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MARKETING TERRITORIAL ET POSITIONNEMENT MONDIAL

Global positioning of the peripheries with territorial marketing

Marc-Urbain Proulx et Dominic Tremblay

Lavoisier | « Géographie, économie, société »

2006/2 Vol. 8 | pages 239 à 256


ISSN 1295-926x
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-geographie-economie-societe-2006-2-page-239.htm
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GÏOGRAPHIE
ÏCONOMIE
Géographie, économie, Société 8 (2006) 239-256
SOCIÏTÏ

Marketing territorial et positionnement mondial

Global positioning of the peripheries


with territorial marketing

Marc-Urbain Proulx*, Dominic Tremblay

Centre de recherche et de développement territorial


Université du Québec à Chicoutimi
555, boul. Université, Chicoutimi
Québec, Canada, G7H 2B1
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Résumé
Ce texte présente les résultats d’une étude portant sur les stratégies promotionnelles de terri-
toires périphériques. Elle a été réalisée auprès de 15 villes et villes-régions de petites et moyennes
tailles, localisées en Amérique du Nord, en Amérique du Sud, en Europe et en Asie. Furent saisis
et évalués les éléments de marketing stratégique et opérationnel utilisés par ces territoires pour
bonifier et communiquer leur offre territoriale de manière à attirer des investissements ainsi que
des entreprises. Les territoires échantillonnés ont été mesurés selon 4 critères, soit la précision de la
segmentation, les modifications de l’offre et de l’attractivité, le positionnement perceptuel ainsi que
les efforts monétaires consentis et les techniques promotionnelles utilisées. Les résultats obtenus
nous permettent de comparer systématiquement les territoires en dégageant des constats, des ten-
dances, des convergences, des divergences entre les stratégies de marketing territorial.
© 2006 Lavoisier, Paris. Tous droits réservés.

Summary
This paper presents results from a comparative study of the marketing strategies used by diffe-
rent territories located in the far periphery. As a sample, we have selected 15 small and medium size

*Adresse email : muproulx@uqac.ca


© 2006 Lavoisier, Paris. Tous droits réservés.

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cities and city-regions in North America, South America, Europe and Asia. Elements of operational
and strategic marketing used by these territories in order to attract investments and firms have been
evaluated according to four criterias: segmentation; changes in the offer; perceptual positioning;
and means invested. Results of the systematic comparative study show diagnosis, tendencies, diver-
gence and convergence between territorial marketing strategies used in the periphery.
© 2006 Lavoisier, Paris. Tous droits réservés.

Mots clés : marketing territorial, positionnement mondial, promotion économique, attractivité


des territoires, image territoriale, vision d’avenir, créneaux d’excellence, Identité régionale, offre
territoriale, compétitivité mondiale
Keywords: place marketing, economic development, city vision, attractiveness, foreign
investment, urban branding, positioning, cluster, territorial identity, global ­competition

Depuis quelques années, plusieurs villes perçoivent le déclin de leurs secteurs tradition-
nels. Certaines industries, qui ont longtemps assuré la prospérité des territoires en fournis-
sant des milliers d’emplois, révisent leurs moyens de production en adoptant de nouvelles
technologies ou en transférant leurs installations dans des régions concurrentes.
Les entreprises se modernisent et implantent des procédées qui leur permettent d’aug-
menter leur productivité et couper sur les coûts de main d’œuvre. Par exemple, la restruc-
turation de l’industrie de l’acier au États-Unis a permis de réduire le temps de production
moyen d’une tonne de métal de 10,1 heures/personne au début des années 1980 à 3 heu-
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res/personne en 2004. Cette restructuration, motivée par divers facteurs : évolution de
la demande, concurrence étrangère, coût des ressources humaines, politiques fiscales, a
entraîné une réduction de plus de 60 % de la main d’œuvre de ce secteur en 22 ans (de
450 000 employés en 1980 à 170 000 en 2002). Certaines villes, qui avaient axé leur
développement sur l’acier, ont donc vue leur moteur de prospérité s’éteindre avec la fer-
meture d’usines ou la diminution des effectifs à la suite de la hausse de la productivité.
La globalisation entraîne aussi la volatilité des entreprises et augmente la concurrence
entre les régions. La libéralisation des échanges entraîne la levée des quotas qui touchent
des pays comme la Chine et l’Inde. Cela bousculera l’industrie du textile Américaine qui
est déjà en ralentissement (perte de 655 000 emplois aux États-Unis depuis 1995). Ces
tendances se répercutent dans les estimations du Bureau of Labor Statistics qui prévoit la
poursuite du déclin de plusieurs secteurs pour la période 2002-2012. Les marchés du textile
(-31 %) et du vêtement (-69 %) seront affectés par la concurrence étrangère, alors que l’acier


 “The Steel Industry in transition”, The Congress of the United States Congressional Budget Office,
1982, 66 pages.

 “The Steel Industry in transition”, The Congress of the United States Congressional Budget Office,
1982, 66 pages.

 “Career Guide to Industries 2004-2005” U.S Department of Labor, Bureau of Statistics

  Kyvik Nordås, Hildegunn. “The Global Textile and Clothing Industry post the Agreement on Textiles and
Clothing”, Genèvre, World Trade Organization, 2004, 41 pages

  Prévision 2002-2012 du Bureau of Labor Statistics

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(-20 %), l’industrie minière (-15 %) ainsi que l’agriculture, les pêches et l’industrie forestière
(-15 %) verront les emplois rationnés par la modernisation et la hausse des importations.

