SECT. 1. – La France et la Convention européenne des ART. 2. – ACTES QUI PEUVENT ÊTRE DEMANDÉS, 275-287.
droits de l’homme, 147-151. ART. 3. – CONDITIONS RELATIVES À LA TRANSMISSION DE LA
SECT. 2. – Placement en garde à vue, 152-203. COMMISSION ROGATOIRE INTERNATIONALE, 288-291.
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Les dispositions de la loi du 14 avril 2011 sur la garde à vue dé- pénal 2010. Alerte 58.
Généralités
A. – Définition L’avis des magistrats instructeurs est souvent demandé. Mais
les magistrats restent très largement dépendants de l’apprécia-
1. Délégation de pouvoir d’un juge. — La commission roga- tion portée sur une affaire par les chefs des services d’enquête
toire est l’acte par lequel un magistrat ayant pouvoir de juridiction eux-mêmes.
charge soit un magistrat ayant même pouvoir, soit un officier de
police judiciaire, de procéder ou de faire procéder en ses lieu B. – Nature juridique
et place à un ou plusieurs actes d’instruction spécifiés, dans le
cadre de la saisine préalable de la juridiction pour le compte de 4. Proche du « mandat judiciaire »…. – La nature juridique de
laquelle agit le magistrat délégant. la commission rogatoire est très proche de celle d’un mandat ju-
diciaire déférant au mandataire les pouvoirs que la loi accorde
2. Juridictions d’instruction ou de jugement. — Les commissions à l’organe juridictionnel mandant. Ce dernier ne peut déléguer
rogatoires peuvent être délivrées par les juridictions d’instruction que ses pouvoirs d’instruction, à l’exclusion de ses attributions
ou de jugement. Toute juridiction est tenue de ne se prononcer juridictionnelles, incommunicables par essence (Crim. 22 déc.
qu’après s’être pleinement éclairée ; elle peut pour cela, à tout 1959, D. 1960. 1, concl. Besson). En outre, le pouvoir d’interro-
moment de la procédure antérieure au jugement sur le fond, re- ger une personne mise en examen ne peut être délégué qu’à un
chercher sa nécessaire information en employant tous procédés magistrat de l’ordre judiciaire (C. pr. pén., art. 152, al. 2), tandis
d’investigation utiles et, notamment, en usant pour cela de la que celui d’entendre une partie civile ou un témoin assisté par un
technique des commissions rogatoires suivant les règles fixées officier de police judiciaire délégué est soumis au consentement
par le code de procédure pénale au chapitre consacré à l’instruc- de la personne (C. pr. pén., art. 152. – V. infra, nos 89 et 90).
tion préparatoire. C’est pourquoi les principes généraux déga-
gés par les articles 151 à 155 du code de procédure pénale re- 5. … mais pas un acte juridictionnel. — Une commission roga-
çoivent application non seulement à l’égard du juge d’instruction toire n’est pas un acte juridictionnel. Elle s’analyse en une simple
(C. pr. pén., art. 81), mais aussi pour l’exécution des mesures délégation de pouvoirs exclusive de fonctions juridictionnelles,
d’information supplémentaire ordonnées par la chambre de l’ins- incommunicables par nature. Un arrêt de renvoi de la Cour de
truction (C. pr. pén., art. 201 s.) ou par le président de la cour cassation ne saurait faire obstacle à ce que les règles de droit
d’assises (C. pr. pén., art. 283). Les mêmes règles s’appliquent commun en matière de commission rogatoire soient observées
au complément d’information ordonné par le tribunal de police (Crim. 8 déc. 1899, DP 1903. 1. 457, note Le Poittevin. – Paris,
(C. pr. pén., art. 538) ou le tribunal correctionnel (C. pr. pén., 19 déc. 1973, JCP 1974. II. 17638, note N. S.).
art. 463). Le droit de décerner commission rogatoire appartient
non au tribunal mais au magistrat qui a concouru au jugement et 6. Extension possible des pouvoirs initiaux. — Mais l’originali-
qui seul peut être désigné pour procéder au supplément d’infor- té de l’institution par rapport au mandat provient essentiellement
mation (Crim. 22 nov. 1956, D. 1957. 89). du fait que le magistrat délégant défère en certains cas des pou-
voirs supérieurs à ceux dont il pourrait disposer s’il opérait par
3. Relative dépendance des services de police. — Dans la pro- lui-même. C’est ainsi que, lorsque la déposition d’un membre du
cédure pénale française, l’affectation des moyens à une enquête gouvernement est jugée nécessaire par un juge d’instruction, si
dépend du bon vouloir des autorités hiérarchiques de police la comparution n’a pas été demandée ou n’a pas été autorisée
ou de gendarmerie. Il n’existe pas, comme dans certains pays par le Conseil des ministres, elle ne peut être reçue directement
étrangers et notamment l’Italie, d’officiers de police judiciaire qui par le magistrat instructeur, mais sur commission rogatoire du
soient délégués auprès des juridictions et qui en dépendraient juge, seulement par le premier président de la cour d’appel, si la
directement. Certes, le procureur de la République intervient personne à entendre réside au chef-lieu de la cour, ou par le pré-
dans le système de notation des officiers de police judiciaire. sident du tribunal de la résidence dans l’autre hypothèse (C. pr.
pén., art. 654). De même, la déposition écrite d’un représentant excès qui s’étaient développés à la faveur de cette jurisprudence
d’une puissance étrangère est demandée par le juge d’instruc- et interdirent toute autre délégation qu’à un magistrat de l’ordre
tion par l’intermédiaire du ministre des Affaires étrangères ; si la judiciaire ; les difficultés pratiques provoquées par cette législa-
demande est agréée, la déposition ne peut être reçue que par tion aboutirent à la loi du 25 mars 1935 (DP 1936. 21), qui, re-
le premier président ou son délégué (C. pr. pén., art. 656). Par venant à plus de souplesse, permit à nouveau au juge d’instruc-
ailleurs, l’officier de police judiciaire délégué est habile à exécu- tion de déléguer ses pouvoirs aux officiers de police judiciaire,
ter une commission rogatoire dès lors que sa compétence ter- sauf en matière d’interrogatoire de l’inculpé. C’est cette dernière
ritoriale propre lui permet d’opérer, quelle que soit par ailleurs conception qui a été maintenue par les articles 151 et 152 du
la compétence territoriale du magistrat qui l’a commis (V. C. pr. code de procédure pénale. Celui-ci insiste toutefois dans son
pén., art. 12 s. – Crim. 31 janv. 1952, S. 1952. 1. 141, note article 81 sur l’impérieux devoir fait au juge d’instruction de ne
M. R. M. P.) ; l’article 18 du code de procédure pénale permet à déléguer que les actes qu’il ne peut effectuer lui-même et d’en
l’officier de police judiciaire délégué, sur réquisition du procureur vérifier soigneusement l’exécution. L’« impossibilité » du juge
de la République ou commission rogatoire du juge d’instruction, d’instruction d’effectuer lui-même l’acte dont il délègue l’exécu-
d’opérer sans subdélégation sur l’ensemble du territoire. L’offi- tion est laissée à l’appréciation du juge mandant (Poitiers, ch.
cier de police judiciaire délégué tire de l’article 154 un pouvoir acc., 15 janv. 1964, Gaz. Pal. 1964. 1. 446. – Crim. 24 févr.
de garde à vue qui n’appartient pas en fait au magistrat délé- 1987, Bull. crim. no 93).
gant. Enfin, la loi du 9 mars 2004 (L. no 2004-204 du 9 mars
2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la crimi- 9. Une « question de conscience et de mesure ». — Depuis,
nalité, D. 2004. 737 ; D. 2004. 1910, chron. de Lamy ; Dossier la nécessité pour le juge de déléguer certains actes n’a jamais
Criminalités organisées : une justice adaptée ?, AJ pénal 2004. réellement été mise en cause. Les conditions de l’instruction
177 ; Dossier La nouvelle garde à vue, AJ pénal 2004. 283 ; moderne ne permettent en effet plus, et depuis longtemps, de
Dossier Les nouvelles enquêtes, AJ pénal 2004. 221 ; Dossier concentrer tous les actes d’instruction entre les mains du seul
L’instruction depuis la loi Perben II, AJ pénal 2004. 346) a ajou- magistrat instructeur. Celui-ci limite son intervention personnelle
té un nouvel alinéa 5 à l’article 18 du code de procédure pé- aux actes qui ne peuvent être réalisés que par lui (mise en exa-
nale, selon lequel des officiers de police judiciaire peuvent réa- men, interrogatoire, confrontation, perquisition dans certains cas
liser certaines auditions à l’étranger sur commission rogatoire énumérés par les art. 56-1 s. c. pr. pén.). Pour le reste, plu-
expresse du juge d’instruction. Or, il ne semblait pas que le juge sieurs conceptions se rencontrent fréquemment dans les juri-
d’instruction puisse réaliser lui-même ces actes, Le problème a dictions. Comme CHAMBON l’écrivait (CHAMBON et GUÉRY,
disparu avec l’entrée en vigueur de la loi du 13 décembre 2011 Droit et pratique de l’instruction préparatoire. Juge d’instruction.
(L. no 2011-1862, art. 22) qui a créé un nouvel article 93-1 du Chambre de l’instruction, 8e éd., 2012, Dalloz action, no 151.13) :
code de procédure pénale aux termes duquel, « Si les néces- « En droit, l’existence ou l’absence de commissions rogatoires
sités de l’instruction l’exigent, le juge d’instruction peut, dans le est indifférente à la validité de la procédure. C’est pour le juge
cadre d’une commission rogatoire adressée à un État étranger d’instruction une question de conscience et de mesure. Le juge
et avec l’accord des autorités compétentes de l’État concerné, d’instruction apprécie en toute indépendance l’opportunité de
se transporter avec son greffier sur le territoire de cet État aux l’emploi de la commission rogatoire, "acte utile à la manifesta-
fins de procéder à des auditions. Il en donne préalablement avis tion de la vérité", ainsi que l’énonce l’article 81. Ni le procu-
au procureur de la République de son tribunal. » reur de la République, ni la chambre de l’instruction, ni à plus
forte raison les parties ne peuvent la lui interdire, ni la lui impo-
ser ». Certains magistrats instructeurs délèguent très volontiers
C. – Historique
tout ce qui n’est pas de leur ressort exclusif, d’autres réalisent
eux-mêmes certains actes qui leur paraissent importants et no-
7. Extension du champ d’application. — L’institution de la com- tamment certaines auditions de témoin. La précision du contenu
mission rogatoire n’a pas cessé de se développer depuis la pro- de la commission rogatoire varie aussi selon les magistrats et
mulgation du code d’instruction criminelle, au point d’aboutir à les dossiers. On note une certaine tendance du législateur, ces
des abus contre lesquels le législateur a tenté à diverses reprises dernières années, à multiplier les perquisitions qui doivent forcé-
de réagir. Dans la conception initiale de ce code, le juge d’ins- ment être accomplies par le magistrat instructeur sans possibilité
truction devait accomplir seul la quasi-totalité des actes d’infor- de délégation (V. infra, no 53).
mation dans la mesure où le lui permettait sa compétence territo-
riale. Dans les autres hypothèses, il déléguait à son homologue 10. Évolution récente. — La loi no 85-1407 du 30 décembre 1985
de la juridiction compétente le pouvoir d’effectuer ceux des actes (JO 31 déc.) a permis au juge d’instruction de déléguer directe-
d’instruction qu’il ne pouvait légalement exercer lui-même. Très ment des officiers de police judiciaire exerçant hors de son res-
tôt, cependant, la jurisprudence avait favorisé les plus vastes dé- sort sans passer par l’intermédiaire du juge d’instruction du lieu
légations de pouvoirs, notamment en matière de déposition de d’exécution de la mission. La loi no 2003-239 du 18 mars 2003
témoins (Crim. 21 nov. 1879, S. 1880. 1. 188), de perquisi- (JO 19 mars) a consacré dans un article 151-1-1 le droit pour
tion (Crim. 13 janv. 1872, S. 1872. 1. 448), d’interrogatoire des l’officier de police judiciaire de procéder aux réquisitions de l’ar-
inculpés (Crim. 22 déc. 1910, S. 1913. 1. 169). C’est ainsi ticle 60-1 du code de procédure pénale. L’article 154-1 lui a don-
que la Cour de cassation a jugé que, d’une manière générale, le né le droit de procéder à des prélèvements biologiques externes.
juge d’instruction peut commettre un officier de police judiciaire La loi du 9 mars 2004 (préc. supra, no 6) a apporté quelques mo-
pour procéder à un acte d’instruction (Crim. 12 juill. 1934, Bull. difications sur ces points (V. infra, no 122) ; elle a, par ailleurs, en
crim. no 137), qu’il peut de même déléguer, à l’effet d’effectuer créant une procédure particulière pour la criminalité organisée,
une visite domiciliaire ou une perquisition, un juge de paix de a profondément modifié les régimes particuliers de garde à vue,
son arrondissement (Crim. 16 janv. 1869, Bull. crim. no 17), un ainsi que les pouvoirs des enquêteurs dans ces affaires, sur au-
maire ou son adjoint (Crim. 8 juin 1872, Bull. crim. no 138), ou torisation expresse du ministère public ou du juge d’instruction
encore un commissaire de police (Crim. 13 juin 1872, Bull. crim. (V. infra, nos 77 s. et 180 s.). Mais le bouleversement législatif le
no 140). plus important de ces dernières années est intervenu, après de
nombreuses vicissitudes, par la loi no 2011-932 du 14 avril 2011
8. Réactions législatives. — Les lois du 7 février 1933 (JO 9 févr.) relative à la garde à vue, dont la plupart des dispositions sont
et 9 juillet 1934 (DP 1934. 419) réagirent brutalement contre les entrées en vigueur le 1er juin suivant (V. infra, nos 142 s.).
CHAPITRE 1er
Conditions de fond des commissions rogatoires
11. Plan. — Ces conditions touchent à la compétence des au- les articles 114 et 119 à 121 » (C. pr. pén., art. 463). Il doit donc
torités délégantes (V. infra, nos 12 s.), au respect des règles de lui-même procéder aux auditions de la personne mise en exa-
la saisine (V. infra, nos 17 s.), et à la compétence des autorités men.
déléguées (V. infra, nos 28 s.).
16. Cour d’assises. — Le président de la cour d’assises peut
ordonner un supplément d’information lorsque l’instruction lui
SECTION 1re semble incomplète ou que des éléments nouveaux se sont
Autorités délégantes révélés depuis sa clôture. Il y procède par lui-même mais il peut
aussi, aux termes de l’article 283 du code de procédure pénale,
12. Juge d’une juridiction d’instruction ou de jugement. — Les déléguer à cette fin un de ses assesseurs ou un juge d’instruc-
commissions rogatoires ne peuvent être délivrées que par un tion, qui obéit aux règles écrites pour l’instruction préparatoire
magistrat appartenant à une juridiction d’instruction ou de juge- (sur la distinction du supplément d’information et des actes
ment compétente et déjà saisie du fait qu’elle tend à vérifier. du pouvoir discrétionnaire : V. Crim. 17 oct. 1968, JCP 1969.
Elles doivent être confiées à un délégué, magistrat ou officier de II. 15780, note Vitu ; Gaz. Pal. 1968. 2. 353. – Crim. 30 avr.
police judiciaire territorialement compétent et investi, en principe, 1969, Bull. crim. no 149 ; D. 1969. 449, note Chapar).
pour l’exécution, des mêmes droits et devoirs que le délégant.
SECTION 2
13. Juge d’instruction, juge des enfants. — C’est le juge d’ins-
truction (V. Instruction préparatoire et Juge d’instruction) qui, Respect des règles de la saisine
le plus souvent, délivre des commissions rogatoires. C’est
d’ailleurs pourquoi la réglementation applicable figure dans 17. Commission rogatoire générale. — Il importe de distinguer la
les textes écrits pour l’instruction. Le juge d’instruction chargé commission rogatoire générale quant aux infractions, prohibée,
des mineurs et le juge des enfants peuvent aussi délivrer une de celle qui est générale quant aux actes à effectuer, qui est
commission rogatoire (Ord. no 45-174 du 2 févr. 1945, art. 8 et permise. Il convient ensuite de préciser quels actes peuvent être
9. – V. Enfance délinquante). accomplis dans le cadre de la saisine initiale.
14. Chambre de l’instruction. — (V. Chambre de l’instruction). La 18. Infraction visée aux poursuites. — L’article 151, alinéa 3,
chambre de l’instruction peut « dans tous les cas », aux termes énonce expressément que la commission rogatoire ne peut pres-
de l’article 201 du code de procédure pénale, et notamment dans crire que des actes d’instruction se rattachant directement à la
le cas des articles 202, 204, 206 et 207, ordonner une informa- répression de l’infraction visée aux poursuites. Par ce texte, le
tion complémentaire, qui est confiée soit à l’un des membres de législateur a érigé en règle d’obligation légale un principe déga-
la chambre de l’instruction, soit à un juge d’instruction de son res- gé par une jurisprudence antérieure qui avait notamment frappé
sort (Crim. 15 mai 1968, Bull. crim. no 156. – Crim. 19 mai 1969, de nullité la commission rogatoire revêtant la forme d’une délé-
ibid. no 176. – Crim. 6 déc. 1984, ibid. no 330). Le président de gation générale de pouvoirs visant de façon éventuelle toute une
la chambre de l’instruction ne possédait, en tant que tel, aucun catégorie d’infractions. Cette nullité s’étendant alors à tous les
pouvoir propre (Crim. 5 nov. 1969, Bull. crim. no 289), mais la actes accomplis pour son exécution et à tous les actes ultérieurs
loi du 9 mars 2004 (préc. supra, no 6) a prévu qu’en cas d’ur- déduits de cette exécution (Crim. 22 janv. 1953, Bull. crim.
gence le président de la chambre de l’instruction ou le conseiller no 24 ; JCP 1953. II. 7456, rapp. Brouchot ; D. 1953. 533, note
désigné par lui peut ordonner l’incarcération provisoire de la per- Lapp. – Pour la situation ultérieure à la promulgation du code de
sonne pendant une durée déterminée qui ne peut en aucun cas procédure pénale : Douai, 6 déc. 1960, D. 1961. Somm. 87). Il
excéder quatre jours ouvrables jusqu’à la réunion de la chambre convient de préciser toutefois ce que l’on entend par « délégation
de l’instruction (C. pr. pén., art. 201, al. 3). L’article 205 du code générale de pouvoirs ».
de procédure pénale dispose qu’« il est procédé au supplément
d’information conformément aux dispositions relatives à l’instruc- ART. 1er. – COMMISSION ROGATOIRE GÉNÉRALE
tion préalable ». Le magistrat chargé de ce supplément d’infor- QUANT AUX INFRACTIONS
mation peut donc donner, comme le juge d’instruction, commis-
sion rogatoire à un autre magistrat ou à un officier de police ju- 19. Prohibition de la commission rogatoire générale quant aux
diciaire selon la nature de l’opération à effectuer. Le doyen des infractions. — Dans l’arrêt du 22 janvier 1953 précité (supra,
juges d’instruction désigné par la chambre de l’instruction peut no 18), la chambre criminelle expose : « Attendu qu’au sens de
lui-même subdéléguer un autre juge d’instruction du même tri- l’article 90 du code d’instruction criminelle, le juge d’instruction
bunal (Crim. 15 nov. 1951, Bull. crim. no 296 ; D. 1951. 755). ne peut délivrer commission rogatoire que sur présomption d’une
infraction déterminée déjà commise ou en cours d’exécution ;
15. Tribunal correctionnel et cour d’appel. — Le tribunal correc- que la commission rogatoire ne saurait revêtir la forme d’une dé-
tionnel et la cour d’appel peuvent, aux termes des articles 463 légation générale de pouvoirs visant de façon éventuelle toute
et 512 du code de procédure pénale, ordonner un supplément une catégorie d’infractions et abandonnant à la merci de l’agent
d’information. Pour y procéder, « le tribunal commet par juge- délégué, l’inviolabilité du domicile de l’ensemble des citoyens. »
ment un de ses membres qui dispose des pouvoirs prévus aux Il est clairement indiqué dans cet arrêt de principe que c’est
articles 151 à 155 ». Ce magistrat doit avoir participé au juge- la commission rogatoire revêtant « une délégation générale de
ment (Crim. 1er avr. 1892, Bull. crim. no 99. – Crim. 22 nov. pouvoirs visant de façon éventuelle toute une catégorie d’infrac-
1956, D. 1957. 89). Il a le pouvoir de donner commission ro- tions » qui est visée. L’arrêt de 1953 concernait une affaire dans
gatoire dans les mêmes conditions que le juge d’instruction. Le laquelle le juge d’instruction faisait vérifier l’existence « de pa-
magistrat commis ou son délégué « obéit aux règles édictées par ris clandestins sur les courses de chevaux, qui auraient eu lieu
à Nice, dans différents cafés de la ville », sans autre précision. sur présomption d’une infraction déterminée déjà commise ou
Il s’agit de la simple application des règles gouvernant la sai- en cours d’exécution » (Crim. 16 avr. 1970, Bull. crim. no 134 ;
sine du juge d’instruction : celui-ci ne peut instruire que sur les D. 1970. Somm. 179 ; RSC 1971. 141, obs. Robert). Si le juge
faits qui lui ont été dévolus par le ministère public et ne peut est saisi de dégradation de monument public, il ne peut faire
s’en écarter. En conséquence, il ne peut expressément deman- procéder à une perquisition pour rechercher des documents
der par commission rogatoire qu’il soit instruit sur des infractions de nature à établir l’appartenance à une ligue dissoute (Paris,
qu’aurait pu aussi commettre la personne soupçonnée, en de- 12 févr. 1975, Gaz. Pal. 1975. 2. Somm. 211. – Dans le sens de
hors de celles dont il est saisi. Doit être annulée la commission la nullité de la commission rogatoire qui prescrit des actes ne se
rogatoire donnant mission aux services de police « notamment, rattachant pas directement à la répression de l’infraction visée
de faire le point sur l’ensemble du patrimoine des frères Y… aux poursuites, V. aussi Rouen, 15 juin 1982, D. 1983. 143, note
et de leurs "acolytes", de répertorier l’ensemble des débits de Chambon). Justifie sa décision la chambre de l’instruction qui,
boissons, bars et autres restaurants au sein desquels ils se- dans une information ouverte contre personne non dénommée
raient associés ou qu’ils dirigeraient, directement ou indirecte- pour tentative d’extorsion de fonds, déclare irrégulière une
ment, de déterminer les conditions dans lesquelles lesdits éta- commission rogatoire prescrivant des investigations totalement
blissements ont été financés, par qui ils sont gérés et la nature étrangères à l’instruction de ce délit (Crim. 28 sept. 2005,
de leurs revenus, d’identifier l’ensemble des gérants et salariés no 05-84.495, Bull. crim. no 246. – Sur les faits de la cause,
desdits établissements et de se renseigner sur leurs habitudes, V. supra, no 19).
antécédents et fréquentations, d’effectuer une enquête appro-
fondie sur le "sex-shop" "Le Malicia" ainsi que sur l’établissement
ART. 2. – COMMISSION ROGATOIRE GÉNÉRALE QUANT AUX ACTES
exploité sous l’enseigne "Ital’Café Expresso", d’adresser toutes
réquisitions utiles dans le but de déterminer l’origine réelle du 22. Délégations de pouvoirs : jurisprudence n’allant pas dans
patrimoine de l’ensemble des personnes impliquées dans cette le sens de l’annulation. — Ne peut être regardée comme consti-
affaire », alors que le magistrat instructeur n’était saisi que des tuant une délégation abusive la commission rogatoire qui se rap-
seuls faits commis dans le cadre de l’exploitation du débit de porte spécialement aux faits dont le juge d’instruction se trouve
boissons « Le Santa Clara » (Crim. 28 sept. 2005, no 05-84.495, saisi et prescrit des investigations ayant pour seul objet d’établir
Bull. crim. no 246). la preuve de ces infractions et d’en rechercher les auteurs (Crim.
24 oct. 1974, Bull. crim. no 302. – Crim. 9 nov. 1976, ibid.
20. Prohibition complexe à mettre en œuvre. — La nuance n’est no 320 ; D. 1977. IR 36. – Crim. 14 juin 1978, Bull. crim. no 199 ;
pas toujours facile à faire, car le juge d’instruction peut instruire D. 1978. IR 453) ou confiée pour exécution au SRPJ territoriale-
sur le « contexte » de l’infraction qui lui est soumise. C’est ainsi, ment compétent aux fins de procéder à toutes recherches utiles
par exemple, que saisi d’abus sexuels sur mineurs, il aura la ten- à la manifestation de la vérité et ce, sur l’étendue du territoire
tation de vérifier les antécédents en ce domaine de la personne. national et visant l’article 18 du code de procédure pénale (Crim.
La plupart du temps, la validité de la commission rogatoire se- 28 avr. 1981, JCP 1981. IV. 250). De même sont valides les
ra alors une question de rédaction. Il n’est pas interdit au ma- commissions rogatoires donnant aux autorités déléguées une
gistrat de vérifier le comportement passé de la personne mise mission générale quant aux actes à accomplir dès lors qu’il existe
en examen. Il lui sera en revanche interdit de donner commis- des circonstances de temps et de lieu propres à pouvoir les indi-
sion rogatoire pour vérifier toutes les infractions qu’elle aurait pu vidualiser (Crim. 19 mars 1953, Bull. crim. no 99. – Crim. 5 mai
commettre. Les investigations sur des faits différents se justifient 1953, ibid. no 157. – Crim. 19 janv. 1956, ibid. no 81. – Crim.
quand elles ont pour objet de préciser les faits en cause et les 4 déc. 1956, ibid. no 802. – Crim. 19 juin 1957, ibid. no 503. –
buts poursuivis par leurs auteurs (Crim. 12 févr. 1985, Bull. crim. Crim. 5 avr. 1965, ibid. no 112). Cette jurisprudence ne s’est pas
no 69 ; JCP 1986. II. 20587, note Jeandidier ; Gaz. Pal. 1985. démentie (Crim. 24 oct. 1974, Bull. crim. no 302. – Crim. 9 nov.
1. 272). Les actes d’instruction tendant à la recherche du mobile 1976, ibid. no 320. – Crim. 14 juin 1978, ibid. no 199. – Crim.
de l’infraction sont justifiés (Crim. 26 juin 1995, no 85-82.333, 28 avr. 1981, ibid. no 128. – Crim. 15 févr. 1988, ibid. no 73. –
Bull. crim. no 235). Il existe un arrêt dans lequel la chambre Crim. 6 févr. 1996, ibid. no 60). Ne constitue pas une délégation
criminelle a admis la délivrance d’une commission rogatoire gé- générale de pouvoirs la commission rogatoire qui vise le réqui-
nérale quant aux infractions, mais directement en relation avec sitoire introductif, lequel se réfère aux procès-verbaux de l’en-
l’incrimination d’association de malfaiteurs reprochée aux sus- quête initiale, et détermine ainsi clairement le cadre de la saisine
pects qui suppose une organisation en vue de préparer ou de du service délégué (Crim. 9 juin 1998, no 98-80.418, Bull. crim.
commettre des crimes contre les personnes et les biens (Crim. no 187. – Dans le même sens, V. Crim. 8 juin 1999, nos 99-81.291
11 juin 1970, Bull. crim. no 199). On sait aussi que des vérifica- et 99-81.807, ibid. no 124). C’est ainsi qu’il a été décidé qu’il
tions peuvent être entreprises dans le cas où des faits portés à n’a été commis aucune violation des textes, ni aucune atteinte
la connaissance du magistrat ou des enquêteurs ne feraient pas aux droits de la défense, par une « commission rogatoire adres-
partie de sa saisine initiale (V. infra, nos 24 s.). sée à un commissaire divisionnaire, aux fins de procéder à une
enquête, à l’audition de toutes personnes susceptibles de four-
21. Délégations de pouvoirs : jurisprudence allant dans le sens nir des renseignements, à toutes confrontations et à toutes per-
de l’annulation. — Doit être annulée une commission rogatoire quisitions régulières en tous lieux et domiciles pour lesquels il
visant des délits d’atteinte à la sûreté extérieure de l’État, sans existerait des présomptions graves de découvrir les auteurs de
mentionner aucun fait délimité dans l’espace et le temps, ni l’infraction ou des objets relatifs aux faits incriminés. En effet,
aucune charge contre quiconque, ni aucun document (Crim. la commission rogatoire a été délivrée dans une information ou-
21 mars 1957, Bull. crim. no 278). Est nulle, ainsi que les verte contre les inculpés dénommés, à l’occasion de faits nette-
actes accomplis pour son exécution, la commission rogatoire ment déterminés, et que la mission prescrite y était précisée »
qui prescrit de rechercher toute une catégorie d’infractions (Crim. 4 oct. 1968, Bull. crim. no 245). Enfin, le fait qu’une
commises par l’inculpé dont le juge n’était pas saisi, de procéder commission rogatoire soit nommée « générale » est sans consé-
à des perquisitions chez des tiers à l’occasion d’infractions quence, dès lors que, conformément à l’article 151, alinéa 3, elle
non déterminées, et qui confère à l’officier de police judiciaire ne prescrit que des actes d’information se rattachant directement
délégué le pouvoir de transmettre directement, sans contrôle à la répression des infractions poursuivies (Crim. 6 févr. 1996,
du juge mandant, les résultats de ces recherches à l’expert no 95-84.041, Bull. crim. no 60 ; D. 1996. 198, note Pradel ; JCP
commis : « Une commission rogatoire ne peut être délivrée que 1996. II. 22634, note Chambon).
ART. 3. – ACTES ACCOMPLIS DANS LE CADRE DE LA SAISINE sibilité de procéder à des investigations sur des faits ne faisant
pas partie de la saisine du juge : lorsque le magistrat acquiert
23. Prohibition des investigations coercitives accomplies en de- la connaissance de faits nouveaux, si l’article 80 ne lui interdit
hors de la saisine initiale. — L’un des grands principes gouver- pas, avant toute communication au procureur de la République,
nant la saisine du juge d’instruction est qu’il ne peut instruire sur d’en consigner la substance dans un procès-verbal et, le cas
des faits étrangers à l’acte de saisine (Crim. 23 janv. 1979, échéant, d’effectuer d’urgence des vérifications sommaires pour
Bull. crim. no 29). La commission rogatoire, sans pour autant en apprécier la vraisemblance, il ne peut, sans excéder ses pou-
être générale quant aux infractions, ne doit pas porter sur des voirs, procéder à des actes qui, présentant un caractère coercitif,
faits autres que ceux qui fondent la saisine du juge d’instruction : exigent la mise en mouvement préalable de l’action publique. Tel
encourt la censure l’arrêt d’une chambre d’accusation (de l’ins- est le cas lorsque le magistrat instructeur, qui n’a été saisi que
truction) qui, dans une information ouverte pour blessures invo- par réquisitoire du 30 mars de faits d’abus de biens sociaux et
lontaires et infractions aux règles relatives à la sécurité des tra- de faux et usage de faux, au préjudice d’une société, a délivré, le
vailleurs, déclare régulière la commission rogatoire du juge d’ins- 8 mars, une commission rogatoire en exécution de laquelle les
truction prescrivant notamment des investigations ayant pour ob- enquêteurs ont, le 13 mars, entendu le dirigeant d’une société,
jet de caractériser le délit de marchandage (Crim. 24 nov. 1998, qui a été placé en garde à vue, et ont perquisitionné à son do-
no 98-83.247, Bull. crim. no 315). De même, encourt la cassa- micile ainsi que dans les locaux de la société où des documents
tion l’arrêt d’une chambre d’accusation (de l’instruction) qui dé- ont été saisis, alors qu’ainsi le juge d’instruction avait procédé,
clare justifiés par l’exécution d’une commission rogatoire du juge concernant des faits dont il n’était pas saisi, à des actes d’instruc-
d’instruction, l’interpellation et le placement en garde à vue de tion entraînant des investigations approfondies et présentant un
personnes par des officiers de police judiciaire à l’occasion de caractère coercitif (Crim. 6 févr. 1996, no 95-85.710, Bull. crim.
la constatation de faits nouveaux, non visés au réquisitoire intro- no 62 ; Dr. pénal 1996. Comm. 21 ; D. 1996. IR 62 et 198, note
ductif (Crim. 1er avr. 1998, BICC 1998, no 959). Pradel ; JCP 1996. II. 22634, note Chambon. – Crim. 30 mai
1996, no 95-85.954, Bull. crim. no 226 ; D. 1996. IR 167). Cette
24. Connaissance de faits nouveaux. — L’article 80 du code décision a été reprise par la suite (Crim. 30 juin 1999, Bull. crim.
de procédure pénale prévoit que, lorsque des faits non visés au no 176). Cette jurisprudence concerne tant les investigations que
réquisitoire sont portés à la connaissance du juge d’instruction, peut accomplir le juge d’instruction que celles accomplies par
celui-ci doit immédiatement communiquer au procureur de la Ré- les enquêteurs sur commission rogatoire (V. encore pour les en-
publique les plaintes ou les procès-verbaux qui les constatent. quêteurs qui peuvent opérer ces vérifications avant même toute
La jurisprudence a dû statuer sur la validité d’actes accomplis communication au procureur de la République ou au juge d’ins-
avant que l’article 80 n’ait pu être appliqué par le juge. C’est truction : Crim. 11 mai 2000, no 99-85.100, Bull. crim. no 186 ;
ainsi qu’elle a établi que si l’article 80 interdit au juge d’instruc- D. 2000. IR 225. – Crim. 13 déc. 2000, no 00-84.189, Bull. crim.
tion d’informer sur des faits dont il n’a pas été saisi en vertu d’un no 377).
réquisitoire du procureur de la République, ce texte ne met pas
obstacle à ce « qu’un inculpé soit entendu, dans les formes de 26. Déclenchement d’une enquête préliminaire ou de fla-
la loi, sur des faits nouveaux apparaissant dans la procédure et grance. — Cette prohibition ne concerne que les actes accom-
dont il n’est ni établi ni soutenu qu’ils aient été l’objet de mesures plis dans le cadre de l’exécution de la commission rogatoire.
d’instruction ; il importe seulement que ces faits ne donnent pas Des actes entrepris sur commission rogatoire et qui entraînent
lieu à inculpation ou à poursuite en l’état contre quiconque et que la découverte d’autres faits dont le juge n’est pas saisi peuvent
le procès-verbal qui les constate soit adressé immédiatement au en effet donner lieu à saisie si les conditions de l’enquête
procureur de la République pour lui permettre d’apprécier la suite préliminaire ou de flagrance sont réunies. Lorsque des officiers
à leur donner » (Crim. 25 juin 1984, Bull. crim. no 240. – Crim. de police judiciaire découvrent au cours de l’exécution d’une
10 mai 1994, no 93-81.522, D. 1994. IR 198). Il est encore pos- commission rogatoire des faits délictueux étrangers à la saisine
sible de prescrire des vérifications en relation avec la recherche du juge d’instruction, il ne leur est pas interdit de procéder
de la preuve des faits poursuivis, fussent-elles éventuellement à des investigations sur ces faits en mettant en œuvre les
de nature à aboutir à caractériser des délits nouveaux (Crim. pouvoirs qu’ils tiennent des règles prévues par les articles 53
4 mai 1994, Gaz. Pal. 1994. 2. Somm. 552). Les officiers à 78 du code de procédure pénale pour l’enquête préliminaire
de police judiciaire qui, à l’occasion de l’exécution d’une com- (et donc avec l’assentiment de la personne pour la saisie : Crim.
mission rogatoire, acquièrent la connaissance de faits nouveaux 17 mai 1994, no 93-82.252, Bull. crim. no 186) ou de flagrance
peuvent, avant toute communication au juge d’instruction des (Crim. 11 juin 1985, Bull. crim. no 227. – Crim. 19 janv. 1999,
procès-verbaux qui les constatent, effectuer d’urgence les vérifi- no 98-83.787, ibid. no 9 ; JCP 1999. II. 10156, note Rebut ;
cations sommaires qui s’imposent pour en apprécier la vraisem- Dr. pénal 1999. Comm. 77, obs. Maron ; RSC 1999. 588,
blance, pourvu qu’elles ne présentent pas un caractère coercitif obs. Delmas Saint-Hilaire. – Cass., ass. plén., 22 nov. 2002,
exigeant la mise en mouvement préalable de l’action publique no 92-82.460, Bull. ass. plén., no 2. – Crim. 26 mars 2003,
(Crim. 1er avr. 1998, no 97-84.372, Bull. crim. no 124 ; BICC 487, no 03-80.084, Bull. crim. no 80 ; JCP 2003. IV. 2121 ; Procé-
no 959. – Crim. 11 mai 2000, no 99-85.100, Bull. crim. no 186 ; D. dures 2003, no 180, note Buisson ; D. 2003. IR 1605 ; RSC
2000. IR 225. – Crim. 26 mars 2003, no 03-80.084, Bull. crim. 2004. 426, note Buisson). Ils peuvent aussi agir en fonction des
no 80 ; Procédures 2003, no 180, note Buisson. – Crim. 1er févr. pouvoirs qu’ils tirent d’une autre commission rogatoire qui leur
2011, no 10-83.523, Bull. crim. no 15). Tel est le cas de réquisi- a été attribuée (Crim. 26 mars 2003, no 03-80.084, préc.). En
tions adressées à des opérateurs de téléphonie par des officiers revanche, encourt la cassation l’arrêt de la chambre d’accusa-
de police judiciaire effectuant sur commission rogatoire la sur- tion (de l’instruction) qui n’annule que partiellement des actes
veillance d’une cabine téléphonique, afin d’obtenir la liste des concernant des faits dont le juge d’instruction n’était pas saisi
appels, antérieurs à ces réquisitions, concernant un numéro es- et qui avaient été accomplis sous le couvert de l’exécution de la
pagnol appelé depuis cette cabine, de manière à déterminer si commission rogatoire délivrée par ce magistrat (Crim. 13 déc.
les propos échangés lors de cet appel se rapportaient ou non à 2000, BICC 2000, no 243).
des faits dont le magistrat instructeur était saisi (Crim. 1er févr.
2011, no 10-83.523, Bull. crim. no 15). 27. Obligation d’information des OPJ. — Les officiers de police
judiciaire qui découvrent des faits nouveaux lors de l’exécution
25. Prohibition des actes coercitifs en cas de faits nouveaux. — de leur mission doivent en prévenir le juge d’instruction (Crim.
Mais la chambre criminelle a posé une limite importante à la pos- 14 janv. 1992, no 91-85.864, Bull. crim. no 13). Ils doivent aussi
prévenir le procureur de la République (Crim. 9 févr. 1993, no 92- ainsi entendus que sur leur demande formulée en connaissance
85.415, Bull. crim. no 66. – Crim. 21 févr. 1995, no 94-83.336, de cause (C. pr. pén., art. 151, al. 1er, et 152. – V. infra, nos 89 et
ibid. no 75). 90).
28. Pouvoirs dévolus au délégant. — La règle posée par l’ar- 34. Compétence déterminée par décret. — L’article 15-1 du code
ticle 152, alinéa 1er, du code de procédure pénale veut que le dé- de procédure pénale, issu de la loi du 1er février 1994, précise
légué à l’exécution d’une commission rogatoire reçoive en prin- que les critères de compétence territoriale des catégories de ser-
cipe tous les pouvoirs dévolus au délégant, sous la réserve des vices ou unités dans lesquels les officiers de police judiciaire
exceptions légales attachées à l’exécution de la mission confiée exercent leurs fonctions habituelles sont déterminés par décret
à un officier de police judiciaire. en Conseil d’État. La loi du 18 mars 2003 a ajouté un alinéa à
cet article ainsi rédigé : « La compétence territoriale de ces ser-
ART. 1er. – MAGISTRATS vices ou unités s’exerce, selon les distinctions prévues par ce
décret, soit sur l’ensemble du territoire national, soit sur une ou
29. Délégation à un magistrat du siège du TGI. — Les magistrats plusieurs zones de défense, ou parties de celles-ci, soit sur l’en-
du siège de l’ordre judiciaire ont qualité pour exécuter, dans le semble d’un département. »
cadre de leur compétence territoriale normale, les commissions
rogatoires du juge d’instruction lorsque celui-ci exerce ses fonc- 35. Les règles propres de compétence des officiers de police
tions au siège du tribunal de grande instance dont dépend le judiciaire sont définies par l’article 18 du code de procédure pé-
siège du magistrat délégué. nale et par l’article D. 12. Avant l’entrée en vigueur de la loi du
14 avril 2011 (L. no 2011-932, JO 15 avr.), l’article 18, alinéa 3,
30. Délégation à un juge d’instruction. — En revanche, lorsque du code de procédure pénale disposait : « En cas de crime ou
le juge d’instruction désire faire exécuter une commission roga- délit flagrant, ils peuvent se transporter dans le ressort des tri-
toire par un magistrat dont la compétence territoriale n’est pas bunaux de grande instance limitrophes du tribunal ou des tribu-
incluse dans la sienne propre, il ne peut s’adresser qu’au juge naux auxquels ils sont rattachés. » La condition de flagrance a
d’instruction territorialement compétent (C. pr. pén., art. 151, été abrogée par la loi du 14 avril 2011 de sorte que les officiers
al. 1er). Bien qu’aucun texte ne le précise, c’est en général le de police judiciaire disposent aussi de cette possibilité dans le
doyen des juges d’instruction qui centralise les commissions ro- cadre de l’enquête préliminaire. Le plus souvent, le juge d’ins-
gatoires qui viennent des autres juridictions, voire de l’étranger. truction délègue des commissions rogatoires à des services qui
La tâche peut être importante dans les grandes juridictions et ont la même compétence territoriale que lui, ou une compétence
le doyen répartit alors les actes entre les différents magistrats moindre, par exemple la sûreté urbaine de la ville principale. Ces
instructeurs de la juridiction. Il s’agit d’une répartition d’ordre in- services sont visés par les articles R. 15-20 (police), R. 15-25 et
térieur, sans conséquences juridiques, qui n’est pas à propre- R. 15-26 (gendarmerie) du code de procédure pénale. Il peut
ment parler une subdélégation (Crim. 15 nov. 1951, Bull. crim. aussi saisir un service dont la compétence excède la sienne, il
no 296). Il n’est pas nécessaire que le juge d’instruction délégué, n’est alors pas nécessaire que le juge étende la compétence de
pour exécuter une commission rogatoire, soit nominativement l’officier de police judiciaire (Crim. 6 déc. 1995, no 94-85.127,
désigné, tous les juges d’instruction d’un même siège ayant ter- Bull. crim. no 370). Certains services sont ainsi compétents sur
ritorialement une compétence égale (Crim. 25 janv. 1849, Bull. une ou plusieurs cours d’appel (C. pr. pén., art. R. 15-19, pour
crim. no 20). la police ; art. R. 15-23, pour la gendarmerie), ou sur plusieurs
tribunaux de grande instance d’une même cour d’appel (C. pr.
