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Table des matières I

TABLE DES MATIERES

1 Introduction 13

1.1 Définition des aménagements hydrauliques 13

1.2 Domaines des aménagements hydrauliques - eau, élément révélateur 13

1.3 Evolution et l'avenir des aménagements hydrauliques 16

1.4 Particularités des aménagements hydrauliques 22


1.4.1 Protection de la nature et de l'environnement 22
1.4.2 Eau des cours naturels - élément imprévisible 24
1.4.3 Réalisation et entretien 24
1.4.4 Calculs hydrauliques 24

2 Données de base 25

2.1 Hydrologie 25
2.1.1 Généralités 25
2.1.2 Cycle hydrologique et bilan d'eau 26
2.1.3 Coefficient de ruissellement (run-off coefficient) 29
2.1.4 Bassin versant 30
2.1.5 Les précipitations 32
2.1.6 Evaporation 38
2.1.7 Variation du stock 40
2.1.8 Ruissellement 40

2.2 Transport solide 56


2.2.1 Forces exercées sur une particule soumis à un écoulement 56
2.2.2 Corps flottants 57
2.2.3 Suspension 58
2.2.4 Charriage 59
2.2.4.1 Mécanisme du charriage 59
2.2.4.2 Ordre de grandeur du charriage 60
2.2.4.3 Caractéristiques et description des matériaux du lit (ou du
charriage) 61
2.2.4.4 Théorie du charriage 62
2.2.4.5 Début du charriage 67
2.2.4.6 Equilibre du transport solide d'une rivière 69

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II Table des matières

2.2.4.7 Stabilisation des berges, dimensionnement des


enrochements 70
2.2.4.8 Aspects constructifs et écologiques des enrochements 72
2.2.4.9 Diminution du charriage en raison du frottement 77

2.3 Géologie et géotechnique 78


2.3.1 Importance pour les constructions hydrauliques 78
2.3.2 Moyens de reconnaissance 81

3 Seuil et barrage en rivière 83

3.1 Introduction et description 83

3.2 Déversoirs non contrôlés 86


3.2.1 Types et utilisation 86
3.2.2 Déversoir standard 88
3.2.2.1 Calcul du débit 88
3.2.2.2 Géométrie du déversoir standard 91
3.2.2.3 Modification de la partie amont avec une saillie 92
3.2.2.4 Effet de charge sur le déversoir standard 92
3.2.3 Effet des piliers 95
3.2.3.1 Fonction des piliers 95
3.2.3.2 Influence des piliers sur le débit déversé 96
3.2.4 Déversoirs noyés 99
3.2.5 Déversoirs à seuil épais 100
3.2.6 Aération des déversoirs 102

3.3 Déversoirs contrôlés par des vannes 104


3.3.1 Rôle d'un seuil ou barrage mobile 104
3.3.2 Types et fonctionnement des vannes 105
3.3.3 Ecoulement dénoyé 110
3.3.4 Forces sur la vanne 113
3.3.5 Ecoulement noyé 114
3.3.6 Vanne de déversoir 117
3.3.6.1 Vanne plane verticale 117
3.3.6.2 Vanne secteur ou segment 118
3.3.7 Clapet 121
3.3.8 Barrage gonflable 122
3.3.9 Batardeaux 123

3.4 Effets amont et aval 123

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Table des matières III

3.4.1 Ecoulements typiques 123


3.4.2 Ecoulements stationnaires et uniformes 124
3.4.3 Ecoulement critique 125
3.4.4 Courbes de remous 127
3.4.4.1 Généralités 127
3.4.4.2 Calcul des courbes de remous - approche pratique de
l'ingénieur 129
3.4.4.3 Théorie générale de la courbe de remous 133
3.4.5 Ecoulement sur le radier du seuil 134
3.4.6 Ressaut hydraulique 135
3.4.6.1 Introduction 135
3.4.6.2 Calcul du ressaut - hauteurs conjuguées 137
3.4.6.3 Dimensionnement du bassin amortisseur 139

3.5 Aspects constructifs 142


3.5.1 Protection du radier contre l'érosion 142
3.5.2 Ecrans d'étanchéité 143
3.5.3 Analyse de stabilité 145
3.5.3.1 Système statique - structure porteuse 145
3.5.3.2 Cas de charge 147
3.5.3.3 Forces agissant sur les seuils 148
3.5.3.4 Sécurité au renversement 149
3.5.3.5 Sécurité au glissement 149

4 Prise d'eau 153

4.1 Introduction et classification générale 153


4.1.1 Eléments des aménagements hydrauliques 153
4.1.2 Prise de surface (sur les cours d’eau) 154
4.1.3 Prises à faible profondeur (dans les réservoirs) 154
4.1.4 Prises à grande profondeur (dans les réservoirs) 155

4.2 Captage possible 155


4.2.1 Prises d'eau en rivière 155
4.2.2 Prises d'eau en lacs/réservoirs 157

4.3 Prise d'eau en rivière 158


4.3.1 Rôle, disposition, combinaison avec un barrage/seuil 158
4.3.2 Classification des prises d’eau en rivière 159
4.3.3 Prise d'eau "latérale" 161

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IV Table des matières

4.3.3.1 Principe de la disposition en courbe 161


4.3.3.2 Eléments essentiels d’une prise d’eau latérale 162
4.3.3.3 Effet du charriage et des purges sur le captage 163
4.3.4 Grilles 164
4.3.4.1 Types de grilles et leurs fonctions 164
4.3.4.2 Pertes de charge à la grille 165
4.3.4.3 Sollicitation de la grille 167
4.3.4.4 Nettoyage des grilles 169
4.3.5 Prise d'eau "frontale" 170
4.3.5.1 Principe de la réalisation 170
4.3.5.2 Eléments essentiels de la prise d’eau frontale 170
4.3.5.3 Utilisation de la prise "frontale" 171
4.3.6 Prise d'eau par-dessous 172
4.3.6.1 Principe 172
4.3.6.2 Eléments essentiels de la prise d’eau tyrolienne 172
4.3.6.3 Dimensionnement de la prise d’eau tyrolienne 175
4.3.6.4 Aspects constructifs 176
4.3.7 Champ d'application de la prise tyrolienne par rapport à la prise
latérale 178
4.3.8 Nécessité d'un seuil ou d'un barrage 178

4.4 Prise d'eau en réservoirs ou lacs 179


4.4.1 Comparaison aux prises d'eau en rivière 179
4.4.2 Classification et éléments essentiels des prises en réservoir 180
4.4.2.1 Classification selon l'emplacement 180
4.4.2.2 Prises situées aux rives 180
4.4.2.3 Prises indépendantes 182
4.4.2.4 Prises combinées avec barrages 184
4.4.3 Dimensionnement et géométrie de l'entrée d'une prise 185
4.4.3.1 But 185
4.4.3.2 Vitesse d'entrée 185
4.4.3.3 Géométrie de l'entrée 185
4.4.4 Prises à faible profondeur 188
4.4.4.1 Introduction 188
4.4.4.2 Classification et origine de la formation des vortex 189
4.4.4.3 Hauteur de submersion critique 192
4.4.4.4 Mesures constructives 193

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Table des matières V

5 Dessableurs 195

5.1 But 195

5.2 Principe de fonctionnement 195

5.3 Choix de l'efficacité du dessablage 196

5.4 Dimensionnement hydraulique 198


5.4.1 Longueur du dessableur 198
5.4.2 Vitesse de chute des grains de sable (vitesse de décantation) 198
5.4.2.1 Eau calme 198
5.4.2.2 Eau agitée 200
5.4.3 Vitesse critique de translation 201
5.4.4 Récapitulation de la démarche pour le dimensionnement
hydraulique 201

5.5 Aspects constructifs 202


5.5.1 Définitions 202
5.5.2 Profondeur du dessableur 202
5.5.3 Largeur du dessableur 203
5.5.4 Inclinaison des parois inférieures 203
5.5.5 Chenal de purge 203
5.5.6 Tronçon de transition - grilles tranquillisatrices 203

5.6 Systèmes de purge 205


5.6.1 Possibilités 205
5.6.2 Dessableur "Büchi" 205
5.6.3 Dessableur "Dufour" 206
5.6.4 Dessableur "Bieri" 206

6 Canaux et galeries 207

6.1 Introduction et utilisation 207


6.1.1 But 207
6.1.2 Utilisation 208
6.1.3 Paramètres impliqués 209

6.2 Canaux découverts 211


6.2.1 Dimensionnement hydraulique 211
6.2.1.1 Ecoulement uniforme 211
6.2.1.2 Section optimale du point de vue hydraulique 212
6.2.1.3 Ecoulement non-uniforme 213

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VI Table des matières

6.2.1.4 Canaux courbes (conditions fluviales) 214


6.2.1.5 Ecoulement non stationnaire - intumescences dans les
canaux (ondes de translation) 216
6.2.1.6 Revanche nécessaire 219
6.2.1.7 Stabilité hydraulique de l'écoulement 220
6.2.2 Dimensionnement économique 221
6.2.2.1 Optimisation économique 221
6.2.2.2 Limitation de la vitesse 222
6.2.2.3 Conclusions concernant les vitesses d’écoulement optimales 225
6.2.3 Canaux trapézoïdaux 225
6.2.3.1 Canaux en excavation ou en remblai 225
6.2.3.2 Stabilité des rives 226
6.2.3.3 Protection contre l'érosion - érodibilité des rives 227
6.2.3.4 Etanchéité – interaction avec la nappe souterraine 230
6.2.4 Canaux rectangulaires 234

6.3 Canaux recouverts et galeries à écoulement libre 236


6.3.1 Comparaison canaux - galeries 236
6.3.2 Dimensionnement hydraulique 236
6.3.2.1 Ecoulement uniforme 236
6.3.2.2 Sections optimales et réserve de capacité 239
6.3.2.3 Ecoulement non-uniforme 240
6.3.3 Dimensionnement économique 240
6.3.4 Galeries en écoulement libre 242

6.4 Ouvrages particuliers – traversées 243

6.5 Conduites et systèmes d’adduction en charge 245


6.5.1 Ouvrages des systèmes d'adduction d'eau 245
6.5.2 Dimensionnement hydraulique 245
6.5.2.1 Régime d'écoulement 245
6.5.2.2 Pertes de charge 246
6.5.2.3 Calcul de l'écoulement en section prismatique 251
6.5.2.4 Calcul de l'écoulement en section variable 252
6.5.3 Dimensionnement économique 252
6.5.3.1 Tracé 252
6.5.3.2 Section 254
6.5.4 Coups de bélier 256
6.5.4.1 Changement instantané du débit 257

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Table des matières VII

6.5.4.2 Célérité de l'onde de pression – vitesse de propagation du


coup de bélier 259
6.5.4.3 Réflexion du coup de bélier 260
6.5.4.4 Fermetures et ouverture linéaires 262
6.5.4.5 Changement lent du débit 263
6.5.4.6 Résumé des différentes formules 264
6.5.5 Charge de dimensionnement 264
6.5.5.1 Conditions stationnaires 264
6.5.5.2 Conditions non-stationnaires 268
6.5.5.3 Conditions pendant la construction ou la révision 269
6.5.6 Dimensionnement statique 270
6.5.6.1 Tube épais étanche 270
6.5.6.2 Tube mince 272
6.5.7 Conduites forcées - aspects constructifs 275
6.5.7.1 Forme de section et matériaux 275
6.5.7.2 Support des conduites 275
6.5.8 Dimensionnement au regard des contraintes longitudinales et de
cisaillement 278

6.6 Galeries et puits en charge 282


6.6.1 Caractéristique des écoulements en charge 282
6.6.2 Evolution de la disposition des aménagements à haute chute 283
6.6.2.1 Généralités 283
6.6.2.2 Fonction de la chambre d'équilibre 284
6.6.2.3 Dispositions courantes en Suisse 286
6.6.2.4 Tendances actuelles 287
6.6.3 Critères généraux de conception et de dimensionnement 288
6.6.4 Choix du tracé 289
6.6.4.1 Facteurs déterminants 289
6.6.4.2 Résistance du massif rocheux 289
6.6.4.3 Limitation des pertes d'eau et leur rayon d'influence 295
6.6.4.4 Coût, pertes de charge et mode de construction 301
6.6.5 Choix du diamètre 304
6.6.6 Types de revêtement 307
6.6.6.1 Objectifs des revêtements 307
6.6.6.2 Profil non revêtu 307
6.6.6.3 Gunite et béton projeté 308
6.6.6.4 Béton coffré non armé 308
6.6.6.5 Béton coffré armé 309

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VIII Table des matières

6.6.6.6 Béton précontraint (précontrainte active ou passive) 310


6.6.6.7 Membranes et blindages minces (profils "sandwich") 313
6.6.6.8 Blindage 314
6.6.7 Dimensionnement des revêtements étanches (ou supposés
étanches) 315
6.6.7.1 Revêtement en béton (non armé, non fissuré) 315
6.6.7.2 Considération des injections 316
6.6.8 Puits blindés 316
6.6.9 Dimensionnement des revêtements perméables 323
6.6.10 Première mise en eau des galeries et puits en charge 324

7 Ouvrages de dérivation temporaires 327

7.1 Types de dérivations 327


7.1.1 Objectifs 327
7.1.2 Dérivation intégrale 327
7.1.3 Dérivation en plusieurs phases à travers le chantier 328
7.1.4 Balancement de la rivière 329

7.2 Eléments de dérivation 330


7.2.1 Eléments permanents ou provisoires 330
7.2.2 Batardeaux 330
7.2.2.1 Batardeaux en remblai 330
7.2.2.2 Batardeaux avec palplanches 332
7.2.2.3 Batardeaux submergés ou submersibles 333
7.2.3 Organes de dérivation 336
7.2.3.1 Galerie de dérivation 336
7.2.3.2 Canaux de dérivation 336
7.2.3.3 Ouvertures dans l'ouvrage final 339
7.2.4 Organes de fermeture 339

7.3 Coupure de la rivière 340

7.4 Aspects hydrauliques 342


7.4.1 Balancement de la rivière 342
7.4.2 Galeries de dérivation 345
7.4.3 Brèches, orifices et ponceaux du système 348

7.5 Choix du système 349


7.5.1 Crues de dérivation 349
7.5.2 Risque d'inondation du chantier 349

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Table des matières IX

7.5.3 Capacité économique de la dérivation 350

8 Ouvrages de vidange 351

8.1 Philosophie des vidanges 351

8.2 Eléments de vidange de fond 352


8.2.1 Introduction 352
8.2.2 Ouvrage d'entrée 353
8.2.3 Galerie de vidange amont (en charge) 354
8.2.4 Vannes de fond 354
8.2.5 Galerie de vidange aval (écoulement en nappe libre) et aération 356
8.2.6 Sortie (ouvrage de restitution) 358

8.3 Conceptions des vidanges de fond 358


8.3.1 Vidange de fond combinée avec le barrage 358
8.3.2 Vidange de fond combinée avec la fondation du barrage 359
8.3.3 Vidange de fond combinée avec la galerie de déviation 359

8.4 Dimensionnement hydraulique 359


8.4.1 Débit de dimensionnement 359

8.5 Calcul de débit 360


8.5.1.1 Détermination de la section nécessaire de la vanne 360
8.5.1.2 Caractéristiques du débit par-dessous la vanne partiellement
fermée 361
8.5.2 Ecoulement aval 362

8.6 Aération 364


8.6.1 Objectifs 364
8.6.2 Mécanismes d'aération 365
8.6.3 Calcul du débit d'air nécessaire 366
8.6.3.1 Ecoulement libre 366
8.6.3.2 Ecoulement à ressaut 366
8.6.3.3 Aérateur de fond 367

8.7 Dispositif d'évacuation de sédiments 368

9 Evacuateurs de crues 371

9.1 But et objectifs 371

9.2 Critères de sécurité - débit de dimensionnement 371

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X Table des matières

9.3 Types d'évacuateurs 371

9.4 Eléments particuliers 374


9.4.1 Coursiers 374
9.4.1.1 Ondes de choc 374
9.4.1.2 Aération superficielle 381
9.4.1.3 Phénomène de l'érosion de cavitation 384
9.4.1.4 Aération forcée des coursiers 386
9.4.2 Evacuateur en tulipe 390

9.5 Dissipation d'énergie 391


9.5.1 Jet libre 391
9.5.2 Saut de ski 392
9.5.3 Bassins amortisseurs 393

10 Aménagements hydroélectriques 395

10.1 Types des aménagements hydroélectriques 395


10.1.1 Critères de classification 395
10.1.2 Disposition de l'aménagement 395
10.1.3 Chute de l'aménagement 397
10.1.4 Possibilité d'accumulation et utilisation de l'eau 397
10.1.4.1 Aménagements au fil de l'eau 397
10.1.4.2 Aménagements avec accumulation 399
10.1.4.3 Aménagement de pompage-turbinage 401
10.1.5 Classification selon les turbines 402
10.1.6 Aménagements à basse chute 406
10.1.6.1 Caractéristiques 406
10.1.6.2 Éléments essentiels d'un aménagement à basse chute 407
10.1.6.3 Variation de la chute en fonction du débit de la rivière et de
la production d'énergie 408
10.1.6.4 Aménagements sans canal de dérivation 411
10.1.6.5 Aménagements avec un canal de dérivation 416
10.1.6.6 Aménagements à basse chute combinés avec des écluses 418
10.1.6.7 Modes d'exploitation des paliers en série 419
10.1.7 Aménagements à moyenne et haute chutes 423
10.1.7.1 Caractéristiques 423
10.1.7.2 Disposition des aménagements à moyenne chute 423
10.1.7.3 Disposition des aménagements à haute chute 426

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Table des matières XI

10.1.7.4 Puissance et production 439


10.1.8 Aménagements pompage-turbinage et pompage 441
10.1.8.1 Caractéristiques et conception 441
10.1.8.2 Exemples 442
10.1.8.3 Principe de l’accumulation par pompage 446
10.1.8.4 Disposition des aménagements de pompage–turbinage 446
10.1.8.5 Classification des aménagements de pompage–turbinage et
modes d’exploitation 448
10.1.8.6 Avantages du pompage 451
10.1.8.7 Rendement du pompage-turbinage et de l'aménagement 454
10.1.8.8 Valeurs moyennes 456

10.2 Aménagement systématique d'un cours d'eau avec des centrales


hydroélectriques 457

10.3 Eléments essentiels d'un aménagement hydroélectrique 458

10.4 Méthodes d'évaluation du potentiel hydroélectrique 459


10.4.1 Principe physique de la force hydraulique 459
10.4.2 Méthodes d'évaluation du potentiel 460
10.4.2.1 Potentiel de surface 460
10.4.2.2 Potentiel linéaire 461
10.4.2.3 Potentiel utilisable (ou techniquement réalisable) 462
10.4.2.4 Exemples 464

10.5 Critères d'évaluation d'un aménagement hydroélectrique 465

11 Retenues et barrages 467

11.1 Rôle des réservoirs 467

11.2 Fonction des réservoirs 467

11.3 Critères généraux du choix de l'aménagement d'un réservoir 469


11.3.1 Critères du point de vue de l'économie des eaux 469
11.3.2 Critères du point de vue de la morphologie du réservoir 472

11.4 Fonctionnement et dimensionnement des réservoirs de production 474


11.4.1 Données de base 474
11.4.2 Equation de rétention 476
11.4.3 Dimensionnement à l'aide des courbes des débits cumulés 476
11.4.4 Exemples: Réservoir avec apport naturel 478

11.5 Simulations numériques des réservoirs de production 481

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XII Table des matières

11.6 Diminution du volume utile par l'alluvionnement 482

11.7 Fonctionnement et dimensionnement des réservoirs pour la


protection contre les crues – laminage des crues par le réservoir 482

11.8 Les différents types de barrages 484


11.8.1 Les barrages en béton 485
11.8.1.1 Les barrages-poids 485
11.8.1.2 Les barrages à contreforts 486
11.8.1.3 Les barrages-voûtes 488
11.8.1.4 Les barrages en béton compacté au rouleau BCR 490
11.8.2 Les barrages en remblai 490

12 Bibliographie 493

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Introduction 13

1 INTRODUCTION

1.1 Définition des aménagements hydrauliques


Que signifie la notion "aménagements hydrauliques"?
Selon un modèle simplifié, le globe peut être représenté comme système fermé,
sans apport ni perte de matière, mais pourvu d'un approvisionnement en énergie par
l'insolation (du soleil).
Réactions
Réactions thermodynamiques
thermodynamiques
cycle
cyclede
del'eau
l ’eau/ / hydrologie
hydrologie

Figure 1.1: Modèle simplifié du globe.

