Salomon)
Yearbook of the International Folk Music Council, Vol. 5. (1973), pp. 85-121.
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Wed Dec 26 21:29:59 2007
ÉCHELLES EQUIHEPTAPHONIQUES DES FLUTES DE
P A N C H E Z LES 'ARE'ARE (Malaita, Iles Salomon)
by Hugo Zemp
with the collaboration of J . Schwarz
0.0.Introduction
Des échelles à sept intervalles équidistants n'étaient connues des
ethnomusicologues, il y a encore peu de temps, que dans deux grandes
régions : Asie du Sud-Est et Afrique noire (cf. Stumpf, 1901; Hornbos-
tel, 1911; Tracey, 1948; Duriyanga, 1948; Jones, 1964; Morton, 1968;
Rouget et Schwarz, 1969). Récemment, l'existence de cette échelle a été
signalée chez les Indiens Tepehua du Mexique.l Notre but est
d'apporter du matériel nouveau pour une quatrième région du monde, la
Mélanésie, dont on ne pensait pas jusqu'à présent qu'elle pouvait avoir
des échelles de ce type.
1.3. Les mesures ont été faites sur un Stroboconn dans le laboratoire
d'analyse du Département d'ethnomusicologie du Musée de l'Homme.
En ce qui concerne les échelles de xylophones malinké mesurées dans le
même laboratoire et avec le même appareil, G . Rouget (1969:49) écrit
qu'on peut considérer les mesures comme exactes à +_ 2 cents près. Il est
évident que les hauteurs obtenues sur un instrument à vent comme la
flûte de Pan ne sont pas aussi stables que celles d'un xylophone.
Les hauteurs mesurées s'échelonnent sur cinq octaves: C2 - C7 (A4 =
88 1 1973 YEARBOOK O F T H E INTERNATIONAL FOLK MUSIC COUNCIL
Il est à noter qu'un même instrument n'est pas toujours employé pour
jouer la même voix. Quand un musicien qui joue habituellement la
seconde voix ne se sent pas sûr dans une pièce musicale, et que le joueur
de la première voix connalt bien la seconde voix, il change avec lui sa
partie tout en gardant son instrument.
L'ensemble dont les échelles sont analysées ici a été enregistré à
Maruitaro (cf. disque 'Are'are vol. 1, face A). Les musiciens, tournés
vers l'intérieur, forment un cercle (Zemp, 1972 a, fig. 17).
2.1. Mesures des hauteurs et des intervalles. Dans le tableau 1 (ainsi
que dans les tableaux VII, XII et XV où sont figurés les trois autres
ensembles de flûtes de Pan 'Are'are), chaque ligne horizontale
90 1 1973 YEARBOOK O F T H E INTERNATIONAL FOLK MUSIC COUNCIL
Il est à noter qu'en cours de jeu, les sauts d'octave d'un même instru-
ment existent, mais sont très rares. Deux instruments de même taille ne
jouent jamais à l'octave. Par contre, rappelons que les petits instruments
suivent les grands à l'octave supérieure. Il apparaît d'après les mesures
que les octaves des grandes flûtes de Pan sont un peu grandes, tandis que
celles des petites sont plutôt petites. Pour les instruments qui jouent en
octaves parallèles (1 et 3 ou 1 et 4, 2 et 3 ou 2 et 4), les octaves dans les
graves sont un peu grandes et dans les aigus un peu petites.
2.5 Ecarts des quatre flûtes de Pan. Les quatre courbes du tableau
VI montrent à la fois les écarts que présente chaque flûte de Pan par
rapport à une droite équiheptaphonique théorique et la distance qui
sépare les instruments les uns des autres, c'est-à-dire les écarts des
unissons.
Le tableau fait apparaître graphiquement que la flûte de Pan 1 est la
mieux accordée et que les flûtes de Pan 1 et 2 d'une part et les flûtes de
Pan 3 et 4 d'autre part (sauf pour les dernières notes) ont des courbes
assez parallèles.
1 2 3 4 Total
S 5 cents 9 5 7 6 27
de 6 à 10 cents 2 4 O 2 8
de 11 à 20 cents 2 4 3 2 11
> 20 cents O O 3 3 6
Total 13 13 13 13 52
TABLEAU III - Ensemble 'au taharra: écarts des secondes classés par ordre
croissant.
