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20-3 | 2017
Varia
Angèle Renaud
Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/fcs/1995
DOI : 10.4000/fcs.1995
ISSN : 2261-5512
Éditeur
Association FCS
Référence électronique
Angèle Renaud, « L’audit environnemental : un dispositif de gestion à l’épreuve de logiques
institutionnelles hétérogènes », Finance Contrôle Stratégie [En ligne], 20-3 | 2017, mis en ligne le 08
novembre 2017, consulté le 03 mai 2019. URL : http://journals.openedition.org/fcs/1995 ; DOI :
10.4000/fcs.1995
L’audit environnemental : un
dispositif de gestion à l’épreuve de
logiques institutionnelles
hétérogènes
A Micro-Analysis of Heterogeneous Institutional Logics in the Environmental
Audit
Angèle Renaud
Introduction
1 L’audit environnemental fait figure de parent pauvre dans la littérature académique. À
l’exception de quelques auteurs (cités infra), les chercheurs travaillant sur la
responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) ou sur la régulation de l’audit accordent peu
d’attention à ce sujet. Or, depuis son apparition aux Etats-Unis au début des années 1970,
ce dispositif de gestion tend à se généraliser à l’échelle de la planète et en particulier dans
les secteurs polluants avec le renforcement des réglementations environnementales et la
pression des parties prenantes. Ce phénomène prend aussi de l’ampleur sous l’impulsion
des normes internationales ISO 14000 et du règlement européen EMAS (système
communautaire de management environnemental et d’audit). Pourtant, nous ne savons
que peu de choses sur ce dispositif de gestion. Les rares études portant sur l’audit
environnemental s’interrogent sur les objectifs et l’objet des vérifications effectuées
(Watson et Emery 2004 ; Gendron 2004 ; Dohou-Renaud 2009), les méthodologies utilisées
(Andrews et al. 2001 ; Gendron 2004 ; Boiral 2006) ou encore la compétence et
l’indépendance des auditeurs (de Moor et de Beelde, 2005 ; Antheaume, 2003 ; Dogui et
Boiral, 2013). Toutefois, ces études sont fragmentées et ne permettent pas de saisir à la
fois les versants sociaux et matériels de ce dispositif de gestion.
de gestion vecteur de logiques institutionnelles (1.2) et une grille d’analyse est proposée
pour explorer les caractéristiques de ce dispositif (1.3).
19 L’étude de cas porte sur l’entreprise FrenchTyre, un plasturgiste français spécialisé dans la
fabrication et la commercialisation de pneumatiques. Cette entreprise réalise un chiffre
d’affaires d’environ 16 milliards d’euros et possède une soixantaine de sites industriels à
travers le monde. En France, elle emploie 30000 salariés sur une quinzaine
d’établissements certifiés ISO 14001. Elle appartient au champ organisationnel plastique
et caoutchouc qui regroupe notamment les producteurs de matière plastique, les
fabricants de machines de production et de moules et les recycleurs de déchets
plastiques. Cette entreprise constitue un terrain adéquat pour traiter notre question de
recherche puisqu’elle utilise l’audit environnemental pour répondre aux diverses
contraintes de son environnement institutionnel.
20 Les pouvoirs publics exercent des pressions sur l’entreprise, car ses activités engendrent
de la pollution et présentent des risques industriels majeurs. En effet, ses activités sont
encadrées par des législations et réglementations coercitives, telle que la législation sur
les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) de 1976, transposée
des directives européennes SEVESO dans le droit français2. D’ailleurs, deux sites
industriels de l’entreprise sont classés « seuil haut » et huit sites « seuil bas » à cause de la
quantité des substances dangereuses stockées sur ces sites. Le risque incendie constitue le
principal risque industriel auquel elle est exposée : par exemple, les départs de feu
peuvent survenir lors de l’utilisation d’hydrocarbures (des substances très inflammables)
dans la production de caoutchouc de synthèse ou lors de la production de mélanges de
gommes (constitués de nombreux matériaux dont les élastomères, les charges
renforçantes, les huiles, les résines, le souffre…) nécessaires à la fabrication des
pneumatiques. En outre, l’entreprise est particulièrement visée par la législation de 2002
sur l’interdiction de la mise en décharge des pneumatiques usagés. Dès lors, elle sous-
traite ses déchets à l’organisation Aliapur3 afin de maîtriser les risques
environnementaux et les coûts de recyclage de ses pneus.
