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Attention
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Sur le plan mondial, la population augmente rapidement et la demande en eau de bonne
qualité est de plus en plus forte (1000 m3 par an et par habitant est le minimum vital) ce qui
finira par rendre les réserves insuffisantes. Face à ce problème majeur de manque d’eau, le
dessalement de l’eau de mer s’avère comme une solution fiable de production d’eau douce.
Il y avait plus de 10 350 unités de dessalement dans plus de 140 pays du monde, qui
produisent plus de 37 750 millions m3/j de l’eau dessalée adaptée à la consommation usuelle.
L’eau dessalée peut être destinée vers de nombreux domaines comme: la consommation
humaine, l’industrie, l’irrigation, la production de l’eau embouteillée et de l’eau distillée…etc
(METAICHE, 2006).
Dans ce chapitre, nous décrivons brièvement les procédés les plus utilisés pour dessaler
l’eau de mer et la rendre potable. Après, nous présenterons les inconvénients et les problèmes
techniques rencontrés en dessalement.
L’eau de mer est une solution complexe qui contient, tout au moins à l’état de traces, tous
les éléments chimiques connus. Ils se présentent soit à l’état de molécules soit à l’état d’ions
(LECLERC, 1978).
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Tableau 4 : Composition chimique de l’eau de mer.
Dans le cas des mers ouvertes, la proportion des différents sels en présence est relativement
constante comme le montre le tableau ci-dessus. En particulier, la somme des ions chlorures
et sodium représente environ 85 % du poids total des sels. En revanche, dans les mers fermées
ou les grands lacs salés, la concentration par évaporation à partir d’apport d’eau de surface
faiblement salées mais relativement différentes de celle de l’eau de mer, conduit quelques fois
à des compositions ioniques très particulières (MAUREL, 2006).
III.2.2. Salinité
La salinité des mers ouvertes sur les masses océaniques (Atlantique, Manche, Mer du Nord,
Pacifique) est de l’ordre de 35 g/l et c’est cette valeur qui est considérée comme salinité
standard de l’eau de mer. Des variations plus ou moins importantes autour de cette valeur
moyenne existent en fonction du bilan précipitations-évaporations. La salinité peut être très
différente dans le cas des mers fermées ou peu ouvertes sur les masses océaniques (Tableau
5) (MAUREL, 2006).
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Tableau 5 : Salinité de l’eau de mer
Un poste de prétraitement ;
Un post-traitement.
Saumure
Eau salée
Dans le cas de dessalement de l’eau de mer, les rejets de saumure ne posent pas de gros
problèmes bien qu’ils puissent contenir des produits de corrosion ainsi que des réactifs utilisés
(MAUREL, 2001).
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III.4. Prise d’eau de mer
La prise d’eau de mer doit permettre d’obtenir à l’entrée de l’usine de dessalement une eau
de la meilleure qualité possible, en particulier du point de vue matières en suspension. Cette
prise en compte de la qualité de l’eau est d’autant plus importante que le procédé de
dessalement choisi sera l’osmose inverse.
Selon MAUREL (2006), deux technologies peuvent être utilisées : les forages côtiers et les
prises d’eau de surface:
Les forages côtiers soit verticaux soit sous forme de galeries horizontales permettent
d’obtenir une eau de très bonne qualité et relativement stable (turbidité, température…). Cette
technique est utilisée pour les installations de faible capacité (< 40 000 m3/j). L’inconvénient
des forages côtiers est leur colmatage éventuel au cours du temps.
La prise d’eau peut être faite en pleine mer. Dans le cas idéal, le captage doit être
effectué en zone profonde, éloigné de la cote, protégé des pollutions et des forts courants et ne
pas être sous l’influence de rejets. La prise d’eau peut aussi être réalisée au moyen d’un
chenal d’alimentation. De tels systèmes permettent d’alimenter des installations de grandes
capacités (> 100 000 m3/j). Les variations de qualité peuvent être élevées suite, par exemple, à
des pollutions ponctuelles (hydrocarbures, algues...).