94 1 1973 YEARBOOK O F T H E INTERNATIONAL FOLK MUSIC COUNCIL
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Si dans les colonnes des deux pièces maani 'au et riko il y a moins
d'intervalles que dans les colonnes de l'échelle, c'est que dans ces deux
pièces -comme dans la plupart des pièces musicales -tous les tuyaux
ne sont pas soufflés.
Comparons maintenant pour chaque intervalle les chiffres obtenus
dans les six mesures. La dernière colonne à droite du tableau VI11
montre l'écart maximal entre le chiffre le plus haut et le chiffre le plus
bas. On voit que l'écart maximal est de 15 cents: pour le troisième
intervalle de la flûte de Pan 3, la valeur la plus petite est de 341 cents (lère
mesure de l'échelle), la valeur la plus grande est de'356 cents (lère
mesure de la piéce musicale maani 'au). Les autres écarts ne dépassent
pas 10 cents; autrement dit, les degrés joués dans le cadre d'une échelle
et ceux joués dans une pièce musicale ne se différencient pas notable-
+
ment: les différences sont de l'ordre de 5 cents.
Nous avons inclus ici le tableau VI11 et son commentaire afin de
démontrer que la mesure des intervalles à partir d'échelles enregistrées
peut être - et l'est dans notre cas - légitime.
3.3 Écarts des tierces. Chaque instrument du 'au keto ayant une
échelle en tierces, nous considérerons d'abord dans le tableau IX les
écarts des tierces par rapport au modèle des tierces de l'échelle
équiheptaphonique.
Dans les trois "grands" instruments (1,3,5), dix tierces sur seize ont
des écarts inférieurs à 20 cents; cinq tierces présentent des écarts entre
20 et 40 cents; l'écart maximal de 53 cents se trouve dans le grave de la
flûte de Pan 1.
Comme on peut s'y attendre, les écarts sont plus importants pour les
"petits" instruments (2,4,6): sept tierces seulement sur quinze ont des
écarts inférieures à 20 cents; les deux écarts maximaux de 68 et 69 cents
se trouvent dans l'aigu des flûtes de Pan 4 et 6.
3.4 Ecarts des secondes. Dans l'ensemble 'au keto, les secondes
résultent du jeu alternatif ou simultané des différents instruments. Le
tableau X présente les grandeurs des secondes calculées à partir du
tableau VI1 et, entre parenthèses, les écarts par rapport au modèle
équiheptaphonique. Treize secondes sur vingt des trois "grands" in-
struments (1 - 3 - 5) ont des écarts inférieurs à 20 cents, l'écart maximal
étant de,3 1 cents.
3.5 Ecarts des octaves. A la différence des instruments du 'au
tahana, l'intervalle de l'octave ne peut pas être joué sur une flûte de Pan
du 'au keto. Le tableau XI ne peut, par conséquent, que regrouper les
écarts des octaves entre un "grand" et un "petit" instrument jouant la
même voix. Les octaves des instruments 1 et 2 sont grandes dans le
grave, presque parfaites au milieu et dans l'aigu. La première octave des
instruments 3 et 4 est grande, la dernière petite, les quatre octaves du
milieu sont ou grandes ou petites. Les octaves des instruments 5 et 6
sont grandes dans le grave, petites ou presque parfaites dans l'aigu. En
ce qui concerne la tessiture de l'ensemble 'au keto, on constate que les
octaves dans le grave sont grandes et dans l'aigu petites (à l'exception de
la dernière octave qui est de 5 cents trop grande).
ÉCHELLES EQUIHEPTAPHONIQUE 1 99
-m
Echelle Pièce maani 'au Pièce riko E
im, .-
:\ 3
1ère mesure E
354 356 358 36 1 350 352 9
-5 394 395 395 3
c .- 396 393 395
4 355 356 354 357 352 352 5
a -5
6) 3 13 3 12 3 16 3 17 - - 5
Y
2 $ 356 358 - - - - -
Ct*
n
3 378 380 388 388 - - 1O
c-7
c .-3
351 349 344 342 342 343 9
p
4 -3 34 1 343 356 353 352 350 15
5 'E 308 304 307 3 10 306 307 6
s -; 345 345 - - - - -
4.3. Écarts des octaves. Le tableau XIV regroupe les écarts des
octaves des instruments jouant la même voix. On constate que partout
les octaves sont grandes. Une seule exception dans le registre moyen:
l'octave B3 - B4 est petite.
TABLEAU XII - Ensemble 'au taka'iori: mesures des hauteurs et des intervalles.
