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Odeurs
Benoit Gingras, Christophe Guy, Thierry Pagé
1. Introduction
2. Principales sources d'odeurs environnementales
3. Populations touchées
4. Caractéristiques de l'exposition aux odeurs
4.1 Perception des odeurs
4.2 Métrologie
4.3 Analyse de l'impact-odeur
5. Effets des odeurs environnementales sur la santé
5.1 Concepts de nuisance et de santé en matière d'odeurs
5.2 Physiopathologie des symptômes associés aux odeurs
5.3 Relation entre perception des odeurs et toxicité aiguë
5.4 Mécanismes des symptômes liés aux odeurs environnementales
5.5 Effets physiologiques liés aux odeurs
5.6 Effets psychologiques liés aux odeurs
6. Nuisance olfactive et réglementations
6.1 Principes à la base des réglementations
6.2 Quelques exemples de réglementation
7. Approches d'atténuation des odeurs
7.1 Approches de prévention
7.2 Approches de traitement
8. Conclusion
500 ENVIRONNEMENT ET SANTÉ PUBLIQUE
Cerveau
Bulbe olfactif
Sinus Hypophyse
Lame criblée
de l'ethmoïde
Filet du nerf olfactif
Muqueuse olfactive
Sinus
Fosses nasales
Cornet moyen
Cornet intérieur
Source: Laboratoire de Neurosciences et
Cornet supérieur Systèmes Sensoriels
Le nerf trijumeau contribue aussi à évaluer la sent simultanément sur la muqueuse olfactive.
magnitude de l'odeur même pour les composés Les différents produits composant l'odeur ont
sans effet irritant (Cain, 1974a). plutôt tendance à se combiner de façon infra-
additive*, peu importe la nature des composés
impliqués ou leur degré de similitude (Berglund
2. PRINCIPALES SOURCES et coll., 1973). Cependant, l'effet irritant aurait
D'ODEURS ENVIRONNEMENTALES tendance à agir de façon additive, surtout
lorsque leur concentration est plus élevée
Une grande variété d'activités urbaines, indus-
(Cometteo-Muniz et coll., 1989).
trielles et agricoles sont source d'émissions
d'odeurs dans l'air et sont susceptibles d'attein- Le tableau 19.1 relève les sources d'odeurs
dre et d'affecter certaines personnes. Certains environnementales les plus fréquentes selon leur
milieux naturels dans lesquels on retrouve des origine.
activités biologiques de décomposition peuvent
aussi émettre des odeurs qui seront perçues dans 3. POPULATIONS TOUCHÉES
le voisinage. La qualité de l'air intérieur des édi- Les populations affectées par les odeurs sont
fices publics, en milieu de travail et en milieu habituellement celles qui habitent dans le voisi-
résidentiel, peut aussi être affectée par des émis- nage des sources émettrices et qui se voient
sions d'odeurs de nature variée. incommodées par ces odeurs non désirées. Nous
Une source d'odeur est généralement com- verrons plus loin que plusieurs facteurs inter-
posée de multiples produits odorants dont cer- viennent pour motiver une plainte éventuelle de
tains ont aussi un caractère irritant et q u i agis- la part des citoyens.
* Aussi nommé hypoadditive: lorsque le résultat d'une interaction produit un effet inférieur à la somme des substances
individuelles.