Cadre conceptuel

Les municipalités dont les emplois sont générés par ces secteurs sont confrontées à la
fermeture d’usines, à la hausse du taux de chômage et à l’exode de la population. Pour
faire face aux bouleversements entraînés par cette situation, ces régions doivent attirer
de nouveaux investissements, développer le tourisme ou devenir des pôles attractifs pour
de nouveaux types entreprises. Hors, la concurrence est forte. Elle s’étale sur l’ensemble
de la planète où une multitude d’autres territoires tentent de charmer les voyageurs et
d’accueillir des grappes industrielles. Cela introduit un processus par lequel les villes ten-
tent de communiquer leur caractère distinctif et leurs avantages concurrentiels pour être
considérées lors des choix de localisation ou de vacances. (Texier 1997).

Appel au marketing territorial

L’utilisation de techniques promotionnelles par les territoires n’est pas un phénomène


nouveau. Les travaux de recensement historique menés par Ward, qui remontent jusqu’en
1850, ont montré les efforts déployés par les régions pour attirer des habitants, des touristes
et des investisseurs depuis 150 ans. Au cours des années, l’offre territoriale et les messages
publicitaires se sont ajustés aux changements culturels locaux et mondiaux et ils ont évolué
selon les besoins des secteurs émergeants. (Ward 1998).
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Cependant, l’implication des chercheurs pour adapter les techniques de marketing
modernes aux territoires est un phénomène nouveau. Le marketing s’est longtemps
limité à l’étude des transactions entreprise-client en excluant ce qui sortait de ce cadre.
C’est Kotler qui a élargi le concept du marketing traditionnel pour y inclure les échanges
non commerciaux comme les œuvres de charités, la politique, les idées et les territoires
(Kotler et Levy 1969, Kotler 1972). Cette vision est généralement acceptée dans la litté-
rature (Nickels 1974, Graham 1993) bien qu’elle ait reçu les critiques de chercheurs qui
la percevaient comme une diversion de la raison d’être du marketing (Laczniak et Michie
1979, Luck 1969, Bartels 1974, Tucker 1974). Cette nouvelle conception a entraîné la
naissance du marketing sans but lucratif et du marketing social.

Le marketing sans but lucratif

Le marketing sans but lucratif est employé par des organisations qui n’ont pas l’objectif de
générer des profits (American Marketing Association). Ces organismes utilisent des techni-
ques de marketing pour financer leurs activités (levée de fonds d’organismes de charité, fonds
de dotations) pour convaincre la population de poser des actions volontaires (signature de la
carte de dons d’organe) pour recruter des membres (parti politique, service de police) ou pour
promouvoir des causes, des gens ou des produits (associations d’affaires, centres d’emploi,
groupes environnementaux et les territoires). Le marketing sans but lucratif englobe donc la
position des autorités territoriales ou des agences de développement qui veulent promouvoir
l’attractivité locale sans avoir l’objectif de réaliser des profits. (Asworth et Voogd 1990)

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Le marketing social

Le marketing social peut être employé autant par les organismes sans but lucratif
que les entreprises (American Marketing Association). Il cherche à favoriser l’adoption
de comportements, d’attitudes et de croyances qui seront bénéfiques pour les individus
eux-mêmes ou pour la société en général (Kotler 1971). Les campagnes contre l’alcool
au volant, pour la poursuite d’études supérieures ou pour contrer l’exode de la popula-
tion sont des exemples de marketing sociétal. Le marketing social introduit l’idée qu’il
est possible d’exécuter des campagnes promotionnelles pour influencer les croyances à
d’autres fins que la favorisation du processus d’achat (Asworth et Voogd 1990). Les ter-
ritoires utilisent ce type de marketing, par exemple, pour créer des liens d’appartenance
entre les entrepreneurs et la région dans laquelle ils sont installés.

Particularités du marketing territorial

Les auteurs distancent le marketing territorial par rapport au marketing commercial.


La municipalité n’est pas un producteur d’espace et de main-d’œuvre que l’on tente de
revendre à profits aux plus offrants. Cependant, le marketing peut servir le territoire
pour mieux mettre en valeur ses avantages comparatifs (Benko, 1999). Car les dirigeants
locaux doivent tenir compte de l’obligation de générer une prospérité économique pour
combattre le chômage, éviter la désertion des espaces industriels et l’exode de la popu-
lation. Cela entraîne des différences dans la gestion du marketing territorial par rapport à
celui des entreprises.
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Différence d’objectifs

L’objectif ultime de l’entreprise réside dans l’obtention du profit. Toutes ses ressources
sont donc orientées vers se but (Yudelson 1988). Le territoire, tant qu’à lui, possède diffé-
rents mandats surtout orientés vers la satisfaction des besoins de la population. (Braun et
van den Berg 1999) La municipalité s’assure du traitement des déchets, de la sécurité publi-
que, des loisirs, de la qualité de vie etc. La croissance économique n’accapare pas la totalité
des fonds et des actions de la ville. De plus, les élus ne possèdent pas toujours de qualités
d’entrepreneurs ou la vision nécessaire pour exercer un leadership positif au développement
industriel ou touristique (Akchin 2001). Ainsi, plusieurs considèrent le marketing comme
un moyen de dernier recours lorsque le territoire est dans une situation avancée de déclin.

