préserver la personne
de son autonomie et de sa dignité dans la relation médecin- humaine dans sa dignité mais également dans le sens transcen-
malade. L’acte de soins s’inscrit dans le cadre collectif de la dant de son existence, encore est-il indispensable qu’elle main-
santé publique (enjeux scientifiques et socio-économiques). tienne vive et constante l’exigence de relation, de rencontre avec
La loi du 4 mars 2002 (dite loi Kouchner) complète l’autre. Un rapport de priorité, d’intériorité, d’intimité qui s’ex-
les devoirs du médecin en précisant les droits des malades : prime en termes de responsabilité partagée. »6
droit à l’information, participation du patient à la décision,
autonomie sociale du mineur. Le patient peut désigner Les droits du malade sont définis par la loi
une personne de confiance qui sera consultée quand
il ne pourra pas exprimer sa volonté. Le patient bénéficie En 1994, la loi relative au respect du corps humain7 proclame
désormais d’un accès direct à son dossier médical. l’inviolabilité du corps humain et la non-patrimonialité de ses élé-
ments et produits, ce qui garantit la gratuité des dons d’organes
Pour la fin de vie, en complément de la déontologie,
ou de tissus et intègre ces dispositions dans le code civil.
la loi sur les soins palliatifs permet au patient de refuser
Par la suite, la loi du 4 mars 2002 8 relative aux droits des
certains soins qui pourraient constituer une obstination
malades et à la qualité du système de santé a consacré un droit
déraisonnable, et la loi Leonetti sur les soins en fin de vie
fondamental à la protection de la santé garantissant l’égal
permet de respecter le choix du patient d’interrompre
accès de chaque personne aux soins nécessités par son état
ou de prolonger les soins. Lorsque ce dernier est hors d’état
(art. L. 1110-1). Cette loi transpose les devoirs des médecins
d’exprimer sa volonté, l’arrêt du traitement est possible après
définis par le code de déontologie en droits pour les patients, tout
la mise en œuvre d’une procédure collégiale.
en leur reconnaissant de nouveaux droits tels que le respect de
sa dignité9, l’absence de discrimination dans l’accès à la pré-
vention ou aux soins en raison du patrimoine génétique 10 , la
meilleure sécurité sanitaire possible11, le respect de la vie privée
nisé. Le second écueil n’est plus à un dévoiement du « colloque et du secret des informations12, la balance bénéfices-risques et
singulier » (l’expression est de Georges Duhamel, écrivain et le soulagement de la douleur13, le libre choix du praticien et de
médecin, en 1935) mais à sa nécessaire inscription dans un l’établissement de santé14.
cadre collectif, celui d’une société à laquelle les médecins – et De plus, la loi offre une protection accrue en raison de leur
les patients dans une moindre mesure – ont des comptes à ren- vulnérabilité à certaines personnes qui se prêtent à la recherche
dre. Car si la souffrance est privée, tout comme la demande de biomédicale, le législateur a prévu une protection particulière
soins et le désir de guérison, les maladies sont aussi des pour les personnes inaptes à consentir15, les personnes séjour-
affaires publiques. En tant que phénomène statistique, elles nant en institution ou celles privées de liberté16.
conditionnent le niveau de santé d’une population entière et
intéressent les pouvoirs publics, ne serait-ce que par leur
impact économique et leur coût financier. Ainsi abordée, la 5. « Le médecin, au service de l’individu et de la santé publique, exerce sa mission
« santé publique » devient affaire politique et citoyenne, sous- dans le respect de la vie humaine, de la personne et de sa dignité... »
6. Hirsch E. Médecine et éthique : le devoir d’humanité. Paris : Cerf, 1996:11-25.
tendue par une autre exigence éthique, celle de partager les 7. Loi 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain.
risques, au nom de la solidarité. 8. Loi 2002-303 du 4 mars 2002 dite « loi Kouchner ».
Pour revenir au médecin, le voici donc confronté – au risque 9. Art. L. 1110-1-2.
10. Art. L. 1110-3.
d’être parfois écartelé – à deux requêtes, potentiellement conflic- 11. Art. L. 1110-5.
tuelles, que le code de déontologie médicale lui-même juxta- 12. Art. L. 1110-4.
pose, dans un ordre qui n’est sans doute pas indifférent, dans 13. Art. L. 1110-5.
14. Art. L. 1110-8 et L.-1110-9.
son article 25 qui inaugure le titre I des « Devoirs généraux des 15. Art. L. 1122-2.
médecins » et symboliquement le code lui-même. 16. Art. L. 1121-6.