502 ENVIRONNEMENT ET SANTÉ PUBLIQUE
4. CARACTÉRISTIQUES DE
L'EXPOSITION AUX ODEURS
4.1 Perception des odeurs
Comme nous l'avons v u , la perception
des odeurs résulte du traitement par le
Figure 19.2 Distribution de la sensibilité olfactive dans la
population cerveau de s t i m u l i localisés sur la
muqueuse olfactive. Celle-ci peut être
Source: AIHA (1993) représentée par un grand nombre de
récepteurs individuels qui émettent cha-
Une odeur émise est perçue par les personnes cun un signal d'une intensité différente en fonc-
exposées selon des caractéristiques quantitatives tion du mélange de composés adsorbés. À partir
(intensité), qualitatives (reconnaissance de de cette i n f o r m a t i o n complexe, le cerveau
l'odeur) et son caractère hédoniste (apprécia- établit d'abord une image odeur, puis la com-
tion). Comme le montre la figure 19.2, dans pare au répertoire d'images odeurs déjà acquises.
une population générale, la plupart des com- Ces images odeurs sont associées au vécu de
posés odorants sont perçus selon une distribu- l'individu; l'appréciation de la qualité de l'odeur
t i o n log-normale, 96 % des gens étant consi- est alors suggestive, car elle fait intervenir l'ex-
dérés comme ayant une sensibilité normale, 2 % périence personnelle et les habitudes culturelles.
étant qualifiés d'hypersensibles et 2 % d'hy- S'il s'agit d'une nouvelle image odeur n o n
posensibles ou anosmiques (Amoore et Hautala, référencée, le cerveau l'associera à l'événement
1983). La pente de distribution varie d'un com- vécu lors de la perception.
posé à l'autre. Cependant, des individus peu- Les principales informations caractéristiques
vent être hypersensibles à une odeur et insensi- de l'odeur perçue sont
bles à une autre.
- la qualité de l'odeur: la reconnaissance de
Certains facteurs externes, comme l'exposi- l'odeur, et dans certains cas pour des i n d i -
tion professionnelle à des gaz, vapeurs ou par- vidus très entraînés, la reconnaissance des
ticules irritants, contribuent à altérer quantita- principaux composés ou des principales
tivement et qualitativement la perception des odeurs «primaires» q u i la constituent;
odeurs. Des facteurs personnels, de nature phy-
- l'appréciation de l'odeur ou son caractère
siologique, peuvent également influencer la sen-
hédonique: l ' i d e n t i f i c a t i o n du caractère
sibilité olfactive chez l'humain (Shusterman,
plaisant ou désagréable de l'odeur;
1992). Citons, par exemple, l'âge (perte
d'acuité), le sexe (les femmes sont plus sensibles - l'intensité de l'odeur, qui est fonction du
selon la plupart des études), le tabagisme (perte caractère spécifique des composés odorants
de sensibilité), certaines allergies et divers états perçus, de leur composition et de leurs inter-
de santé. En plus de ces caractéristiques actions mutuelles et avec la muqueuse olfac-
interindividuelles, il a été démontré qu'il peut y tive.
avoir une grande variabilité de l'acuité olfactive Notre sens de l'odorat est semblable à notre
chez une même personne, d'une journée à perception des corps chauds ou froids: l'inten-
l'autre, et même d'un essai à l'autre. Viennent sité de l'odeur perçue est très forte au début puis
également agir et influencer la sensibilité olfac- se produit une adaptation et une baisse progres-
tive des individus, un phénomène d'adaptation sive de la sensation ressentie. Pour chaque com-
(Cain, 1974b) (se manifeste par une baisse dans posé odorant, il existe un seuil en dessous
ODEURS 503
Intensité
n: Exposant variant de 0.07 à 0,7
I: Intensité odeur
Concentration
duquel le composé n'est pas détecté. Au-dessus dépendant de la méthode analytique utilisée,
du seuil, l'intensité perçue n'est pas proportion- proportionnelle à la dilution dans l'air pur con-
nelle à la concentration, car un effet de satura- trairement à l'intensité odeur. Elle rend compte
tion est observé: la loi de puissance de Stevens aussi des interactions possibles entre les divers
permet de décrire cette dépendance (figure composés d'un mélange odorant (effets additifs,
19.3). synergiques, antagonistes), ce que ne peuvent
A f i n d'éliminer la subjectivité associée avec pas faire les concentrations chimiques. Elle
l'estimation de l'intensité odeur et, surtout, n'est, par contre, pas reliée à l'intensité réelle de
pour s'affranchir de la saturation observée à la perception olfactive: on ne peut pas faire la
haute concentration, la notion de concentration différence entre 1000 et 10 000 u.o./m 3 !