Absence de position hiérarchique entre les acteurs locaux

Lorsqu’il établit sa stratégie de développement, le territoire doit prendre en compte


l’intérêt de nombreux groupes. Chacun possède des volontés propres qui ne sont coordon-
nées par aucune hiérarchie comme on en retrouve chez l’entreprise commerciale (Barke et
Harrop 1990). Ainsi, il y a une large gamme d’objectifs parfois contradictoires venant des
départements de développement économique, des bureaux touristiques, des propriétaires
d’entreprises, des syndicats, des groupes environnementaux, des citoyens mais aussi de
l’influence combinée de tous ces intervenants sur les autorités municipales.

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Chacun étant indépendant par rapport aux autres, les décisions doivent être prises à
l’aide de la consultation, du consensus et du leadership plutôt que de l’autorité hiérarchi-
que. (Braun et van den Berg 1999) Cela peut entraîner un processus de décision plus long
et ardu en raison des opinions divergentes ce qui réduit la flexibilité du territoire.

La complexité du « produit » territoire

Le territoire n’est pas un produit tangible facile à décrire, mais plutôt une entité à
multiples facettes qui peut être « consommé » de milliers façons différentes par des
centaines de groupes différents. (Asworth et Voogd 1990, Padadopulos et Heslop
2002). Il est donc compliqué de déterminer les bénéfices devant être communiqués et
les publiques qui doivent être approchés.

Contrôle partiel sur le marketing mix

Le territoire a un contrôle limité sur son marketing mix. Il possède des caractéristiques
naturelles et culturelles qu’il peut difficilement altérer et il ne peut pas se relocaliser, comme
le font les entreprises, pour obtenir de nouvelles ressources ou une position géographique stra-
tégique. Les gouvernements doivent aussi respecter les champs de compétences des différents
paliers. Ainsi, le fédéral peut réglementer la capacité des municipalités d’utiliser les fonds
publics pour effectuer de la promotion. Les incitatifs financiers et les investissements majeurs
aux infrastructures doivent aussi être négociés entre plusieurs paliers gouvernementaux.
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Les composantes du marketing territorial

Malgré les différences entre les territoires et les entreprises, les composantes princi-
pales des stratégies marketing demeurent semblables. On mentionne d’ailleurs que les
régions doivent réfléchir davantage comme des entreprises pour remporter la bataille de
la concurrence territoriale (Kotler 1993, Wells et Wint 2000). Les stratégies marketing
des territoires sont regroupés en 4 composantes : la segmentation des marchés, l’optimi-
sation du marketing mix, le positionnement perceptuel et l’investissements marketing.

La segmentation des marchés

Porter indique que l’influence du territoire sur l’innovation diffère selon les secteurs
industriels (Porter 2001). Certaines régions peuvent offrir un fort niveau d’innovation
pour l’industrie électronique, mais un faible pour la biotechnologie. Cela s’explique par
les différences historiques, géographiques, culturels, réglementaires et démographiques
des municipalités. Les spécificités des villes ont donc un impact sur leurs domaines
d’excellence. Pour maximiser leur attractivité, les villes segmentent et sélectionnent les
domaines où elles possèdent des avantages et où les opportunités sont les plus favorables.
(Asworth et Voogd 1990, Kotler 1993, Braun et van den Berg 1999, Paddison 1993)
Il a déjà été mentionné qu’il est possible de « consommer » la ville de plusieurs façons
différentes. La municipalité s’adressera donc à plusieurs publics qui chercheront des
bénéfices particuliers. Leurs objectifs n’étant pas toujours compatibles, elle doit s’adres-

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ser à chacun d’eux de façon spécifique. (Barke et Harroys 1990) Il est donc important de
connaître les caractéristiques propres aux différents segments pour maximiser les retom-
ber des actions promotionnelles.
La segmentation commence donc par la compréhension des aspirations de la ville, de
ses capacités, de sa vision et de ce qu’elle a à offrir (Gouttebel 2003). Les régions cher-
chent ensuite à comprendre les besoins des investisseurs potentiels. Ces réflexions se font
généralement par une analyse de forces, faiblesse, opportunités, menaces et par l’ana-
lyse des forces de la concurrence (Kotler 1993, Braun et van den Berg 1999, Noisette et
Vallérugo 1996). On transcrira les résultats dans un plan stratégique qui coordonnera les
actions des intervenants et les alignera sur une même vision à long terme.

L’optimisation du marketing mix

Dans sa conception du marketing territorial, Kotler place la satisfaction des marchés


cibles à l’avant plan. Les responsables de marketing municipal devraient, selon cette
ligne de pensée, prendre une approche client face à ses différents publics (investisseurs,
touristes, citoyens). Cela implique la création de conditions optimales adaptées à chaque
segment et l’amélioration continue de l’offre du territoire. Cependant, on explicite peu
les éléments sur lesquels les dirigeants territoriaux doivent intervenir pour augmenter
leur attractivité, maximiser la satisfaction des investisseurs étrangers et pour assurer la
rétention des citoyens et des entreprises locales.
Même si l’adaptation de l’offre permet de créer ou de consolider les avantages des vil-
les, il faut éviter d’entrer dans des guerres de surenchère (Kotler, 1993). Cela permet aux
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entreprises de mettre les villes en concurrence pour obtenir de meilleures installations, de
plus grandes subventions ou autres primes. Le prix payer pour obtenir les investissements
devient alors souvent plus élevé que les bénéfices qui seront retirés (Kotler 2002).

