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Cancer de la prostate localisé

patient âgé de 60 ans sans antécédents pathologiques, se plaint de dysurie avec BM depuis
3 mois. TR prostate de 40 g suspecte. PSA = 10 ng/ml
biopsie prostatique confirme la présence d’un ADK prostatique gleason 3+4

C’est un des traitements de référence du cancer de la prostate localisé chez les patients
dont l’espérance de vie, estimée par l’âge et les polypathologies, est supérieure ou égale à
10 ans.

- Après 70 ans, la morbidité augmente et rend le bénéfice de la chirurgie plus discutable par
rapport aux autres alternatives thérapeutiques.

- Classiquement réservée aux tumeurs intra-capsulaires, la prostatectomie totale peut


également s’envisager pour des tumeurs avec une extension extra-capsulaire limitée (T3a
clinique, biopsique ou IRM), en particulier chez des patients jeunes et demandeurs,
combinée à d’autres modalités thérapeutiques.

- Il s’agit d’une prostatectomie totale associée à l’exérèse bilatérale des vésicules séminales.
Il existe différentes voies d’abord : voie ouverte rétropubienne ou périnéale, laparoscopique
transpéritonéale ou extra-péritonéale, robot-assistée ou pas. Aucune des voies d’abord n’a
montré de supériorité par rapport aux autres, que ce soit sur le plan carcinologique ou
fonctionnel.

1- La technique de la prostatectomie par voie ouverte rétropubienne :

- Patient en décubitus dorsal, bassin courbé. Mise en place d’une sonde urétrale.

- Incision médiane sous ombilicale.


- Dissection de la face antérieure de la prostate et de ses faces latérales jusqu’à
l’aponévrose pelvienne.

- Incision de l’aponévrose pelvienne jusqu’aux ligaments pubo-prostatiques de part et


d’autre de la prostate.

- Refoulement du bord interne des muscles releveurs de l’anus qui viennent au contact des
lames celluleuses hypogastriques contenant les pédicules vasculaires de la prostate et les
nerfs érecteurs. On peut alors mobiliser et palper la prostate.

- Ligature du plexus de santorini, après la prise en masse des ligaments pubo-prostatiques


et du plexus veineux sous jacent par un passage de gros points au fil résorbable.

- Section du plexus prés de l’apex puis on descend progressivement jusqu’à l’urètre.

- Section de l’hémi-circonférence antérieure de l’urètre qui fait apparaître la sonde. Cette


sonde sera sectionnée et attirée vers le haut. Il est important de conserver une bonne
longueur urétrale ainsi que de préserver le sphincter strié pour avoir de bon résultats
fonctionnels.

- Avant de sectionner l’hémi-circonférence postérieure, on passe à 11h et 1h des fils qui


serviront pour l’anastomose.

- Section de l’hémi-circonférence postérieure de l’urètre, du muscle recto-urétral et du fascia


de Denonvilliers permettant d’atteindre la face antérieure du rectum.

- A ce niveau, on trouve les bandelettes vasculo-nerveuses. Si on veut les conserver, il faut


libérer le feuillet superficiel du fascia pelvien prostatique en s’aidant de la pointe du
dissecteur à angle droit. On identifie correctement le pédicule vasculo-nerveux qu’on refoule
vers l’arrière.

- On passe 2 fils postérieurs sur la tranche de section urétrale pour l’anastomose ultérieure à
5h et 7h.

- Dissection du plan postérieur entre le rectum et la prostate jusqu’à la face postérieure des
vésicules séminales qui sont disséquées.

- Section des déférents.

- Latéralement, on libère les petits vaisseaux prostatiques provenant des pédicules vasculo-
nerveux (sutures fines, clips).

- Ligature section des pédicules vésico-prostatiques postéro-latéraux (ailerons prostatiques)


à la base de la prostate.

- Section de l’hémi-circonférence antérieure du col au dessus du relief de la prostate puis


section de l’hémi-circonférence postérieure du col vésical par l’intérieur de la vessie loin des
méats urétéraux. Il est important de conserver le col vésical pour de meilleurs résultats
fonctionnels.