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Le titre II de la loi du 4 mars 2002 concerne la démocratie sani- prévisibles qu’ils comportent ainsi que les autres solutions
taire et le chapitre II porte sur les droits et les responsabilités des possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus.
usagers. Le législateur a voulu impliquer le malade dans les choix L’information est délivrée lors d’un entretien individuel. La
le concernant, c’est pourquoi le terme de responsabilité est men- volonté d’une personne d’être tenue dans l’ignorance d’un diag-
tionné. Cependant, la lecture attentive des dispositions n’évoque nostic ou d’un pronostic grave doit être respectée sauf lorsque
que faiblement ces obligations. des tiers sont exposés à un risque de contamination.
L’information du patient sur son état de santé est élargie, elle
Principaux droits consacrés par la loi du 4 mars 2002 porte également sur le coût des soins afin de faciliter sa partici-
1. Le droit à l’information pation à la décision. Un délai de réflexion, et la consultation
Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé d’un tiers sont possibles avant que le patient puisse prendre sa
(art. L. 1111-2 du code de santé publique). Cette information décision.
porte sur les investigations, traitements ou actions de prévention Le malade est impliqué dans la prise de décision, c’est unique-
qui lui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs ment dans cette disposition que l’on trouve un devoir pour les
conséquences, les risques fréquents ou graves normalement malades. « La personne prend avec le professionnel de santé,

Qu’est-ce qui peut tomber à l’examen ?


CAS CLINIQUE Qui décide des soins palliatifs :
Une personne âgée de 88 ans est hospitalisée dans un service d’urgence à la suite la personne de confiance, la fille
d’une chute dans son appartement où elle vivait seule. Elle bénéficiait d’aides ou le médecin ?
à domicile (repas, aide ménagère, soins d’hygiène), et sa fille, résidant à 100 km
de son domicile, prenait régulièrement de ses nouvelles. Le bilan réalisé au QUESTION N° 6
service des urgences ne montre aucune lésion osseuse, et la patiente, qui dispose La fille souhaite rester auprès
de sa capacité de discernement, accepte d’être transférée dans un service de de sa mère et demande à son
gériatrie pour l’évaluation de sa situation médico-sociale et l’organisation de son employeur un congé de trois
retour à domicile. Lors de l’admission à l’hôpital, l’aide ménagère a été désignée semaines. Son patron a-t-il le droit
par écrit comme personne de confiance. de refuser ?

QUESTION N° 1 comprendre les questions qui lui sont QUESTION N° 7


Compte tenu de son âge, la patiente posées et son état s’altère très Au terme de quinze jours, sans
était-elle en état de désigner une rapidement. aucune amélioration, la fille demande
personne de confiance ? Précisez Comment la décision médicale pour la à l’équipe soignante de prendre
le rôle de la personne de confiance. poursuite des soins peut-elle être la décision d’interrompre les
influencée par les informations données traitements pour ne pas prolonger
QUESTION N° 2 par la personne de confiance ? exagérément cette survie
Le médecin doit-il prendre en compte qui lui paraît artificielle.
les informations de la personne de QUESTION N° 4 Que prévoit la loi Leonetti dans
confiance ou préférer suivre les décisions La personne de confiance peut-elle ces circonstances ?
de la fille de la patiente, concernant s’opposer aux soins ?
les modalités de sa sortie future
(domicile ou établissement spécialisé) ? QUESTION N° 5 Retrouvez toutes les réponses
L’équipe médicale informe la personne et les commentaires sur
QUESTION N° 3 de confiance et la fille de la patiente www.larevuedupraticien.fr
Dans le service de gériatrie, la patiente que les jours de cette dernière sont onglet ECN
fait brutalement une série d’accidents comptés, et qu’une équipe de soins OK
vasculaires et n’est plus en mesure de palliatifs va la prendre en charge.