104 1 1973 YEARBOOK OF THE INTERNATIONAL FOLK MUSIC COUNCIL
A2 - A3 +62
B2 - B3 +4 1
Cx3 - Cx4 + 16 +44
D3 - D4 +4 1 +58
E3 - E4 +36 +21
Fx3 - Fx4 +31 +15
Gx3 - Gx4 +33 + 19
A3 - A4 +13 +39 + 10
B3 - B4 - 27 - 9 - 3
Cx4 - Cxs +53 + 16
D4 - DS +16 +38
E4 - ES +41 +27
Fx4 - Fx5 + 6 +24
Gx4 -Gxs +40 +56
A4 - AS +31 +12
B4 - B5 +61 + 12
- -
D5 - D6 + 17
TABLEAU XIV - Ensemble 'au taka'iori: écarts des octaves.
varie entre 178 et 239 cents, le second étant plus petit ou l'approchant
d'assez près: entre 146 et 182 cents. Deux instruments présentent sur la
même hauteur (Cs-Ds-Es) des intervalles égaux: 180 et 182 cents (instru-
ment 6) et 178 et 179 cents (instrument 7).
L'intervalle G-A est proche du ton équiheptaphonique et varie dans
les six instruments considérés ici entre 142 et 187 cents.
Les tierces E-G et A-C varient entre 279 et 363 cents, cinq d'entre
elles s'approchant de très près de la tierce équiheptaphonique, avec 336,
336, 337, 338 et 348 cents.
Quant aux deux plus grands instruments (1 et 2), le deuxième a une
répartition des intervalles proche des instruments plus petits, alors que
le premier fait apparaître une répartition inverse dans la grandeur des
intervalles C-D et D-E (C-D étant plus petit que D-E).
5.2. Ecarts des unissons. Le tableau XVI présente les écarts des
unissons de chaque paire d'instrument de même taille (et de même nom).
Les deux écarts les plus grands (49 et 68 cents) apparaissent dans
l'extrême grave (D2) et dans l'extrême aigu (C7).
Afin de ne pas agrandir démesurément le tableau, nous n'y avons pas
inclus les écarts que présentent les instruments de tailles différentes; la
dernière colonne à droite indique cependant la fourchette des écarts de
tous les instruments ayant une même note (à l'exception de la note la
plus aiguë de chaque instrument, qui est systématiquement trop basse).
Ainsi, le premier chiffre de la colonne a été obtenu en cherchant dans le
tableau XV le C3le plus bas (C3 +21; instrument 1)et leplus haut (Cs +55;
instrument 4); la différence de 34 cents correspond à la fourchette des
écarts des instruments 1 à 4. Pour le A3, la fourchette correspond aux
écarts des unissons des six instruments 1 à 6: la différence entre le A3
-26 (instrument 2) et le A3 + 17 (instrument 6) est de 43 cents.
5.3. Écarts des octaves. La partie gauche du tableau XVII présente
les écarts des octaves de chaque instrument. En les examinant, nous
faisons abstraction (pour des raisons que nous avons exposées plus
haut) de la dernière octave de chaque instrument qui est nettement plus
petite que les autres octaves. On constate cependant que les autres
octaves sont également, dans leur grande majorité, petites. Dans le
registre grave (instruments 1 à4), l'écart maximal est de -34 cents; dans
le registre moyen (instruments 5 et 6), les écarts sont encore plus
importants, jusqu'à -63 cents; dans le registre aigu (instruments 7 et 8),
les écarts atteignent même le demi-ton (-96 cents). On peut donc dire
que les octaves, déjà petites dans le grave, deviennent de plus en plus
petites à mesure qu'on monte vers l'aigu.
La partie droite du tableau XVII indique les écarts des octaves que
présentent les instruments accordés dans le rapport d'une seule octave.
Dans le registre grave (C2 - C3jusqu'à C3 - C4), les octaves sont grandes;
dans le registre aigu (Ds - Dsjusqu'à C6 - C7), les octaves sont petites;
dans le registre moyen (C3 - C4 jusqu'à Cs - Cs), il y a aussi bien des
octaves grandes que des octaves petites.
