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L’ORGANISATION

JURIDIQUE DES
PROFESSIONS DE SANTÉ

Cours du Professeur Joël Moret-Bailly

Thème 6

Droit des patients : l’organisation des professions à front renversé ?

Documents à lire

Document 1. Art. L. 1110-1 et s. CSP

Document 2. JOËL MORET-BAILLY, Les modes de définition des professions de sante :


présent et avenir, Rev. Dr. Sanit. et Soc., 2008-3, 508-519

Document 3. Décret n° 2017-90 du 26 janvier 2017 relatif à l’Union nationale des


associations agréées d’usagers du système de santé

Document 4. Arrêté du 24 avril 2017 portant agrément des statuts de l’Union nationale des
associations agréées d’usagers du système de santé (UNAASS) – Plan uniquement
Document 1. Art. L. 1110-1 et s. CSP

Article L1110-1

• Créé par Loi n°2002-303 du 4 mars 2002 (dite Loi Kouchner)- art. 3 JORF 5 mars
2002

Le droit fondamental à la protection de la santé doit être mis en oeuvre par tous moyens
disponibles au bénéfice de toute personne. Les professionnels, les établissements et réseaux
de santé, les organismes d'assurance maladie ou tous autres organismes participant à la
prévention et aux soins, et les autorités sanitaires contribuent, avec les usagers, à développer
la prévention, garantir l'égal accès de chaque personne aux soins nécessités par son état de
santé et assurer la continuité des soins et la meilleure sécurité sanitaire possible.

Article L1110-1-1

• Créé par Loi n°2005-102 du 11 février 2005 - art. 7 JORF 12 février 2005

Les professionnels de santé et du secteur médico-social reçoivent, au cours de leur formation


initiale et continue, une formation spécifique concernant l'évolution des connaissances
relatives aux pathologies à l'origine des handicaps et les innovations thérapeutiques,
technologiques, pédagogiques, éducatives et sociales les concernant, l'accueil et
l'accompagnement des personnes handicapées, ainsi que l'annonce du handicap.

Article L1110-2

• Créé par Loi n°2002-303 du 4 mars 2002 - art. 3 JORF 5 mars 2002

La personne malade a droit au respect de sa dignité.

Article L1110-3

• Modifié par LOI n°2018-1203 du 22 décembre 2018 - art. 52 (V)

Aucune personne ne peut faire l'objet de discriminations dans l'accès à la prévention ou aux
soins.

Un professionnel de santé ne peut refuser de soigner une personne pour l'un des motifs visés
au premier alinéa de l'article 225-1 ou à l'article 225-1-1 du code pénal ou au motif qu'elle est
bénéficiaire de la protection complémentaire en matière de santé prévue à l'article L. 861-1 du
code de la sécurité sociale, ou du droit à l'aide prévue à l'article L. 251-1 du code de l'action
sociale et des familles.

Toute personne qui s'estime victime d'un refus de soins illégitime peut saisir le directeur de
l'organisme local d'assurance maladie ou le président du conseil territorialement compétent de
l'ordre professionnel concerné des faits qui permettent d'en présumer l'existence. Cette saisine
vaut dépôt de plainte. Elle est communiquée à l'autorité qui n'en a pas été destinataire. Le
récipiendaire en accuse réception à l'auteur, en informe le professionnel de santé mis en cause

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et peut le convoquer dans un délai d'un mois à compter de la date d'enregistrement de la
plainte.

Hors cas de récidive, une conciliation est menée dans les trois mois de la réception de la
plainte par une commission mixte composée à parité de représentants du conseil
territorialement compétent de l'ordre professionnel concerné et de l'organisme local
d'assurance maladie.

En cas d'échec de la conciliation, ou en cas de récidive, le président du conseil


territorialement compétent transmet la plainte à la juridiction ordinale compétente avec son
avis motivé et en s'y associant le cas échéant.

En cas de carence du conseil territorialement compétent, dans un délai de trois mois, le


directeur de l'organisme local d'assurance maladie peut prononcer à l'encontre du
professionnel de santé une sanction dans les conditions prévues à l'article L. 162-1-14-1 du
code de la sécurité sociale.

Hors le cas d'urgence et celui où le professionnel de santé manquerait à ses devoirs


d'humanité, le principe énoncé au premier alinéa du présent article ne fait pas obstacle à un
refus de soins fondé sur une exigence personnelle ou professionnelle essentielle et
déterminante de la qualité, de la sécurité ou de l'efficacité des soins. La continuité des soins
doit être assurée quelles que soient les circonstances, dans les conditions prévues par
l'article L. 6315-1 du présent code.

Les modalités d'application du présent article sont fixées par voie réglementaire.

Article L1110-4

Modifié par Ordonnance n°2018-20 du 17 janvier 2018 - art. 2

I.-Toute personne prise en charge par un professionnel de santé, un établissement ou service,


un professionnel ou organisme concourant à la prévention ou aux soins dont les conditions
d'exercice ou les activités sont régies par le présent code, le service de santé des armées, un
professionnel du secteur médico-social ou social ou un établissement ou service social et
médico-social mentionné au I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles a
droit au respect de sa vie privée et du secret des informations la concernant.

Excepté dans les cas de dérogation expressément prévus par la loi, ce secret couvre l'ensemble
des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel, de tout
membre du personnel de ces établissements, services ou organismes et de toute autre personne
en relation, de par ses activités, avec ces établissements ou organismes. Il s'impose à tous les
professionnels intervenant dans le système de santé.

II.-Un professionnel peut échanger avec un ou plusieurs professionnels identifiés des


informations relatives à une même personne prise en charge, à condition qu'ils participent
tous à sa prise en charge et que ces informations soient strictement nécessaires à la

3
coordination ou à la continuité des soins, à la prévention ou à son suivi médico-social et
social.

III.-Lorsque ces professionnels appartiennent à la même équipe de soins, au sens de


l'article L. 1110-12, ils peuvent partager les informations concernant une même personne qui
sont strictement nécessaires à la coordination ou à la continuité des soins ou à son suivi
médico-social et social. Ces informations sont réputées confiées par la personne à l'ensemble
de l'équipe.

Le partage, entre des professionnels ne faisant pas partie de la même équipe de soins,
d'informations nécessaires à la prise en charge d'une personne requiert son consentement
préalable, recueilli par tout moyen, y compris de façon dématérialisée, dans des conditions
définies par décret pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des
libertés.

III bis.-Un professionnel de santé, exerçant au sein du service de santé des armées ou dans le
cadre d'une contribution au soutien sanitaire des forces armées prévue à l'article L. 6147-10,
ou un professionnel du secteur médico-social ou social relevant du ministre de la défense
peuvent, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, échanger avec une ou
plusieurs personnes, relevant du ministre de la défense ou de la tutelle du ministre chargé des
anciens combattants, et ayant pour mission exclusive d'aider ou d'accompagner les militaires
et anciens militaires blessés, des informations relatives à ce militaire ou à cet ancien militaire
pris en charge, à condition que ces informations soient strictement nécessaires à son
accompagnement. Le secret prévu au I s'impose à ces personnes. Un décret en Conseil d'Etat
définit la liste des structures dans lesquelles exercent les personnes ayant pour mission
exclusive d'aider ou d'accompagner les militaires et anciens militaires blessés.

IV.-La personne est dûment informée de son droit d'exercer une opposition à l'échange et au
partage d'informations la concernant. Elle peut exercer ce droit à tout moment.

V.-Le fait d'obtenir ou de tenter d'obtenir la communication de ces informations en violation


du présent article est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.

En cas de diagnostic ou de pronostic grave, le secret médical ne s'oppose pas à ce que la


famille, les proches de la personne malade ou la personne de confiance définie à l'article L.
1111-6 reçoivent les informations nécessaires destinées à leur permettre d'apporter un soutien
direct à celle-ci, sauf opposition de sa part. Seul un médecin est habilité à délivrer, ou à faire
délivrer sous sa responsabilité, ces informations.