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compte tenu des informations et des préconisations qu’il fournit,
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l’arabe et le chinois, ainsi qu’en braille. Elle est affichée dans les
les décisions concernant sa santé » (art. L. 1111-4 du code de établissements de soins et remise au patient lors de son hospita-
santé publique). L’expérience montre que depuis 2002 ce droit est lisation avec le livret d’accueil.
très rarement exercé, le consentement se faisant davantage sur le 6. L’accès direct au dossier médical
mode de la confiance vers le choix proposé par le médecin. La loi donne un accès direct à l’ensemble des informations
2. L’information et les soins aux mineurs détenues par des professionnels de santé. Il s’agit des informa-
Les mineurs ont le droit de recevoir eux-mêmes une informa- tions formalisées qui ont contribué à l’élaboration et au suivi du
tion et de participer à la prise de décision les concernant d’une diagnostic et du traitement, des échanges écrits entre profes-
manière adaptée à leur degré de maturité (art. L. 1111-2 du code sionnels de santé (à l’exception des informations mentionnant
de santé publique). qu’elles ont été recueillies auprès de tiers n’intervenant pas dans
Le législateur a même introduit une dérogation à l’article 371-2 la prise en charge thérapeutique). L’accès au dossier peut se
du code civil, qui dispense le médecin d’obtenir le consentement faire directement ou par l’intermédiaire d’un médecin. La pré-
du titulaire de l’autorité parentale dans le cas où le mineur s’op- sence d’une tierce personne peut être recommandée par le
pose à la consultation du titulaire afin de garder le secret sur son médecin lors de la consultation.
état de santé (art. L. 1111-5 du code de santé publique). Pour Pour les mineurs, l’accès au dossier est exercé par le titulaire
l’aider dans ses décisions, le mineur peut se faire accompagner de l’autorité parentale. À la demande du mineur, cet accès a lieu
par une personne majeure de son choix. par l’intermédiaire d’un médecin (art. L. 1111-5).
Une autonomie « sociale » est même reconnue au mineur dans Après le décès du patient, les ayants droit ont accès (art. L. 1111-7)
certains cas : lorsqu’une personne mineure dont les liens de aux informations nécessaires pour connaître les causes de la mort,
famille sont rompus bénéficie à titre personnel de la couverture pour défendre la mémoire du défunt ou faire valoir leurs droits.
maladie universelle (CMU), son seul consentement est requis. En Toutes ces dispositions visent à renforcer l’autonomie du sujet
toutes circonstances, le consentement du mineur doit être systé- et ébranlent l’image paternaliste de la relation médecin-malade.
matiquement recherché s’il est apte à exprimer sa volonté et à
participer à la décision (art. L. 1111-6). Respect de la personne et la fin de vie
3. Le respect des personnes vulnérables et de leur dignité Les progrès thérapeutiques et de diagnostic ainsi que l’allon-
Certains êtres humains sont plus vulnérables et appellent une gement de l’espérance de vie repoussent les limites de la survie
protection particulière de la part des parents, des médecins, de des patients et posent la question de la limitation technique des
la société. Leur volonté doit être respectée quand elle peut s’ex- soins.
primer. Le médecin garantit le respect de tous les êtres humains 1. Le refus de l’obstination déraisonnable, les soins palliatifs
(personnes) et assurer la protection de leur santé et de leurs Le code de déontologie prescrit des obligations dans deux
droits. Lorsque la personne est hors d’état d’exprimer sa situations de fin de vie : il condamne l’obstination déraisonnable
volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réali- dans les investigations ou la thérapeutique (art. 37) et interdit de
sée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de provoquer délibérément la mort (art. 38). Cependant, il recom-
confiance, ou la famille ou à défaut un des proches, aient été mande l’accès aux soins palliatifs, qui sont mis en œuvre quand
consultés. les soins à finalité curative s’avèrent illusoires.
4. La personne de confiance La loi de juin 1999 sur l’accès aux soins palliatifs20 autorise pour
La désignation d’une personne de confiance 17 , qui sera la première fois le patient à refuser les soins curatifs. Elle définit
consultée si le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté, est les soins palliatifs21 comme des soins actifs et continus dispen-
une nouvelle disposition très intéressante. C’est un parent, un sés par une équipe multidisciplinaire. Ils visent à soulager la dou-
proche, ou le médecin traitant. La personne est désignée par leur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité
écrit, et révocable à tout moment. Lors de toute hospitalisation de la personne malade et à soutenir son entourage. La loi prévoit
dans un établissement de santé, il est proposé au malade de que des bénévoles puissent faire l’accompagnement de fin de
désigner une personne de confiance. Cette mesure prend du vie22, et offre la possibilité qu’un membre de la famille de la per-
temps à se mettre en place dans les faits. sonne en fin de vie puisse bénéficier d’un congé d’accompagne-
5. Les relations avec les usagers des établissements de soins ment d’une durée maximale de trois mois.
Le législateur a instauré une commission des relations avec les
usagers18 (art. 16 de la loi) qui veille au respect des droits des
usagers. Elle facilite les démarches de ces derniers pour qu’elles 17. Art. L.1111-6.
puissent exprimer leurs griefs auprès des responsables. 18. Art. L. 1112-3 du code de santé publique.
Les établissements de soins sont tenus de diffuser un docu- 19. Ordonnance du 24 avril 1996, art 1; et circulaire du 2 mars 2006.
20. Loi 99-477 du 9 juin 1999 visant à garantir le droit à l’accès aux soins palliatifs.
ment pour informer les patients de leurs droits : la charte du 21. Art. L. 1110-10 du code de Santé publique.
patient hospitalisé19. Elle est disponible en sept langues dont 22. Art. L. 1110-11.