Le globe se trouve dans un équilibre dynamique régi par les lois de la thermodyna-
mique. Le cycle d'eau ou le cycle hydrologique en fait parti. Ce cycle est l'essentiel
pour l'existence de toute vie et surtout celle de l'homme.
Depuis longtemps, l'homme tente de profiter des effets favorables de ce cycle et de
se protéger contre ses effets néfastes. Toutes les mesures envisagées par l'homme
pour maîtriser le cycle hydrologique font partie des aménagements hydrauliques,
qu'elles concernent l'eau souterraine ou l'eau de surface, ou encore les océans, les
lacs et les cours d'eau.

1.2 Domaines des aménagements hydrauliques - eau,


élément révélateur
L'eau est d'une part un élément vital pour l'homme, mais d'autre part il est également
un élément destructeur.
La question suivante pourrait être posée:
"Faut-il protéger l'eau (ou la nature) de l'homme ou l'homme de l'eau (ou
de la nature)?"

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


14
Introduction

Toutes les interventions de l'homme se répartissent en deux catégories:


• aménagements hydrauliques d'utilisation de l'eau
• aménagements hydrauliques de protection contre l'eau.

Eau Eau
Elément vital Elément destructeur

Homme
Aménagements hydrauliques Aménagements hydrauliques
pour l'utilisation de l'eau pour la protection contre l'eau
(Nutzwasserbau ) (Schutzwasserbau )

Approvisionnement en eau Traitement des eaux usées


potable ou industrielle (Abwasserentsorgung )
(Wasserversorgung )
Drainage
Irrigation (Entwässerung )
(Bewässerung )
Protection contre les crues
Production d'énergie
(Hochwasserschutz )
(Wasserkraftnutzung )

Navigation Protection contre l'érosion


(Schiffahrt ) (Erosionsschutz )

Figure 1.2 : Domaines d'application des constructions hydrauliques

Les interventions et les ouvrages pour l'utilisation de l'eau remplissent les fonctions
suivantes (cf. Figure 1.2) :
• approvisionnement en eau potable ou industrielle
• irrigation (pour l'agriculture)
• exploitation de l'énergie hydraulique
• navigation (fluviale et maritime).
Dans la catégorie des aménagements hydrauliques de protection, les interventions et
ouvrages peuvent être classés de manière suivante (cf. Figure 1.2) :
• traitement des eaux urbaines ou usées
• drainage
• protection contre les crues
• protection contre l'érosion.
Le traitement des eaux urbaines est typiquement une mesure visant à protéger l'eau
de l'homme. Inversement, avec les trois derniers types d'interventions, l'homme se
protège lui-même de l'eau.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Introduction 15

Les aménagements hydrauliques les plus fréquents sont les suivants :


• aménagements de cours d'eau
• aménagements hydroélectriques
• aménagements d'irrigation
• aménagements de traitement et de distribution d'eau.
Les aménagements hydrauliques répondent souvent à plusieurs demandes. Dans ce
cas, on parle d'aménagements à buts multiples. Par exemple, un aménagement hy-
droélectrique permettant d'accumuler de l'eau dans sa retenue n'est pas limité à la
production d'énergie seule. Il peut également assurer la protection contre les crues,
l'irrigation, l'approvisionnement en eau potable et industrielle ainsi que la régulation
du cours d'eau aval pour faciliter la navigation.
Les aménagements hydrauliques sont composés de plusieurs ouvrages ou élé-
ments, appelés également constructions hydrauliques. Les constructions hydrauli-
ques les plus fréquents sont les suivantes :
• ouvrages de stockage de l'eau : réservoirs d'eau potable, retenues formées
par des barrages, bassins de rétention de crues
• ouvrages de captage de l'eau : prises d'eau en lac ou en rivière, dessa-
bleurs, seuils et barrages en rivière, orifices, déversoirs, etc.
• ouvrages d'adduction ou de dérivation de l'eau : canaux et galeries à écou-
lement libre, galeries et puits en charge, conduites forcées, chambres de
mise en charge, chambres d'équilibre, coursiers, revêtement et stabilisation
des berges, etc.
• ouvrages de restitution : bassins amortisseurs, sauts de ski, puits à vortex,
etc.
• ouvrages particuliers : siphons, aqueducs, ponceaux, etc.
• ouvrages annexes aux barrages : évacuateurs de crues, vidanges de fond,
dérivations temporaires (pendant la construction telles que les brèches,
etc.).
Les ouvrages les plus importants et les plus grands réalisés par l'homme dans le
domaine des constructions hydrauliques sont les réservoirs artificiels créés par un
barrage sur un cours d'eau. La Figure 1.3 montre que ces réservoirs peuvent être
exploités de manière différente selon le but à atteindre.
L'eau accumulée dans le réservoir peut donc être utilisée pour la production d'éner-
gie hydraulique, l'irrigation ou le transport, c'est-à-dire la navigation. Le transport est
rendu possible par une régulation du débit du cours d'eau à l'aval du réservoir. La
majorité des réservoirs serve à la production d'énergie ou à l'irrigation.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


16
Introduction

Réservoirs

Protection Production

Excédent Pénurie

Crues Eau potable Transformation

Inondations Agriculture Energie

Erosions Effets Irrigations


secondaires
Transports
Conséquences à éviter !

Figure 1.3 : Possibilités d’exploitation des réservoirs

L'objectif d'un réservoir peut également être la protection, soit contre un excédent
soit contre une pénurie d'eau.
Un excédent d'eau provoque des crues et par conséquent des inondations et des
érosions.
Une pénurie porte préjudice à l'agriculture et conduit à un manque d'eau potable en-
traînant de multiples effets secondaires.
Il est clair que la construction de réservoirs et de ses ouvrages annexes ne devrait
pas avoir d'effets négatifs inhérents.

1.3 Evolution et l'avenir des aménagements hydrauli-


ques
Avant de discuter le passé et l'avenir des aménagements hydrauliques, il faut dispo-
ser de quelques informations sur la répartition de l'eau sur le globe.
La plus grande partie des réserves d'eau est sous forme liquide, à savoir 97.8%, dont
la majorité est accumulée dans les océans. Ces derniers couvrent 70.6% de la sur-
face du globe.
L'eau douce représente seulement 6.2‰ de la totalité des ressources, dont la plus
grande partie est de l'eau souterraine (98.5%). C'est l'eau douce qui sert essentiel-
lement à la consommation.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Introduction 17
Réserves d’eau sur le globe Quantité en 10 3 km 3 Part en % Réserves d’eau douce
8 ’426 x 10 3 km3
Vapeur d’eau (gaz) 13 0,001
(atmosphère)

Eau (fluide) Eau de


• cours d’eau (douce) 1 0,00001 surface
• lacs (eau douce) 125 0,009 6,2% 0 1,5%
• eau souterraine (douce) 8 ’300 0,61
• océans (eau salée) 1 ’322 ’000 97,2 Eau
souterraine
Glace (solide) 98,5 %
• glace polaire et glaciers 29 ’000 2,15
Réserves totales 1 ’360 ’000 100

Figure 1.4 : Répartition de l'eau sur le globe.

Les paragraphes qui suivent donnent un bref aperçu de l'évolution des aménage-
ments hydrauliques dans l'histoire. Il faut distinguer les différents objectifs des ouvra-
ges ou interventions.
L'irrigation et l'eau potable sont des besoins fondamentaux de l'homme. Leur évolu-
tion était par conséquent parallèle à celle de l'homme. Les premiers ouvrages impor-
tants datent de l'ère des hautes cultures en Chine, Mésopotamie et en Egypte par
exemple. Les jardins de Babylone sont bien connus comme un des sept miracles du
monde. Leur existence est en fait due au plus ancien système d'irrigation.
La protection de l'homme contre les dangers de l'eau s'est avérée nécessaire avec le
développement démographique, plus particulièrement avec l'augmentation de la
densité de la population habitant les rivages des cours d'eau.
Le développement des ouvrages hydrauliques destinés au transport de marchandi-
ses et à la production d'énergie est étroitement lié à l'évolution scientifique et techni-
que.
Un bref historique des hydrauliciens peut être trouvé en annexe I de Sinniger et Ha-
ger (1989). Cet historique donne un aperçu de l'évolution scientifique.
Dans le domaine de l'énergie et de l'irrigation, la réalisation de réservoirs peut donner
une image de l'évolution des constructions hydrauliques.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


18
Introduction

La Figure 1.6 montre une forte augmentation de la construction des barrages après
la deuxième guerre mondiale. A partir des années soixante-dix, le développement a
commencé à ralentir dans le monde entier et surtout en Suisse. La raison pour ceci
est d'une part la récession économique globale et d'autre part le manque de sites
exploitables possibles dans les pays industrialisés comme la Suisse.

Irrigation
Irrigation
Besoins
Besoins fondamentaux
fondamentaux
Eau
Eau Potable
Potable

Transport
Transport Evolution
Evolution
scientifique
scientifique et
et technique
technique
Energie
Energie

Ouvrages
Ouvrages Evolution
Evolution
de
de protection
protection démographique
démographique

Figure 1.5: Evolution des constructions hydrauliques dans l'histoire

25'000 250
23'034
Nombre de barrages > 15 m
Etat 1998:
20'000 Monde sans Chine: 23'034 200
17'744
Monde avec Chine: 44'645 16'601
153
Monde sans Chine

15'000 150
Suisse

144
128
10'000 100

5'000 50

0 0
60 70 80 90
1'800 1'850 1'900 1'950 2'000
An

Figure 1.6 : Nombre de barrages construits depuis 1800

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Introduction 19
La Figure 1.7 représente une rétrospective de l'évolution de la hauteur maximale des
barrages. Les barrages en béton et les digues en terre ou en enrochement sont trai-
tés séparément. La figure montre également le rôle important de la Suisse dans ce
domaine. En ce qui concerne les barrages en béton, la Suisse était plusieurs fois en
tête du développement, le record des barrages en béton étant encore tenu par la
Grande Dixence.

Grande-Dixence 285
300

Vejont 262

Nurek 300
Mauvoisin 237
Hoover 221

Chicoasen 250
Mica 242
Oroville 236
Hauteurs sur fondation

Barrages en béton
200
Chambon 131

Bennet 183
Kopperton III 177
Qwyhee 127

Trinity 164
Arrowrock 107

Diablo 119

Swift 156
Schräh 112
Buffalo Bill 99
New Croton 91

Anderson Ranch 139


Mud Mountain 130
Cheeseman 72
Kurit 64 (1850)

San Gabriel 115

100
Barrages en remblai
Salt Springs 87
Dix River 84
Stillwater 82
San leandro
47 (1892)

1900 1910 1920 1930 1940 1950 1960 1970 1980 1990

Figure 1.7 : Evolution de la hauteur des barrages

Cependant, des barrages sont construits dans d'autres pays. Sur le tableau à gauche
de la Figure 1.8, les dix pays avec le plus grand nombre de barrages en construction
sont énumérés. Les premières positions sont occupées par la Chine, la Turquie, le
Japon et l'Iran. La plupart des barrages en construction en Europe se trouvent en
Espagne et en Italie. (Hydropower & Dams, 2000)
Sur le tableau à droite de la Figure 1.8, les barrages de hauteur importante sont
énumérés (hauteurs > 60m). En début 2000, un total de 35 barrages dépassant
150 m et 361 dépassant 60 m de haut étaient en construction. Plus que 30% de ces
chantiers se trouvent en Mi-Est incluant la Turquie. Presque 40% sont situés en Asie,
incluant la Chine et l'Inde.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


20
Introduction

Hauteur > 60 m Hauteur > 150 m


1. Chine 94 1. Chine 11
2. Iran 56 2. Iran 8
3. Turquie 54 3. Turquie 5
4. Japon 45 4. Inde 3
5. Inde 12 5. Brésil 3
6. Espagne 10 6. Japon, Philippines, Roumanie,
7. Italie 7 Venezuela, Georgie, Argentine,
Roumanie 7 Grèce, Uzbekistan, Ethiopie,
Brésil 7 Malaisie, Russie, Islande,
Vietnam 7 Mexique 13 x 1 = 13
11. Myanmar 6
12. Algérie 5
Russie 5
Total monde 369 Total monde 43
Figure 1.8 : Barrages actuellement en construction dans le monde (début 2004)

Il est également intéressant de connaître les régions du monde où il est encore pos-
sible de construire des aménagements hydroélectriques. La Figure 1.9 montre la par-
tie actuellement utilisée du potentiel hydroélectrique économiquement réalisable
dans différents continents du monde. Dans le monde entier, uniquement 33.2% du
potentiel économique est exploité. Ceci correspond à 18.8% du potentiel hydroélec-
trique techniquement réalisable.

1mio GWh 3,6mio GWh 107,000 GWh 775,000 GWh 1,0mio GWh 1,6mio GWh 8,1mio GWh 37,000 GWh
10.0%
94.0% 80.2% 60.0% 29.8% 25.0% 64.7% 66.8%

19.8% 40.0% 70.2% 75.0% 35.3% 33.2% 90.0%


6.0%
Afrique Asie Asie australe Europe Amérique Amérique Monde entier Suisse
(sans Russie du nord du sud
et Turquie) et centrale
Partie utilisée du potentiel
économiquement réalisable

Potentiel techniquement réalisable


1,750,000 6,800,000 270,000 1,225,000 1,660,000 2,665,000 14,370,000 41,000
GWh GWh GWh GWh GWh GWh GWh GWh

Figure 1.9 : Potentiel hydroélectrique techniquement réalisable et partie utilisée

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Introduction 21
En Asie, en Amérique du Sud et surtout en Afrique, le potentiel n'est que très peu
utilisé. En Suisse par contre, 90% du potentiel économiquement réalisable ou 80%
du potentiel technique sont déjà exploités.
La question la plus essentielle pour un étudiant est certainement celle de l'avenir du
domaine des constructions hydrauliques, car elle influence les débouchés profes-
sionnels. L'auteur est convaincu, que ce domaine génère des emplois stables, pré-
sentant également de bonnes perspectives pour l'avenir grâce à ses différentes ap-
plications telles que (Schleiss, 1999 et 2000):
1. Approvisionnement en eau potable et industrielle :
Il est de fait que 60% de la population mondiale manque d'eau en quantité suf-
fisante et/ou de qualité adéquate (cf. Figure 1.10).
2. Irrigation :
Une grande partie de la population mondiale est menacée par des famines.
Dans beaucoup de régions, l'irrigation pourrait considérablement augmenter la
production alimentaire. Cette situation s'aggravera encore à cause du chan-
gement climatique global.

Consommation d'eau de l'homme [m3/an]


Pays industrialisés 4000 à 5000
Minimum pour la survie 1000

La consommation de l'eau potable ne représente qu'une petite partie de la


consommation globale de l'eau (~ 100 m3/an), le reste étant utilisé pour la produc-
tion de la nourriture. Pour produire un kilo de pain, il faut 1 m3 d'eau.
Est-ce qu'il existe assez d'eau pour tout le monde ?
Théoriquement, la quantité d'eau utilisable est équivalente aux précipitations an-
nuelles. D'autre part le volume total des précipitations par an est égal à celui de
l'eau douce des lacs et des cours d'eau. Il correspond donc à 126 · 103 km3. La po-
pulation du monde atteindra 6 Milliards en l'an 2000. La réserve d'eau est par
conséquent de 21'000 m3 par an et par personne.
Pratiquement, seulement 10% des précipitations peuvent être utilisés, car la pluie
n'arrive que rarement au moment opportun (il pleut quand il ne faudrait pas et il
ne pleut pas quand il faudrait). La réserve d'eau réellement utilisable correspond
donc à 2000 m3 par an et par personne.