odeur est maintenant privilégiée, car elle est La valeur du seuil de perception olfactive
objective et quantitative. Elle est basée sur le dépend du composé ou du mélange gazeux con-
seuil de perception olfactive d'un mélange sidéré ( A I H A , 1989). Il peut varier de 0,1 ppb
gazeux. Ce seuil est défini comme la concentra- (parties par milliard en volume) pour le mercap-
tion d'un mélange gazeux dans de l'air inodore tan allylique (odeur désagréable d'ail) ou le
à laquelle la moitié des membres d'un jury thiocrésol (odeur rance de mouffette) à quelques
perçoivent une odeur, l'autre moitié ne la perce- dizaines de ppm (parties par million en volume)
vant pas. La détermination du seuil suppose comme pour l'ammoniac (17 p p m ) . En règle
donc qu'un jury de plusieurs personnes doit générale, pour les composés purs, le seuil tend à
flairer diverses dilutions du même mélange être plus faible pour des composés de poids
gazeux; la concentration odeur est indépendante moléculaire élevé et dépend des fonctionnalités
de la qualité de l'odeur et de son caractère chimiques de la molécule considérée. Pour des
hédonique. Par définition, le seuil de perception mélanges, le seuil ne peut pas être obtenu à par-
olfactive correspond à une concentration odeur tir des seuils des composés purs: des effets de
de 1 u.o./m 3 (unité odeur par mètre cube). Le synergie ou d'antagonisme, d'addition ou de
nombre de dilutions nécessaires pour atteindre moyenne peuvent être observés.
le seuil de perception à partir du mélange de gaz
initial indique la concentration odeur. Ainsi, si
l'on doit diluer 5000 fois avec de l'air inodore 4.2 Métrologie
un échantillon de gaz prélevé à la cheminée
Dans le cas d'odeurs environnementales, en rai-
d'une usine afin d'obtenir un mélange gazeux
son de l'impossibilité de relier la concentration
correspondant au seuil de perception olfactive,
ou l'intensité d'odeur aux concentrations chi-
la concentration odeur de l'eftluent émis à la
miques, l'analyse chimique ne permet pas de
cheminée est de 5000 u.o./m 3 . La concentration
quantifier une nuisance olfactive. Néanmoins,
odeur est très utile en ingénierie, car elle com-
elle peut s'avérer très utile, en complément de
mande les mêmes avantages que la concentra-
l'analyse olfactométrique, pour déterminer les
tion chimique: quantifiable avec une précision
constituants responsables de la nuisance. Dans
504 ENVIRONNEMENT ET SANTÉ PUBLIQUE
Panelistes
et boîtiers de vote
Filtre à air
Poste
de contrôle
Carte d'acquisition
et de contrôle
* Sentiment de déplaisir associé à un «agent» ou à une condition considérée comme affectant négative-
ment un individu ou un groupe (Lindvall et Radford. 1973).