21 L’entreprise est également soumise à des contraintes de marché. Elle doit gérer les
risques de rupture d’approvisionnements et les risques liés à la concurrence
internationale. Pour fidéliser sa clientèle et conquérir de nouveaux marchés, sa stratégie
concurrentielle repose sur l’innovation des produits et services, le renforcement de sa
présence sur les marchés à forte croissance et l’amélioration de sa compétitivité. En
matière d’innovation, elle investit dans des programmes d’éco-conception afin de
proposer à ses clients actuels et futurs des pneumatiques dits « écologiques » (c’est-à-dire
à faible résistance au roulement4), qui consomment moins de carburant et rejettent moins
de gaz à effet de serre (GES). L’entreprise investit en moyenne 3 % de son chiffre d’affaires
annuel en recherche et développement (R&D).
22 La stratégie de l’entreprise répond aussi à des contraintes financières. Elle cherche à
maîtriser les risques financiers de ses investissements environnementaux. Cette stratégie
consiste aussi à réduire les coûts cachés des sites industriels en optimisant leur
consommation de ressources (énergie et eau) et en diminuant leur production de déchets
mis en décharge. Enfin, l’entreprise cherche à préserver son image et à rassurer ses
parties prenantes sur sa politique de développement durable. Pour cela, elle fait certifier
ses sites industriels selon la norme ISO 14001, publie des rapports sur sa gestion
environnementale et sociale (conformément à la loi de 2001 sur les Nouvelles Régulations
Économiques – NRE) et organise des journées portes ouvertes et des visites de ses sites
industriels.
23 Pour répondre aux différentes contraintes, l’entreprise réalise régulièrement des
vérifications environnementales. Pour cela, elle s’est dotée d’une démarche d’audit qui
s’appuie sur trois acteurs essentiels : le manager opérationnel qui est responsable de
l’identification et de la maîtrise des risques de son entité dans le respect des standards,
les services spécialisés (ex. service environnement et prévention, service financier,
service juridique…) qui analysent les risques de leur domaine, définissent les standards,
animent et contrôlent leur mise en œuvre, et les auditeurs internes qui vérifient
l’efficacité des mesures de maîtrise des risques lors des missions d’audit. L’ensemble de la
démarche est pilotée et coordonnée par un responsable, le risk manager. Ces différents
acteurs font l’objet de notre étude empirique.
24 L’étude de cas s’appuie sur une triangulation des données. Nous avons recueilli plusieurs
types d’informations (données qualitatives et quantitatives, enregistrements audio et
vidéo) à partir de différentes sources de données (acteurs de l’entreprise, sites internet,
médias d’information) et en utilisant deux modes de collecte (entretiens semi-directifs et
analyse documentaire) durant la période de l’étude (2007 à 2010). Cette triangulation a
permis de recouper et de vérifier les informations recueillies afin de limiter les biais
méthodologiques et de renforcer la validité interne de la recherche (Miles et Huberman
2003, Ayerbe et Missonnier, 2007). Le tableau 1 présente une synthèse des données
empiriques collectées.
25 Nous avons interviewé les acteurs clés de la démarche d’audit environnemental. Trois
entretiens approfondis ont été menés avec le risk manager (qui est le responsable de la
démarche d’audit et qui veille à la maîtrise des risques de l’entreprise), le directeur
environnement et hygiène (qui pilote une équipe de 70 auditeurs internes chargés de
garantir l’efficacité et la pérennité du système de management environnemental (SME)
dans le groupe) et le directeur d’une usine de production de caoutchouc synthétique (l’un
des composants essentiels à la fabrication des pneumatiques). Certifiée ISO 14001, cette
usine de 400 salariés est considérée comme l’une des plus polluantes du groupe : « Cette
certification résulte d’une décision du groupe qui, à la fin des années 90, a décidé de faire certifier
ISO 14001 toutes ses usines d’un point de vue environnemental. L’un des sites qui avait de gros
impacts sur l’environnement, c’était notre usine. Donc c’est pour ça que nous avons été les premiers
à nous mettre en action. » (Directeur d’usine, entretien).
26 D’une durée moyenne de 1h30, ces interviews portaient sur les différents éléments de la
gestion environnementale de l’entreprise : la politique environnementale, les raisons de
l’adoption du SME, la mise en place et le fonctionnement du SME, le contexte de sa
certification, les différentes pratiques d’audit environnemental, la réalisation du rapport
environnement, l’implication des parties prenantes… Pour compléter ces données
primaires, nous avons collecté de nombreux documents écrits, audio et vidéo relatifs aux
pratiques environnementales de l’entreprise : rapports annuels, rapports développement
durable, rapports d’audits, documents de références, procédures, politique
environnementale, données relatives au reporting environnemental… Les documents
écrits représentent près de 1200 pages de texte. D’une durée variant entre 3 et 21
minutes, les huit enregistrements audio et vidéo ont été retranscrits intégralement pour
faciliter le traitement des données.