Figure 1.10 : Consommation et réserves d'eau

3. L'exploitation de l'énergie hydraulique :


Comme mentionné ci-dessus, le potentiel hydroélectrique n'est exploité que
partiellement. Le besoin en énergie des pays en voie de développement en
Afrique, Amérique du Sud en Asie est en croissance rapide. La situation est
particulièrement grave dans les pays émergeant, c'est-à-dire la Chine, l'Inde et
surtout les quatre tigres (Thaïlande, Indonésie, Corée et Malaisie). En outre,
les réserves de pétrole, connues aujourd'hui, seront épuisées en 2050 environ.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


22
Introduction
4. La navigation :
Dans le monde, la plus grande partie des marchandises est en fait transportée
par bateau. Dans les pays en voie de développement déjà mentionnés, l'infras-
tructure pour la navigation fluviale et maritime manque encore.
5. Traitement des eaux urbaines/usées :
Uniquement les pays les plus développés ont atteint un état de traitement sa-
tisfaisant.
6. Protection contre les crues et l'érosion :
Avec l'augmentation de la population et le changement climatique, une aug-
mentation de la fréquence et du volume de crues et d'inondations peut être ob-
servée.
En conclusion, il peut dire que le domaine des constructions hydrauliques est et gar-
dera sa grande importance, il doit même être considéré comme indispensable. Grâce
aux constructions hydrauliques les besoins vitaux de l'homme peuvent être satisfaits.
En Suisse, la situation est légèrement différente que dans le reste du monde.
Comme mentionné ci-dessus, le potentiel hydroélectrique est déjà bien développé.
Actuellement, nous avons environ 490 centrales hydroélectriques opérationnelles
(1.1.1998). La plupart des grandes centrales à accumulation dans les Alpes ont été
construites il y a 40 à 50 ans. Leur renouvellement sera par conséquent nécessaire
durant la prochaine décennie. Il est évident que le pays ne peut pas renoncer à cette
énergie durable, renouvelable et propre dans l'avenir (60% de l'énergie électrique
sont produits par des centrales hydrauliques, 40% par des centrales nucléaires). Ou-
tre l'entretien permanent des centrales, ce renouvellement sera générateur d'emplois
pour des ingénieurs spécialisés.
Finalement, la protection contre les crues et les dangers naturels, tels que les crues
de la Reuss en 1987 et en Valais en 1993 et 2000, est également devenue un défi
pour les ingénieurs suisses. Une autre tâche importante pour les ingénieurs dans
l'avenir sera la re-naturalisation des cours d'eau aménagés de façon trop technique
par le passé. Ceci n'est évidemment pas possible dans tous les cas car le re-
aménagement doit malgré tout être conforme aux exigences de sécurité.

1.4 Particularités des aménagements hydrauliques


1.4.1 Protection de la nature et de l'environnement
Il ressort clairement des paragraphes précédents que l'eau est probablement l'élé-
ment le plus précieux de la nature. Les aménagements hydrauliques doivent par
conséquent être très exigeants quant au respect de la nature et de l'environnement.
L'ingénieur qui conçoit et planifie des constructions hydrauliques doit être à la fois
hydraulicien et écologiste. Aujourd'hui, il est impossible de réaliser des projets non
conformes aux objectifs de protection de l'environnement sans s'exposer à des op-
positions de la part des organisations de protection de l'environnement. Le plus sou-
vent, le règlement de ces oppositions s'avère pour le maître d'ouvrage très long et
onéreux.

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Introduction 23

Protection de Eau des cours naturels Réalisation et Calculs


l’environnement élément imprévisible l'entretien hydrauliques
• travail en équipes • comportement des cours • interruption • processus itératif
interdisciplinaires d’eau (débit, forces) d’exploit.
- ingénieurs difficilement prévisibles • nombreuses
- géologues • dérivation des solutions possibles
- écologistes • considérations cours d’eau
- paysagistes probabilistes • paramètres:
• sécurité des - techniques
• éléments interv. • analyse du risque ouvrages - économiques
- l’homme avec - environnementaux
ses infrastructures - paysagers
- le milieu naturel - esthétiques
- la science et - sécurité
l’économie

Figure 1.11 : Particularités des aménagements hydrauliques

L'opposition contre des projets peut seulement être évitée si l'ingénieur considère les
aspects écologiques depuis le départ de la planification, s'il comprend les écologistes
et les prend au sérieux. A cet effet, un travail d'équipe composée d'ingénieurs, de
géologues, d'écologistes et de paysagistes, est nécessaire afin d'élaborer de projets
favorables à l'environnement. Il s'agit de trouver un juste équilibre entre nos propres
besoins, à savoir :
• eau potable et industrielle
• protection contre les crues
• énergie et transport
• irrigation
et les exigences de notre environnement.
Les besoins vitaux de l'homme nécessitent une intervention avec des mesures tech-
niques, mais celle-ci ne doit pas se faire au détriment de son environnement. Au
contraire, par des mesures judicieuses, il est possible de maintenir cet équilibre ou
même d'y apporter des améliorations.
Pour la conception de projets favorables à l'environnement, une base solide et com-
plète est indispensable. Les investigations doivent donc considérer tous les éléments
intervenants. Ce sont :
• l'homme avec ses infrastructures
• le milieu naturel
• la science et l'économie
En général, les interactions de ses éléments sont évaluées dans l'étude d'impact im-
posée par la loi pour les ouvrages importants.

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24
Introduction

Ces études doivent considérer les points suivants :


• la population avec ses infrastructures
• le milieu naturel (faune, flore, paysage)
• le climat (qui est également d'une grande importance pour la conception
technique)
• l'hydrologie
• la géologie et l'hydrogéologie (eau souterraine)
• la géotechnique
• l'économie.

1.4.2 Eau des cours naturels - élément imprévisible


L'eau des cours naturels étant également un élément naturel, il est difficile de prévoir
le comportement des cours d'eau. Souvent les débits et les forces de l'eau ne sont
pas connus très précisément. Des considérations probabilistes et des analyses de
risque sont donc indispensables (études hydrologiques).

1.4.3 Réalisation et entretien


La réalisation et l'entretien des constructions hydrauliques ont des conséquences
particulières :
• l'interruption de l'exploitation
• la dérivation des cours d'eau
• la sécurité des ouvrages.
Pour les constructions hydrauliques, ces conséquences sont beaucoup plus pronon-
cées que pour les ouvrages conventionnels planifiés par l'ingénieur.

1.4.4 Calculs hydrauliques


Par rapport aux calculs statiques, les calculs hydrauliques et le dimensionnement
des constructions hydrauliques sont soumis à un processus itératif. En général, de
nombreuses solutions sont possibles.
Le choix de la meilleure solution doit s'appuyer sur plusieurs critères en fonction des
paramètres suivants :
• techniques
• économiques
• environnementaux
• paysagers, esthétiques
• sécurité.

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Données de base 25

2 DONNEES DE BASE
Après l'introduction au domaine des aménagements hydrauliques, il convient de s'in-
téresser aux données de base nécessaires pour chaque conception et dimension-
nement de divers types de constructions hydrauliques. Ce chapitre traite les domai-
nes de l'hydrologie, du transport solide par l'eau, de la géologie et de la géotechni-
que.

2.1 Hydrologie
2.1.1 Généralités
Le "Petit Robert" donne la définition suivante pour l'hydrologie :
"Etude des eaux et de leurs propriétés"
Selon l’ONU, l’hydrologie peut être définie comme :
"Sciences de l’eau et de son cycle sur la terre"
En général, l'hydrologie désigne l'étude de l'hydrosphère. Selon le milieu et l'environ-
nement concernés, plusieurs disciplines de l'hydrologie peuvent être distinguées :
• Hydrométéorologie : étude des précipitations
• Hydrologie de surface : étude du ruissellement
• Hydrogéologie : étude de l'eau souterraine
• Agrohydrologie : étude du développement végétal
• Hydro-pédologie : étude du type et de la nature des sols
• Limnologie : étude des lacs
• Océanographie : étude des océans
En outre, la différence est faite entre l'hydrologie scientifique qui traite les aspects
théoriques et l'hydrologie opérationnelle qui s'occupe des aspects pratiques et des
observations.
Les aspects théoriques sont basés sur des études de physique de l'hydrosphère et
de l'atmosphère et conduisent au développement de modèles numériques.
L'hydrologie opérationnelle par contre comprend les aspects pratiques tels que :
• l'instrumentation de mesure :
définition et normalisation des caractéristiques des instruments, planifica-
tion des réseaux
• la transmission et le traitement des données
• l'analyse statistique des données
• l'analyse prévisionnelle
Un aspect très important est la reconnaissance et l'estimation des ressources en
eau, surtout la partie accessible et exploitable.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


26 Données de base

L'eau étant un élément vraiment imprévisible, il est indispensable de procéder à des


études et analyses hydrologiques afin de mieux prévoir le comportement de l'eau et
de pouvoir planifier les constructions hydrauliques. Dans le cas contraire, les ouvra-
ges pourraient être mal conçus. Il ne manque pas de mauvais exemples, surtout
dans les pays sans longue tradition d'observation de précipitations et de débits.

2.1.2 Cycle hydrologique et bilan d'eau


Les paragraphes suivants donnent quelques notions hydrologiques indispensables
pour l'hydraulicien praticien.

P E
vent
E

P
Ro

Ru

océans

B
(bassin versant)

Figure 2.1 : Le cycle de l'eau

Le cycle hydrologique est le moteur de l'hydrologie (cf. Figure 2.1). Ce cycle de l'eau
peut être divisé en un cycle terrestre et un cycle océanique. Pour assurer l'existence
de vie sur terre, il est d'une importance primordiale que les précipitations sur les
océans soient inférieures à l'évaporation. La vapeur d'eau excédante, accumulée
dans les nuages, est transportée à l'intérieur des continents par le vent.
Le cycle de l'eau est composé des éléments suivants :
• P : les précipitations,
• E : l'évaporation et l'évapotranspiration de la végétation,
• R : le ruissellement, constitué de :
la partie Ro qui est à la surface
la partie Ru qui est la percolation de l'eau souterraine après son infil-
tration
• S : le stock d'eau

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 27

Pour une région bien définie comme un bassin versant, le bilan suivant peut être
formulé :
P=R+E±S
La précipitation est donc égale à la somme du ruissellement, de l'évaporation et de la
variation du stock. Ce bilan est évidement lié à une période de temps spécifique.
La variation du stock correspond à la variation des réservoirs d'eau souterraine et à
la formation ou à la fonte de la glace et de la neige respectivement.
D'habitude, le bilan se fait en mm de hauteur d'eau en divisant tous les volumes
d'eau par la surface du bassin versant. On obtient :
hP = hR + hE ± hS
Exemple : Bassin versant de la Broye à Payerne, valeurs annuelles
hP = 1172 mm/an
hR = 617 mm/an
hE = 484 mm/an
hS = hR + hE – hP = 71 mm/an
D'après le bilan, 71 mm de neige et/ou de l'eau souterraine sont accumu-
lés chaque année dans le stock.
Lors de l'établissement du bilan, il faut considérer que l'évaporation est difficile à cal-
culer. Par conséquent, sa valeur est sujette à des erreurs qui affectent également le
calcul de la variation du stock. Si le bilan est établi pour une période suffisamment
longue, la variation du stock devient négligeable.

Mois d’hiver Mois d’été

hP = hR + hE + hS hP = hR + hE - hS

hP
h en mm/ mois

hR
hE

hS

Fonte
hR Rétention dans des neiges
hP
la couche de neige
hP - hE

365 jours

Figure 2.2: Influence de la neige sur le bilan hydrologique

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


28 Données de base

La Figure 2.2 montre l'influence de la neige sur le bilan. En hiver, le stock est aug-
menté par la couche de neige; en été, le stock est à nouveau vidé durant la fonte de
neige. Pour le bilan journalier, mensuel ou saisonnier, la rétention de neige joue un
grand rôle. Le bilan annuel par contre n'est que très peu influencé par l'accumulation
et la fonte de neige. Pour l'établissement d'un bilan sur plusieurs années, la variation
du stock due à la neige est négligeable :
hP = hR + hE
Bien entendu, tel n'est pas le cas pour la glace des glaciers, car leur évolution est
due à une variation du climat et surtout de la température à moyen terme.
Le bilan d'un bassin versant partiellement couvert de glaciers ne peut pas, par
conséquent, négliger la variation du stock.

Rhône à la Massa à Rhin à


Porte du Scex Massaboden Rheinfelden
(amont du Léman) (amont de Bâle)
Caractéristiques Surface B km2 5220 202 34550
du bassin versant Glaciers % 16,2 67,2 1,6
Altitude moyenne m s.m 2130 2920 1085
Altitude maximum m s.m 4634 4195 4277
Altitude minimum m s.m 374 687 260
Valeurs moyen- Précipitation hP mm/an 1345 2088 1389
nes mesurées
sur la période Ruissellement hR mm/an 1097 2144 939
1931-1960
Valeurs dérivées Coefficient de ruissellement % 82 103 ! 68
pour la période Partie du ruissellement dû à la
1931-1960 fonte des glaciers 64 266 env. 0
Partie du ruissellement dû aux
précipitations mm/an 1033 1878 939
Evaporation hE mm/an 312 210 450
coefficient de ruissellement
corrigé % 77 90 68

Figure 2.3 : Données hydrologiques de quelques bassins versants en Suisse

A titre d'exemple, dans le bassin versant du Rhône (cf. Figure 2.3), la partie du ruis-
sellement dû à la fonte des glaciers est de 64 mm/an pour la période considérée. La
contribution des glaciers est, avec 266 mm/an, encore plus importante dans le cas
de la Massa. Par contre le Rhin n'est guère influencé par les glaciers.
Une approche assez connue pour quantifier le bilan a été développée par Keller.
Pour un grand nombre de bassins versants, il a établi des régressions linéaires entre
les précipitations moyennes et les débits moyens. Pour les différentes régions en
Europe, il a trouvé les formules suivantes :
Alpes et montagnes moyennes :
hR1 = hP1 – 350 mm/an
Régions à altitude moyenne :
hR2 = 0.942 hP2 – 405 mm/an
Pays plats :
hR3 = 0.884 hP3 – 460 mm/an

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 29

Vérification à l'exemple de la Broye à Payerne


hP2 = 1172 mm/an
hR2 = 699 mm (en réalité hR2 = 617 mm selon l'exemple ci-dessus)
Il est clair, que ces relations ne donnent qu'un ordre de grandeur.

2.1.3 Coefficient de ruissellement


(run-off coefficient)
Le coefficient de ruissellement est défini comme le quotient entre le ruissellement et
la précipitation :
R hR hauteur d' eau ruisselée
= = =
P hP hauteur d' eau précipitée
Désormais le coefficient de ruissellement définit la partie des précipitations qui a
ruisselé.
La hauteur moyenne annuelle du ruissellement déterminée pour la Suisse est de
hR = 970 mm/an et la hauteur moyenne annuelle des précipitations a été évaluée à
hP = 1380 mm/an. Le coefficient de ruissellement moyen sur une longue période est
par conséquent égal à = 0.70.
Le coefficient est facile à calculer si les mesures de pluie et de ruissellement sont
disponibles. Il est cependant difficile de l'évaluer sans mesures de ruissellement, car
il dépend de nombreux paramètres :
• les caractéristiques du bassin versant :
la végétation, la perméabilité du sol, la topographie, le type de sol, etc.…
• les précipitations :
la durée de la pluie, les événements antécédents, la saturation du sol, la
saison (gel).
Il est évident que le coefficient de ruissellement augmente en général avec le volume
et l'intensité de la pluie. Le Tableau 2.1 montre quelques valeurs typiques de pour
différents sols et types de couverture.

Type de sol/couverture Coefficient de ruissellement


Forêt 0.1
Près, champs cultivés 0.2
Rocher compact 0.7
Routes et villages 0.9

Tableau 2.1 : Valeurs caractéristiques du coefficient de ruissellement pour quel-


ques types de sol et de couverture

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


30 Données de base

2.1.4 Bassin versant


Le bassin versant pourrait être défini comme l'espace géographique pour lequel un
bilan hydrologique peut être établi.

limite hydraulique

ruisseau

rivière

exutoire (station de mesure)

Figure 2.4 : Schéma d'un bassin versant

Plus précisément, le bassin versant est une surface élémentaire, fermée du point de
vue hydraulique, pour laquelle les excédents des précipitations s'évaporent ou
s'écoulent par une seule section appelée exutoire.
Les limites du bassin versant hydrologique ne sont pas toujours équivalentes à celles
du bassin versant topographique. Pour la détermination du bassin versant hydrologi-
que, l'écoulement souterrain de l'eau doit être pris en compte (cf. Figure 2.5).
La forme géométrique a une influence sur l'hydrogramme à l'exutoire (cf. Figure 2.6).

limite hydraulique
limite topographique

Précipitations

Figure 2.5 : Coupe - à travers le bassin versant

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 31

1 2 T

Figure 2.6 : Influence de la forme du bassin versant sur l'hydrogramme à l'exu-


toire

La forme des bassins versant peut être caractérisée par l'indice de compacité de
Gravelius :
P
K=
2 A
avec : P : périmètre du bassin versant
A : surface du bassin versant
Exemple : Un exemple est donné à la Figure 2.7.

1 Forme proche
d’un rectangle
élancé
K = 1.8

2 Forme proche
d’un cercle
K 1.0

1 2

Figure 2.7 : Exemple de calcul du coefficient de compacité de Gravelius

Le relief du bassin versant est décrit par la courbe hypsométrique. Elle donne la dis-
tribution de l'altitude en fonction de la surface du bassin versant qui se trouve à cette
altitude (cf. Figure 2.8).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


32 Données de base

Altitude
volume
am =
surface à l' exutoire
Altitude
maximum

Altitude
moyenne am

Altitude
minimum Surface
à l’exutoire 50 % 100 %

Figure 2.8 : Courbe hypsométrique d'un bassin versant

2.1.5 Les précipitations


La formation de précipitations est brièvement rappelée ici. Les gouttes d'eau se for-
ment dans l'air par la condensation de la vapeur formée par évaporation sur les
océans. Ces gouttes de pluie ont en général un diamètre entre 0.5 et 5 mm (jusqu'à
7 mm pour les orages) et elles tombent selon leur diamètre avec une vitesse de 3 à
8 m/s.
Les précipitations ne tombent pas toujours sous forme de pluie, elles peuvent éga-
lement arriver sous forme de neige, de grêle, de grésil, de rosée, de gelée blanche
ou de givre.
a) Les moyens d'observation
Le principe de mesure de précipitations est simple : celles-ci sont récoltées. Le vo-
lume d'eau mesuré ou le volume équivalent d'eau pour les précipitations solides,
permet de déterminer la hauteur d'eau tombée par unité de surface. La précision de
telles mesures devrait être de l'ordre de 1/10 mm. Il faut être conscient, qu'un 1 mm de
lame d'eau représente 1 l/m2 ou 10 m3/ha.
Malheureusement la mesure des précipitations est forcément ponctuelle. Les appa-
reils de mesure sont en fait des bassins versants minuscules, dans lesquels un bilan
hydrologique est établi. Il s'agit souvent de simples petits réservoirs permettant d'ac-
cumuler l'eau. Ils sont appelés pluviomètres.
La Figure 2.9 montre deux différents types de pluviomètres.
A gauche, le pluviomètre le plus utilisé en Suisse, développé par Hellmann, est re-
présenté. Un entonnoir est placé au-dessus du récipient pour limiter l'évaporation.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 33

Surface réceptrice

Paravent

Entonnoir
Hauteur de captation

Hauteur de captation
Collecteur

Réservoir

Protection

Vidange

Pluviomètre journalier selon Hellmann Pluviomètre totalisateur

Figure 2.9 : Différents types de pluviomètres (Vischer, Huber, 1993)

En Europe la surface réceptrice a souvent une aire de 200 ou 500 mm2. Elle se
trouve entre 0 et 6 m au-dessus du sol.
Le pluviomètre de Hellmann permet de mesurer les précipitations journalières. Le
réservoir est vidé toutes les 24 heures ou après les pluies importantes.
Souvent, les pluviomètres sont équipés avec un système d'enregistrement en continu
et une vidange automatique qui se met en marche dès que la hauteur d'eau dans le
réservoir atteint 10 cm, par exemple. Les pluviomètres avec enregistrement continu
sont appelés pluviographes.

cm

10

0
t
0 6 12 18 24

Figure 2.10 : Exemple d'enregistrement d'un pluviographe

Les mesures d'un pluviographe permettent également de déterminer l'intensité de la


pluie.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


34 Données de base

L'enregistrement en continu est le résultat :


• du pesage de l'eau accumulée dans le réservoir à l'aide d'une balance pré-
cise
• de la mesure de la hauteur de l'eau dans le réservoir à l'aide d'un flotteur
• du comptage des basculements de deux augets de volume connu bascu-
lant autour d’un axe
A droite de la Figure 2.9, un dessin schématique d'un pluviomètre totalisateur est
représenté. Ce type de pluviomètre est surtout utilisé en haute montagne où l'on ne
s'intéresse qu'au volume de précipitation hebdomadaire, mensuel ou saisonnier. Gé-
néralement le relevé de la hauteur d'eau dans le réservoir et sa vidange se font ma-
nuellement.
Les données du pluviomètre peuvent être imprécises à cause de l'emplacement et
de l'installation du pluviomètre. Le vent joue un rôle particulièrement important pour
la précision de la mesure.
Le radar présente aujourd'hui un autre moyen pour mesurer les précipitations. Son
état de développement actuel permet d'analyser des fortes précipitations pendant les
orages.
Il est utilisé pour localiser et suivre le déplacement des précipitations. Certains radars
modernes permettent également d'estimer l'intensité des précipitations. Pour cette
estimation, il est indispensable de connaître le diamètre des gouttes.
b) L'évaluation des précipitations mesurées
La moyenne annuelle des précipitations est une grandeur très souvent évaluée.