- Section du feuillet antérieur de l’aponévrose de Dénonvilliers jusqu’à voir apparaître la face


antérieure des ampoules dérérentielles et des vésicules séminales.

- Exérèse de la pièce de vésiculo-prostatectomie.


- Rétablissement de la continuité vésico-urétrale entre le col vésical et l’urètre juste au
dessus du sphincter strié. On identifie la tranche de section urétrale par la pointe d’une
sonde à ballonnet.

- La sonde de Foley Ch20 est poussée dans la vessie, ballonnet gonflé à 15ml. Les fils sont
noués à l’extérieur. On vérifie si nécessaire l’étanchéité de l’anastomose.

- 2 drains de redon aspiratifs dans le retzius.

- La sonde vésicale sera enlevée à J7 (après une cystographie de contrôle selon les
équipes).

- L’alimentation peut être reprise dés le lendemain.

- Le lever précoce à 24h et la prescription d’héparine de bas poids moléculaire sont


essentiels

* Points techniques :

- Une prostatectomie pour un cancer T1a-T1b est techniquement plus difficile.

- La préservation des bandelettes vasculo-nerveuses peut être uni- ou bilatérale. Elle est
recommandée en cas de cancer cliniquement localisé de risque faible ou intermédiaire, chez
les patients souhaitant conserver leur activité sexuelle après l’intervention. Elle n’est pas
recommandée en cas de suspicion d’atteinte extra-capsulaire.

Même si la dissection intra-fasciale semble mieux préserver la fonction sexuelle que les
dissections inter ou extrafasciale, elle est controversée en raison de son impact potentiel sur
le taux des marges chirurgicales positives.

La préservation vasculo-nerveuse est un facteur indépendant de récupération des érections.


Les taux d’érections sont meilleurs après préservation bilatérale qu’après préservation
unilatérale.

Les risques de marges chirurgicales positives et de récidive biologique ne sont pas accrus
sous réserve d’une bonne sélection des patients et d’une technique adaptée.

- La préservation du col vésical permet une récupération plus précoce de la continence


après chirurgie mais n’améliore pas le taux de continence à long terme. Cette préservation
du col augmente le taux de marges positives de 1 à 2%.

- Pour de meilleurs résultats fonctionnels sur la continence, il est important de conserver une
bonne longueur d’urètre ainsi que de préserver le sphincter strié.

Complications et séquelles de la prostatectomie radicale :

a- Complications péri-opératoires :

- Le saignement moyen est variable, moins important dans les séries de laparoscopie, avec
risque de transfusion péri-opératoire.
- Les plaies rectales surviennent dans moins de 4 % des cas. Le traitement repose sur la
suture immédiate du rectum, une anastomose vésico-urétrale impérativement étanche et un
sondage vésical prolongé.

- En cas de fistule vésico-rectale ou urétro-rectale, trois options peuvent être proposées :


traitement conservateur (sondage prolongé), colostomie avec ou sans réparation de la
fistule et réparation de la fistule sans colostomie.

b- Complications tardives et séquelles :

* L’incontinence urinaire :

- Les taux de continence urinaire après prostatectomie totale sont variables compris entre 48
% et 93,7 % à un an.

- Une dissection apicale soigneuse préservant une bonne longueur urétrale et l’intégrité du
sphincter strié est indispensable pour optimiser le retour à la continence. L’impact sur la
continence de la préservation du col vésical et de la restauration du support postérieur du
sphincter strié reste controversé. La préservation des bandelettes vasculo-nerveuses ne
semble pas améliorer la continence.

- Les traitements disponibles de l’incontinence urinaire après prostatectomie totale sont la


rééducation vésicosphinctérienne, les injections sous muqueuses intra-urétrales, les
bandelettes sous-urétrales, les ballonnets péri-uréthraux et le sphincter urinaire artificiel.

