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altération de la fonction visuelle

293 - ORIENTATION DIAGNOSTIQUE DEVANT UNE ALTÉRATION


DE LA FONCTION VISUELLE-2010

Ce qu’il faut savoir

1. Connaitre l’anatomie de l’œil et des voies visuelles,

2. Connaître la physiologie de la vision,

3. Connaître les principales méthodes d’examen utilisées en ophtalmologie,

4. Énumérer les principales causes de baisse d’acuité visuelle brutale et orienter le diagnostic
sur l’interrogatoire et l’examen non spécialisé :
- en cas d’œil blanc indolore,
- en cas d’œil rouge douloureux.
5. Énumérer les principales causes de baisse d’acuité visuelle progressive et orienter le
diagnostic sur l’interrogatoire et l’examen en milieu non spécialisé,

6. Décrire les principales anomalies du champ visuel selon la topographie de l’atteinte des
voies optiques.

L es traumatismes étant traités par ailleurs, ne


seront traités ici que les altérations non-trau-
matiques de la fonction visuelle.
- éclairs lumineux = phosphènes,
- vision déformée des objets = métamorphop-
sies,
L’étudiant se rapportera au chapitre d’introduction - cécité monoculaire transitoire (CMT) = dispa-
«Rappel antomique, méthodes d’examen» pour les rition totale de la vision, quelques minutes, sponta-
notions concernant l’anatomie de l’œil et des voies nément résolutive,
visuelles, la physiologie de la vision et les méthodes - éclipse visuelle brève = disparition totale de la
d’examen. vision, quelques secondes, souvent bilatérale déclen-
chée par les mouvements de la tête ou les efforts,
- aura visuelle = migraine ophtalmique (flashes col
I - EXAMEN
orés accompagnés d’un scotome scintillant s’éten-
dant progressivement à un hémi-champ visuel).
A. Interrogatoire ◊ Sa rapidité d’installation : s’agit-il d’une baisse
◊ Il précise le type de l’altération visuelle : d’acuité visuelle brutale ou d’une baisse d’acuité
visuelle progressive ?
- baisse d’acuité visuelle (explore la rétine cen-
trale) ◊ Son uni- ou bilatéralité,
- altération du champ visuel (explore la rétine ◊ Il précise la présence ou non de douleurs asso-
périphérique) type scotome = lacune dans le CV ciées et leur type :
d’un seul oeil, type hémianopsie = altération dans - douleurs superficielles, évoquant une affection
le CV des 2 yeux, hétéronyme (latérale homonyme), du segment antérieur,
hémianopsie ou amputation altitudinale (amputation - douleurs profondes, irradiant dans le territoire
du CV sup ou inf ). du trijumeau, évoquant un glaucome aigu,
- sensation de « mouches volantes » = myodé- - céphalées, évoquant une étiologie « neuro-oph-
sopsies, talmologique »,
◊ Il recherche des antécédents oculaires et gé-