Le positionnement perceptuel

Le positionnement et l’image suscitent de en plus en plus l’intérêt des chercheurs. On


mentionne l’impact énorme de l’image d’un territoire sur sa capacité d’attirer des inves-
tissements (Gilmore 2002, Hall 2002) mais on concède qu’il est complexe pour la ville de
gérer adéquatement son image (Hankinson 2001). La difficulté provient de la diversité des
intervenants qui participent au rayonnement de l’image d’une ville (Padadopulos et Heslop
2002) et de la complexité du « produit » territoire. Les municipalités n’offrent pas qu’un
seul produit auquel on peut greffer une marque mais bien tout en éventail de services et de
possibilités. Il est difficile de regrouper l’entité municipale sous un seul positionnement.
Pour contrer la difficulté de regrouper l’offre d’une région sous un seul message, la litté-
rature propose d’établir différents positionnements selon les segments visés (Padadopulos
et Heslop, 2002). Ainsi, une municipalité présentera une image pour son industrie fores-
tière, une pour rejoindre les touristes, une autre pour l’industrie de l’acier etc. La prin-
cipale difficulté reliée aux positionnements multiples est d’ordre monétaire (Hankinson
2001), les fonds étant limités, il devient difficile de créer plusieurs campagnes d’image
auprès de différents destinataires. De plus, cela peut entraîné des positionnements contra-
dictoires qui créent de la confusion. Par exemple, plusieurs municipalités veulent être

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perçues comme des villages rustiques pour attirer le tourisme et, en même temps, comme
des régions novatrices auprès des entreprises.

Investissement marketing

Enfin, les budgets limités des territoires ne leur permettent pas toujours d’investir les
sommes optimales pour effectuer la promotion et le positionnement désiré. Hankinson
fait d’ailleurs un lien entre les budgets et les difficultés de générer une image de marque à
la ville. Peu de recherches évaluent de quelle façon les budgets sont utilisés. Cependant,
les véhicules promotionnels utilisés par les villes sont semblables à ceux des entreprises :
publicité, relations publiques, vente directe, outil promotionnel en plus de l’importance
des événements et des foires commerciales.

Présentation de la recherche

Cet article propose les résultats d’une étude réalisée en 2004 auprès de 15 villes de taille
moyenne (environ 50 000 à 200 000 habitants). La majorité des municipalités sélectionnées
possèdent un positionnement géographique périphérique et font ou ont fait face au déclin de
leur secteurs traditionnels ou à l’exode de leur population. Elles ont fait appel au marketing
pour relancer leur développement économique. L’étude a permis de compiler des données
sur les stratégies utilisées par les municipalités pour se vendre aux touristes, aux investis-
seurs et pour développer un sentiment d’appartenance auprès des entrepreneurs locaux. Ce
texte se concentre sur les actions posées par les acteurs locaux auprès des investisseurs.
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Critères et objectifs de l’étude :

1) La précision de la segmentation
Il a d’abord été déterminé si les villes ont opté pour des stratégies « segmentées » ou 
« indifférenciées », c’est-à-dire si elles tentent de rejoindre des créneaux bien précis ou
si elles accueillent l’ensemble des industries sans les cibler. Les villes ont été évaluées
en tenant compte des activités de réflexions et des études effectuées pour déterminer les
forces et les faiblesses du territoire, les opportunités et les menaces de l’environnement
ainsi que le profil des investisseurs potentiels.

2) Adaptation de l’offre
Les modifications apportées au marketing mix (produit, prix, place et promotion) des
municipalités ont ensuite été analysées pour déterminer si celles-ci présentaient une offre
« adapté » ou « inchangé ». Ce critère a été évalué en tenant compte de l’ampleur des
modifications en terme monétaire, mais également selon leur diversité et leur capacité à
satisfaire les besoins des investisseurs.

3) Positionnement perceptuel
Lorsqu’elles communiquent leurs avantages, les localités peuvent utiliser un position-
nement « précis » ou « général ». Certaines tenteront de dégager une image bien définie
vers une clientèle déterminée tandis que d’autres se présentent de façon globale. Ce cri-

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tère a été évalué en tenant compte du choix des messages utilisées pour présenter la ville
comme un lieu attractif, de la viabilité à long terme de l’image et de la capacité de l’axe
de communication d’atteindre les investisseurs cibles.

4) Investissement marketing
Enfin, les fonds accordés au marketing territorial ainsi que les actions entreprises pour
maximiser les investissements ont été analysés. Pour ce critère, on a évalué comment
était structurée la promotion locale ainsi que les budgets des organismes de promotions
créés par le territoire et les initiatives privées pour promouvoir la ville. La cohérence de
la stratégie promotionnelle avec les objectifs de la ville et les marchés qu’elle cible a
également été évaluée.

Résultats de l’étude

Tableau 1 / La précision de la segmentation par rapport au niveau d’adaptation

Segmenté

12 15
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10 11 14

9 8
13
3 3

4 7
3 3
5
Offre 6
inchangée Offre
modifiée

Indifférencié

1 =1 Punta Arenas
= Pu nta A ren as 2 =2 =Escondido
E scond ido 3 3==Tromso
Tromso
4 =4 Prince
= Pri nceGeorge
G eo rge 5 =5 =WhiteHorse
W hiteH orse 6 6==Inverness
I nve rness
7 =7 Richmond
= Ri chmon d 8 =8 =Morioka
M orioka 9 9==Ville
V illede
de Saguenay
Sa guen ay
10 10
= Moncton
= M onc ton 1111= =Winnipeg
Wi nn ipe g 1212==Sherbrooke
S he rbroo ke
13 13
= Saint-Paul
= Sai nt-Pau l 1414= =Cork
C ork 1515==Oulu
Oulu

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En observant le tableau 1 : « La précision de la segmentation par rapport au niveau


d’adaptation », on observe une forte concentration dans le quadrant 1, c’est-à-dire une
offre segmentée et adaptée selon les forces des villes et les besoins des investisseurs.