5.4. Les écarts des unissons et des octaves sont tout aussi
considérables que les différences de grandeur des secondes et des
tierces. Les instruments de l'ensemble de 'Ainiasi sont-ils moins bien
accordés que ceux d'autres ensembles 'au paina? L'examen de trois
ZEMPISCHWARZ ÉCHELLES EQUIHEPTAPHONIQUE / 109
autres ensembles, dont nous n'avons pas encore achevé la mesure des
hauteurs et l'analyse de l'échelle, apportera du matériel comparatif.
Mais-nous pouvons déjà dire que les autres ensembles 'au paina
enregistrés montrent en gros les mêmes caractéristiques de l'échelle,
notamment la différence de grandeur des secondes C-D et D-E. En
prenant l'échelle équiheptaphonique du 'au tahana comme modèle et en
utilisant "la formule 1-1-2-1-2," le musicien 'are'are qui fabrique
les instruments du 'au paina corrige-t-il- et selon quelles critères -la
longueur des tuyaux? Nous essayerons de trouver une réponse à cette
question au cours d'une prochaine mission sur le terrain.
fourchette
2et1 4et3 6et5 8et7 des écarts
C2 +13
D2 +49
E2 + 19
G2 + 19
A2 - 17
C3 +22 +3 34
D3 +38 -25 65
E3 -36 - 12 50
G3 -26 - 15 50
A3 - 3 + 6 (+2) 43
C4 +15 +27 - 25 46
D4 -24 - 1 34
E4 - 8 +2 31
G4 - 3 +3 61
A4 - 13 - 5 66
CS -21 +6 -31 22
Ds -35 +30 54
Es -26 +21 42
Gs + 14 - 10 28
As - 2 + 11 17
c
6 -31 + 15
D6 + 17
E6 + 3
G6 - 25
As - 15
C7 - 68
Mais deux significations sont avancées par les 'Are'are dans le contexte
de la musique: "suivre" et "os." Nous essayerons, au cours d'une
prochaine mission, d'éclaircir l'étymologie de ce terme.' Certains musi-
ciens 'Are'are affirment que le terme suri 'au ne peut être employeé que
pour l'octave jouée simultanément avec deux instruments de tailles
différentes et non pas pour l'octave jouée successivement sur le même
instrument. D'autres disent que le terme est valable dans les deux cas.
Et il existe une pièce musicale appelée suri 'au (à ne pas confondre avec
la pièce suri qui s'inspire du cri des "petits perroquets des cocotiers")
dont la caractéristique principale est d'avoir justement des sauts
d'octave dans la même voix.8
6.5. Pour les autres intervalles - tierce à septième - un musicien
nous a donné le terme de oosioosi ni ' a u , "rayures de bambou," qui,
cependant, ne semble pas être d'un usage courant.
6.6. Jouer un intervalle à degrés disjoints peut se direpora ra'onia,
"sauter par-dessus," ou, avec plus de précision, pora rua h a u , "sauter
deux tuyaux" oupora ooru h a u , "sauter trois tuyaux," etc.s Ces termes
expriment, comme on le voit, le mouvement que le musicien fait pour
passer d'un tuyau à un autre. L'intervalle ne sera pas le même selon le
type d'ensemble de flûtes de Pan: "sauter un tuyau" donnera une tierce
dans le 'au tahana, une quinte dans le 'au keto et le 'au taka'iori, l'un ou
l'autre (selon la position) dans le 'au paina.
6.7. Il existe deux termes pour désigner la direction - montante ou
descendante - d'un intervalle ou de toute une formule mélodique.
Contrairement à l'usage dans les langues européennes, le terme
"monter," hiuru, signifie aller vers le grave, le terme "descendre,"
hihu'a, aller vers l'aigu. En effet, si on va vers le grave d'une flûte de
Pan, on "monte" puisque les tuyaux deviennent de plus en plus longs, et
si on va vers l'aigu, on "descend," les tuyaux devenant plus courts. Si
l'un des musiciens ne trouve pas le bon tuyau, on peut lui dire hiuru
kane, "plus grave encore," ou hihu'a kane, "plus aigu encore." Ou on
peut être plus précis et dire, par exemple, ruana hau ni 'au hiuru,
"deuxième tuyau de bambou vers le grave," ou ooruna hau ni 'au
hihu'a, "troisième tuyau de bambou vers l'aigu."
7.0. CONCLUSlON
7.1. Les quatre types d'ensembles de flûtes de Pan se distinguent
par plusieurs traits (cf. tableau XVIII): (1) le nombre d'instruments; (2)
le nombre de tuyaux de chaque instrument; (3) l'échelle à degrés con-
joints (secondes), disjoints (tierces) ou conjoints et disjoints (secondes
et tierces); (4) le doublement, triplement ou quadruplement à l'octave;
(5) la tessiture de chaque instrument et de l'ensemble complet.