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néraux, - les douleurs sont profondes, intenses, ocu-
◊ Il précise les traitements oculaires et généraux laires et périoculaires irradiant dans le territoire du
suivis, trijumeau,
- il existe souvent des nausées ou des vomis-
◊ Il recherche une notion de traumatisme, même
sements,
minime.
- la chambre antérieure est aplatie,
- il existe une élévation majeure du tonus
B. Examen ophtalmologique oculaire, appréciable par la palpation bidigitale du
Il comprend aux deux yeux : globe oculaire à travers la paupière supérieure,
- la mesure de l’acuité visuelle de loin et de près, - l’examen de l’autre œil met en évidence un
avec correction optique si nécessaire, angle irido-cornéen étroit.
- la réactivité pupillaire : réflexe photomoteur
3. Uvéite antérieure :
direct et réflexe photomoteur consensuel à l’éclai-
- il existe une baisse d’acuité visuelle et des
rement de l’œil controlatéral,
douleurs en général modérées,
- l’examen du segment antérieur : cornée, cham-
- un cercle périkératique,
bre antérieure, et cristallin,
- une pupille en myosis ;
- la mesure du tonus oculaire,
- l’examen à la lampe à fente met en évi-
- l’examen du fond d’œil après dilatation pupil-
dence la présence de cellules inflammatoires dans la
laire : nerf optique, vaisseaux rétiniens, rétine.
chambre antérieure (signe de Tyndall), ± précipités
rétrocornéens et synéchies irido-cristalliniennes
C. Examens complémentaires - l’examen du fond d’œil après dilatation
Ils ne sont pas systématiques et sont orientés par pupillaire recherche des signes d’uvéite postérieure
l’interrogatoire et l’examen clinique : associée.
- examens complémentaires ophtalmologi-
ques (cf.chapitre «SÉMIOLOGIE OCULAIRE»), B. Baisse d’acuité visuelle avec œil
- examens complémentaires non-ophtal- blanc et indolore
mologiques : qu’il s’agisse d’examens biologiques
L’examen du fond d’œil oriente le diagnostic :
ou d’examens radiologiques, ils sont guidés par les
premières orientations diagnostiques. 1. fond d’œil non visible ou mal visible par
« trouble des milieux »
Au terme de l’interrogatoire et de l’examen, a) hémorragie intravitréenne :
l’altération de la fonction visuelle peut rentrer dans Elle entraîne une baisse d’acuité visuelle souvent
des cadres différents. précédée d’une impression de « pluie de suie ».
La baisse d’acuité visuelle est très variable suivant
II - BAISSE D’ACUITÉ VISUELLE BRUTALE l’importance de l’hémorragie : une hémorragie intra-
vitréenne minime peut se manifester principalement
(voir chapitre «ANOMALIES DE LA VISION D’APPARITION par des myodésopsies, sans baisse d’acuité visuelle
BRUTALE») ou avec une baisse d’acuité visuelle minime ; une
hémorragie intravitréenne massive entraîne une
A. Baisse d’acuité visuelle avec un œil
baisse d’acuité visuelle sévère, au maximum acuité
rouge et douloureux
visuelle réduite à la perception lumineuse.
Il s’agit d’une affection aiguë du segment anté-
La cause de l’hémorragie est facile à reconnaître
rieur (cf «ŒIL ROUGE ET/OU DOULOUREUX») :
quand la rétine reste visible; ailleurs, une hémorragie
1. Kératite aiguë :
massive rend la rétine invisible à l’examen du fond
- la baisse d’acuité visuelle s’accompagne de
d’œil : l’échographie B peut alors parfois orienter
douleurs superficielles importantes, avec photopho-
vers une étiologie (par exemple, mise en évidence
bie et blépharospasme,
d’une déchirure rétinienne); l’échographie B est par
- il existe une diminution de transparence de
ailleurs toujours indiquée quand la rétine n’est pas
la cornée, un cercle périkératique,
visible pour éliminer la présence d’un décollement
- et une ou plusieurs ulcérations cornéennes.
de la rétine (+++).
2. Glaucome aigu par fermeture de l’angle :
- la baisse d’acuité visuelle est majeure, Principales causes des hémorragies intravitréen-

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altération de la fonction visuelle