Le secret médical ne fait pas obstacle à ce que les informations concernant une personne
décédée soient délivrées à ses ayants droit, son concubin ou son partenaire lié par un pacte
civil de solidarité, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de
connaître les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt ou de faire valoir leurs
droits, sauf volonté contraire exprimée par la personne avant son décès. Toutefois, en cas de
décès d'une personne mineure, les titulaires de l'autorité parentale conservent leur droit
d'accès à la totalité des informations médicales la concernant, à l'exception des éléments

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relatifs aux décisions médicales pour lesquelles la personne mineure, le cas échéant, s'est
opposée à l'obtention de leur consentement dans les conditions définies aux articles L. 1111-5
et L. 1111-5-1.

VI.-Les conditions et les modalités de mise en œuvre du présent article pour ce qui concerne
l'échange et le partage d'informations entre professionnels de santé, non-professionnels de
santé du champ social et médico-social et personnes ayant pour mission exclusive d'aider ou
d'accompagner les militaires et anciens militaires blessés sont définies par décret en Conseil
d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

Article L1110-4-1

Modifié par LOI n° 2019-774 du 24 juillet 2019 - art. 44 (V)

Afin de garantir l'échange, le partage, la sécurité et la confidentialité des données de santé à


caractère personnel, doivent être conformes aux référentiels d'interopérabilité et de sécurité
élaborés par le groupement d'intérêt public mentionné à l'article L. 1111-24, pour le traitement
de ces données, leur conservation sur support informatique et leur transmission par voie
électronique :

1° Les systèmes d'information ou les services ou outils numériques destinés à être utilisés par
les professionnels de santé et les personnes exerçant sous leur autorité, les établissements et
services de santé, le service de santé des armées et tout organisme participant à la prévention
ou aux soins dont les conditions d'exercice ou les activités sont régies par le présent code ;

2° Les systèmes d'information ou les services ou outils numériques destinés à être utilisés par
les professionnels des secteurs médico-social et social et les établissements ou services des
secteurs médico-social et social mentionnés au I de l'article L. 312-1 du code de l'action
sociale et des familles ;

3° Les systèmes d'information ou les services ou outils numériques mis en œuvre par les
organismes d'assurance maladie, ayant pour finalité principale de contribuer directement à la
prévention ou au suivi du parcours de soins des patients.

Ces référentiels sont élaborés en concertation avec les représentants des professions de santé,
d'associations d'usagers du système de santé agréées, des établissements de santé, des
établissements et services des secteurs médico-social et social ainsi que des opérateurs publics
et privés du développement et de l'édition des systèmes d'information et des services et outils
numériques en santé. Ils sont approuvés par arrêté du ministre chargé de la santé.

Les référentiels d'interopérabilité mentionnés au premier alinéa du présent article s'appuient


sur des standards ouverts en vue de faciliter l'extraction, le partage et le traitement des
données de santé dans le cadre de la coordination des parcours de soins, de l'amélioration de
la qualité des soins et de l'efficience du système de santé ou à des fins de recherche clinique,

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chaque fois que le recours à ces standards est jugé pertinent et possible par le groupement
d'intérêt public mentionné à l'article L. 1111-24 du présent code.

Article L1110-4-2

Créé par LOI n° 2019-774 du 24 juillet 2019 - art. 44 (V)

I.-La conformité d'un système d'information ou d'un service ou outil numérique en santé aux
référentiels d'interopérabilité mentionnés à l'article L. 1110-4-1 est attestée dans le cadre
d'une procédure d'évaluation et de certification définie par décret en Conseil d'Etat.

II.-Est conditionnée à des engagements de mise en conformité aux référentiels


d'interopérabilité dans les conditions prévues au I l'attribution de fonds publics dédiés au
financement d'opérations de conception, d'acquisition ou de renouvellement de systèmes
d'information ou de services ou outils numériques en santé mentionnés aux 1° et 2° de l'article
L. 1110-4-1.

III.-Les conventions d'objectifs et de gestion mentionnées à l'article L. 227-1 du code de la


sécurité sociale, les contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens mentionnés à l'article L.
1435-3 du présent code et les contrats ayant pour objet d'améliorer la qualité et la
coordination des soins mentionnés à l'article L. 1435-4 du même code comprennent des
engagements relatifs à l'acquisition ou à l'utilisation de systèmes d'information ou de services
ou outils numériques en santé dont la conformité aux référentiels d'interopérabilité
mentionnés à l'article L. 1110-4-1 dudit code est attestée dans les conditions prévues au I du
présent article.

IV.-Des modalités complémentaires d'incitation à la mise en conformité des systèmes


d'information et services ou outils numériques en santé aux référentiels d'interopérabilité
mentionnés à l'article L. 1110-4-1 peuvent être prévues par décret en Conseil d'Etat.

NOTA :

Conformément à l’article 44 II de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019, les dispositions du II


et III de l'article L. 1110-4-2 du code de la santé publique entrent en vigueur à une date fixée
par décret, et au plus tard le 1er janvier 2023.

Article L1110-5

Modifié par LOI n°2016-87 du 2 février 2016 - art. 1

Toute personne a, compte tenu de son état de santé et de l'urgence des interventions que celui-
ci requiert, le droit de recevoir, sur l'ensemble du territoire, les traitements et les soins les plus
appropriés et de bénéficier des thérapeutiques dont l'efficacité est reconnue et qui garantissent
la meilleure sécurité sanitaire et le meilleur apaisement possible de la souffrance au regard des
connaissances médicales avérées. Les actes de prévention, d'investigation ou de traitements et
de soins ne doivent pas, en l'état des connaissances médicales, lui faire courir de risques
disproportionnés par rapport au bénéfice escompté. Ces dispositions s'appliquent sans

6
préjudice ni de l'obligation de sécurité à laquelle est tenu tout fournisseur de produits de santé
ni de l'application du titre II du présent livre.

Toute personne a le droit d'avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement
possible de la souffrance. Les professionnels de santé mettent en œuvre tous les moyens à leur
disposition pour que ce droit soit respecté.

Article L1110-5-1

Créé par LOI n°2016-87 du 2 février 2016 - art. 2

Les actes mentionnés à l'article L. 1110-5 ne doivent pas être mis en œuvre ou poursuivis
lorsqu'ils résultent d'une obstination déraisonnable. Lorsqu'ils apparaissent inutiles,
disproportionnés ou lorsqu'ils n'ont d'autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils
peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris, conformément à la volonté du patient et, si ce
dernier est hors d'état d'exprimer sa volonté, à l'issue d'une procédure collégiale définie par
voie réglementaire.

La nutrition et l'hydratation artificielles constituent des traitements qui peuvent être arrêtés
conformément au premier alinéa du présent article.

Lorsque les actes mentionnés aux deux premiers alinéas du présent article sont suspendus ou
ne sont pas entrepris, le médecin sauvegarde la dignité du mourant et assure la qualité de sa
vie en dispensant les soins palliatifs mentionnés à l'article L. 1110-10.

Article L1110-5-2

Créé par LOI n°2016-87 du 2 février 2016 - art. 3

A la demande du patient d'éviter toute souffrance et de ne pas subir d'obstination


déraisonnable, une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience
maintenue jusqu'au décès, associée à une analgésie et à l'arrêt de l'ensemble des traitements de
maintien en vie, est mise en œuvre dans les cas suivants :

1° Lorsque le patient atteint d'une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est
engagé à court terme présente une souffrance réfractaire aux traitements ;

2° Lorsque la décision du patient atteint d'une affection grave et incurable d'arrêter un


traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d'entraîner une
souffrance insupportable.

Lorsque le patient ne peut pas exprimer sa volonté et, au titre du refus de l'obstination
déraisonnable mentionnée à l'article L. 1110-5-1, dans le cas où le médecin arrête un
traitement de maintien en vie, celui-ci applique une sédation profonde et continue provoquant
une altération de la conscience maintenue jusqu'au décès, associée à une analgésie.

La sédation profonde et continue associée à une analgésie prévue au présent article est mise
en œuvre selon la procédure collégiale définie par voie réglementaire qui permet à l'équipe

7
soignante de vérifier préalablement que les conditions d'application prévues aux alinéas
précédents sont remplies.