31. Subdélégation. — Le juge d’instruction ainsi délégué pourra pén., art. R. 15-20, pour la police ; R. 15-24, pour la gendarme-
opérer lui-même ou subdéléguer soit un juge de son tribunal, soit rie). Il est aussi possible de déléguer une commission rogatoire
un officier de police judiciaire si la nature de l’acte à accomplir est à des services ayant une compétence nationale (Crim. 13 sept.
de la compétence ratione materiae et loci de ce dernier. Seul un 1986, Bull. crim. no 254. – C. pr. pén., art. R. 15-18, pour la
juge d’instruction peut user de subdélégation, à l’exclusion des police, et art. R. 15-22, pour la gendarmerie). L’article D. 8-1
juges du siège et des juges d’instance ; l’article 151 retient en du code de procédure pénale donne la liste des offices centraux
cela la solution admise depuis la circulaire du 30 juillet 1854 ; de police judiciaire : … 1o Office central pour la répression du
cette manière de voir s’explique par le principe que peut seul faux monnayage ; … 2o Office central pour la répression du tra-
subdéléguer le magistrat ayant lui-même un pouvoir propre à fic illicite de stupéfiants ; … 3o Office central pour la répression
délivrer commission rogatoire dans le stade de la procédure où de la traite des êtres humains ; … 4o Office central pour la ré-
se place l’opération d’instruction effectuée. pression du banditisme ; … 5o Office central de lutte contre le
trafic de biens culturels ; … 6o Office central pour la répression
32. En pratique, la délivrance à un juge d’instruction d’un autre du trafic des armes, des munitions, des explosifs et des matières
ressort ne s’accorde que lorsqu’il s’agit d’un acte qui ressort ex- nucléaires biologiques et chimiques ; … 7o Office central pour la
clusivement à la compétence d’un magistrat. Ce sera le cas pour répression de la grande délinquance financière ; … 8o Office cen-
les mises en examen et interrogatoires et aussi pour les perqui- tral pour la répression de l’immigration irrégulière et de l’emploi
sitions où la présence d’un juge est exigée (V. infra, no 53). d’étrangers sans titre ; … 9o Office central de lutte contre la crimi-
nalité liée aux technologies de l’information et de la communica-
ART. 2. – OFFICIERS DE POLICE JUDICIAIRE tion ; … 10o Office central chargé des disparitions inquiétantes de
personnes ; … 11o Office central chargé des personnes recher-
33. Restrictions légales. — Alors que le magistrat délégué par chées ou en fuite ; … 12o Office central de lutte contre le crime
le juge d’instruction de son ressort ou le juge d’instruction d’un organisé.
autre ressort a qualité pour exécuter tous les actes d’instruction,
il n’est pas possible de déléguer un officier de police judiciaire 36. Délégation à des OPJ au-delà de la compétence propre du
pour procéder à l’interrogatoire d’une personne mise en examen. juge. — Les officiers de police judiciaire, à l’exclusion des agents
En outre, la partie civile ou le témoin assisté ne peuvent être de police judiciaire, ont qualité pour effectuer sur commission
rogatoire tous les actes d’instruction et notamment les perquisi- au siège de son service, dans lequel une dérivation permettant
tions et les saisies à condition que leur compétence propre leur l’écoute des conversations a été installée (Crim. 20 juin 1996,
permette d’opérer, quelle que soit d’ailleurs la compétence ter- nos 93-82.187 et 95-81.975, Bull. crim. no 270). Il n’y a pas d’ir-
ritoriale du magistrat mandant. Le juge mandant ne pouvait au- régularité dans le fait que l’extension de compétence ne soit pas
trefois que commettre des officiers de police judiciaire dont la impérative et que le juge prescrive seulement d’en faire applica-
compétence territoriale coïncidait au moins partiellement avec tion « en cas de besoin » (Crim. 18 juill. 1989, Bull. crim. no 290).
la sienne propre ; à défaut, il devait s’adresser au juge d’instruc-
tion territorialement compétent qui pouvait ou non subdéléguer 39. Assistance facultative d’un officier de police judiciaire ter-
tel officier de police judiciaire de son choix dont la compétence ritorialement compétent. — Dans sa rédaction issue de la loi
territoriale couvrait le territoire de la circonscription du magistrat no 85-1196 du 18 novembre 1985 (JO 19 nov.), l’article 18, ali-
délégué (C. pr. pén., art. C. 53. – Ord. du 17 févr. 1961). Tel néa 4, du code de procédure pénale exigeait que l’officier de
n’est plus le cas aujourd’hui et le magistrat instructeur peut sai- police judiciaire dont la compétence territoriale était étendue soit
sir n’importe quel service sur le territoire national. C’est la loi assisté d’un officier de police judiciaire « territorialement com-
no 85-1407 du 30 décembre 1985 (D. 1986. 124) qui a simpli- pétent » (ces termes ont remplacé, en 1995, ceux d’origine qui
fié la procédure d’instruction, en permettant au juge d’adresser, étaient : « exerçant ses fonctions dans la juridiction intéressée »).
en dehors de son ressort, ses commissions rogatoires à tout of- La loi du 18 mars 2003 (préc.) a supprimé le caractère obliga-
ficier de police judiciaire compétent. Le procureur de la Répu- toire de cette assistance. Le juge d’instruction peut l’estimer ou
blique du lieu d’exécution doit être avisé mais l’omission de cet non indispensable.
avis n’entraîne pas la nullité des actes accomplis (Crim. 10 janv.
1989, Bull. crim. no 8). Le juge peut même accorder à ce service 40. Absence de valeur contraignante au formalisme de l’article
l’extension de compétence prévue à l’article 18 du code de pro- D. 12. — L’article D. 12 du code de procédure pénale, modifié
cédure pénale (Crim. 20 juin 1996, nos 93-82.187 et 95-81.975, par le décret no 2005-59 du 24 janvier 2005 (JO 29 janv.) précise,
Bull. crim. no 270). Les limites territoriales des officiers de po- entre autres choses, que dans le cas d’une extension de compé-
lice judiciaire sont fixées par voie réglementaire (Crim. 29 juin tence, les actes à accomplir doivent être précisément énumérés
1993, no 93-80.544, Bull. crim. no 228). La compétence de la et avoir été accomplis sur le ressort de l’officier de police judi-
brigade de recherche de la gendarmerie implantée au chef-lieu ciaire dont la compétence est étendue. La chambre criminelle
de département s’étend sur tout ce département (Crim. 12 juill. a estimé qu’« une commission rogatoire qui porte mention des
1994, no 94-82.087, Bull. crim. no 279). Tout officier de police opérations à effectuer en cas d’urgence, prescrites par le magis-
judiciaire appartenant à la Direction de la surveillance du terri- trat instructeur, est régulière au regard des seules dispositions
toire a compétence sur tout le territoire national (Crim. 13 sept. de l’article 18, alinéa 5, du code de procédure pénale, quand
1986, Bull. crim. no 254). Le juge d’instruction a le libre choix du bien même cet acte ne satisferait pas entièrement aux formali-
service auquel il délègue sa mission. Certains critères sont pro- tés de l’article D. 12, alinéa 5, du même code » (Crim. 27 oct.
posés par les articles D. 3 et D. 4 du code de procédure pénale, 1986, Bull. crim. no 305 ; D. 1987. Somm. 81, obs. Pradel).
notamment en ce qui concerne la saisine de la Direction centrale Elle affirme de toute façon que la procédure pénale relevant de
de la police judiciaire. la loi, l’inobservation de textes réglementaires est sans effet sur
la régularité de la procédure (Crim. 25 juill. 1990, no 90-81.329,
37. Extension de compétence. — Traditionnellement, en cas Bull. crim. no 293. – 20 juin 1996, nos 93-82.187 et 95-81.975,
d’urgence, le magistrat délégant pouvait étendre la compétence ibid. no 270).
de l’officier de police judiciaire à l’ensemble du territoire natio-
nal. La commission rogatoire devait être expresse et se référer B. – Libre choix du juge
précisément à la circonstance de l’urgence qui ne faisait l’objet
d’aucun contrôle par la Cour de cassation (Crim. 27 oct. 1986, 41. Choix « guidé » de fait par celui du ministère public : un des-
Bull. crim. no 305. – Crim. 18 juill. 1989, ibid. no 290). L’urgence saisissement délicat. — Le juge d’instruction choisit librement
justifiant l’extension de la compétence territoriale des officiers le service auquel il délivre une commission rogatoire. Au-delà
de police judiciaire, en application de l’article 18, alinéa 4, du de ce principe, il faut remarquer que son choix est déjà large-
code de procédure pénale, relevait de la seule appréciation du ment guidé, en amont, par celui réalisé par le ministère public.
juge d’instruction (Crim. 27 févr. 2001, no 00-86.747, Bull. crim. C’est en effet le magistrat du parquet qui va confirmer dans les
no 50). premières heures après la commission du délit ou du crime, la
compétence naturelle du service le premier sur les lieux ou qui
38. Fin de la condition d’urgence. — La loi du 18 mars 2003 va saisir un autre service, estimé plus compétent compte tenu
(préc. supra, no 10) a supprimé le visa de l’urgence et la seule de la nature de l’infraction commise. Certes, le magistrat ins-
exigence est désormais l’existence d’une commission rogatoire tructeur n’est jamais obligé de maintenir la saisine du service en
expresse. Les officiers de police judiciaire (OPJ) de la brigade charge de l’enquête de flagrance ou préliminaire. Mais les rap-
de recherche et d’intervention, antenne de l’Office central pour la ports directs qui existent, la plupart du temps, entre magistrats
répression du banditisme (OCRB), créée par arrêté du 11 février instructeurs et enquêteurs d’une même circonscription oblige-
1986, détachée à Marseille et mise pour emploi à la disposition ront le juge d’instruction à pouvoir justifier sur des critères précis
du SRPJ de cette ville, ont une compétence territoriale étendue le dessaisissement éventuel du service le premier saisi. Il est né-
à tout le territoire national (Crim. 2 juin 1999, no 99-81.769, Bull. cessaire pour cela de connaître les compétences particulières de
crim. no 120). L’officier de police judiciaire, en principe compé- chaque service de son ressort, ainsi que leurs charges de travail
tent dans sa seule circonscription, peut néanmoins recueillir des respectives. Un dessaisissement sera d’autant mieux accepté
renseignements au-dehors par téléphone, fax ou autres moyens qu’il aura été expliqué oralement à la fois aux enquêteurs et au
(Crim. 10 janv. 1995, no 94-84.687, Bull. crim. no 13). L’officier chef de service. La référence aux critères de choix exposés par
de police judiciaire qui, en exécution d’une commission rogatoire les articles D. 3 et D. 4 du code de procédure pénale – nature et
ne visant pas l’extension de compétence territoriale, procède à circonstances de l’affaire, hypothèses qu’elle autorise, étendue
l’interception, à l’enregistrement et à la transcription de commu- des recherches à entreprendre, rapidité d’intervention, sources
nications émises sur une ligne téléphonique attribuée à un abon- d’information, connaissance de l’affaire et du milieu humain par
né qui demeure hors de son ressort territorial ne méconnaît pas le service de police judiciaire –, peut être utile mais se révéler
les règles de la compétence territoriale, dès lors que tous les insuffisante. Un service peut avoir le sentiment que son dessai-
actes d’exécution de la commission rogatoire ont été dressés sissement est une sanction et qu’il n’aura pas démérité dans les
investigations menées jusqu’alors. Il arrive aussi que ce service 46. Douanes judiciaires. — Le service des douanes peut rece-
comprenne que l’affaire dépasse réellement son cadre de com- voir des commissions rogatoires dès lors que le service com-
pétence naturel. On peut conseiller au magistrat de prendre en porte un douanier spécialement habilité pour cela (C. pr. pén.,
tous les cas le temps de réfléchir et d’expliquer. Le juge d’ins- art. 28-1). Ce nouveau service de douane judiciaire a été créé
truction n’est pas un distributeur automatique de commissions par la loi du 23 juin 1999. Le texte de la loi du 9 mars 2004
rogatoires, qu’elles soient générales ou ordonnent par exemple (préc. supra, no 14) a modifié l’article 28-1 du code de procé-
des écoutes téléphoniques. Pendant les permanences, on voit dure pénale. Le service des douanes judiciaires doit être saisi
certains services arriver avec une procédure et un réquisitoire in- par le procureur de la République ou le juge d’instruction dans
troductif, en pensant qu’ils vont repartir immédiatement avec une le cadre de l’article 28-1. On distingue les matières dans les-
commission rogatoire. Même si l’urgence justifie parfois une ré- quelles les agents de douane habilités peuvent agir seuls : in-
ponse immédiate, il est souvent préférable de prendre le temps fractions au code des douanes relatives au matériel de guerre,
de lire la procédure avant de déléguer ses pouvoirs d’une ma- aux contributions indirectes, à la contrefaçon mais uniquement
nière qui risquerait de devenir trop automatique. de marques, le blanchiment, les escroqueries à la TVA, les in-
fractions relatives aux intérêts financiers de l’Union européenne
42. Désignation d’un « service ». — L’article 151 du code de et toutes les infractions connexes de celles dans lesquelles les
procédure pénale évoque le ou les officiers de police judiciaire agents ne peuvent acter que dans le cadre d’unité mixte tempo-
commis. Mais pour la chambre criminelle, le juge d’instruction raire : infractions en matière de trafic de stupéfiants et de blan-
désigne un service et non un enquêteur particulier : l’officier de chiment du produit du trafic de stupéfiants. Les enquêteurs ont
police judiciaire nominativement désigné n’est jamais obligé d’ef- une compétence nationale. Au cours des procédures confiées à
fectuer personnellement la commission rogatoire (Crim. 24 févr. ces agents, il peut être fait application des dispositions des ar-
1911, Bull. crim. no 111), elle peut être exécutée par un autre of- ticles 100 à 100-7, 122 à 136, 694 à 695-3, 706-28, 706-30-1
ficier de police judiciaire compétent (Crim. 5 nov. 1953, D. 1955. et 706-73 à 706-106 du code de procédure pénale. Ces agents
Somm. 37). Le chef de service auquel est adressée une com- peuvent être assistés par les personnes mentionnées aux ar-
mission rogatoire peut la faire exécuter par un officier de police ticles 706 et 706-2 agissant sur délégation des magistrats. Le
judiciaire placé sous son autorité dans les limites de sa com- service des douanes judiciaires est dirigé par un magistrat en
pétence territoriale (C. pr. pén., art. D. 33, al. 1er). Les parties détachement (V. DOBKINE, La création d’une nouvelle force de
ne sauraient se prévaloir d’un droit acquis à ce que les officiers police judiciaire : la douane judiciaire, commentaire de l’article
de police judiciaire exécutant une commission rogatoire soient 28-1 du code de procédure pénale, D. 2001. Chron. 1475. –
personnellement ceux-là mêmes que le juge d’instruction a cru CARLI, Service national de douane judiciaire : officier de police
devoir nominativement désigner ; il suffit que cette commission judiciaire douanière ? Officier de douane judiciaire ?, D. 2003.
rogatoire ait été exécutée par un officier de police judiciaire léga- Chron. 2701).
lement apte à recevoir les délégations données par le magistrat
47. DGCCRF et fonctionnaires du ministère de l’Économie. —
instructeur (Crim. 5 janv. 1962, D. 1962. Somm. 95). Lorsque
Des agents de la Direction générale de la concurrence, de la
la commission rogatoire a été adressée à un commissaire divi-
consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), ha-
sionnaire, chef des services de police judiciaire, et à « tous ma-
bilités par le garde des Sceaux, peuvent également recevoir des
gistrats compétents », vainement serait-il prétendu, en cas de
commissions rogatoires (C. com., art. L. 450-1) pour certaines
subdélégation, qu’il appartiendrait au seul juge d’instruction, au-
infractions (C. consom., art. L. 141-1). Ils ne peuvent enquêter
teur de la commission rogatoire, de déterminer à quels magis-
sur des infractions qui n’entrent pas dans la liste prévue par le
trats il délègue ses pouvoirs et que, faute de désignation des
code de la consommation (pour une annulation à propos d’une
« magistrats compétents », le juge aurait abandonné sans droit
enquête de corruption, V. Crim. 5 mai 1999, no 98-85.589, Bull.
une partie de ses pouvoirs de délégation à la police judiciaire,
crim. no 88 ; Dr. pénal 1999. Comm. 142, obs. Maron). La loi du
alors que n’a été commise en ce cas aucune violation des ar-
9 mars 2004 (préc.) a ajouté un alinéa à l’article L. 450-1 du code
ticles 151 et suivants, 206 et 593 du code de procédure pénale,
de commerce, en disposant que « des fonctionnaires de catégo-
ni aucune atteinte aux droits de la défense (Crim. 4 oct. 1968,
rie A du ministère chargé de l’Économie, spécialement habilités
Bull. crim. no 245 ; D. 1968. 689, note Baurès).
à cet effet par le garde des Sceaux, ministre de la Justice, sur la
proposition du ministre chargé de l’Économie, peuvent recevoir
43. Pluralité de services saisis. — Il peut arriver, dans une affaire des juges d’instruction des commissions rogatoires. »
particulière, que le juge d’instruction saisisse conjointement plu-
sieurs services différents. S’il s’agit de plusieurs services de gen- 48. GIR. — Satisfait aux conditions de l’article 151 du code de
darmerie, il suffit souvent de monter d’un cran dans la hiérarchie procédure pénale la commission rogatoire délivrée par le juge
administrative et de saisir, par exemple, la Légion de gendarme- d’instruction au commissaire divisionnaire du service régional
rie dont dépend directement la section de recherche plutôt que de police judiciaire et du groupe d’intervention régional (GIR).
la compagnie ou le groupement de compagnie. Plus rarement, Dès lors, n’encourt pas la censure l’arrêt qui rejette l’exception
des services de police et de gendarmerie peuvent être conjoin- de nullité présentée par la personne mise en examen soutenant
tement saisis. L’article D. 5 du code de procédure pénale prévoit que le GIR constitue une structure ne pouvant qu’être considé-
que « lorsque plusieurs services de police judiciaire participent à rée comme dépourvue d’existence légale (Crim. 6 août 2003,
une même enquête, la répartition des tâches et la centralisation nos 03-82.898 ou 03-82.892 et 01-87.924, JCP 2003. IV. 2665 ;
des éléments d’enquête sont assurées par le magistrat saisi. » AJ pénal 2003. 69. – V. aussi LISSOUCK, Le statut juridique des
groupes d’intervention régionaux [GIR], entre État de droit et lo-
44. Information des OPJ. — Le juge peut communiquer aux offi- gique sécuritaire, RSC 2004. 267. – DÉSIRÉ, Des groupes d’in-
ciers de police judiciaire saisis des renseignements recueillis au tervention régionaux efficaces et légaux ?, AJ pénal 2004. 363).
cours de l’information (Crim. 10 janv. 1989, Bull. crim. no 8).
§ 2. – Actes qui ne sont pas susceptibles d’être délégués
C. – Multiplicité des services 49. Seuls les actes d’instruction peuvent être délégués, à l’ex-
clusion des actes de juridiction. — Tous les actes ordinaires d’in-
45. Aux services traditionnels de la gendarmerie nationale et de formation et de pure instruction peuvent être délégués par com-
la police nationale, se sont peu à peu ajoutés d’autres services. mission rogatoire. Seuls l’interrogatoire et la confrontation de la
personne mise en examen ne peuvent être délégués qu’à des faites dans le cabinet ou au domicile d’un avocat doivent être réa-
magistrats. Le juge ne peut déléguer ses pouvoirs de juridic- lisées par un magistrat. Il en est de même, selon l’article 56-3,
tion. C’est ainsi qu’il ne saurait déléguer le pouvoir de prendre pour les perquisitions faites dans le cabinet d’un médecin, d’un
des ordonnances ou de prendre une décision relative à la dé- notaire, d’un avoué ou d’un huissier. Selon l’article 56-2, profon-
tention provisoire, désormais de saisir le juge des libertés et de dément revu par la loi du 4 janvier 2010 relative à la protection
la détention (Paris, 19 déc. 1973, JCP 1974. II. 17638, note du secret des sources des journalistes (L. no 2010-1, JO 5 janv.),
N. S. – Crim. 8 nov. 1990, nos 90-85.741 et 90-85.742, Bull. crim. les perquisitions réalisées dans une entreprise de presse ou de
no 374). Cette situation pose de sérieuses difficultés lorsqu’un communication audiovisuelle doivent également être faites par
juge d’instruction exerçant outre-mer souhaite le placement en un magistrat. Il en est de même désormais en matière de dé-
détention d’une personne et que celle-ci refuse de monter dans fense nationale lorsque la perquisition doit avoir lieu dans un
l’avion, le commandant de bord s’opposant alors le plus souvent lieu précisément identifié, abritant des éléments couverts par le
à son transport. Bien que la délégation du pouvoir de décerner secret de la défense nationale (C. pr. pén., art. 56-4 issu de
les mandats de justice soit l’objet de discussions, nous pensons la L. no 2009-928 du 29 juill. 2009, mais dont le paragraphe III
que le mandat de comparution, le mandat d’amener et le mandat a été déclaré contraire à la Constitution par la décision rendue
de recherche peuvent être utilisés par le magistrat délégataire. no 2011-192 QPC du 10 nov. 2011).
50. Audition d’une personne mise en examen. — L’information 54. Remise volontaire. — La chambre criminelle a établi une
étant ouverte, l’officier de police judiciaire ne peut plus entendre distinction entre perquisition et remise volontaire. L’officier de
la personne poursuivie si elle a déjà été mise en examen. Dans police judiciaire ne procède pas à une perquisition lorsqu’il se
une information ouverte contre personne dénommée, est nulle fait remettre à sa simple demande le document réclamé dans le
l’audition de cette personne par le commissaire de police sur une cabinet d’un médecin (Crim. 20 sept. 1995, no 95-81.140, Bull.
commission rogatoire indiquant inexactement que l’information crim. no 276 ; Dr. pénal 1996. Chron. 4). Ne constitue pas une
est ouverte contre X (Crim. 10 avr. 1959, Bull. crim. no 205). perquisition soumise aux règles édictées par l’article 56 du code
La commission rogatoire n’est pas nulle en elle-même lorsque de procédure pénale, la recherche en vue d’une remise aux ser-
l’officier de police judiciaire a entendu comme témoin une per- vices de police, par le propriétaire d’un local ou son représentant,
sonne précédemment inculpée (Crim. 5 oct. 1999, no 99-80.257, d’objets introduits sans droit ni titre par un tiers n’y ayant pas son
Bull. crim. no 205). En revanche, la commission rogatoire est domicile (Crim. 12 févr. 2008, no 07-87.862, Bull. crim. no 35 ;
nulle lorsqu’elle prescrivait elle-même cette audition (Crim. 4 oct. AJ pénal 2008. 244, obs. Roussel).
1968, Bull. crim. no 245).
55. Apposition de scellés. — Ne peut être assimilée à une per-
51. Reconstitution d’itinéraire. — Un juge d’instruction ayant, quisition la seule apposition de scellés provisoires sur les lo-
par commission rogatoire, donné mission au commissaire de caux devant être perquisitionnés. Il s’agit de mesures provisoires
police d’une ville de reconstituer un itinéraire « après avoir ex- (Crim. 29 nov. 1995, no 95-83.951, Bull. crim. no 363).
trait le prévenu de prison sans l’interroger », s’il résulte du pro-
cès-verbal d’exécution de la commission rogatoire que le préve- § 3. – Actes qui peuvent être délégués sous certaines conditions
nu s’est exécuté et qu’en outre il a apporté, en cours de route,
certaines précisions « spontanées », doit être cassé l’arrêt de la 56. Tous les actes doivent, dans leur accomplissement, ré-
chambre d’accusation (de l’instruction) refusant d’annuler l’ins- pondre à certaines conditions de forme. Il ne sera question
truction alors que l’exécution de la commission supposait la de- dans le présent paragraphe que de ceux qui nécessitent des
mande de renseignements, appelait une réponse du prévenu, conditions de délégation particulières, relatives au contenu
quelle que soit la forme dans laquelle celle-ci devait se mani- formel de la commission rogatoire ou à des conditions légales
fester, et que cette exécution, loin d’assigner à l’inculpé un rôle s’attachant à son accomplissement.
purement passif, impliquait nécessairement sa participation ac-
tive aux opérations qu’elle ordonnait (Crim. 4 oct. 1968, Bull. A. – Actes qui peuvent être accomplis sur mention expresse du juge
crim. no 24 ; D. 1968. 689, note Baurès).
57. Il existe un certain nombre d’actes que l’officier de police
52. Expertise. — L’officier de police judiciaire chargé de l’exé- judiciaire ne peut réaliser que si le juge l’y a expressément au-
cution d’une commission rogatoire du juge d’instruction n’a pas torisé dans la commission rogatoire.
compétence pour ordonner une expertise (Crim. 2 sept. 1986,
Bull. crim. no 251 ; JCP 1987. II. 20766, note Chambon ; RSC 1o Écoutes téléphoniques
1987. 242, note Braunschweig). En l’espèce, l’officier de police
judiciaire avait requis deux experts en armurerie et balistique. Il 58. La loi du 10 juillet 1991 a réglementé les écoutes télépho-
est parfois difficile de définir ce qui entre dans le champ de l’ex- niques judiciaires (V. Écoutes téléphoniques judiciaires et Ins-
pertise de ce qui n’y entre pas (V. Expertise et Instruction prépa- truction préparatoire). Le juge d’instruction, et depuis la loi du
ratoire). Il convient d’être particulièrement vigilant sur ce point, 9 mars 2004, dans certains cas, le juge des libertés et de la dé-
d’autant que les officiers de police judiciaire ont l’habitude, sur tention, peut délivrer une commission rogatoire aux fins d’en-
la base des articles 60 et 77-1 du code de procédure pénale, de registrer des télécommunications. Une procédure particulière a
requérir des personnes qualifiées pour effectuer des examens été prévue aux articles 100 à 100-7 du code de procédure pénale
techniques et scientifiques. Le juge d’instruction ne peut donc, (V. PRADEL, Un exemple de restauration de la légalité crimi-
sous couvert d’une commission rogatoire, confier à un officier de nelle : le régime des interceptions de correspondances émises
police judiciaire une mission constituant en réalité une expertise par la voie des télécommunications, D. 1992. Chron. 49. – KAY-
(Crim. 20 déc. 1972, Bull. crim. no 395). Il ne peut pas davan- SER, La loi no 91-646 du 10 juillet 1991 et les écoutes télépho-
tage notifier les conclusions d’une expertise par l’intermédiaire niques, JCP 1992. I. 3559. – LESCLOUS et MARSAT, Écoutes
d’un officier de police judiciaire (Crim. 15 mai 1973, Bull. crim. téléphoniques-circulaires, Dr. pénal 1991. Chron. 3).
no 221).
59. Absence de motivation spéciale. — Le juge d’instruction peut
53. Perquisitions nécessitant la présence du magistrat. — Se- prescrire, lorsque les nécessités de l’instruction l’exigent, l’inter-
lon l’article 56-1 du code de procédure pénale, les perquisitions ception, l’enregistrement et la transcription des correspondances
émises par voie de télécommunications, soit en matière crimi- cabinet des juges d’instruction n’est pas connue et que les droits
nelle, soit en matière correctionnelle si la peine encourue est de la défense n’ont pas été lésés, la personne mise en examen
égale ou supérieure à deux ans d’emprisonnement. Ces opé- ayant été en mesure de contester la régularité des actes et au-
rations sont effectuées sous son autorité et son contrôle (C. pr. cun interrogatoire n’ayant fait mention des résultats, d’ailleurs
pén., art. 100). Pour rejeter la demande d’annulation d’actes de négatifs, de cette mesure (Crim. 16 mai 2001, nos 99-83.467 et
la procédure fondée sur l’irrégularité de commissions rogatoires 97-80.888, Bull. crim. no 124 ; JCP 2001. IV. 1592).
prescrivant des écoutes téléphoniques faute pour le juge d’ins-
truction d’avoir indiqué les raisons nécessitant cette mesure, la 64. Limites. — Aucune interception ne peut avoir lieu sur une
chambre d’accusation (de l’instruction) énonce que le juge d’ins- ligne dépendant du cabinet d’un avocat ou de son domicile sans
truction peut procéder à tous les actes d’information qu’il juge que le bâtonnier en soit informé par le juge d’instruction (C. pr.
utiles sans avoir à motiver spécialement sa décision. En cet état, pén., art. 100-7). Aucune interception ne peut non plus avoir lieu
la chambre d’accusation (de l’instruction) a fait l’exacte applica- sur la ligne d’un député ou d’un sénateur sans que le président
tion des articles 81, 100 et suivants du code de procédure pé- de l’assemblée à laquelle il appartient en soit informé par le juge
nale (Crim. 13 oct. 1999, nos 96-80.774, 98-80.044 et 96-83.874, d’instruction (C. pr. pén., art. 100-7). Aucune interception ne
Bull. crim. no 219 ; Dr. pénal 2000. Comm. 12 bis, note Maistre peut avoir lieu sur une ligne dépendant du cabinet d’un magistrat
du Chambon). ou de son domicile sans que le premier président ou le procureur
général où il réside en soit informé. Cette dernière précision
60. Formalités. — La décision d’interception est écrite et ne pré- est issue de la loi du 9 mars 2004 (sur toute la jurisprudence
sente aucun caractère juridictionnel. Elle doit comporter tous les concernant les droits de la défense et les écoutes téléphoniques,
éléments d’identification de la liaison à intercepter, la mention V. Instruction préparatoire).
de l’infraction qui motive le recours à l’interception, ainsi que la
durée de celle-ci (C. pr. pén., art. 100-1). Elle est prise pour 65. Informations auprès des opérateurs. — La juridiction com-
une durée maximale de quatre mois. Elle ne peut être renouve- pétente pour ordonner des interceptions peut recueillir auprès
lée que dans les mêmes conditions de forme et de durée (C. pr. de personnes physiques ou morales exploitant des réseaux de
pén., art. 100-2). Une cour d’appel décide à tort que la commis- télécommunications ou fournisseurs de services de télécommu-
sion rogatoire ne comporte pas de limite dans le temps lorsque nications des informations ou des documents qui lui sont néces-
le juge a imparti un délai prédéterminé, puis a mis fin par antici- saires pour la réalisation et l’exploitation des interceptions autori-
pation aux écoutes, qui avaient cessé d’être utiles (Crim. 16 déc. sées par la loi (L. no 91-646 du 10 juill. 1991, art. 22 [JO 13 juill.]).
1991, no 91-85.906, Bull. crim. no 478). Le juge ou l’officier de Dès lors que les réquisitions régulièrement adressées par le ma-
police judiciaire commis par lui peut requérir tout agent qualifié gistrat instructeur aux opérateurs de téléphonie français en vue
d’un service ou d’un organisme placé sous l’autorité ou la tutelle d’intercepter, sans distinction, toutes les conversations menées
du ministre chargé des Télécommunications, ou tout agent qua- sur des téléphones portables transitant par leurs réseaux ne né-
lifié d’un exploitant de réseau ou fournisseur de services de télé- cessitaient aucune assistance technique d’un autre État membre
communications autorisé, en vue de procéder à l’installation d’un de l’Union européenne, ni que fût respectée la procédure de no-
dispositif d’interception (C. pr. pén., art. 100-3). Il doit dresser tification, la demande de nullité des interceptions de communica-
procès-verbal de chacune des opérations d’interception et d’en- tions émises à partir de téléphones mobiles étrangers ou situés à
registrement, en mentionnant la date et l’heure auxquelles l’opé- l’étranger est rejetée (Crim. 7 juin 2011, no 11-81.702, Bull. crim.
ration a commencé et celles auxquelles elle s’est terminée. Les no 121 ; JCP 2011. 818).
enregistrements sont placés sous scellés fermés (C. pr. pén.,
art. 100-4). 66. Faits nouveaux. — Dans le cas où les écoutes téléphoniques
révéleraient des faits dont le juge d’instruction n’est pas saisi, il
61. Transcription. — Seules les correspondances utiles à la ma- est possible pour les enquêteurs d’établir un procès-verbal de
nifestation de la vérité peuvent être transcrites. Il en est dressé renseignements judiciaires en faisant état. Le magistrat saisi de
procès-verbal et la transcription est versée au dossier. Les cor- l’affaire pourra alors faire retranscrire les conversations intéres-
respondances en langue étrangère sont transcrites en français sant les faits nouveaux (Crim. 14 janv. 1992, no 91-85.864, Bull.
avec l’assistance d’un interprète requis à cette fin (C. pr. pén., crim. no 13). La Cour ajoute que les enquêteurs peuvent, et
art. 100-5). La loi du 12 décembre 2005 (L. no 2005-1549, JO même doivent, prévenir le juge d’instruction de l’existence d’une
13 déc.) a ajouté un alinéa à l’article 100-5 selon lequel « à peine autre incrimination pénale. Au cours d’une information ouverte
de nullité, ne peuvent être transcrites les correspondances avec au vu de copies d’écoutes téléphoniques intervenues dans une
un avocat relevant de l’exercice des droits de la défense ». La loi procédure distincte, la défense peut exiger la production des
du 4 janvier 2010 (préc. supra, no 53) en a ajouté un nouveau aux originaux pour exercer son contrôle (Versailles, 9 avr. 1993,
termes duquel, « à peine de nullité, ne peuvent être transcrites Gaz. Pal. 1994. 1. Somm. 87).
les correspondances avec un journaliste permettant d’identifier
une source en violation de l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881 67. Surveillance téléphonique. — La surveillance téléphonique
sur la liberté de la presse. » est possible sans intervention du juge : la poursuite n’est pas
viciée par l’utilisation pendant une enquête préliminaire d’un
62. Destruction. — Les enregistrements sont détruits à la dili- appareil ayant pour but et pour résultat « non d’intercepter des
gence du procureur de la République ou du procureur général à communications téléphoniques, mais de déterminer l’origine
l’expiration du délai de prescription de l’action publique, ce dont des appels et d’en identifier l’auteur » (Crim. 4 janv. 1974, Bull.
il est dressé procès-verbal (C. pr. pén., art. 100-6). crim. no 2). Ne constitue pas une interception de correspon-
dance émise par la voie des télécommunications, au sens des
63. Absence d’obligation de verser au dossier une commission articles 8 de la Convention européenne des droits de l’homme
rogatoire en cours d’exécution. — Il n’y a pas d’irrégularité à ce ou 100 du code de procédure pénale, le simple compte rendu de
que des procès-verbaux constatant des écoutes téléphoniques propos entendus par des policiers, au cours d’une conversation
n’aient été joints à la procédure que plusieurs mois après la date téléphonique qui s’est déroulée en leur présence, sans artifice
de la commission rogatoire ordonnée par le juge. Il n’en résulte ni stratagème. L’utilisation, lors de l’enquête, d’un procédé
aucune irrégularité, dès lors que la loi n’exige pas que, pendant technique ayant pour seul objet l’identification de l’auteur d’ap-
l’exécution d’une commission rogatoire, une copie de cette pièce pels téléphoniques n’est pas irrégulière (Crim. 2 avr. 1997,
figure au dossier, que la date d’arrivée des procès-verbaux au nos 97-80.269 et 97-80.270, Bull. crim. no 131 ; D. 1997. IR 163 ;
Gaz. Pal. 13 août 1997, p. 16). L’identification de numéros arrêt, V. aussi ACCOMANDO et GUÉRY, La sonorisation : un
de téléphone auprès d’un opérateur n’est pas une mesure de mode légal de preuve ?, D. 2002. Chron. 2001). Mais ce n’était
constatation ou d’examen technique ou scientifique au sens des pas le principe même de sonorisation qui était mis en cause
articles 60 et 77-1 du code de procédure pénale (Crim. 18 juin puisque, « par application des articles 81, 151 et 152 du code de
2002, JCP 2002. IV. 2413). Ne constituent pas une interception procédure pénale, le juge d’instruction peut prescrire par com-
de correspondance émise par la voie des télécommunications mission rogatoire, en vue de la constatation des infractions, la
au sens de l’article 100 du code de procédure pénale, les captation, la transmission et l’enregistrement de conversations
simples lecture et transcription par les policiers des messages privées, autres que des communications téléphoniques, pourvu
parvenus sur la bande d’un récepteur de messagerie unilatérale que ces mesures aient lieu sous son contrôle et dans des condi-
(Crim. 14 avr. 1999, no 98-87.224, Bull. crim. no 82), ni le fait de tions ne portant pas atteinte aux droits de la défense » (Crim.
se connecter à un réseau télématique au moyen d’un terminal 23 nov. 1999, no 99-82.658, Bull. crim. no 269 ; D. 2000. IR 38).
mis à la disposition du public par l’opérateur, sans modifica- La loi du 9 mars 2004 a rendu la sonorisation possible dans le
tion préalable de l’installation, aux fins de lire les annonces cas d’infraction prévue à l’article 706-73 (criminalité organisée)
offertes par tel ou tel service en utilisant un pseudonyme pour du code de procédure pénale (C. pr. pén., art. 706-96 s.). Le juge
se connecter à un service de messagerie (Crim. 25 oct. 2000, d’instruction peut, après avis du procureur de la République, au-
BICC 2000, no 48). toriser par ordonnance motivée les officiers et agents de police
judiciaire commis sur commission rogatoire à mettre en place un
68. Écoutes téléphoniques ordonnées par le juge des libertés et dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des
de la détention. — La loi du 9 mars 2004 (préc. supra, no 6) pré- intéressés, la captation, la fixation, la transmission et l’enregis-
voit que si les nécessités de l’enquête de flagrance ou de l’en- trement de paroles prononcées par une ou plusieurs personnes
quête préliminaire relative à l’une des infractions entrant dans à titre privé ou confidentiel, dans des lieux ou véhicules privés ou
le champ d’application de l’article 706-73 (criminalité organisée) publics, ou de l’image d’une ou plusieurs personnes se trouvant
l’exigent, le juge des libertés et de la détention du tribunal de dans un lieu privé. Ces opérations sont effectuées sous l’auto-
grande instance peut, à la requête du procureur de la Répu- rité et le contrôle du juge d’instruction (C. pr. pén., art. 706-96).
blique, autoriser l’interception, l’enregistrement et la transcription Les articles 706-97 à 706-103 fixent les conditions pratiques et
de correspondances émises par la voie des télécommunications les limites de ces opérations sur le modèle des dispositions des
selon les modalités prévues par les articles 100, 2e alinéa, 100-1 articles 100-1 à 100-7 sur les écoutes téléphoniques. Ces opéra-
et 100-3 à 100-7, pour une durée maximum d’un mois (depuis la tions ne peuvent avoir d’autre fin que la mise en place du disposi-
loi du 14 mars 2011, le délai précédent étant de quinze jours), tif technique (C. pr. pén., art. 706-96). S’il s’agit d’un lieu d’habi-
renouvelable une fois dans les mêmes conditions de forme et de tation et que l’opération doit intervenir hors des heures prévues à
durée. Ces opérations sont faites sous le contrôle du juge des li- l’article 59, cette autorisation est délivrée par le juge des libertés
bertés et de la détention (C. pr. pén., art. 706-95). Par ailleurs, si et de la détention saisi à cette fin par le juge d’instruction. Les do-
cela est nécessaire pour rechercher la personne en fuite après miciles, cabinets et véhicules des avocats, magistrats, notaires,
sa condamnation, le juge des libertés et de la détention du tri- huissiers, parlementaires, médecins et entreprises de presse,
bunal de grande instance peut, à la requête du procureur de la selon les distinctions des articles 56-1, 56-2 et 56-3, et 100-7,
République, autoriser l’interception, l’enregistrement et la trans- ne peuvent être concernés par la mise en place de ces dispo-
cription de correspondances émises par la voie des télécommu- sitifs techniques. La Cour européenne des droits de l’homme
nications selon les modalités prévues par les articles 100, 100-1 a condamné la France dans un arrêt du 31 mai 2005 (CEDH,
et 100-3 à 100-7, pour une durée maximale de deux mois re- 2e sect., 31 mai 2005, Vetter c/ France, req. no 59842/00, BICC
nouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée, 2005, no 1383 ; D. 2005. 2575, note Hennion-Jacquet) en esti-
dans la limite de six mois en matière correctionnelle (C. pr. pén., mant que, dans le domaine de la pose de micros, le droit fran-
art. 74-2). Le code de procédure pénale ne prévoit pas l’obliga- çais (soit les art. 81, 100 à 100-7 insérés par la L. du 10 juill.
tion de motivation des décisions d’autorisation des interceptions 1991, 151 et 152 c. pr. pén.) n’indique pas avec assez de clarté
de correspondances téléphoniques rendues par le juge des li- l’étendue et les modalités d’exercice du pouvoir d’appréciation
bertés et de la détention, mesures autorisées par un juge qui des autorités : « Dès lors le requérant, qui se plaignait de la so-
doit être tenu informé de leur exécution et répondant à des exi- norisation de l’appartement d’un tiers où il devait se rendre et
gences précises, dont la personne concernée peut faire sanc- de l’enregistrement des propos qu’il y a tenus, n’a pas joui du
tionner le défaut de respect par une requête en nullité (Crim. degré minimal de protection voulu par la prééminence du droit
27 sept. 2011, no 11-81.458, Bull. crim. no 186 ; JCP 2011. dans une société démocratique et il y a eu violation de l’article 8
1246 ; D. 2011. 2544). de la Convention. » La loi du 9 mars 2004 semble avoir posé des
garanties suffisantes, mais seulement dans le domaine de la cri-
minalité organisée.
2o Sonorisation
69. Sonorisation sous le contrôle du juge. — Avant l’entrée en 70. Jurisprudence. — Justifie sa décision, au regard de l’article 8
vigueur de la loi du 9 mars 2004 (préc. supra, no 6), les pos- de la Convention européenne des droits de l’homme, la chambre
sibilités de sonorisation étaient limitées. En effet, la chambre de l’instruction qui, après avoir contrôlé que l’interception des
criminelle de la Cour de cassation avait estimé qu’« aux termes conversations échangées au parloir de la maison d’arrêt entre
des articles 56, 94 et 152 du code de procédure pénale, les per- une personne mise en examen et ses visiteurs a répondu aux
quisitions ordonnées par le juge d’instruction ne peuvent avoir conditions et formes prévues par les articles 706-96 à 706-102
d’autres fins que la recherche d’objets utiles à la manifestation du code de procédure pénale, relève que les opérations, or-
de la vérité. Dès lors, est irrégulière la commission rogatoire par données par un juge d’instruction, pour une durée limitée, ont
laquelle le magistrat instructeur prescrit à l’officier de police ju- été placées en permanence sous son autorité et son contrôle
diciaire l’enregistrement de conversations dans un domicile pri- et qu’elles étaient nécessaires à la recherche de la manifesta-
vé, de telles opérations n’étant autorisées ni par l’article 81 du tion de la vérité, relativement à des infractions portant grave-
code de procédure pénale, ni par les articles 100 et suivants ment atteinte à l’ordre public, les personnes concernées ayant
dudit code » (Crim. 15 févr. 2000, no 99-86.623, Bull. crim. été, en outre, en mesure d’en contrôler efficacement l’exécu-
no 68 ; Dr. pénal 2000. Comm. 82 ; D. 2000. IR 143. – Sur cet tion (Crim. 1er mars 2006, no 05-87.251, Bull. crim. no 59 ; D.