506 ENVIRONNEMENT ET SANTÉ PUBLIQUE
un groupe ou un individu peut, d'une part, 5.3 Relation entre perception des
réaliser ses aspirations et satisfaire ses besoins et, odeurs et toxicité aiguë
d'autre part, évoluer avec le milieu ou s'adapter
à celui-ci (...). Ainsi donc, la promotion de la Malgré des variations interpersonnelles, il est
santé ne relève pas seulement du secteur de la possible d'établir, pour les diverses substances
santé; elle dépasse les modes de vie sains pour odorantes, une échelle psychophysique* qui
viser le bien-être ( O M S , 1986). Dans ce con- conserve sa validité d'un individu à l'autre, de
texte, l'approche des questions de nuisance et façon à pouvoir déterminer des niveaux d'expo-
d'atteinte au confort dans le domaine de la santé sition selon l'intensité de l'odeur (Cain et
environnementale ne peut être dissociée du con- Moskowitz, 1974). Par ailleurs, le ratio de la
cept de santé. concentration du produit à laquelle des effets
irritants ou toxiques sur l'humain peuvent se
produire (concentration maximale admissible
5.2 Physiopathologie des symptômes pour une durée de huit heures) sur son seuil
associés aux odeurs olfactif constitue le facteur de sécurité olfactive
(FSO) pour cette substance (Amoore et
On constate souvent que les effets apparents
Hautala, 1983). Lorsque le FSO d'un contami-
provoqués par les odeurs environnementales sur
nant est faible (<10), les symptômes liés aux
la santé de personnes habitant, par exemple, en
odeurs sont aussi les symptômes liés à la toxicité
bordure d'usines de traitement des eaux usées
intrinsèque du produit. Un produit odorant
ou d'enfouissement des déchets, de sites indus-
dont le FSO est modéré (10-25) peut aussi
triels ou de lieux d'activités agricoles ne répon-
causer une toxicité aiguë dans la population,
dent pas, de façon objective, à l'approche toxi-
mais seulement si sa concentration environ-
cologique classique. Un certain nombre
nementale dépasse largement son seuil olfactif.
d'études réalisées chez l'animal et chez l'humain
D'autres produits cependant peuvent provoquer
au cours des dernières années a permis de mieux
des symptômes aigus associés à leur simple
comprendre les mécanismes par lesquels les
odeur, même si les concentrations en cause ne
odeurs peuvent affecter la santé.
constituent pas une exposition toxique propre-
Une revue de la littérature réalisée par ment dite (Shusterman, 1992).
Shusterman (1992) indique que la plupart des
symptômes rapportés par les personnes exposées Par exemple, certains gaz comme le sulfure
à des sources d'odeurs environnementales sont d'hydrogène et divers mercaptans q u i , notam-
aigus dans leurs manifestations, limités dans le ment, sont des produits souvent impliqués en
temps et de nature subjective; ils sont donc dif- cas de plaintes de citoyens possèdent un seuil
ficiles à définir objectivement. Néanmoins, olfactif beaucoup plus bas que les niveaux
plusieurs études rapportées par cet auteur ten- reconnus comme pouvant entraîner des symp-
dent à démontrer une forte corrélation entre les tômes par les mécanismes toxicologiques ou irri-
symptômes rapportés par les personnes exposées tatifs classiques. Pourtant, ces gaz sont souvent
ou l'exposition aux odeurs environnementales associés à des manifestations symptomatiques
dans l'air intérieur des bâtiments ou provenant apparaissant à des niveaux qui dépassent de peu
d'équipements municipaux, d'activités agricoles leur seuil olfactif, donc à des concentrations
ou industrielles, même si les concentrations des considérées comme non toxiques (Flesh et Turk,
contaminants responsables de ces odeurs étaient 1975). À titre d'exemple, la figure 19.5
bien inférieures aux niveaux considérés toxi- représente la relation entre les concentrations
ques. Shusterman conclut que, en matière de dans l'air et la proportion de personnes affectées
problèmes de santé associés aux odeurs, les à diverses intensités pour le sulfure d'hydrogène.
mécanismes physiopathologiques ne s'ex-
pliquent pas par l'approche toxicologique clas-
5.4 Mécanismes des symptômes liés
sique, mais doivent être abordés comme des
effets non toxicologiques de ces contaminants aux odeurs environnementales
sur la santé. Les mécanismes pouvant expliquer les pro-
blèmes de santé dont se plaignent des citoyens
* La psychophysique est la science qui étudie les caractéristiques stimulus-réponse des stimuli sensoriels
ODEURS 507
Tableau 19.2 Principaux mécanismes des symptômes liés aux odeurs environnementales
Aversion innée aux odeurs Les facteurs individuels influencent grandement les réactions aux odeurs perçues. Cependant,
plusieurs substances odorantes ne vont laisser certaines personnes indifférentes et provoquer
des réactions réflexes.