Précision de la segmentation

Les résultats montrent l’importance accordée à la planification et à l’élaboration de


visions d’avenir. En effet, de moins en moins de villes déterminent leurs segments seu-
lement de façon informelle. Beaucoup de municipalités, qui s’étaient toujours basées
sur leurs attraits innés pour attirer des investisseurs, mandatent maintenant des firmes
d’experts pour déterminer les secteurs sur lesquels elles devraient concentrer leurs efforts.
Ainsi, la majorité des régions étudiées optent pour des stratégies dites « segmentées ».
Elles analysent leurs forces et sélectionnent les secteurs pour lesquels les perspectives de
réussite sont les plus élevées.
À la suite de ces séances de réflexion stratégique, la majorité des localités offi-
cialisent leur choix de créneaux à l’intérieur d’une « Vision » à long terme ou d’un
plan de développement. La création de la vision est parfois une initiative des inter-
venants de la municipalité qui cherchent à dynamiser la relance leur économie. Le
plan stratégique devient alors un outil pour obtenir du support (capitaux, infras-
tructures, structures) auprès des paliers de gouvernements supérieurs en plus de
guider l’action des intervenants sur le terrain autour des segments précis énoncés
dans le plan. Pour d’autres villes, la création d’une vision fait partie d’une stratégie
de développement globale initiée par les paliers de gouvernement supérieurs qui
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demandent aux municipalités de créer des plans et de déterminer leurs créneaux
d’excellence pour ensuite y investir.
Divers facteurs guident les municipalités lors du choix des segments. Tout d’abord, on
tient compte des particularités du territoire au niveau géographique et démographique.
Ces particularités permettent de dégager une série de forces distinctives pour des secteurs
précis. Par exemple, la position nordique de Tromso en Norvège permet à la municipalité
de devenir un centre de premier plan dans la recherche sur les phénomènes polaires. À
Moncton, le taux de bilinguisme élevé est un avantage pour établir de centres téléphoni-
ques de service à la clientèle ou de soutien aux entreprises.
Ensuite, plusieurs régions s’intéresseront davantage aux secteurs dérivés de leurs
industries traditionnelles. Par exemple, Prince George dont l’économie est supportée par
sa capacité forestière, tente de développer le secteur de la seconde et troisième transfor-
mation du bois.
La présence de la grande entreprise sur un territoire aura également un impact sur le
choix des segments. On voudra profiter de l’établissement d’une compagnie importante
pour démarrer une grappe industrielle autour d’elle. Oulu avec Nokia et Inverness avec
Johnson et Johnson en sont des exemples.
Enfin, plusieurs secteurs offrent des perspectives d’avenir intéressantes. Les villes
peuvent être tentées de privilégier des secteurs « à la mode » comme la haute technolo-
gie, la biotechnologie ou les recherches en santé. Certaines localités qui ne possèdent pas
véritablement d’avantage de base dans ces domaines pourront tout de même s’y lancer en
créant les infrastructures nécessaires à l’attraction d’entreprises.

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Si la détermination des créneaux est généralement effectuée au travers d’un proces-


sus officiel et concerté, le profil des investisseurs cibles est déterminé de manière plus
informelle. Celui-ci évolue au travers des essais, erreurs et des expériences des acteurs
de développement. Ainsi, peu de visions ou de plans stratégiques établissent dès le départ
une description détaillée des investisseurs visés.
Il est important de noter que la segmentation présentée à l’intérieur des visions
s’attarde principalement aux domaines à haute valeur ajoutée ou de « l’économie du
savoir » pour lesquels des créneaux précis sont déterminés. Les secteurs plus tradi-
tionnels, même ceux qui ne sont pas en déclin sont peu segmentés et peu explorés à
l’intérieur des visions.

Modification des produits

Pour développer les créneaux visés dans les plans stratégiques, les municipalités
et les paliers de gouvernements supérieurs effectuent des investissements souvent
massifs pour implanter des infrastructures, créer des incitatifs et mettre en place des
structures de promotion. Les régions prennent conscience de la nécessité d’offrir une
plus value aux investisseurs pour les convaincre de venir s’implanter sur leur terri-
toire. Voici les principales modifications effectuées au sein du mix marketing par les
villes étudiées :

1) Produit
a) Centre d’aide à l’implantation et au développement des entreprises.
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Beaucoup de villes optent pour la création d’incubateurs d’entreprises pour soutenir
les compagnies des segments choisis. Ces incubateurs aident à la création d’un entrepre-
nariat local et peuvent avoir un pouvoir attractif sur les petites entreprises étrangères.

b) Amélioration de l’offre en formation


Pour s’assurer de posséder une main d’œuvre qualifiée dans les créneaux d’ex-
cellence choisis, les villes créent des programmes de formation dans les domaines
appropriés. La modification de l’offre en formation se traduit par l’ajout ou l’amélio-
ration de programmes d’études, la construction ou la rénovation des infrastructures
scolaires et l’achat d’équipement.

c) L’attraction d’activités de recherche


Pour donner une notoriété et une crédibilité à leurs créneaux d’excellence, les muni-
cipalités cherchent à convaincre les paliers de gouvernements supérieurs d’implanter des
centres de recherche et développement sur leur territoire. L’ouverture de ces centres est
l’activité d’adaptation la plus souvent remarquée chez les municipalités qui tentent de
démarrer ou de dynamiser une grappe industrielle.

d) Création de partenariats
Pour augmenter le potentiel attractif des centres de formations, de recherches et des
intervenants de la ville, on crée des activités de maillages et des processus d’échange
d’informations pour faciliter les communications entre les différents intervenants.