27 Àl’issue de la collecte des données, le corpus obtenu fut traité selon la technique de
l’analyse de contenu thématique (Hlady Rispal, 2002 ; Miles et Huberman, 2003 ; Bardin
2007). Le corpus a été codé à partir de la grille d’analyse (présentée supra) issue de la
littérature sur les logiques institutionnelles et les dispositifs de gestion. Nous avons
procédé à un découpage par thèmes correspondant aux concepts mobilisés dans cette
grille : logiques institutionnelles, substrat technique, philosophie gestionnaire, vision
simplifiée des relations organisationnelles. Par exemple pour traiter l’item « rôles des
auditeurs », rattaché au concept « vision simplifiée des relations organisationnelles »,
nous avons isolé dans deux codes distincts les extraits du corpus décrivant les missions
des auditeurs internes (les membres du service environnement et prévention) et des
auditeurs externes (l’entreprise fait appel au cabinet PricewaterhouseCoopers – PwC en
tant que tiers indépendant pour évaluer ses rapports). Chaque document ou entretien fut
traité séparément (analyse verticale) puis de façon transversale pour faire apparaitre les
thèmes récurrents à l’intérieur du corpus, c’est-à-dire apparaissant d’un document à
l’autre (analyse horizontale). Cette double analyse a servi à mettre en exergue les
similitudes et les différences entre les vérifications réalisées dans l’entreprise et de
générer une taxonomie des formes d’audit environnemental. Notre analyse fut facilitée
par l’utilisation du logiciel NVivo7, qui a permis de manipuler rapidement une masse
importante de données, de procéder à un codage systématique du corpus, d’amalgamer
des codes ou encore de retrouver immédiatement les extraits codés. Les résultats de
l’analyse sont présentés infra.
Politique environnementale
Charte de responsabilité sociale et
environnementale
Documents de références
3 rapports annuels
3 rapports environnement ou
développement durable
3 extraits des rapports des commissaires
Documents consultés dans
aux comptes sur les informations sociales
l’entreprise :
et environnementales
Grille d’évaluation des aspects Pages web consacrées à la stratégie de
Collecte de et impacts environnementaux développement durable et à la gestion
documents écrits, significatifs environnementale de l’entreprise
audio et vidéo Référentiel règlementaire 1 vidéo sur la stratégie développement
Fichier d’indicateurs durable de l’entreprise
environnementaux Documents réalisés par les médias
Rapport et procédure d’audit d’information et la presse spécialisée :
5 articles de presse écrite
2 vidéos sur la fabrication et le cycle de vie
du pneumatique
1 vidéo sur la valorisation des
pneumatiques usagés
Rapports publiés sur la filière plastique et
caoutchouc par la Fédération de la
Plasturgie et des Composites (FPC) et
l’INSEE
-Associations
-Clients professionnelles
(automobile, (ex. Association
-L’Etat et aéronautique, Profession
collectivités agroalimentaire, Plastique,
locales BTP….) Fédération de la
Acteurs -Investisseurs
-Commission -Fournisseurs de Plasturgie et des
européenne matières Composites -
FPC,)
- ONG -Concurrents
européens et -Organisations
internationaux internationales
(ex. ISO)
-Eviter les
sanctions
financières en se
conformant aux
-Protéger la
obligations
réputation de la
légales et
filière
règlementaires -Obtenir un
-Protéger -Promouvoir la
Buts et l’environnement - Maximiser le avantage compétitif
filière
croyances profit et réduire -Innover en
-Lutter contre la -Renforcer la
les coûts en proposant des
pollution légitimité de la
consommant produits « verts »
filière auprès de
moins de
ses parties
ressources
prenantes
naturelles et en
produisant
moins de
déchets
-Rentabilité -Compétitivité
-Développement -Maîtrise des -Innovation -Réputation
durable coûts et des -Maîtrise des -Légitimité sociale
Valeurs clés -Maîtrise des risques risques liés
la à
financiers -Maîtrise des
risques concurrence et à la
risques d’image
environnementaux -Economie de rupture des
ressources approvisionnements
-Certification ISO
-Adoption de lois
14001,
et de règlements
enregistrement
(ex. ICPE, NRE,
EMAS
REACH, EMAS…)
-Labels
- Mise en œuvre de -Plans
écologiques (ex.