Exacerbation de conditions Les principales conditions médicales impliquées dans ce mécanisme sont l'asthme, la bronchite,
médicales préexistantes la grossesse, certains troubles psychosomatiques et certaines dysfonctions olfactives.
Intolérance acquise Ce type de réaction résulte le plus souvent d'une expérience antérieure d'exposition aiguë
aux odeurs symptomatique. Cette sensibilisation conditionnée à des substances odorantes est surtout
rapportée en milieu de travail. Elle pourrait aussi se manifester plus subtilement dans un contexte
d'odeurs environnementales, lorsque des gens sont exposés de façon fréquente à des odeurs
désagréables.
Somatisation due au Il s'agit ici d'un état de stress associé au sentiment d'altération de l'environnement par les
stress environnemental odeurs, auquel s'associent des sentiments de perte de jouissance des lieux et de perte de valeur
de la propriété.
Nature intermittente La réaction relève du sentiment d'absence de contrôle sur un stimulus transitoire récidivant et
du stimulus non désiré.
Réponse du système Plusieurs études ont mis en évidence des liens directs entre les centres olfactifs du cerveau et les
immunitaire aux odeurs tissus lymphoïdes. Par ce mécanisme, les odeurs agiraient sur le système immunitaire par un effet
déplaisantes d'immunosuppression (parfois d'immunostimulation). Il a aussi été démontré que l'altération de
l'humeur pouvait avoir une influence négative sur le système immunitaire.
Effet physique direct Les molécules de certaines substances odorantes tel l'ammoniac, le sulfure d'hydrogène sulfuré
et le chlore agissent directement sur la muqueuse nasale et respiratoire, puis acheminent les
influx nerveux via les nerfs crâniens trijumeau, glossopharingien et vague. En laboratoire, une
telle stimulation de la muqueuse nasale chez l'animal peut provoquer une augmentation de la
sécrétion d'adrénaline. Ce type d'effet chez l'humain serait-il à même de contribuer à faire
naître des sentiments d'anxiété et de colère?
Effet de type phéromonal Si le phénomène entre humains a été démontré, un tel effet en lien avec d'autres types d'odeurs
environnementales reste à démontrer.
(Doty, 1981; Silver, 1987; Shusterman, 1992; Manley, 1993; Laing et coll., 1994; Schiffman et coll., 1995; Bell et coll., 1996)
508 ENVIRONNEMENT ET SANTÉ PUBLIQUE
logiques, principalement à cause du caractère dence, de façon objective, une quelconque cause
largement subjectif des symptômes rapportés et environnementale. Ce type d'effet est plus sus-
à leurs grandes variations d ' u n i n d i v i d u à ceptible de se produire dans des populations fer-
l'autre. De plus, la difficulté de mesurer les mées, en milieu de travail ou dans une école, par
niveaux environnementaux souvent fluctuants exemple, que dans une communauté.
des odeurs ne permet pas d'établir avec satisfac-
tion les corrélations avec les diverses manifesta- 6. NUISANCE OLFACTIVE
tions physiologiques.