2006. IR 1249 et p. 1505, note Pradel ; AJ pénal 2006. 222, de la mesure ; doivent également être précisées les conditions
obs. Céré ; AJ pénal 2006. 304, note Remilleux). La capta- d’établissement des procès-verbaux de synthèse consignant les
tion, la fixation, l’enregistrement ou la transmission par les po- conversations “écoutées”, les précautions à prendre pour com-
liciers de l’image d’une personne se trouvant dans un lieu pri- muniquer intacts et complets les enregistrements réalisés, aux
vé, qui ne sont autorisés que dans les cas et conditions prévus fins de contrôle éventuel par le juge et par la défense, ainsi
par l’article 706-96 du code de procédure pénale, ne peuvent que les circonstances dans lesquelles peut ou doit s’opérer l’ef-
être opérés au cours d’une enquête préliminaire (Crim. 21 mars facement ou la destruction desdites bandes, notamment après
2007, no 06-89.444, Bull. crim. no 89 ; D. 2007. AJ 1204 ; AJ non-lieu ou relaxe. » La Cour considère en conséquence que
pénal 2007. 286, note Royer ; Procédures 2007, no 201, note « le droit français n’indique pas avec assez de clarté la possibi-
Buisson. – V. aussi CARON et MÉNOTTI, Les conditions de la lité d’ingérence par les autorités dans la vie privée des détenus,
légalité de la photographie par les policiers de personnes ou de ainsi que l’étendue et les modalités d’exercice de leur pouvoir
véhicules dans un lieu privé, D. 2007. 1817). Une telle autori- d’appréciation dans ce domaine ». Depuis l’entrée en vigueur
sation ne peut être délivrée que par le juge d’instruction, dans le de la loi du 9 mars 2004, la chambre criminelle estime que les
cadre d’une information concernant une infraction entrant dans écoutes de parloir ne sont plus possibles dans le cadre de la
le champ d’application de l’article 706-73 du code de procédure procédure de droit commun : « Attendu qu’en prononçant ainsi,
pénale (Crim. 27 mai 2009, no 09-82.115, D. 2009. 1697, note dès lors que les opérations de sonorisation précitées doivent né-
Girault). La mise en place d’une sonorisation suppose que, cu- cessairement répondre aux conditions de fond et de forme énon-
mulativement, soient prise une ordonnance motivée et délivrée cées à l’article 706-96 du code précité, la chambre de l’instruction
une commission rogatoire spéciale, conformément aux dispo- a justifié sa décision » (Crim. 9 juill. 2008, no 08-82.091, Bull.
sitions de l’article 706-96 du code de procédure pénale (Crim. crim. no 170 ; JCP 2008. IV. 2526 ; AJ pénal 2008. 424, note
13 févr. 2008, no 07-87.458, Bull. crim. no 40 ; D. 2008. AJ 787 ; Lasserre Capdeville). Le décret du 3 mai 2007 (no 2007-699,
RSC 2008. 364, obs. Finielz ; AJ pénal 2008. 193, obs. Lavric ; JO 5 mai) a prévu que les communications enregistrées par le
RSC 2008. 661, obs. Buisson. – Sur la décision motivée, V. aus- personnel de surveillance de la maison d’arrêt sur le fondement
si Crim. 27 févr. 2008, no 07-88.275, Bull. crim. no 53 ; D. 2008. de l’article 727-1 du code de procédure pénale, issu lui-même
AJ 991 ; AJ pénal 2008. 284, obs. Leblois-Harpe ; RSC 2008. de l’une des lois du 5 mars 2007 (no 2007-297), devaient être
659, obs. Buisson). La prolongation de cette autorisation doit communiquées au magistrat instructeur. L’article 706-1-3, issu
intervenir avant l’expiration de la mesure précédente même si le de la loi no 2007-1598 du 13 novembre 2007 relative à la lutte
système mis en place est resté, désactivé, dans les lieux concer- contre la corruption (JO 14 nov.), prévoit également la possibili-
nés (Crim. 13 nov. 2008, no 08-85.456, Bull. crim. no 230 ; Dr. té de l’installation d’un dispositif pour les infractions prévues par
pénal 2009, no 43, note Maron et Haas). Le point de départ des les articles 432-11, 433-1, 433-2, 434-9, 434-9-1, 435-1 à 435-4
mesures de sonorisation doit être fixé au jour de leur mise en et 435-7 à 435-10 du code pénal. L’article 313-2, dernier alinéa
place effective (Crim. 13 nov. 2008, no 08-85.456, Bull. crim. (escroquerie en bande organisée), a été retiré de la liste depuis
no 230 ; Dr. pénal 2009, no 43, note Maron et Haas). Les par- la loi du 17 mai 2011 (L. no 2011-525, JO 18 mai) car il a rejoint
ties communes d’une copropriété constituent un lieu privé, les celle de l’article 706-73, déjà concerné par ce dispositif.
opérations de captation et de fixation d’images ne peuvent se
dérouler hors du cadre de l’article 706-96 (Crim. 27 mai 2009, 3o Audition de témoin sous X
no 09-82.115, Bull. crim. no 108 ; D. 2009. 1697, obs. Girault
et p. 2238, obs. Pradel ; Procédures 2009, no 284, note Buis- 72. Domiciliation des témoins. — (V. Témoin). La loi no 95-73
son ; Dr. pénal 2009, no 114, note Maron et Haas ; Dr. pénal du 21 janvier 1995 (D. 1995. 90) a créé l’article 62-1 du code
2010. Chron. 1, obs. Guérin ; AJ pénal 2009. 367, obs Ascenci ; de procédure pénale afin de mettre les témoins à l’abri de tout
RSC 2009. 595, obs Mayaud ; RSC 2009. 866 obs Finielz ; AJ- risque de chantage ou de menace. Elle autorisait les personnes
DI 2010. 228, obs. Roujou de Boubée). Le parking souterrain entendues comme témoins, sur autorisation du procureur de la
d’un immeuble d’habitation constitue un lieu privé et non un lieu République, à déclarer comme domicile l’adresse du commis-
d’habitation, au sens de l’article 706-96 du code de procédure sariat ou de la brigade de gendarmerie. Ces dispositions ont
pénale (Crim. 22 nov. 2011, no 11-84.308, Bull. crim. no 234 ; été remplacées par la loi no 2001-1062 du 15 novembre 2001
D. 2011. Somm. 2937 ; D. 2011. 2937 ; Dr. pénal 2012. Comm. (JO 16 nov.), modifiée par la loi no 2002-307 du 4 mars 2002
12, note Maron et Haas). (JO 5 mars). L’article 706-57 du code de procédure pénale est
ainsi rédigé : « Les personnes à l’encontre desquelles il n’existe
71. Écoutes de parloir. — La chambre criminelle a décidé que aucune raison plausible de soupçonner qu’elles ont commis ou
le juge d’instruction peut prescrire, par commission rogatoire, tenté de commettre une infraction et qui sont susceptibles d’ap-
l’écoute et l’enregistrement des conversations tenues par la per- porter des éléments de preuve intéressant la procédure peuvent,
sonne mise en examen au parloir de la maison d’arrêt, pourvu sur autorisation du procureur de la République ou du juge d’ins-
que ces mesures aient lieu sous son contrôle et dans des condi- truction, déclarer comme domicile l’adresse du commissariat ou
tions ne portant pas atteinte aux droits de la défense. L’intercep- de la brigade de gendarmerie. L’adresse de ces personnes est
tion des conversations ainsi tenues, qui sont soumises de droit alors inscrite sur un registre coté et paraphé qui est ouvert à cet
à la surveillance du personnel pénitentiaire, ne constitue pas, au effet. »
sens de l’article 8 de la Convention européenne des droits de
l’homme, une ingérence dans l’exercice du droit au respect de la 73. Témoin anonyme. — Traditionnellement, le témoignage ano-
vie privée, du domicile et de la correspondance (Crim. 12 déc. nyme, qu’il faut différencier du problème du renseignement ano-
2000, BICC 2000, no 226). L’arrêt de la Cour européenne des nyme (V. infra, no 74), est prohibé : l’indication des nom, prénom,
droits de l’Homme Wisse contre France du 20 décembre 2005 âge, état, profession et demeure du témoin est une formalité sub-
(CEDH 20 déc. 2005, Wisse c/ France, req. no 71611/01, AJ pé- stantielle et l’absence de ses éléments peut entraîner la nullité
nal 2006. 128, note Céré) donne une idée des exigences néces- de la déposition en cas d’atteinte aux droits de la défense (Crim.
saires au sens de la Convention : « Parmi les “sauvegardes adé- 2 oct. 1990, no 90-84.412, Bull. crim. no 327). Mais la loi du
quates” contre les abus à redouter figurent les catégories de per- 15 novembre 2001 (préc.) a prévu dans l’article 706-58 la possi-
sonnes susceptibles de faire l’objet d’une telle mesure et la na- bilité de témoignage sous X dans certains cas et selon une pro-
ture des infractions pouvant y donner lieu doivent être définies ; cédure relativement complexe (V. Témoin et Instruction prépara-
le juge doit être astreint à fixer une limite à la durée de l’exécution toire. – LE CALVEZ, Les dangers du « X » en procédure pénale :
opinion contre le témoin anonyme, D. 2002. Chron. 3024. – pénale, en matière de trafic de stupéfiants. Cet article a été abro-
CHAMBON et GUÉRY, Droit et pratique de l’instruction prépara- gé par la loi du 9 mars 2004 (préc. supra, no 6). Depuis cette loi,
toire. Juge d’instruction. Chambre de l’instruction, 8e éd., 2012, applicable sur ce point le 1er octobre 2004, l’article 706-81 du
Dalloz action, no 71.24). code de procédure pénale dispose que lorsque les nécessités
de l’enquête ou de l’instruction concernant l’un des crimes ou
74. Renseignement anonyme. — Le procès-verbal rapportant délits entrant dans le champ d’application de l’article 706-73 (cri-
des renseignements anonymes n’est pas assujetti aux prescrip- minalité organisée. – V. C. pr. pén., art. 706-73, issu de l’ord. du
tions des articles 101 et suivants du code de procédure pénale. 12 mars 2012. – V. infra, no 229) le justifient, le procureur de la
De tels procès-verbaux ne s’analysent pas en dépositions de té- République ou, après avis de ce magistrat, le juge d’instruction
moins et ne doivent pas être annulés dès lors qu’ils sont sou- saisi peuvent autoriser qu’il soit procédé, sous leur contrôle res-
mis à la discussion contradictoire des parties (Crim. 9 juin 1998, pectif, à une opération d’infiltration dans les conditions prévues
no 98-80.418, Bull. crim. no 187). Un procès-verbal dressé par par la loi.
un policier qui rapporte des informations obtenues auprès d’une
personne désirant conserver l’anonymat constitue non un pro- 78. Définition. — L’infiltration consiste, pour un officier ou un
cès-verbal d’audition de témoin, mais un procès-verbal de ren- agent de police judiciaire spécialement habilité dans des condi-
seignements destiné à guider d’éventuelles investigations de la tions fixées par décret et agissant sous la responsabilité d’un
police judiciaire, sans pouvoir être retenu lui-même comme un officier de police judiciaire chargé de coordonner l’opération, à
moyen de preuve. Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu d’appliquer, pour surveiller des personnes suspectées de commettre un crime ou
l’établissement d’un tel procès-verbal, les dispositions du livre IV un délit en se faisant passer, auprès de ces personnes, comme
du code de procédure pénale relatives à la protection des té- un de leurs coauteurs, complices ou receleurs. L’officier ou
moins (Crim. 9 juill. 2003, no 03-82.119, D. 2003. IR 2285 ; l’agent de police judiciaire est à cette fin autorisé à faire usage
JCP 2003. IV. 2667 ; AJ pénal 2003. 73. – Crim. 9 nov. 2011, d’une identité d’emprunt et à commettre si nécessaire les actes
nos 09-86.381 et 09-87.745, Dr. pénal 2012. Comm 13). mentionnés à l’article 706-82. À peine de nullité, ces actes ne
peuvent constituer une incitation à commettre des infractions.
4o Actes accomplis à l’étranger
79. Autorisation exceptionnelle. — À peine de nullité, l’autorisa-
75. Auditions effectuées à l’étranger. — Depuis la modifica- tion donnée est délivrée par écrit et doit être spécialement moti-
tion de l’article 18 du code de procédure pénale par la loi du vée. Elle mentionne la ou les infractions qui justifient le recours à
9 mars 2004 (préc. supra, no 6), il est possible aux officiers de po- cette procédure et l’identité de l’officier de police judiciaire sous
lice judiciaire, avec l’accord des autorités compétentes de l’État la responsabilité duquel se déroule l’opération. Cette autorisa-
concerné, et « sur commission rogatoire expresse du juge d’ins- tion fixe la durée de l’opération d’infiltration, qui ne peut pas ex-
truction ou sur réquisitions du procureur de la République », de céder quatre mois. L’opération peut être renouvelée dans les
procéder à des auditions sur le territoire d’un État étranger. Cette mêmes conditions de forme et de durée. Le magistrat qui a au-
possibilité n’est toutefois pas ouverte pour accomplir n’importe torisé l’opération peut, à tout moment, ordonner son interruption
quel acte mais seulement des « auditions ». On doit en conclure avant l’expiration de la durée fixée. L’autorisation est versée au
que le placement en garde à vue n’est pas possible, la personne dossier de la procédure après achèvement de l’opération d’in-
placée en garde à vue ne pouvant être considérée comme un té- filtration. Des conditions particulières règlent l’anonymat de la
moin. Il s’agissait d’un cas pour lequel le magistrat déléguait des personne infiltrée et son irresponsabilité pénale.
pouvoirs qu’il ne possédait pas lui-même. La loi du 9 mars 2004
n’avait pas ouvert la possibilité de procéder à des auditions sur 6o Actes dérogatoires au droit commun réalisés
un territoire étranger à un magistrat, même avec l’accord du pays dans le cadre d’infractions particulières : perquisitions
concerné. C’est chose faite depuis la loi du 13 décembre 2011.
Le juge d’instruction peut aussi, si les nécessités de l’instruction 80. Stupéfiants. — L’article 706-28 du code de procédure pé-
l’exigent, dans le cadre d’une commission rogatoire adressée nale prévoyait que le juge d’instruction pouvait autoriser des per-
à un État étranger et avec l’accord des autorités compétentes quisitions de nuit à l’intérieur des locaux où l’on use en société
de l’État concerné, se transporter avec son greffier sur le terri- de stupéfiants ou dans lesquels sont fabriqués, transformés ou
toire de cet État aux fins de procéder à des auditions. Le juge entreposés illicitement des stupéfiants. Si la perquisition devait
doit donner préalablement avis au procureur de la République avoir lieu dans une maison d’habitation ou un appartement, le
de son tribunal (C. pr. pén, art. 93-1). Le procureur de la Répu- juge devait préciser l’adresse des lieux, et dans ce cas, pouvait
blique peut également le faire (C. pr. pén, art. 41). se déplacer sur les lieux pour veiller au respect des dispositions
légales. Cet article 706-28 a été modifié par la loi du 9 mars
76. Observation. Arrestation. — Aucune disposition légale ou 2004, qui a par ailleurs créé un cadre commun aux infractions de
conventionnelle ne subordonne l’exercice du droit d’observation criminalité organisée (V. infra, no 83). Désormais, la perquisition
sur le territoire d’une autre partie contractante à la Convention n’est possible dans les conditions prévues par l’article 706-28
dite de « Schengen » à une autorisation du juge mandant (Crim. que lorsqu’il ne s’agit pas de locaux d’habitation.
14 juin 2000, no 00-81.386, Bull. crim. no 224). En revanche,
l’interpellation et l’arrestation d’une personne en territoire hel- 81. Terrorisme. — L’article 706-24-1 du code de procédure pé-
vétique par des officiers de police judiciaire français malgré nale prévoyait la possibilité pour le juge d’instruction de per-
la bonne foi de ces derniers qui n’auraient pas vu les bornes mettre, par ordonnance motivée, des perquisitions de nuit en ma-
frontalières sont nulles (Crim. 21 sept. 1999, nos 99-83.692 et tière de terrorisme. Cet article a été abrogé par la loi du 9 mars
99-83.229, Bull. crim. no 189 ; D. 1999. IR 273 ; Procédures 2004. Le terrorisme fait désormais partie de la liste des infrac-
2000. 23, obs. Buisson ; RSC 2000. 221, obs. Guidicelli et tions de criminalité organisée énoncée à l’article 706-73 (V. infra,
p. 417, obs. Commaret). no 83).
5o Actes dérogatoires au droit commun réalisés 82. Proxénétisme. — L’article 706-35 énumère les lieux où
dans le cadre d’infractions particulières : l’infiltration peuvent être réalisées, en cette matière, des perquisitions en
dehors des heures légales : tout hôtel, maison meublée, pen-
77. Criminalité organisée. — Certaines possibilités d’infiltration sion, débit de boisson, club, cercle, dancing, lieu de spectacle
étaient déjà prévues par l’article 706-32 du code de procédure ou leurs annexes et en tout autre lieu ouvert au public ou utilisé
par le public lorsqu’il est constaté que des personnes se livrant champ d’application de l’article 706-73, la personne au domicile
à la prostitution y sont reçues habituellement. Cet article ne de laquelle est faite une perquisition est en garde à vue ou déte-
prévoit pas l’autorisation préalable du juge. Il n’a pas été modifié nue en un autre lieu et que son transport sur place paraît devoir
par la loi du 9 mars 2004. être évité en raison des risques graves soit de troubles à l’ordre
public ou d’évasion, soit de disparition des preuves pendant le
83. Criminalité organisée (L. du 9 mars 2004). — L’article 706-91 temps nécessaire au transport, la perquisition peut être faite,
du code de procédure pénale dispose que si les nécessités de avec l’accord préalable du juge d’instruction, en présence de
l’instruction relative à l’une des infractions entrant dans le champ deux témoins requis dans les conditions prévues au deuxième
d’application de l’article 706-73 l’exigent, le juge d’instruction alinéa de l’article 57, ou d’un représentant désigné par celui dont
peut, selon les modalités prévues par l’article 706-92, autoriser le domicile est en cause. Il en est de même en cas de flagrance
les officiers de police judiciaire agissant sur commission roga- et en cas d’enquête préliminaire lorsque la perquisition est faite
toire à procéder à des perquisitions, visites domiciliaires et sai- sans l’assentiment de la personne dans les conditions prévues
sies de pièces à conviction en dehors des heures prévues à l’ar- aux articles 76 et 706-90. L’accord est alors donné par le juge
ticle 59, lorsque ces opérations ne concernent pas des locaux des libertés et de la détention (C. pr. pén., art. 706-94).
d’habitation.
B. – Actes qui nécessitent des conditions légales préalables
84. En cas d’urgence, le juge d’instruction peut également auto-
riser les officiers de police judiciaire à procéder à ces opérations 89. Partie civile et témoin assisté. — Les officiers de police ju-
dans les locaux d’habitation : … 1o Lorsqu’il s’agit d’un crime ou diciaire ne peuvent procéder à l’audition des parties civiles et du
d’un délit flagrant ; … 2o Lorsqu’il existe un risque immédiat de témoin assisté qu’à la demande de ceux-ci (C. pr. pén., art. 152,
disparition des preuves ou des indices matériels ; … 3o Lorsqu’il al. 2). Il faut entendre par « témoin assisté » la personne qui a
existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’une déjà été entendue comme telle ou qui bénéficie de ce statut de
ou plusieurs personnes se trouvant dans les locaux où la perqui- par la loi (comme celle qui est visée au réquisitoire introductif. –
sition doit avoir lieu sont en train de commettre des crimes ou des Sur la distinction entre témoin assisté et personne qui peut se
délits entrant dans le champ d’application de l’article 706-73. voir octroyer ce statut, V. Témoin assisté, et GUÉRY, La mise en
examen par le juge d’instruction depuis l’entrée en vigueur de la
85. À propos du « risque immédiat de disparition des preuves ou loi du 15 juin 2000, JCP 2001. I. 359. – CHAMBON et GUÉRY,
d’indices matériels », le Conseil constitutionnel a, dans sa déci- op. cit., no 81.11 s.). Le juge d’instruction peut parfaitement déli-
sion du 2 mars 2004, estimé que cette notion devait « s’entendre vrer une commission rogatoire dans laquelle il sollicite l’audition
comme ne permettant au juge d’instruction d’autoriser une per- d’un témoin assisté ou d’une partie civile dès lors que les termes
quisition de nuit que si celle-ci ne peut être réalisée dans d’autres de l’article 152 leur auront été lus, ce qui figurera au procès-ver-
circonstances de temps ». bal de leur audition. Le texte parle de « demande » de ceux-ci,
terme que la pratique a très rapidement transformé en simple
86. Conditions de forme. — Selon l’article 706-92, à peine de « accord », mais depuis longtemps en ce qui concerne la partie
nullité, les autorisations prévues par les articles 706-89 à 706-91 civile, sans que la chambre criminelle ait jamais trouvé à y redire.
sont données pour des perquisitions déterminées et font l’objet
d’une ordonnance écrite, précisant la qualification de l’infraction 90. Personne visée par une plainte avec constitution de par-
dont la preuve est recherchée ainsi que l’adresse des lieux dans tie civile. — Dans un arrêt du 6 août 2008 (Crim. 6 août 2008,
lesquels les visites, perquisitions et saisies peuvent être faites ; no 08-82.924, Bull. crim. no 171 ; D. 2008. 2836, note Guéry ;
cette ordonnance, qui n’est pas susceptible d’appel, est motivée JCP 2008. IV. 2638 ; AJ pénal 2008. 471, obs. Ascenci), la
par référence aux éléments de fait et de droit justifiant que ces chambre criminelle estime qu’il résulte des articles 113-2 et 152
opérations sont nécessaires. Les opérations sont faites sous le du code de procédure pénale que, « si toute personne, qui est
contrôle du magistrat qui les a autorisées, et qui peut se déplacer nommément visée par une plainte avec constitution de partie ci-
sur les lieux pour veiller au respect des dispositions légales. vile et qui n’a pas acquis la qualité de témoin assisté, peut être
entendue par un officier de police judiciaire agissant sur com-
87. Dans les cas prévus par les 1o, 2o et 3o de l’article 706-91, mission rogatoire, c’est à la condition qu’elle y ait consenti après
l’ordonnance comporte également l’énoncé des considérations avoir été avisée de son droit d’être entendue comme témoin as-
de droit et de fait qui constituent le fondement de cette déci- sisté par le juge d’instruction. » La chambre criminelle ajoute ma-
sion par référence aux seules conditions prévues par ces ali- nifestement au texte puisque celui-ci ne concerne que la per-
néas. Les opérations prévues aux articles 706-89 à 706-91 ne sonne qui comparait devant le juge d’instruction. Les officiers de
peuvent, à peine de nullité, avoir un autre objet que la recherche police judiciaire doivent donc désormais notifier leurs droits aux
et la constatation des infractions visées dans la décision du juge personnes nommément visées dans une plainte avec constitu-
des libertés et de la détention ou du juge d’instruction. Le fait tion de partie civile, ce qui interdit tout placement en garde à vue
que ces opérations révèlent des infractions autres que celles vi- dans ce type d’affaire.
sées dans la décision du juge des libertés et de la détention ou
du juge d’instruction ne constitue pas une cause de nullité des 91. Représentant légal. — La personne qui s’est constituée par-
procédures incidentes (C. pr. pén., art. 706-93). tie civile pour autrui en cours de l’information, en tant que repré-
sentant légal d’un incapable, peut être entendue en dehors de
88. Perquisition au domicile d’un gardé à vue ou d’un détenu. — toute demande de sa part sur les faits dont elle a été personnel-
La loi du 9 mars 2004 a également prévu que, lorsque, au cours lement témoin (Crim. 22 avr. 1992, nos 91-85.467 et 92-80.881,
d’une instruction relative à l’une des infractions entrant dans le Bull. crim. no 172).
CHAPITRE 2
Conditions de forme des commissions rogatoires
92. Reflet du dossier. — Il est de principe que la commission imprécision n’apparaisse quant à la qualité du mandant, les per-
rogatoire doit exprimer le reflet du dossier dont elle est une des sonnes en cause, les actes délégués, la durée impartie pour
pièces en exposant les éléments nécessaires à ce qu’aucune l’exécution.
93. Date. — Une commission rogatoire doit être datée. Est sub- seuls nuls les auditions irrégulières et les actes de constatation
stantielle la nullité qui résulte de l’omission de la date d’une com- qui en seraient la conséquence (Crim. 10 avr. 1959, Bull. crim.
mission rogatoire (Crim. 10 nov. 1970, Bull. crim. no 294). Mais no 205).
l’absence de date sur une commission rogatoire n’entraîne pas
la nullité de celle-ci dès lors qu’il est établi que le réquisitoire a 98. Faits. — Un exposé des faits de la cause devait autrefois
précédé la commission rogatoire dont les actes d’exécution ont précéder la rédaction de la mission. La chambre criminelle avait
tous été postérieurs (Crim. 18 avr. 2000, no 00-80.402, Bull. même indiqué qu’il était ainsi possible de vérifier si les conditions
crim. no 148). La date rectifiée, après rature d’une précédente, de fond nécessaires à la validité de la commission rogatoire elle-
qui est apposée par le juge d’instruction et authentifiée par sa même se trouvent remplies (Crim. 22 janv. 1953, D. 1953. 533,
signature, fait foi jusqu’à inscription de faux (Crim. 6 févr. 1996, note Lapp). Cet exposé des faits a le plus souvent disparu de la
no 95-84.041, Bull. crim. no 60). Le fait qu’une commission roga- pratique. Dès lors que le service saisi est celui qui a traité l’affaire
toire porte une date antérieure à celle du réquisitoire introductif initiale, il ne se justifie pas. En revanche, dès lors que c’est un
n’a pas pour effet d’entraîner sa nullité malgré les dispositions de autre service ou un magistrat qui est saisi, il pourrait toujours se
l’article 80 dès lors que la chambre d’accusation peut établir que justifier. La plupart du temps, le magistrat instructeur se contente
la discordance entre les deux dates est la conséquence d’une de joindre une copie partielle ou complète de la procédure. Il est
erreur purement matérielle et que le réquisitoire est bien anté- toutefois obligatoire de rédiger un résumé des faits dans le cas
rieur à la commission rogatoire (Crim. 30 janv. 1995, Dr. pénal des commissions rogatoires internationales (V. infra, no 270).
1995. Chron. 37).
99. Délais d’exécution. — L’article 151 du code de procédure
94. Signature et sceau. — La commission rogatoire doit être pénale fixe des délais à l’exécution des commissions rogatoires
signée. Cette formalité apparaît comme une formalité substan- lorsque celles-ci sont adressées à des officiers de police judi-
tielle. Le défaut de signature entraîne la nullité de la commission ciaire. Chaque fois que cela est possible, le terme de ces délais
rogatoire. En revanche, l’apposition du sceau, bien que men- est déterminé par le juge ; dans le cas contraire, la commission
tionnée expressément par l’article 151, alinéa 2, du code de pro- rogatoire doit être transmise dans les huit jours de la fin des opé-
cédure pénale, ne semble pas constituer une formalité substan- rations exécutées en vertu de celle-ci. Ces dispositions sont dé-
tielle. pourvues de sanctions. En fait, le seul moyen de mettre un terme
à l’exécution de la commission rogatoire consiste à la révoquer
95. Copies. — Une commission rogatoire peut faire l’objet pour expressément si elle n’est pas exécutée à une date déterminée.
les facilités de son exécution de copies multiples pouvant donner La clôture de l’information met fin aux pouvoirs détenus par l’exé-
mandat à « tout juge d’instruction et à tout officier de police judi- cutant d’une commission rogatoire, qu’il en soit avisé ou non,
ciaire compétents ». Chaque copie sera certifiée conforme par si elle rend nuls les actes effectués postérieurement en exécu-
le greffier ou par l’autorité administrative ou judiciaire chargée de tion de la commission rogatoire devenue périmée (Crim. 24 juill.
la diffusion (C. pr. pén., art. C. 311, al. 3). De même sera au- 1961, Bull. crim. no 353). Le dépassement par l’officier de po-
thentique, au même titre que l’original, toute photocopie directe lice judiciaire du délai qui lui est imparti n’a pas de conséquence
ou indirecte d’une commission rogatoire dont l’original porte la juridique. Il ne met pas fin à la mission. Il est toutefois usuel que
mention : « peut être diffusé par photocopie ». le juge d’instruction adresse alors au service un rappel ou une
prorogation de délai. L’éventuel dépassement du délai imparti
96. Diffusion en cas d’opérations simultanées. — Lorsque la par le juge d’instruction pour l’exécution d’une commission roga-
commission rogatoire prescrit des opérations simultanées sur di- toire ne saurait, en l’absence de retrait de cette délégation, avoir
vers points du territoire, elle peut, sur l’ordre du juge d’instruc- d’incidence sur la validité des actes accomplis dans le cadre de
tion mandant, être adressée aux juges d’instruction ou officiers celle-ci (Crim. 15 févr. 2006, no 05-97.002, Bull. crim. no 44).
de police judiciaire chargés de son exécution sous forme de re-
production ou de copie intégrale de l’original. Elle peut même, 100. Retour partiel. — Les commissions rogatoires peuvent re-
en cas d’urgence, être diffusée par tous moyens ; chaque diffu- venir en procédure avant leur exécution complète. C’est souvent
sion doit toutefois préciser les mentions essentielles de l’original le cas lorsque des gardes à vue suivies de défèrement ont lieu
et spécialement la nature de la mise en examen, le nom et la en cours d’information. Le magistrat instructeur doit alors être en
qualité du magistrat mandant (C. pr. pén., art. 155). L’un des possession des pièces d’exécution antérieures à la présentation
moyens de diffusion peut être la voie télégraphique. En cas de de l’intéressé. Souvent, la transmission partielle permet aussi
secret nécessaire, le télégramme sera, sur réquisition du juge au juge de commencer ses actes propres, notamment les mises
d’instruction, chiffré par le procureur de la République près le tri- en examen, alors que les enquêteurs poursuivent l’enquête vers
bunal du magistrat mandant, adressé au parquet du lieu de l’exé- d’autres personnes. Bien sûr, à partir du moment où la commis-
cution qui en remettra la traduction en clair au juge d’instruction sion rogatoire partielle est rendue au magistrat instructeur, elle
délégué. Le télégramme rédigé en chiffres ne doit pas figurer doit figurer à la procédure.
au dossier d’information qui contiendra seulement la minute de
la commission rogatoire et les éléments de son exécution après 101. Annexion de pièces. — Un juge d’instruction a la facul-
mise au clair (C. pr. pén., art. D. 33 à D. 36). Il pourrait être utile té d’annexer à sa procédure une copie des pièces d’exécution
de revoir la rédaction de ces articles et de prévoir les conditions d’une commission rogatoire délivrée dans une autre procédure
de diffusion par des moyens plus modernes… (Crim. 23 juill. 1985, Bull. crim. no 275).
97. Nom des parties. Audition. — Il est souhaitable que la com- 102. Versement au dossier. — La commission rogatoire en cours
mission rogatoire porte le nom de toutes les parties, principale- d’exécution n’a pas à figurer au dossier de la procédure (Crim.
ment pour éviter à l’officier de police judiciaire mal informé d’en- 12 mars 1991, no 90-87.733, Bull. crim. no 122. – Crim. 30 mai
tendre comme témoin une personne mise en examen ou une 1996, no 95-85.954, ibid. no 226. – Crim. 4 août 1998, no 98-
partie civile qui n’aurait pas fait connaître sa qualité au délégué. 82.622, ibid. no 222. – Crim. 30 juin 1999, no 99-81.426, ibid.
Il en est de même, depuis l’arrêt du 6 août 2008, des indications no 176). Un document joint à la commission rogatoire n’a pas à
relatives aux plaintes avec constitution de partie civile contre per- être versé à la procédure avant le retour de celle-ci (Crim. 30 mai
sonnes dénommées (V. supra, no 90). Toutefois, dès lors que 1996, préc.). La difficulté que peut rencontrer le juge des libertés
la commission rogatoire n’a pas expressément prescrit ces au- et de la détention ou la chambre de l’instruction réside donc dans
ditions illégales, elle n’est pas nulle en tant que telle ; seraient l’absence de preuve que des actes soient en cours de réalisation.
Le magistrat instructeur peut toutefois en informer le juge des exécution était suffisante pour attester l’existence de la com-
libertés et de la détention dans l’ordonnance de saisine. mission rogatoire (Crim. 15 mars 1988, Bull. crim. no 128) et
qu’une commission rogatoire pouvait être rétablie au sens de
103. Disparition de la commission rogatoire. — La chambre cri- l’article 648 du code de procédure pénale dès lors que le juge
minelle a considéré que la seule transcription faite le jour même d’instruction avait fait référence à cette pièce dans d’autres actes
de sa délivrance par l’officier de police judiciaire chargé de son (Crim. 10 mars 1993, no 91-80.936, Bull. crim. no 106).
CHAPITRE 3
Modalités d’exécution des commissions rogatoires
104. Identité de droits de principe. — En principe, et sous la ré- directement les enquêteurs d’une commission rogatoire, même
serve de l’interdiction faite aux officiers de police judiciaire d’en- lorsqu’ils ne relèvent pas de sa compétence territoriale.
tendre une personne mise en examen ou de procéder à l’audi-
tion d’une partie civile ou d’un témoin assisté non consentants, 107. Délégation de la mise en examen. — Après l’entrée en
le délégué jouit des mêmes droits et devoirs que le mandant. Le vigueur de la loi no 2000-516 du 15 juin 2000 (JO 16 juin), les
juge d’instruction conserve le pouvoir de refaire les actes incom- magistrats instructeurs se sont heurtés à une difficulté nouvelle.
plets ou défectueux, mais ne peut pas réparer les nullités qui Alors qu’auparavant la mise en examen, et encore avant l’incul-
entachent les actes accomplis par ses mandataires ; ces actes pation, se notifiait fréquemment et sans problème sur commis-
seront soumis par lui à la censure de la chambre de l’instruc- sion rogatoire par un juge mieux placé géographiquement, les
tion dont il dépend. En ce sens le magistrat instructeur est aussi nouveautés apportées à la mise en examen par cette loi ont en-
garant de l’absence de nullité touchant l’enquête initiale ou les gendré l’impossibilité de fait de poursuivre cette pratique. En
actes réalisés sur commission rogatoire. effet, on pouvait douter qu’un magistrat puisse déléguer le pou-
voir d’appréciation de choisir, après avoir entendu la personne et
son avocat, entre le statut de personne mise en examen et celui
SECTION 1re de témoin assisté (V. Instruction préparatoire). L’article 154-1 du
Magistrat délégué code de procédure pénale, issu de la loi du 9 mars 2004, dis-
pose que « le juge d’instruction qui envisage de mettre en exa-
105. Conseil. Mise à disposition du dossier. — Le magistrat dé- men une personne qui n’a pas déjà été entendue comme témoin
légué est astreint aux mêmes règles de procédure que celles qui assisté peut requérir par commission rogatoire, selon les moda-
s’imposent au délégant, notamment quant aux obligations résul- lités prévues par l’article 151, tout juge d’instruction de procéder
tant de l’observation des articles 114 à 118 du code de procédure à la mise en examen de cette personne conformément aux dis-
pénale : convocation du conseil avant l’interrogatoire de la per- positions de l’article 116. Le juge d’instruction chargé d’exécuter
sonne mise en examen et mise à disposition de ce conseil du la commission rogatoire procède alors à la mise en examen de la
dossier, le tout dans les délais légaux. Cette mise à disposition personne conformément aux dispositions de l’article 116, sauf s’il
était assurée, selon une ancienne jurisprudence, soit dans le ca- estime, au vu de ses observations ou celles de son avocat, qu’il
binet du juge mandant si le conseil réside dans la circonscription n’existe pas contre elle d’indices graves ou concordants rendant
de celui-ci, soit au cabinet du juge délégué en toute autre hy- vraisemblable sa culpabilité, auquel cas ce magistrat l’informe
pothèse, ce, en principe, grâce à la transmission du double de qu’elle bénéficie des droits du témoin assisté ». Dans cette hypo-
la procédure institué par l’article 81 du code de procédure pé- thèse, le mandataire peut donc notifier la mise en examen mais
nale (V. Paris, 23 févr. 1912, DP 1913. 2. 52. – Crim. 21 juin peut aussi faire bénéficier la personne mise en cause du statut
1962, Bull. crim. no 230). Mais la Cour de cassation a jugé en de témoin assisté. Toutefois, à la différence de ce qu’aurait pu
1982 que le dossier complet devait être tenu à la disposition du faire le juge mandant, il ne peut octroyer ce statut par pure oppor-
conseil au lieu d’exécution de la commission rogatoire : le conseil tunité mais seulement s’il considère qu’il n’existe pas d’indices
qui assiste la personne interrogée sur le fond par le juge d’ins- graves ou concordants. Si la personne avait déjà été entendue
truction chargé par commission rogatoire d’y procéder, a droit à comme témoin assisté auparavant, le juge mandataire est alors
la communication intégrale et préalable du dossier, s’il en a fait lié par la décision de mise en examen prise par le juge mandant
la demande (Crim. 9 févr. 1982, Bull. crim. no 47 ; JCP 1983. (C. pr. pén., art. 154-1).
II. 19973, note Chambon ; D. 1982. 544, note Pradel).
108. Conformité des actes à la commission. — Il n’est pas né-
106. Absence de pouvoir d’appréciation. — Le juge d’instruc- cessaire que le juge d’instruction délégué constate, dans les
tion délégué, subdéléguant ou non, ne dispose pas d’un pouvoir actes auxquels il procède, qu’il a agi en vertu de cette déléga-
d’appréciation sur l’opportunité des actes qui sont demandés, tion ; il suffit que ces actes soient conformes à la teneur de la
mais doit veiller à leur régularité juridique, tant dans leur concep- commission (Crim. 25 janv. 1849, Bull. crim. no 20).
tion par le commettant que dans leur exécution par le subdélé-
gué. Il doit retourner sans exécution la commission rogatoire si SECTION 2
elle prescrit des actes manifestement illégaux ou irréguliers pour
lesquels il est donc incompétent à un titre quelconque. Il doit re- Enquêteurs
faire ou compléter, comme le pourrait le juge mandant, les actes
accomplis sous son contrôle dès lors que, sans être entachés de ART. 1er. – CADRE GÉNÉRAL D’INTERVENTION
nullité, ceux-ci lui paraîtraient incomplets. Si par extraordinaire
le magistrat délégant maintient un point de vue contraire à l’opi- § 1er. – Principes
nion du magistrat délégué sur la régularité juridique des actes
demandés, le juge délégué doit rendre une ordonnance ouvrant 109. Origines des pouvoirs de l’OPJ. — (V. Police judiciaire).
possibilité à incidents contentieux. Ceux-ci sont tranchés sur re- L’officier de police judiciaire agissant en exécution d’une com-
cours du ministère public près la juridiction qui a commis (Crim. mission rogatoire tire ses prérogatives de la commission roga-
15 mai 1869, Bull. crim. no 114). Ces débats apparaissent pour toire à lui délivrée. Il ne saurait mettre en œuvre dans le cadre de
la plupart obsolètes depuis que le juge d’instruction peut saisir l’exécution même de cette mission des pouvoirs qu’il tire d’autres
cadres juridiques comme celui de la flagrance. Mais rien ne l’em- note Guéry ; JCP 2008. IV. 2638 ; AJ pénal 2008. 471, obs. As-
pêche, s’il découvre, à l’occasion de l’exécution d’une commis- cenci. – V. supra, no 90), la chambre criminelle a affirmé qu’il ré-
sion rogatoire, des faits nouveaux dont le juge d’instruction n’est sultait des articles 113-2 et 152 du code de procédure pénale que
pas saisi, de mettre en œuvre les pouvoirs qu’il peut tirer de « si toute personne, qui est nommément visée par une plainte
ses attributions d’officier de police judiciaire en pratiquant, par avec constitution de partie civile et qui n’a pas acquis la qualité
exemple, une saisie incidente, à condition qu’il respecte le ré- de témoin assisté, peut être entendue par un officier de police
gime spécifique sous lequel il se place alors (en l’occurrence, si judiciaire agissant sur commission rogatoire, c’est à la condi-
les faits ne sont pas flagrants, il devra obtenir l’autorisation de tion qu’elle y ait consenti après avoir été avisée de son droit
saisie de la personne chez laquelle l’objet est découvert). d’être entendue comme témoin assisté par le juge d’instruction ».
En conséquence, les officiers de police judiciaire doivent notifier
110. Formalisme. — Lorsque le délégué est officier de police ju- leurs droits aux personnes nommément visées dans une plainte
diciaire, il n’est pas tenu de s’assurer l’assistance d’un greffier avec constitution de partie civile. La personne choisit alors soit
(Décr. du 22 août 1958, art. 132, D. 1958. 280. – Crim. 4 juin de répondre aux questions des enquêteurs, soit de se présenter
1953, D. 1954. 147, note F. G.). L’avis de la commission roga- ultérieurement devant le magistrat instructeur. Dès lors que l’in-
toire qui doit être donné au procureur de la République, dans le formation est ouverte dans ce cadre juridique particulier, la garde
cas de l’article 18, alinéa 4, comme dans celui de l’article 151, à vue est impossible. Il en va différemment toutefois lorsque la
alinéa 1er, n’est pas prescrit à peine de nullité (Crim. 10 janv. personne est mise en cause par la partie civile postérieurement à
1989, Bull. crim. no 8. – Crim. 18 juill. 1989, ibid. no 290). la plainte : dans ce cas, la jurisprudence du 6 août 2008 ne s’ap-
plique pas (Crim. 26 mai 2009, no 09-81.075, AJ pénal 2009.