nes : o tableau clinique variable selon la localisation


- rétinopathie diabétique proliférante, de l’occlusion en cas d’occlusion d’une branche de
- occlusions de forme ischémique de la veine la veine centrale de la rétine.
centrale de la rétine ou d’une de ses branches,
- déchirure rétinienne : une déchirure rétinien- - DMLA compliquée de néovaisseaux cho-
ne, compliquée ou non de décollement de la rétine roïdiens maculaires (voir 60 – Dégénérescence
(voir plus loin), peut entraîner lors de sa survenue une maculaire liée à l’âge) :
hémorragie intravitréenne par rupture d’un vaisseau o Survenue brutale d’une baisse d’acuité vi-
rétinien, suelle et de métamorphopsies,
- syndrome de Terson : hémorragie intra-vi- o Décollement exsudatif de la rétine macu-
tréenne uni- ou bilatérale associée à une hémorragie laire ± hémorragies sous-rétiniennes et exsudats
méningée par rupture d’anévrysme intracrânien (le profonds.
syndrome de Terson peut également être associée à - Décollement de la rétine rhegmatogène : il
une hémorragie méningée d’origine traumatique). s’agit d’un décollement de rétine secondaire à une
déchirure rétinienne (du grec rhegma = déchirure),
b) « hyalite » : on désigne par ce terme un trouble s’opposant aux décollements de rétine exsudatifs
inflammatoire du vitré au cours des uvéites posté- (comme au cours de l’HTA ou de la toxémie gra-
rieures. vidique – voir 130 – Rétinopathie hypertensive) et
La baisse d’acuité visuelle n’est en général pas aux décollements de rétine par traction (au cours
brutale mais peut être d’installation rapidement notamment de la rétinopathie diabétique).
progressive, en quelques jours. o la survenue d’une déchirure au niveau de
L’examen met en évidence un trouble du vitré la rétine périphérique (cf.chapitre «SÉMIOLOGIE OCU-
avec présence de cellules inflammatoires à l’examen LAIRE») peut permettre le passage de liquide depuis
à la lampe à fente. la cavité vitréenne dans l’espace sous-rétinien; ce
Les étiologies sont celles des uvéites postérieu- liquide sous-rétinien (LSR) va soulever la rétine de
res. proche en proche : c’est le décollement de la rétine
(DR).
2. fond d’œil bien visible et anormal :
o il reconnaît trois causes principales :
- Occlusion de l’artère centrale de la rétine
◊ décollement de la rétine idiopathique, le plus
ou d’une de ses branches (voir 130 – Occlusions
souvent chez le sujet âgé,
artérielles rétiniennes) :
◊ myopie, notamment myopie forte (myopie supé-
o baisse d’acuité visuelle brutale, très profonde
rieure à – 6 dioptries) ; le risque de DR rhegmatogène
(perception lumineuse) ;
croit avec le degré de myopie,
o pupille en mydriase aréflectique,
◊ chirurgie de la cataracte (DR de l’aphake ou
o rétrécissement diffus du calibre artériel
du pseudophake), qui se complique d’un DR dans
o œdème blanc rétinien ischémique de la rétine
environ 2% des cas, dans un délai variable, parfois
avec tache rouge cerise de la macula ;
plusieurs années après l’intervention sur le cristal-
o tableau clinique variable selon la localisation
lin.
de l’occlusion en cas d’occlusion d’une branche de
l’artère centrale de la rétine. o l’évolution spontanée est très péjorative :
elle se fait vers l’extension inexorable du DR, qui
- Occlusion de la veine centrale de la rétine englobe la macula, puis intéresse la totalité de la
ou d’une de ses branches (voir 130 – Occlusions rétine; la rétine décollée subit en quelques semaines
veineuses rétiniennes) : des lésions irréversibles responsables d’une cécité.
o baisse d’acuité visuelle très variable en o le traitement est uniquement chirurgical :
fonction de la forme clinique. son principe est d’obturer la déchirure rétinienne
o à l’examen du fond d’œil, œdème papillaire, périphérique, permettant de stopper le passage de
hémorragies rétiniennes disséminées, nodules coton- liquide sous-rétinien; le LSR résiduel est ensuite
neux, tortuosité et dilatation veineuses, réabsorbé par l’épithélium pigmentaire et la cho-
o examen du fond d’œil et angiographie fluo- roïde, permettant à la rétine de se réappliquer. Le
rescénique permettent de préciser la forme clinique pronostic anatomique (environ 90% de succès) et
de l’occlusion veineuse : forme non-ischémique ou fonctionnel du traitement chirurgical est d’autant
forme ischémique, meilleur qu’il est précoce, surtout si la macula est