III.5. Prétraitement
Le prétraitement est l’un des principales filières dans les stations de dessalement de l’eau
de mer, il évite la formation de dépôts sur les surfaces membranaires et afin de produire une
eau conforme à l’alimentation des systèmes de dessalement. Il a pour but d’éliminer les
matières décantables et de réduire les matières en suspension, ainsi que la turbidité
(HAMOUNI, 2008).
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III.6. Différents procédés de dessalement de l’eau de mer
Ces procédés peuvent être classés plus précisément (BOUKEMIDJA, 2007), soit :
Procédés de dessalement
Procédés de dessalement
III.6.1.1. Distillation
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Distillation à multiples effets
- Dans la première cellule de distillation (Figure 5), l’eau de mer ruisselle sur un serpentin
de tubes chauffés ou sur des plaques, grâce à la chaudière. Elle se transforme ainsi en vapeur à
seulement 70°C, grâce à une pression inferieure à la pression atmosphérique. Cela évite
l’entartrage des tuyaux ;
- L’eau de mer non transformée en vapeur s’accumule au fond de la cellule. Elle se
concentre davantage de sels car celui-ci n’est pas vaporisable ;
- L’eau est pompée, puis envoyée dans la cellule 2 ;
- La vapeur entre dans la deuxième cellule, puis se condense dans le serpentin. Ce passage à
l’état liquide dégage assez d’énergie pour en céder à l’eau de mer. Celle-ci ruisselle sur les
tubes ainsi chauffés et se vaporise ;
- Le même processus se répète dans la troisième cellule. En pratique, on peut placer en série
jusqu’à 6 ou 7 cellules de distillation ;
- Le dernier serpentin est refroidi par l’eau de mer ;
- La vapeur condensée dans les serpentins donne de l’eau douce. Il faut 2 à 4 litres d’eau
salée pour obtenir 1 litre d’eau douce.
Figure 5 : Procédé de dessalement par distillation à multiples effets MED (ALAOUI, 2008)
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Distillation Multi-Stage Flash (MSF) ou par détentes successives
Ce procédé dit flash consiste à maintenir l’eau sous pression pendant toute la durée du
chauffage, lorsqu’elle atteint une température de l’ordre de 120°C elle est introduite dans une
enceinte (ou étage) où règne une pression réduite (Figure 6). Il en résulte une vaporisation
instantanée par détente appelée flash. Le phénomène de flash est reproduit ensuite dans un
deuxième étage où règne une pression encore plus réduite. La vaporisation de l’eau est ainsi
réalisée par détentes successives dans une série d’étage où règnent des pressions de plus en
plus réduites. On peut trouver jusqu’à 40 étages successifs dans une unité MSF industrielle
(BOUGOUFA, 2004).
Figure 6: Procédé de dessalement par distillation multi flash MSF (ALAOUI, 2008)
III.5.1.2. Congélation
Lorsqu’on refroidie une eau de mer jusqu’à environ - 2 °C, il y a formation de cristaux de
glace constitués d’eau douce. L’eau de mer étant alors plus concentrée, elle résiste mieux à la
congélation. Si on fait baisser davantage la température, la production de glace augmente, le
sulfate de sodium décahydraté à tendance à précipiter à - 9 °C. Pour produire de l’eau pure, il
est donc préférable de ne pas refroidir l’eau au dessous de cette température (DESJARDINS,
1997).
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III.6.2. Procédés utilisant des membranes
Le dessalement de l’eau de mer par osmose inverse nécessite un prétraitement très poussé
afin de prévenir le colmatage des membranes (BENSAADI, 2004).
III.6.2.2. Électrodialyse
Le procédé de séparation par membrane d’électrodialyse consiste à séparer électriquement
les molécules de NaCl contenues dans une eau concentrée en anions (Cl-) et en cations (Na+).
Puis à une dialyse par des membranes appropriées séparant l’eau douce et les ions produits
(BENSAADI, 2004).
