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Seymour Drescher
2001/1 no 1 | pages 63 à 76
ISSN 1291-1941
ISBN 2724629043
Article disponible en ligne à l'adresse :
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L’Amérique vue
par les tocquevilliens
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« est-il en train de devenir un auteur
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2. Cf. Seymour Drescher, « Foreword », dans Françoise Mélonio, Tocqueville and the
French, Charlottesville, University Press of Virginia, 1993, p. VII-XV.
3. Guy Gudliotta, « The Tyranny of the Misquote », The Washington Post Magazine, 6 sep-
tembre 1998, p. 4-5. Cf., aussi, « De Tocqueville Saw it Coming », The New York Times,
Week in Review, 26 novembre 2000, p. 4 sur les élections présidentielles aux États-Unis.
4. Les chiffres ont été calculés à partir de deux index électroniques. Cf. « America : History
and Life » et « Historical Abstracts » (à l’exclusion de l’Amérique du Nord). Sur
l’ampleur de l’intérêt en faveur de Tocqueville, cf. James T. Kloppenberg, « Life
Everlasting : Tocqueville in America », La Revue Tocqueville, 17 (2), 1996, p. 19-36.
Parmi d’autres interprétations collectives récentes sur Tocqueville, cf. Augustine Lawler,
Joseph Alulis (dir.), Tocqueville’s Defense of Human Liberty : Current Essays, New York,
Garland Publishing, 1993 ; Ken Masugi (dir.), Interpreting Tocqueville’s Democracy in
America, Savage, Maryland, Rowman and Littlefield, 1991 ; Tocqueville’s Political
Science : Classic Essays, New York, Garland Publishing, 1992 ; Abraham S. Eisenstadt,
(dir.), Reconsidering Tocqueville’s Democracy in America, New Brunswick, NJ, Rutgers
University Press, 1988 ainsi que Eduardo Nolla (ed.), Liberty, Equality, Democracy, New
York, New York University Press, 1992. Cf., aussi, Democracy in America, traduit par
Harvey C. Mansfield et Delba Winthrop, Chicago, Chicago University Press, 2000.
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5. Cf. Peter Berkowitz, « The Art of Association », New Republic, 24 juin 1996, p. 44-49.
Les deux réimpressions de Memoir on Pauperism sont : Chicago, Ivan R. Dee, 1997 et
Londres, Institute of Economic Affairs, 1997. Chacun des deux ouvrages comporte une
introduction de Gertrude Himmelfarb.
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6. À titre indicatif, cf. George Probst, The Happy Republic : a Reader in Tocqueville’s Ame-
rica, New York, 1962.
7. Cf. Louis Hartz, The Liberal Tradition in America : an Interpretation of American Political
Thought Since the Revolution, New York, Harcourt, Brace and World, 1955. Pour
d’autres études tocquevilliennes importantes de la même époque, cf. Daniel Boorstin,
The Genius of American Politics, Chicago Press, 1953 ; Seymour Martin Lipset, The First
New Nation, New York, Basic Books, 1963.
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8. Pour un résumé de la littérature sur la question, cf. Rogers M. Smith, « Beyond Toc-
queville, Myrdal and Hartz : the Multiple Traditions in America », American Political
Science Review, 87 (3), septembre 1993, p. 549-566 ; Jacqueline Stevens, Rogers
M. Smith, « Beyond Tocqueville, Please ! », American Political Science Review, 89 (4),
décembre 1995, p. 987-995 ; Rogers M. Smith, Civic Ideals : Conflicting Visions of
Citizenship in US History, New Haven, Londres, Yale University Press, 1997.
9. Cf. Edward Pessen, Jacksonian America : Society, Personality and Politics, Homewood,
Ill., Dorsey Press, 1969. Les sociaux-historiens, envisageant les inégalités fondamen-
tales et les divisions de classe en tant que moteur de l’histoire américaine, ne tendaient
pas à considérer La démocratie de Tocqueville comme une grille d’analyse de référence
pour faire leurs propres histoires de l’Amérique.
10. R. M. Smith, « Beyond Tocqueville… », art. cité, p. 552-553. L’interprétation domi-
nante affirme le fort sentiment (strong sense) de Tocqueville pour le pouvoir intégrateur
de la culture politique américaine et de ses institutions. Cf., par exemple, Lawrence
H. Fuchs, The American Kaleidoscope : Race, Ethnicity and the Civic Culture, Londres,
University Press of New England, 1990, chap. 1, « True Americanism : the Founda-
tions of Civic Culture », p. 3-4.
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les races en refusant d’admettre le lien qui existe entre cet aspect de
la vie américaine, d’une part, et l’« immense et complète démocra-
tie », d’autre part. À l’évidence, dans le chapitre sur les relations entre
les races, Tocqueville n’avait cependant pas hésité à pousser la logique
d’exclusion jusqu’à sa forme la plus aboutie. Il était clair pour tout
lecteur américain ou européen que le modèle de la « démocratie sans
bornes » était incompatible avec les sinistres prédictions concernant
l’aboutissement probable des relations interraciales aux États-Unis.
L’ironie réside dans le fait que la réflexion marginalisée (margina-
lized mediation) de Tocqueville sur l’issue probable des relations inter-
raciales en Amérique n’était que le signe annonciateur de l’émergence
du problème des relations interraciales dans les sociétés démocratiques
partout dans le monde. Dans le cas des États-Unis, il est maintenant
évident que le modèle égalitaire de Tocqueville a été plus solide qu’il
ne le croyait dans son chapitre sur l’avenir des relations interraciales
aux États-Unis. Le modèle tocquevillien qui souligne la capacité
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15. « Habits of the heart that make liberal democracies work. » Cf. Jean Cohen, « Trust,
Voluntary Association and Workable Democracy : the Contemporary American Dis-
course of Civil Society », dans Mark Warren (dir.), Democracy and Trust, Cambridge,
Cambridge University Press, 1999, p. 208.