A la demande du patient, la sédation profonde et continue peut être mise en œuvre à son
domicile, dans un établissement de santé ou un établissement mentionné au 6° du I de
l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles.

L'ensemble de la procédure suivie est inscrite au dossier médical du patient.

Article L1110-5-3

Créé par LOI n°2016-87 du 2 février 2016 - art. 4

Toute personne a le droit de recevoir des traitements et des soins visant à soulager sa
souffrance. Celle-ci doit être, en toutes circonstances, prévenue, prise en compte, évaluée et
traitée.

Le médecin met en place l'ensemble des traitements analgésiques et sédatifs pour répondre à
la souffrance réfractaire du malade en phase avancée ou terminale, même s'ils peuvent avoir
comme effet d'abréger la vie. Il doit en informer le malade, sans préjudice du quatrième alinéa
de l'article L. 1111-2, la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6, la famille ou, à
défaut, un des proches du malade. La procédure suivie est inscrite dans le dossier médical.

Toute personne est informée par les professionnels de santé de la possibilité d'être prise en
charge à domicile, dès lors que son état le permet.

Article L1110-6

Créé par Loi n°2002-303 du 4 mars 2002 - art. 3 JORF 5 mars 2002

Dans la mesure où leurs conditions d'hospitalisation le permettent, les enfants en âge scolaire
ont droit à un suivi scolaire adapté au sein des établissements de santé.

Article L1110-7

Modifié par Ordonnance n°2010-177 du 23 février 2010 - art. 26, art. 9

L'évaluation prévue à l'article L. 6113-2 et la certification prévue à l'article L. 6113-


3 prennent en compte les mesures prises par les établissements de santé pour assurer le
respect des droits des personnes malades et les résultats obtenus à cet égard. Les
établissements de santé rendent compte de ces actions et de leurs résultats dans le cadre des
transmissions d'informations aux agences régionales de santé.

Article L1110-8

Modifié par LOI n°2016-41 du 26 janvier 2016 - art. 175

Le droit du malade au libre choix de son praticien et de son établissement de santé et de son
mode de prise en charge, sous forme ambulatoire ou à domicile, en particulier lorsqu'il relève

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de soins palliatifs au sens de l'article L. 1110-10, est un principe fondamental de la législation
sanitaire.

Les limitations apportées à ce principe par les différents régimes de protection sociale ne
peuvent être introduites qu'en considération des capacités techniques des établissements, de
leur mode de tarification et des critères de l'autorisation à dispenser des soins remboursables
aux assurés sociaux.

Article L1110-9

Créé par Loi n°2002-303 du 4 mars 2002 - art. 9 JORF 5 mars 2002

Toute personne malade dont l'état le requiert a le droit d'accéder à des soins palliatifs et à un
accompagnement.

Article L1110-10

Créé par Loi n°2002-303 du 4 mars 2002 - art. 9 JORF 5 mars 2002

Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire
en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique,
à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage.

Article L1110-11

Modifié par Ordonnance n°2010-177 du 23 février 2010 - art. 7

Des bénévoles, formés à l'accompagnement de la fin de vie et appartenant à des associations


qui les sélectionnent, peuvent, avec l'accord de la personne malade ou de ses proches et sans
interférer avec la pratique des soins médicaux et paramédicaux, apporter leur concours à
l'équipe de soins en participant à l'ultime accompagnement du malade et en confortant
l'environnement psychologique et social de la personne malade et de son entourage.

Les associations qui organisent l'intervention des bénévoles se dotent d'une charte qui définit
les principes qu'ils doivent respecter dans leur action. Ces principes comportent notamment le
respect des opinions philosophiques et religieuses de la personne accompagnée, le respect de
sa dignité et de son intimité, la discrétion, la confidentialité, l'absence d'interférence dans les
soins.

Les associations qui organisent l'intervention des bénévoles dans des établissements de santé
publics ou privés et des établissements sociaux et médico-sociaux doivent conclure, avec les
établissements concernés, une convention conforme à une convention type définie par décret
en Conseil d'Etat. A défaut d'une telle convention ou lorsqu'il est constaté des manquements
au respect des dispositions de la convention, le directeur de l'établissement, ou à défaut le
directeur général de l'agence régionale de santé, interdit l'accès de l'établissement aux
membres de cette association.

Seules les associations ayant conclu la convention mentionnée à l'alinéa précédent peuvent
organiser l'intervention des bénévoles au domicile des personnes malades.

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Article L1110-12

Créé par LOI n° 2016-41 du 26 janvier 2016 - art. 96 (V)

Pour l'application du présent titre, l'équipe de soins est un ensemble de professionnels qui
participent directement au profit d'un même patient à la réalisation d'un acte diagnostique,
thérapeutique, de compensation du handicap, de soulagement de la douleur ou de prévention
de perte d'autonomie, ou aux actions nécessaires à la coordination de plusieurs de ces actes, et
qui :

1° Soit exercent dans le même établissement de santé, au sein du service de santé des armées,
dans le même établissement ou service social ou médico-social mentionné au I de l'article L.
312-1 du code de l'action sociale et des familles ou dans le cadre d'une structure de
coopération, d'exercice partagé ou de coordination sanitaire ou médico-sociale figurant sur
une liste fixée par décret ;

2° Soit se sont vu reconnaître la qualité de membre de l'équipe de soins par le patient qui
s'adresse à eux pour la réalisation des consultations et des actes prescrits par un médecin
auquel il a confié sa prise en charge ;

3° Soit exercent dans un ensemble, comprenant au moins un professionnel de santé,


présentant une organisation formalisée et des pratiques conformes à un cahier des charges fixé
par un arrêté du ministre chargé de la santé.

Article L1110-13

Créé par LOI n°2016-41 du 26 janvier 2016 - art. 90

La médiation sanitaire et l'interprétariat linguistique visent à améliorer l'accès aux droits, à la


prévention et aux soins des personnes éloignées des systèmes de prévention et de soins, en
prenant en compte leurs spécificités.

Des référentiels de compétences, de formation et de bonnes pratiques définissent et encadrent


les modalités d'intervention des acteurs qui mettent en œuvre ou participent à des dispositifs
de médiation sanitaire ou d'interprétariat linguistique ainsi que la place de ces acteurs dans le
parcours de soins des personnes concernées. Ces référentiels définissent également le cadre
dans lequel les personnes éloignées des systèmes de prévention et de soins peuvent avoir
accès à des dispositifs de médiation sanitaire et d'interprétariat linguistique. Ils sont élaborés
par la Haute Autorité de santé.

Les modalités d'application du présent article sont déterminées par décret.

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Document 2. Joël Moret-Bailly, Les modes de définition des professions de
sante : présent et avenir, Rev. Dr. Sanit. et Soc., 2008-3, 508-519.

LES MODES DE DEFINITION DES PROFESSIONS DE SANTE :


PRESENT ET AVENIR
Les professions de santé sont actuellement définies en référence à leurs diplômes ainsi qu’aux
actes qu’elles peuvent pratiquer. Elles pourraient, à l’avenir, être redéfinies en privilégiant la
référence à leurs missions.

Introduction

Les modes de définition des professions de santé sont sans doute à un tournant de leur
histoire. Le système de santé doit, en effet, faire face à des difficultés de démographie
professionnelle, qui posent la question du transfert d'une partie de l'activité de certaines
professions, et notamment de la profession médicale, vers d'autres intervenants 1 . La
régulation des professions intègre, en outre, et de manière croissante, l’évaluation de la
compétence des professionnels au cœur même de la pratique des professions : en témoignent
des mécanismes comme la formation professionnelle continue ou l’évaluation des pratiques
professionnelles2. Ces évolutions structurelles ne peuvent pas être sans conséquence sur les
frontières, donc sur les définitions des différentes professions. Or, les professions de santé
sont aujourd'hui essentiellement définies par les actes qu’elles peuvent pratiquer, et l'on peut
se demander si ce mode particulier de définition est le plus adapté eu égard aux évolutions en
cours. Nous pensons que la réponse à cette question est négative : le but de cet article est de le
montrer, ainsi que de proposer des pistes pour un nouveau mode de définition3.