4500

4000

3500

3000

2500
mm[l/m2]

2000

1500

1000

500

0
Bâle

Sion
Scuol
Säntis
Jungfrau

Locarno

Neuchâtel
St-Gothard

Moy. Suisse

Figure 2.11 : Hauteur annuelle moyenne des précipitations pour quelques villes
suisses

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 35

La Figure 2.11 donne les valeurs pour quelques villes suisses. La moyenne annuelle
pour la Suisse est à peu près égale à 1500 mm. Bien entendu, cette moyenne a été
établie sur plusieurs années. Elle est donc représentative pour une longue période.
L'intensité de la pluie iP est définie par le quotient de la hauteur de la précipitation par
rapport à un certain temps d'observation.
hP
iP =
t0
avec : hP : hauteur des précipitations tombées pendant le temps
d'observation
t0 : temps d'observation ou durée de la pluie tP
L'expérience montre que l'intensité diminue avec la durée des précipitations. L'inten-
sité peut être donnée en fonction de la durée de la pluie.
Les unités de l'intensité les plus souvent utilisées sont les suivantes :
• mm/min
• mm/heure
• mm/jour
De quelle manière sont représentées les mesures pluviométriques en Suisse et
quelle est leur fiabilité ?
Actuellement, environ 500 pluviomètres sont installés en Suisse. Pour les stations les
plus importantes, une analyse statistique des résultats d'observation a été faite et
publiée par le FNP (Institut fédéral de recherche sur la forêt, la neige et le paysage) à
Birmensdorf (Zeller, Röthlisberger, Geiger, 1979).

iP
const
ip
tp

x courbe enveloppe ~ hyperbole


x
x x
x x
x x
x intensité observée
x x x
x x x
x xx x x
x x x
x

tP

Figure 2.12 : Intensité de précipitation en fonction de la durée des précipitations

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


36 Données de base

La Figure 2.13 représente l'intensité relevée à la station pluviométrique de Lausanne


en fonction de l'intervalle de mesure, c'est-à-dire en fonction de la durée de la préci-
pitation, pour différentes périodes de retour en année. Cette représentation est appe-
lée courbes intensité-durée-fréquence. Une période de retour de 100 ans signifie
qu'une précipitation de cette intensité a une probabilité de 1/100 ou de 1% de se pro-
duire pendant l'année. La Figure 2.13 montre bien la diminution de l'intensité en fonc-
tion de la durée de la précipitation comme il a été mentionnée ci-dessus.

Figure 2.13 : Courbes intensité-durée-fréquence de la station de Lausanne (Zeller,


Röthlisberger, Geiger, 1979)

Exemple : hP10 = 3 mm pour une durée de 24 h

hP10 = 35 mm pour une durée de 1 h

hP10 = 100 mm pour une duré de ¼ h

Les précipitations de très courte durée ne peuvent être mesurées qu'avec un pluvio-
graphe. A partir d'un intervalle de 10 h, les totalisateurs journaliers peuvent être utili-
sés.
Les pluviomètres ne donnent que des informations ponctuelles. L'ingénieur praticien
s'intéresse cependant à la pluie sur toute une région ou un bassin versant. Ces in-
formations doivent être extrapolées à partir des observations ponctuelles.
Lorsqu'il y a plusieurs stations de mesure dans une région, chacune doit être attri-
buée à une partie de la région considérée. Si l'on dispose de très peu de stations,
l'extrapolation des précipitations se fait selon la méthode de Thiessen. Elle permet
d'attribuer une partie de la région totale à chaque station en construisant des polygo-
nes comme montré à la Figure 2.14.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 37

. A2

.
1
3 A3

A1 .
. A4
4 A: surface totale
A = A1 + A2 + A3 + A4

Figure 2.14 : Distribution de la surface du bassin versant aux stations de mesures


selon la méthode de Thiessen (Exemple pour quatre stations)

Après avoir attribué les surfaces recouvertes par chaque station, la hauteur de préci-
pitation pour toute la région se calcule en général par la formule suivante :
n Ai
hP = hPi
i =1 A
Avec un grand nombre de stations, une évaluation plus précise des précipitations sur
toute une région consiste en un calcul des isohyètes.

AA

1
hp = hp' dA
A
Isohyète
A : surface totale

Figure 2.15 : Détermination d’intensités locales de précipitations dans une région


sur la base des isohyètes estimées (9 stations de mesure)

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38 Données de base

2.1.6 Evaporation
L'eau évaporée a deux origines, à savoir
• l'eau de surface évaporation (à gauche sur la Figure 2.16)
• l'eau du sol évapotranspiration (à droite sur la Figure 2.16)

Figure 2.16 : Evaporation de l'eau de surface et évapotranspiration de l'eau du sol

L'évaporation peut être exprimée dans les unités suivantes :


• mm/jours
• mm/mois
• mm/ans
Le Tableau 2.2 montre quelques exemple de valeurs d'évaporation.

Eau de surface Evaporation


[mm/an]
Lac de Tacern (Suède) 600
Léman 650
Lac de Zoug 775
Neusiedlersee (Autriche) 940
Retenu d'Imfout (Maroc) 1430
Lac Payao (Thaïlande) 1900
Mer morte 2400

Tableau 2.2 : Exemples de valeurs d'évaporation pour l'eau de surface

L'évaporation est une donnée importante, avant tout pour :


• l'irrigation, le transport de l'eau
• le calcul des retenues.

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Données de base 39

L'évapotranspiration est très difficile à mesurer, car elle est influencée par beaucoup
de paramètres : nature du sol, type de végétation, température, vent, humidité et en-
soleillement.
En principe, l'installation pour mesurer l'évaporation de l'eau de surface est assez
simple. Comme montré à la Figure 2.17, les installations de mesure très simples sont
constituées par des petits bassins dits évaporomètres.
Pour considérer l'influence des différents paramètres mentionnés ci-dessus, les éva-
poromètres sont combinés avec un pluviomètre, un thermomètre, un hydromètre et
un anémomètre.
Ces installations ne représentent cependant pas très fidèlement les processus
d'évaporation d'un réservoir par exemple. La température de l'eau dans le petit bas-
sin de l'évaporomètre est en fait plus élevée que dans le réservoir. Le taux d'évapo-
ration est donc surestimé de 20 à 40%

Boîte contenant un
thermomètre et une
Anémomètre sonde d’humidité
Limnimètre

Thermomètre

Pluviomètre

Bassin

Figure 2.17 : Installation pour la mesure de l'évaporation (Vischer, Huber, 1993)

La mesure de l'évapotranspiration est plus complexe. Des installations particulières,


par exemple un bac enterré, sont nécessaires. L'installation qui est représentée
schématiquement sur la Figure 2.18 est appelée lysimètre et peut également servir
pour mesurer l'infiltration.

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40 Données de base

Précipitation

Pluviomètre P

R
S

Figure 2.18 : Schéma d'un lysimètre (Vischer, Huber, 1993)

2.1.7 Variation du stock


La variation du stock se manifeste dans les différents réservoirs, à savoir :
• l'eau de surface (lacs, cours d'eau)
• la couche de neige
• les sols avec couvert végétal
• l'eau souterraine.

2.1.8 Ruissellement
a) Régime du ruissellement
Même en connaissant les précipitations, l'évaporation et la variation du stock, on ne
peut expliquer que qualitativement le régime du ruissellement et le débit dans les
cours d'eau.
Le bilan hydrologique permet d'écrire :
R =P E±S
En général, le régime du ruissellement est surtout influencé par les caractéristiques
du bassin versant et le climat. En Suisse, la plus grande partie du ruissellement des
cours d'eau arrive en été. Par conséquent, les crues se manifestent également en
été.
Pour caractériser les débits, les notions suivantes sont utilisées :
EHQ : crue extrême (le déluge) (Extremhochwasser)
HHQ : débit de pointe maximal observé (Höchsthochwasser)
MHQ : débit moyen (Mittelwasser)
NQ : débit d'étiage (Niedrigwasser)
NNQ : débit minimum (Niedrigstniederwasser)

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Données de base 41

Pour les événements extrêmes, la date ou la période de retour doit être rajoutée, par
exemple :
HHQ25.8.87 : crue du 25 août 1987
HQ100 : crue centennale
b) Observation
En substance, il existe trois méthodes pour observer le débit dans un cours d'eau :
1. mesure du niveau d'eau (par échelle et fluviomètres)
2. mesure de la vitesse de l'écoulement
3. mesure de la concentration d'un traceur (méthode de dissolution)
c) Mesures du niveau d'eau
Pour calculer les débits à partir des niveaux mesurés, il faut connaître le régime
d'écoulement. Les hauteurs d'eau peuvent être déterminées de manière unique dans
le seul cas d'un écoulement uniforme ou critique.
Pour un écoulement uniforme, le débit peut se calculer par la formule de Manning-
Strickler :
1 2
Q=K J 2 Rh 3 A

avec : Rh : rayon hydraulique de la section A (fonction de la hauteur


d'eau) [m]
J : pente du lit (égale à la pente de la surface d'eau et de la
ligne d'énergie) [-]
K : coefficient de Strickler [m1/3/s]
K peut être estimé avec la formule suivante :
21.1
K= 1
d906
où : d90 : diamètre caractéristique des galets de dimensions varia-
bles qui constituent le lit (90% des matériaux ont un dia-
mètre inférieur à d90), correspond au diamètre moyen du
pavage [m]
L'utilisation de d90 traduit le fait que la rugosité est surtout influencée par les maté-
riaux les plus gros à cause de la formation d'une couche de protection ou de pavage
sur le font du lit (cf. Figure 2.19).

déposé comme des tuiles

Figure 2.19 : Pavage du lit d'un cours d'eau

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


42 Données de base

Puisque l'estimation de la rugosité du lit entraîne beaucoup d'imprécision, il est mieux


de mesurer les niveaux d'eau dans une section de contrôle. Dans une telle section,
l'écoulement est critique. Le débit ne dépend que de la hauteur d'eau et il est donnée
par une formule de forme :
Q = C hn
avec : C : constante géométrique
h : hauteur d'eau (critique)
n : exposant, n = 3/2 pour une section rectangulaire
n = 5/2 pour une section triangulaire
Souvent, des sections de contrôle artificielles sont construites pour mesurer plus
précisément les débits par :

• des seuils (type Venturi) hc

• des Venturis (rétrécissement latéral)

• des déversoirs à parois minces

b) Mesure des vitesses d'écoulement


Dans les cours d'eau naturels, une section bien définie est souvent choisie et on y
établit une courbe de tarage à l'aide de profils de vitesses mesurés.

h [m]

x x x x x x x ligne de vitesse
x x x x x x x identique
x x x x x
extrapolation
x x
point de
Q = a + b · hn
mesure
Q [m3/s]

Figure 2.20 : Etablissement d'une courbe de tarage à partir de mesures de vites-


ses

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 43

Pendant les crues, il est difficile de déterminer le profil de vitesse, d'où, par consé-
quent, l'obligation d'extrapoler la courbe de tarage pour les grands débits. Ceci cons-
titue une source d'imprécisions.
Les vitesses sont en général mesurées à l'aide de moulinets (Messflügel).
c) Méthode de dissolution
La turbulence des écoulements torrentiels étant grande, il s'avère trop difficile de
mesurer des profils de vitesse. Dans ce cas, la méthode de dissolution est utilisée.
Elle fonctionne parfaitement bien en présence de fortes turbulences.
Le traceur le plus souvent choisi est le sel. Parfois, des colorants sont également
utilisés.
Deux manières d'application du traceur sont à distinguer (cf. Figure 2.21) :
• adjonction unique d'un volume déterminé du traceur
• injection en continu d'un débit déterminé du traceur
Malheureusement, la méthode de dissolution ne donne pas des résultats satisfai-
sants pour les grands débits. L'eau est trop chargée en matériaux en suspension
pendant les crues.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


44 Données de base

adjonction unique V
ou
injection continue q
prélevement
d’échantillon

1 2
distance du mélange

C Injection unique V C
c dt = T C m
T
Concentration

V = volume de
la solution Cm: concentration
moyenne
Co

C1
T t t
durée du passage Concentration
constante
Bilan du Traceur (sel)

V = Q c dt = Q c dt q C0 = (Q + q) C1
T T

Q=
V
=
V
Q=q
(C 0 C1 )
q
C0
(q << Q )
c dt Cm T C1 C1
T

Figure 2.21 : Techniques de traçage pour la mesure du débit par la méthode de


dissolution

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 45

d) Présentation des résultats d'observation


Les débits mesurés sont présentés sur des courbes chronologiques ou sur des cour-
bes de débit cumulé (cf. Figure 2.22).

VT [m3]
Q [m 3/s]
pointe annuelle

apport annuel [m3]

débits cumulés
moyenne annuelle

moyenne mensuelle

t
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

1 année

Figure 2.22: Représentations possibles de débits mesurés

Normalement, la courbe chronologique est basée sur les débits moyens journaliers.
Dans le cas d'un enregistrement automatique, les débits instantanés peuvent en
principe également servir de base. L'information donnée par la courbe n'est cepen-
dant pas améliorée.
A partir de la courbe, les grandeurs suivantes peuvent être déduites :
• la pointe annuelle
• les moyennes mensuelles
• la moyenne annuelle ou le module.
Lorsque les débits sont connus du début jusqu'à la fin de l'année, la courbe des dé-
bits cumulés peut être établie à l'aide de la formule suivante :

[ ]
T
VT = Q dt m 3
0

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


46 Données de base

La pente de cette courbe est égale au débit :


dVt
=Q
dt
Les courbes des débits cumulés sont utilisées pour le dimensionnement des rete-
nues, c'est-à-dire des volumes des réservoirs.
Si l'on dispose d'une série de mesures de débit assez longue, disons au minimum
vingt à trente ans, une analyse statistique peut être faite sur :
• les moyennes mensuelles
• les modules
• les apports annuels
• les pointes annuelles
La méthode utilisée pour une interprétation statistique des séries de mesure sera
traitée ci-dessous.
La courbe des débits classés est également un outil souvent utilisé pour le dimen-
sionnement des constructions hydrauliques. La courbe est construite en classant les
débits mesurés selon leur valeur.

Q [m3/s]
1 = 2

pointe annuelle

1 moyenne annuelle
Qd 2
débit d’étiage
minimum annuel

T [jours]
0 130 150 350 355 365

Figure 2.23 : Courbe des débits classés

Exemple : A l'aide de la courbe de la Figure 2.23, il peut être déterminé que le débit
dérivé Qd est garanti pendant 130 jours de l'année.
La courbe des débits classés peut être présentée pour une seule année. Plus sou-
vent, on s'intéresse à une série de plusieurs années, c'est-à-dire à une courbe repré-
sentative du cours d'eau et valable à long terme.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 47

En outre, plusieurs grandeurs, utiles pour la comparaison des caractéristiques de


différents bassins versants, ont été définies. Les dénominations suivantes sont à re-
tenir :
• le débit spécifique : q [m3/s km2]
• la hauteur de la lame d'eau ruissellée : Hr [mm]
Cette dernière peut être corrélée avec les précipitations mesurées soit pour une an-
née (module comparé au volume total des précipitations), soit pour un événement
extrême.
e) Estimation des pointes de débit
Les très fortes précipitations conduisent à des débits extrêmes, c'est-à-dire à des
événements de crue. Les crues sont des écoulements fortement instationnaires. El-
les sont représentées par des hydrogrammes (cf. Figure 2.24).

Débit

débit de pointe Q*

courbe de crue

apport de la crue

débit de base
( situation avant la crue)
temps
t*

Figure 2.24 : Exemple d'un hydrogramme de crue

Les pointes de débit ou les crues peuvent essentiellement être déterminées par les
méthodes suivantes :
• formules empiriques
• formules rationnelles
• analyses statistiques
Avant d'expliquer ces méthodes en détail, il faut traiter la relation entre les crues et la
surface d'un bassin versant ( formules empiriques).
Une relation de la forme suivante peut être établie pour chaque bassin versant :

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


48 Données de base

HHQ = C A n ou
HHQ C
= qmax = C A n 1 = 1 n
A A
C et n sont des paramètres qui caractérisent la région du point de vue des précipita-
tions, de la surface et de la nature du bassin versant.
L'exposant n est toujours inférieur à l'unité. Souvent on a :
1
/2 < n < 2/3
Ceci est surtout valable pour les petits ruisseaux, où la pointe du débit spécifique est
plus grande que dans les rivières.

log q max [m 3/s km 2]


Pointe de débit spécifique

Enveloppe de tous les cours d’eau


dans une région/bassin versant
ruisseau 1

ruisseau 2
Q
ma
x =C
·A
n-1

rivière 1 tan =n
rivière 2

log A
Bassin versant [km2]

Figure 2.25 : Débits de pointe spécifiques en fonction de la surface du bassin ver-


sant

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 49

Figure 2.26 : Débits de pointe spécifiques du bassin versant du Rhône (ASF


Crues, 1974)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


50 Données de base

Formules empiriques
Plusieurs ingénieurs et hydrologues ont établi des formules empiriques pour estimer
les crues dans différentes régions dont les mieux connues en Suisse sont présen-
tées à la Figure 2.27.