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2) Prix
Les modifications au niveau du prix sont effectuées par la création de différentes
mesures financières telles que : crédits d’impôt, congés fiscaux, prêts à taux d’intérêts
préférentiels, subventions ou aide à la recherche. L’adaptation du prix est utilisée pour
attirer des investisseurs, mais également pour organiser la localisation des entreprises
dans l’espace. Ainsi, le gouvernement du Québec a voulu favoriser la concentration des
activités de transformation de l’aluminium en offrant des crédits d’impôts aux entreprises
qui s’implantaient spécifiquement à Ville de Saguenay. D’autres villes voudront revita-
liser leur centre-ville et créeront donc des programmes de réduction de taxes pour les
commerces qui s’y implantent.
L’utilisation du prix comme moyen d’attraction peut rapidement mener à de la suren-
chère avec des villes concurrentes. Il faut donc l’utiliser de façon à fidéliser les entreprises
à long terme et éviter d’en faire un moyen de vente à court terme.

3) Distribution
Au niveau de la distribution, on facilite les accès à la ville par toutes les voies (voitu-
res, trains, bateaux, avions). De plus, on prévoit les variations dans le nombre d’habitants
en construisant de nouvelles aires d’habitants et en adaptant les systèmes de transport en
commun. L’amélioration de la qualité de vie fait aussi partie des priorités. On s’assure de
la propreté, de la sécurité et du développement des activités de divertissement.
On cherche aussi à faciliter l’implantation et la croissance des entreprises en réduisant
la complexité de la bureaucratie et créant des organismes ressources pour aider les entre-
preneurs dans leurs démarches.
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4) Promotion
Pour communiquer leurs avantages, les villes créent des agences de promotion. Celles-
ci planifient la stratégie marketing et font de la prospection de marché pour attirer des
investisseurs. Généralement, les régions qui lancent de nouveaux créneaux adapteront
leur image, leurs messages et leurs outils de prospection en fonctions des secteurs visés.
On explore également de nouveaux véhiculent publicitaires pour vendre les attraits de la
ville. Ainsi, des sites web sont créés ou réaménagés pour ouvrir une vitrine internationale
aux municipalités.

Si les villes sont regroupées dans le premier quadrant dans le tableau 1, elles sont
davantage divisées dans le second tableau : «  La précision du positionnement par rap-
port à l’investissement marketing ».

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Tableau 2
Tableau 2 : La précision du positionnement par rapport
La précision du positionnement par rapport à l’investissement marketing
à l’investissement marketing

Positionnem ent précis

15
11

13

10

3 7
3 12
8

Aucun investissement
marketing 4 9 Investissement
5 marketing
2 14

6
1
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Positionnem ent général

1 =1 =Punta Arenas
Pu nta A ren as
2 2==Escondido
E scond ido
33== Tromso
Tromso
4 =4 =Prince George
Pri nce G eo rge
5 5==WhiteHorse
W hiteH orse
66== Inverness
I nve rness
7 =7 =Richmond
Ri chmon d 8 8==Morioka
M orioka 99== Ville
V ille de Saguenay
de Sa guen ay
1010==Moncton
M onc ton 1111==Winnipeg
Wi nn ipe g 12
12== Sherbrooke
S he rbroo ke
1313==Saint-Paul
Sai nt-Pau l 1414==Cork
C ork 15
15== Oulu
Oulu

Positionnement perceptuel

Les villes n’en sont pas toutes au même point au niveau de l’image quelle désirent pro-
jeter aux investisseurs. Certaines localités possèdent déjà un positionnement précis, leurs
forces sont reconnues et elles sont établies comme expertes dans leurs créneaux d’ex-
cellence. Pour beaucoup de ces villes, que l’on retrouve dans le quadrant 1 du tableau,
la démarche de positionnement a commencé il y a plusieurs années. Leurs créneaux ont
obtenu de la notoriété par la présence d’entreprises à succès, le développement de pro-
duits commercialisables et la création de réseaux et de collaborations internationales.
D’autres villes choisissent un positionnement global. Au lieu de dégager une image de
leader ou d’innovateur pour des niches de marché précises, elles communiqueront une
série de forces générales qui s’adresseront à un ensemble de secteurs. Ces municipalités

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veulent projeter l’idée qu’elles offrent de tout pour toutes les industries. Le positionne-
ment général est surtout utilisé lorsqu’il y a absence de vision. Ainsi, se sont les villes
avec une stratégie indifférenciée qui optent pour un positionnement global. La majorité
des localités positionnent précisément leurs secteurs à haute valeur ajoutée tout en pré-
sentant leurs industries plus traditionnelles de façon globale.
Enfin, plusieurs villes sont en phase de repositionnement. Celles-ci tentent générale-
ment de lancer de nouveaux créneaux d’excellence pour lesquels elles ne possèdent pas
encore de notoriété. Elles cherchent à se créer une image de marque. Pour y parvenir, ces
localités ne possèdent souvent pas beaucoup d’histoires de réussite. Elles sont en phase
de bâtir leurs réseaux et elles doivent convaincre les investisseurs de leurs forces sans
avoir des preuves concrètes du succès des entreprises sur leur territoire ni d’assurance
sur la survie à long terme de la grappe industrielle. Plusieurs ont encore de la difficulté à
déterminer le « thème » ou la « force distinctive » qui pourra véritablement permettre de
générer le positionnement désiré.