* La dysfonction érectile :

- La récupération des érections dépend des caractéristiques du patient (âge, diabète,


fonction sexuelle avant l’intervention), de la technique opératoire et de l’utilisation ou non
d’agents pharmacologiques.

- La préservation vasculo-nerveuse permet une meilleure fonction érectile postopératoire, de


même que l’injection intra caverneuse précoce de prostaglandines E1 pour oxygéner les
corps caverneux associée par la suite à un traitement inhibiteur de la phosphodistérase de
type 5.

- Les traitements disponibles de la dysfonction érectile après prostatectomie totale sont les
agents oraux (inhibiteurs de la phosphodiestérase 5), les injections intra-caverneuses, le
vacuum et les prothèses péniennes.

* Sténose de l’anastomose urétro-vésicale :

- Le risque de sténose anastomotique après prostatectomie totale est d’environ 10 %.

- L’apparition d’une sténose anastomotique est favorisée par certaines caractéristiques du


patient (tabagisme, antécédents cardio-vasculaires), par un saignement peropératoire
important et surtout par une fistule anastomotique postopératoire. La préservation du col
vésical, le type de suture (surjet ou points séparés), le nombre de points anastomotiques, le
diamètre de la sonde utilisée et la durée de sondage ne sont pas associés au risque de
sténose anastomotique

- Le traitement de la sténose anastomotique est endoscopique. Pour les formes peu


serrées, des dilatations peuvent suffire. Pour les formes évoluées, le traitement de référence
est l’incision du col vésical à la lame froide ou au laser.

Les facteurs pronostiques :

A- Cliniques :

- Le stade clinique initial selon les données du TR, surtout pour les tumeurs localement
avancées (cT3) (surtout si obésité associée) est associé à un risque évolutif majoré après
traitement local.

B- Biologiques :

- La valeur du PSA initial et la cinétique du PSA (vélocité et temps de doublement) sont des
facteurs indépendants de l’évolution de la maladie.

- Une hypotestostéronémie pré-thérapeutique est également un facteur indépendant de


récidive (non recommandée en routine).

- Le nadir du PSA < 0,5 ng/ml après radiothérapie ou curiethérapie est un facteur de bon
pronostic.

C- Anatomopathologiques :

- Score de Gleason > 7 et pourcentage de grade 4 ou 5

- Pourcentage de biopsies positives et longueur de cancer

- Embols tumoraux intravasculaires, invasion tumorale périnerveuse

- Après prostatectomie : Gleason « chirurgical », stade pTNM, statut des limites d’exérèse
(et en cas de marge positive, sa longueur)

D- IRM :

- Détection des grades élevés (séquences de diffusion : corrélation inversement


proportionnelle entre le score ADC et le score de Gleason)

- Appréciation de l’extension locale (envahissement extra-capsulaire ou des VS).


Pronostic :

A- Groupe de faible risque de D’Amico :

* Survie globale à 5 ans : 92%

* Survie sans rechute biologique (SRB) après prostatectomie ou radiothérapie à 10 ans :


95%

* SRB après HIFU : 77% à 5ans et 70% à 7 ans.

B- Groupe de risque intermédiaire de D’Amico :

* Survie globale à 5 ans : 78% * SRB après prostatectomie : 80% à 8 ans

C- Groupe à risque élevé de D’Amico :

* Survie globale à 5 ans : 65%

* SRB après prostatectomie ou radiothérapie : 5 à 50% en fonction des facteurs de gravité

En l’absence de traitement 20 à 40% des stades T2 deviennent métastatiques à 5 ans.

D- Tumeurs localement avancées :

* SRB à 5 ans après prostatectomie : 30%

E- Stades N+ :

* Survie à 10 ans : 55%

F- Stades M+ :

- Le pronostic reste défavorable à moyen terme avec une durée moyenne de réponse au
traitement hormonal de 18 mois à 2 ans, date à laquelle apparaît l’échappement hormonal.

- En présence de dissémination métastatique, 50% des patients décèdent dans les 24 mois
et 90% dans les 5 ans.

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