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soulevée par le DR. Le DR est ainsi considéré comme l’acuité visuelle.
une « semi-urgence », justifiant une intervention
dans les quelques jours suivant le diagnostic. 3. Anomalies de la vision d’apparition brutale
avec fond d’œil visible et normal
o signes cliniques :
- NORB (voir le chapitre «ŒIL ET SCLÉROSE EN
◊ signes fonctionnels : myodésopsies, suivies de
PLAQUES».
phosphènes correspondant à la survenue de la dé-
o Importante baisse d’acuité visuelle unilaté-
chirure rétinienne, puis d’une amputation du champ
rale brutale,
visuel périphérique, correspondant à la constitution
o Douleurs oculaires augmentées lors des
du DR; lorsque le DR soulève la macula, il entraîne
mouvements oculaires,
alors une baisse d’acuité visuelle. o Réflexe photomoteur direct diminué,
◊ examen du fond d’œil : o Examen du fond d’œil normal (plus rare-
- il fait le diagnostic : la rétine apparaît en relief, ment, œdème papillaire modéré),
mobile, d’aspect cérébriforme, o Scotome central ou cæco-central à l’examen
- il recherche la déchirure causale; il doit s’atta- du champ visuel.
cher à rechercher plusieurs déchirures, les déchirures
multiples étant fréquentes; la méconnaissance d’une - Atteintes des voies optiques chiasmatiques
ou plusieurs déchirures expose en effet à un échec et rétro-chiasmatiques (voir plus loin « Altérations
du champ visuel ») :
du traitement chirurgical,
- un examen de la rétine périphérique de l’œil • une atteinte chiasmatique donne le plus souvent
controlatéral doit être systématiquement pratiqué, à une hémianopsie bitemporale d’installation progres-
la recherche de déchirure(s) non compliquée(s) de sive, la cause étant le plus souvent une compression
décollement de rétine ou de lésions prédisposantes d’origine tumorale ;
(zones de dégénérescence palissadique au niveau
• devant une hémianopsie ou une quadranopsie,
desquelles peuvent survenir des déchirures rétinien-
- l’installation brutale évoque une étiologie
nes); ces lésions peuvent en effet bénéficier d’un
vasculaire,
traitement préventif par photocoagulation au laser - alors qu’une installation progressive évoque
afin de diminuer le risque de bilatéralisation du DR une étiologie tumorale.
(plus de 10% des cas).
- Neuropathie optique ischémique antérieure
C. Anomalies transitoires de la vision
(cf 130 – NOIA) : 1. CMT (Cécité Monoculaire Transitoire) : dispa-
o baisse d’acuité visuelle unilatérale brutale, rition totale de la vision, d’apparition aiguë, d’une
le plus souvent massive, durée de quelques minutes, spontanément résolutive,
o diminution du réflexe photomoteur direct, c’est l’amaurose fugace ; elle correspond à un acci-
o œdème papillaire total ou en secteur, dent ischémique rétinient ransitoire.
o déficit fasciculaire, typiquement altitudinal, C’est une urgence diagnostique en raison du ris-
à l’examen du champ visuel. que de survenue d’une occlusion artérielle rétinienne
constituée ou d’un AVC ischémique.
o la cause la plus fréquente est l’artériosclé-
Elle doit faire rechercher avant tout un athérome
rose, mais la NOIA doit faire systématiquement
carotidien ou une cardiopathie emboligène (cf. cha-
rechercher une maladie de Horton nécessitant une
pitre «OCCLUSIONS ARTÉRIELLES RÉTINIENNES».
corticothérapie par voie générale en urgence.
2. Insuffisance vertébro-basilaire : une amaurose
- Toxoplasmose oculaire : elle est responsable
transitoire bilatérale, de durée brève, peut traduire
d’une chorio-rétinite récidivante, qui s’accompagne
une ischémie dans le territoire vertébro-basilaire.
de signes inflammatoires vitréens (hyalite) : elle
se manifeste par des myodésopsies et une baisse 3. « Éclipses visuelles » : flou visuel aux change-
d’acuité variable, d’autant plus importante que le ments de position, durant quelques secondes ; elles
foyer est à proximité de la macula ; à l’examen du accompagnent l’œdème papillaire de l’hypertension
fond d’œil, il s’agit d’un foyer blanchâtre qui évolue intracrânienne.
vers une cicatrice atrophique, à partir de laquelle 4. Scotome scintillant : bilatéral, accompagné
peuvent survenir des récidives; le traitement re- de flashes colorés, s’étendant progressivement à
pose sur les antiparasitaires (association Malocid® un hémi-champ visuel, il évoque une migraine
et Adiazine®), prescrit s’il existe une menace sur ophtalmique.
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altération de la fonction visuelle

