1. Introduction
Définition : Le goût est une modalité sensorielle chimique qui permet d'apprécier la saveur
d'une substance ingérée grâce aux récepteurs gustatifs situés dans la cavité buccale.
Il y a également
environ 400
bourgeons sur le
voile du palais et
près de 1000 sur
l'épiglotte.
2.2. Structure du bourgeon gustatif: Anatomie microscopique
Les bourgeons du goût sont des amas cellulaires globulaires, de 50µm de diamètre
environ. Ils reposent sur la lame basale de l'épithélium et s'insèrent entre ses cellules. Chaque
bourgeon s'ouvre à la surface de l'épithélium par un pore de 2µm de diamètre, dont l'entrée
contient une substance mucoïde, dense en microscopie électronique. Chaque bourgeon
renferme des cellules allongées (entre 30 et 80) et des cellules basales.
On distingue essentiellement 4 types de cellules dans le bourgeon gustatif observé en
microscopie électronique:
Les cellules de type 1 et 2 sont des cellules de
soutien; elles présentent des micro-villosités dans
leur région apicale, et semblent sécréter certaines
substances dans la lumière du pore gustatif. Seules
les cellules de type 2 entretiennent des contacts non-
synaptiques avec certaines des fibres nerveuses
pénétrant dans le bourgeon. Elles pourraient être
impliquées dans la genèse des signaux nerveux.
Les cellules de type 3 sont très probablement
les vraies cellules réceptrices, puisque les seules du
bourgeon à présenter des structures synaptiques dans
les zones de contact avec les terminaisons
nerveuses. Elles présentent une protubérance apicale
qui pourrait être le site de transduction.
Les cellules de type 4 sont les cellules basales,
jouant probablement un rôle de remplacement des
cellules du bourgeon. Elles n'atteignent pas le pore
et ont une morphologie peu différente des cellules
germinatives épithéliales. Les études par marquage
radio-actif indiquent que ces cellules basales
proviennent de la différenciation des cellules
épithéliales voisines.
Comme ces dernières, les cellules gustatives sont soumises à un renouvellement
continu. Les expériences de marquage radio-actif des cellules épithéliales ont montré que la
demi-vie moyenne des cellules gustatives constituant le bourgeon est d'environ 10 jours.
Cette dernière observation amène à s'interroger sur les mécanismes par lesquels les
connections nerveuses sont maintenues avec les cellules gustatives. Ces relations nerveuses
sont d'ailleurs indispensables à la survie du bourgeon, comme l'ont montré les expériences de
dénervation, provoquant une dégénérescence puis une disparition rapide des bourgeons
gustatifs. Lors de la ré-innervation, les bourgeons réapparaissent. Ces observations sont à
l'origine de l'hypothèse suivant laquelle les fibres nerveuses gustatives libèreraient une ou des
substances trophiques, déclenchant la transformation des cellules épithéliales germinales en
cellules gustatives.
Il y a plus de fibres nerveuses pénétrant dans les bourgeons que de fibres dans les nerfs
gustatifs, ce qui dénote l'existence d'un fort taux d'arborisation périphérique. Les cellules
sensorielles sont innervées par des fibres nerveuses amyéliniques, pouvant innerver chacune 4
à 8 de ces cellules. Par ailleurs, chaque cellule sensorielle est innervée par plusieurs fibres
nerveuses différentes, pouvant chacune innerver plusieurs bourgeons différents, parfois
distants de plusieurs mm.
4. Données fonctionnelles
1. La transduction membranaire
Selon les saveurs, les mécanismes cellulaires à l’origine des potentiels de récepteur (PR) sont
différents, nous distinguerons les saveurs ioniques (salée, acide) des saveurs organiques
(sucrée, amère, umami).
2. Les récepteurs
la détection des molécules sapides repose sur la présence de récepteurs spécifiques, qui sont
classés en deux grands types, récepteurs ionotropiques et métabotropiques.
1. 1. Saveurs ioniques
Saveur salée : la sensation salée la plus pure est induite par le chlorure de sodium. Le Na+
présent au niveau du pore diffuse passive dans la cellule réceptrice à travers des canaux
sodiques ENaC, à l’origine de la dépolarisation membranaire. Ce phénomène est bloqué par
l’amiloride (diurétique qui bloque spécifiquement certains canaux sodiques). Inversement le
bréthylium qui ouvre les canaux sensibles à l’amiloride augmente la perception salée. Un
transport para cellulaire des ions est également vraisemblable, car un certain nombre de
réponses sont indépendantes des canaux sodium sensibles à l’amiloride.
Saveur acide : Les composés acides libèrent des protons H+, responsables du goût acide, qui
peuvent entraîner la dépolarisation de la membrane par deux mécanismes possibles : d’une
part, les protons bloqueraient les canaux potassiques voltage-dependants, présents sur la partie
apicale des cellules, d’autre part ils seraient capables d’emprunter une voie para cellulaire. La
perception acide ne serait donc pas corrélée au pH.
1. 2. Saveurs organiques
Saveur sucrée
De récentes études ont abouti à la découverte de plusieurs récepteurs: T1R1, T1R2 et T1R3.