Une telle évolution ne peut, cependant, s'effectuer indépendamment de la manière dont les
professions sont actuellement définies. Il en est ainsi, notamment, des rapports entre ces
modes de définition et les règles pénales, ici centrales, relative à la protection de l'intégrité
corporelle ; il en est de même de l'architecture générale de l'organisation des professions de
santé dans le Code de la santé publique.

Une intervention sur le corps humain constitue en effet, par principe, si elle entraîne un
dommage, une « atteinte à l'intégrité physique des personnes » au sens du Code pénal. Elle

1 Cf. la recommandation intitulée Délégation, transfert, nouveaux métiers… Conditions des


nouvelles formes de coopération entre professionnels de santé, de la Haute Autorité de Santé (HAS), en
collaboration avec l’Observatoire national de la Démographie des Professionnels de Santé (ONDPS), avril 2008,
8-10. Cette recommandation se fonde notamment sur un rapport relatif aux aspects juridiques de la question,
élaboré par un groupe de travail présidé par C. Evin, dont nous étions le rapporteur. Des expérimentations
relatives aux nouvelles formes de coopération entre professions de santé ont notamment été permises par la loi
d'orientation de la santé publique du 9 août 2004.
2 Cf., dans une perspective nationale et internationale, Y. Matillon, Modalités et conditions
d'évaluation des compétences professionnelles des métiers de la santé, Rapport au Ministre de l'éducation et au
Ministre de la santé, mars 2003.
3 Il ne s'agit évidemment, ici, que d'analyser le système d’organisation des tâches des différentes
professions de santé, et non de se prononcer sur l'opportunité de cette organisation.

11
est, à ce titre, punissable, la peine dépendant de la gravité de l'atteinte4. La loi peut cependant
organiser les conditions d'une atteinte légitime à l'intégrité corporelle, c'est-à-dire prévoir des
cas dans lesquels l'atteinte sera, au sens de la technique pénale, « justifiée » par «
l'autorisation de la loi »5. Se pose, dès lors, la question du critère de cette autorisation. Il
s’agit, actuellement, de la qualification professionnelle c'est-à-dire de la possession d'un
diplôme ou d’un titre équivalent.

Le Code de la santé publique organise ainsi vingt-deux professions6, au centre desquelles se


trouve la profession médicale, les compétences des autres professions étant construites
comme des dérogations au monopole de cette dernière, lui-même protégé par l'infraction
d'exercice illégal de la médecine7.

Le Code est ainsi implicitement organisé selon l’autonomie des professions, attestée par leur
plus ou moins grande qualification8. Sa quatrième partie, consacrée aux « professions de
santé », se décline ainsi en trois livres, respectivement dévolus aux : « professions
médicales », « professions de la pharmacie » et « auxiliaires médicaux ». Le livre 1 est dédié
aux professions de médecin, chirurgien-dentiste, et sage-femme. Le livre 2, relatif aux
« professions de la pharmacie », est consacré aux professions de pharmacien et de préparateur
en pharmacie9. Le livre 3, relatif aux « auxiliaires médicaux », traite, dans l'ordre des titres
qui leur sont consacrés, des professions d'infirmier ou d'infirmière (titre 1), de masseur-
kinésithérapeute et de pédicure-podologue (titre 2), d'ergothérapeute et de psychomotricien
(titre 3), d'orthophoniste et d'orthoptiste (titre 4), de manipulateur d'électroradiologie médicale
(titre 5), d'audioprothésiste, d'opticien-lunetier, de prothésiste et d'orthésiste pour
l'appareillage des personnes handicapées (titre 6), et de la profession de diététicien (titre 7)10.

Analyser les modes de définition des professions de santé dans le but de dégager des pistes
quant à leur évolution ne peut se faire sans connaître la manière dont ils sont actuellement
construits. C'est la raison pour laquelle nous aborderons, dans un premier temps,

4 Code pénal, art. 222-7 à 222-16-1, « des violences ».


5 Article 122-4 : « N'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou
autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires (…) ». Cf. sur ce mécanisme, Y. Mayaud, Droit
pénal général, PUF, 2007, 371-383.
6 Nous réservons ici le cas de l’ostéopathie et de la chiropraxie, qui ne constituent pas des
professions, mais des titres : cf. infra, II, A’, 2)..
7 Mais un médecin peut toujours, quant à lui, intervenir dans le champ d'une autre profession.
8 Cf., à ce propos, l’analyse sociologique classique d’E. Freidson, La profession médicale, Payot,
1984, notamment 33-56.
9 L’article L. 4211-1 c. san. pub instaure un monopole d’activité en faveur du pharmacien,
notamment en ce qui concerne « 1° La préparation des médicaments destinés à l'usage de la médecine humaine ;
(…) 4° La vente en gros, la vente au détail et toute dispensation au public des médicaments, produits et objets
mentionnés aux 1°, 2° et 3° ». Le préparateur est destiné à « seconder » (L. 4241-1) le pharmacien. Dans la
mesure où ces professions n’interviennent pas directement sur le corps des patients, nous ne les retiendrons pas
dans notre analyse.
10 La partie réglementaire du Code contient, quant à elle, depuis 2005 (décret nº 2005-840 du 20
juillet 2005 art. 11 5º), des règles relatives aux professions « (…) d'aides-soignants, d'auxiliaires de puériculture,
d'ambulanciers et de techniciens en analyses biomédicales ». Une dernière profession a été organisée, en 2000 :
le conseiller en génétique (ordonnance nº 2000-916 du 19 septembre 2000, art. 3, entré en vigueur le 1er janvier
2002 ; art. L. 1132-1 et s. c. san. pub.). Ces dernières professions ne peuvent, cependant, effectuer d’actes
portant atteinte à l'intégrité corporelle. Leurs modes d'organisation n'apportent donc pas à la présente étude.

12
l'organisation présente, caractérisée par des définitions construites en référence aux diplômes
et aux actes (I), pour aborder, ensuite, son avenir, qui pourrait être constitué par des
définitions privilégiant les missions professionnelles (II).

I : Le présent : des définitions construites en référence aux diplômes et aux


actes
Deux logiques de définition sont actuellement à l'œuvre : une logique formelle, la définition
par le diplôme (A) ; une logique matérielle, la définition par les actes (B).

A) La logique formelle : la définition par le diplôme


La possibilité d'exercer légalement l'une des trois « professions médicales » sur le territoire
national suppose remplies trois types de conditions, énumérées par l'article L. 4111-1 c. san.
pub. : outre les conditions d'inscription à l'Ordre professionnel et de nationalité 11 , une
personne, pour appartenir à l'une des professions médicales, doit être « titulaire d'un diplôme,
certificat ou autre titre » déterminé par la loi12. Cette condition est primordiale, dans la mesure
où elle conditionne la mise en œuvre des deux autres. La clef de voûte de l'organisation de
l'atteinte légitime au corps humain par les professions médicales est donc bien leur
qualification, attestée par le diplôme, condition de licéité de leur intervention. Il en est de
même de l’ensemble des professions d'auxiliaires médicaux, par exemple selon l’article L.
4311-2 pour la profession d'infirmier ou d'infirmière ou, selon l’article L. 4321-2 en ce qui
concerne la profession de masseur-kinésithérapeute.

Ces définitions formelles ne permettent cependant pas de savoir ce que peuvent concrètement
faire les professionnels concernés ; elles permettent seulement de ne pas admettre au sein des
professions ceux qui ne sont pas titulaires d’une qualification déterminée. Les différentes
professions sont, cependant, également définies par les actes que les professionnels peuvent
effectuer, ajoutant aux définitions formelles, des définitions qui renvoient aux actes
professionnels, et que l’on peut qualifier de « matérielles ».

B) La logique matérielle : la définition par les actes


Au cœur du système se trouve la définition de l’exercice illégal de la médecine, qui a
aujourd’hui pour corollaire la définition des autres professions en référence aux actes qu’elles
peuvent effectuer13.