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Pour le refus de soins, la loi du 4 mars 2002 va plus loin, le préalable soit mise en œuvre lorsque le patient est hors d’état
patient a désormais le droit de refuser des soins quelles que d’exprimer sa volonté. Le médecin peut limiter ou arrêter les trai-
soient les circonstances. Ce refus doit être éclairé, c’est-à-dire tements dispensés après concertation avec l’équipe de soins et
que le patient est informé des conséquences de son choix. La sur l’avis motivé d’au moins un médecin appelé en qualité de
décision du malade est inscrite dans le dossier médical23. consultant. Il ne doit exister aucun lien de nature hiérarchique
Une limite persiste : c’est la mise en danger de la vie du patient, entre le médecin en charge du patient et le consultant. Un avis
certains médecins se refusant à laisser mourir leur patient. La loi motivé d’un autre consultant peut être demandé si l’un des deux
de 2005 dite Leonetti sur les soins en fin de vie24 permet de res- médecins l’estime utile. La décision prend en compte les direc-
pecter le souhait du malade de s’opposer à toute réanimation. Le tives anticipées du patient, si elles existent, l’avis de la personne
patient peut même faire valoir ses choix par l’expression de direc- de confiance si elle a été désignée, ainsi que celui de la famille ou
tives anticipées25 pour le cas où il serait un jour hors d’état d’expri- à défaut de l’un de ses proches. La décision est motivée et ins-
mer sa volonté. Ces directives indiquent les souhaits de la per- crite dans le dossier du patient. •
sonne relatifs à sa fin de vie. Elles sont révocables à tout moment.
A.-M. Duguet et P.-A. Delpla déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts.
Si elles sont antérieures à trois ans, le médecin doit les respecter26.
Le respect du principe d’autonomie permet au patient lucide
et conscient de refuser tout traitement et toute réanimation, et
d’organiser ainsi la fin de sa vie. 23. Art. L. 1111-10.
24. Loi 2005-370 du 22 avril 2005.
2. Arrêt du traitement d’un patient est hors d’état d’exprimer sa volonté
25. Art. L. 1111-11.
Depuis 2006, l’article 37 du code de déontologie (R. 4127 du 26. Art. L. 1110-9.
code de santé publique27) prévoit qu’une procédure collégiale 27. Décret 2006-120, 6 février 2006, art. 1.

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