Ils appartiennent à la famille C des récepteurs couplés à une protéine G (RCPG), et possèdent
donc les sept hélices transmembranaires caractéristiques des RCPG. Ils présentent également
un large domaine amino-terminal extracellulaire.
L’hétérodimère formé par les récepteurs T1R2 et T1R3 a été le premier récepteur identifié et
joue un rôle clé dans le goût sucré.
Les homodimères T1R3+T1R3 font également fonction de récepteurs aux molécules sucrées.
De plus, de récentes études suggèrent l’existence d’autres récepteurs, encore inconnus.
Saveur amère
Ces molécules ont des structures très diverses (cations inorganiques, petits peptides,
alcaloïdes) souvent toxiques. Ainsi apparaît une certaine finalité, le goût amer étant
initialement un signal d’alarme, et, du fait de la situation des bourgeons sensibles, contribuant
à l’arrêt d’absorption de la substance amère.
Compte tenu de la variabilité des structures, il semble que leur transduction serait assurée par
des récepteurs de types divers.
La gustducine aurait un effet facilitant sur la réponse d’aversion à l’amer.
La quinine, molécule de référence d’amertume, ferme les canaux potassiques de la membrane
apicale.
Trente à cinquante gènes codant pour des récepteurs à l’amer ont été découverts. Les
récepteurs sont couplés à des protéines G et sont nommés T2R. Ils s’apparentent aux
récepteurs de la famille A couplés à des protéines G.
Saveur umami
Le 5e goût a été identifié en 1909 par Ikeda (61). L’umami (signifie savoureux en japonais)
correspond à la sensation engendrée par le glutamate, qui a la particularité de renforcer le goût
de nombreux aliments ; le glutamate de sodium est de plus en plus utilisé comme additif de
« palatabilité ». Plusieurs récepteurs ont été identifiés : un hétérodimère T1R1+T1R3,
répondant sélectivement à l’aspartate et au glutamate de monosodium, ainsi que des variantes
des récepteurs mGluR1 et mGluR4, avec des extrémités amino-terminales tronquées. Tous ces
récepteurs font partie de la famille C des récepteurs couplés à une protéine G.
Fig 6-Représentation schématique des récepteurs pour les saveurs umami, sucrée et amère,
(d’après Chandrashekar et al., 2006)
Récepteurs aux lipides : il existe des arguments pour l’existence de deux types distincts
(longue chaîne, polyinsaturés).
La transduction finale dans tous ces différents cas de figure est basée sur un mécanisme
commun, la dépolarisation de la cellule de type 3 (appelée potentiel récepteur), par un flux
entrant de Ca++ au travers de canaux Ca++ dépendant du voltage. Comme toutes les cellules
sensorielles, les cellules gustatives sont polarisées avec une différence de potentiel trans-
membranaire d'environ 50mV. Cette entrée de Ca++ déstabilise à son tour les vésicules pré-
synaptiques, qui vont être libérées dans la fente synaptique, et exciter les récepteurs post-
synaptiques des fibres nerveuses gustatives afférentes. Celles-ci vont émettre à leur tour des
potentiels d'action dont la fréquence dépendra de l'amplitude du potentiel récepteur. Le délai
entre l'application du stimulus sapide et l'apparition des potentiels d'action varie de 15 à
100ms.
3. Le codage
a) Codage quantitatif
.
Insérer
Les enregistrements nerveux sur fibre nerveuse unique réalisés généralement au niveau
de la corde du tympan montrent que l'activité nerveuse augmente quand on élève la
concentration du stimulus. Il existe une relation linéaire entre la fréquence des potentiels
d'action émis par la fibre et la molarité du stimulus (fig yy).
Comme le nombre de fibres nerveuses excitées augmente quand on élève la
concentration, le codage de l'intensité du stimulus gustatif est représenté par la densité globale
du trafic d'influx nerveux transmis par les nerfs gustatifs.
b) Codage qualitatif
Les experiences menees depuis une dizaine d’annees remettent en question les modeles non
specifiques (across fibre model) et montrent que les cellules receptrices presentent une
specificite d’activation: chaque classe de recepteur est exprimee dans un type de cellules pre-
receptrice donne, selon un schema de codage “une cellule, un gout ” (labeled line model)
d’apres Zuker et al.
Les experiences menees sur des fibres isolees de la corde du tympan montrent que cette
specificite cellulaire n’est pas totale au niveau des fibres afferentes car les fibres sont
connectees a plusieurs types de cellules gustatives issues de differents bourgeons.
6. Valeur hédonique
La composante hédonique détermine l’aversion ou l’attrait que l’on peut avoir pour un
aliment, c’est-à-dire sa palatabilité. Cette dernière est génétiquement déterminée, mais aussi
influencée par l’expérience du sujet que ce soit au niveau individuel ou culturel. Par
exemple, dans la culture occidentale, un goût sucré est plus fréquemment associé à une
perception agréable qu’un goût amer ou acide.
La valeur hédonique d’un aliment peut varier selon le statut nutritionnel du sujet (faim ou
satiété).
La composante hédonique est construite au niveau hypothalamo-limbique, l’hypothalamus
latéral et l’amygdale étant particulièrement impliqués. La palatabilité participe donc au
contrôle du comportement alimentaire et intervient directement sur la régulation du milieu
intérieur.
7. Affections touchant les perceptions gustatives