Valeurs pour C
Formule Bassin versant
plat moyen raide
HHQ Montagnes 30 42
=C·A1/2 Montagnes moyennes 25 30
(Hofbauer) Pays plats 15-21 21
HHQ
=C·A1/3 9 12
(Kürsteiner)
avec:
Au-dessus de la limite 17 26 34
HHQ des forêts HHQ [m3/s et km2] :
Débit de pointe maximal
=C·A2/3 Près de la limite des 9-13 17-22 26-30 observé
(Melli) forêts
Région plus basse 2-4 7-13 13-22 A [km 2] : Surface du
bassin versant

Figure 2.27 : Exemple de formules empiriques

Monde
Etats Unis
Courbe enveloppe
Tessin et Adda
Rhin, respectivement Rhône

Figure 2.28 : Débits spécifiques maximaux du monde en comparaison avec les


courbes enveloppes des débits spécifiques maximaux en Suisse se-
lon Vischer (1980).

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Données de base 51

Formule rationnelle
Une autre méthode pour l'estimation des crues est la formule rationelle, selon la-
quelle le débit à l'exutoire d'un bassin versant se calcule par :
Q = iP A
avec : iP : intensité des précipitations [m/s]
A : surface totale du bassin versant [m2]
: coefficient de ruissellement [-]
Pour un bassin versant donné, le débit est fortement influencé par la durée des pré-
cipitations. Après une certaine durée de la pluie, le débit n'augmente cependant plus
à l'exutoire. Cette durée correspond au temps que met la goutte tombant sur la ré-
gion du bassin versant la plus éloignée de l'exutoire pour atteindre ce dernier. Ce
temps minimum est appelé "temps de concentration". Cet effet sera démontré à
l'aide de l'hydrogramme à l'exutoire.
Prenons d'une part une pluie d'une durée inférieure au temps de concentration, et
d'autre part une avec une durée plus longue.

Q [m3/s]
tp < tc
1
tp > t c
2

Hydrogramme
à l'exutoire

t
tp1
tc tp 2

Temps de concentration

t p1 < t c Exutoire
tp2 > t c

Surface de contribution
au débit maximum

Figure 2.29: Hydrogrammes à l'exutoire pour des pluies de durée inférieure ou


supérieure au temps de concentration

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52 Données de base

Les hydrogrammes en fonction du temps (instationnaires), sont déterminés par un


modèle de calcul hydraulique en considérant des paramètres tels que la pente des
ruisseaux, la rugosité de leur lit et la longueur du cours d'eau.
Pour estimer la crue maximale possible d'un bassin versant avec la formule ration-
nelle, il faut choisir l'intensité de la pluie de telle manière que le débit à l'exutoire soit
le plus grand. L'intensité de pluie étant plus grande pour les pluies de courte durée
(cf. ci-dessus), l'intensité maximale correspond à une durée de pluie égale au temps
minimum (temps de concentration). Par conséquent, la formule s'écrit comme suit :
HQ = S iPmax A

avec : iPmax : intensité de pluie pour une durée tp = tc [min]

S : coefficient de ruissellement comparé à des pointes de dé-


bit (déterminé empiriquement à l'aide d'événements ex-
HQ
trêmes observés P = )
iP A
L'estimation du temps minimum se fait avec des modèles hydrauliques basés sur la
vitesse de l'écoulement dans le bassin versant.
Relation entre les formules empiriques et la formule rationelle
Comme mentionné ci-dessus, la relation entre l'intensité et la durée de la pluie obéit
approximativement à une loi hyperbolique :
Const
iPmax =
tP
La durée minimum tm est proportionnelle à la distance maximale d'écoulement dans
le bassin versant en direction de l'exutoire. Les considérations géométriques condui-
sent à poser :
1
L A 2

et par conséquent :
1
tm Const A 2
= tP
En introduisant ces deux relations dans la formule rationnelle, on obtient :
HQ = S iPmax A
Const
= S A
tP
Const A 1
= S HQ = S Const A 2
Const A 12
Cette dernière équation a la même forme que les formules empiriques.
Analyse statistique des crues – période de retour en années
Avec la formule rationnelle, le débit de pointe d'une crue d'une certaine période de
retour peut être calculé directement à partir de la pluie de période de retour corres-
pondante. La formule permet par exemple d'écrire :

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Données de base 53

HQ100 = s iP100 A

Avec les formules empiriques, cette méthode n'est pas possible. Il faut disposer de
séries de débits observés afin de pouvoir déterminer les périodes de retour en année
des crues.
Prenons la série d'observations de débits d'une période de n années du Tableau 2.3.

Classement Pointe an- Fréquence empirique (probabi- Période de retour


des pointes nuelle (crue lité de dépassement) empirique
annuelles observée)
P W
Q
1 Q1 1/(n+1) n+1
2 Q2 2/(n+1) (n+1)/2
3 Q3 3/(n+1) (n+1)/3
M M M M
i Qi i/(n+1) (n+1)/i
M M M M
n Qn n/(n+1) (n+1)/n
(Q1 > Qi > Qn)

Tableau 2.3 : Calcul de la période de retour empirique des débits de pointe d'une
série de mesure

Les pointes annuelles sont sélectionnées et classées par ordre décroissant. En sup-
posant que ces pointes sont des variables stochastiques indépendantes, la fré-
quence empirique P peut théoriquement être calculée par la formule suivante :
i 1
P= 1 ou
n n
Ainsi, la plus grande pointe observée a une fréquence de 1/n et la plus petite de 1 ce
qui n’est pas admissible en statistique. Par conséquent, le dénominateur utilisé est
égal à n + 1.
La valeur réciproque de P, donc :
1 1+ n
w= =
P i
est égale à la période de retour empirique en année de la crue.

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54 Données de base

Q [m 3/s]
Extrapolation

Qi
F(x)=?
Débits

Qn n : durée de la période d’observation


1
w = [ans ]
n+1 n +1 n+1 p
n i
Période de retour empirique

Figure 2.30 : Débit en fonction de la période de retour

Bien entendu, la période de retour empirique en années est limitée par le nombre de
crues observées n. Pour déterminer des débits de pointe de période de retour supé-
rieure à n, une extrapolation à l'aide d'une loi statistique de distribution est néces-
saire (cf. Figure 2.30).
Il existe plusieurs lois statistiques de distribution dont quelques-unes sont énumérées
par la suite :
• Fechner (distribution log-normale (débit-période de retour) selon Gauss)
• Pearson (log-Pearson III)
• (distribution bornée)
• log-Gumbel
La fonction la plus simple a été proposée par Fechner. Il a observé que beaucoup de
phénomènes naturels, y compris les crues, ne dépendent pas des variables elles-
mêmes, mais de leur logarithme selon une distribution de Gauss, connue comme
distribution log-normale.
En pratique, les différentes fonctions de distribution sont analysées à l'aide de logi-
ciels. L'analyse peut également se faire très rapidement graphiquement en utilisant
des papiers statistiques disponibles dans le commerce. Il existe des papiers avec
une échelle log-normale, log-log et Gumbel. En utilisant une trame log-normale, la
relation entre la fréquence et le logarithme du débit devient linéaire. L'extrapolation
peut se faire par une régression linéaire (cf. Figure 2.31).
Il faut être conscient, qu'en principe, l'extrapolation n'est plus fiable pour les périodes
de retour supérieures au double de la période d'observation. Les ingénieurs travail-
lant dans le domaine des constructions hydrauliques sont cependant souvent
contraints à faire des extrapolations au delà de cette limite, par exemple pour déter-

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Données de base 55

miner le débit de pointe de la crue millénale. Les valeurs obtenues ne sont par
conséquent que des estimations et donc à utiliser avec précaution.

Débit de pointe

Extrapolation

x
x x
x x
x
x x
x
x x
x
x
x x
0 Période de retour
0 1 10 100 1000

Figure 2.31 : Exemple d'une extrapolation à l'aide d'une distribution statistique

180

160

140
Débit de pointe 3[m 3/s]

120
? ? ?
Débit de pointe [m /s]

100

80

60

40

20

0
0 100 200 300 400 500 600 700 800 900 1000 1100
Période de retour [ans]
Période de retour [ans] Loi de distribution statistique
180

160
[m 3/s]

140

120
Débit de pointe [m /s]
Débit de pointe 3

100

80

? ? ?
60

40

20

0
1.25 2 5 10 20 50 100 200 500 1000
Période de retour [ans]
Période de retour [ans]

Figure 2.32 : Exemple d'une distribution log-Gumbel

Outre les trois méthodes présentées ci-dessus, l'ingénieur dispose aujourd'hui de


modèles numériques assez complexes qui sont composés de modules météorologi-
ques et hydrauliques. Ces modèles simulent d'une part les précipitations sur une ré-
gion déterminée et d'autre part le ruissellement de surface et l'écoulement dans les
cours d'eau dans un bassin versant.

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56 Données de base

2.2 Transport solide


2.2.1 Forces exercées sur une particule soumis à un écoulement
Outre l'eau propre et les substances dissolues dans cette dernière, les cours d'eau
peuvent également transporter :
• des corps flottants
• des matériaux en suspension
• du charriage
• de la glace flottante.

pressions
h Fp
h co FA F
s

G FT V
r

Figure 2.33: Forces agissant sur un corps immergé dans un écoulement.

La Figure 2.33 montre les forces agissant sur un corps immergé dans un écoule-
ment. Outre les forces d'inertie qui sont moins significatives, les efforts principaux sur
un tel corps sont :
• le poids G
• la poussée d'Archimède
• la force hydrodynamique.
La poussée d'Archimède se calcule selon la formule suivante :
FA = g V
avec : : densité de l ’eau
g : gravité
V : volume du corps

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Données de base 57

La force hydrodynamique est composée de la force de traînée et de la portance qui


agit toujours perpendiculairement à l'écoulement. La traînée est la seule force qui
s'oppose au mouvement de l'eau. Elle est donnée par :
v r2
FT = CT A
2 T
La portance est calculée par :
v r2
FP = CP A
2 P
où : CP, CT : coefficient de traînée/portance qui dépend de la forme du
corps et du nombre de Reynolds, le cas échéant
AP, AT : surface projetée du corps, appelée également "maître-
couple"
vr : vitesse relative de l'écoulement par rapport au corps
Si l'inclinaison de la surface de l'eau est très faible, la portance est parallèle à la
poussée d'Archimède.

2.2.2 Corps flottants


En considérant l'équilibre des forces, on constate que pour les corps flottants, la
composante du poids doit être inférieure à la somme de la portance et de la poussée
d'Archimède. Pour les grands corps, la portance est négligeable et l'équation de-
vient :
G cos < FA cos
ou
G< g V
ou
S <
où : s : densité du corps
Les corps flottants dans un cours d'eau se composent de déchets de la civilisation,
tels que le plastique, les bouteilles, le bois de construction, les boîtes, etc., et de ma-
tériaux naturels, c'est-à-dire des feuilles, du bois, de l'herbe, des cadavres.
Une concentration importante des corps flottants est surtout observée pendant les
crues.
Pour avoir un ordre de grandeur concernant les corps flottants, voilà l'exemple de la
centrale hydroélectrique à Klingnau sur l'Aar :
Exemple : Centrale hydroélectrique à Klingnau
3
L'apport annuel des corps flottants varie entre 3000 et 8000 m , la
3
moyenne est de 4300 m (400 à 800 t). Pendant les crues, jusqu'à
3
1000 m de matériaux sont enlevés en un seul jour.

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58 Données de base

2.2.3 Suspension
Pour les matériaux en suspension les forces sont évidemment équilibrées, la force
de la pesanteur est égale à la somme de la portance et de la poussée d'Archimède.
Cependant l'orientation de la portance est fortement variable à cause de la turbu-
lence de l'écoulement.
L'équation donnée ci-dessus est donc uniquement valable en moyennant sur le
temps. En réalité, des particules d'une densité supérieure à celle de l'eau sont trans-
portées grâce à la turbulence de l'écoulement.
Les matériaux en suspension sont d'une part d'origine organique d'autre part d'ori-
gine minérale.
Pour quantifier la matière en suspension, les notions suivantes sont utiles :
• Concentration en matériau en suspension : [mg/l], [g/m3], [kg/m3]
(correspond au poids sec des matériaux en suspension par rapport au vo-
lume d'eau)
• Transport de matière en suspension : [g/s], [kg/s]
(correspond à la masse des matériaux en suspension par unité de temps,
c'est-à-dire à la concentration multipliée par le débit)
• Apport des matériaux en suspension : [kg], [t]
(correspond à la masse des matériaux en suspension transportée pendant
une période donnée, par exemple pendant une année)
Dans les rivières et fleuves alpins, les concentrations atteignent typiquement 1 g/l en
moyenne et 30 g/l à court terme pendant les crues. Dans d'autre régions du monde
le transport est plus important. Le Jiangtsé en Chine par exemple transporte 1.2 g/l
en temps normal et le Fleuve Jaune jusqu'à 37 g/l.
Entre 1900 et 1960, le Rhin a déposé en moyenne 3.1 mio m3/an de matériaux soli-
des dans le lac de Constance dont 3.0 mio m3 étaient des matières en suspension.
Seulement une petite partie de 0.1 mio m3 est donc transportée par charriage.
Il n'existe aucune méthode utilisable en pratique pour estimer la quantité de transport
en suspension. Le problème est trop complexe : D'une part, le potentiel des maté-
riaux en suspension est influencé par le processus de la décomposition et de la dété-
rioration des matériaux. D'autre part, la turbulence influe fortement sur la capacité de
transport du cours d'eau.
En disposant d'une série d'observations, le phénomène peut être approché par une
relation de la forme :
QS = a Qb
où : QS : transport en suspension
Q : débit d'eau
a, b : constantes d'ajustement (fonction linéaire en échelle log-
log)

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Données de base 59

Apport journalier des matériaux en suspension [t/jour]

Débit [m3/s]

Figure 2.34 : Apport journalier des matériaux en suspension par le Rhin à Koblenz

Le transport en suspension peut être mesuré de manière assez simple en prélevant


des échantillons d'eau chargée. Des appareils spéciaux sont utilisés pour prélever
localement des échantillons dans une section déterminée du cours d'eau. A l'aide de
plusieurs mesures réparties sur une même section, un profil de concentration peut
être établi. La concentration moyenne dans la section peut ensuite être déterminée
par intégration.

2.2.4 Charriage

2.2.4.1 Mécanisme du charriage


Le mécanisme du charriage est le suivant : les matériaux d'un lit de rivière, c'est-à-
dire les particules de sable et de gravier, roulent, glissent et sautent sur le fond prati-
quement sans quitter le lit. Ces mouvements des grains ressemblent un peu à celui
des feuilles qui sont transportées sur une route par le vent d'automne. Cependant, le
transport a lieu uniquement si le courant est assez fort, donc pendant une période
limitée.
La relation entre le débit d'eau et le débit solide ou le charriage peut être représentée
sous la forme suivante :

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60 Données de base

Q s [m 3/s]

débit solide/charriage

Q [m3/s]
Q cr

Figure 2.35 : Relation entre le débit d'eau et le débit solide ou le charriage

Le débit Qcr caractérise le début du mouvement des grains ou le début du charriage


(cf. Figure 2.35). Après le début du charriage, les grains sont soumis à la condition
d'équilibre comme dans le cas du transport en suspension. Avant le début du mou-
vement, le poids du grain est supérieur aux forces hydrodynamiques, comme indiqué
par l'équation donnée sur la Figure 2.33.

2.2.4.2 Ordre de grandeur du charriage


Le charriage dans un cours d'eau se compose surtout d'un mélange de sable et de
gravier. La vitesse de transport solide vS est inférieure à la vitesse de l'eau. Pour
quantifier le charriage, les unités suivantes sont utilisées :
• le transport ou le débit solide par unité de largeur : [kg/m s], [m3/m s]
(Geschiebetrieb)
• le débit solide : [kg/s], [m3/s]
(Geschiebeführung)
• l'apport en matériaux solides pendant une période
déterminée (par exemple une année) (Geschiebefracht) : [kg], [m3]
Comme montré ci-dessus à l'aide de l'exemple du Rhin, les volumes des matériaux
solides transportés par charriage sont en général plus petits que les volumes des
matières en suspension pendant une année moyenne. Pour rappel :
Transport en suspension : 3.0 mio m3/an
Transport solide : 3.1 mio m3/an
Transport par charriage : 0.1 mio m3/an

Le charriage dans le Rhin ne représente par conséquent qu'un faible pourcentage de


l'apport annuel moyen. Ceci ne signifie cependant pas que les problèmes liés au
charriage sont également négligeables. Au contraire, le charriage est un phénomène
déterminant pour la morphologie des cours d'eau, car il est à l'origine de l'érosion et
l'alluvionnement du lit. Ce processus a une influence d'énorme importance sur la sé-
curité et le comportement de tous les ouvrages de protection ou les infrastructures
touchant les cours d'eau.

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Données de base 61

2.2.4.3 Caractéristiques et description des matériaux du lit (ou du charriage)


Les matériaux du lit ou les composants du charriage sont caractérisés par :
• la stratification,
• le type de rocher,
• la forme des grains,
• la granulométrie.
Les paramètres nécessaires pour les calculs sont dérivés de la granulométrie, qui
peut être obtenue par criblage d'échantillons. Les résultats sont présentés par des
courbes granulométrique.

Pourcentage
du poids [%]
Fraction des grains passant par

100%
le crible (poids mesuré)

A2

50% A1 = A2 pour dm
100
d
dm = dp
A1 0
100

d [mm]
d50 dm dmax = d100
Diamètre des grains

Figure 2.36 : Exemple d'une courbe granulométrique

Les échantillons pour le criblage sont prélevés avec des collecteurs de charriage
dans l'eau ou simplement par dragage sub-aquatique des bancs de gravier.
Si le lit du cours d'eau est composé de blocs assez grossiers, le criblage n'est plus
possible. Dans ce cas, les diamètres des grains qui se trouvent à la surface d'un
banc de gravier sont mesurés à la main. A l'aide de relations empiriques, la courbe
granulométrique de matériau au-dessous de la surface du lit peut être déterminée.
En pratique, les mesures se font selon deux méthodes : les diamètres des grains de
la couche superficielle sont analysés soit sur une surface, soit sur une ligne prédéfi-
nie.

