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A la Gloire du Grand Architecte de L’Univers

Francs-maçons de Rite Ecossais Ancien et Accepté


Au nom et sous les auspices de la Grande Loge de France
Ordo Ab Chao
Respectable Loge « Paix et Harmonie » No. 1020
Orient de Port-Louis, Ile Maurice
LIBERTE - EGALITE – FRATERNITE
V∴M∴, dignitaires à l’Orient et à vous tous mes FF∴ en vos Grades et
Qualités.

Le sujet qui m’a été attribué pour cette planche m’a quelque peu
décontenancé au départ. Mais j’ai très vite compris à quel point de
parler du salaire en loge allait me permettre de polir ma pierre brute.
Un travail qui avait d’ailleurs déjà commencé alors que j’étais dans le
Cabinet de réflexion, alors qu’on m’avait invité à me dépouiller de
tous mes métaux et que j’avais devant moi, entre autres choses, une
coupelle contenant du sel.

Dans le Mémento de l’apprenti, le mot « salaire » est défini comme la


récompense du Travail produit par l’ouvrier. Le mot « salaire », tel
que nous l’utilisons dans le monde profane, renvoie au paiement
régulier qu’un employeur verse à un employé, donc un salarié, pour un
travail accompli.

Ce mot provient du latin salarium, lui-même dérivé de sal, le sel qui


désignait initialement la ration de sel que recevaient les soldats
romains, avant de définir l’indemnité en argent versée pour acheter le
sel et d’autres vivres.

Ce qui me permet de revenir au sel du Cabinet de réflexion. Le sel, qui


est le résultat de l’évaporation de l’eau de mer, symbolise une
transmutation physique, passant de l’état liquide à l’état solide. Le
symbolisme va encore plus loin, car il s’apparente à un changement
moral et spirituel.

Notons que dans la tradition judéo-chrétienne, le partage du pain et du


sel crée une amitié indestructible. Nous pourrons trouver
d’innombrables références au sel dans les traditions religieuses. Mais,
ce qui nous intéresse ici, c’est la notion d’engagement et de
changement moral et spirituel.

Quand Gandhi, en mars 1930, entame la Marche du sel, avec un long


parcours à pied, c’était pour encourager ses compatriotes à défier le
monopole du pouvoir colonial britannique sur la distribution du sel.
C’était un geste hautement symbolique d’appropriation de son destin,
ici politique. Mais ce que nous, mes frères, pourrons retenir de ce
geste, c’est aussi l’idée de transmutation. Car Gandhi fait de ses
disciples des hommes désireux de s’affranchir d’un état de
dépendance.
Cette faculté de transmutation, le perfectionnement, me ramène à mon
travail d’apprenti, une année après mon initiation. Dans le Memento,
avant de parvenir au mot « salaire », apparaissent cette question sur la
manière d’épeler le Mot sacré de même que la réponse. Que je cite :
« La méthode de la franc-maçonnerie qui sollicite les efforts
intellectuels de chacun, tout en évitant d’inculquer les dogmes. On
met le néophyte sur la voie de la Vérité, en lui donnant
symboliquement la première lettre du Mot, il doit trouver lui-même la
deuxième ; puis on lui indique la troisième, afin qu’il devine la
quatrième. »
« Il doit trouver lui-même la deuxième et deviner la quatrième… ».
Ce qui se rapproche des questions qui viennent tout de suite après sur
le salaire. Ce mot est, d’abord, défini par « la récompense du Travail
produit par l’ouvrier », puis il est expliqué que le « salaire des
Francs-Maçons » se traduit « par un perfectionnement graduel de soi-
même »…