111. Principe de loyauté des preuves. — (V. Preuve et Témoin). 416, obs. Ascensi; D. 2009. AJ 1763, obs. Allain).
Tout comme le magistrat instructeur, l’officier de police judiciaire
délégué est assujetti au principe de loyauté dans la recherche 114. Faux témoignage. — (V. Faux témoignage). Depuis l’entrée
des preuves et ne peut recourir à des moyens incompatibles en vigueur du code pénal le 1er mars 1994, le faux témoignage
avec les droits de la défense (Crim. 12 juin 1952, JCP 1952. du témoin devant le juge d’instruction ou sur commission roga-
II. 7241). Il ne peut utiliser de stratagème : ni faire téléphoner à toire est puni des peines prévues aux articles 434-13 et 434-14
un suspect pour lui annoncer une livraison de drogue (en dehors du code pénal, sauf rétractation intervenue avant la fin de la pro-
des cas d’infiltration désormais précisés par le code de procé- cédure.
dure pénale : Crim. 13 juin 1989, Bull. crim. no 254) ; ni pro-
céder à un enregistrement par apposition d’un dispositif relié au § 2. – Modalités d’exécution
combiné de l’appareil, même réalisé avec l’accord de l’un des
correspondants (Paris, ch. acc., 8 févr. 1995, D. 1995. 221, 115. Assistance à l’exécution par des personnes qualifiées. —
note Pradel. – Crim. 27 févr. 1996, no 95-81.366, D. 1996. 346, Sous quelle forme l’officier de police judiciaire peut-il faire ap-
note Guéry ; JCP 1996. II. 22629, note Rassat). Il ne peut non pel à certaines administrations spécialisées pour l’aider dans sa
plus utiliser l’hypnose : viole les dispositions de l’article 81 du mission ? La jurisprudence de la chambre criminelle ne paraît
code de procédure pénale l’audition faite par des gendarmes, pas avoir encore totalement éclairci toutes les difficultés. La
sur commission rogatoire, d’un témoin placé avec son consen- question principale est en effet de savoir si les personnes qui
tement sous hypnose par un expert désigné par le juge d’instruc- viennent ainsi en « assistance » doivent ou non prêter serment.
tion (Crim. 12 déc. 2000, no 00-83.852, Bull. crim. no 369). Il en A été jugée régulière l’intervention de deux agents de police judi-
est de même pour une personne suspectée mise en garde à vue ciaire du service d’enquête sur les fraudes aux technologies de
et placée sous hypnose par un expert désigné par le magistrat, l’information dans le cadre d’opérations de perquisition et de sai-
interrogée ensuite par un psychologue sous couvert d’une mis- sie : ils n’avaient pas à prêter le serment de l’article 60, alinéa 2,
sion d’expertise (Crim. 28 nov. 2001, no 01-86.467, Bull. crim. du code de procédure pénale, dès lors qu’ils intervenaient pour
no 248). seconder dans l’exercice de leurs fonctions les officiers de po-
lice judiciaire, conformément aux dispositions de l’article 20 du-
112. Audition d’un simple témoin. — Tout témoin cité pour être dit code (Crim. 27 juin 2001, no 01-81.865, Bull. crim. no 163 ;
entendu au cours de l’exécution d’une commission rogatoire est D. 2001. IR 2947). Des policiers spécialisés, notamment en
tenu de comparaître, de prêter serment et de déposer (C. pr. informatique, n’ont donc pas à prêter serment lorsqu’ils inter-
pén., art. 153, al. 1er). Le défaut de prestation de serment par viennent en assistance, par exemple pour la saisie du disque dur
les témoins entendus sur commission rogatoire par un officier d’un ordinateur. De même, les agents de la Direction nationale
de police judiciaire, en l’espèce au cours d’une enquête de curri- des enquêtes et de la répression des fraudes (DNERF) ne sont
culum vitae, n’est pas une cause de nullité (Crim. 31 mars 1981, pas des « personnes qualifiées » qui doivent prêter serment dès
Bull. crim. no 110). Jusqu’à la loi du 15 juin 2000, le juge d’ins- lors qu’ils interviennent dans un domaine où la loi leur confie des
truction pouvait sanctionner le témoin défaillant d’une amende. pouvoirs de police judiciaire (Crim. 6 mai 2002, no 02-81.130,
La loi du 15 juin 2000, en supprimant cette disposition, a créé un inédit. – Contra : Crim. 3 déc. 1988, Bull. crim. no 333). Doit
nouveau délit prévu par l’article 434-15-1 du code pénal. La loi en conséquence être cassé l’arrêt qui, pour annuler une com-
du 4 mars 2002 a inclus dans la prévention les témoins entendus mission rogatoire, relève que la participation d’inspecteurs des
sur commission rogatoire. douanes à son exécution, alors que l’administration des douanes
était partie à la procédure, est contraire à l’article 6, §1 de la
113. Personne nommément citée dans une plainte. — L’ancien Convention européenne des droits de l’homme (Crim. 4 avr.
article 104 donnait à la personne nommément citée dans une 2001, no 01-80.835, Bull. crim. no 95). Le serment semble né-
plainte avec constitution de partie civile le droit de refuser d’être cessaire pour les fonctionnaires des impôts (Crim. 3 oct. 1996,
entendue sur commission rogatoire. Depuis la loi du 15 juin no 95-83.879, Bull. crim. no 345 ; JCP 1997. IV. 431. – Crim.
2000, la personne citée dans une plainte avec constitution de 21 juin 2006, no 06-82.774, Bull. crim. no 193 ; D. 2006. IR 2055 ;
partie civile ne bénéficiait plus d’aucun droit particulier. Selon le Gaz. Pal. 2/3 févr. 2007, 20, note Monnet ; Procédures 2006,
texte, c’est seulement lorsqu’elle comparaît devant le juge d’ins- no 216, note Buisson). Le défaut de prestation de serment ap-
truction que cette personne peut exiger d’être entendue comme paraît alors comme une nullité pour laquelle la démonstration de
témoin assisté. Toutefois, dans un arrêt du 6 août 2008 (Crim. l’existence d’un grief n’est pas nécessaire (Crim. 21 juin 2006,
6 août 2008, no 08-82.924, Bull. crim. no 171 ; D. 2008. 2836, préc.).
116. Transport du juge. — Il arrive que le magistrat instruc- le système initial. Les données auxquelles il est ainsi accédé
teur donne commission rogatoire à des officiers de police judi- peuvent être copiées sur tout support.
ciaire pour l’assister dans le cadre d’opérations qu’il accomplit
lui-même. Ce sera le cas à chaque fois qu’une perquisition res- 121. Rémunération des indicateurs. — Les services de police et
sortit à sa compétence exclusive (V. supra, no 53). Mais il peut de gendarmerie peuvent rétribuer toute personne étrangère aux
arriver aussi que le magistrat instructeur souhaite être assisté administrations publiques qui leur a fourni des renseignements
dans des perquisitions qui ne sont pas obligatoirement de sa ayant amené directement soit la découverte de crimes ou de dé-
compétence exclusive mais qu’il souhaite assurer lui-même. La lits, soit l’identification des auteurs de crimes ou de délits. Les
chambre criminelle a indiqué que le code de procédure pénale modalités de rétribution de ces personnes sont déterminées par
ne faisait pas obligation au juge d’instruction, lorsqu’il estime que arrêté conjoint du ministre de la Justice, du ministre de l’Inté-
les circonstances l’exigent, de révéler par avance aux officiers rieur, du ministre de la Défense et du ministre des Finances (L.
de police judiciaire qui collaborent avec lui l’objet et le lieu d’un no 95-73 du 21 janv. 1995, art. 15-1). Cet arrêté a été pris le
transport de justice décidé dans une information en cours ou 20 juin 2006.
de requérir leur assistance par écrit préalablement à l’opération
(Crim. 26 févr. 1997, no 96-84.960, Bull. crim. no 78 ; D. 1997. 122. Prélèvements biologiques. — L’officier de police judiciaire
297, note Pradel). agissant au cours de l’enquête ou sur commission rogatoire peut
faire procéder à une recherche de la séropositivité sur toute per-
117. Transport sans procéder lui-même aux actes. — L’ar- sonne contre laquelle il existe des indices graves ou concordants
ticle 152, alinéa 3, du code de procédure pénale, issu de la d’avoir commis une atteinte sexuelle, une agression sexuelle ou
loi du 9 mars 2004, dispose que le juge d’instruction peut un viol (C. pr. pén., art. 706-47-1). Il peut aussi faire procéder à
se transporter, sans être assisté de son greffier, ni devoir en des prélèvements biologiques susceptibles d’être comparés aux
dresser procès-verbal, pour diriger et contrôler l’exécution de la informations contenues dans le fichier d’empreintes génétiques
commission rogatoire, dès lors qu’il ne procède pas lui-même (C. pr. pén., art. 55-1, 76-2 et 154-1. – V. Signalement et identifi-
à des actes d’instruction. À l’occasion de ce transport, il peut cation). Depuis la loi du 9 mars 2004, lorsqu’il n’est pas possible
ordonner la prolongation des gardes à vue prononcées dans le de procéder à un prélèvement biologique sur cette personne,
cadre de la commission rogatoire. Dans tous les cas, mention l’identification de son empreinte génétique peut être réalisée à
de ce transport est faite sur les pièces d’exécution de la com- partir de matériel biologique qui se serait naturellement détaché
mission rogatoire. du corps de l’intéressé (C. pr. pén., art. 706-56).
118. Audition dans le cadre d’une autre procédure. — À l’occa- 123. Prise de sang sous contrainte. — L’article 121 de la loi
sion de l’audition du témoin dans le cadre de l’exécution d’une LOPPSI 2 du 14 mars 2011 (L. no 2011-267, JO 15 mars) pré-
commission rogatoire, l’officier de police judiciaire délégué peut voit un cas où la personne peut être contrainte d’être soumise à
entendre le témoin sur une procédure différente portant sur une prise de sang : il s’agit du cas où elle est mise en cause pour
d’autres faits (Crim. 27 juin 1964, Bull. crim. no 252). avoir commis sur une personne dépositaire de l’autorité publique
ou chargée d’une mission de service public, dans l’exercice de
119. Droit de réquisition. — L’article 99-4 du code de procé- ses fonctions, des actes susceptibles d’entraîner sa contamina-
dure pénale permet à l’officier de police judiciaire, pour les né- tion par une maladie virale grave. Dans ce cas, le professionnel
cessités de l’exécution de la commission rogatoire, de procéder de santé doit « s’efforcer d’obtenir le consentement de l’intéres-
aux réquisitions prévues par le premier alinéa de l’article 60-2. sé ». Mais « à la demande de la victime ou lorsque son intérêt le
Il en est de même avec l’autorisation expresse du juge d’ins- justifie, cette opération peut être effectuée sans le consentement
truction. Cette autorisation concerne la mise à disposition de de l’intéressé sur instructions écrites du procureur de la Répu-
fichiers et notamment de ceux des opérateurs de télécommuni- blique ou du juge d’instruction qui sont versées au dossier de la
cations (l’ancien texte était contenu dans l’art. 151-1-1 et ren- procédure.Le résultat du dépistage est porté, dans les meilleurs
voyait à l’art. 60-1). Le juge d’instruction ou l’officier de police délais et par l’intermédiaire d’un médecin, à la connaissance de
judiciaire par lui commis peut aussi requérir de toute personne, la victime. Le fait de refuser de se soumettre au dépistage pré-
de tout établissement ou organisme privé ou public ou de toute vu au présent article est puni d’un an d’emprisonnement et de
administration publique qui sont susceptibles de détenir des do- 15 000 € d’amende. »
cuments intéressant l’instruction, y compris ceux issus d’un sys-
tème informatique ou d’un traitement de données nominatives, 124. Logiciels de rapprochement judiciaire. — L’article 14 de la
de lui remettre ces documents, sans que puisse lui être opposée, loi LOPPSI 2 du 14 mars 2011 a introduit dans le titre IV du livre
sans motif légitime, l’obligation au secret professionnel. Lorsque Ier du code de procédure pénale un chapitre III intitulé « Des logi-
les réquisitions concernent des personnes mentionnées aux ar- ciels de rapprochement judiciaire ». L’article 230-20 nouveau du
ticles 56-1 à 56-3, la remise des documents ne peut interve- code de procédure pénale dispose : « Afin de faciliter le rassem-
nir qu’avec leur accord. En l’absence de réponse de la per- blement des preuves des infractions et l’identification de leurs
sonne aux réquisitions, les dispositions du deuxième alinéa de auteurs, les services de la police nationale et de la gendarme-
l’article 60-1 sont applicables (C. pr. pén., art. 99-3, issu de la rie nationale chargés d’une mission de police judiciaire peuvent
L. du 9 mars 2004). mettre en œuvre, sous le contrôle de l’autorité judiciaire, des lo-
giciels destinés à faciliter l’exploitation et le rapprochement d’in-
120. Données informatiques sur les lieux d’une perquisition. — formations sur les modes opératoires réunies par ces services
La loi du 18 mars 2003 a ajouté un article 97-1 au code de procé- au cours : 1o Des enquêtes préliminaires, des enquêtes de fla-
dure pénale selon lequel l’officier de police judiciaire peut, pour grance ou des investigations exécutées sur commission roga-
les nécessités de l’exécution de la commission rogatoire, procé- toire ; 2o Des procédures de recherche des causes de la mort ou
der aux opérations prévues à l’article 57. Celui-ci ouvre la pos- d’une disparition prévues par les articles 74 et 74-1. Un certain
sibilité, sur les lieux d’une perquisition, de se servir du système nombre de dispositions régissent le sort des données à carac-
informatique implanté sur ces lieux pour accéder à des données tère personnel éventuellement révélées par l’exploitation des en-
intéressant l’enquête en cours et stockées dans ce système ou quêtes et investigations. Elles sont effacées à la clôture de l’en-
dans un autre système informatique, dès lors que ces données quête et, en tout état de cause, à l’expiration d’un délai de trois
sont accessibles à partir du système initial ou disponible pour ans » (C. pr. pén., art. 230-22). Parmi les personnes désignés
par l’article 230-25 comme pouvant utiliser ces logiciels figurent rogatoire (C. pr. pén., art. 81, al. 5), et le président de la chambre
des agents des services de police judiciaire individuellement dé- de l’instruction doit s’en assurer (art. 220).
signés et spécialement habilités, les magistrats du parquet et les
magistrats instructeurs. Un décret en Conseil d’État doit les au- 130. Dessaisissement. Clôture. — La commission rogatoire ne
toriser (C. pr. pén., art. 230-27). peut recevoir exécution après que le juge d’instruction a été des-
saisi. Selon une ancienne jurisprudence, le juge d’instruction
125. Fichiers d’analyse sérielle. — La LOPPSI 2 a introduit dans pouvait joindre à la procédure des procès-verbaux établis alors
le code de procédure pénale une section intitulée « Des fichiers que l’information était ouverte mais reçus après la clôture (Crim.
d’analyse sérielle ». Afin de rassembler les preuves et d’identifier 3 juill. 1952, Bull. crim. no 174). Elle semble obsolète depuis
les auteurs, grâce à l’établissement de liens entre les individus, que le juge a l’obligation de délivrer des avis de fin d’information.
les événements ou les infractions, des crimes et délits présen-
tant un caractère sériel, les services et unités de la police et de
la gendarmerie nationales chargés d’une mission de police judi- ART. 2. – 105 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE :
ciaire peuvent mettre en œuvre, sous le contrôle des autorités AUDITION DU « SUSPECT »
judiciaires, des traitements automatisés de données à caractère
personnel collectées au cours : « 1o Des enquêtes préliminaires A. – Principes
ou de flagrance ou des investigations exécutées sur commis-
sion rogatoire et concernant toute infraction punie d’au moins 131. Indices graves et concordants. — (L’art. 105 est étudié par
cinq ans d’emprisonnement ; 2o Des procédures de recherche ailleurs en détail : V. Instruction préparatoire. – V. égal. Défense
des causes de la mort prévues par l’article 74 ou de recherche pénale). Nous ne reprendrons ici que les éléments principaux.
des causes d’une disparition prévues par l’article 74-1 » (C. pr. L’article 105 du code de procédure pénale dispose que les per-
pén., art. 230-12). sonnes à l’encontre desquelles il existe des indices graves et
concordants d’avoir participé aux faits dont le juge d’instruction
126. Rapports et renseignements. — Les rapports par lesquels est saisi ne peuvent être entendues comme témoins. L’ancien
les services de police transmettent au juge d’instruction les ren- article 105, abrogé par la loi du 4 janvier 1993, portait une exi-
seignements qu’ils ont pu recueillir ne constituent pas des actes gence supplémentaire : l’audition du témoin devait avoir été réa-
d’instruction ; par suite, les inculpés ne sauraient se faire un grief lisée ou poursuivie dans le dessein de faire échec aux droits de
de ce que ces renseignements n’auraient pas été obtenus en la défense. Désormais, la nullité est prononcée uniquement si la
observant les règles qui régissent les commissions rogatoires violation de la loi a porté atteinte aux droits de la défense. L’ar-
(Crim. 17 févr. 1953, Bull. crim. no 57). La violation de l’ar- ticle 105 suppose qu’une information soit ouverte ; il est étran-
ticle 105 du code de procédure pénale ne peut être invoquée ger aux auditions effectuées en cours d’une enquête préliminaire
lorsque les déclarations du futur inculpé, faites devant l’officier de (Crim. 17 juin 1964, Bull. crim. no 204. – Crim. 27 juill. 1964,
police sur commission rogatoire, ont été relatées dans un simple D. 1964. Somm. 99 ; Gaz. Pal. 1964. 2. 356 ; RSC 1965. 149,
rapport et n’ont pas fait l’objet d’un procès-verbal régulier d’audi- obs. Robert).
tion (Crim. 7 mai 1969, Bull. crim. no 156 ; JCP 1969. II. 16120,
note Chambon). Aucun texte ne prévoit la notification à la per- 132. Article 105 et garde à vue. — L’impossibilité d’entendre en
sonne poursuivie du rapport de police établi sur l’exécution d’une qualité de témoin une personne à l’encontre de laquelle il existe
commission rogatoire (Crim. 10 janv. 1989, Bull. crim. no 8). des indices graves et concordants d’avoir participé aux faits dont
le juge d’instruction est saisi ne fait pas obstacle à ce que la
§ 3. – Une exécution en liaison avec le juge d’instruction garde à vue de celle-ci soit prolongée dès lors que cette mesure
répond aux nécessités de l’enquête et que la prolongation est or-
127. Contacts entre les enquêteurs et le juge d’instruction. —
donnée après présentation de la personne au juge d’instruction
Ils sont nécessaires pour plusieurs raisons. Le juge d’instruction
(Crim. 14 juin 2000, no 00-81.386, Bull. crim. no 224). La prolon-
doit en effet suivre l’exécution de la commission rogatoire pour
gation de la garde à vue peut avoir d’autres objets : recherches
pouvoir donner des instructions précises au fur et à mesure de
d’indices, confrontation visant la culpabilité de complices, etc.
son déroulement. Par ailleurs, le juge d’instruction peut avoir
Dans l’espèce du 14 juin 2000, les policiers réalisaient des re-
eu connaissance, par les actes qu’il accomplit lui-même, d’élé-
cherches afin de trouver un box dont la personne disposait. Il
ments dont ne disposent pas les enquêteurs. Il peut ainsi leur
est donc partiellement inexact de prétendre que l’autorisation de
faire parvenir copie des auditions ou interrogatoires qu’il réalise.
prolongation de garde à vue suppose que ne soient pas réunis
Une constitution de partie civile incidente en cours d’information
contre la personne des indices graves et concordants de culpa-
modifie le régime de l’audition sur commission rogatoire. Il est
bilité. On peut désormais s’interroger sur l’avenir de cette dispo-
donc nécessaire que l’enquêteur en soit également averti. En-
sition qui n’était censée concerner que les seuls témoins, puis-
fin, les règles de l’article 105 imposent que le magistrat puisse
qu’on sait désormais que la garde à vue est incompatible avec
apprécier si l’audition d’un témoin doit être suspendue dès que
ce statut.
celui-ci, soupçonné d’une infraction, a fait des aveux suffisam-
ment précis, circonstanciés et vérifiables (Crim. 19 sept. 1959, 133. Témoin assisté. — Depuis l’entrée en vigueur de la loi du
Bull. crim. no 404) et qu’il a été procédé, le cas échéant, à la 15 juin 2000, l’article 105 n’est pas applicable au témoin assisté.
vérification de ces aveux par voie de confrontation (Crim. 6 août Il ne saurait donc être fait grief au magistrat instructeur d’avoir
1960, Bull. crim. no 401). continué à entendre un témoin assisté sous ce régime, alors
128. Information du juge mandant par les OPJ. — L’article R. 2 même qu’il disposait contre lui d’indices graves et concordants.
du code de procédure pénale énonce que les officiers de police Le législateur a estimé qu’une appréciation inverse aurait conduit
judiciaire doivent rendre compte de leurs diverses opérations à les magistrats instructeurs à délaisser le statut de témoin assisté
l’autorité judiciaire dont ils dépendent sans attendre la fin de leur par crainte de voir leur audition annulée (V. Instruction prépara-
mission. Ils doivent référer sans délai des difficultés qui vien- toire et Témoin assisté).
draient à se présenter et solliciter des instructions (C. pr. pén.,
art. D. 34). 134. Obligations du témoin. — Tout témoin cité pour être enten-
du au cours de l’exécution d’une commission rogatoire doit com-
129. Vérification par le juge. — Le juge d’instruction est tenu de paraître, prêter serment et déposer. En cas de refus, toutefois, le
vérifier les éléments d’information recueillis dans la commission délégué ne jouit pas d’un pouvoir de coercition et doit simplement
en référer au magistrat mandant qui peut seul contraindre le té- 137. Audition après investigations. — Lorsqu’un juge d’instruc-
moin à comparution par réquisition de la force publique, (C. pr. tion indique, par écrit, dans une procédure, que les éléments à
pén., art. 153. – V. Témoin). charge préexistants à l’encontre de personnes soupçonnées,
complétés par des investigations menées sur commission
rogatoire, lui paraissent suffisants pour impliquer celles-ci « en
toute certitude », il ne peut plus, sans violer l’article 105 du code
B. – Jurisprudence
de procédure pénale, entendre ces dernières ultérieurement
en qualité de témoins, après les avoir fait placer en garde à
135. Appréciation « in concreto ». — Ne méconnaît pas les dis- vue (Crim. 20 juin 2001, no 01-82.607, Bull. crim. no 156 ; JCP
positions de l’article 105 du code de procédure pénale, en sa ré- 2001. IV. 2172, no 2932).
daction issue de la loi du 24 août 1993, la chambre d’accusation
(de l’instruction) qui, pour rejeter l’exception de nullité prise d’une
mise en examen tardive, énonce que l’intéressé, lors de son au- C. – Nullité encourue
dition, en qualité de témoin, par les enquêteurs agissant sur com-
mission rogatoire, a nié toute participation aux faits poursuivis,
a bénéficié de l’assistance d’un avocat au cours de sa garde 138. Étendue de l’annulation. — L’audition d’une personne
à vue et qu’il n’a été porté aucune atteinte à ses droits (Crim. contre laquelle il existe des indices graves ou concordants n’en-
13 mars 1997, nos 95-85.766 et 94-83.209, Bull. crim. no 105). traîne la nullité que de cet acte et non celle de la commission
Les enquêteurs agissant sur commission rogatoire peuvent, en rogatoire (Crim. 10 avr. 1959, Bull. crim. no 205). Il n’en est
présence d’un suspect qui nie puis accepte de parler, laisser l’in- autrement que si la commission rogatoire elle-même prescrit
téressé s’expliquer, afin de vérifier s’il existe des charges de na- expressément l’audition d’une personne contre laquelle il existe
ture à engager une responsabilité pénale. Mais une nouvelle déjà de tels indices (Crim. 30 avr. 1960, Bull. crim. no 227. –
audition, après vérification positive des aveux, méconnaît la pro- Crim. 20 juin 2001, ibid. no 156).
hibition de l’article 105 ; sa nullité ne s’étend pas à l’audition anté-
rieure régulière (Crim. 16 juin 1981, Bull. crim. no 207 ; D. 1983. 139. Invocation de l’article 105 par un tiers. — Traditionnel-
IR 76, obs. Roujou de Boubée ; JCP 1982. II. 19838, note Cham- lement, la chambre criminelle jugeait qu’un tiers était sans
bon ; RSC 1983. 97). La Cour de cassation se livre à une ap- qualité pour se prévaloir de la méconnaissance des dispositions
préciation in concreto pour rechercher si les circonstances de de l’article 105 du code de procédure pénale au soutien de
l’espèce autorisent l’enquêteur à considérer qu’il n’existait pas, sa demande d’annulation du procès-verbal d’audition comme
en l’état, d’indices suffisamment graves et concordants de culpa- témoin d’une autre personne (Crim. 4 mars 2004, no 03-85.983,
bilité (Crim. 28 févr. 1974, Bull. crim. no 88 ; D. 1974. IR 105 ; Bull. crim. no 57 ; D. 2004. IR 1213 ; AJ pénal 2004. 207,
JCP 1974. II. 17774, note Chambon. – Crim. 15 oct. 1974, obs. Leblois-Happe ; JCP 2004. IV. 1782). Mais le 15 février
Bull. crim. no 292 ; D. 1974. IR 236). Des indices graves, s’ils 2011, la chambre criminelle confirmait un arrêt de chambre de
résultent d’un seul témoignage, alors que plusieurs individus se l’instruction qui, pour rejeter la requête aux fins d’annulation
trouvent sur les lieux d’un meurtre, n’interdisent pas l’audition de pièces de la procédure présentée par la partie civile, avait
de la personne soupçonnée par le commissaire enquêteur sai- retenu que celle-ci ne saurait se faire un grief de l’audition, en
si d’une commission rogatoire au cours d’une information suivie qualité de simples témoins, de personnes nommément visées
contre X. Toutefois, lorsque les renseignements sur le rôle de dans sa plainte ou dans des réquisitions, dès lors que les
chacun des auteurs possibles sont réunis, le juge d’instruction dispositions de l’article 105 du code de procédure pénale sont
méconnaît les dispositions de l’article 105 du code de procédure prescrites dans l’intérêt exclusif des personnes concernées.
pénale en autorisant la prolongation de la garde à vue, ce qui En se prononçant ainsi, la chambre de l’instruction a justifié sa
permet un nouvel interrogatoire par les officiers de police judi- décision au regard de l’article 802 du code de procédure pénale
ciaire (Crim. 13 juill. 1971, Bull. crim. no 230. – Crim. 13 févr. (Crim. 15 févr. 2011, nos 09-87.947 et 07-83.640, Bull. crim.
1975, ibid. no 53 ; D. 1975. IR 84 ; Gaz. Pal. 1975. 1. 344). no 23). On pouvait ainsi se demander si la démonstration d’un
Il n’existe pas d’indices concordants lorsqu’un individu avoue grief pouvait rendre une telle requête recevable. Au regard du
un crime dans des conditions qui ne concordent pas avec les revirement de jurisprudence amorcé dans l’arrêt du 14 février
constatations des experts, alors qu’il existe d’autres personnes 2012, on peut désormais en douter (Crim. 14 févr. 2012, JCP
soupçonnées (Crim. 24 avr. 1975, Bull. crim. no 107 ; Gaz. Pal. 2012, act. 242, obs. Maréchal ; JCP 2012. Doctr. 341, no 17,
1975. 2. 504). Au cours de l’exécution d’une commission roga- obs. Maron ; JCP 2012, note Pradel, JCP 2012. 484 ; D. 2012.
toire, l’audition de l’auteur d’un aveu, lorsqu’elle a pour unique 775, concl. Boccon-Gibod ; D. 2012. 612 ; D. 2012. 779, note
objet l’identification de coauteurs, ne méconnaît pas les droits Matsopoulou. – V. infra, no 245).
de la défense (Crim. 3 oct. 1973, Bull. crim. no 343 ; D. 1973.
Somm. 139. – Crim. 4 janv. 1977, Bull. crim. no 5 ; D. 1977.
IR 86 ; JCP 1977. II. 18727, note Mayer-Jack ; Gaz. Pal. 1977. 140. Interdiction de reconstituer les procès-verbaux annulés. —
2. 380. – Crim. 24 févr. 1987, Bull. crim. no 93). Une dé- Tout procédé tendant à reconstituer un procès-verbal dont le
nonciation ne fait apparaître des indices graves et concordants retrait du dossier a été ordonné méconnaît le principe de l’ar-
qu’après l’exécution d’actes de vérification (Crim. 1er févr. 1988, ticle 105 : tel est le cas de l’audition d’un inspecteur ayant assis-
Bull. crim. no 47). té à l’interrogatoire, frappé de nullité (Crim. 30 juin 1981, Bull.
crim. no 224 ; Gaz. Pal. 1982. 1. 166).
136. Résumé des déclarations. — Lorsqu’un suspect reconnaît
qu’il avait accepté de faire éliminer physiquement un adversaire, 141. Prescription de l’action publique. — Une commission ro-
l’officier de police judiciaire qui pose encore deux questions ne gatoire délivrée par le juge d’instruction, quel qu’en soit l’objet,
faisant que résumer les déclarations antérieures et n’apportant constitue en elle-même un acte d’instruction au sens de l’article 7
aucun élément nouveau ne méconnaît pas les prescriptions de du code de procédure pénale de nature à interrompre la prescrip-
l’article 105 du code de procédure pénale (Crim. 1er sept. 1987, tion (Crim. 12 nov. 2008, no 08-80.381, Bull. crim. no 228 ; AJ
Bull. crim. no 308). pénal 2009. 72, obs. Girault).
CHAPITRE 4
Garde à vue
142. La jurisprudence de la Cour européenne des droits de Convention (CEDH, gr. ch., 27 nov. 2008, Salduz c/ Turquie,
l’homme, du Conseil constitutionnel, celle de la chambre crimi- req. no 36391/02. – CEDH, gr. ch., 13 oct. 2009, Dayanan
nelle de la Cour de cassation, de l’Assemblée plénière de la c/ Turquie, req. no 7377/03). Ils énonçaient déjà que, « pour
Cour, le législateur dans sa loi du 14 avril 2011, ont considé- que le droit à un procès équitable consacré par l’article 6,
rablement rénové cette matière. § 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme
et des libertés fondamentales soit effectif et concret, il faut,
143. Alignement des différents régimes de garde à vue. — Les en règle générale, que la personne placée en garde à vue
réformes successives apportées à la garde à vue sur commis- puisse bénéficier de l’assistance d’un avocat dès le début de la
sion rogatoire ont cessé d’en faire un domaine particulier La loi mesure et pendant ses interrogatoires ». Mais le législateur a
du 14 avril 2011 poursuit dans cette voie, l’article 154 se conten- tardé à réagir. Avant même que la loi du 14 avril 2011 entre en
tant désormais de renvoyer aux articles qui régissent l’enquête application, une évolution s’est dessinée, marquée tout d’abord
de flagrance, auxquels renvoie aussi ceux qui gouvernent l’en- par la décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010
quête préliminaire. Il n’existe plus qu’un seul régime de garde à (V. infra, no 148), les arrêts rendus par la chambre criminelle le
vue, quel que soit le cadre procédural. 19 octobre 2010 (V. infra, no 149), ceux rendus par l’Assemblée
plénière le 15 avril 2011 (V. infra, no 150) et, enfin, les décisions
144. Définition. — « La garde à vue a pour objet l’audition de de la chambre criminelle postérieurs, rendus le 31 mai (V. infra,
la personne retenue à la disposition de l’officier de police judi- no 151).
ciaire » (Crim. 11 juill. 1994, no 94-82.220, Bull. crim. no 273).
C’est une mesure de rétention d’une personne, sous le contrôle 148. Décision du Conseil constitutionnel du 30 juillet 2010. — Le
de l’autorité judiciaire, à la disposition d’un officier de police ju- Conseil constitutionnel juge, dans sa décision rendue le 30 juillet
diciaire pour les nécessités de l’enquête (Crim. 11 oct. 2000, 2010 (Cons. const. 30 juill. 2010, no 2010-14/22 QPC, Rev.
no 00-82.238, Bull. crim. no 296). Lorsqu’elle n’a pas fait l’ob- pénit. juill.-sept. 2010, dossier spécial ; Dr. pénal 2010. Comm.
jet de contrainte, et notamment lorsqu’elle s’est présentée libre- 113, note Maron et Haas. – PERRIER, Une décision empreinte
ment, on ne peut pas reprocher à l’officier de police judiciaire de pragmatisme, AJ pénal 2010. 470. – AJDA 2010. 1556. –
de ne pas l’avoir placée en garde à vue (Crim. 28 juin 2000, D. 2010. 2434, note Roets. – D. 2010. 2254, obs. Pradel. –
no 99-81.688, Bull. crim. no 251). Le législateur de 2011 n’a tou- CHARRIÈRE BOURNAZEL, Garde à vue, le sursaut républi-
jours pas changé le principe selon lequel seule la personne gar- cain, D. 2010. 1928. – FOURNIÉ, Nouvelles considérations
dée à vue bénéficie de droits et non le suspect. Ce qui fait que « huroniques » : JCP 2010. 914), que la législation française de
celui qui est sous l’emprise d’une autre contrainte que la garde à droit commun de la garde à vue est contraire à la Constitution.
vue ne bénéficie d’aucun droit. Il en est ainsi lorsqu’il se trouve Il reporte toutefois les effets de l’inconstitutionnalité prononcée
en détention, voire fait l’objet d’une autre garde à vue, (Crim. à une intervention législative et, au plus tard, le 1er juillet 2011.
12 oct. 2005, no 05-81.848, inédit, Dr. pénal 2006. Comm. 17,
obs. Maron). Il en est ainsi également lorsqu’il s’est présenté 149. Arrêts rendus par la chambre criminelle le 19 octobre
« volontairement » dans les locaux où elle est entendue, toute la 2010. — Les arrêts rendus par la chambre criminelle le 19 oc-
nuance portant sur la réalité du caractère volontaire (sur ce point, tobre 2010 consacrent le caractère contraire à la Convention
V. not GUÉRY, L’avenir du suspect, AJ pénal 2005. 232. – MA- européenne de la garde à vue française de droit commun, mais
THIAS, Pour une loi des suspects… libres. – [à propos du projet la chambre criminelle estime que ces principes ne peuvent
de loi relatif à la garde à vue], Dr. pénal 2011. Étude 6). « s’appliquer immédiatement à une garde à vue conduite dans
le respect des dispositions législatives en vigueur lors de sa
145. Différence entre surveillance et garde à vue. — Une me- mise en œuvre, sans porter atteinte au principe de sécurité
sure de simple surveillance ordonnée par la commission roga- juridique et à la bonne administration de la justice » (Crim.
toire d’un juge d’instruction n’a pas pour objet, comme la garde 19 oct. 2010, nos 10-82.306, 10-82.902 et 10-85.051, D. 2010.
à vue, l’audition de la personne retenue à la disposition d’un of- 2434, obs. Lavric ; JCP 2010. 1104, note Matsopoulou ; Dr.
ficier de police judiciaire, et la commission rogatoire n’a pas à pénal 2010, dossier 11, note Maron et dossier 12, note Georget ;
être annulée (Crim. 11 juill. 1994, no 94-82.220, Bull. crim. Procédures 2010. Comm. 422, Buisson ; Gaz. Pal. 2010,
no 273 ; D. 1995. Somm. 141, obs. Pradel). Cette mesure de jurispr., no 297 et no 299, p. 15 à 19, note Bachelet ; Gaz. Pal.
surveillance peut être ordonnée par exemple en présence d’une 17-18 nov. 2010, jurispr. p. 16, note Detraz ; RSC 2010. 879,
personne suspectée et qui est hospitalisée avant que son état note Gindre ; D. 2010. 2809, note Dreyer). Bien qu’inusitée, la
ne permette une mesure de garde à vue ou avant sa mise en décision pouvait se comprendre et figurait d’ailleurs en toutes
examen. lettres dans la motivation de la cour : il s’agissait de protéger la
sécurité juridique et d’éviter des annulations en cascade.
146. Retenue douanière. — Le régime de la garde à vue ne
s’applique pas aux retenues douanières prévues par le code des 150. Arrêts rendus par l’Assemblée plénière de la Cour de cas-
douanes (Crim. 7 mars 1994, no 93-85.698, Bull. crim. no 89). sation le 15 avril 2011. — L’Assemblée plénière, par quatre arrêts
rendus le 15 avril 2011 (Cass., ass. plén., 15 avr. 2011, nos 10-
17.049, 10-30.313, 10-30.316 et 10-30.242, Gaz. Pal. 17-19 avr.
SECTION 1re 2011, jurispr. p. 10, note Bachelet ; Dr. pénal 2011. Comm. 84,
La France et la Convention européenne Maron et Haas ; AJ pénal 2011. 311, note Mauro ; RSC 2011.
des droits de l’homme 410, note Giudicelli – PRADEL, Un regard très européen sur
les gardes à vue antérieures à l’application de la loi du 14 avril
147. Évolution. — Plusieurs arrêts de la Cour européenne 2011, JCP 2011. 756. – Jurispr. conf. par Crim. 7 juin 2011,
des droits de l’homme avaient semblé indiquer que la légis- no 11-81.702, Bull. crim. no 121 ; D. 2011. 1824), confirme la ju-
lation française concernant la garde à vue était contraire à la risprudence de la chambre criminelle sur le fond – la garde à vue
française ne répond pas aux exigences de la Convention – mais nommément visée par un réquisitoire introductif » (Crim. 14 mai
elle estime que ces principes sont applicables immédiatement. 2002, no 02-80.721, Bull. crim. no 111).
Ces arrêts étant rendus le lendemain de la promulgation de la loi
du 14 avril, celle-ci va fonder les pratiques des parquets dès le 154. La partie civile peut être placée en garde à vue. — Dès lors
15 avril, puisque la loi nouvelle semble répondre aux exigences que ce n’est pas en tant que partie civile mais bien en tant que
conventionnnelles. personne soupçonnée qu’elle est entendue, rien ne s’oppose à
ce qu’une partie civile soit placée en garde à vue. Cette position,
151. Arrêts rendus par la chambre criminelle le 31 mai 2011. — déjà admise par la doctrine, a été confirmée par la chambre cri-
Le 31 mai 2011 (Crim. 31 mai 2011, nos 10-88.293, 10-88.809, minelle : ne constituent pas une cause de nullité le placement
11-80.034 et 11-81.412, Bull. crim. nos 113 à 115 ; D. 2011. en garde à vue et l’audition par les policiers sur commission
1563 ; AJ pénal 2011. 370, obs Mauro ; RSC 2011. 412, note rogatoire d’une personne, dès lors qu’il existe à son encontre
Giudicelli), la chambre criminelle s’incline en estimant que les des indices faisant présumer qu’elle a commis l’infraction, ob-
principes de la Convention s’appliquent immédiatement, y com- jet de l’information, ou qu’elle y a participé, quand bien même
pris aux auditions reçues lors de garde à vue antérieures. Toute- se serait-elle constituée partie civile dans cette procédure (Crim.
fois, l’application de l’article 173-1 du code de procédure pénale 28 avr. 2004, no 01-84.554, JCP 2004. IV. 2268 ; D. 2004. IR
interdit de revenir sur une garde à vue dès lors qu’elle a été suivie 1644).
d’une mise en examen depuis plus de six mois (V. infra, no 246).
Par ailleurs, l’article 174 du même code produit le même effet 155. Investigations corporelles. — L’article 63-5 du code de pro-
pour des personnes qui auraient été mises en examen moins de cédure pénale, issu de la loi du 15 juin 2000, prévoit que, lorsqu’il
six mois avant leur requête mais qui auraient déjà soulevé une est indispensable pour les nécessités de l’enquête de procéder à
nullité de procédure, ou été avisées par le parquet général d’une des investigations corporelles internes sur une personne gardée
audience sur une requête en nullité déposée par une autre partie, à vue, celles-ci ne peuvent être réalisées que par un médecin
dès lors qu’elles étaient alors dans l’obligation de faire connaître requis à cet effet (V. Fouilles corporelles).
à la chambre de l’instruction toute nullité pouvant les concerner. 156. Diplomate. — Les diplomates étrangers ne peuvent pas
Enfin, la théorie dite « du support nécessaire » (V. infra, nos 240 être placés en garde à vue. C’est une conséquence de leur im-
et 248) va permettre de mettre un frein puissant à l’étendue des munité pénale.
annulations prononcées.
157. Parlementaire. — L’article 26 de la Constitution dispose
SECTION 2 qu’« aucun membre du Parlement ne peut faire l’objet, en ma-
tière criminelle ou correctionnelle, d’une arrestation ou de toute
Placement en garde à vue autre mesure privative ou restrictive de liberté qu’avec l’autori-
sation du bureau de l’assemblée dont il fait partie ». Il n’en va
ART. 1er. – PERSONNES POUVANT ÊTRE PLACÉES EN GARDE À VUE différemment qu’en cas de délit ou de crime flagrant. La garde
à vue est donc assujettie à l’autorisation de l’assemblée dont
152. Un simple témoin ne peut plus être placé en garde à vue. — dépend le parlementaire en cause. L’assemblée peut aussi sus-
« La personne à l’encontre de laquelle il n’existe aucune raison pendre les poursuites ou des mesures restrictives ou privatives
plausible de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre de liberté pour la durée de la session parlementaire (Constit. du
une infraction ne peut être retenue que le temps nécessaire à 4 oct. 1958, art. 26). La violation de ces règles entraîne la nullité
son audition » (C. pr. pén., art. 153, al. 2). Ce texte, qui pro- des opérations (Crim. 17 juin 1986, Bull. crim. no 208. – Crim.
hibe la garde à vue des simples témoins, est issu de la loi du 10 oct. 1988, ibid. no 334).
15 juin 2000. L’officier de police judiciaire peut, pour l’exécution
d’une commission rogatoire, placer en garde à vue uniquement 158. Président de la République. — Le Président de la Répu-
une personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs blique ne peut pas être placé en garde à vue ni même enten-
raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de du comme témoin. Il n’est pas possible de le poursuivre pour
commettre une infraction (C. pr. pén., art. 154, al. 1er). La termi- des actes commis antérieurement à son entrée en fonction pen-
nologie de « raison plausible » est inspirée de la procédure ac- dant le temps de son mandat (Cons. const. 22 janv. 1999,
cusatoire et plus précisément de l’article 5, c) de la Convention no 98-408 DC, JO 24 janv. – Cass., ass. plén., 10 oct. 2001,
européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des liber- no 01-84.922, Bull. ass. plén., no 11 ; BICC 15 nov. 2001, concl.
tés fondamentales. de Gouttes, rapp. Roman ; D. 2002. 237 ; D. 2002. 674, note
Pradel. – GUIDICELLI, RSC 1999. 614 ; RSC 2002. 624. – FA-
153. Prestation de serment de la personne en garde à vue, en- VOREU, Le statut pénal du chef de l’État, D. 2003. 430 ; La Cour
tendue sur commission rogatoire. — L’article 153 du code de de cassation, le Conseil constitutionnel et la responsabilité pé-
procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 9 mars nale du président de la République, D. 2001. Chron. 3365. –
2004, dispose que « l’obligation de prêter serment et de déposer HAMON, À propos du statut pénal du chef de l’État : conver-
n’est pas applicable aux personnes gardées à vue en applica- gences et divergences entre le Conseil constitutionnel et la Cour
tion des dispositions de l’article 154. Le fait que les personnes de cassation, RSC 2002. 59).
gardées à vue aient été entendues après avoir prêté serment ne
constitue toutefois pas une cause de nullité de la procédure ». ART. 2. – FORMALITÉS RELATIVES AU PLACEMENT EN GARDE À VUE
C’est le principe contraire qu’avait adopté la chambre criminelle
en estimant, après que la garde à vue du simple témoin sur com- 159. Dispositions applicables sur commission rogatoire. —
mission rogatoire n’a plus été possible, « qu’il résulte des dispo- L’ensemble du texte nouveau relatif à la garde à vue est écrit
sitions combinées des articles 105, 113-1, 153 et 154 du code pour l’enquête préliminaire et de flagrance. L’article 154 est
de procédure pénale, qui ne sont pas contraires à l’article 6 de la désormais rédigé par simple renvoi : « Les dispositions des
Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, articles 62-2 à 64-1 relatives à la garde à vue sont applicables
qu’une personne placée en garde à vue sur commission roga- lors de l’exécution des commissions rogatoires. Les attributions
toire du juge d’instruction est entendue comme témoin après conférées au procureur de la République par ces articles sont
avoir prêté le serment prévu par la loi, dès lors qu’il n’existe pas à alors exercées par le juge d’instruction. Lors de la délivrance de
son encontre des indices graves et concordants d’avoir participé l’information prévue à l’article 63-1, il est précisé que la garde
aux faits dont le juge d’instruction est saisi ou qu’elle n’est pas à vue intervient dans le cadre d’une commission rogatoire. » La
garde à vue sur commission rogatoire ne possède donc plus le magistrat instructeur, par tout moyen, du placement de la
aucune spécificité. personne en garde à vue. Il lui donne connaissance des motifs
justifiant, en application de l’article 62-2, ce placement, et l’avise
160. Le placement en garde à vue est conditionné à l’exis- de la qualification des faits qu’il a notifiée à la personne en ap-
tence d’une peine d’emprisonnement. — Cette condition n’était plication du 2o de l’article 63-1. Le magistrat peut modifier cette
visée que par les articles 63 et 67 du code de procédure pénale, qualification ; dans ce cas, la nouvelle qualification est notifiée à
c’est-à-dire dans le cadre de l’enquête de flagrance. Il en est la personne dans les conditions prévues au même article 63-1,
désormais de même dans le cadre de l’enquête préliminaire et c’est-à-dire par l’établissement d’un nouveau procès-verbal le
dans le cadre de l’instruction préparatoire. précisant ou complétant le précédent.