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62 Données de base

Analyse planimétrique Analyse linéaire

Figure 2.37 : Méthode d'analyse des diamètres des grains de la couche superfi-
cielle d'un banc de gravier

En analysant les matériaux du fond d'un cours d'eau, on constate souvent que la sur-
face du lit est couverte par une couche de pavage. La structure de cette couche res-
semble aux tuiles d'un toit.

Couche de pavage dmDS

Sous-couche dmUS
(granulométrie du charriage)

Figure 2.38 : Couche de pavage constituant le lit d'un cours d'eau

La couche de pavage résulte d'un processus de tri granulométrique. Après une crue,
les matériaux fins sont peu à peu transportés vers l'aval et une couche composée
par des éléments grossiers reste déposée en surface. Le dépôt de cette couche
augmente la résistance du lit contre l'érosion. Le début du transport ou du charriage
est par conséquent retardé.
Par expérience, le diamètre de la couche de pavage correspond au diamètre d90 de
la sous-couche.
dmDS = d90US

2.2.4.4 Théorie du charriage


a) Introduction
La théorie du transport solide, en particulier du charriage, est un des problèmes les
plus complexes connus en hydraulique. Une approche purement théorique n'a pas
été possible jusqu'à présent. Toutes les formules utilisées aujourd'hui sont donc
semi-empiriques et basées sur de nombreux essais en laboratoire. Les auteurs des
formules les plus connues sont par exemple :
• Du Boys (1879) en France
• Shields (1930) en Allemagne et aux Etats Unis

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Données de base 63

• Meyer-Peter/Müller (1948) en Suisse


• Schocklitsch (1950) en Allemagne
• Einstein (1950) aux Etats Unis et en Suisse
• Ackers/White (1972) aux Etats Unis
• Smart & Jäggi (1983) en Suisse
• Hunziker (1995) en Suisse.
Les formules qui donnent les meilleurs résultats dans le cas de cours d'eau avec un
lit en gravier, donc également pour les conditions alpines, sont celles de Meyer-
Peter/Müller et de Smart & Jäggi. La formule des Suisses Meyer-Peter et Müller était
vraiment révolutionnaire en son temps et elle est connue dans le monde entier. Puis-
que l'application de cette formule était limitée à des pentes de lit inférieures à 7%,
Smart et Jäggi ont réalisé une nouvelle série d'essais qui leur a permis d'établir une
relation valable jusqu'à des pentes de 20%. Actuellement, en pratique en Suisse on
utilise presque uniquement la formule de Smart & Jäggi.
Il est à savoir que toutes ces formules ne sont valables que pour l'état d'équilibre
dans un tronçon du cours d'eau considéré, c'est-à-dire si le charriage est égal aux
apports amonts dans le tronçon (la forme du lit ne change pas, pas d'érosion ni d'al-
luvionnement).
b) Formule de Meyer-Peter/Müller
Par la suite, la formule de Meyer-Peter/Müller, qui est très descriptive du point de vue
de la méthodologie, est présentée en détails. La formule de Meyer-Peter/Müller est
valable pour des écoulements avec une pente de frottement entre 0.4 et 2%.
L'écoulement dans un cours d'eau est retardé ou freiné par le frottement du lit. Ce
frottement implique des forces tractrices et, par conséquent, des contraintes de
cisaillement.
En considérant une section de la rivière, comme montré sur la Figure 2.39, les
contraintes de cisaillement sont fonction de la densité de l'eau, du rayon hydraulique,
de la pente de frottement et de la forme du lit.

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64 Données de base

Lignes isotaches.
dL
1m

R As h

· g · AS · dL

bs

Figure 2.39 : Contraintes de cisaillement R définies pour la formule de Meyer-


Peter/Müller

Bien entendu, ces contraintes de cisaillement sont seulement influencées par le débit
qui agit réellement sur le lit. Cette partie du débit est déterminée à partir des lignes
de vitesses égales. Ainsi, on distingue le débit agissant sur les berges du débit agis-
sant sur le lit (cf. Figure 2.39).
R b S dL = g A S dL sin
R = g RS J
avec : R : contrainte de cisaillement
: densité de l’eau
RS : rayon hydraulique du débit agissant sur le lit
A
RS = S
bS
h : hauteur d’eau (valeur locale)
AS : section du débit agissant sur le lit (cf. Figure 2.39)
bS : largeur du lit
J : pente du lit (pente de frottement en cas d’un écoulement
non-uniforme)
K : rugosité du lit selon Strickler
Kr : rugosité des matériaux du lit
Pour une section entière, la contrainte de frottement s'écrit par conséquent comme
suit :
3
2
K
R = g RS J
Kr

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Données de base 65

La contrainte de cisaillement peut également être exprimée par unité de largeur :


3
2
K
R = g h J
Kr
Lorsque la largeur du lit est assez grande (bs / h > 10), la section d'écoulement du
débit agissant sur le fond est à peu près équivalente à la largeur multipliée par la
hauteur d'eau.
Le facteur de correction K / Kr qui était introduit par Meyer-Peter/Müller tient compte
de la forme du lit. Pour des lits plats des canaux artificiels K / Kr devient égal à l'unité.
Dans les cours d'eau naturels et même quand ils sont aménagés, les lits sont rare-
ment plats, K / Kr est égal à 0.75. Pour des lits très irréguliers, par exemple des lits
avec des dunes ou des bancs de sable, le facteur de correction est de 0.5.
La rugosité équivalente de sable d'un lit de gravier peut être calculée par la formule
empirique proposée par Müller :
26
Kr =
6 dm
En considérant l'armature du lit par une couche de pavage, le coefficient de frotte-
ment du lit peut être écrit selon Strickler (en tenant compte des irrégularités) :
21.1
K St =
6 d90
Basé sur de nombreux essais en laboratoire et des observations sur le Rhin, Meyer-
Peter et Müller ont trouvé une formule qui définit la résistance passive des matériaux
du lit par une contrainte de cisaillement critique :
cr = 0.047 ( s ) g dm

avec : cr : contrainte de cisaillement critique


s : densité des grains (2.6-2.7 t/m3)
dm : diamètre moyen (diamètre déterminant) des grains selon
la granulométrie (entre d50 et d75 )
Cette contrainte dépend surtout du diamètre moyen des matériaux selon la granulo-
métrie des grains et de leur densité. Le facteur de proportionnalité proposé par
Meyer-Peter/Müller est de 0.047. Ce facteur n'est valable que pour le charriage bien
développé, c'est-à-dire lorsque toutes les particules du lit sont en mouvement. Il
correspond en principe au facteur de Shields qui exprime une contrainte de cisaille-
ment critique adimensionnel :
cr
= 0.047 =
cr
( S )g dm
Si cr est inférieure à 0.03, il n'y a aucun mouvement.
Connaissant les forces tractrices et la résistance passive des matériaux du lit, le dé-
bit solide par charriage peut être calculé à l'aide de la formule empirique suivante
(valable pour une pente de frottement entre 0.4 et 2%) :

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


66 Données de base

8 3/2
qs =
12
( cr ) [kg/m s]
(1 ) g
R
s

8 3/ 2
qs = 12
( R cr ) [m3/m s]
( s )
avec : qs : débit solide par mètre de largeur
Il est évident que le transport aura lieu uniquement si les forces tractrices sont supé-
rieures aux contraintes de cisaillement critiques.
La formule donne le débit solide par unité de largeur du cours d'eau. Le débit solide
total est obtenu par intégration.
bs

Q s = qS db
0

avec : Qs : débit solide


En pratique, le calcul se fait par tranche, si la hauteur d'eau varie fortement dans une
section (cf. Figure 2.40).

1 i n

qSi
n
Q= qSi
i =1

Figure 2.40 : Calcul du débit solide par intégration dans une section irrégulière

c) Formule de Smart & Jäggi


Comme mentionné ci-dessus, la formule de Smart & Jäggi se base également sur les
essais de Meyer-Peter et Müller. Mais pour généraliser la formule jusqu'à des pentes
de 20%, Smart et Jäggi ont fait de nombreux nouveaux essais en laboratoire avec
des pentes plus importantes, selon une systématique bien définie. Ainsi, ils ont pro-
posé la formule suivante qui est basée sur une corrélation de tous les résultats d'es-
sais (y inclus ceux de Meyer-Peter/Müller) :
qs 4.2 1.6 (s 1 ) d m
= J 1 cr

q s 1 h J
avec : qs : débit solide unitaire par mètre de largeur
q : débit liquide unitaire
J : pente de frottement
dm : diamètre moyen des grains de gravier (diamètre détermi-
nant)

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Données de base 67

cr : contrainte de cisaillement critique adimensionnelle (défini-


tion selon Shields)
h : hauteur d'eau.
s : densité spécifique
s= s

s : densité du matériau solide (grains)


La formule de Smart & Jäggi est valable pour des pentes de frottement entre 0.4 0/00
et 20%. Pour cr = 0.05 et s = 2.65 elle devient :
d
q s = 2.5 q J
0. 6
J m [m3/sm]
12.1 h

Comme déjà mentionné, cr est un facteur qui est souvent utilisé dans les formules
de transport solide. Il est égal à une contrainte de cisaillement critique adimension-
nelle et a été introduit par Shields. Dans la formule de Meyer-Peter, ce facteur cor-
respond au multiplicateur 0.047.

2.2.4.5 Début du charriage


Il y a différents critères pour déterminer le début du mouvement des particules du lit
d'un cours d'eau donc du charriage. Selon la formule de Smart & Jäggi, le transport
solide commence lorsque l'expression entre parenthèses de la formule ci-
(s 1) dm
dessus 1 cr est positive, donc :
h J

cr
( s 1) dm
h
J
où : cr : peut être déterminée à l'aide du diagramme de Shields (cf.
Figure 2.41)
Comme mentionné ci-dessus, le lit d'un cours d'eau naturel est couvert par une cou-
che de pavage (cf. Figure 2.38), qui est composée par des éléments grossiers. Il faut
donc distinguer deux cas, d'une part une couche de pavage détruite, d'autre part une
couche de pavage intacte. Après l'érosion de la couche de pavage, le charriage ré-
gulier commence. La hauteur d'eau pour ce début de transport solide se calcule par
la formule déjà présentée :
cr (s - 1) d
mUS
hcr =
J
avec : J : pente de frottement.
cr : contrainte de cisaillement critique adimensionnelle
dmUS : diamètre moyen des grains de la sous-couche
s : densité spécifique
s= s

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


68 Données de base

Contrainte de
cisaillement
adimensionnelle
(par définition)

=
g (s 1) d

h<<b = cr

h J
=
(s 1) d
h : hauteur d’eau
J : pente de frottement
d : diamètre des grains 1/ 3
g
s :
S
= 2 . 6 ÷ 2 .7 Diamètre adimensionel d * = d 50 s

"2

Figure 2.41 : Début du charriage (diagramme de Shields), (Graf, 1993)

cr est une contrainte de cisaillement adimensionnelle selon Shields. Pour des va-
leurs de cr inférieures à 0.03, il n'y a aucun mouvement. Pour des valeurs entre 0.03
et 0.047, quelques particules sont déplacées, mais pas tout le lit. Si cr dépasse
0.047, le charriage est bien développé et régulier.
Avant que la sous-couche du lit contribue au charriage, il faut que le pavage soit dé-
truit. Ce processus peut être calculé à l'aide de la formule suivante :
cr (s 1) d90US
hcr =
J
Cette équation est égale à celle de la sous-couche, sauf que l'on utilise le diamètre
moyen des particules du pavage. Ce diamètre est à peu près égal à d90 de la sous-
couche.
Une formule plus sophistiquée a été développée par Günter :
0.67
cr (s 1) dmDS dmDS
hcr =
J dmUS

Cette formule peut être appliquée lorsque la granulométrie du pavage est connue.
Les formules ci-dessus, qui donnent les critères pour le début du mouvement, ré-
pondent aux questions suivantes, si tous les paramètres sont analysés :
1. hcr ou qcr (Qcr), J et dm donnés :
Quelle est la hauteur d'eau pour le débit critique d'entraînement ?
Comme mentionné ci-dessus, il y a deux débits critiques. D'une part le débit
pour lequel le pavage est détruit et d'autre part le débit qui commence à
éroder la sous-couche.
La Figure 2.42 montre qualitativement la fonction entre le débit liquide et le
débit solide.
2. dmcr , Q et J connus:
Pour un débit et une pente de lit donnés, quel est le diamètre moyen né-

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 69

cessaire pour éviter le charriage ?


Vu de cette manière, les formules permettent le dimensionnement d'un pa-
vage ou d'une armature du lit pour des canaux artificiels ou sur des tron-
çons aménagés.
Pour garantir la stabilité du pavage, une valeur de 0.03 doit être choisie
pour #cr.
3. Jcr, Q et dm donnés :
Pour un débit et une granulométrie donnés, quelle est la pente du lit pour
laquelle le lit n'est pas érodé ?
En analysant un cours d'eau selon ce critère, il peut être déterminé s'il se
trouve en état d'équilibre, d'érosion ou d'alluvionnement.

Qs (charriage) Fonction de charriage


sans pavage du lit
Fonction de charriage
avec pavage du lit

Q (eau)
Qcr US
Qcr DS

Figure 2.42 : Relation entre le débit liquide et le débit solide

2.2.4.6 Equilibre du transport solide d'une rivière


Il est important de savoir qu'une rivière sans apport latéral de charriage transporte la
quantité de matériau correspondant à sa capacité de transport selon la fonction de
charriage. Cette capacité de transport de l'écoulement est déterminante pour la mor-
phologie, c'est-à-dire le changement du lit du cours d'eau.
La Figure 2.43 montre un tronçon de rivière sans apport solide latéral possédant un
point fixe du lit à l'aval.
Le point fixe correspond à un déversoir, un seuil, un banc rocheux ou à l'embouchure
dans un lac.
En considérant un débit solide égal à la capacité de transport de la rivière à l'aval du
tronçon, trois cas peuvent être distingués :
• Si le charriage sortant est égal à l'apport à l'amont, le lit est en équilibre.
• Si l'apport en solide est inférieur à la capacité de transport, la rivière assou-
vit sa faim par l'érosion du lit. En conséquent la pente du lit se réduit.
• Si le débit solide est plus grand que la capacité de transport, il y a alluvion-
nement et la pente du lit devient plus raide.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


70 Données de base

La pente du lit tourne autour du point fixe. La variation de l'altitude du lit à l'amont
peut atteindre des valeurs considérables pour des tronçons d'une certaine longueur.

Qso

Qsu
Q so = Q su l’équilibre de transport
Tronçon

Qso

Qsu l’érosion du lit,


Q so < Q su
la pente du lit se réduit

Qso

l ’alluvionnement du lit
Q so > Q su
Qsu la pente du lit s’agrandit

Qsu : le charriage sortant


(capacité de transport) Point fixe (déversoir, seuil, lit rocheux,
Qso : l ’apport de charriage embouchure dans un lac)

Figure 2.43 : Etats possibles d'un tronçon de rivière sans apport solide latéral pos-
sédant un point fixe du lit à l'aval

2.2.4.7 Stabilisation des berges, dimensionnement des enrochements


Les berges d'une rivière sont aujourd'hui souvent protégées par des enrochements
contre l'érosion par l'écoulement (cf. Figure 2.44).
En principe, le dimensionnement de ces enrochements se base également sur la
théorie du transport solide.
En premier lieu, les forces tractrices ou les contraintes de cisaillement maximales
agissant sur les berges sont calculées :
R max = 0.77 g hmax J

avec : hmax : hauteur d’eau maximale sur les berges


J : pente de frottement

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 71

hmax Blocs comme refuge à


poissons
1

Filtre ou
géotextile
Blocs de pierre enterrés selon la
profondeur d'affouillement attendue

Figure 2.44 : Protection contre l'érosion des berges par des blocs d'enrochement

Le facteur 0.77 tient compte du fait, que les forces agissant sur les berges sont infé-
rieures à celles agissant sur le lit (cf. Figure 2.45). La contrainte de cisaillement est
souvent exprimée sous forme adimensionnelle :
R max 0.77 hmax J
= =
g (s 1) dB (s-1) dB
avec : s : densité spécifique
s= s

dB : diamètre des blocs

0.77 · Rmax

Rmax

Figure 2.45 : Répartition des contraintes de cisaillement dans un profil trapézoïdal

Stevens et al. (1976) ont proposé une méthode de dimensionnement pour les enro-
chements. Par expérience, cette méthode donne des résultats satisfaisants pour les
rivières suisses. Elle montre également une bonne corrélation avec les essais en
laboratoire sur modèle réduit.
Selon Stevens et al. (1976), il faut d'abord calculer les deux facteurs adimensionnels
$ et % :

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


72 Données de base

16.17 hmax J
$= =
cr (s 1) dB
et
Sm
&=$
cos

tan '
Sm =
tan
avec : $ ,& : facteurs de dimensionnement selon Stevens et al. (1976)
hmax : hauteur d'eau maximale sur les berges
J : pente de frottement.
s : densité spécifique
s= s

q : contrainte de cisaillement adimensionnelle


cr : contrainte de cisaillement adimensionnelle critique
: angle du talus avec l’horizontale (tan = 1/m)
' : angle d’un talus d’enrochement stable sans écoulement
Sm : Facteur de sécurité sans écoulement
En général, une valeur de 0.047 est adoptée pour la contrainte de cisaillement criti-
que adimensionnelle. Pour les torrents de montagne dont les lits sont armés de gros
blocs, la valeur de 0.1 est proposée, ce qui se traduit par le remplacement du facteur
16.17 par 7.7 dans la formule pour $.
L'inclinaison d'un talus d'enrochement stable sans écoulement dépend de la forme et
de la taille des blocs. Des valeurs approximatives raisonnables selon l'auteur se-
raient 40 à 45° pour des blocs inférieurs à 1 t et entre 45 et 60° pour des blocs de
poids plus important.
Dans une troisième étape, la sécurité de l'enrochement est déterminée à l'aide de la
formule suivante (Stevens et al. (1976)) :

S=
Sm
2
(& 2
+4 & )
avec : S : facteur de sécurité
Le facteur de sécurité doit être supérieur à 1. Suivant les conditions de débit, des
valeurs entre 1.1 et 1.3 sont en général prescrites pour le facteur de sécurité.

2.2.4.8 Aspects constructifs et écologiques des enrochements


a) Choix du tracé et pentes des talus
Même dans un tronçon rectiligne, l'enrochement d'un cours d'eau ne devrait pas être
aligné géométriquement, mais disposé de manière légèrement ondulée (Figure

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 73

2.46). La ligne du pied de l'enrochement devraient se situer dans une bande corres-
pondant à 1 à 2 fois la hauteur de l'enrochement. En même temps, une variation ir-
régulière des talus entre les parties raides (max. 4:5) et à faible pente (jusqu'à 1:2)
est souhaitable. Le choix d'un tracé et de pentes de talus variés présente les avanta-
ges suivants:
l'impression d'une mesure de protection de rive très géométrique et monotone est
diminuée en faveur d'une rive plus naturelle;
la rugosité de la rive est augmentée grâce à sa forme non uniforme qui, en même
temps, contribue à réduire le danger d'affouillement du pied;
les baies ainsi créées peuvent servir de refuge aux poissons pendant les crues.