à l’aspect observé dans la maculopathie aux APS


Le trouble visuel régresse en 15 à 20 minutes
(voir plus loin).
environ, laissant la place à une céphalée pulsatile,
volontiers hémicrânienne et controlatérale. b) hérédo-dégénerescence périphérique : rétino-
Dans certains cas, le scotome scintillant est isolé, pathie pigmentaire
sans céphalée. - il s’agit d’une affection d’aspect et de
gravité variables en fonction du gène en cause; il
III - BAISSE D’ACUITÉ VISUELLE PROGRES- existe ainsi de nombreuses formes de rétinopathie
SIVE pigmentaire, dont la transmission est elle aussi très
variable, autosomique dominante ou récessive ou
liée à l’X. Un grand nombre de cas, par ailleurs,
n’atteint qu’un sujet de façon isolée, sans que l’en-
A. Cataracte quête génétique ne retrouve de sujets atteints dans
- Baisse d’acuité visuelle progressive, bilatérale, les ascendants, descendants et collatéraux («formes
photophobie, myopie d’indice, diplopie monocu- sporadiques»).
laire (cataracte nucléaire) - elle atteint 30 000 à 40 000 personnes en
France.
- Examen après dilatation pupillaire : cataracte - l’atteinte des batônnets est responsable
nucléaire, sous-capsulaire postérieure, corticale ou d’une héméralopie (gêne en vision crépusculaire et
totale nocturne) et d’un rétrécissement progressif du champ
- Étiologie : le plus souvent cataracte sénile visuel débutant dans l’enfance; en fin d’évolution ne
- Traitement chirurgical si baisse d’acuité visuelle persiste qu’un champ visuel tubulaire, correspondant
invalidante : extraction du cristallin par phako-émul- à la perte complète des batônnets périphériques et à
sification par ultrasons et mise en place d’un implant la seule persistance des cônes centraux; il peut même
intraoculaire. survenir en fin d’évolution, par un mécanisme non
B. Glaucome chronique à angle ouvert élucidé, une atteinte dégénérative des cônes abou-
Entraîne dans un premier temps des altérations tissant à une cécité complète.
progressives du champ visuel sans baisse d’acuité - on observe à l’examen du fond d’œil des
visuelle, celle-ci étant d’apparition tardive, à un stade migrations de pigments sous-rétiniens donnant dans
évolué de l’affection les formes typiques une image en «ostéoblastes».
Diagnostic :
- élévation du tonus oculaire, - Rétinopathie diabétique : elle peut entraîner
- altérations du champ visuel, une baisse d’acuité visuelle progressive par œdème
- excavation glaucomateuse de la papille. maculaire (une baisse d’acuité visuelle brutale pou-
vant être le fait d’une hémorragie intravitréenne, d’un
Traitement par collyres hypotonisants, trabéculo- décollement de rétine par traction ou d’un glaucome
plastie au laser ou traitement chirurgical (trabéculec- néovasculaire).
tomie ou sclérectomie profonde).
- Membrane prémaculaires et trou maculai-
res:
C. Affections rétiniennes a) membranes prémaculaires :
- Dégénérescences rétiniennes héréditaires
Elles sont schématiquement de deux types, cen- - fréquemment, chez le sujet d’un certain âge,
trales (atteinte des cônes) ou périphériques (atteinte peut se développer à la face interne de la rétine macu-
des batônnets). laire une membrane fibreuse, dénommée «membrane
prémaculaire» ; ces membranes s’épaississent et se
a) hérédo-dégénérescences centrales : contractent lentement au cours de leur évolution,
La plus fréquente est la maladie de Stargardt : entraînant une baisse d’acuité visuelle et des méta-
- affection autosomale récessive, morphopsies d’installation lente.
- elle débute dans l’enfance et entraîne pro- - elles peuvent, quand elles entraînent une
gressivement une baisse d’acuité visuelle très sévère baisse d’acuité visuelle importante, bénéficier d’une
(entre 1/20ème et 1/10ème en fin d’évolution), ablation chirurgicale par voie de vitrectomie, appor-
- elle se traduit à l’examen du fond d’œil tant une amélioration fonctionnelle dans 80% des
par des remaniements maculaires donnant un aspect cas.
typique de «maculopathie en œil de bœuf», analogue
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Fig. 1 - Rétinopathie pigmentaire ; migrations de pigments sous-rétiniens donnant une image typique en «ostéo-
blastes», particulièrement bien visibles sur les clichés c et d.

Fig. 2 - Membrane prémaculaire. Fig. 3 - Trou maculaire.