161. Placement en garde à vue. Prérogative de l’OPJ. — La 164. Contrôle de la garde à vue. — L’article 62-3 du code de
décision de placement en garde à vue est traditionnellement une procédure pénale prévoit que la garde à vue s’exécute sous le
prérogative de l’officier de police judiciaire. Les agents de police contrôle du procureur de la République. Le procureur de la Ré-
judiciaire n’ont pas qualité pour décider des mesures de garde publique apprécie si le maintien de la personne en garde à vue
à vue (C. pr. pén., art. 20). Le placement en garde à vue peut et, le cas échéant, la prolongation de cette mesure sont néces-
concerner toute personne à l’exception des diplomates étrangers saires à l’enquête et proportionnés à la gravité des faits que
et des parlementaires. Des dispositions particulières concernent la personne est soupçonnée d’avoir commis ou tenté de com-
le mineur (V. infra, nos 212, 222 et 231). La loi du 14 avril 2011 mettre. Il assure la sauvegarde des droits reconnus par la loi à
ajoute que la décision peut également être prise par le procureur la personne gardée à vue. Il peut ordonner à tout moment que
de la République. la personne gardée à vue soit présentée devant lui ou remise en
liberté. Cet article introduit la notion de proportionnalité entre le
162. Objectifs de la garde à vue. — Si le placement en garde maintien en garde à vue, terminologie adaptée puisque la prise
à vue est toujours une prérogative de l’OPJ, il doit désormais de décision est celle de l’OPJ, précision apportée par l’article 63,
répondre à certains objectifs. Les nouveaux articles 62-2 et ou la prolongation de la garde à vue et la gravité des faits. La
62-3 du code de procédure pénale ont pour but de souligner garde à vue sur commission rogatoire s’exécute, quant à elle,
les conditions de placement en garde à vue mais aussi les ob- sous le contrôle du magistrat instructeur, bien que le texte soit
jectifs de celle-ci, ce qui est un élément totalement nouveau. taisant sur ce point. Le contrôle du magistrat porte aussi sur
L’article 62-2 dispose que « La garde à vue est une mesure de la qualification donnée aux faits par l’officier de police judiciaire.
contrainte décidée par un officier de police judiciaire, sous le En effet, on sait qu’il existe des régimes particuliers touchant à
contrôle de l’autorité judiciaire, par laquelle une personne à l’en- l’entretien avec l’avocat ou les possibilités étendues de prolon-
contre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles gation de la garde à vue, selon la qualification de l’infraction. La
de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre un crime multiplication de ces régimes dérogatoires dans la loi du 9 mars
ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement est maintenue à 2004, et l’utilisation de la notion de « bande organisée », rend ce
la disposition des enquêteurs ». « Cette mesure doit constituer contrôle encore plus nécessaire (V. infra, nos 213 et 214).
l’unique moyen de parvenir à l’un au moins des objectifs sui-
vants : « 1o Permettre l’exécution des investigations impliquant la 165. Mandat de recherche et garde à vue. — La loi du 9 mars
présence ou la participation de la personne ; « 2o Garantir la pré- 2004 a créé une exception à la prérogative traditionnelle de l’of-
sentation de la personne devant le procureur de la République ficier de police judiciaire, en créant un nouveau mandat nommé
afin que ce magistrat puisse apprécier la suite à donner à l’en- « mandat de recherche », qui peut être décerné aussi bien par le
quête ; « 3o Empêcher que la personne ne modifie les preuves ministère public, dans le cadre de l’enquête de flagrance (C. pr.
ou indices matériels ; « 4o Empêcher que la personne ne fasse pén., art. 70) ou préliminaire (art. 77-4), que par le juge d’ins-
pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur fa- truction (art. 122). La définition du mandat de recherche est in-
mille ou leurs proches ; « 5o Empêcher que la personne ne se cluse dans la section du code de procédure pénale consacrée
concerte avec d’autres personnes susceptibles d’être ses coau- aux mandats et à leur exécution : le mandat de recherche peut
teurs ou complices ; « 6o Garantir la mise en œuvre des mesures être décerné à l’égard d’une personne à l’encontre de laquelle il
destinées à faire cesser le crime ou le délit ». Le caractère très existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle
étendu de cette liste, dont on remarque que certains des critères a commis ou tenté de commettre une infraction. L’article 135-1
seront à peu près identiques lorsqu’il s’agira de décider du place- précise que « la personne découverte en vertu d’un mandat de
ment d’une personne en détention provisoire, ne permet pas de recherche est placée en garde à vue par l’officier de police judi-
penser que ces critères auront une quelconque incidence sur le ciaire du lieu de la découverte, suivant les modalités prévues à
nombre des placements en garde à vue. Le 2o est à cet égard si- l’article 154 ». L’article 70 précise, quant à lui, que la personne
gnificatif : le placement en garde à vue peut ne pas avoir d’autre découverte en vertu de ce mandat est placée en garde à vue
objectif que de garantir la personne à disposition du parquet… par l’officier de police judiciaire du lieu de la découverte qui peut
Il convient toutefois de souligner que l’officier de police judiciaire procéder à son audition, sans préjudice de l’application de l’ar-
doit informer le procureur de la République des motifs justifiant la ticle 43 et de la possibilité pour les enquêteurs déjà saisis des
garde à vue et que la prolongation ne peut être ordonnée qu’en faits de se transporter sur place afin d’y procéder eux-mêmes,
visant l’un au moins des objectifs énoncés. après avoir si nécessaire bénéficié d’une extension de compé-
tence conformément à l’article 18, alinéa 4. Dans chacun de ces
163. Information du magistrat par l’officier de police judiciaire. — cas, l’officier de police judiciaire place en garde à vue parce que
Le régime de l’information du placement en garde à vue par la loi l’y contraint (sur le mandat de recherche V. Mandats, et
l’officier de police judiciaire au juge d’instruction a subi de CHAMBON et GUÉRY, op. cit., no 122.41 s.).
nombreuses modifications ; successivement, l’avertissement a
dû être donné « sans délai », puis « immédiatement », avant que 166. Registre de garde à vue. — Les mentions et émargements
la loi du 9 mars 2004 prévoit qu’il pouvait être donné, « sauf en prévus par l’alinéa 1er de l’article 64 du code de procédure pénale
cas de circonstance insurmontable, dans les meilleurs délais » et qui concernent les dates et heures de début et de fin de garde
(C. pr. pén., art. 154, al. 1er), formulation maintenue par la à vue, les repos et la durée des auditions doivent figurer sur un
loi du 14 avril 2011. Dès le début de la mesure, l’officier de registre spécial tenu à cet effet dans les locaux de police ou de
police judiciaire informe donc le procureur de la République ou gendarmerie (C. pr. pén., art. 65).
167. Procès-verbal. — Le procès-verbal rendant compte de la 170. Des sanctions pénales sont attachées à la divulgation
garde à vue doit comporter, aux termes du nouvel article 64 du de ces enregistrements. À l’expiration d’un délai de cinq ans à
code de procédure pénale, les mentions suivantes : compter de la date de l’extinction de l’action publique, l’enre-
« 1o Les motifs justifiant le placement en garde à vue, conformé- gistrement est détruit dans le délai d’un mois. La jurisprudence
ment aux 1o à 6o de l’article 62-2 ; antérieure, prise dans le cadre de l’obligation de l’enregistre-
« 2o La durée des auditions de la personne gardée à vue et des ment audiovisuel des interrogatoires des mineurs placés en
repos qui ont séparé ces auditions, les heures auxquelles elle garde à vue est transposable à cette exigence. Or, le défaut
a pu s’alimenter, le jour et l’heure à partir desquels elle a été d’enregistrement audiovisuel des interrogatoires d’un mineur
gardée à vue, ainsi que le jour et l’heure à partir desquels elle a placé en garde à vue, non justifié par un obstacle insurmon-
été soit libérée, soit déférée devant le magistrat compétent ; table porte nécessairement atteinte aux intérêts de ce mineur.
« 3o Le cas échéant, les auditions de la personne gardée à vue L’impossibilité, avancée par les fonctionnaires de police, de
effectuées dans une autre procédure pendant la durée de la réaliser l’enregistrement audiovisuel de ce mineur en raison
garde à vue ; d’un « problème informatique », ne suffit pas, en l’absence de
« 4o Les informations données et les demandes faites en appli- toute autre précision, à caractériser la cause insurmontable
cation des articles 63-2 à 63-3-1 et les suites qui leur ont été qui justifierait l’omission de procéder à un tel enregistrement
données ; (Crim. 3 avr. 2007, no 06-87.264, Bull. crim. no 104 ; Gaz. Pal.
« 5o S’il a été procédé à une fouille intégrale ou à des investiga- 29 août/1er sept. 2007. 8, note Gagnoud ; JCP 2007. II. 10132,
tions corporelles internes. note Maréchal ; Dr. pénal 2007, no 109, note Maron ; D. 2007.
« Ces mentions doivent être spécialement émargées par la per- Études 2141, note Pradel ; AJ pénal 2007. 287, note Royer. –
sonne gardée à vue. En cas de refus, il en est fait mention. Crim. 12 juin 2007, no 07-80.194, Bull. crim. no 155 ; D. 2007.
Certaines des mentions figurant dans ce procès-verbal doivent AJ 1960 ; JCP 2007. IV. 2524). L’impossibilité technique de
également figurer dans un registre spécial : il en est ainsi des procéder à l’interrogatoire filmé des mineurs placés en garde
mentions relatives aux dates et heures du début et de fin de à vue, doit faire l’objet d’une mention dans le procès-verbal
garde à vue et de la durée des auditions et repos mais égale- d’interrogatoire lui-même et être porté immédiatement à la
ment des cas où des fouilles intégrales et investigations corpo- connaissance du procureur de la République ou du juge d’ins-
relles ont été réalisées. Ce registre peut être tenu sous forme truction (Crim. 26 mars 2008, no 07-88.554, Bull. crim. no 77 ;
dématérialisée. Dr. pénal 2008. Comm. 119, note Maron et Haas ; AJ pénal
2008. 287, obs. Royer). L’obligation d’enregistrement des
168. Enregistrement audiovisuel de certains interrogatoires : interrogatoires de garde à vue, prévue à l’article 64-1 du code
principe. — La loi du 5 mars 2007 (no 2007-291) a prévu l’obliga- de procédure pénale, n’est applicable qu’en matière criminelle
tion de filmer certains interrogatoires de garde à vue (C. pr. pén., (Crim. 2 déc. 2009, no 09-85.103, Bull. crim. no 201 ; D. 2010.
art. 64-1). Il s’agit de ceux des personnes placées en garde 211 obs Girault ; AJ pénal 2010. 200, obs Duparc).
à vue pour crime lorsqu’ils sont réalisés dans les locaux d’un
service ou d’une unité de police ou de gendarmerie exerçant une 171. Décisions nos 2012-228/229 QPC du Conseil constitution-
mission de police judiciaire. Il est alors tenu compte de la nature nel du 6 avril 2012. — Le Conseil constitutionnel a censuré les
de l’infraction dont est informée la personne conformément septièmes alinéas des articles 64-1 et 116-1 du code de procé-
aux dispositions de l’article 63-1 du code de procédure pénale dure pénale qui dispensaient de l’enregistrement audiovisuel les
(art. D. 15-6 issu du Décr. no 2007-699 du 3 mai 2007). L’enre- auditions ou interrogatoires des personnes mises en cause pour
gistrement ne peut être consulté qu’en cas de contestation du des crimes en matière de criminalité organisée ou d’atteinte aux
contenu du procès-verbal d’interrogatoire, sur décision du juge intérêts fondamentaux de la nation. La censure est à effet im-
d’instruction ou de la juridiction de jugement, à la demande du médiat et concerne donc autant les auditions menées en garde
ministère public ou d’une des parties. Les huit derniers alinéas à vue sur commission rogatoire que les interrogatoires criminels
de l’article 114 ne sont pas applicables. Lorsqu’une partie du magistrat instructeur.
demande la consultation de l’enregistrement, cette demande est
formée et le juge d’instruction statue conformément aux deux 172. Lieu de la garde à vue. — Bien que la jurisprudence ne
premiers alinéas de l’article 82-1. semble pas s’être prononcée sur ce point, il est communément
admis que l’officier de police judiciaire peut transférer une per-
169. Enregistrement audiovisuel de certains interrogatoires : ex- sonne dans des locaux différents de ceux dans lesquels elle est
ceptions. — Trois exceptions à ce principe sont prévues par le retenue tout d’abord.
texte :
– lorsque le nombre de personnes gardées à vue devant être si- 173. Transport du juge d’instruction. — La loi du 9 mars 2004 a
multanément interrogées, au cours de la même procédure ou de complété l’article 152 du code de procédure pénale en prévoyant
procédures distinctes, fait obstacle à l’enregistrement de tous les que le « juge d’instruction peut se transporter, sans être assisté
interrogatoires, l’officier de police judiciaire en réfère sans délai de son greffier ni devoir en dresser procès-verbal, pour diriger
au procureur de la République qui désigne, par décision écrite et contrôler l’exécution de la commission rogatoire, dès lors qu’il
versée au dossier, la ou les personnes dont les interrogatoires ne procède pas lui-même à des actes d’instruction. À l’occasion
ne seront pas enregistrés ; de ce transport, il peut ordonner la prolongation des gardes à
– lorsque l’enregistrement ne peut être effectué en raison d’une vue prononcées dans le cadre de la commission rogatoire. Dans
impossibilité technique, il en est fait mention dans le procès-ver- tous les cas, mention de ce transport est faite sur les pièces
bal d’interrogatoire, qui précise la nature de cette impossibilité. d’exécution de la commission rogatoire. »
Le procureur de la République en est immédiatement avisé ;
– lorsque la personne est gardée à vue pour un crime mentionné 174. Rétention de sûreté. — La loi du 14 avril 2011 édicte que
à l’article 706-73 du code pénal (criminalité organisée) ou prévu « Lorsqu’il est mis fin à la rétention en chambre de sûreté de
par les titres Ier et II du livre IV du code pénal (atteintes aux in- la personne, son placement en garde à vue, si les conditions
térêts de la Nation, terrorisme), sauf si le procureur de la Répu- de cette mesure prévues par le code de procédure pénale sont
blique ordonne l’enregistrement. Le texte omet de mentionner le réunies, n’est pas obligatoire dès lors qu’elle n’est pas tenue
juge d’instruction qui semble pourtant le seul interlocuteur pos- sous la contrainte de demeurer à la disposition des enquêteurs
sible si une information a été ouverte. et qu’elle a été informée qu’elle peut à tout moment quitter les
Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er juin 2008. locaux de police ou de gendarmerie (CSP, art L. 3341-2). Il en
est de même lorsqu’il a été procédé aux épreuves de dépistage 179. Personne en état d’ébriété. — Lorsqu’une personne en
et aux vérifications prévues par les articles L. 234-3 et L. 234-5 état d’ébriété est placée en garde à vue, la notification des droits
(CSP, art. L. 234-18) ou L. 235-2 (art. L. 235-5). ne peut intervenir qu’à partir du moment où la personne est en
mesure d’en comprendre la portée (Crim. 3 avr. 1995, no 94-
175. Retenue douanière. — La loi du 14 avril 2011 a égale- 81.792, Bull. crim. no 140). Pendant le dégrisement, la personne
ment copié les principes de rétention douanière sur les nou- n’est pas placée en garde à vue (Crim. 4 janv. 1996, no 95-
velles dispositions gouvernant la garde à vue (V. C. douanes, 84.330, Bull. crim. no 5. – Crim. 10 mai 2000, no 00-80.865, ibid.
art. 323-1 s.). L’article 323-1 du code des douanes dispose ainsi no 181. – Pour la conformité à la Constitution de l’art. L. 3341-1
que les agents des douanes ne peuvent procéder à l’arrestation CSP, qui permet la retenue d’une personne en état d’ébriété dans
et au placement en retenue douanière d’une personne qu’en cas un local de police ou de gendarmerie jusqu’à ce qu’elle ait recou-
de flagrant délit douanier puni d’une peine d’emprisonnement et vré la raison, V. Cons. const. 8 juin 2012, no 2012-253-QPC).
lorsque cette mesure est justifiée par les nécessités de l’enquête Les officiers de police judiciaire doivent donc se montrer particu-
douanière. lièrement vigilants. Ils ne doivent pas notifier la garde à vue et
les droits y afférents trop tôt sous peine de voir soulevée une ir-
ART. 3. – DROITS DE LA PERSONNE PLACÉE EN GARDE À VUE régularité touchant à l’incapacité de la personne de comprendre
le sens de la mesure. D’un autre côté, ils ne doivent pas non
§ 1er. – Dispositions applicables avant la loi du 14 avril 2011 plus la notifier trop tard, sous peine de voir soulevée l’absence
de notification immédiate. En tout état de cause, la durée de la
176. Droits anciens, droits nouveaux. — Les droits de la per- retenue doit être prise en compte (Const. const. 8 juin 2012,
sonne gardée à vue ont été considérablement accrus par la loi préc.).
du 14 avril 2011. Il convient donc de différencier les droits plus
anciens, acquis avant 2011, et la jurisprudence intervenue dans 180. Atteinte aux intérêts de la partie : nullité. — Le retard in-
ce cadre, des dispositions nouvelles. justifié dans la notification des droits porte nécessairement at-
teinte aux intérêts de la partie qu’elle concerne (Crim. 30 avr.
177. Information. — Le gardé à vue doit être immédiatement 1996, no 95-82.217, Bull. crim. no 182. – Crim. 29 avr. 1998,
informé de ses droits : droit de faire prévenir un proche ; droit no 98-80.121, ibid. no 145. – Crim. 14 déc. 1999, no 99-84.148,
à un examen médical ; droit à s’entretenir avec un avocat. La ibid. no 302). C’est le cas lorsque les droits sont notifiés à l’is-
mention de l’avis est portée au procès-verbal et émargée par la sue d’une perquisition alors que la personne avait été placée en
personne gardée à vue ; en cas de refus d’émargement, il en garde à vue avant qu’elle ne commence (Crim. 18 juin 1998,
est fait mention. Depuis la loi du 15 juin 2000, la personne est no 98-81.369, Bull. crim. no 200. – Crim. 10 mai 2000, no 00-
informée de la nature de l’infraction sur laquelle porte l’enquête. 81.201, ibid. no 182. – Mais V. supra, no 144). De même, lors-
qu’une personne est retenue par un officier de police judiciaire
178. Notification tardive. — La notification n’est pas tardive dès
pour être entendue, elle doit être considérée comme ayant été
lors qu’il résulte notamment des mentions contenues dans un
mise en garde à vue, même si celle-ci ne lui a pas été notifiée
procès-verbal signé de l’intéressé que, dès le début de la me-
(Crim. 10 mai 2000, no 00-81.201, préc.). Elle doit être informée
sure de garde à vue, il a été informé de ce droit (Crim. 9 févr.
immédiatement de ses droits (Crim. 11 oct. 2000, no 00-82.238,
2000, no 99-87.659, Bull. crim. no 64). Le procès-verbal doit être
Bull. crim. no 296 ; Dr. pénal 2000. Comm. 13, obs. Maron).
rédigé sur-le-champ mais l’irrégularité consistant à ne consigner
cette notification qu’ultérieurement ne peut entraîner la nullité 181. Langue comprise. — Les informations doivent être commu-
des actes effectués pendant la mesure lorsqu’il est établi que niquées à la personne dans une langue qu’elle comprend (Crim.
cette personne a eu effectivement connaissance de ses droits 11 févr. 1998, no 97-85.542, Bull. crim. no 55). Il suffit que la per-
dès le début de la mesure (Crim. 21 mars 2000, no 99-87.632, sonne puisse comprendre les droits qui lui sont notifiés, il n’est
Bull. crim. no 127). La chambre criminelle distingue donc la noti- pas nécessaire que l’officier de police judiciaire fasse appel à
fication effective des droits, qui doit être immédiate, de la consi- un interprète assermenté (Crim. 26 mai 1999, nos 99-81.457 et
gnation au procès-verbal, qui peut être plus tardive s’il existe au 98-84.997, Bull. crim. no 105). La pratique a développé la re-
dossier la mention que la notification a bien été immédiate. Peu mise d’imprimés dans les langues les moins courantes. Cette
importe par ailleurs que, dans l’intérêt de la personne gardée à pratique a été codifiée par un ajout à l’article 63-1 du code de
vue, on ait fait rétroagir le point de départ de la garde à vue à procédure pénale, issu de la loi du 9 mars 2004, qui dispose dé-
un moment où la personne était entendue sans contrainte, dès sormais que « les informations mentionnées au premier alinéa
lors que la notification des droits est intervenue dès le place- doivent être communiquées à la personne gardée à vue dans
ment effectif en garde à vue (Crim. 19 janv. 2000, no 99-86.090, une langue qu’elle comprend, le cas échéant au moyen de for-
Bull. crim. no 33). La rédaction d’un procès-verbal spécifique mulaires écrits. »
n’est pas indispensable, tout acte de procédure pouvant ser-
vir à établir l’accomplissement de la formalité (Crim. 24 oct. 182. Droit au silence. — La loi du 15 juin 2000 avait instauré un
2000, no 00-85.407, Bull. crim. no 306. – Crim. 19 déc. 2000, droit au silence : la personne devait être informée de son droit
no 00-86.715, ibid. no 383). L’impossibilité de joindre un inter- de ne pas répondre aux questions des enquêteurs (C. pr. pén.,
prète peut être une justification de l’absence de notification im- art. 63-1). Cette disposition a été abrogée par la loi du 18 mars
médiate des droits. Mais la Cour de cassation se livre à une 2003 (V. Aveu et Défense pénale). Elle a été reprise par celle du
étude concrète des cas qui lui sont soumis. Ainsi, elle a esti- 14 avril 2011 (V. infra, no 188).
mé injustifié un délai de seize heures résultant de l’impossibilité
de joindre l’interprète en langue arabe auquel recourt habituel- 183. Droit d’informer un proche. — La personne placée en garde
lement le service de police (Crim. 3 déc. 1996, no 96-84.503, à vue peut faire prévenir un tiers de la mesure dont elle fait l’ob-
Bull. crim. no 443). Depuis l’entrée en vigueur de la loi du jet. Les personnes qui peuvent être avisées sont celles avec les-
4 mars 2002, sauf en cas de circonstances insurmontables, les quelles la personne « vit habituellement ou l’un de ses parents
diligences résultant pour les enquêteurs de la communication en ligne directe, l’un de ses frères et sœurs ou son employeur »
des droits mentionnés aux articles 63-2 et 63-3 (avec un proche (C. pr. pén., art. 63-2). Lorsqu’un officier de police judiciaire es-
et un médecin) doivent intervenir au plus tard dans un délai de time, en raison des nécessités de l’enquête, qu’il ne doit pas faire
trois heures à compter du moment où la personne a été placée droit à la demande du gardé à vue, il en réfère sans délai au juge
en garde à vue. d’instruction. Ce dernier décide s’il y a lieu d’y faire droit.
184. Droit à un examen médical. — La personne gardée à vue « 1o De son placement en garde à vue ainsi que de la durée de
a le droit d’être examinée par un médecin au cours de la garde la mesure et de la ou des prolongations dont celle-ci peut faire
à vue (C. pr. pén., art. 63-3). En cas de prolongation de la garde l’objet ;
à vue, un second examen est possible. Le juge d’instruction ou « 2o De la nature et de la date présumée de l’infraction qu’elle est
l’officier de police judiciaire peut aussi désigner d’office un méde- soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre ;
cin. Il est de droit si un membre de la famille en fait la demande. « 3o Du fait qu’elle bénéficie :
Le certificat médical dans lequel le médecin se prononce sur l’ap- « – du droit de faire prévenir un proche et son employeur, confor-
titude de la personne à demeurer en garde à vue est versé au mément à l’article 63-2 ;
dossier de la procédure. « – du droit d’être examinée par un médecin, conformément à
l’article 63-3 ;
185. Droit à un entretien avec un avocat. — (V. Défense pénale). « – du droit d’être assistée par un avocat, conformément aux
Depuis les lois de 1993, l’avocat a fait son entrée, au départ ti- articles 63-3-1 à 63-4-3 ;
mide, dans les locaux de garde à vue. Il peut s’entretenir avec « – du droit, lors des auditions, après avoir décliné son identité,
son client pendant une durée maximum de trente minutes mais de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont
il n’a pas accès à la procédure. À défaut de choix par l’intéres- posées ou de se taire.
sé, ou si cet avocat ne peut être contacté, la personne gardée « Si la personne est atteinte de surdité et qu’elle ne sait ni lire,
à vue peut demander à rencontrer un avocat commis d’office, ni écrire, elle doit être assistée par un interprète en langue des
désigné par le bâtonnier de l’ordre qui en est informé sans dé- signes ou par toute personne qualifiée maîtrisant un langage
lai. L’entretien se déroule dans des conditions qui garantissent ou une méthode permettant de communiquer avec elle. Il peut
la confidentialité. L’avocat peut, le cas échéant, présenter des également être recouru à tout dispositif technique permettant de
observations écrites qui sont jointes à la procédure. Avant la communiquer avec une personne atteinte de surdité.
loi du 9 mars 2004, sauf régime particulier, un premier entretien « Si la personne ne comprend pas le français, ses droits doivent
pouvait intervenir dès le début de la garde à vue, et le deuxième lui être notifiés par un interprète, le cas échéant après qu’un for-
à la vingtième heure. Un troisième entretien pouvait avoir lieu à mulaire lui a été remis pour son information immédiate.
la trente-sixième heure si une prolongation de garde à vue avait « Mention de l’information donnée en application du présent ar-
été ordonnée. La loi du 9 mars 2004 a modifié le texte de l’ar- ticle est portée au procès-verbal de déroulement de la garde à
ticle 63-4. Si la possibilité de l’entretien « dès le début de la garde vue et émargée par la personne gardée à vue. En cas de refus
à vue » subsiste (C. pr. pén., art. 63-4, al. 1er), en revanche, d’émargement, il en est fait mention. » La personne doit désor-
l’entretien de la vingtième heure est remplacé par un entretien mais être informée « immédiatement » de la nature et de la date
à partir de la fin de la vingt-quatrième. L’article 63-4, alinéa 6, de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tenté
est ainsi libellé : « Lorsque la garde à vue fait l’objet d’une pro- de commettre, ce qui est une nouveauté. De nombreux avocats
longation, la personne peut également demander à s’entretenir faisaient en effet valoir que leurs clients avaient été retenus un
avec un avocat dès le début de la prolongation dans les condi- certain temps sans même avoir été informés des raisons réelles
tions et selon les modalités prévues aux alinéas précédents. » de leur présence.
L’alinéa suivant prévoit les cas de prolongations exceptionnelles
(V. infra, nos 177 s.). Sur le régime depuis la loi du 14 avril 2011, 189. Avertissements. — Le nouveau texte a élargi le champ des
V. infra, nos 190 s. personnes qui peuvent être prévenues, à la demande du gar-
dé à vue. Il en est désormais ainsi s’agissant des parents, de
186. Obligation de l’officier de police judiciaire de prévenir l’avo- l’employeur, du curateur ou du tuteur (C. pr. pén., art. 63-2) ou
cat. — A satisfait à l’obligation que lui impose le texte l’officier de encore du médecin (art. 63-3) dans les trois heures à compter
police judiciaire qui a téléphoné vainement à plusieurs reprises du moment où la personne a formulé la demande, sauf en cas
au numéro du service de garde institué par le barreau intéres- de circonstance insurmontable. Sauf décision contraire du mé-
sé sans pouvoir obtenir d’interlocuteur (Crim. 9 mai 1994, no 94- decin, l’examen médical doit être pratiqué à l’abri du regard et de
80.802, Bull. crim. no 174. – Crim. 13 févr. 1996, no 95-85.676, toute écoute extérieure afin de permettre le respect de la digni-
ibid. no 73 ; D. 1996. Somm. 260, note Pradel). té et du secret professionnel. La personne peut donc désormais
faire prévenir, en sus d’un membre de sa famille, son employeur.
187. Transcription contre la volonté de la personne entendue. — La personne de nationalité étrangère peut demander à ce que les
La chambre criminelle estime que le procédé, assez usuel, autorités consulaires du pays dont elle est ressortissante soient
consistant pour un officier de police judiciaire à retranscrire avisées de cette mesure (C. pr. pén, art. 63-2).
dans un procès-verbal particulier, ou dans son procès-verbal de
synthèse, les propos tenus en off par un gardé à vue, et qu’il n’a
190. Droit à être assisté par un avocat. — L’article 63-3-1 dis-
pas voulu consigner, ne peut être admis et qu’encourt la censure
pose : « Dès le début de la garde à vue, la personne peut deman-
l’arrêt qui refuse d’annuler un procès-verbal reproduisant des
der à être assistée par un avocat. Si elle n’est pas en mesure
déclarations verbales que la personne gardée à vue n’a pas
d’en désigner un ou si l’avocat choisi ne peut être contacté, elle
voulu voir consignées dans le procès-verbal de son audition
peut demander qu’il lui en soit commis un d’office par le bâton-
(Crim. 3 avr. 2007, no 07-80.807, Bull. crim. no 102 ; D. 2007.
nier. Le bâtonnier ou l’avocat de permanence commis d’office
AJ 1422, obs. Caron et Menotti).
par le bâtonnier est informé de cette demande par tous moyens
et sans délai. L’avocat peut également être désigné par la ou les
§ 2. – Dispositions applicables personnes prévenues en application du premier alinéa de l’ar-
depuis l’entrée en vigueur de la loi du 14 avril 2011 ticle 63-2. Cette désignation doit toutefois être confirmée par la
personne. » Cette dernière précision devrait mettre fin à des pra-
tiques divergentes, certains magistrats instructeurs acceptant la
188. Information des droits. — L’article 63-1 du code de procé-
désignation d’un avocat par la famille, les autres non (en dehors
dure pénale dispose que « La personne placée en garde à vue
du cas des mineurs).
est immédiatement informée par un officier de police judiciaire
ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire,
dans une langue qu’elle comprend, le cas échéant au moyen de 191. Droits des avocats : information sur la nature et la date
formulaires écrits : des faits. — Aux termes de l’article 63-3-1, l’avocat désigné est
informé par l’officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de expressément d’une extension aux situations d’avant procès (à
celui-ci, par un agent de police judiciaire de la nature et de la l’exception de son extension aux cas de l’art. 5-4 qui est relatif
date présumée de l’infraction sur laquelle porte l’enquête. S’il aux droits de faire un recours juridictionnel sur la légalité de la dé-
constate un conflit d’intérêts, l’avocat fait demander la désigna- tention, hypothèse qui suppose une personne en détention pro-
tion d’un autre avocat. En cas de divergence d’appréciation entre visoire). Ainsi, dans l’arrêt Svipsta contre Lettonie (CEDH 9 mars
l’avocat et l’officier de police judiciaire ou le procureur de la Ré- 2006, req. no 66820/01, § 137) « la Cour reconnaît la nécessité
publique sur l’existence d’un conflit d’intérêts, l’officier de police d’une conduite efficace des enquêtes pénales, ce qui peut impli-
judiciaire ou le procureur de la République saisit le bâtonnier quer qu’une partie des informations recueillies durant ces inves-
qui peut désigner un autre défenseur. Le procureur de la Répu- tigations doivent être gardées secrètes afin d’empêcher les ac-
blique, d’office ou saisi par l’officier de police judiciaire ou l’agent cusés d’altérer les preuves et de nuire à la bonne administration
de police judiciaire, peut également saisir le bâtonnier afin qu’il de la justice […] toutefois ce but légitime ne saurait être pour-
soit désigné plusieurs avocats lorsqu’il est nécessaire de procé- suivi au prix de restrictions importantes apportées aux droits de
der à l’audition simultanée de plusieurs personnes placées en la défense. » En conséquence, un accès à tout le dossier n’est
garde à vue ». L’une des conséquences de la possibilité pour nullement imposé par la Cour lorsque l’on se trouve au stade de
l’avocat de demeurer avec son client tout au long des interroga- l’enquête ou de l’instruction préparatoire.
toires de garde à vue est de rendre impossible l’assistance de
plusieurs personnes en même temps ! Cela n’empêche pas la 195. Consultation des pièces de la procédure : décision du
désignation du même avocat par plusieurs personnes gardées Conseil constitutionnel. — Le Conseil constitutionnel a été saisi
à vue dans la même affaire, mais nécessite alors que le conseil les 23 août et 9 septembre 2011 par le Conseil d’État et la Cour
se fasse substituer pendant certaines des auditions. de cassation, dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la
Constitution, de questions prioritaires de constitutionnalité. Ces
192. Droits des avocats : s’entretenir avec le client. — La durée questions étaient relatives à la conformité aux droits et libertés
de l’entretien entre la personne et son avocat n’a pas changé. que la Constitution garantit des articles 62, 63-3-1, alinéa 3,
Elle est toujours de trente minutes, aux termes de l’article 63-4 63-4, alinéa 2, 63-4-1 à 63-4-5 du code de procédure pénale.
du code de procédure pénale, puis de trente minutes encore en Le Conseil constitutionnel a rendu le 18 novembre 2011 sa déci-
cas de prolongation. sion (Cons. const. 18 nov. 2011, no 2011-191/194/195/196/197
QPC, JO 19 nov., JCP 2011. 1452, note Pradel ; Dr. pénal 2012,
193. Droits des avocats : consultation de pièces de la procé- no 1, Étude 4, note Leroy ; D. 2011. 3034, note Matsopoulou ;
dure. — C’est ici l’une des nouveautés les plus marquantes et D. 2011. 3005, point de vue Vergès ; AJ pénal 2012. 102, obs.
en même temps la plus controversée. L’avocat peut en effet Perrier ; RSC 2012. 217, note de Lamy) et a déclaré conformes
consulter le procès-verbal établi en application du dernier ali- à la Constitution tous les articles soumis à son contrôle : « Les
néa de l’article 63-1 constatant la notification du placement en dispositions contestées n’ont pas pour objet de permettre la
garde à vue et des droits y étant attachés, le certificat médical discussion de la légalité des actes d’enquête ou du bien-fondé
établi en application de l’article 63-3, ainsi que les procès-ver- des éléments de preuve rassemblés par les enquêteurs, qui
baux d’audition de la personne qu’il assiste. Il ne peut en de- n’ont pas donné lieu à une décision de poursuite de l’autorité
mander ou en réaliser une copie. Il peut toutefois prendre des judiciaire et qui ont vocation, le cas échéant, à être discutés
notes. En soi, cette information est donc beaucoup plus com- devant les juridictions d’instruction et de jugement. » Les restric-
plète qu’elle ne l’était avant la loi du 14 avril 2011 puisque l’avo- tions apportées par la loi du 14 avril 2011 aux droits nouveaux
cat n’avait droit à aucune consultation de pièces… Toutefois, qu’elle met en œuvre assurent une « conciliation, qui n’est
l’énumération par le texte des pièces consultables ne l’autorise pas déséquilibrée, entre le respect des droits de la défense et
pas à prendre connaissance des procès-verbaux des autres per- l’objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs
sonnes concernées par l’affaire, qu’il s’agisse des témoins en- d’infractions ». En l’état, les dispositions en cause n’appa-
tendus auparavant, des personnes en garde à vue en même raissent donc ni contraires à la Constitution, ni contraires à la
temps que le client, etc. Bien que de nombreuses voix se soient Convention. Toutefois, en juin 2011, la Commission européenne
fait entendre pour réclamer un accès plus complet (V. not. NIO- a déposé une proposition de directive relative au droit d’accès à
RÉ, Nouvelle garde à vue : sœur jumelle de la détention provi- un avocat dans le cadre des procédures pénales (COM[2011]
soire à la discrétion de l’OPJ sous le contrôle du parquet tout 326) allant beaucoup plus loin que la réglementation française
puissant, Gaz. Pal. 10-12 avr. 2011, p. 17. – FAYOLLE et PER- actuelle mais aussi que celles de pays anglo-saxons comme
RIER, Regards croisés sur la réforme de la garde à vue, un projet le Royaume-Uni et l’Irlande (V. BARBE, L’influence du droit de
insuffisant et des attentes insatisfaites, Gaz. Pal. 6-8 févr. 2011, l’Union européenne sur le droit pénal français : de l’ombre à la
p. 8), il n’apparaît pas qu’une telle consultation soit possible. Elle lumière, AJ pénal 2011. 438). Le débat est donc loin d’être clos.
n’est d’ailleurs nullement imposée par la Convention.
196. Droits des avocats : assistance aux auditions et confron-
194. Consultation des pièces de la procédure : CEDH. — L’arrêt tations. — Selon l’article 63-4-2, la personne gardée à vue peut
Danayan c/ Turquie du 13 octobre 2009 dispose que « l’équité demander que l’avocat assiste à ses auditions et confrontations.
de la procédure requiert que l’accusé puisse obtenir toute la Dans ce cas, la première audition, sauf si elle porte uniquement
vaste gamme d’interventions qui sont propres au conseil. À cet sur les éléments d’identité, ne peut débuter sans la présence de
égard, la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la l’avocat choisi ou commis d’office avant l’expiration d’un délai de
recherche des preuves favorables à l’accusé, la préparation des deux heures suivant l’avis adressé dans les conditions prévues
interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse et le contrôle à l’article 63-3-1 de la demande formulée par la personne gar-
des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de dée à vue d’être assistée par un avocat. Au cours des auditions
la défense que l’avocat doit librement exercer. » L’arrêt ne fait pas ou confrontations, l’avocat peut prendre des notes. Si l’avocat
allusion à la consultation du dossier. En fait, la communication se présente après l’expiration du délai prévu au premier alinéa
des pièces à ce stade relève non de l’article 6 de la Convention, alors qu’une audition ou une confrontation est en cours, celle-ci
mais de l’article 5. Or, si la Cour européenne a étendu certains est interrompue à la demande de la personne gardée à vue afin
des principes posés par l’article 6, elle s’est gardée d’étendre de lui permettre de s’entretenir avec son avocat dans les condi-
à l’avant procès la totalité des dispositions de l’article 6. L’ar- tions prévues à l’article 63-4 et que celui-ci prenne connaissance
ticle 6.3.b, prévoyant le droit de disposer du temps et des facilités des documents prévus à l’article 63-4-1. Si la personne gardée
nécessaires à la préparation de sa défense n’a jamais fait l’objet à vue ne demande pas à s’entretenir avec son avocat, celui-ci
peut assister à l’audition en cours dès son arrivée dans les lo- 23 mai 2011 confirme l’interprétation proposée dans le cadre de
caux du service de police judiciaire ou à la confrontation. » Le celle du 15 avril (no III.5.3.2).
délai de deux heures part à compter de l’avis adressé par les
enquêteurs c’est-à-dire de l’appel téléphonique passé à l’avocat 198. Dérogation à l’attente de l’avocat pendant deux heures. —
choisi ou de permanence. Le rédacteur du procès-verbal doit L’article 63-4-1 dispose que lorsque les nécessités de l’enquête
donc faire figurer la nature de l’avis donné, avec l’identification exigent une audition immédiate de la personne, le procureur de
du numéro de téléphone appelé, l’horaire, etc. Il existe néan- la République peut autoriser, par décision écrite et motivée, sur
moins certaines dérogations possibles à l’obligation d’attendre demande de l’officier de police judiciaire, que l’audition débute
pendant deux heures l’arrivée du conseil mais aussi au droit d’as- sans attendre l’expiration du délai prévu au premier alinéa. Il
sister aux auditions. s’agit donc ici d’une dérogation à l’obligation d’attendre l’expi-
ration du délai de deux heures à compter de la notification des
droits. La décision doit être écrite et motivée.
197. Dérogation au droit d’assister aux auditions. — À titre ex-
ceptionnel, sur demande de l’officier de police judiciaire, le pro- 199. Difficultés pratiques. — Il est certain que l’enquêteur n’est
cureur de la République ou le juge des libertés et de la détention, obligé d’attendre le conseil que pour la première audition de la
selon les distinctions prévues par l’alinéa suivant, peut autoriser, personne gardée à vue. Rien ne l’oblige ensuite à attendre à
par décision écrite et motivée, le report de présence de l’avo- nouveau l’avocat pour reprendre une nouvelle audition. Au cas
cat lors des auditions ou confrontations, si cette mesure appa- par cas, les services de police et de gendarmerie informent donc
raît indispensable pour des raisons impérieuses tenant aux cir- les avocats des heures prévisibles auxquelles leurs clients se-
constances particulières de l’enquête, soit pour permettre le bon ront à nouveau entendus. Une nouvelle perquisition fructueuse,
déroulement d’investigations urgentes tendant au recueil ou à des déclarations éclairantes d’un complice, peuvent conduire à
la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte im- une reprise de l’audition de la personne, sans que son avocat
minente aux personnes. Le procureur de la République ne peut en ait forcément été prévenu très longtemps à l’avance. Il s’agit
différer la présence de l’avocat que pendant une durée maximale là de relations non codifiées entre enquêteurs et avocats qui
de douze heures. Lorsque la personne est gardée à vue pour un doivent entretenir des rapports de loyauté. À l’issue de chaque
crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure audition ou confrontation à laquelle il assiste, l’avocat peut po-
ou égale à cinq ans, le juge des libertés et de la détention peut, ser des questions. L’officier ou l’agent de police judiciaire ne
sur requête du procureur de la République, autoriser à différer peut s’opposer aux questions que si celles-ci sont de nature à
la présence de l’avocat, au-delà de la douzième heure, jusqu’à nuire au bon déroulement de l’enquête. Mention de ce refus est
la vingt-quatrième heure. Les autorisations du procureur de la portée au procès-verbal. À l’issue de chaque entretien avec la
République et du juge des libertés et de la détention sont écrites personne gardée à vue et de chaque audition ou confrontation
et motivées par référence aux conditions prévues à l’alinéa pré- à laquelle il a assisté, l’avocat peut présenter des observations
cédent au regard des éléments précis et circonstanciés résultant écrites dans lesquelles il peut consigner les questions refusées
des faits de l’espèce. Le texte précise les raisons limitatives au- en application du deuxième alinéa. Celles-ci sont jointes à la
torisant ce type d’exception : il faut que cette mesure apparaisse procédure. L’avocat peut adresser ses observations, ou copie
indispensable pour des raisons impérieuses tenant aux circons- de celles-ci, au procureur de la République pendant la durée de
tances particulières de l’enquête, soit pour permettre le bon dé- la garde à vue. Enfin, la personne gardée à vue peut à tout mo-
roulement d’investigations urgentes tendant au recueil ou à la ment changer d’avis sur le droit d’être assisté par un conseil : il se
conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte immi- déduit de l’article 6 § 3 de la Convention européenne de sauve-
nente aux personnes. On peut se demander en quoi la présence garde des droits de l’homme et des libertés fondamentales que
d’un avocat à l’audition de son client serait susceptible d’inter- toute personne placée en garde à vue doit pouvoir bénéficier de
dire des investigations urgentes ou de nuire à la conservation l’assistance d’un avocat dès qu’elle en fait la demande (Crim.
des preuves. Selon la circulaire du 15 avril 2011 (no 2.2.1.2.1), 14 déc. 2011, no 11-81.329, Dr. pénal 2012, no 3, comm. 44, par
« le report ne devrait intervenir, en pratique, que dans des hypo- Maron et Haas). La renonciation à l’assistance d’un avocat n’est
thèses tout à fait rarissimes ». Le seul exemple donné au cours jamais définitive. Si elle n’a pas à être renouvelée, elle doit être
des débats parlementaires a été celui d’une personne soupçon- suivie d’effet dès sa formulation.
née d’enlèvement et dont les déclarations doivent être immé-
diatement recueillies pour tenter de retrouver en vie sa victime.