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16. L’une des études américaines les plus remarquables en politique démocratique et cultu-
relle comparative menée dès le début des années 1960 ne contenait qu’une seule réfé-
rence à Tocqueville ; elle portait sur le degré d’engagement civique aux États-Unis. Cf.
Gabriel A. Almond, Sidney Verba, The Civic Culture : Political Attitudes and Democracy
in Five Nations, Princeton, Princeton University Press, 1963, p. 274-75. Sur les pers-
pectives de Tocqueville au début des année 1970, cf. S. Drescher, « Tocqueville, Alexis
de », dans Encyclopædia Britannica, Chicago, University of Chicago Press, 1974.
17. Cf. Fritz Stern, « The New Democracies in Crisis in Interwar Europe », dans Demo-
cracy’s Victory and Crisis, The Nobel Symposium, n° 93, Uppsala, New York, Cam-
bridge University Press, 1997, p. 15-22.
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18. Ronald Axtmann, Liberal Democracy into the Twenty-First Century : Globalization, Inte-
gration and the Nation-State, Manchester/New York, Manchester University Press/
St. Martin’s Press, 1996, p. 62-67.
19. Robert D. Putnam, « Democracy in America at Century’s End », Democracy’s Victory
and Crisis : Nobel Symyosium n° 93, Cambridge, Cambridge University Press, 1997,
p. 27-70 et p. 56-57.
20. Robert D. Putnam, Bowling Alone : The Collapse and Revival of American Community,
New York, Simon and Schuster, 2000, p. 292. La Revue Tocqueville contribue pleine-
ment à cette réincarnation particulière des concepts tocquevilliens. Cf. « Confiance et
capital social » pour un résumé sur les grandes dimensions internationales de ce
concept, 20 (1), 1999, p. 5-81, avec des essais théoriques et méthodologiques de Henk
Flap, Tom A. B. Snijders, Olivier Galland et Michel Forsé.
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21. Robert M. Bellah et al., Habits of the Heart : Individualism and Commitment in Ame-
rican Life, New York, Harper and Row, 1986.
22. Theda Skocpol, Marshall Ganz, Ziad Munson, « A Nation of Organizers : the Institu-
tional Origins of Civic Voluntarism in the United States », American Political Science
Review, 94 (3), septembre 2000, p. 527-544. Cf. aussi les nombreux essais dans Theda
Skocpol, Morris P. Fiorina (dir.), Civic Engagement in American Democracy,
Washington, DC, Brookings Institution Press, 1999.
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23. Une discussion sur ce point figure dans Seymour Drescher, « More than America :
Comparison and Synthesis in Democracy in America », dans Abraham S. Eisenstadt
(dir.), Reconsidering Tocqueville’s Democracy in America, New Brunswick, NJ, Rutgers
University Press, p. 77-93 ; James T. Schleiffer, « How Many Democracies ? », dans
Eduardo Nolla (ed.), Liberty, Equality, Democracy, op. cit., p. 193-205.
24. R. D. Putnam, Bowling Alone, op. cit., passim. Cet ouvrage fournit une mine d’infor-
mations sur la participation civique aux États-Unis. Sur les diverses applications de ces
idées fructueuses, cf. Nancy L. Rosenblum, Membership and Morals : The Personal Uses
of Pluralism in America, Princeton University Press, 1998, p. 43-45.
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25. Cf. inter alia, Joshua Mitchell, The Fragility of Freedom : Tocqueville on Religion. Demo-
cracy and the American Future, Chicago, University of Chicago Press, 1995 ; Stephen
L. Carter, The Culture of Disbelief : How American Law and Politics Trivialize Religious
Devotion, New York, Basic Books, 1993, p. 35-37.
26. Cf. P. Berkowitz, « The Art of Association », art. cité, p. 48-49.
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RÉSUMÉ
L’intérêt dont Tocqueville est aujourd’hui l’objet aux États-Unis n’a jamais été
aussi intense. Il est cité et invoqué dans tous les domaines de la vie politique et
intellectuelle. La raison de cet engouement a pourtant changé. Après 1945, le
contexte de la guerre froide a incité à utiliser les écrits de Tocqueville pour souli-
gner l’exceptionnalité de la société et de l’histoire américaines. Au cours des vingt
dernières années, l’attention s’est reportée sur deux autres aspects de la pensée toc-
quevillienne. Ses réflexions sur les relations entre les races et entre les sexes ont ali-
menté un débat persistant sur la validité du concept d’« égalité des conditions »
comme point de départ pour une tentative de compréhension des États-Unis.
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In the United States interest in Tocqueville has never been higher. He is cited and
invoked at all levels of political and intellectual life. However, the focus of interest has
changed. During the generation after 1945, the existence of the Cold War encouraged
the use of his writings to stress the exceptionality of American society and history.
During the last two decades attention has turned to two other aspects of Tocqueville’s
thought. His writings on race and gender relations in America have inspired prolonged
debate over the applicability of his idea of “equality of conditions” as the point of depar-
ture for understanding America. But, above all, Tocqueville’s ideas on association and
civil society have inspired a new empirical dimension of political science, and a renewed
emphasis on the role of spiritual values in the survival of democracy.