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altération de la fonction visuelle

b) trous maculaires : mg/jour. La rétinopathie résulte de l’accumulation de


- moins fréquents, ils correspondent à un trou métabolites toxiques dans l’épithélium pigmentaire.
fovéolaire de formation brutale : ils se traduisent par Elle prédomine au niveau maculaire (“maculopathie
une baisse d’acuité visuelle brutale et un scotome aux APS”).
central de petite taille qui vont s’aggraver de façon Les APS ont une affinité pour les cellules mélani-
progressive, ainsi que par des métamorphopsies dues ques; ils ont particulièrement tendance à s’accumuler
à un décollement de la rétine maculaire très localisé dans l’épithélium pigmentaire, dans un premier
au bord du trou.
temps dans la région périfovéolaire où la densité de
- ils peuvent bénéficier d’un traitement chi-
pigments est la plus forte. Ceci explique que l’at-
rurgical visant à obturer le trou fovéolaire.
teinte toxique débute par une périfovéolopathie, qui
aux stades précoces épargne la fovéola et respecte
- Dégénérescence maculaire liée à l’âge (voir
l’acuité visuelle.
chapitre 60 - DMLA)
Elle peut entraîner une baisse d’acuité visuelle Elle se présente comme une maculopathie bila-
progressive aux stades de début (drusen), ou dans les térale.
formes atrophiques, alors que les formes exsudatives • elle débute par une périfovéolopathie qui se
(néovaisseaux choroïdiens maculaires) se traduisent traduit par :
par une baisse d’acuité visuelle et des métamorphop- - un scotome annulaire périfovéolaire caracté-
sies d’apparition brutale. ristique, très bien mis en évidence par l’examen du
- Œdèmes maculaires champ visuel en périmétrie statique automatisée (cf.
chapitre «SÉMIOLOGIE OCULAIRE»),
Ils se traduisent par un épaississement rétinien
maculaire, associé à une baisse d’acuité visuelle en - une dyschromatopsie d’axe bleu - jaune témoin
général progressive. Lorsque l’œdème maculaire est de l’atteinte maculaire (voir chapitre «Anatomie,
important, il prend un aspect d’oedème maculaire méthodes d’examen),
cystoïde (OMC), qui donne une image très typique - des altérations de l’électro-oculogramme (EOG),
à l’angiographie, «en pétales de fleur». méthode d’exploration fonctionnelle mesurant l’ac-
Principales causes : tivité de l’épithélium pigmentaire.
a) Rétinopathie diabétique : l’œdème macu- - ces altérations ne sont pas ressenties par le pa-
laire est la principale cause de malvoyance chez les tient : il s’agit donc à ce stade d’une atteinte asymp-
diabétiques de type 2. topmatique, sans baisse d’acuité visuelle.
b) Occlusion de la veine centrale de la rétine - à ce stade pré-clinique, l’arrêt du traitement par
ou d’une de ses branches dans sa forme non isché- APS permet de stopper l’évolution et d’éviter le pas-
mique. sage au stade de maculopathie confirmée ; c’est dire
c) Chirurgie de la cataracte : survenant dans l’intérêt d’une surveillance systématique régulière de
environ 3% des cas, quelques semaines après l’in- tous les patients sous APS.
tervention chirurgicale, il va régresser dans 2/3 des
cas, mais dans 1/3 des cas, soit 1% des yeux opérés, • secondairement, la surcharge des cellules de
l’évolution se fait vers un œdème maculaire chroni- l’épithélium pigmentaire s’aggrave et s’étend, englo-
que avec baisse d’acuité visuelle permanente. bant alors la fovéola ; à ce stade apparaissent :
d) Uvéites postérieures : l’œdème maculaire - une baisse d’acuité visuelle progressive,
est une des principales causes de baisse d’acuité - et un aspect caractéristique de la macula en
visuelle permanente au cours des uvéites postérieu- «œil de bœuf», dû aux altérations de l’épithélium
res. pigmentaire maculaire.
- Maculopathies toxiques : la principale est la - la baisse d’acuité est irréversible et peut même
maculopathie aux APS continuer à progresser à l’arrêt des APS.
Un traitement continu par antipaludéens de syn- - c’est dire l’importance du dépistage au stade
thèse (APS) peut entraîner l’apparition d’une réti- pré-clinique.
nopathie toxique bilatérale; le risque apparaît pour
une posologie cumulée supérieure à 250 grammes de La possibilité de dépister l’atteinte rétinienne
chloroquine, autrement dit à partir de la 3 année au stade pré-clinique, asymptomatique, par les
ème

d’un traitement à la posologie quotidienne de 250


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Fig. 4 - Maculopathie aux APS :
• clichés du haut : maculopathie en «œil de bœuf» aux deux yeux.
• clichés du bas : angiographie fluorescéinique de l’œil droit.