Dans le silence où je suis enfermé sur la colonne du Septentrion,


j’observe les rites pendant les travaux, j’essaye de les comprendre et je
m’efforce de travailler sur moi-même pour corriger mes erreurs.
C’est vers la fin des travaux que retentit la question du Vénérable
Maître quand il s’adresse au Frère Second Surveillant pour lui
demander : « Où les Apprentis Francs-Maçons reçoivent-ils leur
salaire ? »
Et la réponse fuse : « A la Colonne B, Vénérable maître. »
La Colonne J se trouve à droite en entrant dans la loge et la Colonne B
à gauche, toutes deux posées devant la porte du Temple. Outre de
soutenir l’édifice, elles représentent à la fois l’ensemble de cet édifice
et le passage entre le monde profane et le monde sacré.
Cette Colonne B où je suis attendu à la fin de la tenue constitue grâce
à sa verticalité, ma propre colonne vertébrale et le symbole de la
droiture. Avec la Colonne J, la Colonne B représente la Force. Qui n’a
rien à voir avec la force brute, mais évoque plutôt le travail
persévérant et vigilant de l’apprenti. Elle représente aussi la solidité du
temple qui se construit pierre par pierre sachant que chacune d’elles y
contribue. La colonne B, c’est aussi la transmutation. Une
transmutation librement consentie par moi, Apprenti, à l’image du sel,
ainsi que je l’expliquai plus tôt. Je ne touche pas encore de salaire ;
mais juste une récompense sous la forme de la satisfaction du travail
accompli.
Pour la dernière partie de cette planche, revenons au salaire du franc-
maçon. Dans l’accomplissement des rites que nous observons lors
d’une tenue, c’est aussi une marche, mais ici intellectuelle et
spirituelle, que nous entamons. Nous partons à la quête du Graal, un
Graal personnel pour récompenser nos efforts sur nous-même. Quand
je suis assis au Septentrion, la partie de notre loge éclairée par la lune,
je suis dans la pénombre, à peine sorti de mon obscurité de profane.
J’ai encore beaucoup à apprendre, j’entame à peine ma quête et le
Graal paraît encore lointain. Je ne suis pas encore prêt à recevoir la
clarté et je m’efforce à ne pas envier mes frères compagnons, que je
vois sur la colonne d’en face, avec un peu de lumière, mais plutôt à les
prendre en exemple dans mes efforts.
Et là, une image qui, je l’admets volontiers, est triviale s’impose dans
mon esprit quand je pense au Graal, qui est peut-être une coupe. Dans
le monde profane, beaucoup attachent d’importance aux activités
sportives, football, athlétisme etc. Les meilleurs dans n’importe quelle
discipline reçoit généralement une coupe en récompense de ses
efforts, un symbole qui n’est pas innocent car il s’inspire aussi du
Graal. Cette métaphore sportive me permet de pousser plus loin ma
réflexion sur le salaire auquel j’aspire, sur le Graal dont j’ai entamé la
quête lors de mon initiation. La quête du salaire ou du Graal implique
des efforts sur soi-même, une discipline. Mais parfois quand, par
exemple, on suit une compétition de football, ou un tournoi, pour
rester dans le vocabulaire des chevaliers du Moyen-âge, on se
demande si c’est la remise de la coupe qui est la plus importante, ou le
cheminement qui mène, ou non, à cette heureuse conclusion.

De la même façon, moi, modeste apprenti, je me demande si c’est le


salaire qui m’attend au bout de mon cheminement qui compte le plus,
ou si c’est le cheminement lui-même, ces efforts que je m’impose
pour polir ma pierre.

En conclusion, j’aimerais revenir sur deux questions du Memento : la


première concerne la Marche de l’Apprenti qui est ainsi définie : « Le
zèle que nous devons montrer, en marchant vers la Lumière. » Et puis,
cette question : « Avez-vous quelques ambitions ? » Et la réponse :
« Une seule : j’aspire à l’honneur d’être reçu parmi les
Compagnons. »
Pour cela, il me faut continuer, avec assiduité, avec votre soutien, mes
frères, à polir ma pierre brute, à enlever ces aspérités que je continue,
malgré moi, à porter.

Vénérable Maître
J’ai dit.

Avril 6020

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