Mais cet exemple apparaît plus en relation avec la possibilité de 200. Criminalité organisée. Renvoi. — Il convient de préciser
procéder à l’audition de la personne avant l’écoulement du délai qu’en droit commun, le report ne peut concerner que la consul-
de deux heures plutôt qu’avec le report de l’accès à un avocat tation des pièces de procédure et la présence de l’avocat aux au-
au cours d’une enquête (V. infra, no 198). Le texte précise égale- ditions. Il en va différemment dans le cadre particulier de la crimi-
ment que lorsque le procureur de la République ou le juge des li- nalité organisée où le report peut également porter sur l’entretien
bertés et de la détention a autorisé à différer la présence de l’avo- de trente minutes dès le début de la mesure (V. infra, no 229).
cat lors des auditions ou confrontations, il peut également, dans
les conditions et selon les modalités prévues par ces mêmes ali- 201. Nouveaux droits de la victime. — Aux termes du nouvel
néas, décider que l’avocat ne peut, pour une durée identique, article 63-4-5 du code de procédure pénale, si la victime est
consulter les procès-verbaux d’audition de la personne gardée à confrontée avec une personne gardée à vue, elle peut deman-
vue. L’article 63-4-2 dispose que lorsque la personne est gardée der à être également assistée par un avocat choisi par elle ou
à vue pour un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonne- par son représentant légal si elle est mineure ou, à sa demande,
ment supérieure ou égale à cinq ans, le juge des libertés et de la désigné par le bâtonnier. La victime est informée de ce droit
détention peut, sur requête du procureur de la République, au- avant qu’il soit procédé à la confrontation. À sa demande, l’avo-
toriser à différer la présence de l’avocat, au-delà de la douzième cat peut consulter les procès-verbaux d’audition de la personne
heure, jusqu’à la vingt-quatrième heure ». Qu’en est-il en ma- qu’il assiste. L’avocat de la victime peut également poser des
tière d’instruction préparatoire ? La chancellerie estime que le questions. Il n’est donc pas nécessaire d’être partie civile pour
renvoi de l’article 154 aux articles 62-2 à 64-1 entraîne la substi- pouvoir bénéficier d’un avocat. Ce droit n’existe toutefois que
tution des termes « sur requête du procureur de la République » pour les seules confrontations, pas en cas d’audition simple. Il
par ceux de « sur requête du juge d’instruction ». La circulaire du n’est pas nécessaire pour cela que la personne gardée à vue
soit effectivement, en ce qui la concerne, défendue par un avo- heures au plus. Exceptionnellement, la personne peut ne pas
cat. La question se pose néanmoins, en termes d’égalité des être présentée au magistrat (C. pr. pén., art. 154, al. 2 anc.). La
armes, dans l’hypothèse où le ministère public ou le juge d’ins- circulaire du 27 janvier 1993 avait tenté de préciser quelles pou-
truction aurait reporté le début de présence de l’avocat aux in- vaient être ces circonstances exceptionnelles : « considérations
terrogatoires ou confrontations. liées à la nature de l’affaire ou à la personnalité de la personne
gardée à vue, difficultés matérielles de transport liées à l’éloi-
202. Audition libre. — L’article 62 du code de procédure pénale, gnement du lieu d’exécution, nécessités impérieuses tenant au
issu de la loi du 14 avril 2011, dispose que les personnes à l’en- déroulement des investigations […] ».
contre desquelles il n’existe aucune raison plausible de soupçon-
ner qu’elles ont commis ou tenté de commettre une infraction 206. Prolongation de garde à vue par le juge du lieu d’exécu-
ne peuvent être retenues que le temps strictement nécessaire tion de la mesure. — La jurisprudence considérait que c’était le
à leur audition, sans que cette durée ne puisse excéder quatre juge du lieu d’exécution de la garde à vue qui devait autoriser
heures. S’il apparaît, au cours de l’audition de la personne, qu’il sa prolongation et le législateur a consacré ce principe (Crim.
existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou 6 oct. 1998, no 98-80.767, Bull. crim. no 247 ; Procédures 1999.
tenté de commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’em- 12, obs. Buisson). En vertu de l’article 154 du code de pro-
prisonnement, elle ne peut être maintenue sous la contrainte à cédure pénale, lorsqu’un officier de police judiciaire chargé de
la disposition des enquêteurs que sous le régime de la garde à l’exécution d’une commission rogatoire en dehors du ressort du
vue. Son placement en garde à vue lui est alors notifié dans les juge d’instruction mandant est amené à garder à sa disposition
conditions prévues à l’article 63. une personne, il doit, avant l’expiration d’un délai de vingt-quatre
heures, la présenter au juge d’instruction du lieu d’exécution de
203. Audition libre : décision du Conseil constitution- la mesure, lequel peut prolonger la garde à vue d’un nouveau
nel. — Dans sa décision du 18 novembre 2011 (no 2011- délai de vingt-quatre heures au maximum. À titre exceptionnel,
191/194/195/196/197 QPC, JO 19 nov., JCP 2011. 1452, note ce magistrat peut accorder cette autorisation par décision écrite
Pradel ; Dr. pénal 2012, no 1, étude 4, note Leroy. – V. supra, et motivée sans présentation préalable de la personne. Sur les
no 195), le Conseil constitutionnel a émis une réserve d’inter- questions résultant de la nouvelle rédaction des textes, V. infra,
prétation relative aux conditions de l’audition libre prévue par no 226.
l’article 62. Le Conseil estime en effet que « le respect des droits
de la défense exige qu’une personne à l’encontre de laquelle il 207. Transport du juge. — La loi du 9 mars 2004 a complété l’ar-
apparaît, avant son audition ou au cours de celle-ci, qu’il existe ticle 152 du code de procédure pénale en prévoyant que le « juge
des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté d’instruction peut se transporter, sans être assisté de son gref-
de commettre une infraction pour laquelle elle pourrait être fier, ni devoir en dresser procès-verbal, pour diriger et contrôler
placée en garde à vue, ne puisse être entendue ou continuer l’exécution de la commission rogatoire, dès lors qu’il ne procède
à être entendue librement par les enquêteurs que si elle a pas lui-même à des actes d’instruction. À l’occasion de ce trans-
été informée de la nature et de la date de l’infraction qu’on la port, il peut ordonner la prolongation des gardes à vue pronon-
soupçonne d’avoir commise et de son droit de quitter à tout mo- cées dans le cadre de la commission rogatoire. Dans tous les
ment les locaux de police ou de gendarmerie ; que, sous cette cas, mention de ce transport est faite sur les pièces d’exécution
réserve applicable aux auditions réalisées postérieurement à la de la commission rogatoire. » Cet article semble avoir vocation
publication de la présente décision, les dispositions du second à s’appliquer au-delà du contrôle de garde à vue expressément
alinéa de l’article 62 du code de procédure pénale ne mécon- mentionné. La chambre criminelle avait déjà estimé que le trans-
naissent pas les droits de la défense ». Dès lors qu’il existe des port du juge pour contrôler une garde à vue n’entrait pas dans les
raisons plausibles de soupçonner que la personne entendue dispositions de l’article 92 du code de procédure pénale (Crim.
librement a commis ou tenté de commettre une infraction, elle 28 mai 1990, no 89-83.915, Bull. crim. no 216).
doit être informée expressément, et mention doit figurer au
procès-verbal, de la nature et de la date de l’infraction et de son 208. Jurisprudence. — La chambre de l’instruction apprécie
droit de quitter à tout moment les locaux du service d’enquête. Il souverainement les circonstances exceptionnelles permettant
en est de même si ces raisons plausibles apparaissent en cours de prolonger une garde à vue sans présentation de l’intéressé
d’audition. à un juge d’instruction ; l’éloignement géographique du juge
d’instruction peut constituer une impossibilité matérielle de
présentation (Crim. 27 juin 2000, no 00-80.411, Bull. crim.
SECTION 3 no 246). De même la prolongation de la garde à vue n’a pas à
être annulée pour défaut de présentation au juge s’il apparaît
Durée de la garde à vue
que la personne n’a pas été présentée en raison de la nécessité
204. Là encore, la question a considérablement évolué et doit d’accomplir des investigations pendant le temps de la garde à
être étudiée en analysant tant sa progression dans le temps que vue (Crim. 12 déc. 2000, no 99-87.640, Bull. crim. no 370). Le
les différences substantielles entre les infractions de droit com- juge d’instruction peut décider de la prolongation de garde à
mun et celles regroupées dans la terminologie de criminalité or- vue plusieurs heures avant la fin de la période initiale. En effet,
ganisée. les textes n’imposent pas une présentation de l’intéressé au
magistrat à la dernière heure de cette période (Crim. 20 déc.
2000, no 00-86.499, Bull. crim. no 386). Le procès-verbal de
ART. 1er. – DISPOSITIONS APPLICABLES notification de la prolongation antérieur à l’autorisation écrite
AVANT L’ENTRÉE EN VIGUEUR DE LA LOI DU 14 AVRIL 2011 de prolongation n’entraîne pas la nullité de cette partie de la
procédure dans la mesure où le juge d’instruction n’est pas
§ 1er. – Règles applicables en droit commun tenu d’indiquer d’heure de délivrance de l’autorisation et où les
deux actes sont intervenus avant l’expiration du premier délai
205. Principes gouvernant la prolongation de la garde à vue. — de 24 heures de garde à vue (Crim. 30 oct. 2001, no 01-85.530,
La personne gardée à vue ne peut être retenue plus de vingt- Bull. crim. no 221 ; D. 2002. IR 307). L’erreur du juge sur le
quatre heures. Avant l’expiration de ce délai, elle est conduite point de départ de la prolongation de la garde à vue ne porte
devant le juge d’instruction saisi des faits ou celui du lieu de pas atteinte aux intérêts de la personne dès lors que la garde
l’exécution, qui peut accorder un nouveau délai de vingt-quatre à vue n’a pas dépassé le délai maximal prévu par la loi (Crim.
15 févr. 2000, no 99-86.623, Bull. crim. no 68 ; Dr. pénal 2000. B. – Dispositions de la loi du 9 mars 2004 (criminalité organisée)
Comm. 82, obs. Maron).
213. Domaine. — La loi du 9 mars 2004 a créé un régime particu-
lier de garde à vue pour les infractions prévues à l’article 706-73.
§ 2. – Régimes spécifiques de garde à vue
La procédure applicable à l’enquête, la poursuite, l’instruction et
A. – Dispositions antérieures à la loi du 9 mars 2004
le jugement des crimes et des délits suivants est celle prévue
par le présent code, sous réserve des dispositions du présent
209. Stupéfiants. — L’article 706-29 du code de procédure pé- titre : … 1o Crime de meurtre commis en bande organisée prévu
nale prévoyait des dispositions particulières en cas de garde à par le 8o de l’article 221-4 du code pénal ; … 2o Crime de tor-
vue en matière de trafic de stupéfiants : désignation d’un méde- tures et d’actes de barbarie commis en bande organisée prévu
cin expert toutes les vingt-quatre heures pour voir le gardé à vue, par l’article 222-4 du code pénal ; … 3o Crimes et délits de trafic
prolongation de quarante-huit heures possible après la première de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-40 du code
prolongation de vingt-quatre heures. La prolongation de qua- pénal ; … 4o Crimes et délits d’enlèvement et de séquestration
rante-huit heures était ordonnée par le juge d’instruction mais, commis en bande organisée prévus par l’article 224-5-2 du code
depuis la loi du 15 juin 2000, c’est le juge des libertés et de la pénal ; … 5o Crimes et délits aggravés de traite des êtres hu-
détention qui l’ordonnait dès lors que le cadre était celui de l’en- mains prévus par les articles 225-4-2 à 225-4-7 du code pénal ;
quête préliminaire ou de flagrance. L’article 706-29 a été abrogé … 6o Crimes et délits aggravés de proxénétisme prévus par les
par la loi du 9 mars 2004. Désormais, le trafic de produits stupé- articles 225-7 à 225-12 du code pénal ; … 7o Crime de vol com-
fiants fait partie des cas prévus par l’article 706-73, en matière mis en bande organisée prévu par l’article 311-9 du code pénal ;
de criminalité organisée (V. infra, nos 228, 229. – VLAMYNCK, … 8o Crimes aggravés d’extorsion prévus par les articles 312-6
Le trafic de stupéfiants et les procédures policières afférentes, et 312-7 du code pénal ; … 9o Crime de destruction, dégrada-
AJ pénal 2004. 187). tion et détérioration d’un bien commis en bande organisée prévu
par l’article 322-8 du code pénal ; … 10o Crimes en matière de
210. Terrorisme. — Selon l’article 706-23 du code de procédure fausse monnaie prévus par les articles 442-1 et 442-2 du code
pénale, il existait aussi une garde à vue particulière pour les in- pénal ; … 11o Crimes et délits constituant des actes de terro-
fractions de terrorisme avec une seconde prolongation de qua- risme prévus par les articles 421-1 à 421-5 du code pénal ; …
rante-huit heures et présentation préalable obligatoire au mo- 12o Délits en matière d’armes commis en bande organisée pré-
ment de la prolongation. Cet article a lui aussi été abrogé par vus par l’article 3 de la loi du 19 juin 1871, qui abroge le décret
la loi du 9 mars 2004, le terrorisme entrant dans les articles vi- du 4 septembre 1870 sur la fabrication des armes de guerre,
sés par l’article 706-73 (V. infra, no 228. – RICARD et HOUYVET, les articles 24, 26 et 31 du décret du 18 avril 1939 fixant le ré-
Lutte contre le terrorisme : spécificités de la loi française, AJ pé- gime des matériels de guerre, armes et munitions, l’article 6 de
nal 2004. 191). la loi no 70-575 du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des
poudres et substances explosives, l’article 4 de la loi no 72-467
211. Association de malfaiteurs, proxénétisme, extorsion de du 9 juin 1972 interdisant la mise au point, la fabrication, la déten-
fonds, infractions commises en bande organisée. — L’ar- tion, le stockage, l’acquisition et la cession d’armes biologiques
ticle 63-4 du code de procédure pénale prévoyait un régime ou à base de toxines ; … 13o Délits d’aide à l’entrée, à la circu-
particulier en ce qui concerne l’entretien avec l’avocat. Il était lation et au séjour irréguliers d’un étranger en France commis
possible seulement au bout de trente-six heures lorsque l’en- en bande organisée prévus par le quatrième alinéa du I de l’ar-
quête portait sur une association de malfaiteurs prévue par ticle 21 de l’ordonnance no 45-2658 du 2 novembre 1945 relative
l’article 450-1 du code pénal, sur les infractions de proxénétisme aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France ; …
ou d’extorsion de fonds aggravés prévues aux articles 225-7, 14o Délits de blanchiment prévus par les articles 324-1 et 324-2
225-9, 312-2 à 312-5 et 312-7, ou une infraction commise en du code pénal, ou de recel prévus par les articles 321-1 et 321-2
bande organisée prévue par les articles 224-3, 225-8, 311-9, du même code, du produit, des revenus, des choses provenant
312-6, 322-8 du code pénal. Cet alinéa a été abrogé par la loi des infractions mentionnées aux 1o à 13o ; … 15o Délits d’asso-
du 9 mars 2004, qui fait désormais référence aux infractions de ciation de malfaiteurs prévus par l’article 450-1 du code pénal,
l’article 706-73, en maintenant certaines différences de régime lorsqu’ils ont pour objet la préparation de l’une des infractions
(V. infra, no 213). mentionnées aux 1o à 4o. Pour les infractions visées aux 3o,
6o et 11o, sont applicables, sauf précision contraire, les dispo-
212. Mineurs. — (V. Enfance délinquante). L’article 4 de l’or- sitions relatives à la criminalité organisée ainsi que celles des
donnance no 45-174 du 2 février 1945 (D. 1945. 41 et 169) ex- titres XV, XVI et XVII du code de procédure pénale. Parallèle-
pose que le mineur de treize ans ne peut être placé en garde ment, un nouvel article 706-74 dispose que lorsque la loi le pré-
à vue mais seulement retenu pour les nécessités de l’enquête voit, les dispositions relatives à la criminalité organisée sont éga-
durant dix heures avec l’accord préalable d’un juge d’instruction lement applicables : … 1o Aux crimes et délits commis en bande
spécialisé dans la protection de l’enfance, lorsqu’il existe des in- organisée, autres que ceux relevant de l’article 706-73 ; … 2o Aux
dices graves ou concordants laissant présumer qu’il a commis délits d’association de malfaiteurs prévus par le deuxième ali-
un crime ou un délit puni d’au moins sept ans d’emprisonnement. néa de l’article 450-1 du code pénal autres que ceux relevant du
Une prolongation exceptionnelle de dix heures peut être ordon- 15o de l’article 706-73 du présent code. L’article 706-29 du code
née après présentation obligatoire devant le magistrat. L’exa- de procédure pénale qui prévoyait des dispositions particulières
men médical et l’entretien avec l’avocat interviennent dès le dé- en cas de garde à vue en matière de trafic de stupéfiants a été
but de la rétention (Crim. 8 mars 2000, no 99-87.319, Bull. crim. abrogé par la loi du 9 mars 2004. Le trafic de produits stupé-
no 109. – Crim. 17 mai 2000, no 00-81.133, ibid. no 196). La fiants fait partie des cas prévus par l’article 706-73, en matière
garde à vue d’un mineur de treize à seize ans ne peut pas être de criminalité organisée. L’article 706-73 a été modifié plusieurs
prolongée en cas de délit puni d’une peine inférieure à cinq ans fois depuis. Pour le dernier état du texte, V. infra, no 228.
d’emprisonnement. L’entretien est de droit dès le début de la
garde à vue. La garde à vue des mineurs de seize à dix-huit ans 214. Notion de « bande organisée » et Conseil constitutionnel. —
obéit au régime de droit commun des majeurs, sauf que l’infor- Dans sa décision du 2 mars 2004, le Conseil constitutionnel a
mation des parents est de droit, sauf dérogation limitée et que validé la quasi-totalité de la loi du 9 mars 2004. Un seul article
la présentation devant le magistrat est obligatoire en cas de pro- a été annulé dans sa totalité. Le Conseil a, en revanche, émis
longation de la garde à vue. des réserves d’interprétation au regard de certains des textes. Il
émet une réserve générale ainsi rédigée : « Il appartiendra aux 218. Contrôle de la qualification des faits. — Le Conseil consti-
magistrats appelés à décider de mettre en œuvre la procédure tutionnel apporte, dans sa décision du 2 mars 2004 (V. supra,
définie par ce texte, de s’assurer au cas par cas : qu’il existe no 214), les précisions suivantes : « Considérant qu’en indiquant
une ou plusieurs raisons plausibles de penser que les faits ne que le procureur de la République est avisé de la qualification
constituent pas l’une des infractions graves commises en bande des faits justifiant le report de la première intervention de l’avo-
organisée énumérées au nouvel article 706-73 du code de pro- cat […] le législateur a nécessairement entendu que ce magistrat
cédure pénale, que les besoins de l’enquête ou de l’instruction […] contrôle aussi cette qualification ; que l’appréciation initiale-
justifient les restrictions que ces mesures peuvent apporter à la ment portée par l’officier de police judiciaire en ce qui concerne le
liberté individuelle, à l’inviolabilité du domicile ou au secret de la report éventuel de l’intervention de l’avocat au cours de la garde
vie privée » (V. aussi LÉVY, Pénalisation et répression : adapta- à vue est ainsi soumise au contrôle de l’autorité judiciaire et ne
tion à la criminalité ou dérive sécuritaire ?, Gaz. Pal. 12/13 mai saurait déterminer le déroulement ultérieur de la procédure. »
2004, p. 2. – DOBKINE, La constitutionnalité de la loi portant Il est donc indispensable que les officiers de police judiciaire
adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, D. 2004. rendent compte au magistrat qui contrôlera la qualification adop-
Chron. 956. – SCHOETTL, La loi « Perben II » devant le Conseil tée. Ceci est sans doute plus important encore dans le cadre
constitutionnel, Gaz. Pal. 11-15 avr. 2004, p. 3. – ZARKA, Loi de l’enquête de flagrance ou préliminaire. Dans le cadre d’une
Perben II : le Conseil constitutionnel a prononcé deux censures commission rogatoire, la qualification est en effet déjà relevée.
et émis diverses réserves d’interprétation, JCP 2004. II. 10049). Mais la chambre criminelle a eu l’occasion de dire que « si les in-
vestigations des policiers, agissant sur commission rogatoire du
juge d’instruction, saisi de vols avec arme, font apparaître que
215. Prolongations. — L’article 706-88 ne prévoit un régime spé-
ces vols ont été commis en bande organisée ou en relation avec
cifique que pour les infractions visées à l’article 706-73. Pour
une association de malfaiteurs, le délai applicable à l’entretien
l’application des articles 63, 77 et 154, si les nécessités de l’en-
avec un avocat est celui prévu par l’article 63-4 » (c’est-à-dire un
quête ou de l’instruction relatives à l’une des infractions entrant
entretien au bout de la trente-sixième heure à l’époque, Crim.
dans le champ d’application de l’article 706-73 l’exigent, la garde
8 nov. 1995, no 95-82.877, Bull. crim. no 341 ; Dr. pénal 1996,
à vue d’une personne peut, à titre exceptionnel, faire l’objet de
comm. 92). La qualification de départ n’induit donc pas forcé-
deux prolongations supplémentaires de vingt-quatre heures cha-
ment celle qui sera retenue au moment de la garde à vue.
cune. Ces prolongations sont autorisées, par décision écrite et
motivée, soit, à la requête du procureur de la République, par le
juge des libertés et de la détention, soit par le juge d’instruction. 219. Différences tenant à l’entretien avec l’avocat. — Elles sont
La personne gardée à vue doit être présentée au magistrat qui énoncées dans l’article 706-88 lui-même. Les infractions concer-
statue sur la prolongation préalablement à cette décision. La se- nées par cet article, parmi lesquelles on trouve celles qui fai-
conde prolongation peut toutefois, à titre exceptionnel, être auto- saient l’objet de dispositions particulières (trafic de stupéfiants,
risée sans présentation préalable de la personne en raison des terrorisme, association de malfaiteurs, proxénétisme, infractions
nécessités des investigations en cours ou à effectuer. Lorsqu’il commises en bande organisée, V. supra, nos 209 s.), font l’objet,
résulte de la procédure qu’avant d’être déférés devant le juge avec d’autres qui sont nouvelles, d’une disposition qui fixe le pre-
des libertés et de la détention et d’être entendus par ce magis- mier entretien à la quarante-huitième heure, puis à la soixante-
trat préalablement à la décision de prolongation de garde à vue, douzième heure. En sont exceptées les dispositions des 3e et
les intéressés se sont entretenus avec leurs avocats qui ont été 11e alinéas de ce même article 706-73, c’est-à-dire les crimes
informés de la nature de l’infraction et n’ont pas formulé d’obser- et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à
vations, doit être écartée le moyen de nullité pris de l’absence de 222-40 du code pénal et les crimes et délits constituant des actes
notification de ce que la circonstance aggravante de bande orga- de terrorisme prévus par les articles 421-1 à 421-5 du code pénal
nisée était désormais retenue (Crim. 7 juin 2006, no 06-82.405, (C. pr. pén., art. 706-73, 11o) pour lesquels l’entretien (et donc le
Bull. crim. no 157 ; Gaz. Pal. 2-3 févr. 2007. 15, note Monnet). seul) est susceptible d’intervenir à la soixante-douzième heure
seulement. Lorsqu’on examine l’article 63-4 du code de procé-
216. Examen médical. — Lorsque la première prolongation est dure pénale, on s’aperçoit qu’il prévoit que « si la personne est
décidée, la personne gardée à vue est examinée par un médecin gardée à vue pour une infraction mentionnée aux 4o, 6o, 7o, 8o et
désigné par le procureur de la République, le juge d’instruction 15o de l’article 706-73, l’entretien avec un avocat ne peut inter-
ou l’officier de police judiciaire. Le médecin délivre un certifi- venir qu’à l’issue d’un délai de quarante-huit heures », est en-
cat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l’ap- suite mentionné le délai de soixante-douze heures pour le trafic
titude au maintien en garde à vue, qui est versé au dossier. La de stupéfiants et le terrorisme. La contradiction entre ces deux
personne est avisée par l’officier de police judiciaire du droit de textes n’est qu’apparente car l’article 706-88 est spécifique aux
demander un nouvel examen médical. Ces examens médicaux prolongations exceptionnelles.
sont de droit. Mention de cet avis est portée au procès-verbal et
émargée par la personne intéressée ; en cas de refus d’émarge-
220. La contradiction est résolue par le renvoi que fait l’ar-
ment, il en est fait mention. Notons que, contrairement au texte
ticle 706-88 à l’article 63-4. Trois groupes doivent alors être
qui prévoyait la nécessité de la désignation d’un médecin expert
distingués : les 1o, 2o, 5o, 9o, 10o, 12o, 13o, 14o, pour lesquels
par un magistrat dans le cas de trafic de stupéfiants, le texte ne
l’entretien a lieu à la première, à la vingt-quatrième, qua-
fait plus allusion qu’à un « médecin désigné par le procureur de la
rante-huitième et soixante-douzième heure ; les 4o, 6o, 7o, 8o et
République, le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire ».
15o, pour lesquels le premier entretien a lieu à la quarante-hui-
tième heure puis, le cas échéant, à la soixante-douzième ; les
217. Prolongation supplémentaire. — Par dérogation aux dispo- 3o et 11o, pour lesquels le seul entretien possible se situe à la
sitions du premier alinéa de l’article 706-88, si la durée prévisible soixante-douzième heure (sur la criminalité organisée, V. aussi
des investigations restant à réaliser à l’issue des premières qua- DANET, De la procédure à la répression de la criminalité or-
rante-huit heures de garde à vue le justifie, le juge des libertés et ganisée, ou laquelle est l’instrument de l’autre, AJ pénal 2004.
de la détention ou le juge d’instruction peuvent décider, selon les 192. – MOLINS, De la nécessité de lutter plus activement contre
modalités prévues au deuxième alinéa, que la garde à vue fera les nouvelles formes de criminalité, AJ pénal 2004. 177. –
l’objet d’une seule prolongation supplémentaire de quarante-huit VERGES, La notion de criminalité organisée après la loi du
heures. 9 mars 2004, AJ pénal 2004. 181).
221. Terrorisme. — L’article 706-23 du code de procédure pé- Bull. crim. no 314 ; Dr. pénal 1999. Comm. 30, obs. Maron).
nale instaurait aussi une garde à vue particulière pour les in- Ceci n’a pas pour effet de rendre la notification des droits tar-
fractions de terrorisme avec une seconde prolongation de qua- dive (Crim. 19 janv. 2000, no 99-86.090, Bull. crim. no 33 ; Dr.
rante-huit heures et présentation préalable obligatoire au mo- pénal 2000. Comm. 81, obs. Maron. – Crim. 16 févr. 2000,
ment de la prolongation. Cet article a lui aussi été abrogé par no 99-86.307, Bull. crim. no 72 ; Dr. pénal 2000. Comm. 50, obs.
la loi du 9 mars 2004, le terrorisme entrant dans les articles vi- Maron. – Crim. 10 mai 2000, no 00-81.201, Bull. crim. no 182. –
sés par l’article 706-73. Mais depuis l’entrée en vigueur de la loi Crim. 12 déc. 2000, no 00-83.852, ibid. no 369).
du 23 janvier 2006 (no 2006-64, JO 24 janv.), « s’il ressort des
premiers éléments de l’enquête ou de la garde à vue elle-même
qu’il existe un risque sérieux de l’imminence d’une action terro- 224. La prolongation de la garde à vue est conditionnée à une
riste en France ou à l’étranger ou que les nécessités de la co- peine d’emprisonnement au moins égale à un an. — Aux termes
opération internationale le requièrent impérativement » la garde de l’article 63, II du code de procédure pénale, la prolongation de
à vue des personnes concernées peut être encore prolongée de la garde à vue n’est possible qu’en cas de crime ou de délit puni
24 heures renouvelables une fois, c’est-à-dire atteindre 6 jours d’une peine d’emprisonnement supérieure ou égale à un an. Il
(C. pr. pén., art. 706-88-1). s’agit d’une nouveauté issue de la loi du 14 avril 2011 mais qui
ne devrait avoir que peu de conséquences pratiques, les délits
ne faisant pas encourir d’emprisonnement (d’ailleurs déjà exclus
222. Mineurs. — La loi du 9 mars 2004 a modifié l’article 4 de de tout placement), ou seulement six mois, étant rares.
l’ordonnance du 2 février 1945. La garde à vue des mineurs de
plus de seize ans est soumise aux dispositions de l’article 706-88
du code de procédure pénale (V. supra, no 219), dès lors qu’il 225. Modalités de la prolongation de la garde à vue. — L’auto-
« existe des raisons plausibles de soupçonner qu’une ou plu- risation de prolongation de garde à vue ne peut être accordée
sieurs personnes majeures ont participé comme auteurs ou com- qu’après présentation de la personne au procureur de la Répu-
plices à la commission de l’infraction ». La garde à vue de ces blique. Cette présentation peut être réalisée par l’utilisation d’un
mineurs peut donc atteindre quatre-vingt-seize heures (V. BON- moyen de télécommunication audiovisuelle. Elle peut cepen-
FILS, Les dispositions relatives aux mineurs de la loi no 2004-204 dant, à titre exceptionnel, être accordée par une décision écrite
du 9 mars 2004, dite Perben II, JCP 2004. I. 140). Le mineur et motivée, sans présentation préalable. La plupart des parquets
de treize ans ne peut être placé en garde à vue mais seule- exigent désormais une présentation de principe de toute per-
ment retenu pour les nécessités de l’enquête durant dix heures sonne susceptible de voir prolonger sa garde à vue. Bien que
avec l’accord préalable d’un juge d’instruction spécialisé dans la modification du texte ne concerne que l’enquête de flagrance
la protection de l’enfance, lorsqu’il existe des indices graves ou menée par le ministère public, ce principe est susceptible de
concordants laissant présumer qu’il a commis un crime ou un s’étendre, dans la pratique, aux juges d’instruction prolongeant
délit puni d’au moins sept ans d’emprisonnement. Une prolon- les gardes à vue sur commission rogatoire.
gation exceptionnelle de dix heures peut être ordonnée après
présentation obligatoire devant le magistrat. L’examen médical 226. Compétence du magistrat instructeur pour prolonger la
et l’entretien avec l’avocat interviennent dès le début de la ré- garde à vue lorsque celle-ci se déroule sur un autre ressort. —
tention (Crim. 8 mars 2000, no 99-87.319, Bull. crim. no 109. – Avant l’entrée en vigueur de la loi du 14 avril 2011, c’était le juge
Crim. 17 mai 2000, no 00-81.133, ibid. no 196). La garde à vue d’instruction de l’exécution de la mesure qui était incontestable-
d’un mineur de treize à seize ans ne peut pas être prolongée en ment le seul compétent pour prolonger une garde à vue se dé-
cas de délit puni d’une peine inférieure à cinq ans d’emprisonne- roulant sur son ressort (V. supra, no 206). Mais depuis l’entrée
ment. L’entretien est de droit dès le début de la garde à vue. en vigueur de la loi du 14 avril 2011, l’article 154 se contente
de renvoyer aux dispositions des articles 62-2 à 64-1 du code de
procédure pénale, et d’indiquer que les attributions conférées au
ART. 2. – DISPOSITIONS APPLICABLES procureur de la République par ces articles sont alors exercées
DEPUIS L’ENTRÉE EN VIGUEUR DE LA LOI DU 14 AVRIL 2011 par le juge d’instruction. Or, l’article 63-9 nouveau dispose que le
procureur de la République compétent pour être avisé des place-
ments en garde à vue, en contrôler le déroulement, en ordonner
§ 1er. – Règles applicables en droit commun la prolongation et décider de l’issue de la mesure est celui sous la
direction duquel l’enquête est menée. Toutefois, le procureur de
la République du lieu où est exécutée la garde à vue est égale-
223. Durée de la garde à vue. — La garde à vue est en principe ment compétent pour la contrôler et en ordonner la prolongation.
de vingt-quatre heures. Toutefois, la garde à vue peut être pro- On peut donc légitimement s’interroger aujourd’hui sur le point
longée pour un nouveau délai de vingt-quatre heures au plus, de savoir si le juge de l’exécution ne partage pas ses préroga-
sur autorisation écrite et motivée du procureur de la République tives avec le juge ayant délivré la commission rogatoire. L’éloi-
ou du juge d’instruction, si l’infraction que la personne est soup- gnement entre le lieu de garde à vue effective et celui où réside
çonnée d’avoir commise ou tenté de commettre est un crime le juge qui a délivré la commission rogatoire rendra la saisine
ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement supérieure ou du juge local la plus fréquente. Mais il apparaît bien désormais,
égale à un an et si la prolongation de la mesure est l’unique par exemple dans le cas de juridictions limitrophes, que le juge
moyen de parvenir à l’un au moins des objectifs mentionnés mandant peut prolonger la garde à vue lui-même.
aux 1o à 6o de l’article 62-2. Il importe peu que plusieurs heures
s’écoulent entre les dernières investigations et l’expiration de ce
délai (Cass., ch. mixte, 7 juill. 2000, no 98-50.007, Bull. crim. 227. État de santé du gardé à vue. — Si le gardé à vue est
no 257). Les officiers de police judiciaire font débuter la garde provisoirement confié à un service médical, et par exemple hos-
à vue soit de l’heure de l’interpellation, soit du début de l’audi- pitalisé, la durée de la prise en charge s’impute sur la durée de
tion même si la décision de contrainte n’est pas prise dès l’ori- la garde à vue si celle-ci est encore en cours pendant la période
gine. On peut calculer le délai à partir du moment où la personne des soins (Crim. 13 oct. 1998, no 98-82.522, Bull. crim. no 254).
s’est présentée sans contrainte au service (Crim. 13 nov. 1996, L’audition d’un suspect hospitalisé dans un service de réanima-
nos 96-82.087 et 96-83.708, Bull. crim. no 401 ; Dr. pénal 1997. tion à la suite d’une blessure intervenue au cours de son inter-
Comm. 71, obs. Maron. – Crim. 24 nov. 1998, no 98-82.496, pellation méconnaît les exigences de l’article 3 de la Convention
relatif au traitement inhumain et dégradant s’il n’est pas établi Pour les infractions visées aux 3o, 6o et 11o, sont applicables,
que les policiers ont agi avec l’autorisation préalable d’un mé- sauf précision contraire, les dispositions du présent titre ainsi que
decin (Crim. 25 oct. 2011, no 11-82.780, D. 2011. 2731, obs. celles des titres XV, XVI et XVII. »
Girault ; AJ pénal 2012. 101, obs Ascenci ; D. 2012. 185, note
Ravigneaux). 229. Criminalité organisée. — Depuis l’entrée en vigueur de la
loi du 14 avril 2011, l’intervention de l’avocat en garde à vue peut
§ 2. – Régimes particuliers être différée, en considération de raisons impérieuses tenant aux
circonstances particulières de l’enquête ou de l’instruction, soit
228. Nouvel article 706-73 du code de procédure pénale. — pour permettre le recueil ou la conservation des preuves, soit
Dans son dernier état, issu de l’ordonnance du 12 mars 2012 pour prévenir une atteinte aux personnes, pendant une durée
(no 2012-351), l’article 706-73 est ainsi rédigé : maximale de quarante-huit heures ou, s’il s’agit d’une infraction
« La procédure applicable à l’enquête, la poursuite, l’instruction mentionnée aux 3o ou 11o de l’article 706-73, pendant une du-
et le jugement des crimes et des délits suivants est celle prévue rée maximale de soixante-douze heures. Les 3o et 11o de l’ar-
par le présent code, sous réserve des dispositions du présent ticle 706-73 concernent les crimes et délits relatifs au trafic de
titre : stupéfiants et au terrorisme. Le parquet (ou le juge d’instruc-
1o Crime de meurtre commis en bande organisée prévu par le tion) peut décider lui-même d’un report de vingt-quatre heures
8o de l’article 221-4 du code pénal ; au plus. Si le parquet (ou le juge d’instruction) souhaite obtenir
2o Crime de tortures et d’actes de barbarie commis en bande un report au-delà de la vingt-quatrième heure, il doit le deman-
organisée prévu par l’article 222-4 du code pénal ; der au juge des libertés et de la détention. L’exception porte non
3o Crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les ar- seulement sur la présence lors des auditions mais sur les entre-
ticles 222-34 à 222-40 du code pénal ; tiens de 30 minutes.
4o Crimes et délits d’enlèvement et de séquestration commis en
bande organisée prévus par l’article 224-5-2 du code pénal ; 230. Terrorisme. — Le terrorisme fait partie de la liste dressée
5o Crimes et délits aggravés de traite des êtres humains prévus par l’article 706-73 (V. supra, no 228). Mais la désignation de
par les articles 225-4-2 à 225-4-7 du code pénal ; l’avocat connaît une particularité. En effet, selon la loi du 14 avril,
6o Crimes et délits aggravés de proxénétisme prévus par les ar- doit être établie une liste particulière d’avocats pouvant interve-
ticles 225-7 à 225-12 du code pénal ; nir dans ce type d’affaire. L’article 706-88-2 dispose : « Si la per-
7o Crime de vol commis en bande organisée prévu par l’article sonne est gardée à vue pour une infraction mentionnée au 11o de
311-9 du code pénal ; l’article 706-73, le juge des libertés et de la détention, saisi par
8o Crimes aggravés d’extorsion prévus par les articles 312-6 et le procureur de la République à la demande de l’officier de po-
312-7 du code pénal ; lice judiciaire, ou le juge d’instruction lorsque la garde à vue in-
8o bis Délit d’escroquerie en bande organisée prévu par le der- tervient au cours d’une instruction, peut décider que la personne
nier alinéa de l’article 313-2 du code pénal ; sera assistée par un avocat désigné par le bâtonnier sur une liste
9o Crime de destruction, dégradation et détérioration d’un bien d’avocats habilités, établie par le bureau du Conseil national des
commis en bande organisée prévu par l’article 322-8 du code barreaux sur propositions des conseils de l’ordre de chaque bar-
pénal ; reau ». Il était prévu que les modalités d’application de ce texte
10o Crimes en matière de fausse monnaie prévus par les articles soient définies par décret en Conseil d’État. Ce décret est ce-
442-1 et 442-2 du code pénal ; lui du 14 novembre 2011 (Décr. no 2011-1520, JO 16 nov., Dr.