11 Qui peuvent d'ailleurs recevoir exception, articles L. 4111-2 et suivants c. san. pub.
12 Aux articles L. 4131-1, L. 4141-3 et L. L. 4151-5.
13 A l’exception des chirurgiens-dentistes dont la définition reprend, dans l’art. L. 4141-1 c. san.
pub., les termes centraux de la définition de l'exercice illégal de la médecine, le « diagnostic ou le traitement des
maladies congénitales ou acquises, réelles ou supposées », le chirurgien-dentiste pouvant intervenir de la même
manière que le médecin, mais en ce qui concerne une partie limitée du corps : « la bouche, les dents, les
maxillaires et les tissus attenants ». Ces professionnels peuvent alors, selon l’article L. 4141-2 « prescrire tous
les actes, produits et prestations nécessaires à l'exercice de l'art dentaire ».

13
1) Le rôle central de l’infraction d’exercice illégal de la médecine
L’article L. 4161-1 c. san. pub, qui incrimine l'exercice illégal de la médecine, outre qu'il
permet de définir, au fond, ce qu'il faut entendre par « profession médicale » (définition qui
n'existe pas dans l'article L. 4111-1 du Code), permet, par surcroît, de tracer les limites que ne
sauraient franchir les non médecins sans tomber sous le coup de l'incrimination. Le 1er du
premier alinéa de l'article L. 4161-1, pose la définition de l'exercice illégal ; son second
alinéa, prévoit les conditions de la justification (au sens pénal du terme14) de l'infraction en ce
qui concerne les auxiliaires médicaux15.

Ainsi, « Exerce illégalement la médecine (…) Toute personne qui prend part habituellement
ou par direction suivie, même en présence d'un médecin, à l'établissement d'un diagnostic ou
au traitement de maladies, congénitales ou acquises, réelles ou supposées, par actes
personnels, consultations verbales ou écrites ou par tous autres procédés quels qu'ils soient, ou
pratique l'un des actes professionnels prévus dans une nomenclature fixée par arrêté du
ministre chargé de la santé pris après avis de l'Académie nationale de médecine, sans être
titulaire d'un diplôme, certificat ou autre titre mentionné à l'article L. 4131-1 et exigé pour
l'exercice de la profession de médecin (…) »16.

La définition de la médecine portée par cet article est donc double : il s’agit soit d’une
pratique générique (« l'établissement d'un diagnostic ou [le] traitement de maladies,
congénitales ou acquises, réelles ou supposées »), soit de la réalisation d’actes techniques
précisément identifiés (« l'un des actes professionnels prévus dans une nomenclature fixée par
arrêté du ministre chargé de la santé »). Ces derniers sont prévus dans un arrêté du 6 janvier
1962, fixant la liste des actes médicaux ne pouvant être pratiqués que par des médecins ou
pouvant être pratiqués également par des auxiliaires médicaux ou par des directeurs de
laboratoires d'analyse médicale non médecins17.

Et c’est à partir de cette mention que le système d’organisation des professions d’auxiliaires
médicaux en fonction de leurs actes est institué.

2) Le système des décrets d’actes


L'art. L. 4161-1 al. 2 précise, en effet, le champ d'application de l’alinéa premier en prévoyant
que « Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux étudiants en médecine ni aux
sages-femmes, ni aux infirmiers ou gardes-malades qui agissent comme aides d'un médecin

14 Cf. supra, introduction.


15 Les 2e, 4e et 5e prévoient, en outre, que l'infraction est réalisée en cas d'irrespect des conditions
d'exercice relatives à la nationalité et à l'inscription à l'ordre professionnel. Le 3e prévoit la répression en ce qui
concerne l'assistance, prêtée par un médecin, à une personne qui exercerait illégalement l'art médical. Cette
disposition présente un intérêt didactique, mais ne constitue, techniquement, qu'une hypothèse de complicité,
prévue, de manière générale, par l'article 121-7 du Code pénal.
16 « (…) ou sans être bénéficiaire des dispositions spéciales mentionnées aux articles L. 4111-2 à
L. 4111-4, L. 4111-6, L. 4111-7, L. 4112-6, L. 4131-2 à L. 4131-5 ».
17 En ce qui concerne les actes réservés à la profession médicale, l'art. 2 énumère notamment : « 1)
Toute mobilisation forcée des articulations et toute réduction de déplacement osseux, ainsi que toutes
manipulations vertébrales, et, d'une façon générale, tous les traitements dits d'ostéopathie, de spondylothérapie
(ou vertébrothérapie) et de chiropraxie. 2) Le massage prostatique. 3) Le massage gynécologique. 4) Tout acte
de physiothérapie aboutissant à la destruction si limitée soit-elle des téguments, et notamment la cryothérapie,
l'électrolyse, l'électrocoagulation et la diathermo-coagulation (…) ».

14
ou que celui-ci place auprès de ses malades, ni aux personnes qui accomplissent, dans les
conditions prévues par décret en Conseil d'Etat pris après avis de l'Académie nationale de
médecine, les actes professionnels dont la liste est établie par ce même décret ». Cet article
prévoit donc une modalité générale d'organisation de l'intervention des « étudiants en
médecine, (...) sages-femmes, (...) infirmiers ou gardes-malades qui agissent comme aides
d'un médecin » ainsi qu’une modalité plus particulière d’intervention d'autres « personnes », «
qui accomplissent, dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat pris après avis de
l'Académie nationale de médecine, les actes professionnels dont la liste est établie par ce
même décret ». On comprend alors que l'intervention de l'ensemble des professions
d’auxiliaires médicaux, ainsi que celles de la profession de sage-femme, ne s'entend, au sens
du droit actuel, que comme une exception au monopole médical, puisque l'exercice illégal de
la médecine a, justement, pour objet la défense de ce monopole18.

Du point de vue de la forme que peuvent embrasser les règles relatives à ces actes, l'art. L.
4161-1 al. 2 précise que ces derniers doivent être accomplis « dans les conditions prévues par
décret en Conseil d'Etat pris après avis de l'Académie nationale de médecine ». Autrement dit,
les « décrets d'actes » ne peuvent prendre place, et sous peine d'illégalité, que dans des décrets
en Conseil d'État, actes du Premier ministre.

Encore faut-il bien mesurer la place, dans ce système, de l'arrêté du 6 janvier 1962, fixant la
liste des actes médicaux ne pouvant être pratiqués que par des médecins ou pouvant être
pratiqués également par des auxiliaires médicaux ou par des directeurs de laboratoires
d'analyse médicales non médecins, auquel il est fait référence dans le premier alinéa de l'art.
L. 4161-1. En effet, lorsque celui-ci fixe les conditions de la répression de l'exercice illégal de
la médecine, il prévoit, comme élément de cette définition, la pratique de « l'un des actes
professionnels prévus dans une nomenclature fixée par arrêté du ministre chargé de la santé
pris après avis de l'Académie nationale de médecine ». Il faut bien comprendre que l'article L.
4161-1 alinéa 1er utilise ici la technique de « l'incrimination par renvoi »19, ce qui signifie que
si l'arrêté auquel renvoie la loi peut être modifié dans les formes habituelles de modification
des arrêtés, son contenu, eu égard aux autres normes d'application de l'article L. 4161-1, doit
être considéré comme ayant une valeur équivalente à celle de la loi dont il précise le contenu.
Dans ce contexte, les « décrets d'actes » prévus à l'article L. 4161-1 alinéa 2, doivent respecter
les règles de l'arrêté de 1962.

Deux conséquences s’évincent de ce système : d'une part, la liste des actes possibles pour les
auxiliaires médicaux est limitative ; d'autre part, ces actes ne peuvent être effectués que dans
deux circonstances bien identifiées par l’arrêté : « sous la responsabilité et la surveillance
directe d'un médecin, celui-ci pouvant contrôler et intervenir à tout moment » ou «

18 Précisons que la référence à la profession de sages-femmes dans cet alinéa n'a pas exactement la
même portée que la référence aux autres professions. En effet, la profession de sage-femme fait partie, au sens
du Code de la santé publique, des professions médicales. À ce titre, ses possibilités d'intervention sont définies,
dans les articles L. 4151-1 et suivants. Son intervention est donc licite en vertu de ces derniers articles, et non
seulement en vertu de l'article L. 4161-1 alinéa 2 du Code.
19 Cf. sur ce mécanisme, Fr. Derportes et Fr Le Gunehec, Droit pénal général, 13ème édition,
Economica, 2006, n°243-244.