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altération de la fonction visuelle

explorations fonctionnelles, et de stopper alors le • l’atteinte d’un faisceau de fibres au niveau de


traitement avant l’apparition d’une maculopathie la papille est responsable d’un déficit fasciculaire;
avec baisse d’acuité visuelle, fait tout l’intérêt d’une il se traduit par un déficit isoptérique relié à la tache
surveillance systématique de tous les sujets traités aveugle. On l’observe notamment lors d’une atteinte
par antipaludéens de synthèse ++++ : ischémique de la papille (neuropathie optique isché-
mique antérieure) où il prend typiquement l’aspect
• les examens de surveillance doivent être d’un déficit altitudinal, à limite horizontale.
pratiqués tous les 6 à 18 mois en fonction :
- de la posologie quotidienne et de la durée du - étiologie :
traitement, • NORB de la sclérose en plaques (voir plus
- de l’existence de facteurs de risque oculaires haut)
comme une DMLA. • neuropathie optique ischémique antérieure =
• chaque examen de surveillance complet NOIA (voir plus haut)
comporte :
• neuropathies optiques toxiques et métaboli-
- la mesure de l’acuité visuelle,
ques : elles ont en commun de se manifester par une
- une périmétrie statique automatisée,
atteinte bilatérale et progressive. Elles sont dominées
- un examen de la vision chromatique, par quatre causes :
- un électro-oculogramme (EOG),
- un examen du fond d’œil; l’angiographie fluo- - neuropathie optique éthylique :
rescéinique n’est pas systématique et n’est réalisée . elle est favorisée par le tabagisme associé,
que lorsqu’existent des modifications pigmentaires et on parle volontiers de neuropathie optique al-
visibles à l’examen du fond d’œil. coolo-tabagique
. elle réalise typiquement à l’examen du
IV - ALTÉRATIONS DU CHAMP VISUEL champ visuel un scotome cæco-central bilatéral.
. en l’absence de sevrage, elle aboutit à la
Elle peuvent ou non s’accompagner d’un baisse constitution d’une atrophie optique.
d’acuité visuelle - neuropathies optiques médicamenteuses :
A. Anomalies du champ visuel au cours d’af- . elles s’observent principalement au cours de
fections rétiniennes traitements antituberculeux (Ethambutol et Isonia-
- soit scotomes en cas d’atteinte de la ré- zide) et peuvent laisser une baisse d’acuité visuelle
tine centrale respectant la périphérie ; un scotome définitive.
central, englobant le point de fixation, traduit une . d’où la règle d’une surveillance régulière systé-
atteinte maculaire et s’accompagne toujours d’une matique des patients traités par l’examen du champ
baisse d’acuité visuelle sévère (exemple : DMLA visuel et surtout de la vision des couleurs, ces neu-
évoluée).
ropathies optiques se révélant précocément par une
- soit déficits périphériques du champ visuel
dyschromatopsie d’axe rouge-vert.
lors d’atteintes rétiniennes siégeant ou débutant en
périphérie (exemple : décollement de la rétine rheg- - neuropathies optiques professionnelles (ex.
matogène, rétinopathie pigmentaire). plomb).
- neuropathies optiques métaboliques : no-
B. Atteinte du champ visuel par atteinte des tamment diabète.
voies optiques • neuropathies optiques tumorales :
1. atteintes du nerf optique - tumeurs intra-orbitaires : tumeurs du nerf
• l’atteinte totale du nerf optique est responsable optique (gliome ) ou de ses gaines (méningiome ),
d’une cécité unilatérale (se voit essentiellement au compression du nerf optique par une tumeur intra-
cours des traumatismes). orbitaire quelle qu’en soit la nature.
• une atteinte des fibres optiques à point de départ - elles se traduisent le plus souvent par une
maculaire réalise : atrophie optique associée à une exophtalmie.
- soit un scotome central, limité autour du
point de fixation (c.a.d. de la fovéola), - tumeurs de l’étage antérieur du crâne
- soit un scotome cæco-central, englobant la (méningiome du sphénoïde,…).
tache aveugle et le point de fixation.
- 179 -
2. lésions du chiasma optique
3. lésions rétrochiamastiques
Elles réalisent un syndrome chiasmatique qui dans
sa forme typique se traduit à l’examen du champ Elles se manifestent typiquement par une hé-
visuel par une hémianopsie bitemporale. mianopsie latérale homonyme du côté opposé à la
lésion. Une atteinte des radiations optiques, où fibres
Elles sont dominées sur le plan étiologique par
supérieures et inférieures cheminent dans deux fais-
les adénomes de l’hypophyse : ils sont responsa-
ceaux nettement séparés, se traduira plus volontiers
bles d’un syndrome chiasmatique d’installation
par une quadranopsie latérale homonyme, le plus
progressive, débutant du fait du siège inférieur de
souvent supérieure.
la compression chiasmatique par une quadranopsie
bitemporale supérieure. Elles reconnaissent trois grandes causes :
D’autres affections peuvent être responsables • vasculaire : hémianopsie ou quadranopsie
d’un syndrome chiasmatique parfois moins typi- latérale homonyme d’installation brutale.
que en fonction de la localisation de l’atteinte du • tumorale : hémianopsie ou quadranopsie
latérale homonyme d’installation progressive.
chiasma :
• traumatique : hémianopsie ou quadranop-
• chez l’adulte : méningiome du tubercule
sie latérale homonyme contemporaine du trauma-
de la selle, anévrisme de la carotide interne, crânio-
tisme.
pharyngiome,
• chez l’enfant : gliome du chiasma, qui 4. cécité corticale
survient souvent dans le cadre d’une maladie de On désigne sous ce terme un tableau clinique
Recklinghausen, crâniopharyngiome. particulier secondaire à une atteinte des deux lobes
occipitaux, le plus souvent par accident vasculaire
cérébral dans le territoire vertébrobasilaire.
Elle réalise une cécité bilatérale brutale, associé
à des éléments évocateurs :
• examen ophtalmologique, notamment
examen du fond d’œil, normal.
• conservation du réflexe photomoteur
(+++)
• désorientation temporo-spatiale, hallucina-
tions visuelles et anosognosie = méconnaissance de
sa cécité par le patient, très caractéristique (+++).