11o Crimes et délits constituant des actes de terrorisme prévus pénal 2011, no 12, Alerte 47, Veille par Roumier). Il prévoit que
par les articles 421-1 à 421-6 du code pénal ; pourront figurer sur la liste les avocats inscrits au tableau depuis
12o Délits en matière d’armes et de produits explosifs commis plus de cinq ans. Chaque conseil de l’ordre devra transmettre
en bande organisée, prévus par les articles L. 2339-2, L. 2339- au Conseil national des barreaux les noms des avocats propo-
3, L. 2339-10, L. 2341-4, L. 2353-4 et L. 2353-5 du code de la sés au moins deux mois avant la fin de l’année civile. Le bureau
défense ainsi que par les articles L. 317-2, L. 317-4 et L. 317-7 du Conseil national des barreaux arrêtera la liste des avocats ha-
du code de la sécurité intérieure ; bilités pour une durée de trois ans, et il la communiquera avant le
13o Délits d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irréguliers début de l’année civile à l’ensemble des bâtonniers et des chefs
d’un étranger en France commis en bande organisée prévus par de juridiction. Il est précisé que le procureur de la République
le quatrième alinéa du I de l’article 21 de l’ordonnance no 45-2658 ou le juge d’instruction informeront le bâtonnier dans le ressort
du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour duquel se déroule la garde à vue des décisions prises en appli-
des étrangers en France ; cation de l’article 706-88-2, le bâtonnier devant ensuite commu-
14o Délits de blanchiment prévus par les articles 324-1 et 324-2 niquer à ce magistrat le nom de l’avocat qu’il a désigné. Cette
du code pénal, ou de recel prévus par les articles 321-1 et 321-2 mesure a été particulièrement mal acceptée par les barreaux, qui
du même code, du produit, des revenus, des choses provenant estimaient qu’il s’agissait là d’une intolérable suspicion a priori.
des infractions mentionnées aux 1o à 13o ; Le Conseil constitutionnel, dans une décision du 17 février 2012
15o Délits d’association de malfaiteurs prévus par l’article 450-1 (no 2012-223 QPC, JO 18 févr., Dr. pénal 2012. Comm. 62, obs.
du code pénal, lorsqu’ils ont pour objet la préparation de l’une Maron et Haas) a jugé l’article 706-88-2 contraire à la Constitu-
des infractions mentionnées aux 1o à 14o et 17o ; tion ; il a estimé qu’en l’absence de tout encadrement du pouvoir
16o Délit de non-justification de ressources correspondant au du juge de priver la personne gardée à vue du libre choix de son
train de vie, prévu par l’article 321-6-1 du code pénal, lorsqu’il avocat, les dispositions contestées étaient contraires aux droits
est en relation avec l’une des infractions mentionnées aux 1o à et libertés garantis par la Constitution. Le décret du 13 avril 2012
15o et 17o ; (no 2012-476, JO 14 avr.) a ensuite abrogé le décret du 14 no-
17o Crime de détournement d’aéronef, de navire ou de tout autre vembre 2011.
moyen de transport commis en bande organisée prévu par l’ar-
ticle 224-6-1 du code pénal ; 231. Mineurs. — L’ordonnance no 45-174 du 2 février 1945 a
18o Crimes et délits punis de dix ans d’emprisonnement, contri- également été modifiée par la loi du 14 avril 2011. Le sep-
buant à la prolifération des armes de destruction massive et de tième alinéa de l’article 4 de cette ordonnance rend applicable
leurs vecteurs entrant dans le champ d’application de l’article les articles 63-3-1 à 63-4-3 du code de procédure pénale aux
706-167. mineurs. En conséquence, toutes les dispositions relatives aux
majeurs exposées ci-dessus lui sont applicables : droit d’entre- où la personne pouvait parfois passer une nuit dans l’attente de
tien de trente minutes, droit d’intervenir immédiatement avec re- sa présentation. Elle a estimé que l’écoulement de délais de
port du début de l’audition d’un délai de deux heures maximum, neuf heures et de douze heures entre l’issue de la garde à vue
droit d’accès à certaines pièces du dossier. Les reports excep- et le défèrement des intéressés devant le magistrat instructeur
tionnels prévus à l’article 706-88 du code de procédure pénale n’était pas contraire à l’article 5, § 3 de la Convention européenne
ne sont pas applicables aux mineurs. Seules lui sont donc appli- des droits de l’homme (Crim. 9 févr. 2000, no 99-87.659, Bull.
cables les dispositions de droit commun, y compris si le mineur crim. no 64 ; Dr. pénal 2000. Comm. 79, obs. Maron. – Crim.
est impliqué dans une affaire faisant partie de la liste dressée par 25 oct. 2000, no 00-83.253, Bull. crim. no 316). Elle a admis
l’article 706-73 du code de procédure pénale (V. supra, no 228). une présentation effective le lendemain de la levée de la garde
à vue (Crim. 25 nov. 2003, no 03-85.076, Bull. crim. no 221 ;
AJ pénal 2004. 74, obs. L.-H. ; D. 2004. IR 677 ; Dr. pénal
ART. 3. – CUMULS DE GARDES À VUE
2004. Comm. 42, note Maron. – 16 mars 1999, no 98-82.596,
232. Cumul de gardes à vue : mêmes faits. — Les durées de inédit). Toutefois, elle avait cassé pour insuffisance de motif l’ar-
gardes à vue se rapportant aux mêmes faits se cumulent entre rêt d’une chambre de l’instruction qui s’était contenté d’énoncer
elles. Le dépassement du délai constitue par lui-même une at- qu’en l’absence de dispositions légales, le requérant ne saurait
teinte aux intérêts de la personne concernée et entraîne l’annula- tirer de conséquences juridiques d’un délai de défèrement de-
tion des actes de procédure (Crim. 13 févr. 1996, no 95-85.538, vant le juge d’instruction, écoulé, après notification de la fin de
Bull. crim. no 74 ; Dr. pénal 1996. Comm. 143, obs. Maron ; la garde à vue, « sans qu’aucune explication ne soit apportée
D. 1996. Somm. 258, obs. Pradel. – Crim. 15 déc. 1999, sur les motifs ayant contraint à différer sa comparution, en l’es-
nos 99-86.233 et 99-80.532, Bull. crim. no 311). La chambre cri- pèce de plus de vingt-quatre heures » (Crim. 16 sept. 2003,
minelle a statué sur ce point important dans une espèce (celle no 03-82.918, Bull. crim. no 160).
ayant donné lieu à l’arrêt de 1996) où six ans séparaient la pre- 237. Depuis la loi du 9 mars 2004. — L’article 803-2 du code
mière garde à vue, intervenue lors de l’enquête préliminaire, de de procédure pénale, issu de la loi du 9 mars 2004, dispose que
celle reprise sur commission rogatoire. toute personne ayant fait l’objet d’un défèrement à l’issue de sa
garde à vue à la demande du procureur de la République com-
233. Cumul de gardes à vue : faits distincts. — La chambre cri-
paraît le jour même devant ce magistrat ou, en cas d’ouverture
minelle a estimé dans un arrêt du 17 mars 2004 que « si une
d’une information, devant le juge d’instruction saisi de la procé-
personne peut être soumise, à l’occasion de faits distincts, à des
dure. Il en est de même si la personne est déférée devant le juge
mesures de garde à vue immédiatement successives et indé-
d’instruction à l’issue d’une garde à vue sur commission roga-
pendantes l’une de l’autre, elle ne peut toutefois être retenue de
toire. Cet article est applicable à l’ensemble du territoire national
manière continue à la disposition des officiers de police judiciaire
et non pas seulement aux juridictions dotées d’un « petit dépôt ».
pendant une période totale excédant la durée maximale de garde
L’article 803-3, en revanche, dispose qu’en cas de nécessité et
à vue autorisée par la loi » (Crim. 17 mars 2004, no 03-87.739,
par dérogation aux dispositions de l’article 803-2, la personne
Bull. crim. no 69 ; BICC 2004, no 768 ; D. 2004. IR 1353 ; JCP
peut comparaître le jour suivant et peut être retenue à cette fin
2004. IV. 1968 ; AJ pénal 2004. 248, note Coste). Comme le
dans les locaux de la juridiction spécialement aménagés, à la
dit l’annotatrice, « cet arrêt est d’autant plus important que la ré-
condition que cette comparution intervienne au plus tard dans
cente loi Perben II du 9 mars 2004 allonge les délais de garde à
un délai de vingt heures à compter de l’heure à laquelle la garde
vue pour un certain nombre d’infractions. »
à vue a été levée, à défaut de quoi l’intéressé est immédiatement
remis en liberté. Elle doit alors avoir la possibilité de s’alimen-
234. Cumul de garde à vue : loi du 14 avril 2011. — L’article 63
ter et de bénéficier des droits dont elle dispose lorsqu’elle est
du code de procédure pénale, dans son septième alinéa, précise
en garde à vue : droit de faire prévenir une personne visée à
désormais que « si une personne a déjà été placée en garde à
l’article 63-2 par téléphone, d’être examinée par un médecin, de
vue pour les mêmes faits, la durée des précédentes périodes
s’entretenir à tout moment avec son avocat désigné ou commis
de garde à vue s’impute sur la durée de la mesure ». Cet article
d’office. Un registre spécial avec les heures d’arrivée des per-
conforte la jurisprudence de la chambre criminelle. Lors de la re-
sonnes doit être tenu. Cet article n’est pas applicable lorsque
prise d’une garde à vue, il convient que les droits de la personne
la garde à vue a duré plus de trois jours en application de l’ar-
soient à nouveau notifiés et un délai de deux heures respecté
ticle 706-88 du code de procédure pénale. L’article 803-3 n’est
dans l’attente d’un avocat si elle en fait la demande. Ce régime
applicable que dans les juridictions qui disposent de locaux spé-
d’imputation ne concerne que la garde à vue pour les mêmes
cialement aménagés pour que la personne puisse passer la nuit.
faits. En revanche, aucune disposition légale n’impose à l’offi-
cier de police judiciaire d’imputer, sur la durée d’une mesure de 238. Décisions du Conseil constitutionnel. — Le Conseil consti-
garde à vue en cours, celle d’une audition, portant sur les mêmes tutionnel a déclaré conformes à la constitution les articles 803-3
faits, effectuée sans contrainte, fût-elle postérieure à un premier (Cons. const. 17 déc. 2010, no 2010-80 QPC) puis 803-2 (Cons.
placement en garde à vue (Crim. 31 oct. 2001, no 01-85.341, const. 6 mai 2011, no 2011-125 QPC) du code de procédure pé-
Bull. crim. no 228). nale mais a émis une réserve d’interprétation à propos du pre-
mier cité : le magistrat du parquet doit être informé sans délai de
ART. 4. – DÉFÈREMENT APRÈS GARDE À VUE l’arrivée de la personne dans les locaux de la juridiction et la per-
sonne doit être effectivement présentée à un magistrat du siège
235. Nature juridique du transfert. — Aucune disposition lé- avant l’expiration du délai de vingt heures prévu par cet article.
gale ou conventionnelle n’oblige le juge d’instruction à délivrer La loi du 14 avril 2011 a modifié le seul article 803-3. Désormais,
un mandat d’amener pour se faire présenter la personne à l’is- le magistrat devant lequel l’intéressé est appelé à comparaître
sue d’une mesure de garde à vue qui s’est déroulée dans son est informé sans délai de l’arrivée de la personne déférée dans
ressort (Crim. 9 juin 1998, no 98-80.418, Bull. crim. no 187). les locaux de la juridiction. Par ailleurs, lorsque la garde à vue a
été prolongée mais que cette prolongation n’a pas été ordonnée
236. Avant la loi du 9 mars 2004. — La chambre criminelle par le juge des libertés et de la détention ou par un juge d’instruc-
n’avait pas fixé de limite à la durée pouvant s’écouler entre la tion, la personne retenue doit être effectivement présentée à la
fin de la garde à vue et la présentation effective devant le ma- juridiction saisie ou, à défaut, au juge des libertés et de la déten-
gistrat, validant par là même la pratique dite du « petit dépôt » tion avant l’expiration du délai de vingt heures. Les dispositions
nouvelles ne sont pas applicables lorsque la personne compa- (Crim. 6 févr. 2002, no 01-87.991, Bull. crim. no 26). La ju-
raît à la suite d’une garde à vue qui n’a pas été prolongée, ou à risprudence admet que la nullité d’actes accomplis pendant la
la suite d’une garde à vue prolongée par le juge des libertés ou garde à vue est sans effet sur les actes ultérieurement accomplis
de la détention ou par le juge d’instruction ou le juge des enfants dont cette mesure n’est pas le support nécessaire (Crim. 15 oct.
(sur ces points V. Circ. du 31 mai 2011, CRIM 11/14/E8, no 2.2). 2003, no 03-82.683, Bull. crim. no 193 ; JCP 2003. IV. 1044. –
La mainlevée de la garde à vue, susceptible de faire courir le Sur la théorie du support nécessaire, V. aussi infra, no 248). La
délai légal de 20 heures entre la levée de garde à vue et la com- décision de placer en garde à vue une personne à l’encontre de
parution devant un magistrat, ne devient effective qu’au moment laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soup-
de la notification de la fin de cette mesure, et non au moment çonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction,
où le procureur de la République a donné les instructions sur relève d’une faculté que l’officier de police judiciaire tient de la
l’heure de cette levée (Crim. 26 oct. 2004, no 04-84.550, Bull. loi et qu’il exerce, dans les conditions qu’elle définit, sous le seul
crim. no 255 ; AJ pénal 2005. 31, obs. J. C.). contrôle du procureur de la République ou, le cas échéant, du
juge d’instruction. Excède dès lors ses pouvoirs, la cour d’ap-
pel qui, après avoir constaté qu’il ressort des procès-verbaux
SECTION 4
de police que la prévenue peut être soupçonnée d’avoir commis
Nullités de garde à vue l’infraction d’outrage envers des personnes dépositaires de l’au-
torité publique, énonce que sa garde à vue ne répond pas aux
239. Histoire. — Pendant longtemps, les règles édictées par l’ar- nécessités de l’enquête et que son audition aurait dû être réa-
ticle 154 du code de procédure pénale concernant les gardes à lisée après convocation au commissariat (Crim. 4 janv. 2005,
vue auxquelles il est procédé lors de l’exécution de commissions no 04-84.876, Bull. crim. no 3 ; JCP 2005. IV. 1380). Toutefois
rogatoires n’étaient pas prescrites, selon la chambre criminelle, aucune disposition légale ne fait obstacle à ce que l’officier de po-
à peine de nullité. La Haute juridiction estimait que « leur inob- lice judiciaire sollicite les instructions du magistrat mandant avant
servation ne saurait, par elle-même, entraîner la nullité des actes de décider de la mesure (Crim. 27 sept. 2005, no 05-83.590,
de la procédure lorsqu’il n’est pas démontré que la recherche et Bull. crim. no 237 ; Gaz. Pal. 24-25 mars 2006, p. 2, note Mon-
l’établissement de la vérité s’en sont trouvés fondamentalement net ; D. 2006. Chron. 887, par Lennon).
viciés » (V. not. Crim. 15 oct. 1974, Bull. crim. no 292. – Crim.
22 déc. 1987, ibid. no 477 ; D. 1989. 323, note Julien-Lafer-
ART. 1er. – CONDITIONS DE RECEVABILITÉ
rière. – Crim. 26 févr. 1991, no 90-87.295, Bull. crim. no 97. –
Crim. 25 févr. 1992, no 91-80.217, ibid. no 83. – Crim. 22 avr. 242. Évolution jurisprudentielle. — La Cour de cassation exami-
1992, nos 91-85.467 et 92-80.881, ibid. no 172). Mais la juris- nait au cas par cas si une atteinte avait été portée aux intérêts de
prudence de la chambre criminelle a changé et désormais les la personne gardée à vue. Elle a aussi défini des cas dans les-
irrégularités touchant la garde à vue constituent l’un des motifs quels certaines irrégularités portent forcément atteinte à ses in-
principaux de requête en nullité et encore bien plus ces dernières térêts. Elle a ensuite semblé admettre que la nullité d’une garde
années. à vue pouvait être invoquée par un tiers dès lors qu’elle lui avait
porté préjudice, avant de revenir, dans un arrêt du 14 février 2012
240. Jurisprudence. — Tout retard injustifié dans l’avertissement (V. infra, no 245), à une jurisprudence plus traditionnelle.
que doit donner l’officier de police judiciaire de tout placement
en garde à vue au juge d’instruction porte nécessairement at- 243. Atteinte aux intérêts de la partie. — Il en est notamment
teinte aux droits de la personne gardée à vue : « Est irrégulière ainsi en matière de retard injustifié dans l’avertissement que doit
et fait nécessairement grief aux intérêts de la personne concer- donner l’officier de police judiciaire de tout placement en garde à
née la garde à vue dont le juge d’instruction mandant n’a été vue au juge d’instruction, retard portant nécessairement atteinte
avisé que le lendemain en l’absence de toute circonstance in- aux droits de la personne gardée à vue (Crim. 29 févr. 2000,
surmontable ayant fait obstacle à une information dès le début no 99-84.899, Bull. crim. no 92 ; Dr. pénal 2000. Comm. 80,
de la mesure » (Crim. 29 févr. 2000, no 99-84.899, Bull. crim. obs. Maron. – Sur l’irrégularité résultant d’un traitement humi-
no 92. – Crim. 2 févr. 2005, no 04-86.805, ibid. no 41 ; D. 2005. liant, V. Crim. 10 janv. 1995, no 94-82.198, D. 1996. IR 173).
IR 797 ; JCP 2005. II. 10111, note Henrion ; JCP 2005. IV. 1644 ; En revanche, l’allégation non établie d’un repos insuffisant pris
Procédures 2005, no 110, note Buisson). La notification n’est pas au cours de la garde à vue n’affecte pas la régularité de la com-
tardive dès lors qu’il résulte notamment des mentions contenues mission rogatoire (Crim. 1er sept. 1987, Bull. crim. no 308).
dans un procès-verbal signé de l’intéressé que, dès le début de Les dispositions prises par un magistrat pour mettre un détenu
la mesure de garde à vue, il a été informé de ce droit (Crim. à la disposition d’officiers de police judiciaire chargés d’une en-
9 févr. 2000, no 99-87.659, Bull. crim. no 64). Le procès-ver- quête ne sauraient ni constituer un acte d’instruction, ni affecter
bal doit être rédigé sur-le-champ mais l’irrégularité consistant la régularité des actes accomplis par eux. Cet officier de police
à ne consigner cette notification qu’ultérieurement ne peut en- judiciaire n’est pas tenu de mettre une personne qu’il extrait de la
traîner la nullité des actes effectués pendant la mesure lorsqu’il maison d’arrêt où elle est détenue pour autre cause, en garde à
est établi que cette personne a eu effectivement connaissance vue, dès lors qu’elle ne s’est opposée ni à son extraction, ni à son
de ses droits dès le début de la mesure (Crim. 21 mars 2000, audition, ni à l’exécution de la perquisition, et qu’elle n’avait été
no 99-87.632, Bull. crim. no 127). La rédaction d’un procès-ver- soumise à aucune autre contrainte que celle résultant du mandat
bal spécifique n’est pas indispensable, tout acte de procédure de dépôt dont elle était l’objet (Crim. 6 févr. 2002, no 01-87.991,
pouvant servir à établir l’accomplissement de la formalité (Crim. Bull. crim. no 26. – V. FOSSAERT-SABATIER, Le contrôle de la
24 oct. 2000, no 00-85.407, Bull. crim. no 306. – Crim. 19 déc. Cour de cassation en matière de garde à vue, Dr. pénal 1997.
2000, no 00-86.715, ibid. no 383). Chron. 10 et 13).
241. L’allégation non établie d’un repos insuffisant pris au cours 244. Incidences de la jurisprudence européenne Lambert et Ma-
de la garde à vue n’affecte pas la régularité de la commission theron. — Après les arrêts Lambert (CEDH 24 août 1998, Lam-
rogatoire (Crim. 1er sept. 1987, nos 85-92.518 et 87-83.370, bert c/ France, req. no 23618/94, D. 1999. Somm. 271, note
Bull. crim. no 308). Les dispositions prises par un magistrat Renucci ; RSC 1998. 829, obs. Pettiti ; JCP 1999. I. 105 chron.
pour mettre un détenu à la disposition d’officiers de police judi- Sudre), et Matheron (CEDH 29 mars 2005, Matheron c/ France,
ciaire chargés d’une enquête ne sauraient ni constituer un acte req. no 57752/00 ; JCP 2005. II. 10091, obs. di Raimondo ;
d’instruction ni affecter la régularité des actes accomplis par eux D. 2005. 1755, note Pradel), la chambre criminelle a modifié sa
jurisprudence traditionnelle selon laquelle une partie ne pouvait nouvelle : le demandeur qui n’était plus recevable en applica-
arguer de la nullité d’un acte ne la concernant pas directement tion des articles 173-1 et 174 du code de procédure pénale à
(Crim. 17 oct. 1989, Bull. crim. no 365. – Crim. 10 mars 1993, faire état de moyens de nullité de la procédure qu’il n’avait pas
no 91-80.936, ibid. no 106. – Crim. 14 nov. 2001, no 01-85.965, soulevés en temps utile devant la chambre de l’instruction, ne
ibid. no 238. – Crim. 15 févr. 2000, no 99-86.623, ibid. no 68. – saurait être admis à invoquer, devant la Cour de cassation de
Crim. 4 mars 2004, no 03-85.983, ibid. no 57 ; D. 2004. IR 1213 ; tels moyens pour faire grief à la chambre de l’instruction de ne
AJ pénal 2004. 207, obs. Leblois-Happe ; JCP 2004. IV. 1782). pas avoir annulé d’office certains actes de procédure en vertu
Elle a ainsi admis dans un arrêt du 6 septembre 2006 que le du pouvoir qu’elle tient de l’article 206 du code de procédure
requérant peut invoquer l’irrégularité d’un acte de la procédure pénale. Il n’importe qu’une requête déposée aux mêmes fins
concernant un tiers si cet acte, illégalement accompli, a porté par une autre personne mise en examen ait été déclarée rece-
atteinte à ses intérêts (Crim. 6 sept. 2006, no 06-84.869, Bull. vable (Crim. 27 avr. 2011, no 11-80.076, Bull. crim. no 75 ; D.
crim. no 208 ; Gaz. Pal. 28/29 mars 2007, p. 7, note Monnet ; 2011. 1352, obs Bombled). Le même principe est affirmé dans
JCP 2007. 19, note Matsopoulou ; AJ pénal 2006. 509, note Gi- un arrêt postérieur : « Attendu que X n’est plus recevable, en
rault). Dans le domaine de la garde à vue, un arrêt du 31 mai application des articles 173-1 et 174 du code de procédure pé-
2007 (no 07-80.928, Bull. crim. no 146 ; JCP 2007. IV. 2403 ; nale, à faire état auprès de la chambre de l’instruction, fut-ce
D. 2007. Actu. 2033 ; Dr. pénal 2007. Comm. 163, note Ma- en se prévalant d’une évolution de la jurisprudence, d’un moyen
ron ; Procédures 2007. Comm. 229, note Buisson) expose : de nullité des auditions de garde à vue de Mme Y, ne saurait
« Attendu qu’un demandeur n’est recevable à invoquer l’irrégula- être admis à invoquer devant la Cour de cassation un tel moyen
rité d’un acte concernant une autre personne mise en examen, pour faire grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa requête en annulation
qui n’a pas requis cette annulation, qu’à la condition de préci- d’actes de la procédure (Crim. 27 sept. 2011, no 11-81.458, AJ
ser en quoi cette irrégularité a porté atteinte à ses intérêts ; que pénal 2012. 43, obs Girault). Ce dernier arrêt est d’autant plus
Julien X… se bornant, en l’espèce, à alléguer l’existence d’un important qu’il rejette un moyen invoquant l’évolution de la juris-
grief qui résulterait pour lui de l’irrégularité de la garde à vue de prudence en matière de garde à vue.
Rachid Y…, sans en apporter toutefois aucune démonstration,
le moyen ne saurait être déclaré recevable. » Or, dans cette af-
faire X et Y avaient été placés tous deux en garde à vue, et X ART. 2. – INCIDENCES DE LA NULLITÉ DE LA GARDE À VUE
à vue entachée de nullité (Crim. 19 avr. 2000, no 00-80.357, Bull. 626 ; D. 2011. 1421, obs. Girault ; RSC 2011. 414, obs Danet),
crim. no 160. – Crim. 27 juin 2000, no 00-80.411, ibid. no 246), la chambre criminelle énonce : « Attendu qu’en se déterminant
ou lorsqu’elle refuse d’étendre l’annulation au mandat d’amener ainsi, par des motifs qui fondent la déclaration de culpabilité sur
décerné par le juge d’instruction, aux réquisitions supplétives du des déclarations enregistrées au cours de la garde à vue par les-
procureur de la République, au procès-verbal de première com- quelles la personne a contribué à sa propre incrimination sans
parution et à l’ordonnance de placement en détention provisoire, avoir pu être assistée par un avocat, et ensuite rétractées, la cour
en énonçant qu’en l’état des éléments antérieurs de l’informa- d’appel n’a pas justifié sa décision. » Il ne s’agit plus ici de nullité
tion, la garde à vue n’a pas été le préalable nécessaire à ces de procédure mais de la valeur probatoire de déclarations : pour
actes (Crim. 28 mars 2000, no 00-80.090, Bull. crim. no 137 ; la chambre criminelle, en fondant les motifs de déclaration de
JCP 2000. IV. 1156. – Crim. 15 oct. 2003, JCP 2003. IV. 1044). culpabilité sur des déclarations faites par une personne qui n’a
La théorie dite du support nécessaire a considérablement atté- pu être assistée par un avocat, la cour d’appel n’a pas justifié sa
nué les conséquences de la jurisprudence de l’Assemblée plé- décision. Dans ce cas d’espèce, la cour d’appel avait non seule-
nière du 15 avril 2011. En effet, la garde à vue d’une personne ment évoqué l’auto-incrimination du prévenu mais aussi d’autres
peut parfaitement n’avoir aucune conséquence sur la procédure éléments et notamment qu’il était mis en cause par la victime. La
qui a suivi. condamnation ne se fondait donc pas seulement sur l’auto-incri-
mination.
249. Renonciation à la présence de l’avocat. — Le gardé à vue
ne peut invoquer l’absence de son avocat pendant ses auditions 252. Modification de l’article préliminaire du code de procédure
que s’il n’avait pas renoncé à se prévaloir de ce droit : n’est pas pénale. — L’article préliminaire du code de procédure pénale a
fondé à se prévaloir de l’article 6 le prévenu qui a librement re- lui aussi été modifié par la loi no 2011-392 du 14 avril 2011, en-
noncé, lors de sa garde à vue, à l’assistance d’un avocat ; le trée en vigueur le 1er juin 2011, soit postérieurement à l’arrêt du
caractère libre et éclairé de cette renonciation résultant, en l’es- 11 mai précité. L’alinéa nouveau dispose « qu’en matière crimi-
pèce, des déclarations univoques faites par l’intéressé, en pré- nelle et correctionnelle, aucune condamnation ne peut être pro-
sence et par l’intermédiaire de son interprète, au début de la noncée contre une personne sur le seul fondement de déclara-
mesure, et réitérées au moment de son renouvellement (Crim. tions qu’elle a faites sans avoir pu s’entretenir avec un avocat et
14 déc. 2011, no 11-81.329, Bull. crim. no 256 ; D. 2012. 220 ; être assistée par lui. »
Dalloz actualité 1er févr. 2012, obs. Girault. – Crim. 17 janv.
2012, no 11-86.797, D. 2012. 503, obs. Lavric). Il reste à savoir 253. Jurisprudence postérieure. — La jurisprudence du 11 mai
si, sous l’égide du texte antérieur à la loi du 14 avril 2011, la Cour 2011 est plus sévère que la loi puisque l’article préliminaire inter-
européenne assimilera la renonciation à se prévaloir d’un entre- dit de prononcer une condamnation sur le seul fondement de dé-
tien de 30 minutes avec un conseil, à celle qui aurait consisté à clarations faites sans avoir pu s’entretenir avec un avocat et être
renoncer à être assisté par un avocat pendant les auditions, droit assisté par lui. Elle semblait conforme à la jurisprudence euro-
auquel l’intéressé n’a pas réellement renoncé, puisqu’on ne lui a péenne puisque, dans l’arrêt Salduz c/ Turquie du 27 novembre
pas proposé… 2008, la Cour européenne des droits de l’homme estime « qu’il
est en principe porté une atteinte irrémédiable aux droits de la
250. Procès-verbaux d’audition. — Selon l’article D. 10 du code défense lorsque des déclarations incriminantes faites lors d’un
de procédure pénale, les officiers de police judiciaire délégués interrogatoire de police subi sans assistance possible d’un avo-
établissent des procès-verbaux séparés pour chacun des actes cat sont utilisées pour fonder une condamnation ». C’est la men-
qu’ils accomplissent. Depuis l’entrée en vigueur de la loi du tion même de déclarations incriminantes formulées sans avoir
15 juin 2000, l’article 429 du code de procédure pénale, qui pu s’entretenir avec un avocat qu’il faut éviter. (V. aussi DANET,
possède valeur générale, exige que les questions apparaissent Le nouvel alinéa de l’article préliminaire du code de procédure
toujours sur les procès-verbaux. Enquêteurs et juges d’instruc- pénale nous prémunit-il des erreurs judiciaires ?, AJ pénal 2011.
tion ne peuvent donc plus user des « S. I. » qui fleurissaient au- 331 ; La contribution à sa propre incrimination sans assistance
paravant dans certains procès-verbaux, rendant ceux-ci quasi- d’un avocat ne peut avoir de force probante, pas même valeur
ment incompréhensibles, dès lors qu’aucune des questions po- de preuve « corroborante », RSC 2011. 414). Mais la chambre
sées n’apparaissait. Cette pratique n’est désormais plus pos- criminelle est revenue en arrière dans une décision du 6 dé-
sible et les chambres de l’instruction sont amenées à canceller cembre 2011 (no 11-80.326, Gaz. Pal. 22-24 janv. 2012, p. 7,
les parties d’audition ou d’interrogatoire qui comporteraient de note Bachelet ; RSC 2012. 185, obs. Danet) aux termes de
tels sigles (« S. I. » signifie traditionnellement : « sur interroga- laquelle elle confirme une décision de cour d’appel en relevant
tion » ou « sur interpellation »). Mais la chambre criminelle a es- « que les juges prononcent ensuite sur la culpabilité des préve-
timé que le respect des dispositions de l’article 429 du code de nus par les motifs repris au moyen, desquels il résulte qu’ils ne
procédure pénale n’était pas prescrit à peine de nullité. (Crim. se sont fondés ni exclusivement ni même essentiellement sur les
21 sept. 2005, no 04-85.149, inédit, Procédures 2005. Comm déclarations recueillies au cours des gardes à vue ». La circu-
291, obs. Buisson ; AJ pénal 2006. 128, obs. Roussel). laire de la Chancellerie avait proposé de considérer qu’il s’agit du
fondement principal (Circ. du 23 mai 2011, CRIM 2011-13/E6,
no IV.2.3). Mais, selon la jurisprudence européenne, ce n’est
ni le caractère exclusif ni même le caractère essentiel qui im-
ART. 3. – NON-OPPOSABILITÉ DES DÉCLARATIONS porte, mais le seul fait que la déclaration soit utilisée pour fonder
FAITES SANS AVOCAT une condamnation. La chambre criminelle a repris la jurispru-
dence du 6 décembre 2011 par la suite (V. Crim. 14 mars 2012,
251. Valeur probatoire des déclarations. — Dans un arrêt ren- no 11-85.827, Bull. crim. no 73 ; D. 2012. 1063. – Crim. 21 mars
du le 11 mai 2011 (no 10-84.251, Bull. crim. no 97 ; AJ pénal 2012, no 11-83.637, Dr. pénal 2012. Comm. 78, note Maron et
2011. 371, obs Ascenci ; D. 2011. 1421, obs. Girault ; JCP 2011. Haas ; D. 2012. 1063).
CHAPITRE 5
Commission rogatoire internationale
12 juill.) et son protocole additionnel du 16 octobre 2001 portant faire obstacle à l’exercice des poursuites exercées sur le fonde-
sur les comptes en banque (JOCE, no L 326/1, 21 nov.). Il existe ment de la compétence territoriale française (Crim. 8 juin 2005,
ce qu’on appelle des « conventions multilatérales spéciales » qui no 05-81.800, Bull. crim. no 174 ; D. 2005. IR 1959 ; JCP 2005.
s’appliquent pour certaines catégories d’infractions : stupéfiants IV. 2693 ; AJ pénal 2005. 368).
(Conv. des Nations unies contre le trafic illicite de stupéfiants du
19 déc. 1988), crime organisé (Conv. des Nations unies contre 266. Équipes communes d’enquête. — La loi du 9 mars 2004 a
la criminalité transnationale organisée du 15 nov. 2000), etc. prévu un dispositif particulier à l’intérieur des pays de l’Union eu-
Les conventions doivent être ratifiées par les États pour entrer ropéenne. Ce dispositif insère en droit interne les engagements
en application. Les décisions-cadres, quant à elles (et not. celle internationaux issus de la Convention du 29 mai 2000 et de la dé-
créant Eurojust le 28 février 2002 ou celle concernant le mandat cision-cadre du 13 juin 2002. Avec l’accord préalable du ministre
d’arrêt européen du 13 juin 2002), doivent être transposées dans de la Justice et le consentement du ou des autres États membres
les législations internes. La loi du 9 mars 2004 a ainsi transposé concernés, l’autorité judiciaire compétente peut créer une équipe
en France les deux décisions-cadres précitées. La multiplicité commune d’enquête, soit lorsqu’il y a lieu d’effectuer, dans le
des sources ne facilite pas leur mise en œuvre et est à la base de cadre d’une procédure française, des enquêtes complexes im-
confusions dans le maniement des instruments internationaux. pliquant la mobilisation d’importants moyens et qui concernent
d’autres États membres, soit lorsque plusieurs États membres
262. Exclusion de certaines infractions. — Selon les pays, cer- effectuent des enquêtes relatives à des infractions exigeant une
taines infractions sont ou ne sont pas exclues du domaine d’ap- action coordonnée et concertée entre les États membres concer-
plication de l’entraide. Les infractions purement militaires sont nés (C. pr. pén., art. 695-2). Les agents étrangers détachés par
exclues (Conv. du 20 avr. 1959, art. 1er, § 2). La convention un autre État membre auprès d’une équipe commune d’enquête,
reconnaît à la partie requise le droit de refuser l’entraide en ma- dans la limite des attributions attachées à leur statut, peuvent,
tière fiscale ou politique, mais d’autres instruments internatio- sous la direction de l’autorité judiciaire compétente, avoir pour
naux sont susceptibles de modifier encore ce principe. On peut mission, le cas échéant, sur toute l’étendue du territoire natio-
noter une évolution certaine en matière fiscale (la matière fiscale nal : … 1o de constater tous crimes, délits ou contraventions et
comprend à la fois le délit de fraude fiscale mais aussi les délits d’en dresser procès-verbal, au besoin dans les formes prévues
qui lui sont liés, telle l’escroquerie à la TVA, et en matière de par le droit de leur État ; … 2o de recevoir par procès-verbal les
douane, le délit de contrebande et d’importation et d’exportation déclarations qui leur sont faites par toute personne susceptible
de marchandise prohibée prévu par l’art. 414 c. douanes, les dé- de fournir des renseignements sur les faits en cause, au besoin
lits de change prévus à l’art. 459 du même code). La possibilité dans les formes prévues par le droit de leur État ; … 3o de se-
d’opposer le caractère fiscal de l’infraction n’a pas été reprise par conder les officiers de police judiciaire français dans l’exercice
l’article 50 de l’Accord Schengen du 19 juin 1990 (au moins en de leurs fonctions ; … 4o de procéder à des surveillances et, s’ils
matière d’impôts indirects et d’infractions douanières), ni par le sont spécialement habilités à cette fin, à des infiltrations, dans
protocole additionnel du 16 octobre 2001. les conditions prévues aux articles 706-81 et suivants, et sans
qu’il soit nécessaire de faire application des dispositions des ar-
263. Atteinte aux intérêts essentiels de la Nation. — L’article 2, ticles 694-7 et 694-8.
b) de la Convention européenne du 20 avril 1959 prévoit que si
la partie requise estime que l’exécution de la demande est de 267. « Les agents étrangers détachés auprès d’une équipe com-
nature à porter atteinte aux intérêts essentiels de la Nation, l’en- mune d’enquête peuvent exercer ces missions, sous réserve du
traide judiciaire peut être refusée. Cet article n’a pas été remis consentement de l’État membre ayant procédé à leur détache-
en cause par la Convention du 29 mai 2000, ni par le protocole ment » (C. pr. pén., art. 695-2).
additionnel du 16 octobre 2001.
268. Dans le cadre de l’équipe commune d’enquête, les of-
264. Principe de double incrimination. — En matière d’entraide, ficiers et agents de police judiciaire français détachés auprès
le principe de la double incrimination n’est pas aussi fort que d’une équipe commune d’enquête peuvent procéder aux opé-
dans le droit de l’extradition (où il s’affaiblit d’ailleurs aussi, rations prescrites par le responsable d’équipe, sur toute l’éten-
V. Mandat d’arrêt européen). L’absence de double incrimina- due du territoire de l’État où ils interviennent, dans la limite des
tion n’est pas un motif de refus lorsque l’acte demandé n’a pouvoirs qui leur sont reconnus par la loi. Leurs missions sont
pas de nature coercitive. En revanche, lorsqu’il s’agit d’une définies par l’autorité de l’État membre compétente pour diriger
arrestation, de perquisition ou de saisie, voire parfois de saisie l’équipe commune d’enquête sur le territoire duquel l’équipe in-
de documents bancaires (en Suisse), le principe de double tervient. Ils peuvent recevoir les déclarations et constater les in-
incrimination doit être respecté (V. infra, no 279). La qualification fractions dans les formes prévues par la loi, sous réserve de l’ac-
n’est pas pour autant essentielle, ce sont les faits qui doivent cord de l’État sur le territoire duquel ils interviennent (C. pr. pén.,
être analysés à l’aune du droit pénal de l’État requis. art. 695-3). L’équipe commune d’enquête ne peut être mise en
place que dans le cadre d’une procédure judiciaire préexistante,
265. Règle « non bis in idem ». — Elle ne s’applique que si la qu’il s’agisse d’une commission rogatoire ou d’une enquête pré-
procédure française et la procédure étrangère concernent les liminaire ou de flagrance.
mêmes faits. L’article 692 du code de procédure pénale prévoit
qu’aucune poursuite ne peut être exercée contre une personne 269. Échange d’informations. — L’ordonnance no 2011-1069 du
qui justifie qu’elle a été jugée définitivement à l’étranger pour les 8 septembre 2011 (JO 9 sept.), prise en application de l’article
mêmes faits et, en cas de condamnation, que sa peine a été 103 de la loi no 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de
exécutée ou prescrite. La Convention de Schengen a ajouté à programmation pour la performance de la sécurité intérieure (JO
ces cas celui de la peine en cours d’exécution, ou amnistiée, ou 15 mars), édicte des dispositions en conformité avec la déci-
si une grâce est intervenue. D’un point de vue pratique, l’appli- sion-cadre 2006/960/JAI du Conseil de l’Europe du 18 décembre
cation de la règle « non bis in idem » interdit à l’État qui a réa- 2006 relative à la simplification de l’échange d’informations et de
lisé en premier les poursuites de donner suite à une demande renseignements entre les services répressifs des États membres
d’entraide d’un État ayant poursuivi postérieurement les mêmes de l’Union européenne. Cette décision cadre met en place un
faits. L’exception de la chose jugée prévue aux articles 113-9 mécanisme commun et simplifié permettant aux services d’en-
du code pénal et 692 du code de procédure pénale ne saurait quête des États membres d’échanger plus fréquemment, soit sur
leur demande motivée, soit sur leur initiative, des informations à les perquisitions et saisies, que des conditions préalables soient
leur disposition aux fins de prévenir une infraction, d’en rassem- remplies, telle la compatibilité de la mesure avec la loi de l’État
bler les preuves ou d’en rechercher les auteurs, dans un délai requis ou la double incrimination. La saisie peut porter sur n’im-
strictement défini et sans conditions plus restrictives que celles porte quel bien meuble mais aussi, selon la doctrine, sur un im-
prévues au plan national. Les articles 695-9-31 et suivants du meuble.
code de procédure pénale définissent les services français com-
pétents pour échanger ces informations, dans le but de préve- 273. Demande d’application de règles procédurales fran-
nir et de réprimer les infractions, les modalités de la fourniture çaises. — Il est possible de demander que les autorités
de ces informations, celles de leur versement éventuel en pro- judiciaires saisies appliquent des règles procédurales fran-
cédure, et ceci lorsque la France est demandeur ou reçoit une çaises particulières. Cela peut être utile avec des pays dont les
demande d’un État étranger (V. aussi Dr. pénal 2011. Alerte 34). droits de la défense pourraient être moins développés que sur
le territoire national, notamment des États qui ne sont pas par-
ties à la Convention européenne de sauvegarde des droits de
SECTION 2 l’homme et des libertés fondamentales. Des précisions doivent
Formes de la commission rogatoire internationale alors être fournies dans le corps de la commission rogatoire aux
fins de permettre aux autorités judiciaires étrangères de mettre
en œuvre les principes du code de procédure pénale français,
ART. 1er. – CONDITIONS DE RÉDACTION
si elles l’acceptent. Toutefois, ces précisions ne sont pas utiles
DE LA COMMISSION ROGATOIRE INTERNATIONALE
dès lors que l’État requis fait partie de l’Union européenne. En
270. Formes différentes selon les conventions. — Les com- effet, la Cour de cassation ne contrôle la régularité de l’acte
missions rogatoires internationales diffèrent, quant à la forme, exécuté à l’étranger qu’au regard des droits de la défense et
de celles qui sont destinées à être exécutées sur le territoire des principes généraux du droit (V. infra, no 296).
national. En effet, leur forme est conditionnée par la conven-
274. Retour des pièces. — Si le magistrat le souhaite, il est
tion internationale qui permet sa délivrance et son exécution. Il
possible de mentionner expressément que les enquêteurs pré-
convient donc tout d’abord de vérifier quelle est la convention ap-
sents sur les lieux d’exécution de la mission, voire le magistrat
plicable. Selon le pays concerné, il sera par exemple nécessaire
lui-même, puissent se voir remettre les copies des pièces d’exé-
ou non de faire traduire la commission rogatoire internationale
cution (sur le retour des pièces, V. aussi infra, no 294).
et les pièces d’exécution, même si le principe d’une traduction
systématique peut être adopté. La traduction par un interprète
traducteur des pièces d’exécution d’une commission rogatoire à ART. 2. – ACTES QUI PEUVENT ÊTRE DEMANDÉS
l’étranger ne constitue pas une expertise (Crim. 19 juin 1984,
275. Convention européenne d’entraide judiciaire en matière pé-
JCP 1984. IV. 277), à moins que la mission n’ait un caractère
nale. — Selon l’article 3 de la Convention européenne du 20 avril
technique (Cass., ass. plén., 19 oct. 1984, Bull. civ., no 310 ;
1959 (in Code de procédure pénale Dalloz), les commissions
JCP 1984. IV. 354 ; D. 1985. IR 133). Il est nécessaire, le plus
rogatoires internationales ont pour objet l’accomplissement des
souvent : … 1o De rédiger un résumé des faits précis, notam-
actes d’instruction ou la communication des pièces à conviction.
ment en ce qui concerne les points qui vont faire l’objet de la
Les missions portent le plus souvent sur l’audition de témoins,
mission ; en droit anglo-saxon, il est souvent nécessaire de dé-
des vérifications bancaires, des perquisitions, voire l’interroga-
montrer que la mesure coercitive est nécessaire et proportion-
toire de personnes déjà mises en examen.
née à la gravité de l’infraction ; il convient d’indiquer les motifs
qui peuvent montrer, pour une perquisition, par exemple, qu’il 276. Certains actes sont exclus par nature de l’entraide interna-
existe des raisons sérieuses de penser que l’on peut trouver telle tionale. — Il s’agit de l’exécution des décisions d’arrestation ou
chose à tel endroit. Toutes les précisions sont les bienvenues, y de condamnation qui ressortissent au droit de l’extradition ou au
compris, par exemple, les références précises des objets déro- transfèrement des personnes condamnées.
bés ; … 2o D’indiquer les qualifications retenues et la référence
des textes applicables ; … 3o De préciser les termes de la mis- 277. Aide judiciaire la plus large possible. — Les conventions
sion ; … 4o De donner les références exactes de l’autorité dont énoncent souvent que les États s’accordent l’aide judiciaire la
émane la demande, non seulement ses noms, prénom et qua- plus large possible. Cela permet de demander un acte d’enquête
lité, mais aussi son adresse, son numéro de téléphone, de fax, qui ne serait pas expressément visé à la convention, d’autant que
et adresse e-mail. Cela permet un contact plus direct ; … 5o De la chambre criminelle a jugé, dans un cas où la convention men-
préciser l’identité du destinataire… tionnait seulement que « l’État requis exécute dans les formes
prévues par sa loi les demandes d’entraide en matière pénale
271. Formule générale. — La circulaire-mémento sur l’entraide de l’État requérant », que le fait que l’acte demandé ne soit pas
pénale internationale conseille une formule générale pour clôtu- expressément prévu ne devait pas être interprété comme inter-
rer la mission dans le style : « et de procéder à tous autres actes disant de le demander ou de l’exécuter (Crim. 30 mars 1999,
utiles à la répression des infractions visées dans la présente de- no 97-85.451, Bull. crim. no 60).
mande », qui pourrait être préférable à la formule traditionnelle :
« manifestation de la vérité ». La commission rogatoire doit enfin 278. Mise en examen. — La loi du 15 juin 2000 a posé de sérieux
porter le sceau de l’autorité qui la délivre. problèmes pratiques aux magistrats qui souhaitaient, à l’intérieur
même de l’espace national, déléguer à un collègue mieux placé
272. Contenu différent selon la convention. — Le contenu de la territorialement une mise en examen. Ces difficultés se posaient
mission dépend aussi étroitement de la convention applicable. exactement de la même manière pour solliciter une mise en exa-
Le droit français connaît, par exemple, une phase procédurale men à l’étranger dès lors que l’application du code de procédure
appelée « garde à vue » que ne connaissent pas les pays à pro- pénale était requise. L’article 154-2, issu de la loi du 9 mars
cédure accusatoire, pour lesquels il sera nécessaire de préciser 2004, a levé la difficulté et cette délégation est désormais pos-
si la personne est entendue comme témoin, ce qui lui confère sible (V. supra, no 107).
un statut particulier, ou comme suspect, ce qui lui en confère
un autre. Ainsi, il est souvent impossible de demander à la fois 279. Perquisitions et saisies. — Dans le cadre de Schengen, les
d’interpeller une personne et de l’entendre comme témoin. De États ne peuvent refuser d’exécuter une demande d’entraide aux
même, il arrive que l’État requis ait exigé, en ce qui concerne fins de perquisition ou de saisie lorsque le fait qui a donné lieu
à la demande d’entraide est punissable d’une peine de six mois 283. Prêt de détenu. — Dans le cadre du Conseil de l’Europe,
ou plus dans les deux États, ou lorsqu’il est punissable d’une une personne détenue peut être transférée temporairement sur
peine de six mois ou plus et dans l’autre au titre d’« infraction le territoire national sous condition de son accord et de son renvoi
aux règlements poursuivis par des autorités administratives dont dans le délai indiqué par l’État requis (Conv. EDH 1959, art. 11).
la décision peut donner lieu à un recours devant une juridiction Seule l’audition comme témoin est alors possible à l’exclusion de
compétente, notamment en matière pénale ». La France est l’un toute mise en examen ou interrogatoire qui nécessitent, quant à
des pays européens où les perquisitions peuvent être effectuées eux, la délivrance d’un mandat d’arrêt.
avec le moins de contrôle. Il est donc inutile en cette matière
de solliciter l’application des règles du code de procédure pé- 284. Visioconférence. — La visioconférence peut être deman-
nale français. En contrepartie, il est souvent nécessaire d’être dée à une juridiction étrangère sur la base de la Convention
très précis à la fois dans les lieux où les investigations doivent du 29 mai 2000 et du protocole du 9 novembre 2001 ou, en
être réalisées, mais surtout en ce qui concerne la nature des l’absence de convention, au titre de la réciprocité. Les articles
objets recherchés. Il est nécessaire de préciser que les objets du code de procédure pénale sont les articles 694-5, 706-71 et
saisis doivent être placés sous scellés. Dans le cas contraire, il R. 53-33 et suivants. Cet acte a lieu dans l’État requis en pré-
conviendra de les placer sous scellés à leur arrivée en France. sence d’un magistrat de cet État.