Moyens et sanctions pour d’investissement -Programmes d’éco-
NF
règles non-respect des et de conception
environnement,
textes juridiques financement
Écolabel
- Moyens d’action européen)
des ONG
-Formations sur la
(manifestations,
gestion
lobbying…)
environnementale
Sous la
responsabilité des
managers des sites
industriels, les
responsables
Fixer les priorités environnement et
du SME en les correspondants
effectuant un environnementaux
diagnostic (opérationnels des
Grille
Analyse préalable des usines) identifient
Hybridation des d’identification des
environnementale activités, produits les risques et
logiques aspects et impacts
(audit et services pour mesurent les
environnementale environnementaux
préliminaire au réduire leurs impacts qui font
et de légitimité basée sur la norme
SME) impacts l’objet de
ISO 14001
environnementaux discussion en
et obtenir le comité de
certificat ISO direction entre les
14001 dirigeants afin de
définir les objectifs
de performance
environnementale
des sites
industriels.
-Référentiel d’audit
interne basé sur la
norme ISO 14001 et
les standards
internes de
performance
environnementale
propres à
l’entreprise, Les vérifications
sont effectuées par
-Indicateur
les auditeurs
composite de
internes groupe
performance
(service
environnementale
environnement et
mesurant six
prévention) et les
Hybridation
des impacts significatifs : Evaluer l’efficacité
auditeurs internes
Audit interne de logiques consommation de du SME et réduire
locaux
SME environnementale ressources en eau et les coûts
(correspondants
et financière énergie, émissions environnementaux
environnementaux
de dioxyde de
des usines). Les
carbone (CO2) et de
résultats sont
composés
débattus avec les
organiques volatils
managers locaux
(COV), génération et
et remontés à la
mise en décharge de
direction générale.
déchets,
-Indicateurs
financiers : dépenses
environnementales
et investissements
pour la prévention
de l’air, de l’eau et
des sols
Les vérifications
sont effectuées par
le service juridique
Evaluer le niveau
et les responsables
de conformité aux
environnement
obligations légales
(rattachés aux
Référentiel et réglementaires,
sites industriels).
réglementaire : faire de la veille
Hybridation des Les résultats sont
Audit de inventaire des textes juridique,
logiques communiqués aux
conformité législatifs et respecter les
environnementale managers des sites
réglementaire réglementaires textes et corriger
et financière pour qu’ils
applicables à les non-
puissent corriger
l’entreprise conformités afin
les non-
d’éviter les
conformités, puis
sanctions
remontés aux
financières
dirigeants et
investisseurs de
l’entreprise.
Crédibiliser la
gestion
environnementale Les vérifications
de l’entreprise en sont effectuées par
Audit de Hybridation des Référentiel UTAC obtenant une les auditeurs
certification ISO logiques pour la certification reconnaissance externes (UTAC)
14001 et audit environnementale ISO 14001 et les externe (certificat pour répondre à la
externe de SME et de légitimité audits de suivis ISO 14001) et demande des
renforcer la clients
légitimité vis-à-vis automobiles.
des clients
automobiles
Les vérifications
Communiquer sur sont effectuées par
la gestion les auditeurs
Hybridation des Référentiel construit environnementale externes (PwC).
Audit du rapport logiques à partir des lignes de l’entreprise et L’avis des
environnemental environnementale directrices de la GRI renforcer la auditeurs ainsi que
et de légitimité et de la loi NRE légitimité vis-à-vis les rapports
de l’ensemble des vérifiés sont
parties prenantes diffusés aux
parties prenantes.
38 Conformément à la norme ISO 14001, l’entreprise FrenchTyre évalue son SME en mettant
en place un programme d’audit sur ses sites industriels. D’après les dirigeants, le SME est
un outil qui permet de d’identifier et de maîtriser les impacts de leurs activités : « Nous
avons la volonté de le perfectionner constamment et d’en faire un standard Groupe, nous
permettant de satisfaire totalement les réglementations, lorsqu’elles existent ou d’appliquer nos
meilleures normes en leur absence. » (Charte de responsabilité sociale et environnementale).
Trois types de vérifications sont réalisés à différents moments de la vie du SME : l’analyse
environnementale, l’audit interne et l’audit de certification.
