Aussi, il existe une deuxième attitude qui témoigne d’un malaise plus
profond dans le cœur de l’homme. C’est l’attitude de celui qui ne croit ni
au ciel ni à son contraire.9 Les propos de Caïn en sont une belle
illustration « Il n’y a pas de jugement, pas de juge, pas d’autre monde. Il y
a ni remise d’une récompense aux justes, ni châtiment pour les
méchants. »10 Ce sont ici les propos d’un homme qui vit l’enfer. Puisque
l’enfer est « fondamentalement la négation de notre relation avec le Dieu
vivant, le meilleur moyen de supprimer cet enfer c’est de nier Dieu. Dans
ce cas logiquement, l’enfer n’existe plus, ni le paradis, ni le péché. »11 Dieu
n’existant plus, toutes les actions de l’homme sont du coup frappé par le
sceau du néant. De cela, toutes nos actions, aussi bonne qu’elles puissent
paraitre se pervertissent par ce que orienté sur nous même et non sur celui
qui est la bonté même. C’est donc a juste titre que Daniel Foucher
raisonnait en ces termes « que peut faire l’homme sans son Dieu ? Non pas
quelque chose, mais Rien, par ce qu’il n’est rien sans lui. » 12 Disons plutôt
il ne peut rien faire de vrai, de bien et de bon. Dans ce même ordre d’idée
le christ lui-même dira « moi, je suis la vigne ; vous, les serments. Celui
qui demeure en moi, et moi en lui, celui la porte beaucoup de fruit ; car
8
Jean Paul II, salvifici doloris « le sens chrétien de la souffrance », 1984, nº9.
9
daniel Foucher, pourquoi l’enfer si Dieu est Amour ?, édition de Montligeon, p.106.
10
P. Grelot, op cit, p. 38.
11
daniel Foucher, idem, p. 106.
12
Idem, p. 96.
hors de moi vous ne pouvez rien faire. »Jn15, 5. De cela, nous comprenons
assurément que sans Dieu, on ne peut porter les fruits du royaume.
Lesquels fruits trouvent leurs expressions ultimes dans l’amour à l’autre.
Par voie de conséquence nous pouvons dire que le fruit de la vie sans Dieu,
est la haine de l’autre. Cette haine s’exprime par la violence exercée sur
l’autre. Cette violence a pour point culminant le meurtre.
Nous comprenons donc ici les motivations qui ont poussé Caïn à tuer
son frère Abel. Aussi, nous comprenons que la jalousie de Caïn dont il est
question dans genèse 4, 1-16 est une conséquence et non la cause de sa
violence contre son frère. Ainsi, la cause profonde de cette violence de
Caïn était sa mauvaise disposition. C’est même là le reproche que Dieu lui
adresse « si tu es bien disposé, ne relèveras tu pas la tête ? » gn4, 7. Cette
mauvaise disposition est, comme nous l’avons déjà dit, la fermeture de
notre cœur à Dieu. Cette fermeture qui tend à lui refuser toute possibilité
d’exister pour nous. La malédiction qui accompagne l’acte de Caïn, nous
apparait alors comme une leçon de Dieu. En effet, « il instruit le genre
humain, comme s’il lui disait à haute voix : que personne parmi vous ne
commette le même crime, s’il ne veut éprouver le même châtiment. »13
19
E. Autexier, le mystère du mal, Paris, édition saint Michel, 1970, PP.81-82.
20
G.M. Garrone, Qu’est ce Dieu?, paris, Desclée, 1969, P. 60.
puissance de dieu est donc une toute puissance de bonté. Cette bonté,
interdit toute option préférentielle. Dieu veut être le même pour les
innocents comme pour les méchants. Si Dieu prenait le parti des innocents,
cela voudrait dire qu’il n’y aurait plus de mécréants puisque les hommes se
seraient ajustés à la loi divine. Cependant, « il n’y aurait pas davantage de
vrais chrétiens. On servirait Dieu par intérêt et non par amour ; les foules
envahiraient nos Eglises non pour glorifier Dieu et se sanctifier, mais pour
obtenir le succès et la prospérité. Ce serait la mort de la liberté et de la
vertu, c'est-à-dire de tout ce qui fait la grandeur et le mérite de
l’homme. »21
En plus de cela, il faut souligner le fait que la vie éternelle que Dieu
garantie a tous ceux qui se sont tenu pur (les innocents), n’est pas cette vie
terrestre. Alors pourquoi s’en prendre à Dieu lorsqu’il rappelle son élu a
lui. Apres lui avoir donné son royaume de grâce ici bas n’est ce pas normal
qu’il l’invite à son royaume de gloire ?22
25
Ibidem.
26
Ibidem.
27
Jean Paul II, salvifici doloris, le sens chrétien de la souffrance, 1984, nº 19.
28
gabriel David, méditations évangéliques, tome II, Paris, Daniel brottier, p. 145.
Nous soulignons le tout de suite, que la violence est lier au sacrifice,
voir au martyre. Puisque la violence comme nous l’avons précédemment
montrer, foule au pied « l’inviolabilité de l’homme sur qui brille la
splendeur de Dieu. »29 Cette violence qui trouve son expression ultime
dans le meurtre est facilement conciliable au sacrifice et au martyre. Le
martyre, tout comme le sacrifice qui lui est consubstantiel, est un admirable
témoignage de fidélité et de confiance en Dieu. De cela, il en découle que
se rendre disponible au martyre, c’est proclamer « qu’il n’est pas juste de
faire ce que la loi de Dieu qualifie comme mal pour retirer un bien quel
qu’il soit. »30 En clair, c’est éviter le compromis avec toute forme de mal.
Est déclaré martyre, celui qui, dans les circonstances les plus graves,
accepte de subir la violence plutôt d’en commettre. C’est le refus de violer
la vérité moral et de faire violence a l’autre même dan l’intention de sauver
sa propre vie. « C’est l’acceptation volontaire de la mort (…) et
l’affirmation de l’inviolabilité de l’ordre moral.»31 Pour conclure disons
que le martyre « (…) dévoile clairement la véritable, visage, celui d’une
violation de l’humanité de l’homme, plus en celui qui qu’en celui qui le
subit. »32 C’est précisément ici, le point qui lie la violence au martyre. La
violence ainsi comprise n’est elle pas la conséquence d’un refus de Dieu ?