Il existe 3 types de positionnement principalement utilisés par les municipalités :

1) Positionnement sur des arguments économiques


Les villes qui emploient ce positionnement tentent d’être perçue comme des régions
qui offrent des avantages monétaires importants autant au niveau des coûts d’opération
que de la rentabilité. Pour y arriver on utilise les études, les analyses et les classements
effectués par les firmes spécialisées ou les magazines économiques. Par exemple, les
résultats de l’étude Choix Concurrentiels, de KPMG, sont utilisés par les villes pour
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démontrant les faibles coûts d’opération des entreprises sur leur territoire.
D’autres villes positionnent leurs généreux incitatifs financiers (prêts, subventions,
avantages fiscaux etc.). Les municipalités qui utilisent cet argument se positionnent
comme des régions attractives parce qu’elles offrent plus d’argent (en subvention ou en
crédit d’impôts) que leurs concurrents.
Enfin, pour convaincre les investisseurs qu’il sera rentable pour eux de faire affaires
avec une municipalité, plusieurs présentent les succès survenus dans leur région. Par
exemple, on énonce les entreprises faisant partie du Fortune 500, on présente les produits
conçus et commercialisés à l’aide des structures en place et l’on donne des statistiques sur
la croissance des entreprises établies dans la municipalité.

2) Le positionnement sur des arguments géographiques


Ce type d’argumentation est surtout utilisé pour faire ressortir des éléments uniques
liés à la localisation de la municipalité. Les particularités liées au territoire et les avanta-
ges qui s’en dégagent permettent de positionner la ville selon des caractéristiques spécifi-
ques. Pour ce faire, différents arguments ou thèmes sont employés :

a)La notion de capitale ou de centre


La grande majorité des villes étudiées se définissent comme étant la capitale ou le cœur
de leur région. (Capitale des Highlands, du Yukon, de la Patagonie, du Manitoba etc.)
En utilisant l’idée de la capitale ou du cœur, on positionne le rôle central occupé par la
ville au sein de son environnement. Cela permet, entre autres, d’obtenir certaines infras-

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tructures gouvernementales (administration, santé, formation) et permet de démontrer le


dynamisme et le rôle de premier plan qu’occupe la ville dans sa région.
Certaines villes, par leur localisation, peuvent aussi se définir comme étant située au
centre d’un marché d’importance. (Centre du Canada, Centre du Canada Atlantique,
Centre d’un marché de 300 millions de consommateurs etc.) Cette position devient stra-
tégique pour toute entreprise dont les affaires s’étendent sur l’ensemble de ce marché.

b) Les particularités du territoire


On positionne les caractéristiques géographiques propres d’une municipalité qui lui
donnent des avantages sur les concurrents pour des créneaux précis. Par exemple, certai-
nes villes ont des températures peu communes, des bassins de ressources, des phénomè-
nes atmosphériques uniques etc.

c) Les alliances entre les villes


On tente d’augmenter la valeur d’un territoire par des alliances entre différentes muni-
cipalités. Les relations entre Saint Paul et le Minnesota ainsi que le Corridor Halifax-
Moncton en sont de bons exemples. Le Corridor Halifax-Moncton possède beaucoup plus
d’avantages que la seule ville de Moncton. Au lieu de se concurrencer comme s’était le
cas dans le passé, les municipalités adjacentes ont tendance à créer des partenariats pour
augmenter l’attractivité globale de l’ensemble de la région.

3) Le positionnement des ressources humaines et des infrastructures


Plusieurs villes veulent se positionner comme étant des leaders dynamiques et créatifs.
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Pour démontrer qu’elles possèdent les atouts pour le développement de leurs créneaux
d’excellence, elles cherchent à démontrer la qualité de leur main d’œuvre, de leur institu-
tion de formation et de leur équipement spécialisé. La présence de centres de recherches
gouvernementaux demeure cependant le principal argument utilisé par les territoires pour
donner de la crédibilité à leurs grappes industrielles.

Investissement marketing

Les municipalités ne déploient pas toutes autant d’énergie et de fonds pour leurs acti-
vités de prospection. Alors que certaines villes mettent en place des stratégies d’inves-
tissement permanentes, d’autres n’effectuent que quelques campagnes promotionnelles
ponctuelles. Cependant, on remarque que, depuis le début de années 2000, de nombreu-
ses villes ont entièrement remodelé leurs activités marketing pour être plus agressives
auprès des entreprises et des investisseurs étrangers. On élargie le mandat des agences
promotionnelles, on augmente leur budget et on tente de leur donner une vocation à long
terme. Certaines régions créent des départements uniquement destinés à promouvoir les
nouvelles niches de marché visées.
Il y a une très grande disparité dans l’utilisation des médias de masse pour effectuer la
promotion des villes. Certains afficheront des publicités de format standard (image, titre,
slogan) pour vanter les attraits de la ville auprès des investisseurs. Ces publicités seront
par la suite affichées dans les magazines et les quotidiens spécialisés. D’autres villes
croient moins en l’utilisation des slogans et de la publicité traditionnelle dans des médias