15
uniquement sur prescription qualitative et quantitative du médecin, mais en dehors de la
présence de celui-ci »20.

On conçoit que le système que nous venons d'analyser est relativement figé (dans le but
premier de garantir les patients contre les atteintes inconsidérées à leur intégrité corporelle),
les frontières entre les professions étant, en outre, relativement étanches. Cette organisation ne
prend pas non plus en compte la compétence effective des professionnels (ce qu'ils savent
réellement faire), mais fait uniquement référence à leur qualification, c'est-à-dire à ce qu'ils
sont autorisés à faire du fait de leur diplôme. Une piste d’évolution réside dans une place plus
importante faite aux missions, dans les modes définition des professions.

II : L’avenir : des définitions privilégiant les missions ?


Un tel mode de définition existe d'ores et déjà ; il ne s'agirait donc que de l'étendre. Nous
allons, dans un premier temps, en analyser des exemples (A’), avant d’adopter une attitude
prospective en ce qui concerne la faisabilité d'une redéfinition des professions d'auxiliaires
médicaux suivant l'optique proposée (B’).

A’) Modèle
Nous allons, pour établir ce modèle, prendre deux exemples d’organisation de l’activité de
soins : la profession de sage femme et l’activité d’ostéopathe. Cette dernière n’est certes pas
une profession, puisqu’elle peut être exercée par les membres de plusieurs d’entre elles, ainsi
que par des personnes n’appartenant à aucune d’elles 21 . Mais elle propose un modèle
d’organisation de l’accès au corps tout à fait inédit, et particulièrement intéressant en ce qui
concerne la présente analyse.

1) L’exemple de la profession de sage-femme


Selon l'article L. 4151-1 c. san. pub., « L'exercice de la profession de sage-femme comporte la
pratique des actes nécessaires au diagnostic, à la surveillance de la grossesse et à la
préparation psychoprophylactique à l'accouchement, ainsi qu'à la surveillance et à la pratique
de l'accouchement et des soins postnataux en ce qui concerne la mère et l'enfant (...) /
L'examen postnatal peut être pratiqué par une sage-femme si la grossesse a été normale et si
l'accouchement a été eutocique / L'exercice de la profession de sage-femme peut comporter
également la participation aux consultations de planification familiale ». La définition légale
de la profession prévoit également les limites de son intervention. Ainsi, selon l'article
L. 4151-3, « En cas de pathologie maternelle, fœtale ou néonatale pendant la grossesse,
l'accouchement ou les suites de couches, et en cas d'accouchement dystocique, la sage-femme

20 Le plan de cet arrêté nous indique, ainsi, la manière dont les « décrets d'actes » seront organisés.
Ainsi, par exemple, l'article R. 4321-5 du Code de la santé publique prévoit : « Sur prescription médicale, le
masseur-kinésithérapeute est habilité à participer aux traitements de rééducation suivants (…) » ; il prévoit, en
outre, dans l’article R. 4321-8 : « Sur prescription médicale, et à condition qu’un médecin puisse intervenir à
tout moment, le masseur-kinésithérapeute est habilité à (…) ».
21 Cf. infra, 2).

16
doit faire appel à un médecin. Les sages-femmes peuvent pratiquer les soins prescrits par un
médecin en cas de grossesse ou de suites de couches pathologiques ». L. 4151-4 ajoute que
« Les sages-femmes peuvent prescrire les dispositifs médicaux, dont la liste est fixée par
l'autorité administrative, et les examens strictement nécessaires à l'exercice de leur profession.
Elles peuvent également prescrire les médicaments d'une classe thérapeutique figurant sur une
liste fixée par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de l'Agence française de
sécurité sanitaire des produits de santé » ; l’art. L. 4151-2 dispose, quant à lui, que « Les
sages-femmes sont autorisées à pratiquer les vaccinations dont la liste est fixée par arrêté du
ministre chargé de la santé ». On constate que la liste des dispositifs médicaux, ainsi que celle
des vaccinations est limitative. Nous sommes ici proches du modèle de la définition par les
actes.

Le Code de déontologie de la profession prévoit, cependant, des normes d’application de ces


dispositions22. Ainsi, l’article R. 4127-318 c. san. pub. prévoit, à l’instar des professions
d’auxiliaires médicaux, une liste d’actes qui peuvent être effectués par la sage-femme ; mais
cette liste n’est pas limitative, puisque précédée de l'adverbe « notamment ». On peut en
déduire qu’en ce qui concerne les sages-femmes, entre la définition par les actes et la
définition par les missions, c’est cette dernière modalité qui prévaut. En outre, l’article R.
4127-313 prévoit que « Dans l'exercice de sa profession, la sage-femme ne doit pas, sauf
circonstances exceptionnelles, effectuer des actes ou donner des soins, ni formuler des
prescriptions dans les domaines qui débordent sa compétence professionnelle ou dépassent
ses possibilités » ; cette dernière disposition laisse donc à la sage-femme l’évaluation des
limites de sa propre compétence.

Soulignons, en outre, que pour un certain nombre d'interventions, la coopération entre la sage-
femme et le médecin est construite au plus près des compétences des uns et des autres.
Notamment, l’article R. 4127-318 prévoit : « II. - La sage-femme est autorisée, au cours du
travail, à effectuer la demande d'anesthésie loco-régionale auprès du médecin anesthésiste-
réanimateur. Elle en informe le médecin gynécologue-obstétricien. / Sous réserve qu'un
médecin puisse intervenir à tout moment, la sage-femme peut participer à la technique
d'analgésie loco-régionale pratiquée lors de l'accouchement, à l'exclusion de la période
d'expulsion. La première injection doit être réalisée par un médecin. La sage-femme ne peut
pratiquer les injections suivantes que par la voie du dispositif mis en place par le médecin.
Elle peut procéder au retrait de ce dispositif ».

On comprend, à titre synthétique, qu’il ne s'agit pas, lorsque le législateur organise les
possibilités d'intervention des sages-femmes, de leur donner une liberté intégrale quant à leurs
interventions ; il s'agit plutôt de leur donner une importante marge d’initiative, mais

22 Conformément à l’article L. 4151-1, selon lequel la profession se définit notamment « suivant


les modalités fixées par le code de déontologie de la profession, mentionné à l'article L. 4127-1 ».

17
uniquement dans les limites de leurs compétences, un médecin devant intervenir dès lors que
ces dernières sont atteintes23.

Un exemple tout à fait différent permet d’affiner la réflexion.

2) Les enseignements de l’organisation de l’activité d’ostéopathe


L'activité des ostéopathes a été récemment organisée 24 . Or, cette organisation présente
d'indéniables intérêts dans notre perspective. Rappelons, cependant, qu'il s'agit, ici, non de
l'organisation d'une profession mais de celle d’un titre, puisque les membres de différentes
professions (médecins, sages-femmes, masseurs-kinésithérapeutes et infirmiers), ainsi que des
personnes n’appartenant pas à l'une des professions réglementées par le Code de la santé
publique - les ostéopathes dits « à titre exclusif » -, peuvent pratiquer l'ostéopathie25.

Dans ce contexte, l'art. 1er alinéa 1er du décret définit les missions ainsi que les limites de
l’ostéopathie, prévoyant que « Les praticiens justifiant d’un titre d’ostéopathe sont autorisés à
pratiquer des manipulations ayant pour seul but de prévenir ou de remédier à des troubles
fonctionnels du corps humain, à l’exclusion des pathologies organiques qui nécessitent une
intervention thérapeutique, médicale, chirurgicale, médicamenteuse ou par agents physiques.
Ces manipulations sont musculo-squelettiques et myo-fasciales, exclusivement manuelles et
externes. Ils ne peuvent agir lorsqu’il existe des symptômes justifiant des examens
paracliniques »26. Ce texte définit donc bien l’activité des ostéopathes en fonction du type
d’intervention sur le corps, et non en fonction des actes que ceux-ci peuvent effectuer.