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Selon DEGREMONT (1978), si un liquide riche en ions est soumis à un champ électrique
grâce à deux électrodes entre lesquelles on applique une différence de potentiel continue, les
cations de Na+ vont se diriger vers l’électrode négative (cathode) tandis que les anions de Cl-
vont se diriger vers l’électrode positive (anode). Si rien ne s’oppose à leur mouvement, ils
viennent se décharger sur les électrodes de signes contraires, il y a électrolyse. En revanche, si
l’on place entre les deux électrodes un ensemble de membranes de dialyse sélectives :
Eau de mer
Rinçage anode Rinçage cathode
Liquide de rinçage d’électrode
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III.6.3. Procédés agissant sur les liaisons chimiques
Ce procédé consiste en une élimination totale des sels par l’utilisation des produits
chimiques appelés « échangeurs d’ions » qui sont des substances granulaires insolubles
comportant dans leur structure moléculaire des radicaux acides ou basiques susceptible de
permuter les ions positifs ou négatifs fixés sur ces radicaux, contre des ions de même signe
(Na+ et Cl-) se trouvant en solution salée. Il utilise des résines synthétiques, les unes capables
d’absorber les anions, les autres les cations (BENSAADI, 2004).
L’extraction par solvant est l’opération fondamentale qui permet d’extraire un composant
(soluté) d’un liquide, par un autre liquide (solvant). Cette méthode repose sur la miscibilité de
certains solvants avec l’eau, sans être solvant pour les sels. On obtiendra de l’eau douce par
extraction, on peut schématiser cette opération comme suit :
La phase liquide I est un mélange homogène. Le solvant ne doit pas être miscible avec l’un
des deux composés initiaux, l’inerte et le solvant ne sont pas miscibles. Ce procédé est utilisé
généralement dans le déphénolage (élimination des phénols) des soudes usées de raffinerie
avec le gazole comme solvant. Le mode de dispersion des deux phases peut être gravitaire par
agitation ou par pulsation (AMAMRA, 1999).
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III.7. Post-traitement
Correction de pH
Le perméat présente un pH acide. Ce paramètre doit être ramené à une valeur comprise
entre 6,5 – 7,5 adéquate pour les eaux potables, et aussi pour éviter la corrosion. L’ajustement
du pH est réalisé par injection de la soude ou la chaux.
Post chloration
Le perméat doit être chloré en utilisant l’hypochlorite de sodium (NaOCl) ou le chlore
gazeux pour éviter toute contamination et développement biologique.
Selon BENSAADI (2004), les facteurs à prendre en compte dans le choix d’un procédé de
dessalement sont de deux ordres :
Critères économiques
Critères techniques
Salinité de l’eau à traiter : elle varie de 7 g/kg dans la mer baltique à 270 g/kg dans la mer
morte. En général, les procédés de distillation permettent de traiter des eaux de fortes
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concentrations, lorsque les procédés à membrane sont généralement appliqués aux eaux
saumâtres ;
Composition chimique de l’eau à traiter ;
Caractéristiques physiques de l’eau (turbidité, matières en suspension…) déterminent le type
de prétraitement à utiliser ;
Salinité de l’eau produite : selon l’usage qui en sera fait, elle peut varier de 300 à 500 ppm
pour l’approvisionnement en eau potable à 15-30 ppm pour l’alimentation en eau industrielle ;
Source d’énergie disponible (gaz, pétrole, électricité, énergie renouvelable, énergie nucléaire
et énergie récupérée).
Les principaux problèmes que l’on rencontre dans le dessalement de l’eau de mer sont des
problèmes d’entartrage, des problèmes de colmatage des surfaces d’échange et des problèmes
de corrosion.