L’analyse environnementale
L’audit interne
41 Après l’implantation du SME, chaque site industriel réalise des audits internes dont la
philosophie gestionnaire est d’évaluer l’efficacité du SME au regard des exigences de la
norme ISO 14001 et des exigences de performances internes fixées par les dirigeants de
l’entreprise. Ces audits internes concilient la logique environnementale avec la logique
financière. En effet, si l’objectif affiché des managers est d’améliorer les performances
environnementales des sites industriels, il n’en demeure pas moins que les audits
internes répondent aussi à des impératifs économiques. Ces audits permettent de
détecter les éventuelles économies de ressources et de mettre en place des actions pour
réduire les coûts : « La performance environnementale des usines va de pair avec les orientations
stratégiques de l’entreprise, c.-à-d. que si on baisse les consommations d’eau et d’énergie, on
diminue la dépense de l’entreprise. (…) Si on baisse les émissions de CO 2, on commence dès à présent
à diminuer une dépense future de l’entreprise car, selon les schémas de quotas au niveau de
l’Europe, on aura à payer les émissions de CO2. (…) Donc, il faut trouver des orientations qui
permettent à l’entreprise de se développer, de baisser ses dépenses, et de prendre des parts de
marché. » (Risk manager, entretien). Le substrat technique de l’audit interne découle du
croisement de la norme ISO 14001 et d’un standard interne de performance
environnementale. Il traduit les deux logiques en termes d’indicateurs
environnementaux et financiers. Un indicateur composite permet aux managers locaux
de piloter la performance environnementale de leurs sites industriels : « On a créé un
indicateur global qui se focalise vraiment sur les priorités environnementales du groupe. Notre
indicateur est composé : d’un axe consommateur de ressources avec deux branches (eau et
énergie) ; d’un second axe concernant les émissions dans l’air (émissions de COV, émissions de gaz à
effets de serre CO2) et d’un dernier axe avec les déchets générés et mis en décharge. » (Directeur
environnement et hygiène, entretien). « Notre objectif est de réduire notre indicateur global de
30 % à l’horizon 2013. » (Risk manager, entretien). Ce substrat intègre aussi des indicateurs
financiers pour mesurer la performance des sites industriels en termes de coûts de
43 En plus des audits internes, des audits externes sont réalisés pour donner l’assurance aux
parties prenantes, notamment les clients, que l’entreprise répond bien à leurs attentes.
Ces audits sont menés dans le cadre de la certification ISO 14001.
44 L’audit de certification répond principalement à une logique de légitimité vis-à-vis des
constructeurs automobiles, qui représentent les principaux clients de l’entreprise. Ces
derniers subissent depuis une dizaine d’années des pressions réglementaires de plus en
plus fortes pour réduire leurs rejets atmosphériques. Ces polluants, notamment les
émissions de composés organiques volatils (COV) et de dioxyde de carbone (CO2), sont
néfastes pour la santé des individus et contribuent au réchauffement climatique. Pour
faire face à leurs responsabilités environnementales, les constructeurs automobiles
49 L’entreprise FrenchTyre procède à une analyse du cycle de vie (ACV) pour évaluer les
impacts environnementaux du pneumatique en considérant toutes les étapes de son cycle
de vie, depuis l’extraction des matières8 qui le composent jusqu’à sa fin de vie ou son
recyclage. « On a fait une analyse du cycle de vie du produit (les pneumatiques) qui nous a permis
de voir que l’impact principal de la vie du produit, c’était pendant l’usage sur le véhicule » (Risk
manager, entretien). Par exemple pour un pneumatique poids lourd, l’ACV montre que «
les phases de conception, fabrication et transport ne génèrent que 5 % de l’impact global (…) tandis
que la phase d’utilisation représente la part la plus importante de l’impact (93,5 %) du fait de la
consommation de carburant induite par la résistance au roulement. En fin de vie, le traitement
pèse très peu (1,5 %) dans le cycle de vie du pneu. » (Rapport développement durable).
50 La méthode des écopoints constitue le substrat technique de l’ACV. L’écopoint est l’unité
de mesure utilisée pour rendre compte des impacts d’un produit durant son cycle de vie.
Il permet d’agréger différents impacts en un indice unique utilisé pour comparer l’impact
global de deux ou plusieurs produits. Pour le pneumatique, « l’écopoint prend en compte de
nombreux critères : impacts sur la santé et les écosystèmes, atteinte à la biodiversité,
consommation de minerais et de ressources fossiles. Pour cela, il évalue l’intensité des phénomènes
qui induisent ces impacts : émissions de substances organiques et inorganiques, changement
climatique, émissions de radiations ionisantes, substances cancérigènes. » (Rapport
développement durable). En identifiant les impacts, la philosophie gestionnaire qui sous-
tend l’ACV est d’améliorer la performance des produits : « Un phénomène, appelé la
résistance au roulement, fait que le pneumatique va consommer du carburant. Il oppose une force à
l’avancement du véhicule et ce n’est pas négligeable, car c’est 20 % de l’énergie du véhicule qui
passe dans le pneu. Ce qui signifie qu’un de nos axes de travail, et sans doute l’axe le plus important
en termes de stratégie d’entreprise, c’est l’abaissement de la résistance au roulement du pneu, pour
que le pneu consomme moins de carburant. » (Risk manager, entretien). « Au vu des
enseignements de l’ACV, nous développons des technologies permettant de réduire la résistance au
roulement pour diminuer la consommation de carburant, mais également d’allonger la durée de vie
pour réduire le nombre de pneus à traiter en fin de vie et de privilégier les matières premières à
faible impact environnemental. » (Rapport développement durable).