7.2. Trois des quatre ensembles de flûtes de Pan ont manifestement
une échelle équiheptaphonique: le 'au tahana (àdegrés conjoints), le 'au
keto et le 'au taka'iori (à degrés disjoints). Les instruments du 'au
tahana étudié ici sont ceux qui sont le mieux accordés par rapport au
modèle théorique (la moitié des intervalles ne s'en écarte pas plus de 5
cents; les seuls intervalles [6 sur 521 qui s'en écartent de plus de 20 cents
se trouvent dans l'aigu des petits instruments). Rappelons que le 'au
ZEMPISCHWARZ ÉCHELLES EQUIHEPTAPHONIQUE 1 113
tahana est considéré par les 'Are'are comme le plus ancien et le plus
important des ensembles de flûtes de Pan, et que les autres ensembles
sont censés en être dérivés; un facteur de flûtes de Pan peut, encore
aujourd'hui, prendre un instrument du 'au tahana comme modèle de
référence pour fabriquer, par exemple, les instruments d'un 'au keto (cf.
Zemp, 1972 b: 18, 34 et fig. 12).
7.3. Comment faut-il interpréter les différences de grandeur des
intervalles que montre l'analyse des mesures effectuées au Stroboconn?
Il y a, à notre avis, trois possibilités à envisager. (1) Y a-t-il des
différences de qualité de l'accord, les instruments aux déviations les
plus grandes étant les moins bien accordés? Question justifiée car,
comme dit G. Rouget (1969:58) après avoir comparé la justesse de
l'accord de xylophones Malinké et de pianos de concert, pourquoi n'y
aurait-il pas ici, comme ailleurs, des instruments plus ou moins bons et
des accords plus ou moins réussis? Les musiciens 'Are'are eux-mêmes
distinguent-ils un instrument très bien accordé d'un instrument moins
bien réussi? (2) Les instruments utilisés chez les 'Are'are sont-ils tous
"bien accordés" selon des normes qui permettraient une certaine
variabilité de la grandeur des intervalles, tout en restant à l'intérieur
d'un système à intervalles égaux? Dans ce cas, au-delà de quel seuil les
déviations deviennent-elles inacceptables et l'accord doit-il être
corrigé? La tolérance est-elle plus grande pour les instruments dont
l'échelle est à degrés disjoints ('au keto et 'au taka'iori) que pour les
instruments dont l'échelle est à degrés conjoints ('au tahana)? (3)
S'agit-il, enfin, d'écarts pertinents d'une échelle non équidistante,
comme le soutiennent M. Hood (1954, 1966) et C. McPhee (1966) pour
les échelles sléndro de Java et de Bali, échelles qui ont été décrites
souvent dans la littérature ethnomusicologique comme étant composées
de cinq intervalles égaux ou, tout au moins, comme montrant une
"tendance à l'équidistance?"
Les mesures les plus précises effectuées au Stroboconn ne rempla-
cent pas l'interprétation de l'échelle que donnent les musiciens eux-
mêmes, soit explicitement par leurs dires, soit implicitement par leur
pratique musicale. En faveur de la thèse de la non-équidistance du
sléndro, M. Hood fait valoir, entre autres, plusieurs arguments de poids:
l'existence de termes javanais pour trois différentes grandeurs
d'intervalles permettant (de même que la hauteur absolue) de distinguer
trois types de sléndro (Hood, 1966:35); l'existence de modes, palet,
dont la base logique doit être trouvée dans une échelle à intervalles non
équidistants (Hood, 1954:139); des constatations explicites de musi-
ciens déclarant que deux des intervalles sont plus grands (Hood,
1971:221).
Revenons à Malaita. Les musiciens 'Are'are ne distinguent que deux
grandeurs d'intervalles dans les échelles des flûtes de Pan jouées en
formation: la seconde (rapi 'au) dans le 'au tahana et la tierce (quand le
tuyau faisant rapi 'au manque) dans le 'au keto et lé 'au taka'iori, le 'au
paina ayant les deux grandeurs. Il n'y a aucune notion de mode. Dans le
'au tahana, on peut commencer une pièce sur différentes hauteurs,
"vers le grave" ou "vers l'aigu," sans changer le caractère de la pièce.