Pied du talus
de l'enrochement Lit
1 à 2 fois
la hauteur

Remblai

Figure 2.46: Ligne ondulée du pied du talus d'un enrochement dans un tronçon
rectiligne d'une rivière (pente moyenne du talus 2:3).

Les blocs doivent être placés de façon à obtenir une rugosité de surface maximale.
Toutefois, ils ne doivent pas être posés avec leur diamètre maximal perpendiculaire
au talus (Figure 2.47).
surface blocs posés blocs posés
trop lisse défavorablement favorablement

Figure 2.47: Rugosité de surface des enrochements selon la manière de les met-
tre en place.

b) Possibilités d'augmentation de la résistance


Pour des contraintes de maniabilité le poids maximal des blocs extraits de carrières
et pouvant être posés dans des cours d'eau est de 6 à 7 tonnes. En présence de for-

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


74 Données de base

tes pentes (> 4%) et de profondeurs d'eau importantes (> 5 m), les coefficients de
sécurité, atteignent difficilement 1.0, selon l'équation de Stevens qui donne le facteur
de sécurité. Pour garantir une meilleure sécurité, l'enrochement peut être réalisé en
deux couches (Figure 2.48 et Figure 2.49). Le gain de sécurité ainsi obtenu est diffi-
cile à quantifier. Néanmoins, un gain de 30 à 50% a été observé dans des essais sur
modèle physique.
Dans la partie supérieure du talus, où l'eau est moins profonde, un enrochement
composé d'une seule couche est suffisant. Cette partie du talus se prête bien à être
recouverte avec du terrain meuble sur lequel une végétation adéquate sera ensuite
plantée (Figure 2.48 et Figure 2.49).
Si, pour des raisons de construction, il est impossible d'atteindre un coefficient de
sécurité de 1.0 au pied de l'enrochement, un couplage des blocs par câbles en acier
peut être envisagé (Figure 2.48 et Figure 2.49). Toutefois, il faut rester attentifs à ce
que la liaison par câbles entre les blocs ne soit pas trop rigide et tendue. Il est re-
commandé de coupler les blocs en groupes de 4 à 8 avec des liaisons fixes aux
premier et dernier blocs et une fixation glissante, avec des anneaux, entre les blocs
du milieu (Figure 2.49). Par exemple pour des enrochements à deux couches, un
guidage du câble en spirale dans la direction longitudinale entre la couche inférieure
et supérieure, s'est avéré être une bonne solution. La couche supérieure doit être
posée de telle manière à ce que les fixations soient orientées vers les joints et que
les câbles en acier ne soient pas visibles.
La pose des blocs dans un lit de béton maigre et le remplissage des joints entre les
blocs également avec du béton sont en principe déconseillés. Ce genre de mesures
de protection empêche d'une part la végétation de se développer et d'autre part les
blocs liés avec du béton créent un élément en forme de dalle qui, une fois exposé à
la pression dynamique de l'eau, peut être facilement emporté par l'écoulement. Un
enrochement noyé dans le béton est rigide et par conséquent plus sensible aux af-
fouillements.Dans ce cas, des blocs ne peuvent plus glisser dans la fosse d'érosion
et retarder ainsi ce processus.

HHQ

HQ10 - HQ50
po
du ids
blo réd
c uit

géotextil

blocs du pied couplés


avec des câbles en acier tapis des blocs / protection
contre l'affouillement

Figure 2.48: Enrochement posé en deux couches (pente de talus 4:5 en bas, 2:3
en haut dans la partie avec une couche). Les blocs du pied sont liés
entre eux par des câbles en acier.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 75

Les points d'un enrochement les plus exposés à l'érosion sont ses extrémités amont
et aval. Le plus souvent, la détérioration d'un enrochement est tout d'abord observée
à son extrémité amont et se poursuit vers l'aval. Pour lutter contre ce phénomène, un
enfouissement suffisamment profond de l'enrochement dans les rives à ses deux
extrémités est indispensable. Il peut être réalisé avec une tranchée remplie de blocs
sur toute la hauteur de l'enrochement.

Figure 2.49: Enrochement à deux couches en construction (pose sur le géotextil).


Les blocs de pied sont liés avec des anneaux pour faciliter le cou-
plage avec des câbles en acier (poids des blocs: 4.0 – 4.5 t). (Exem-
ple : Reuss à Göschenen, UR)

c) Protection des enrochements contre l'érosion interne et le lavage de la


fondation
L'utilisation de gros blocs engendre des joints relativement larges. A travers ces
joints, non étanches, les matériaux meubles de la fondation peuvent être exposés à
l'érosion, subir des transformations et être emportés par l'écoulement. La stabilité
globale de l'enrochement peut alors être mise en danger. Le lavage et l'érosion in-
terne peuvent être évités si l'enrochement est posé sur une couche filtre. Pour des
raisons pratiques, des géotextiles sont habituellement utilisés dans ce but (Figure
2.49). Une fois l'enrochement couvert par la végétation, les racines assurent égale-
ment cette fonction de protection contre l'érosion interne.
d) Aspects écologiques et paysagers
Le choix d'un tracé et de pentes de talus variables représente un premier pas vers
une intégration satisfaisante de l'enrochement dans le paysage. La végétation des
rives constitue un autre élément important. La croissance de la végétation riveraine
peut être favorisée en recouvrant l'enrochement avec du terrain meuble et de la terre
végétale jusqu'au niveau d'une crue décennale ou cinquantennale (Figure 2.46,
Figure 2.48 et Figure 2.50). Les matériaux d'excavation ou de la terre végétale peu-
vent servir de remblai. Les matériaux d'excavation favorisent plutôt la végétation ty-

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


76 Données de base

pique des lieux secs, tandis que la végétation grasse se développera sur les maté-
riaux organiques.

Figure 2.50: Enrochement partiellement recouvert par de la terre végétale. Photo


prise durant le 2ème été après la fin des travaux (type d'enrochement
selon Figure 2.48)

L'épaisseur de ce remblai devrait atteindre une fois le diamètre des blocs au mini-
mum. Les joints de l'enrochement situé sous le remblai à réaliser doivent être remplis
hydrauliquement, en ajoutant beaucoup d'eau aux matériaux meubles. La réalisation
de la couverture des enrochements est facilitée si la pente de cette partie supérieure
est faible et si l'enrochement est réduit à une seule couche (Figure 2.48).
Les plantations en continu le long des rives et en rangées régulières, par exemple
des saules, ne sont pas très naturelles. L'utilisation des plantes locales et la prévision
d'espaces libres pour leur prolifération naturelle est beaucoup plus adaptée.
Si les talus des rives sont longs, des risbermes le long du cours d'eau devraient être
prévus. Ces risbermes, selon leur largeur, peuvent servir de chemins pédestres (1 à
2 m) ou chemins d'entretien (env. 3 m) (Figure 2.51).
Avec des groupes de blocs placés au pied de l'enrochement, des refuges sup-
plémentaires pour les poissons peuvent être créés (Figure 2.51). Ces refuges sont
disposés à distance irrégulière le long de la rive, mais pas à l'extérieur d'une courbe.
Les plus gros blocs des enrochements peuvent être sélectionnés pour la réalisation
de ces refuges. Ils sont posés sur le tapis des blocs qui protègent le pied de l'enro-
chement contre l'affouillement. Pour que ces groupes de blocs résistent aux crues, ils
doivent être, si possible, combinés à des blocs résiduels près des rives.
Le tracé ondulé mentionné dans la partie a) de ce chapitre crée également des zo-
nes d'eau morte qui servent de refuge aux poissons.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 77

HHQ

risberme
chemin de rive
po
i
du ds ré HQ10 - HQ50
blo dui
c t groupe de blocs

géotextil

tapis des blocs /


protection contre
l'affouillement
.
Figure 2.51: Enrochement avec risberme comme chemin de rive. Groupe de
blocs comme refuge de poissons au pied de l'enrochement

2.2.4.9 Diminution du charriage en raison du frottement


Les particules solides deviennent plus petites lors du charriage, ce qui est dû aux
effets suivants :
• efforts mécaniques rupture des grains
• abrasion
Pour caractériser ce processus, Sternberg (1975) a développé une relation de forme
exponentielle assez simple :
dP = c · P · dx
d'où :
Pu = Po e-c x
d'où :
-c x
du = d o e 3

et finalement :
Gu = Go e-c x
avec : P : poids des grains
C : coefficient d'abrasion de Sternberg
d : diamètre des grains
x : distance du transport
G : poids du charriage

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


78 Données de base

u : index désignant la section aval


o : index désignant la section amont
La constante C est appelée coefficient d'abrasion de Sternberg. Pour le Rhin à Sar-
gans, par exemple, on a calculé un C de 0.046 /km.
La différence de poids du charriage (Go-Gu) entre deux sections se transforme en
matière en suspension.

2.3 Géologie et géotechnique


2.3.1 Importance pour les constructions hydrauliques
L'ingénieur qui conçoit des constructions hydrauliques doit bien connaître et considé-
rer les problèmes géologiques et géotechniques. Par rapport aux autres construc-
tions, par exemple les bâtiments, les connaissances de la géologie et géotechnique
doivent être plus approfondies parce que l'interaction avec le terrain n'est pas limitée
aux effets des forces appliquées, elle subit également l'action dynamique de l'eau.
L'importance de la géologie et de la géotechnique pour les constructions hydrauli-
ques est illustrée par quatre exemples qui sont représentés sur la Figure 2.52 et la
Figure 2.53.

pilier d’un pont


1 2
Blocs

Nappe

Protection
Elargissement
des rives Par ex. palplanches
Approfondissement du lit fouille

Problèmes : Problèmes :
1) Exécution des travaux en présence de l’eau. 1) Interaction de la fouille avec l’écoulement et la
(par exemple, élargissement ou appro- nappe (érosion, inondation, boulance,
fondissement du lit, protection des rives). soulèvement du fond).
2) Erosion des rives et du lit. 2) Evolution du lit.
3) Déposition des matériaux, alluvionnement. 3) Condition de fondation (tassements).
4) Interaction avec la nappe (alimentation ou 4) Influence de l’ouvrage sur l’écoulement (érosion
drainage) locale, affouillement pendant les crues).

Figure 2.52 : Quatre exemples de l'importance de la géologie et de la géotechni-


que en constructions hydrauliques.
Cours d'eau Pile de pont

Le premier exemple est celui d'un cours d'eau naturel ou d'un canal artificiel. Les
problèmes suivants peuvent surgir :
• la présence de l'eau perturbe les travaux, tels que l'élargissement ou l'ap-
profondissement du lit ou la mise en place de protections de rive.
• l'érosion des rives et du lit par les forces tractrices de l'eau.
• le dépôt des matériaux, l'alluvionnement du lit

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 79

• l'interaction avec la nappe phréatique, l'alimentation ou le drainage par le


canal.
En cas de la réalisation d'un ouvrage implanté totalement ou partiellement dans le
cours d'eau (par exemple une pile de pont), il faut considérer les problèmes sui-
vants :
• L'interaction de la fouille avec l'écoulement :
La fouille peut être inondée ou érodée, il y a également un risque de bou-
lance ou de soulèvement du fond.
• L'évolution du lit joue un rôle important pour la pérennité de l'ouvrage.
• Le tassement de la fondation intervient également dans l'interaction ou-
vrage-cours d'eau-sol.
• Finalement l'ouvrage influence lui-même l'écoulement et il peut provoquer
de l'érosion locale sur les rives ou sur le fond.

3 4

Pi

Problèmes : Problèmes :
1) Exécution des travaux en présence de l’eau 1) Exécution en présence de l’eau souterraine.
(cours d’eau, nappe). 2) Contraintes naturelles dans le rocher.
2) Etanchéité des appuis et fondations. 3) Etanchéité, stabilité et pérennité de l’ouvrage.
3) Stabilité mécanique des appuis et fondations. 4) Interaction avec la nappe souterraine .
4) Stabilité et pérennité de l’ouvrage (sous- 5) Mise en pression et vidange.
pressions!) 6) Interaction des effets mécaniques et
5) Remplissage du réservoir (instabilité des hydrauliques.
pentes).
6) Interaction des effets mécaniques et
hydrauliques.

Figure 2.53 : Quatre exemples de l'importance de la géologie et de la géotechni-


que en construction hydrauliques.
Barrage Galerie en charge

Lors de la construction de barrages, il faut s'attendre aux problèmes suivants :


• La présence de l'eau a une influence importante pendant la construction,
qu'il s'agisse du cours d'eau ou de la nappe phréatique.
• L'étanchéité des appuis et des fondations est un point important lors de la
conception.
• La stabilité mécanique des appuis et des fondations doit être garantie.
• Les sous-pressions influent sur la stabilité et la pérennité de l'ouvrage.
• Le remplissage du réservoir peut conduire à des instabilités des versants.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


80 Données de base

• Il y a une forte interaction entre les effets mécaniques et hydrauliques.


Dans le cas d'une galerie en charge, l'interaction de l'eau à l'intérieur de la galerie
avec le revêtement et le rocher est très importante pour le dimensionnement. En ou-
tre, il y a également une interaction avec l'eau souterraine circulant dans les fissures
de la roche. Ceci conduit aux problèmes suivants :
• L'exécution n'est pas aisée en présence d’eau souterraine.
• Les contraintes naturelles dans le rocher jouent un rôle important pour la
stabilité de l'ouvrage.
• L'étanchéité influe sur la stabilité et la pérennité de l’ouvrage.
• Les infiltrations ou pertes d'eau suivent le niveau de la nappe phréatique.
• La mise en pression et la vidange sont des cas de charge extrêmes pour le
dimensionnement de l'ouvrage.
• Il y a une forte interaction entre les effets mécaniques et hydrauliques.

Galerie en charge
Pression intérieure

Mécanique des Hydraulique des


roches 1 roches
2
Changement de
la perméabilité

Déformation du Percolation à travers


revêtement et de Pressions interstitielles de le revêtement dans
la roche l'écoulement en milieux le rocher
poreux ou fissurés

4 3

Figure 2.54: Interaction des effets mécaniques et hydrauliques dans les milieux
poreux ou fissurés

Les interactions entre les effets mécaniques et hydrauliques peuvent être illustrées à
l'aide d'un exemple concernant les galeries en charge (cf. Figure 2.54). Dans le cas
d'un revêtement perméable, tel que le béton en général, l'ingénieur ne doit pas uni-
quement considérer la mécanique des roches, mais également leurs propriétés hy-
drauliques. Sous l'action de la pression intérieure, le revêtement et le rocher se dé-
forment. Dans les matériaux fissurés ou poreux les déformations se manifestent sur-
tout par un changement de la perméabilité. Le régime de percolation d'eau dans les
fissures – dues à la pression intérieure – et par conséquent les forces de frottement
de la percolation changent. Puisque les déformations du rocher sont également in-
fluencées par ces dernières, on parle d'une interaction mécanique-hydraulique. Il est
clair, que pour une certaine pression intérieure, un équilibre s'établit entre les diffé-
rents effets.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 81

2.3.2 Moyens de reconnaissance


Les moyens et les résultats des reconnaissances géologiques sont résumés à la
Figure 2.55.

Moyens Résultats
• Photos satellites • Morphologie
Photos aériennes Tectonique

• Reconnaissance de la surface • Géologie de surface

• Méthodes géophysiques • Coupes géophysiques


(résistivité, vitesse des ondes)
• Forages, puits, tranchées galeries • Lithologie, stratigraphie, tectonique

Figure 2.55 : Moyens de reconnaissance en géologie et leurs résultats

Les essais géotechniques les plus importants en constructions hydrauliques sont


résumés à la Figure 2.56.

In situ En laboratoire
• Perméabilité • Granulométrie
Essai Lefranc, essai de pompage, • Atterberg
essai Lugeon
• Déformations • Oedomètres
Essai pressiométrique, essai de • Proctor
pénétration, scissométrique
• Sondages de reconnaissance • Triaxial
Carottages
Figure 2.56 : Essais géotechniques les plus utilisés dans le domaine des construc-
tions hydrauliques

Il est clair que les sondages in situ coûtent assez cher. Mais il ne faut jamais oublier
que
les sondages les plus chers sont ceux qui n'ont pas été exécutés.
Le but des essais géotechniques est d'obtenir les informations nécessaires pour le
dimensionnement des fondations ou pour la sélection des matériaux de construction.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


Données de base 83

3 SEUIL ET BARRAGE EN RIVIERE

3.1 Introduction et description


Les objectifs de la construction d'un seuil ou d'un barrage en rivière peuvent être les
suivants :
• Ouvrage de réglage et de contrôle pour une prise d'eau ou une centrale hy-
droélectrique
• Dispositif de mesure du débit
• Point fixe dans un cours d'eau pour limiter l'érosion du lit par le charriage
Combiné avec une prise d'eau, le seuil ou le barrage est en principe un obstacle
dans le cours d'eau qui dirige le débit à soutirer vers la centrale hydroélectrique. A
l'aide d'un seuil ou d'un barrage, le niveau d'eau peut être surélevé et contrôlé et la
vitesse de l'écoulement diminuée. Ces effets facilitent le captage de l'eau.
Dans l'état naturel, le niveau d'eau est soumis à une grande fluctuation en fonction
du débit instantané (cf. Figure 3.1).

max. Prise d’eau projetée max. Seuil, barrage


Q Q
min.
min. Q- Q P
h
h1

Prise d’eau QP

Etat naturel But

Q(h) Q(h)

QD Débit déversé

Débit de
QP QP prise d ’eau
Q(h1 )
QR Débit réstitué
t t
Captage possible max. 25%

Figure 3.1 : Effet régulateur d'une prise d'eau sur le niveau d'eau

Avec un seuil, le niveau d'eau minimum et, par conséquent, la chute peuvent être
augmentés. Ainsi, le débit passant par la prise est plus important. L'expérience a
montré qu'une prise d'eau sans seuil permet de prélever au maximum 25% de l'ap-
port total. Une prise d'eau avec seuil permet théoriquement de dériver la totalité de
l'apport, mais cette possibilité n'est pratiquement jamais mise à profit.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


84 Données de base

• En général, il faut garantir un débit minimum dans le cours d'eau pour des
raisons écologiques :
Q - QP QR
• Pour des raisons économiques, il n'est pas rentable de soutirer pendant les
crues rares de faible volume ( courbe des débits classés).

débit

QD

QP

QR
jours
0 365

Figure 3.2: Courbe des débits classés

Les débits suivants sont donc distingués :


• QP = débit de la prise d'eau (Fassungsmenge)
• QR = débit restitué (Restwassermenge)
• QD = débit déversé (Überfallwassermenge)
Les exigences pour le débit capté QP sont les suivantes :
1. captage à niveau d'eau quasi-constant
2. pas de matériaux de charriage
3. pas de corps flottants
4. éventuellement profiter d'une rétention ou d'un réservoir d'eau pour régler le
débit
Du point de vue fonctionnement, les seuils ou barrages fixes peuvent être distingués
des barrages mobiles.
Les seuils ou barrages fixes ne disposent pas d'organes de réglage. Ils sont par
conséquent moins chers et ils assurent une plus grande sécurité pour l'exploitation.
Ils ont par contre le désavantage que le niveau d'eau varie selon le débit.
D'autre part, les barrages mobiles sont équipés avec des organes de réglage ou de
contrôle. Ces organes sont appelés vannes et permettent de garder le niveau d'eau
constant ou au moins limiter ses variations. Selon le type de la vanne, il y a égale-

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 85

ment la possibilité d'évacuer le sédiment accumulé dans la retenue à l'amont du


seuil.
Certains ouvrages de prise sont également munis d'une combinaison entre le bar-
rage fixe et le barrage mobile. Les éléments essentiels d'un seuil ou d'un barrage en
rivière (Wehr) sont présentés sur la Figure 3.3 :
• le déversoir et la crête (Überfall, Wehrschwelle)
• le coursier (Wehrrücken)
• le bassin amortisseur pour la dissipation d'énergie (Tosbecken)
• la marche positive pour stabiliser le ressaut hydraulique
• l'écran d'étanchéité pour diminuer les sous-pressions agissant sur le seuil
et pour réduire la percolation souterraine
• les piliers pour porter un pont d'accès ou des vannes
• les parafouilles à l'amont pour augmenter la sécurité de glissement du seuil
et à l'aval pour éviter l'érosion du fond du bassin amortisseur
• la protection contre l'érosion locale (enrochement)
• la vanne (par exemple une vanne segment)

Seuil / barrages fixes


Déversoir
Niveau
Coursier Bassin amortisseur
variable
Protection contre
érosion locale

Alluvionnement
Joint Marche positive

Ecran d'étanchéité

Seuil / barrages mobiles


Niveau variable Vanne segment
Pilier

Parafouilles

Figure 3.3 : Seuil et barrages mobiles

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86 Données de base

3.2 Déversoirs non contrôlés


Avec un déversoir non contrôlé, il y a une surélévation du plan d'eau pour
Q = QD > QP + QR.