51 Les résultats de l’ACV influencent les décisions des dirigeants, car ils les incitent à
investir dans des programmes d’éco-conception afin de proposer à leurs clients des
produits plus performants (ex. les pneus économes en carburant) et de se différencier des
concurrents : « Il se trouve que le pneu écologique, qui consomme moins de carburant à l’usage,
c’est un élément d’augmentation de part de marché parce que le client est demandeur de ce type de
produits. » (Risk manager, entretien). Pour satisfaire les clients, qui souhaitent acheter le
pneu le moins cher à l’usage, le service de recherche et développement de l’entreprise
s’emploie à abaisser le prix de revient kilométrique en améliorant l’efficacité énergétique
et la durée de vie du pneumatique : « Grâce aux efforts déployés par nos chercheurs, les pneus
sont globalement supérieurs à la moyenne du marché depuis plusieurs décennies en matière
d’efficacité énergétique et de durée de vie. » (Directeur marketing-innovation, rapport
développement durable). L’une des innovations marquantes de ces dernières années fut «
de remplacer partiellement le noir de carbone par la silice pour améliorer l’efficacité énergétique
du pneu » (Directeur marketing-innovation, vidéo). Introduit dans les mélanges de
gommes, la silice est liée aux molécules du caoutchouc grâce à un agent de liaison
chimique qui est ajouté lors du mélangeage. Ce procédé a permis à l’entreprise de
produire des pneus à faible résistance au roulement et d’obtenir un avantage compétitif.
En résumé, l’ACV permet de combiner la logique environnementale à la logique de
marché : « Augmenter l’efficacité énergétique des pneus constitue donc un enjeu économique et
environnemental majeur. En réduisant la consommation des véhicules, des ressources fossiles sont
économisées, moins de gaz d’échappement sont rejetés dans l’atmosphère et le coût de revient au
kilomètre est diminué. » (Rapport environnement).
52 Etant soumise à l’article 116 de la loi NRE9, l’entreprise FrenchTyre publie dans son rapport
annuel des informations sur sa gestion environnementale. Elle publie également un
rapport spécifique (rapport environnement ou développement durable) qui présente de
manière détaillée les objectifs, les actions menées pour améliorer les performances
environnementales de ses produits et sites industriels ainsi que les résultats obtenus. Sur
son site internet, elle communique régulièrement ses résultats sous forme d’une liste
d’indicateurs environnementaux. Tous ces supports sont établis conjointement par le
service environnement et le service de communication. Avant leur publication, ces
rapports sont vérifiés par le cabinet d’audit et de commissariat aux comptes
PricewaterhouseCoopers. Cet audit répond à la fois à une logique environnementale et
une logique de légitimité. En effet, la philosophie managériale qui sous-tend cet audit est
de rendre compte aux parties prenantes de leurs performances environnementales et de
les rassurer sur la maîtrise des risques de l’entreprise dans le but de préserver sa
réputation. Les rapports audités sont diffusés aux trois catégories de parties prenantes de
l’entreprise : les acteurs participant directement à la vie sociale et économique de
l’entreprise (salariés, clients, fournisseurs, actionnaires), ceux qui l’observent (ONG,
syndicats) ou l’influencent (pouvoirs publics, collectivités locales, société civile).