En outre, l'art. 3 du décret prévoit que « I. − Le praticien justifiant d’un titre d’ostéopathe ne
peut effectuer les actes suivants : (…). II. − Après un diagnostic établi par un médecin
attestant l’absence de contre-indication médicale à l’ostéopathie, le praticien justifiant d’un
titre d’ostéopathe est habilité à effectuer les actes suivants (…) ». Ce décret utilise donc la
référence aux actes aussi bien pour les autoriser que pour les exclure.

Ajoutons, du point de vue des rapports entre professionnels, que l'art. 2 du décret prévoit que
« Les praticiens mentionnés à l’art. 1er sont tenus, s’ils n’ont pas eux-mêmes la qualité de
médecin, d’orienter le patient vers un médecin lorsque les symptômes nécessitent un

23 Rappelons, également, que l'intervention d'un médecin peut résulter de l'initiative de la sage-
femme elle-même, soit pendant le suivi de la grossesse, soit à propos de « demande d'anesthésie loco-
régionale ».
24 Loi n°2002-303, du 4 mars 2002, relative aux droits des patients et à la qualité du système de
santé, art. 75 et décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 relatif aux actes et aux conditions d’exercice de
l’ostéopathie, dont la légalité a été admise par le Conseil d’État, 23 mai 2007, n°305544, inédit.
25 L’article 75 de la loi n°2002-303, précitée, dispose : « L'usage professionnel du titre
d'ostéopathe ou de chiropracteur est réservé aux personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation
spécifique à l'ostéopathie ou à la chiropraxie (…) » ; le décret n°2007- 435 décide, dans son art. 4 : « L’usage
professionnel du titre d’ostéopathe est réservé : 1o Aux médecins, sages-femmes, masseurs-kinésithérapeutes et
infirmiers autorisés à exercer, titulaires d’un diplôme universitaire ou interuniversitaire sanctionnant une
formation suivie au sein d’une unité de formation et de recherche de médecine délivré par une université de
médecine et reconnu par le Conseil national de l’ordre des médecins. 2o Aux titulaires d’un diplôme délivré par
un établissement agréé dans les conditions prévues aux articles 5 à 9 du décret du 25 mars 2007 susvisé ; 3o Aux
titulaires d’une autorisation d’exercice de l’ostéopathie ou d’user du titre d’ostéopathe délivrée par l’autorité
administrative en application des articles 9 ou 16 du présent décret ».
26 C'est nous qui soulignons.

18
diagnostic ou un traitement médical, lorsqu’il est constaté une persistance ou une aggravation
de ces symptômes ou que les troubles présentés excèdent son champ de compétences ». Il
s'agit, ici, d'une nouvelle illustration d'un mécanisme que nous avons rencontré à propos des
sages-femmes, qui confie au professionnel la qualification de la limite de son intervention27.

On comprend alors que, même si l'activité des ostéopathes renvoie à une définition construite
en fonction des missions des personnes qui possèdent ce titre (et donc le diplôme idoine) ainsi
que des limites de leurs interventions, la référence précise à certains actes, pour les autoriser
ou les exclure, peut présenter une utilité pour la régulation de l'activité en cause.

B’) Application
Nous privilégierons, ici, l’exemple de la profession infirmière, dans la mesure où celle-ci
occupe, d’une part, une place particulière dans le système de soins du fait de ses champs
d'intervention, notablement plus variés que ceux des autres professions, mais ce, d’autre part,
dans le cadre strictement délimité par son « décret d’actes ». Nous verrons, ensuite, que si le
modèle proposé se développe, la réalité normative qui en résultera prendra vraisemblablement
une forme « hybride » et emportera, sans doute, des conséquences structurelles sur le droit des
professions de santé.

1) L’exemple de la profession infirmière


Selon l'article L. 4311-1 c. san. pub., « Est considérée comme exerçant la profession
d'infirmière ou d'infirmier toute personne qui donne habituellement des soins infirmiers sur
prescription ou conseil médical, ou en application du rôle propre qui lui est dévolu. /
L'infirmière ou l'infirmier participe à différentes actions, notamment en matière de prévention,
d'éducation de la santé et de formation ou d'encadrement ». La formule utilisée est donc
largement tautologique, renvoyant, pour une définition plus précise, au décret d'actes de la
profession, intégré aux articles R. 4311-1 et suivants c. san. pub.. Ce dernier dispose alors
dans son article 1er, que : « L'exercice de la profession d’infirmier comporte l’analyse,
l’organisation, la réalisation de soins infirmiers et leur évaluation, la contribution au recueil
de données cliniques et épidémiologiques et la participation à des actions de prévention, de
dépistage, de formation et d’éducation à la santé. (…) ». L'article R. 4311-2 précise que : «
Les soins infirmiers (...) ont pour objet (…) : 1º De protéger, maintenir, restaurer et
promouvoir la santé physique et mentale des personnes ou l'autonomie de leurs fonctions
vitales physiques et psychiques en vue de favoriser leur maintien, leur insertion ou leur
réinsertion dans leur cadre de vie familial ou social ; 2º De concourir à la mise en place de
méthodes et au recueil des informations utiles aux autres professionnels, et notamment aux
médecins pour poser leur diagnostic et évaluer l'effet de leurs prescriptions ; 3º De participer à
l'évaluation du degré de dépendance des personnes ; 4º De contribuer à la mise en œuvre des
traitements en participant à la surveillance clinique et à l'application des prescriptions
médicales contenues, le cas échéant, dans des protocoles établis à l'initiative du ou des
médecins prescripteurs ; 5º De participer à la prévention, à l'évaluation et au soulagement de

27 Ainsi, en outre, que la possibilité la possibilité d'entrer dans le système de soins par un autre
professionnel que le médecin, système n’existant pas en ce qui concerne les professions d'auxiliaires médicaux, à
l’exception des pédicures-podologues.

19
la douleur et de la détresse physique et psychique des personnes, particulièrement en fin de
vie au moyen des soins palliatifs, et d'accompagner, en tant que de besoin, leur entourage ».
Ces deux derniers énoncés font clairement référence aux missions des professionnels
concernés28.

Dans ce contexte, la référence aux limites des interventions des infirmiers ne fait pas l'objet
de prévisions textuelles explicites. Celles-ci ne sont cependant pas nécessaires, dans la mesure
où, comme nous l’avons montré, les infirmiers ne sont autorisés, dans le système actuel (hors
leur rôle propre29), qu'à effectuer des actes sous contrôle médical. Ainsi, tout acte qui n'est pas
explicitement autorisé est exclu. Si l'on devait se diriger vers un système dans lequel la
référence aux actes devenait secondaire par rapport aux missions, cette configuration textuelle
serait amenée à évoluer.

Pour ce faire, deux procédés techniques sont immédiatement envisageables : 1) remplacer la


définition légale de la profession par sa définition réglementaire, ou ajouter la définition
réglementaire à la définition légale ; 2) ajouter l’adverbe « notamment » à la liste des
actes professionnels30.

2) Vers une réalité normative forcément hybride ?


L’analyse des différents dispositifs de régulation des professions de santé montre qu’il
n'existe pas de modèle « pur » d'organisation d'une profession, sauf en ce qui concerne les
professions d'auxiliaires médicaux les moins qualifiées, construites exclusivement en
référence aux actes que les professionnels peuvent exécuter, et systématiquement sous
contrôle médical. A contrario, en ce en ce qui concerne les trois professions ou activité que
nous avons plus particulièrement analysées, les régulations en cause prévoient
systématiquement des références, à la fois aux missions des professionnels, aux limites de
leurs interventions, ainsi qu'à un certain nombre d'actes, autorisés ou non, selon une
distribution renvoyant aux particularités de chaque profession ainsi qu’aux différents
contextes d'exercice professionnel31.