280. Comptes bancaires. — Il convient de faire une différence 285. Échanges d’informations. – Les dispositions de l’article 39
entre l’identification du détenteur d’un compte et le dépistage de la Convention d’application de l’Accord de Schengen du
consistant, pour une personne donnée, à identifier ses différents 19 juin 1990, selon lesquelles les services de police de chaque
comptes bancaires. En ce qui concerne l’identification, la cir- État partie peuvent procéder entre eux à des échanges d’infor-
culaire-mémento d’avril 2004 rappelle qu’il peut être opportun mations écrites destinées à apporter la preuve d’une infraction,
d’adresser d’abord une réquisition à la succursale en France de autorisent la communication d’informations relatives à des in-
la banque étrangère qui gère le compte qui pourra peut-être ré- vestigations, telles des écoutes téléphoniques, effectuées dans
pondre à la demande d’identification, sans qu’il soit nécessaire des procédures suivies sur le territoire de l’État concerné (Crim.
de recourir à une demande d’entraide. En cas de demande for- 9 juill. 2003, no 03-82.119, Bull. crim. no 138 ; D. 2003. IR 2285).
malisée, l’incompatibilité de la mesure avec le droit interne ne
peut être opposée par un État membre ni par un État membre du 286. Le code de procédure pénale prévoit que des opérations
Groupe d’action financière sur le blanchiment de capitaux (GA- d’infiltration et de surveillance sur le territoire français ou étran-
FI), ce qui inclut la Suisse, les États-Unis, le Canada, le Japon, ger peuvent être autorisées (C. pr. pén., art. 694-6, 694-7 et
la Chine, etc. Pour les États membres de l’Union européenne, 694-8).
l’État étranger requis ne peut opposer à la demande d’identifi-
cation la même condition relative à la double incrimination qu’à 287. L’ordonnance du 8 septembre 2011 (préc. supra, no 269),
une demande de perquisition ou de saisie. En ce qui concerne prise en application de l’article 103 de la loi du 14 mars
le dépistage, les possibilités sont souvent plus réduites, car seul 2011, édicte des dispositions relevant en conformité avec
le protocole du 16 octobre 2001 fait obligation aux États parties la décision-cadre 2006/960/JAI du Conseil de l’Europe du
d’être en mesure de dépister les comptes bancaires dont une 18 décembre 2006 relative à la simplification de l’échange
personne est titulaire. Les conditions de double incrimination d’informations et de renseignements entre les services répres-
sont aussi plus rigoureuses puisque le fait doit être punissable sifs des États membres de l’Union européenne. Les articles
d’une peine d’emprisonnement d’un maximum d’au moins quatre 695-9-31 et suivants du code de procédure pénale définissent
ans dans l’État membre requérant et d’au moins deux ans dans les services français compétents pour échanger ces informa-
celui de l’État requis ou une infraction relevant de la compétence tions, dans le but de prévenir et de réprimer les infractions, les
d’Europol, ou relevant de la protection des intérêts financiers des modalités de la fourniture de ces informations, celles de leur
Communautés européennes. Dans tous les cas, les demandes versement éventuel en procédure, et ceci lorsque la France est
devront être les plus précises possibles. demandeur ou reçoit une demande d’un État étranger. Elle a
été complétée par un décret no 2012-456 du 5 avril 2012 (Décr.
281. Convocations adressées à l’étranger. — Il est possible no 2012-456, JO 7 avr., JCP 2012. 481) insérant au Livre IV
de convoquer directement un témoin devant une juridiction du code de procédure pénale, un Titre X portant sur l’entraide
française et la transmission de la convocation directe par voie judiciaire internationale (C. pr. pén, art. R. 49-35 à R. 49-39
postale est possible entre États Schengen (Accord Schengen, nouv.).
art. 52). Hors États Schengen, en Europe, la transmission doit
se faire entre ministères de la Justice, même si l’adresse de la
personne est connue. En dehors de ces États, il convient de ART. 3. – CONDITIONS RELATIVES À LA TRANSMISSION
vérifier ce qui est prévu par la convention. DE LA COMMISSION ROGATOIRE INTERNATIONALE
282. Le témoin bénéficie d’une immunité. — Le témoin qui com- 288. Transmission des demandes d’entraide : absence de
paraît devant une autorité judiciaire française à la suite d’une convention applicable. — En l’absence de convention ap-
convocation délivrée à l’étranger ne peut être l’objet d’aucune plicable, les demandes de la France État requérant sont
restriction à sa liberté individuelle sur le territoire national pour transmises désormais par le ministère de la Justice sans passer
des faits ou condamnations antérieurs à son départ du territoire par la voie diplomatique. Dans les cas d’urgence, elles peuvent
étranger (Conv. EDH 1959, art. 12). Ce principe s’applique aus- être envoyées directement aux autorités judiciaires compétentes
si bien aux faits qui ont donné lieu à l’envoi de la convocation. Il pour les exécuter. Les pièces d’exécution sont renvoyées aux
n’est pas possible de « piéger » une personne en la convoquant autorités de l’État requérant par la même voie (C. pr. pén.,
comme témoin pour la mettre finalement en garde à vue, en exa- art. 694).
men et en détention… Cette immunité s’applique aussi bien au
témoin étranger que français domicilié à l’étranger. Elle ne vaut 289. Transmission des demandes d’entraide : États membres
toutefois que si le témoin a bien déféré à la convocation. Si la de l’Union européenne. — La Convention d’application de l’Ac-
personne reste en France quinze jours après son audition, l’im- cord de Schengen du 19 juin 1990 (in Code de procédure pé-
munité cesse. nale Dalloz) a profondément modifié les règles traditionnelles de
transmission. Celles-ci peuvent désormais être faites directe- poursuivie ne peut être effectué qu’avec son consentement. »
ment entre les autorités judiciaires si le pays requérant le sou- L’article 4 de la Convention relative à l’entraide judiciaire en
haite, sans condition d’urgence. Pour la France, c’est le procu- matière pénale entre les États membres de l’Union européenne
reur général près la cour d’appel qui était chargé, en vertu de du 29 mai 2000 prévoit en effet que l’État requis respecte les
l’ancien article 695, de la transmission. Depuis l’entrée en vi- formalités de procédure expressément indiquées par l’État
gueur de la loi du 9 mars 2004, d’application immédiate dans ce requérant, sauf pour l’État requis à écarter les « formalités et
domaine, c’est l’article 695-1 qui est applicable. Les demandes procédures qui sont contraires aux principes fondamentaux de
d’entraide sont transmises et les pièces d’exécution retournées son droit » (V. GHICA-LEMARCHAND, La commission rogatoire
directement entre les autorités judiciaires territorialement com- internationale en droit pénal, article préc.). Le magistrat ne
pétentes pour les délivrer et les exécuter. Avant de procéder à doit pas hésiter à poser de telles exigences, surtout lorsque
l’exécution d’une demande d’entraide dont il a été directement l’exécution dans le pays requis risque d’être moins protectrice
saisi, le juge d’instruction la communique immédiatement pour que celle du droit national (sur la condamnation de la France
avis au procureur de la République. à la suite de la non-existence en Belgique du statut de témoin
assisté et sur l’audition sans avocat d’un suspect, V. CEDH
290. Dans les cas d’urgence, et en ce qui concerne les États 27 oct. 2011, Stojkovic c/ France et Belgique, req. no 25303/08,
non membres de l’Union européenne, il est possible également AJ pénal 2012. 93, note Demarchi ; RSC 2012. 241, note
d’adresser directement la commission rogatoire à son desti- Marguénaud. – V. aussi DREYER, Un an de droit européen en
nataire. Cette faculté était ouverte par l’article 30 de la loi du matière pénale [janv.-déc. 2011], Dr. pénal 2012. Chron. 3).
10 mars 1927 et par l’article 15 de la Convention européenne.
L’article 694-1 dispose qu’en cas d’urgence, les demandes 294. Retour des pièces. — On a pu longtemps penser que le
d’entraide émanant des autorités judiciaires étrangères sont seul retour officiel des pièces d’exécution de la commission roga-
transmises, selon les distinctions prévues à l’article 694-2, au toire internationale permettait leur utilisation procédurale. Pour-
procureur de la République ou au juge d’instruction du tribunal tant, la Cour de cassation a jugé que « les articles 694 et 695
de grande instance territorialement compétent. Elles peuvent du code de procédure pénale instituent une mesure d’adminis-
également être adressées à ces magistrats par l’intermédiaire tration judiciaire qui n’intéresse pas les droits des parties ; qu’en
du procureur général. L’autorité judiciaire requise demeure libre conséquence, la méconnaissance de telles dispositions ne sau-
d’accepter ou non l’urgence ainsi signalée. rait constituer une cause de nullité de la procédure » (Crim. 9 juill.
2003, no 03-82.163, Bull. crim. no 134).
291. C’est le procureur général du ressort de la cour d’appel qui
est chargé d’assurer la transmission des demandes d’entraide et 295. Versement dans une autre procédure. — Même si le prin-
le retour des pièces d’exécution en cas d’utilisation de la procé- cipe de spécialité est beaucoup plus fort dans le cadre du droit de
dure d’urgence prévue à l’article 53 de la Convention Schengen. l’extradition que dans celui de l’entraide, il faut être vigilant lors-
Les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure qu’on souhaite utiliser certaines pièces exécutées dans le cadre
pénale (désormais abrogées), selon lesquelles le procureur gé- d’une CRI dans un dossier distinct de celui dans lequel elles ont
néral est chargé d’assurer le retour des pièces d’exécution des été demandées. Certaines conventions multilatérales prohibent
commissions rogatoires délivrées aux autorités judiciaires d’un en effet cette utilisation, sauf à demander à l’État requis son au-
État partie à la Convention de Schengen du 19 juin 1990, insti- torisation. C’est le cas de la Convention relative au trafic de stu-
tuent une mesure d’administration judiciaire qui n’intéresse pas péfiants, au blanchiment, à la criminalité transnationale organi-
les droits des parties. Il s’ensuit que la méconnaissance de telles sée et surtout de la Convention Schengen, même si le principe
dispositions ne saurait constituer une cause de nullité de la pro- est limité aux infractions fiscales. Malgré la multiplication des
cédure (Crim. 9 juill. 2003, préc.). organismes qui prennent en charge le bon déroulement des de-
mandes d’entraide, celles-ci restent souvent conditionnées à une
bonne volonté générale des États requis, voire à la « qualité » de
SECTION 3 leur réglementation interne, qui prévoit parfois une multitude de
Exécution de la commission rogatoire internationale recours possibles rendant difficile toute exécution. C’est ainsi
que des responsables suisses ont eux-mêmes dénoncé la multi-
plication des recours internes possibles dans leur pays, rendant
ART. 1er. – COMMISSION ROGATOIRE FRANÇAISE illusoires de nombreuses demandes, même si la révision de la
EXÉCUTÉE À L’ÉTRANGER loi en 1997 a amélioré les choses. Ainsi, en 1995, sur 258 de-
mandes d’entraide, il y a eu 189 recours, le record était de 93
§ 1er. – Exécution et contrôle de l’exécution recours pour la même procédure… Le procureur général de Ge-
nève, M. BERTOSSA, a qualifié la loi suisse de « loi d’entrave in-
292. Principe : application du droit de l’État requis. — L’auto- ternationale » (cité par GHICA-LEMARCHAND, La commission
rité étrangère saisie applique, lorsque les conventions n’en dis- rogatoire internationale en droit pénal, article préc.).
posent pas autrement, sa propre procédure pénale (Crim. 12 juin
1914, Bull. crim. no 276. – T. corr. Seine, 6 juill. 1954, D. 1954. 296. La nullité de l’exécution de la commission rogatoire inter-
654. – Conv. européenne d’entraide judiciaire, art. 3). C’est l’ap- nationale ne peut être soulevée qu’auprès des autorités requé-
plication du principe de la loi du for. Il est toutefois possible, rantes. Les pièces établies à la suite de l’exécution de la com-
lorsque la France est l’État requis, d’appliquer une règle étran- mission rogatoire internationale réalisée à l’étranger « peuvent
gère dès lors qu’elle a été édictée en faveur des droits de la dé- être contestées devant le juge français » et « la qualité de partie
fense. à intervenir dans ces instances s’apprécie au regard de la seule
législation française » (Crim. 30 oct. 1995, no 94-83.842, Bull.
293. Exception : application du droit de l’État requérant. — crim. no 332). Il en est de même quand la France est État re-
L’article 694-5 du code de procédure pénale, issu de la loi du quis (Crim., ord. président, 5 août 1991, no 89-85.624, inédit).
9 mars 2004, dispose : « Les interrogatoires, les auditions ou les La chambre d’accusation (de l’instruction) ne peut, sans excé-
confrontations réalisés à l’étranger à la demande des autorités der ses pouvoirs, porter une appréciation sur les modalités de
judiciaires françaises sont exécutés conformément aux disposi- délivrance et de transmission d’une commission rogatoire inter-
tions du présent code, sauf si une convention internationale y nationale par l’État requérant (Crim. 4 nov. 1997, no 97-82.274,
fait obstacle. L’interrogatoire ou la confrontation d’une personne Bull. crim. no 365). Un transport sur les lieux et des vérifications
matérielles effectuées à l’étranger par les autorités judiciaires de fonctionnement du Réseau judiciaire européen). Il a pour objectif
l’État requis en exécution d’une commission rogatoire internatio- de faciliter les demandes d’entraide relatives aux formes graves
nale ne sauraient être annulés dès lors que la Cour de cassation de criminalité. Depuis 1998, il existe dans chaque cour d’appel
est en mesure de s’assurer que les actes dont la nullité est de- un correspondant du Réseau judiciaire européen, au niveau du
mandée n’ont pas été accomplis en violation des droits de la dé- parquet général.
fense, ni d’aucun principe général du droit (Crim. 4 nov. 1997,
no 97-83.463, Bull. crim. no 366). La difficulté du contrôle des 301. Eurojust. — C’est une décision du Conseil de l’Union euro-
actes accomplis à l’étranger est évidente : ces actes sont régis péenne du 28 février 2002 qui a créé Eurojust (JOCE, no L 63/1,
par la loi de l’État requis et la jurisprudence française ne peut 6 mars). La mission d’Eurojust est de faciliter l’entraide dans
vérifier l’accomplissement d’une règle étrangère. Par ailleurs, le domaine de la criminalité organisée (V. THWAITES, Eurojust :
comment apprécier sa validité par rapport à une législation fran- autre brique dans l’édifice de la coopération judiciaire en matière
çaise par hypothèse distincte de celle qui a été effectivement pénale ou solide mortier ?, RSC 2003. 45).
appliquée ? C’est pourquoi la Cour de cassation se limite à un
302. La loi du 9 mars 2004 a transposé les dispositions euro-
contrôle pour s’assurer si « les actes n’ont pas été accomplis en
péennes dans les articles 695-4 à 695-9 du code de procédure
violation des droits de la défense, ni d’aucun principe général du
pénale. L’unité Eurojust, agissant par l’intermédiaire de ses
droit » (Crim. 4 nov. 1997, no 97-83.463, préc.).
représentants nationaux ou en tant que collège, peut : « …
297. Le principe de territorialité s’opposait à ce qu’un magistrat 1o Informer le procureur général des infractions dont elle a
instructeur puisse accomplir lui-même à l’étranger certains actes connaissance et lui demander de faire procéder à une en-
(Crim. 20 août 1992, no 92-82.970, Bull. crim. no 279). Il n’en quête ou de faire engager des poursuites ; … 2o Demander
est plus tout à fait de même depuis la loi du 13 décembre 2011 au procureur général de dénoncer ou de faire dénoncer des
(V. infra, no 308). On a vu que les officiers de police judiciaire infractions aux autorités compétentes d’un autre État membre
peuvent, quant à eux, sur délégation expresse et avec accord de de l’Union européenne ; … 3o Demander au procureur général
l’État concerné, procéder sur le territoire étranger à des auditions de faire mettre en place une équipe commune d’enquête ; …
(V. supra, no 6. – C. pr. pén., art. 18, al. 5, issu de la L. du 9 mars 4o Demander au procureur général ou au juge d’instruction de lui
2004). communiquer les informations issues de procédures judiciaires
qui sont nécessaires à l’accomplissement de ses tâches » (C. pr.
pén., art. 695-5). Le représentant national est un magistrat hors
§ 2. – Rôles de coordination
hiérarchie mis à disposition de l’unité Eurojust pour une durée
298. Autorités judiciaires à l’étranger. — Au regard du prin- de trois ans par arrêté du ministre de la Justice (C. pr. pén.,
cipe de la séparation des pouvoirs, selon la conception fran- art. 695-8). Le ministre de la Justice peut lui adresser des
çaise de l’ordre public international, un ministre de la Justice ne instructions dans les conditions fixées par l’article 30.
peut avoir la qualité d’autorité judiciaire. Il s’ensuit que l’audi-
303. Il peut demander aux autorités judiciaires compétentes de
tion, par le ministre de la Justice de l’État destinataire, de per-
lui communiquer les informations issues des procédures judi-
sonnes désignées dans le cadre de l’exécution d’une commis-
ciaires qui sont nécessaires à l’accomplissement de sa mission.
sion rogatoire doit être déclarée nulle, faute pour l’autorité judi-
L’autorité judiciaire sollicitée peut toutefois refuser cette commu-
ciaire compétente d’avoir procédé à la mesure d’instruction (Ver-
nication si celle-ci est de nature à porter atteinte à l’ordre pu-
sailles, 13 sept. 2001, BICC 2001, no 289).
blic ou aux intérêts essentiels de la Nation. Elle peut également
299. Magistrats de liaison. — Pour faciliter l’exécution des différer cette communication pour des motifs liés au bon dérou-
commissions rogatoires internationales, il a été créé des magis- lement d’une enquête en cours ou à la sécurité des personnes
trats de liaison, institués par l’Action commune 96/277/JAI du (C. pr. pén., art. 695-9).
22 avril 1996 (JOCE, no L 105, 27 avr. – Circ. SAEI no 97-04 du
304. Les magistrats peuvent solliciter Eurojust dès lors que la
14 nov. 1997, sur le rôle et les attributions des magistrats de
demande d’entraide est adressée à deux États ou plus. Il est
liaison). Leur rôle est de faciliter la transmission de l’information
aussi possible de l’adresser si la demande ne concerne qu’un
et de permettre une plus grande célérité dans l’exécution des
seul État lorsqu’il convient de mettre en place une équipe com-
commissions rogatoires internationales. Les CRI peuvent être
mune d’enquête, lorsqu’il n’existe pas de magistrat de liaison,
faxées au magistrat de liaison en même temps qu’elles passent
etc.
par le canal habituel, ce qui peut en accélérer le traitement
(V. LABRÉGÈRE, Les fonctions du magistrat de liaison et ses 305. Eurojust est une structure qui comprend des représentants
rapports avec les autres, in de KERCHOVE et WEYEMBERG du ministère public des quinze nations qui la composent. Il ne
[dir.], Vers un espace judiciaire européen, 2000, Institut d’étude s’agit toutefois absolument pas d’un parquet européen puisqu’il
européen, éd. Université de Bruxelles). Les pays concernés ne remplit aucune fonction de poursuites.
sont en augmentation constante. En 2012, la France compte un
magistrat de liaison dans les pays suivants : Algérie, Allemagne, 306. Rôle du consul de France à l’étranger. — L’article 5 de la
Canada, Chine, Croatie (et ce magistrat a compétence sur les Convention de Vienne sur les relations consulaires du 24 avril
pays suivants : Albanie, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Chypre, 1963 (Legifrance) prévoit que le consul peut transmettre des
Kosovo, Macédoine, Moldavie, Moténégro, Roumanie, Serbie, actes judiciaires et extrajudiciaires et exécuter des commissions
Slovénie), Brésil (compétent aussi pour le Vénézuéla et la Boli- rogatoires internationales conformément aux accords internatio-
vie), Turquie, Espagne, États-Unis, Italie (compétent également naux en vigueur.
pour Malte), Maroc, Pays-Bas, Qatar, République tchèque, Rou-
manie, Royaume-Uni, Russie, Sénégal. Leurs adresses mail 307. Transports de magistrats ou d’enquêteurs français à l’étran-
se trouvent sur la page : http://intranet.justice.gouv.fr/site/eu- ger. — Avec l’accord des autorités saisies, qui doit être demandé
rope-international/index.php ?rubrique=4399&ssrubrique=4419. dans la commission rogatoire internationale, et avec l’accord de
Dans d’autres pays, on peut prendre attache avec les attachés la Chancellerie, le magistrat instructeur français peut effectuer le
de sécurité intérieure ou les officiers de liaison. déplacement à l’étranger pour assister à la réalisation des opéra-
tions qu’il a demandées. Selon les pays, le rôle effectif joué par
300. Réseau judiciaire européen. — Il a été mis en place par ce magistrat diffère. Théoriquement, il ne peut lui-même poser
l’action commune du 29 juin 1998 (Circ. no 99-02 relative au bon aucune question ni ajouter au contenu de ce qui a été demandé
par écrit. Sur place, la latitude ouverte au juge peut toutefois être 311. Transmission au parquet pour avis des demandes reçues
plus importante. Le procureur de la République de la juridiction directement par le juge d’instruction. — Le dernier alinéa de l’ar-
du magistrat instructeur qui souhaite se déplacer, puis le procu- ticle 694-1 dispose : « Avant de procéder à l’exécution d’une de-
reur général émettent un avis sur l’opportunité du déplacement. mande d’entraide dont il a été directement saisi, le juge d’ins-
Les enquêteurs peuvent aussi se déplacer et ce déplacement truction la communique immédiatement pour avis au procureur
est devenu assez courant. Les autorisations sont alors données de la République ». Il ne s’agit pas seulement des demandes qui
par le ministère de l’Intérieur ou de la Défense. Le juge d’ins- lui paraissent pouvoir porter atteinte à l’intérêt de la Nation ou à
truction doit préciser dans sa commission rogatoire qu’il sollicite l’ordre public, comme sous l’égide de l’ancien article 696-2, mais
la présence des enquêteurs français. de toutes les demandes qu’il reçoit directement.
308. Transport pour audition de témoin. Loi du 13 décembre
2011. — Depuis l’entrée en vigueur de la loi no 2011-1862 du 312. Transports de magistrats ou d’enquêteurs étrangers en
13 décembre 2011, si les nécessités de l’instruction l’exigent, le France. — Cette pratique est de plus en plus courante. Elle doit
juge d’instruction peut, dans le cadre d’une commission roga- être autorisée par les autorités françaises. La chancellerie ad-
toire adressée à un État étranger et avec l’accord des autorités met même désormais, dans certains cas, un transport du juge
compétentes de l’État concerné, se transporter avec son greffier préparatoire à l’exécution de la mission. Dans le cadre de la
sur le territoire de cet État aux fins de procéder à des auditions. Convention d’application de l’Accord de Schengen, c’est le pro-
Il en donne préalablement avis au procureur de la République cureur général qui est habilité à autoriser la présence d’enquê-
de son tribunal. L’application de cet article, pendant de l’article teurs ou de magistrats étrangers en France. Excède ses pou-
18, alinéa 5 pour les OPJ, se limite aux auditions de témoin. voirs le juge d’instruction qui, chargé d’exécuter une commission
rogatoire délivrée en application de la Convention franco-séné-
ART. 2. – COMMISSIONS ROGATOIRES EXÉCUTÉES EN FRANCE galaise de coopération judiciaire du 29 mars 1974, refuse d’exé-
cuter les actes demandés en raison de la nature politique des
309. La France accepte de donner suite à une demande d’en- infractions poursuivies (Crim. 30 mars 1999, no 97-85.451, Bull.
traide étrangère même en l’absence de convention, à condition crim. no 60).
qu’il en soit de même dans l’autre sens ; c’est l’application du
principe de réciprocité.
313. Procédure. — Le principe est que les demandes d’entraide
310. Compétence de principe du ministère public. — Depuis l’en- émanant des autorités judiciaires étrangères sont exécutées se-
trée en vigueur de la loi Perben II (sur ce point, les dispositions lon les règles du code de procédure pénale : c’est le principe de
étaient d’application immédiate), les commissions rogatoires in- la loi du for (C. pr. pén., art. 694-3). Mais si la demande d’en-
ternationales émanant des autorités judiciaires étrangères sont traide le précise, elle est exécutée selon les règles de procédure
exécutées par le procureur de la République ou par les officiers expressément indiquées par les autorités compétentes de l’État
ou agents de police judiciaire requis à cette fin par ce magistrat. requérant, à condition, sous peine de nullité, que ces règles ne
Elles sont exécutées par le juge d’instruction ou par des officiers réduisent pas les droits des parties ou les garanties procédurales
de police judiciaire agissant sur commission rogatoire de ce ma- françaises. Le principe est expressément prévu par l’alinéa 2 de
gistrat lorsqu’elles nécessitent certains actes de procédure qui l’article 694-3 du code de procédure pénale, situé dans un cha-
ne peuvent être ordonnés ou exécutés qu’au cours d’une ins- pitre qui concerne aussi les pays non membres de l’Union euro-
truction préparatoire (C. pr. pén., art. 694-2). Le principe an- péenne. Lorsque la demande d’entraide ne peut être exécutée
cien, selon lequel c’était le doyen des juges d’instruction qui re- conformément aux exigences de l’État requérant, les autorités
cevait toutes les commissions rogatoires internationales en ma- compétentes françaises en informent sans délai les autorités de
tière pénale, a donc disparu. Le magistrat instructeur n’est plus l’État requérant et indiquent dans quelles conditions la demande
compétent que lorsque « certains actes de procédure ne peuvent pourrait être exécutée. Les autorités françaises compétentes et
être ordonnés ou exécutés qu’au cours d’une instruction prépa- celles de l’État requérant peuvent ultérieurement s’accorder sur
ratoire ». On comprendra dans ces actes l’interrogatoire de pre- la suite à réserver à la demande, le cas échéant, en la subor-
mière comparution ou tout interrogatoire au fond. Les écoutes donnant au respect desdites conditions. Lorsque, conformément
téléphoniques doivent aussi faire partie de ces actes même si, aux stipulations prévues par les conventions internationales, le
depuis l’entrée en vigueur de la loi Perben, le parquet peut sol- procureur de la République ou le juge d’instruction communique
liciter du juge des libertés et de la détention certaines écoutes à des autorités judiciaires étrangères des informations issues
dans des cas particuliers (V. Instruction préparatoire). L’inter- d’une procédure pénale en cours, il peut soumettre l’utilisation
vention de la juridiction de jugement pour l’exécution d’une de- de ces informations aux conditions qu’il détermine (C. pr. pén.,
mande d’entraide n’est plus prévue par les nouveaux textes. art. 694-9).
INDEX ALPHABÉTIQUE
Action publique (prescription), 141 V. Faux témoignage, Garde à vue – quant aux infractions, 19 s. : dé- souveraineté des États (principe),
Article préliminaire (C. pr. pén.), Avocat légations de pouvoirs (annulation), 258
252 – assistance par, 190 21 ; difficultés de mise en œuvre, – exécution, 292 s. : commission ro-
– droits des avocats, 191 s. : as- 20 ; principe de prohibition, 19 gatoire française exécutée à l’étran-
Assemblée plénière, 150 Commission rogatoire internatio- ger, 292 s. [exécution et contrôle
sistance aux auditions et confron-
Association de malfaiteurs, 211 nale, 254 s. de l’exécution, 292 s. : application
tations, 196 s. ; consultation des
Audition pièces de la procédure, 193 s. ; cri- – cadre d’intervention, 258 s. : at- du droit de l’État requérant (ex-
– effectuée à l’étranger, 75 minalité organisée, 200 ; entretien teinte aux intérêts essentiels de la ception), 293 ; application du droit
avec le client, 192 ; information sur Nation (obstacle), 263 ; double de l’État requis (principe), 292 ;
– libre, 202 s.
la nature et la date des faits, 191 incrimination (principe), 264 ; contestation, 296 ; principe de ter-
– personne mise en examen, 50 échange d’informations, 269 ; ritorialité (recul), 297 ; retour des
– simple témoin, 112 – renonciation à sa présence, 249
équipes communes d’enquête, pièces, 294 ; versement dans une
V. Garde à vue
– témoin sous X, 72 s. : domicilia- 266 s. ; exclusion de certaines autre procédure, 295] [rôles de co-
tion des témoins, 72 ; renseigne- Bande organisée, 211, 214 infractions, 262 ; instruments, ordination, 298 s. : autorités judi-
ment anonyme, 74 ; témoin ano- Commission rogatoire générale 260 s. ; non bis in idem, 265 ; ciaires à l’étranger, 298 ; Eurojust,
nyme, 73 – quant aux actes, 22 301 s. ; magistrats de liaison, 299 ;
réseau judiciaire européen, 300 ; V. Association de malfaiteurs, loi du 14 avril 2011, 223 s. [droit V. Garde à vue
rôle du consul de France à l’étran- Bande organisée, Extorsion de commun, 223 s. : durée, 223 ; Mineurs, 212, 222, 231
ger, 306 ; transport pour audition fonds, Proxénétisme état de santé, 227 ; prolongation Ministre de la justice (autorité judi-
de témoin, 308 ; transports de ma- Date, 93 (compétence), 226 ; prolongation ciaire étrangère, non), 298
gistrats ou d’enquêteurs français Déférement (modalités), 225 ; prolongation Mise en examen, 107, 278
à l’étranger, 307] ; commissions V. Garde à vue conditionnée à un an d’emprison- Nature juridique, 4 s.
rogatoires exécutées en France, Définition, 1 s. nement, 224] [régimes particuliers, Non bis in idem, 265
309 s. [demandes reçues direc- Délégation 228 s. : criminalité organisée, 229 ; Nullités
tement par le juge d’instruction – à un juge d’instruction, 30 mineurs, 231 ; nouvel art. 706-73 V. Garde à vue
(transmission), 311] [ministère pu- – à un magistrat du siège du TGI, 29 C. pr. pén, 228 ; terrorisme, 230] Officier de police judiciaire
blic (compétence de principe), 310] – subdélégation, 31 – nullités, 239 s. : conditions de re- – délégataire, 33 s. : compétence,
[procédure, 313] [transports de ma- DGCCRF (et agents des administra- cevabilité, 242 s. [atteinte aux inté- 34 s. [actes ne pouvant pas être
gistrats ou d’enquêteurs étrangers tions), 47 rêts de la partie, 243 s.] [évolution délégués, 49 s. : actes de juri-
en France, 312] Diplomate, 156 jurisprudentielle, 242] [soumission diction, 49 ; apposition des scel-
– formes, 270 s. : actes pouvant être Douanes judiciaires, 46 aux art. 173-1 et 174 C. pr. pén, lés, 55 ; audition d’une personne
demandés, 275 s. [actes exclus Double incrimination (principe), 264 246] ; historique, jurisprudence, mise en examen, 50 ; expertise,
par nature, 276] [aide judiciaire la Échange d’informations, 269, 285 239 s. ; incidences, 247 s. [actes 52 ; perquisitions impliquant la
plus large possible, 277] [comptes Écoutes téléphoniques, 58 s. antérieurs, 247] [procédure sub- présence du magistrat, 53 ; re-
bancaires, 280] [convention eu- – absence de motivation spéciale, 59 séquente, 248] [procès-verbaux constitution d’itinéraire, 51 ; remise
ropéenne d’entraide judiciaire en – destruction, 62 d’audition, 250] [renonciation à la volontaire, 54] [actes pouvant être
matière pénale, 275] [convoca- – écoutes ordonnées par le JLD, 68 présence de l’avocat, 249] ; non délégués, 56 s. : suivant des condi-
tions adressées à l’étranger, 281] – faits nouveaux, 66 opposabilité des déclarations faites tions légales préalables, 89 s. ; sur
[échanges d’informations, 285 s.] – formalités, 60 sans avocat, 251 s. [art. prélimi- mention expresse du juge, 57 s.]
[immunité du témoin, 282] [mise – informations auprès des opéra- naire modifié, 252] [jurisprudence [choisie par le juge, 41 s. : choix
en examen, 278] [perquisitions et teurs, 65 postérieure, 253] [valeur proba- guidé par celui du parquet, 41 ; dé-
saisies, 279] [prêt de détenu, 283] – surveillance téléphonique, 67 toire, 251] signation d’un « service », 42 ; in-
[visioconférence, 284] ; conditions – transcription, 61 – placement, 152 s. : droits du gardé formation des OPJ, 44 ; pluralité de
de rédaction, 270 s. [contenu diffé- – versement au dossier d’une com- à vue, 176 s. [avant la loi du 14 services saisis, 43] [services mul-
rent selon la convention, 272] [de- mission rogatoire en cours d’exécu- avril 2011, 176 s. : entretien avec tiples, 45 s. : DGCCRF et fonction-
mande d’application de règles pro- tion, 63 s. un avocat, 185 s. ; état d’ébrié- naires du ministère de l’Économie,
cédurales françaises, 273] [formes Enquête préliminaire ou de fla- té, 179 ; examen médical, 184 ; 47 ; douanes judiciaires, 46 ; GIR,
différentes selon les conventions, grance (déclenchement), 26 information des droits, 177 ; infor- 48] [territoriale, 34 s. : assistance
270] [formule générale, 271] [retour V. Faits nouveaux mation d’un proche, 183 ; langue facultative d’un OPJ territoriale-
des pièces, 274] ; conditions de Enregistrement audiovisuel, 168 s. comprise, 181 ; notification tar- ment compétent, 39 ; délégation à
transmission, 288 s. [absence de V. Garde à vue dive, 178 ; nullité, 180 ; silence, des OPJ au-delà de la compétence
convention applicable, 288] [com- Équipes communes d’enquête, 182 ; transcription contre la vo- propre du juge, 36 ; déterminée
pétence du procureur général, 291] 266 s. lonté de la personne entendue, par décret, 34 ; extension de com-
[États membres de l’UE, 289] [ur- Eurojust, 301 s. 187] [depuis la loi du 14 avril 2011, pétence en cas d’urgence, 37 s. ;
gence, 290] Exécution (modalités), 104 s. 188 s. : assistance par un avocat, formalisme de l’art. D. 12, 40]
– historique, 254 s. – enquêteurs, 109 s. : « audition » du 190 ; audition libre, 202 ; avertis- – délégué, 109 s. : audition du « sus-
Compte bancaire, 280 suspect (art. 105), 131 s. ; cadre sements, 189 ; droits des avocats, pect » (art. 105), 131 s. [jurispru-
Conditions général d’intervention, 109 s. [exé- 191 s. ; information des droits, dence, 135 s. : appréciation in
– de fond, 11 s. : autorités délé- cution en liaison avec le juge d’ins- 188 ; nouveaux droits de la victime, concreto, 135 ; audition après in-
gantes, 12 s. [chambre de l’instruc- truction, 127 s.] [modalités d’exé- 201] ; formalités, 159 s. [contrôle, vestigations, 137 ; résumé des dé-
tion, 14] [cours d’assises, 16] [juge cution, 115 s.] [principes, 109 s.] 164] [dispositions applicables sur clarations, 136] [nullité encourue,
d’instruction, juge des enfants, 13] – magistrat délégué, 105 s. : ab- commission rogatoire, 159] [en- 138 s. : étendue de l’annulation,
[tribunal correctionnel et cour d’ap- sence de pouvoir d’appréciation, registrement audiovisuel, 168 s.] 138 ; interdiction de reconstituer
pel, 15] ; autorités délégataires, 106 ; conformité des actes à la [existence d’une peine d’empri- les PV annulés, 140 ; invocation
28 s. [magistrats, 29 s.] [officiers commission, 108 ; conseil, mise à sonnement, 160] [information du de l’art. 105 par un tiers, 139 ;
de police judiciaire, 33 s.] ; res- disposition du dossier, 105 ; délé- magistrat, 163] [lieu, 172] [man- prescription de l’action publique,
pect des règles de la saisine, 17 s. gation de la mise en examen, 107 dat de recherche, 165] [objectifs, 141] [principes, 131 s. : art. 105 et
[actes accomplis dans le cadre de Expertise, 52 162] [prérogative de l’OPJ, 161] garde à vue, 132 ; indices graves
la saisine, 23 s.] [commission ro- Extorsion de fonds, 211 [procès-verbal, 167] [registre, 166] et concordants, 131 ; obligations
gatoire générale quant aux actes, Faits nouveaux [rétention de sûreté, 174] [rete- du témoin, 134 ; témoin assisté,
22] [commission rogatoire générale – connaissance, 24 nue douanière, 175] [transport du 133] ; cadre général d’intervention,
quant aux infractions, 19 s.] – déclenchement d’une enquête, 26 juge d’instruction, 173] ; personnes 109 s. [exécution en liaison avec le
– de forme, 92 s. : annexion de – obligation d’information des OPJ, concernées, 152 s. [diplomate, juge d’instruction, 127 s. : contacts
pièces, 101 ; copies, 95 ; date, 27 156] [investigations corporelles, entre les enquêteurs et le juge,
93 ; délais d’exécution, 99 ; diffu- – prohibition des actes coercitifs, 25 155] [parlementaire, 157] [partie 127 ; dessaisissement, clôture,
sion en cas d’opérations simulta- Faux témoignage, 114 civile, 154] [président de la Répu- 130 ; information du juge mandant
nées, 96 ; disparition, 103 ; faits, Fichiers d’analyse sérielle, 125 blique, 158] [prestation de serment par les OPJ, 128 ; vérification par le
98 ; nom des parties, audition, 97 ; Garde à vue, 142 s. du suspect entendu sur commis- juge, 129] [modalités d’exécution,
reflet du dossier, 92 ; retour partiel, – Conv. EDH, 147 s., 194, 245 sion rogatoire, 153] [témoin, 152] 115 s. : assistance à l’exécution
100 ; signature et sceau, 94 ; ver- – définition, 144 Groupe d’intervention régional, 48 par des personnes qualifiées, 115 ;
sement au dossier, 102 – durée, 204 s. : avant la loi du 14 Historique, 7 s. audition dans le cadre d’une autre
V. Magistrat, Officier de police judi- avril 2011, 205 s. [droit commun, Indicateurs (rémunération), 121 procédure, 118 ; données informa-
ciaire, Saisine (règles) 205 s. : jurisprudence, 208 ; pro- Indices graves et concordants, 131 tiques sur les lieux d’une perqui-
Conseil constitutionnel, 148, 171, longation (principes), 205 ; prolon- Infiltration, 77 s. sition, 120 ; droit de réquisition,
203, 214, 238 gation par le juge du lieu d’exécu- – autorisation exceptionnelle, 79 119 ; fichiers d’analyse sérielle,
tion, 206 ; transport du juge, 207] – définition, 78 125 ; logiciels de rapprochement
Consul de France, 306
[régimes particuliers, 209 s. : avant – domaine, 77 judiciaire, 124 ; prélèvements bio-
Convention
la loi du 9 mars 2004, 209 s. ; de- Intérêts fondamentaux de la Nation logiques, 122 ; prise de sang sous
– EDH, 152 s., 194 puis la loi du 9 mars 2004, 213 s.] ; (atteinte), 263 contrainte, 123 ; rapports et ren-
– européenne d’entraide judiciaire en cumuls de gardes à vue, 232 s. Juge des enfants, 13 seignements, 126 ; rémunération
matière pénale, 275 [faits distincts, 233] [loi du 14 avril Loyauté (preuves), 111 des indicateurs, 121 ; transport du
V. Garde à vue 2011, 234] [mêmes faits, 232] ; Magistrat juge, 116 s.] [principes, 109 s. :
Coopération policière internatio- défèrement après garde à vue, – délégataire, 29 s. : juge d’instruc- audition d’un simple témoin, 112 ;
nale, 255 s. 235 s. [avant la loi du 9 mars tion, 30 ; magistrat du siège du TGI, faux témoignage, 114 ; formalisme,
Copies, 95 2004, 236] [décisions du Conseil 29 ; subdélégation, 31 110 ; loyauté des preuves, 111 ; ori-
Cour d’appel, 15 constitutionnel, 238] [depuis la loi – délégué, 105 s. gines des pouvoirs de l’OPJ, 109 ;
Cour d’assises, 16 du 9 mars 2004, 237] [nature juri- Magistrat de liaison, 299 personne nommément citée dans
Criminalité organisée dique du transfert, 235] ; depuis la Mandat de recherche, 165 une plainte, 113]
V. Audition, Écoutes télépho- Remise volontaire, 54 – commission rogatoire générale Souveraineté (principe), 258
niques, Infiltration, Sonorisation Représentant légal, 91 quant aux infractions, 19 s. : délé- Stupéfiants, 80, 209
Parlementaire, 157 Réquisition (droit de), 119 gations de pouvoirs (jurisprudence), Supplément d’information, 14 s.
Parloir (écoutes), 71 Réseau judiciaire européen, 300 21 ; prohibition [mise en œuvre, 20]
Témoin
Perquisition (et saisie), 279 Rétention de sûreté, 174 [principe, 19]
– apposition de scellés, 55 Retenue douanière, 146, 175 Santé (gardé à vue) – anonyme, 73
– domicile (gardé à vue, détenu), 88 Saisine (règles), 17 s. – état de santé, 227 – assisté, 89, 133
– données informatiques, 120 – actes accomplis dans le cadre – état d’ébriété, 179 – immunité, 282
– nécessitant la présence du magis- de la saisine, 23 s. : déclenche- – examen médical, 184, 216 – obligations (audition), 134
trat, 53 ment d’une enquête préliminaire ou Sceau, 94 Terrorisme, 81, 210, 221, 230
– remise volontaire, 54 de flagrance, 26 ; faits nouveaux Scellés (apposition), 55 Transport, 116 s., 173, 207, 307 s.
Prélèvement biologique, 122 [connaissance, 24] [prohibition des Serment, 153
Tribunal correctionnel, 15
Président de la République, 158 actes coercitifs, 25] ; obligation Service saisi, 42 s.
Prise de sang (sous contrainte), 123 d’information des OPJ, 27 ; prohi- Signature, 94 Victime
Proxénétisme, 82, 211 bition des investigations coercitives Sonorisation, 69 s. – nouveaux droits, 201
Rapprochement judiciaire (logi- hors saisine, 23 – contrôle du juge d’instruction, 69 – partie civile : audition, 89 ; place-
ciels), 124 – commission rogatoire générale – jurisprudence, 70 ment en garde à vue, 154
Reconstitution (itinéraire), 51 quant aux actes, 22 – parloirs, 71 Visioconférence, 284