53 Le substrat technique de l’audit est constitué de référentiels de reporting élaborés par
l’entreprise et inspirés des lignes directrices de la Global Reporting Initiative (GRI). La
démarche de reporting de l’entreprise est expliquée ci-après : « Les responsables de
l’environnement, dans chacune des usines, sont chargés de faire le reporting à travers un système
d’informations. Ils vont rentrer tous les mois un ensemble de paramètres et de données sur leurs
consommations et leurs émissions de toutes sortes. Ensuite, c’est le service central environnement
qui fait, à travers ce système, la consolidation des résultats des usines. La consolidation est
trimestrielle (…).Àmon niveau, j’ai à faire la consolidation de l’ensemble de la démarche
développement durable pour la réalisation des pages NRE du rapport annuel et pour le rapport de
développement durable. » (Risk manager, entretien). En outre, il convient de noter que la
mission des auditeurs externes ne se limite qu’à vérifier l’application des procédures de
reporting interne : « Nous avons analysé les procédures de reporting de ces informations sociales
et environnementales au regard de leur pertinence, leur fiabilité, leur objectivité et leur caractère
compréhensible » (Rapport d’audit du commissaire aux comptes). Cette vérification porte
davantage sur la qualité du rapport au regard des procédures internes que sur le contenu
des politiques et performances environnementales de l’entreprise. Le degré de confiance
à accorder au contenu du rapport est donc à relativiser : « Nous avons mis en œuvre les
diligences (…) conduisant à une assurance modérée que les processus d’établissement de certaines
4. Discussion
55 L’objectif de cette recherche est de montrer comment l’audit environnemental concilie
des logiques institutionnelles hétérogènes. D’après le cas étudié, l’entreprise FrenchTyre
est soumise à quatre logiques différentes (logique environnementale, logique financière,
logique de marché et logique de légitimité) inhérentes à son champ organisationnel (la
filière plastique et caoutchouc). Pour faire face à ce pluralisme institutionnel, le dispositif
de gestion prend alors plusieurs formes : analyse environnementale, audit interne de
SME, audit de certification ISO 14001/ audits externes de SME, audit de conformité
réglementaire, analyse de cycle de vie (ACV) et audit du rapport environnement. Chaque
forme est une combinaison de deux logiques qui fait varier les éléments composant le
dispositif de gestion (substrat technique, philosophie gestionnaire, vision simplifiée des
relations organisationnelles). Ainsi, l’audit environnemental concilie les logiques en
présence en adoptant plusieurs formes afin de répondre aux attentes des divers acteurs
du champ organisationnel. Il s’agit d’un dispositif de gestion caméléon. Nous qualifions
alors de « polymorphisme organisationnel » le processus par lequel ce dispositif se
transforme en réaction à la complexité institutionnelle. Dans cette partie, nous discutons
des contributions théoriques de la recherche en soulignant les concepts d’hybridation
duale et de polymorphisme organisationnel.
56 Il ressort de l’étude de cas que l’audit environnemental est utilisé dans l’entreprise pour
répondre de manière simultanée et dissociée aux quatre logiques hétérogènes de la filière
plastique et caoutchouc. Au sein de ce dispositif de gestion, l’articulation des logiques
institutionnelles se déroule en deux temps, de la compartimentation vers l’hybridation
duale des logiques. Tout d’abord, la compartimentation des logiques (Pratt et Foreman,
2000 ; Kraatz et Block, 2008) a lieu pour répondre de façon dissociée aux attentes des
divers acteurs du champ organisationnel. A titre d’exemple, l’analyse de conformité
réglementaire sert à répondre aux injonctions des pouvoirs publics tandis que l’ACV tend
à satisfaire les besoins des clients et que l’audit interne de SME cherche à préserver les
intérêts financiers des investisseurs en maîtrisant les risques. Chaque forme d’audit est
réalisée par des entités spécialisées en lien avec le service environnement et prévention :
le service juridique pour l’analyse de conformité réglementaire, le service recherche et
développement pour l’ACV, les managers et les opérationnels pour l’analyse
environnementale et l’audit interne de SME et les cabinets d’audits externes pour l’audit
de certification ISO 14001 et le rapport environnement. Les logiques étant traitées
Logique de
Logique financière Logique de légitimité
marché
artefacts. Ainsi, à l’instar des institutions et des organisations, les artefacts peuvent être
considérés comme des « objets vivants », évoluant d’un état à un autre, pour permettre
aux organisations de répondre à leur environnement institutionnel complexe et ce
processus de changement peut être qualifié de polymorphisme organisationnel. C’est
donc à travers ce concept que notre recherche complète les travaux antérieurs et
contribue effectivement au courant des micro-fondations du néo-institutionnalisme
(Powell et Colyvas, 2008 ; Thornton et al., 2012). En interrogeantles fondements des
logiques institutionnelles à l’échelle intra-organisationnelle, ce nouveau courant
constitue, en quelque sorte, un retour au vieil institutionnalisme (de Selznick, 1949) dans
la mesure où les anciens institutionnalistes considéraient les organisations à la fois
comme les unités institutionnalisées et les lieux clés de l’institutionnalisation (DiMaggio
et Powell, 1997).
Conclusion
62 Malgré l’engouement suscité par l’audit environnemental dans les organisations, ce
dispositif de gestion fait rarement l’objet d’études académiques. En croisant les travaux
sur les logiques institutionnelles et les dispositifs de gestion, cette recherche explore
comment l’audit environnemental concilie des logiques hétérogènes. À partir d’une étude
de cas, réalisée dans une entreprise française de pneumatiques, nous montrons que
l’audit environnement est un dispositif de gestion caméléon. Il concile les logiques en
présence en adoptant plusieurs formes en réaction à la complexité institutionnelle. Une
taxonomie des formes d’audit environnemental est alors mise en évidence : l’analyse
environnementale, l’audit interne de SME, l’audit de certification ISO 14001/l’audit
externe de SME, l’audit de conformité réglementaire, l’analyse de cycle de vie et l’audit du
rapport environnement. Chaque forme d’audit hybride deux à deux les logiques
institutionnelles (logique environnementale, logique financière, logique de marché,
logique de légitimité) inhérentes au champ organisationnel (filière plastique-caoutchouc)
et présente des caractéristiques distinctes (en termes de substrat technique, de
philosophie gestionnaire et de vision simplifiée des relations organisationnelles).