Dans une telle perspective, la référence aux actes dans la définition des différentes professions
doit faire l'objet d'une approche nuancée. Il ne s'agit pas, en effet, de considérer que celle-ci

28 La mission des infirmiers est, également, précisée, en ce qui concerne leur rôle propre, dans
l'article R. 4311-3, selon lequel « Relèvent du rôle propre de l'infirmier ou de l'infirmière les soins liés aux
fonctions d'entretien et de continuité de la vie et visant à compenser partiellement ou totalement un manque ou
une diminution d'autonomie d'une personne ou d'un groupe de personnes. / Dans ce cadre, l'infirmier ou
l'infirmière a compétence pour prendre les initiatives et accomplir les soins qu'il juge nécessaires conformément
aux dispositions des articles R. 4311-5 et R. 4311-6. Il identifie les besoins de la personne, pose un diagnostic
infirmier, formule des objectifs de soins, met en œuvre les actions appropriées et les évalue. Il peut élaborer,
avec la participation des membres de l'équipe soignante, des protocoles de soins infirmiers relevant de son
initiative. Il est chargé de la conception, de l'utilisation et de la gestion du dossier de soins infirmiers ».
29 Mais celui-ci n’implique pas d’atteinte à l’intégrité corporelle.
30 On pourrait, en outre, intégrer, à l’instar des sages-femmes, une disposition relative aux limites
de l’intervention professionnelle aux règles de déontologie des infirmières (art. R. 4312-1 et s. c. san. pub.).
31 On pourrait ajouter à ce florilège les possibilités de spécialisation des professionnels, par
exemple en ce qui concerne les infirmiers, les spécialisations citées par le décret d’actes, art. R. 4311-11, 12 et
13 : « L'infirmier ou l'infirmière titulaire du diplôme d'État de bloc opératoire », « L'infirmier ou l'infirmière,
anesthésiste diplômé d'État » et l’ « infirmière titulaire du diplôme d'État de puéricultrice ».

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manque totalement de pertinence, et doit être complètement écartée au profit d’un modèle de
définition des professions exclusivement construit en référence à des missions
professionnelles assorties de limites. Nous avons vu, en effet, que la définition des missions et
des limites des professions peut être construite en référence à certains actes professionnels
particuliers, notamment en ce qui concerne les limites interventionnelles. Il peut être utile, en
outre, de viser certains actes pour préciser les modalités de coopération entre professionnels, à
l’image des rapports entre les médecins et les sages-femmes32.

Il ne s'agit donc pas, dans le modèle proposé, de gommer toute référence aux actes dans la
définition des tâches professionnelles, mais d'éviter que la référence aux actes constitue la
référence exclusive pour permettre l'intervention d'un professionnel sur le corps d'un patient.
Il faut avoir conscience, cependant, que d’éventuelles redéfinitions des professions seront
sans doute variables en fonction du degré d'autonomie et du contenu de la formation des
différents professionnels. Ainsi, si une évolution semble relativement aisée en ce qui concerne
les professions d'infirmier et infirmière, de masseurs kinésithérapeutes ou de pédicure
podologue, elle semble plus difficile en ce qui concerne d’autres professions, par exemple
celle de manipulateur d'électroradiologie médicale, tant celle-ci semble, justement, organisée
pour effectuer certains actes précis.

De telles modifications dans la définition des professions impliquent, en outre, certaines


modifications structurelles dans le droit des professions de santé.

3) Les conséquences structurelles de l’évolution des modes de définition sur le droit


des professions de santé
Nous avons montré que la répartition des tâches entre les différentes professions de santé était
essentiellement organisée autour de l'infraction d'exercice illégal de la médecine,
l'intervention des auxiliaires médicaux constituant une exception au monopole médical
défendu par l'infraction d'exercice illégal, obligeant, dans le texte même de cette infraction, à
prévoir un « fait justificatif de l’infraction » permettant aux auxiliaires médicaux d'intervenir
légitimement33.

Or, les « décrets d'actes » doivent respecter les règles de l'arrêté du 6 janvier 1962, fixant la
liste des actes médicaux ne pouvant être pratiqués que par des médecins ou pouvant être
pratiqués également par des auxiliaires médicaux ou par des directeurs de laboratoires
d'analyse médicales non médecins, auquel il est fait référence dans le premier alinéa de l'art.
L. 4161-1 c. san. pub., et dont la valeur est, en ce qui concerne la définition des professions, et
du fait de l’utilisation de la technique de « l’incrimination par renvoi », équivalente à celle de
la loi. Or, celui-ci ne permet pas d'autre système que celui de la définition des professions en
référence aux actes professionnels. C'est la raison pour laquelle il est nécessaire, si l'on veut
s'engager dans la voie d'une redéfinition des professions non exclusivement fondée sur les

32 Cf. supra.
33 Cf. supra.

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actes professionnels, de gommer la référence à l'arrêté de 1962 dans la définition de l’exercice
illégal de la médecine34.

Ces analyses nous conduisent donc à proposer deux modifications de l'art. L. 4161-1 :
supprimer du premier alinéa la formule : « ou pratique l'un des actes professionnels prévus
dans une nomenclature fixée par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis de
l'Académie nationale de médecine » ; modifier le second alinéa en remplaçant la formule «
dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat pris après avis de l'Académie
nationale de médecine, les actes professionnels dont la liste est établie par ce même décret »,
par la formule « leurs missions professionnelles dans les conditions définies par la loi ».

Les alinéas 1 et 2 de l'art. L. 4161-1 seraient donc rédigés comme suit : alinéa 1, « Exerce
illégalement la médecine : 1º Toute personne qui prend part habituellement ou par direction
suivie, même en présence d'un médecin, à l'établissement d'un diagnostic ou au traitement de
maladies, congénitales ou acquises, réelles ou supposées, par actes personnels, consultations
verbales ou écrites ou par tous autres procédés quels qu'ils soient, sans être titulaire d'un
diplôme, certificat ou autre titre mentionné à l'art. L. 4131-1 et exigé pour l'exercice de la
profession de médecin (...) » ; alinéa 2, « Les dispositions du présent article ne s'appliquent
pas aux étudiants en médecine, ni aux infirmiers ou gardes-malades qui agissent comme aides
d'un médecin ou que celui-ci place auprès de ses malades 35 , ni aux personnes qui
accomplissent leurs missions professionnelles dans les conditions déterminées par la loi »36.

34 Il serait techniquement possible, de modifier le système dans le sens proposé, sans abrogation
de la référence à l'arrêté de 1962 dans l'art. L. 4161-1. Il suffirait, pour ce faire, de modifier les règles légales de
définition des professions, et donc de prévoir, implicitement, une exception légale à l'art. L. 4161-1, l’exception
prévalant alors sur la règle générale. Une telle solution semble toutefois peu pertinente à un double point de vue :
elle manque de lisibilité, obligeant, pour en mesurer les effets, à une série d'interprétations passablement
techniques ; elle appellerait, en outre, des interventions légales à chaque fois qu'il s'agirait de modifier, même
marginalement, le champ d'intervention d'une profession, rendant, paradoxalement, le système plus difficile à
faire évoluer qu'aujourd'hui. Il convient donc d'écarter cette solution.
35 Nous avons également supprimé la référence aux sages-femmes, dans la mesure où l’article L.
4151-1 prévoit implicitement la légitimité de leur intervention en dehors du système des décrets d’actes, cf.
supra, II, A’, 1).
36 Une telle modification ne nuira pas à la capacité répressive du juge pénal puisqu’elle ne modifie
en rien la définition « générique » de la médecine portée par l'article L. 4161-1, l'arrêté de 1962 ne faisant
actuellement que préciser cette définition. La référence à l’avis de l'Académie nationale de médecine à propos de
la définition des actes des auxiliaires médicaux pourrait être reprise à propos des normes règlementaires
d’application.

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Document 3. Décret n° 2017-90 du 26 janvier 2017 relatif à l’Union nationale
des associations agréées d’usagers du système de santé

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Document 4. Arrêté du 24 avril 2017 portant agrément des statuts de l’Union
nationale des associations agréées d’usagers du système de santé (UNAASS) –
Plan uniquement

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