III.9.1. Entartrage
Le tartre est un dépôt de sels minéraux dont la solubilité décroit lorsque la température de
l’eau de mer augmente. Ce dépôt est constitué principalement de carbonate de calcium qui
apparait à partir de 60 °C suivant la réaction :
(CO3H)2 Ca CO3 Ca + CO2 + H2O
La formation du gaz carbonique dans les cellules chaudes provoque une augmentation
d’hydroxyde de magnésium qui précipite suivant la réaction :
Mg + 2 OH Mg (OH)2
D’autre part le sulfate de calcium peut également précipiter dans certains cas, la réaction est
la suivante : Ca + SO4 Ca SO3
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III.9.2. Colmatage
Les dépôts qui sont à l’origine de l’encrassement des surfaces d’échanges peuvent être
classés en trois catégories :
- Les dépôts minéraux qui correspondent au phénomène d’entartrage constitués
principalement par Ca CO3, Ca SO4, x H2O… ;
- Les dépôts organiques constitués principalement par les matières en suspension, les
acides humiques ou fulviques, les microorganismes ainsi que les produits excrétés par les
microorganismes (polysaccharides) ;
- Les dépôts colloïdaux (silice, soufre, hydroxyde de fer et de manganèse d’aluminium).
En fait, un dépôt est en général constitué par un mélange de ces différents types auxquels il
faut rajouter les produits de corrosion ainsi que les précipités résultants des réactifs ajoutés
(floculants, antitartres,…) (MAUREL, 2006).
III.9.3. Corrosion
La corrosion est définie comme l’attaque, la dissolution des métaux (et en particulier des
métaux ferreux) ainsi que leur transformation progressive en oxyde ou sels plus stables.
Divers mécanismes peuvent être intervenir selon le pH, l’acidité, la présence ou non
d’oxygène dissous et de certains types de microorganismes (TARDAT, BEAUDRY, 1995).
D’après AKLI (2007), parmi les impacts dus à une usine de dessalement, il y a ceux qui se
limitent à la phase de construction et ceux qui sont à la phase d’exploitation. Les impacts
commencent avec la transformation de l’occupation du sol, puis continuent avec
conséquences visuelles et des nuisances sonores pour s’étendre à des émissions dans
l’atmosphère et des rejets dans l’eau donnent des dommages potentiels pour le milieu
récepteur.
Les activités de construction et d’exploitation auront un impact sur les zones littorales,
affectant notamment la qualité de l’air, la qualité de l’eau, la flore et la faune marine, la
perturbation d’écosystème (dunes de sable, herbiers marins).
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La réduction de l’oxygène dissous dans les eaux réceptrices par suite du rejet de saumure
chaude et les effets nocifs pour les espèces résistantes aux sels sont caractérisés comme étant
des impacts de degré moyen. La turbidité accrue et la limitation de la photosynthèse par suite
de la perturbation des sables dues aux activités d’excavation et de dragage sont caractérisées
comme des impacts de degré moyen. La toxicité due aux produits chimiques est caractérisée
comme étant un impact de degré faible.
L’Algérie a connu durant les deux dernières décennies du siècle passé une sécheresse
persistante et particulièrement dans sa partie Ouest. Cette situation a entraîné un rabattement
du niveau des nappes aquifères du fait du volume mobilisé des eaux souterraines et du volume
des réserves des barrages (Anonyme, 2007). Devant cette situation et pour assurer un niveau
acceptable en matière d’alimentation en eau potable des populations, l’Algérie a opté pour
l’option de dessalement de l’eau de mer (un littoral de 1200 Km sur la méditerranée).
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Tableau 6: Petites stations monoblocs de dessalement d’eau de mer en Algérie
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Tableau 7 : Grandes stations de dessalement de l’eau de mer en Algérie
Parmi les différents procédés décrits, on peut noter que les deux technologies qui sont les
plus couramment utilisées actuellement sont le procédé par Osmose inverse et le procédé
MSF. Leurs fiabilités respectives sont liées de façon prépondérante à la source d’énergie
employée et à la production réalisée : pour le système par Osmose inverse c’est l’emploi
direct de l’électricité comme source initiale d’énergie pour la production d’eau distillée ; pour
le système MSF c’est l’emploi d’énergie thermique en particulier gazière.
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