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de masse pour attirer les entrepreneurs. Pour eux, ce genre de publicité sera réservé à la
communication avec les citoyens à l’intérieur de campagnes d’image pour la ville ou de
campagnes de recrutement de travailleurs étrangers.
On axe de plus en plus sur le réseautage. Ce rôle est généralement attribué aux agences
de promotion. Les réseaux se créent d’abord au niveau local par des activités de maillages
entre les entrepreneurs de la ville, puis au niveau national et international par la visite de
foires commerciales, les missions et les contacts avec les ambassades.
Diverses actions de marketing direct sont posées, soit par le biais de rencontres de
sensibilisation, de contacts ciblés, d’envoi de matériel promotionnel et de sollicitation
d’entrepreneurs. Pour supporter les activités promotionnelles, les responsables des com-
munications créent des dépliants, brochures, des guides ou des vidéos promotionnels.
Les documents les plus souvent utilisés sont les guides « invest in », les guides qui expli-
quent les procédures entourant l’établissement d’une entreprise dans la ville, les vidéos
promotionnelles, les recueils de statistiques et les dépliants qui décrivent les avantages
des créneaux d’excellence. Le matériel créé agira généralement en support aux autres
activités promotionnelles.
Enfin, on utilise le web pour faire de la promotion auprès des investisseurs potentiels.
En plus de donner accès à des versions électroniques du matériel promotionnel, les sites
web permettent la transmission d’information, de statistiques et de liens qui intéresseront
les différents types d’entrepreneurs.

Conclusion
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La gestion du pouvoir attractif des régions est un processus à long terme composé
d’une série d’étapes inter reliées. La qualité des choix effectués à chacune d’elles aura un
impact important sur la capacité de la ville à attirer des investisseurs, mais aussi sur les
coûts nécessaires pour y parvenir.
Il importe donc d’être proactif dans l’implantation d’une stratégie de marketing plutôt
que de devoir réagir d’urgence au déclin des industries traditionnelles. En effet, si une
municipalité attend la fermeture de ses usines pour mettre en place des stratégies, elle
devra agir rapidement et souvent tomber dans la surenchère d’incitatifs financiers pour
contrebalancer les avantages qu’elle n’aura pas le temps de développer.
Le succès de l’action marketing demande une bonne compréhension du territoire, de
ses forces et du profil des investisseurs cibles. C’est pour cela que la majorité des villes
étudiées optent pour des stratégies différenciées. La connaissance des besoins et moti-
vations des segments permet d’effectuer les adaptations adéquates, d’utiliser des médias
promotionnels ciblés et efficaces et d’utiliser un positionnement qui saura faire réagir les
investisseurs cibles. Cependant, les municipalités doivent éviter d’évaluer leurs forces
de façon complaisante en percevant les avantages et les opportunités qu’elles aimeraient
avoir plutôt que celles qu’elles ont véritablement.
L’implication des gouvernements supérieurs a aussi un rôle à jouer dans le processus.
Les pays, états ou provinces n’ont pas tous un cadre réglementaire qui permet aux munici-
palités d’utiliser ses fonds pour la prospection auprès des entreprises. De plus, le pouvoir
d’investissement des paliers supérieurs est essentiel pour réaliser certaines modifications
à l’offre régionale, surtout lors du lancement de nouvelles grappes industrielles. Ainsi,

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l’établissement de centres de recherche gouvernementaux à rayonnement national, l’amé-


lioration des accès à la ville par la construction de nouvelles routes ou la mise sur pieds de
crédits d’impôts ne peuvent être réalisé par la ville seule. Les gouvernements supérieurs
ne doivent cependant pas se substituer au consensus régional pour effectuer les choix
stratégiques à la place des acteurs locaux.
De nombreuses villes cherchent à se forger une image de territoire dynamique où
les idées d’affaires se transforment en succès commercial. Elle ne doive cependant pas
oublier que le positionnement n’est pas seulement un concept publicitaire abstrait, il doit
également être le reflet d’une réalité du territoire. Il ne suffit pas de choisir les secteurs
à la mode, d’implanter des attractions semblables à celles qui obtiennent du succès dans
d’autres villes et de reprendre les formulations de slogans à succès pour que les inves-
tisseurs se bousculent sur le territoire. Si l’on présente une grappe industrielle comme
bien établie et, qu’en fait, la ville ne possède qu’une ou deux entreprises de ce secteur
qui peinent à démarrer, on ne sera pas en mesure de convaincre les investisseurs de notre
bonne foi. Les autorités régionales doivent eux-mêmes posséder les facteurs intangibles
recherchés par les entreprises. Le leadership régional, l’esprit visionnaire, la créativité et
l’innovation deviennent des qualités essentiels aux ambassadeurs qui tentent de démon-
trer que leur territoire possède ces mêmes avantages.
Les villes ne possèdent pas toujours beaucoup de fonds pour effectuer leur campagne
de promotion et transmettre l’image désirée. Le choix de secteurs lors de la segmentation
permet de concentrer les efforts promotionnels sur des industries bien définies. Il est ainsi
possible de gérer les perceptions des investisseurs par des véhicules promotionnels bien
ciblés et plus abordable que les campagnes d’image à grands déploiement.
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Comme il s’agit d’un processus à long terme, les premiers investissements ne seront pas
immédiats. Il faut de temps pour créer les réseaux et de développer les plans marketing. La
stabilité du financement des agences de promotions doivent donc être assurée à long terme
et non pas être remis en question à chaque changement dans la classe politique.

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