114 1 1973 YEARBOOK O F T H E INTERNATIONAL FOLK MUSIC COUNCIL
FOOTNOTES
1. L. Boilès (1%7:271) dit en passant, dans une étude qui n'est pas consacrée aux
échelles, que "al1 the songs used for this paper are based on equitonic modes in which
the steps are 175 cents apart. ( . . . ) These tunings and the pitches used in perfor-
mance were checked on the Strobotuner of the Laboratory of Ethnomusicology at
Tulane University. Variance from the indicated pitches is rarely more than 5 cents."
2. "Aux termes equiheptatonic et equipentatonic adoptés par A. Jones pour désigner
échelles et xylophones partageant l'octave en sept ou en cinq intervalles égaux, nous
préférerons, pour notre pari, équihepta- et équipentaphonique, ce qui nous amène à
revenir sur un point de terminologie déjàdébattu par Brailoiu (1953:33l ) , l'alternative
-tonique -phonique. Retenant pour prendre parti d'autres critères que lui, mais
aboutissant en pratique à la même conclusion, nous proposerions de réserver
phonique pour les termes se rapportant au nombre de degrés arithmétiquement
présents dans une musique donnée et -tonique pour ceux qui se rapportent au nombre
ZEMP/SCHWARZ ÉCHELLES EQUIHEPTAPHONIQUE 1 117
de degrés déterminant le système dans lequel cette musique les intègre; une échelle
- ou un instrument - heptaphonique ne faisant pas nécessairement l'objet d'un
usage heptatonique mais pouvant donner lieu à une musique pentatonique par exem-
ple, et réciproquement un système pentatonique pouvant faire emploi, Brailoiu l'a
amplement montré, de sept degrés. Autrement dit on réserverait -phonique pour ce
qui relève du concept d'échelle et -tonique pour ce qui relève de celui du système,
cela tout au moins dans le domaine de l'ethnomusicologie et malgré, comme on l'a
écrit (loc. cit.), "dodécaphonique" maintenant généralisé" (G. Rouget, 1%9:50,56).
4. Dans la langue 'Are'are - comme dans les autres langues de Malaita - le terme
général pour flûte de Pan est 'au, "bambou." Il recouvre en fait toute la musique
instrumentale, car toute musique instrumentale est faite avec des instruments en
bambou (à l'exception de celle des ensembles de tambours-de-bois dans la moitié sud
de Malaita). Dans les grandes fêtes cérémonielles où les seuls "bambous" qui
apparaissent sont les flûtes de Panjouées en formation, il sufit de dire 'au pour savoir
de quoi en parle. Chaque type d'ensemble de flûtes de Pan a cependant un nom
suffixé au terme de 'au, ce qui permet de distinguer les différents types.
5. Il existe une variante de cet ensemble qui est appelée 'au taka'iori ni Marau. Le
nombre d'instruments e t d e voix e s t le même, mais les deux voix
"d'accompagnement" sont doublées et non pas triplées à l'octave; d'autre part les
deux voix "mélodiques" sontjouées chacune par trois instruments: un "grand" et, à
l'octave supérieure, deux "petits" qui jouent à l'unisson. En outre, la position des
musiciens est différente: ils se mettent en cercle et non pas sur deux rangs (cf. Zemp,
1972 a, fig. 26 et 27; disque 'Are'are vol. 2, face B, plages 6-1 1).
6. Dans les flûtes de Pan jouées en solo, dont l'ordre des tuyaux est "irrégulier" (cf.
Zemp 1971 b: 48), les différents tuyaux ont parfois des noms qui varient selon
l'instrument et le musicien qui l'a fabriqué et qui le joue.
7. Signalons que, pour les flûtes de Panjouées en solo, nous avons trouvé plusieurs fois
un terme qui désigne non pas l'intervalle de l'octave, mais le tuyau qui, accordé à
l'octave superieure, est à côté d'un long tuyau: hari ni 'au, litt. "division (en deux)
d'un bambou."
8. Rappelons qu'une des quatre voix polyphoniques du 'au taka'iori s'appelle aussisuri
'au. La terminologie est ici particulièrement embrouillée, puisqu'il existe un
"grand" et un "petit" suri 'au qui sont accordés àl'octave, doncsuri 'au entre eux.
9. Hau, ou plus exactement hau ni 'au, est le terme général pour "tuyau de bambou"
des flûtes de Pan; il désigne, en dehors du contexte musical, une section de bambou
entre deux noeuds.