ET RÉGLEMENTATIONS
5.6 Effets psychologiques Un certain nombre d'activités industrielles ou
commerciales sont responsables de nuisances
liés aux odeurs olfactives subies par les riverains. Ces nuisances
L'exposition à des odeurs environnementales sont de moins en moins acceptées par le public
désagréables, tant extérieures qu'intérieures, qui les considère comme les manifestations de
engendrées par divers types d'activités, peut problèmes plus graves de pollution ou d'impact
aussi avoir des effets variés de nature psy- sur la santé. Pour ces raisons, les pouvoirs
chologique sur les personnes exposées. Ces effets publics, surtout au niveau local ou régional, ont
se manifestent par des atteintes de l'humeur, de imposé des réglementations de plus en plus
l'anxiété, diverses réactions émotives, des t r o u - sévères qui obligent généralement les respon-
bles du sommeil, et l'altération de plusieurs sables des nuisances à gérer et diminuer leurs
types de performances intellectuelles dont les émissions d'odeurs.
capacités d'apprentissage (Winneke et Katska,
1977; Rotton, 1983; Camilleri et coll., 1986;
Ehrlichman et Bastone, 1992; Shusterman,
6.1 Principes à la base
1992; Laing et coll., 1994; Deloraine et coll., des réglementations
1995; Schiffman et coll., 1995). Le stress
La plupart des réglementations actuelles ou en
engendré par une exposition fréquente à des
préparation exigent que la concentration odeur
odeurs désagréables peut par la suite entraîner
à l'extérieur des limites de la propriété visée soit
d'autres types de problèmes de santé, par exem- 3
inférieure à 1 u.o./m . Comme nous l'avons dit
ple une augmentation de la tension artérielle,
précédemment, cela correspond à la situation où
une d i m i n u t i o n de la motilité gastrique ou une
la moitié de la population ne perçoit pas l'odeur
augmentation de la tension musculaire du cuir
et l'autre moitié la sent. Les méthodes d'analyse
chevelu chez des personnes souffrant de
olfactométrique actuelles ne permettent pas de
céphalées à type de tension (Boxer et coll.,
mesurer une concentration d'odeur inférieure à
1984; Selmi et Manaster, 1989; Rugh et coll.,
2 ou 3 u.o./m 3 . Il est donc impossible de mesu-
1990). Par déduction, on pourrait aussi relier
rer une concentration dans l'air ambiant à
l'exposition aux odeurs environnementales aux
moins que celle-ci ne soit très élevée. Pour cette
problèmes de santé généralement reconnus
raison, les réglementations exigent la mesure du
comme consécutifs à un état de stress chronique
débit odeur (en u.o./s) aux sources (par exem-
tels que la maladie coronarienne, l'ulcère pep-
ple, à la cheminée) et l'utilisation d'un modèle
tique et l'hypertension artérielle chronique
de dispersion atmosphérique pour estimer la
(Shusterman, 1992).
concentration odeur dans l'air ambiant autour
Notons enfin que des phénomènes psy- du site étudié. Le débit odeur est calculé sur la
chologiques de masse ont été décrits à la suite base de la mesure du débit volumique total et de
d'exposition à des odeurs environnementales la concentration odeur mesurée à l'aide d'un
inattendues ( C D C , 1983; Hall et Johnson, 1989; olfactomètre à dilution dynamique. L'approche
Jones et coll., 2000). Ce phénomène se manifeste d'étude d'impact odeur présentée dans un para-
par la propagation rapide dans une population, graphe précédent est particulièrement adaptée à
de symptômes subjectifs que l'on attribue à l'ex- la vérification de la conformité d'un site ou de
position à une substance toxique dans l'environ- l'estimation de critères de réduction nécessaires
nement, mais sans que l'on puisse mettre en évi- pour respecter les valeurs réglementaires.
510 ENVIRONNEMENT ET SANTÉ PUBLIQUE
* Elles sont basées sur le choix des matières premières et des procédés qui est motivé par une concep-
tion et une opération qui intègre des critères environnementaux de diminution de la pollution ou de
développement durable.
ODEURS 511
Bibliographie
Alarie, Y. «Irritating properties of airborne materials C a i n , W. S. «Perception of odor intensity and the
to the upper respiratory tract», Arch Environ t i m e course of olfactory adaptation», ASHRAE
Health, 13, 1966, p. 433-449. Trans, 8 0 , 1974b, p. 53-75.