63 Cette recherche contribue au courant des micro-fondations du néo-institutionnalisme en
examinant le rôle actif des dispositifs de gestion au niveau micro-organisationnel (niveau
très peu traité dans la littérature). En mettant en évidence les concepts d’hybridation
duale et de polymorphisme organisationnel, l’étude participe à une meilleure
compréhension de la matérialité des logiques hétérogènes. En outre, elle enrichit
également la littérature de management environnemental en explorant l’aspect social de
l’audit environnemental dans la mesure où les études en sciences de l’environnement
restent focalisées sur l’aspect technique de ce dispositif de gestion. En termes de
contributions managériales, l’étude fournit une grille d’analyse multicritères de l’audit
environnemental qui devrait faciliter la prise de décision des managers.
64 Toutefois, cette recherche présente des limites inhérentes à la méthodologie retenue. En
premier lieu, étant donné que l’étude repose sur un cas unique, il semble qu’une
réplication dans d’autres contextes organisationnels (entreprises de tailles et de secteurs
d’activité variés) soit nécessaire pour permettre la transférabilité des résultats et leur
généralisation analytique (Yin, 2003 ; Ayerbe et Missonnier, 2007). Ainsi, si notre étude de
cas montre l’hybridation duale des logiques, il serait intéressant de voir dans quelles
mesures d’autres formes d’hybridation peuvent apparaître et comment elles se traduisent
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NOTES
1. Bien qu’on insiste souvent sur la confusion entourant ces définitions, il s’agit en fait d’un faux
débat, car ces dernières renvoient toutes à une évaluation systématique et documentée, seuls les
objectifs et l’objet de la vérification changent (Gendron, 2004).
2. Pour en savoir plus : http://www.installationsclassees.developpement-durable.gouv.fr/
Risques-accidentels.html
RÉSUMÉS
L’objectif de cet article est de montrer comment l’audit environnemental concilie des logiques
institutionnelles hétérogènes afin de contribuer au courant des micro-fondations du néo-
institutionnalisme. À partir d’une étude de cas, nous analysons l’audit environnemental d’une
entreprise française de la filière plastique et caoutchouc confrontée à quatre logiques
institutionnelles hétérogènes (logique environnementale, logique financière, logique de marché
et logique de légitimité). Face à cette complexité institutionnelle, les résultats montrent que
l’audit environnemental est un dispositif de gestion caméléon qui adopte plusieurs formes pour
concilier les logiques en présence. Il hybride les logiques de façon duale et ses composants
(substrat technique, philosophie gestionnaire, vision simplifiée des relations organisationnelles)
évoluent en fonction de la dynamique d’hybridation. Le concept de « polymorphisme
organisationnel » est alors proposé pour expliquer le processus de changement du dispositif de
gestion.
The objective of this paper is to highlight how the environmental audit reconciles heterogeneous
institutional logics in order to contribute to the microfoundations of institutional theory. Using a
case study approach, we explore the environmental audit of a French company in rubber and
plastics industry which faces four heterogeneous institutional logics (environmental logic,
financial logic, market logic and legitimacy logic). The results show that the environmental audit
is a “chameleon” management tool that can take many forms to suit the institutional complexity.
Each form of the environmental audit hybridizes two logics and its characteristics (technical
substrate, management philosophy, simplified vision of organizational relationships) evolve in
line with the dynamic hybridization. Finally, the concept of “organizational polymorphism” is
proposed to explain this organizational change process.
INDEX
Mots-clés : Audit environnemental – Dispositif de gestion – Logiques institutionnelles
– Matérialité – Polymorphisme organisationnel
Keywords : Environmental audit – Institutionallogics – Materiality – Management
tool – Organizational polymorphism
jel M14 - Corporate Culture; Social Responsability, M42 - Auditing, Q53 - Air Pollution; Water
Pollution; Noise; Hazardous Waste; Solid Waste Recycling
AUTEUR
ANGÈLE RENAUD
Université de Bourgogne, IAE Dijon, CREGO
2 Boulevard Gabriel 21000 Dijon
angele.renaud@u-bourgogne.fr