10. Nous remercions Gilbert Rouget des conseils et encouragements qu'il nous a donnés
tout au long de ce travail. Nos remerciements vont aussi au Service de Muséographie
du Musée de l'Homme pour la réalisation des tableaux 1, VI, VII, XII, XV et XVIII.
118 1 1973 YEARBOOK O F T H E INTERNATIONAL FOLK MUSIC COUNCIL
RÉFÉRENCES
BIBLIOGRAPHIQUES:
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DISCOGRAPHIQUES:
SUMMARY
Introduction. Until recently, equal interval, seven tone scales were
known to ethnomusicologists only in two major areas: South-east Asia
and Black Africa. However, not long ago this scale was reported in
Mexico amongst the Tepehua Indians. Our aim here is to show its
existence in yet a fourth area, Melanesia, which until now was not
thought to have this scale. The article offers the initial findings from a
continuing study into the scales of more than 300 instruments belonging
to about 40 panpipe ensembles which we have recorded in different
societies of Malaita, the most densely populated of the British Solomon
Islands. In this initial report we have chosen only 28 instruments belong-
ing to four panpipe ensembles of the 'Are'are people: 'au tahana, 'au
keto, 'au taka'iori and 'au paina.
1. Recording and measurement procedure. The instruments used here
for the scale analysis are the ones which appear in the recorded pieces
from the two discs Melanesian Panpipes, 'Are'are Vol. 1 and Vol. 2.
The scales of each instrument was played in ascending direction by a
musician, each note being blown six times, giving a total duration of
about 5 seconds. A Stroboconn was used in the measurements. The
degree of error in the readings of the pitches may be considered to be
+ +
3 Cents in the middle two octaves (C4- Bs) and 5 Cents or the very
low and very high registers. To ascertain whether there was a differ-
ence between the pitches when played in the scale order and when
played in a performance, we measured the pitches of two pieces of
music played with the three big instruments of the 'au keto ensemble.
These measurements were made from recordings of three part
polyphony in which the three musicians, each in turn, played near the
microphone. Each measurement was taken twice, and the compari-
sons showed that the difference between ensembles and the played
+
scales was minimal, in the order of 5 Cents (cf. Table VIII).
120 1 1973 YEARBOOK OF THE INTERNATIONAL FOLK MUSIC COUNCIL
'au keto and 'au taka'iori (disjunct degrees). The instruments from the
'au tahana ensemble studied here conform most closely to the theoreti-
cal scale (half the intervals are within 5Cents, whilst the only intervals [6
of the 521 which deviate more than 20 Cents are found in the high register
of the small instruments). The 'au tahana ensemble is considered by the
'Are'are as being the oldest and most important panpipe ensemble,
whereas the others are considered to be derived. After an examination
of both the terminology and the musical practice of the 'Are'are (there is
no concept of modes; the same piece can start on different pitches), we
feel that the differences in interval sizes shown in the analysis represent
non-pertinent discrepancies in the equiheptatonic scale.
The ' a u paina is the only panpipe ensemble in which the 'Are'are
distinguish between different intervals: the second and the third. How-
ever, the scale analysis has shown that there is a difference in the sizes of
the seconds; this is contradictory in view of both the oral tradition which
claims that the 'aupaina was made from the 'au tahana model, and also
of information we received which suggests that it would be made today
in the same way. During Our next field trip we will endeavour to see how
the instrument maker modifies the tuning for the 'aupaina from the 'au
tahana model.
The unison discrepancies between instruments of the same name and
size (in the 'au tahana and 'aupaina ensembles), unlike some Mandinka
xylophones and the Balinese gamelan, do not show systematic charac-
teristics. Contrary to the Balinese gamelan the 'Are'are panpipe ensem-
bles tend to have "stretched" octaves in the low registers and "com-
pressed" octaves in the high registers.
http://www.jstor.org
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Footnotes
2
Sur les xylophones équiheptaphoniques des Malinké
Gilbert Rouget; J. Schwarz
Revue de musicologie, T. 55e, No. 1er. (1969), pp. 47-77.
Stable URL:
http://links.jstor.org/sici?sici=0035-1601%281969%293%3A55%3A1%3C47%3ASLXEDM%3E2.0.CO%3B2-Z
Références
NOTE: The reference numbering from the original has been maintained in this citation list.