- 180 -
altération de la fonction visuelle

REPRÉSENTATION SCHÉMATIQUE DES ALTÉRATIONS DU CHAMP VISUEL EN FONCTION DU NIVEAU


DE L’ATTEINTE DES VOIES OPTIQUES
• nerf optique : scotome central
• chiasma : hémianopsie bitemporale
• bandelettes optiques : hémianopsie latérale homonyme
• radiations optiques : quadranopsie latérale homonyme

- 181 -
a. cécité unilatérale (ex. traumatisme) b. scotome central unilatéral (ex. SEP)

c. scotome cæco-central unilatéral (ex. SEP) d. scotome cæco-central bilatéral


(ex. neuropathie optique éthylique)

e. déficit fasciculaire f. déficit fasciculaire altitudinal (ex. NOIA)

ALTÉRATIONS DU CHAMP VISUEL DANS LES ATTEINTES DU NERF OPTIQUE

hémianopsie latérale homonyme gauche hémianopsie latérale homonyme droite


(atteinte des voies optiques (atteinte des voies optiques
rétrochiasmatiques droites) rétrochiasmatiques gauches)

HÉMIANOPSIES LATÉRALES HOMONYMES

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altération de la fonction visuelle

quadranopsie latérale homonyme supérieure quadranopsie latérale homonyme inférieure


gauche (atteinte du faisceau inférieur des gauche (atteinte du faisceau supérieur des
radiations optiques droites) radiations optiques droites)

quadranopsie latérale homonyme supérieure quadranopsie latérale homonyme inférieure


droite (atteinte du faisceau inférieur des droite (atteinte du faisceau supérieur des
radiations optiques gauches) radiations optiques gauches)

QUADRANOPSIES LATÉRALES HOMONYMES

quadranopsie bitemporale supérieure hémianopsie bitemporale

SYNDROME CHIASMATIQUE

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