3.2.1 Types et utilisation


En coupe, trois types de déversoirs peuvent être distingués :

• à mince paroi

• à seuil épais

• à crête arrondie

En situation, le déversoir peut être rectiligne ou non (cf. Figure 3.4 et Figure 3.5).

.
........ érosion

Crête perpendiculaire Crête oblique par Déversoir latéral


à l’axe rapport à l ’axe

Figure 3.4 : Déversoirs rectilignes, vue en plan

Circulaire Marguerite
Ronde Labyrinthe polygonal
Evacuateurs en puits

Figure 3.5 : Déversoirs non rectilignes, vue en plan

Deux conditions d'écoulement par dessus un déversoir peuvent s'installer (cf. Figure
3.6).

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Données de base 87

Ecoulement noyé

Ecoulement dénoyé

Figure 3.6 : Conditions d'écoulement sur un déversoir

Le déversoir est dit noyé, si le plan d'eau à l'aval a une influence sur la capacité du
déversoir.
Le déversoir le plus utilisé pour les seuils en rivière est rectiligne et perpendiculaire à
l'axe du cours d'eau. Il sert à régler et contrôler le niveau d'eau à l'amont comme
mentionné ci-dessus. Puisque la relation entre le débit et la hauteur d'eau est unique
et univoque, le déversoir peut également servir de dispositif de mesure (cf. Figure
3.7).

H
Q = f(H)

Figure 3.7 : Déversoir à mince paroi et sa relation hauteur-débit

Les déversoirs sont également souvent utilisés comme évacuateurs de crues pour
les retenues naturelles et artificielles (cf. Figure 3.8)

Vanne
Réservoir Lac clapet
artificiel naturel
Barrage
voûte

Figure 3.8: Déversoirs servant d'évacuateur de crues pour un réservoir artificiel


ou un lac naturel

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88 Données de base

3.2.2 Déversoir standard


L'analyse de l'écoulement par dessus un déversoir à seuil épais révèle la présence
de zones de sous-pression (cf. Figure 3.9). Sa forme avec angles vifs n'est en fait
pas idéale du point de vue hydrodynamique.

H h0
Zones de
sous-pression

Le

Figure 3.9 : Ecoulement par dessus un déversoir à seuil épais avec zones de
sous-pressions.

H H

)H

w w

a) b)

Figure 3.10 : Forme d'un déversoir standard

Pour éviter de telles zones de sous-pression, la géométrie de la crête du déversoir


doit suivre la courbe formée par la nappe inférieure d'une lame d'eau passant par-
dessus un déversoir à mince paroi (cf. Figure 3.10). Un déversoir à crête fixe de cette
géométrie est appelé déversoir standard.

3.2.2.1 Calcul du débit


La relation entre la charge et le débit sur le déversoir peut être dérivée à partir d'un
écoulement par dessus un déversoir à mince paroi (cf. Figure 3.11). En considérant
un tube d'épaisseur dh, l'équation de Bernoulli s'écrit :

} 0 } 0
2 2
vo v p
+ h
{ = + u
2 g p 2 g g
o

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Données de base 89

En admettant que la vitesse d'approche est très faible


( v o = 0 et ho = H pour ho << w ), on obtient

v= 2 g h
pour la vitesse dans le tube.

dh
h
h0 H
v(h)

v0
w

o u

Figure 3.11 : Analyse de l'écoulement par dessus un déversoir à mince paroi

Le débit spécifique se calcule par intégration de la vitesse sur la hauteur d'eau :


H H H
2 3 2 3
q = v dh = 2 g h dh = 2 g h 2 q= µ H 2 2g
0 0 3 0 3

Cette formule est appelée formule de Poleni où µ est un facteur de correction qui
tient compte de :
• heff < h sur la crête
• linges de courant + parallèles
• répartition des pressions + hydrostatique
• répartition des vitesses + uniforme
Le coefficient de débit est défini comme :
2
Cd = µ = f ( ho , w )
3
Une valeur moyenne du coefficient de débit pour le déversoir à mince paroi est de :
C d = 0.42 (µ = 0.63)

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90 Données de base

Q 1> Q2> Q3

H3

Figure 3.12 : Formes du jet passant par dessus un déversoir à mince paroi

Suivant la charge H à l'amont, le jet d'eau passant par dessus le déversoir à mince
paroi forme des nappes différentes (cf. Figure 3.12). Pour une forme donnée et par
conséquent pour un débit (charge) donné, la géométrie d'un déversoir standard peut
être définie.

HD H
)H

Figure 3.13: Géométrie d'un déversoir standard pour une charge respectivement
un débit donné

Remarque : Les notations changent


H HD
Cd CdD (pour HD)
La valeur moyenne du coefficient de débit du déversoir standard est de :
CdD = 0.494 (µ = 0.74)
Sous la charge de dimensionnement, les écoulements par dessus les deux déver-
soirs correspondants sont pratiquement identiques, mais :
H > HD
L'équation pour le calcul du débit est également identique :
3
Q = Cd b 2 g H 2

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Données de base 91

Le coefficient de débit est une fonction de la charge par rapport à la charge de di-
mensionnement HD (cf. Figure 3.14) :
H
Cd = f
HD
0 .12
Cd H
=
C dD HD
pour : 0.2 < h/HD < 2.0

0.6
Cd

0.494 0.5

0.4
H/HD

0 1 2 3 4

Figure 3.14 : Relation entre le coefficient de débit et la charge

3.2.2.2 Géométrie du déversoir standard


La géométrie du déversoir standard est définie par la forme de la nappe, pour une
certaine charge ou un certain débit, c'est-à-dire la charge de dimensionnement (cf.
Figure 3.10).
Pour une charge donnée, le déversoir peut être construit selon la géométrie propo-
sée par l'United States Army, Corps of Engineers (USCE) (cf. Figure 3.15).

Figure 3.15 : Géométrie d'un déversoir standard selon la proposition du USCE

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92 Données de base

Pour obtenir des fonctions uniques, un système de coordonnées adimensionnelles a


été choisi :
X = x / HD
Z = z / HD
L'origine des coordonnées coïncide avec la crête du déversoir standard.
Pour le quadrant aval, la courbe du radier est donnée par une fonction de puis-
sance :
1 1.85
Z= X
2
La partie amont se compose de trois arcs circulaires. L'origine et le rayon pour ces
trois courbures peuvent être trouvés à la page 149 de Sinniger et Hager (1989).

3.2.2.3 Modification de la partie amont avec une saillie


Pour rendre la construction d'un déversoir plus économique, le parement amont peut
être modifié en aménageant une saillie. Ainsi, une masse importante de béton peut
être économisée (cf. Figure 3.16).

x Recommandé :
M / N > 0.5
M M / HD 0.6
-z

Béton éliminé

Figure 3.16 : Déversoir standard avec saillie pour économiser du béton

3.2.2.4 Effet de charge sur le déversoir standard


Comme mentionné ci-dessus, les écoulements sur un déversoir à mince paroi et sur
le déversoir standard correspondant sont pratiquement identiques si la charge H sur
ce dernier est égale à la charge de dimensionnement HD.
Etant donné que le radier du déversoir standard reste fixe, il provoque une nappe
moins incurvée pour H / HD < 1 et plus incurvée pour H / HD > 1. L'analyse des pres-
sions sur le radier montre les conséquences de ceci.
• si H / HD = 1, la pression sur le radier est négligeable
• si H / HD < 1, la pression devient plus grande et positive (la nappe inférieure
appuie contre le radier)
• si H / HD > 1, la pression diminue et devient négative (la nappe tend à dé-
coller du radier)

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Données de base 93

HD H>HD, sous-pressions
H
)H

H=HD

H<HD, sur-pressions

Figure 3.17 : Effet de charge sur le déversoir standard (H + HD)

Les sous-pressions peuvent conduire à une érosion du radier par cavitation. Des
charges considérablement plus élevées que la charge de dimensionnement sont par
conséquent à éviter.
Si H / HD < 1, le déversoir standard est dit surdimensionné, tandis qu'il est sous-
dimensionné pour H / HD > 1. Les conséquences d'un surdimensionnement
(H / HD < 1) sont les suivantes :
• les pressions sur le radier sont plus fortes mais positives et peuvent être
acceptées
• le coefficient de débit diminue (cf. Figure 3.14).
Le minimum de CD est de 0.385. Il est atteint pour H / HD 0.

Figure 3.18 : Pressions sur le radier d'un déversoir standard pour différentes char-
ges

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


94 Données de base

Les conséquences d'un sous-dimensionnement (H / HD > 1) sont les suivantes :


• le coefficient de débit augmente, mais
• les pressions sur le radier deviennent négatives (sous-pressions) et l'écou-
lement décolle du déversoir
Les sous-pressions sont à éviter, car il y a un risque de cavitation, si la pression de-
vient inférieure à la pression de vapeur. L'énergie libérée par l'implosion des bulles
d'air provoque une érosion de la surface rigide par le phénomène de cavitation.
Exemple : H = 10 m si H / HD = 1.6 risque de cavitation
H = 20 m H / HD = 1.4 risque de cavitation
En pratique des rapports de H / HD = 1.1 à 1.3 sont acceptables sans ris-
que de cavitation.
La séparation de l'écoulement du déversoir standard aura lieu pour H / HD > 1, quand
l'air peut pénétrer entre la nappe inférieure et le radier.
La Figure 3.20 montre que le radier peut être aéré depuis le coté à partir de l'extrémi-
té d'un pilier (Figure 3.20 a)) ou depuis l'aval (Figure 3.20 b)).
La séparation de l'écoulement mène à une surélévation du plan d'eau et souvent à
des vibrations considérables.

H / HD

1.5

H
1
0 10 m 20

Figure 3.19 : Début de cavitation pour différentes charges

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 95

)HS )HS

HS Hn
)z )z

a) b)
Figure 3.20: Entraînement d'air à la crête d'un déversoir standard et séparation de
l’écoulement a) dû au pilier mal formé b) dû à la géométrie du fond
non-conforme.

3.2.3 Effet des piliers

3.2.3.1 Fonction des piliers


Un déversoir est souvent subdivisé par des piliers de différentes formes et tailles. Ils
servent à :
a) loger ou supporter des installations hydromécaniques comme les vannes
ou les clapets
b) supporter un pont d'accès qui traverse le déversoir :
Ce pont facilite également l'entretien des installations hydromécaniques.
c) imposer une direction déterminée à l'écoulement pour que le débit soit dis-
tribué de manière uniforme sur toute la largeur du déversoir et du coursier :
Ceci importe surtout dans le cas où l'écoulement d'approche n'est pas per-
pendiculaire à l'axe du déversoir.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


96 Données de base

3.2.3.2 Influence des piliers sur le débit déversé


Les piliers forment des obstacles à l'écoulement et provoquent une séparation de ce
dernier de la paroi. La section effective du déversoir se trouve par conséquent ré-
duite (cf. Figure 3.21).

zone de Be
séparation
pilier

Figure 3.21 : Influence des piliers sur le déversoir

Si B est la largeur géométrique entre deux piliers, la largeur efficace Be est égale à :
Be = B 2 K p H

où : Kp : coefficient de contraction latérale


Le coefficient de contraction latérale dépend de la forme et de la disposition du pilier
(cf. Figure 3.22).

Figure 3.22 : Coefficient de contraction latérale en fonction de la forme du pilier

Pour une forme arrondie du pilier qui est favorable du point de vue hydrodynamique,
le coefficient de contraction latérale devient très petit. Une prolongation du pilier vers
l'amont du déversoir conduit au même effet. Avec une prolongation combinée avec
une forme hydrodynamique du pilier, la contraction latérale de l'écoulement devient
négligeable. Les formes idéales, c'est-à-dire les plus hydrodynamiques, ressemblent
à une proue de bateau (cf. Figure 3.23).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 97

Figure 3.23 : Formes de pilier idéales


1 2 3 3a 4

Les formes de pilier fréquemment utilisées en pratique ont été testées systémati-
quement sur modèle réduit. Les résultats de ces investigations sont montrés sur la
Figure 3.23 b).
Bien entendu, les parois latérales provoquent également une contraction latérale.
Elles sont donc à traiter comme les piliers pour le calcul de la largeur effective du
déversoir :
(
B eTOT = (n + 1) B 2 n K p1 + K p2 H )

B B B B

1 2 n

Piliers Parois
Kp1 Kp2

Figure 3.24 : Exemple du calcul de la largeur effective d'un déversoir

Exemple : Un déversoir fixe de longueur de crête Btot = 2 4 m avec un pilier au mi-


3
lieu de b = 1 m doit laisser passer un débit de 25 m /s. La forme du dé-
versoir et la hauteur d'eau à l'amont, c'est-à-dire la charge, sont recher-
chées.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


98 Données de base

Piliers ronds et
parois latérales
Kp = 0.035

Choisissons un rapport H / HD = 1.1, c'est-à-dire un déversoir légèrement


sous-dimensionné. Pour ne pas être trop prudent, un rapport H / HD entre
1.1 et 1.3 est en général choisi. Pour un déversoir standard le coefficient
de débit Cd est égal à 0.5 pour H / HD = 1.1 (cf. Figure 3.14).
La largeur efficace Be se calcule comme suit pour une passe :
Be = B 2 K p H
= 4 2 0.035 15
. = 3.9 m
en admettant que H est égale à 1.5 m.
Le coefficient de pilier et de paroi latérale pour le type choisi est de 0.035
et Be devient 7.8 m.
La hauteur d'eau amont se calcule par
3
Q = B eTOT C d 2 g H 2

3
H 2
= 1.45 H = 1.28 m
En principe il faut déterminer de nouveau la largeur efficace avec la hau-
teur d'eau calculée. Puisque la différence entre 1.28 m et 1.5 m n'a pas
une grande influence sur l'effet des piliers, la largeur efficace ne change
pratiquement pas.
Avec la hauteur de dimensionnement HD = 1.16 m (HD = 1.28 / 1.1) la
forme du déversoir peut être déterminée à l'aide de la formule suivante :
1.85
z 1 x
=
HD 2 HD
Le z peut être calculé en fonction de x. Pour x = 1 m, z vaut par exemple
0.44 m.
Si la hauteur d'eau maximale et le débit Q sont donnés, la largeur libre
nécessaire entre les piliers peut être déterminée :
3
Q = 50 m /s, Hmax = 3.0 m
On choisit H / HD = 1.1, d'où Cd = 0.5 et
Q
B eTOT = 3
= 4.35 m
Cd 2 g H 2

B TOT = B eTOT + 4 0.035 3 = 4.77 m


1=42
B 2.38
43 m
largeur géométriqu e
entre les piliers
Finalement on obtient B = 2.38 m pour la largeur géométrique entre les
piliers

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 99

3.2.4 Déversoirs noyés


Le débit passant par un déversoir dénoyé n'est contrôlé que par une seule section
constituant la section de contrôle.

)h noyé
H h

dénoyé
hu
w

V,0 H=h

Figure 3.25: Ecoulement dénoyé et noyé par dessus un déversoir standard

A l'amont de cette section, l'écoulement est fluvial, tandis qu'à l'aval il est torrentiel.
Si le niveau aval augmente progressivement, il peut influer sur l'écoulement (cf.
Figure 3.25). Le débit n'est alors plus déterminé par une seule section, mais par deux
sections amont et aval. La condition d'écoulement critique n'est plus remplie dans la
section de contrôle. On parle de déversoirs noyés.
Dans quelles conditions la formule du déversoir dénoyé peut être utilisée pour calcu-
ler le débit ?
3
Q=b Cd 2 g H 2
{
dénoyé
La formule ci-dessus peut être utilisée si les deux critères suivants sont respectés :
• la vitesse d'approche doit être très petite, ce qui sera le cas pour :
w 2 · H (exceptionnellement w H).
• le déversoir n'est pas noyé, si :
)h > 0.8 · H et (hu + )h) > 3 · H
Si la dernière condition n'est pas satisfaite, le déversoir devient noyé. Dans ce cas,
l'influence sur le débit est considérée par une diminution du coefficient de débit.
3
Q = b Cd 2 g H 2
{
noyé

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


100 Données de base

Sur la Figure 3.26 les résultats d'une analyse détaillée de l'USCE sont présentés. Le
pourcentage de réduction du coefficient de débit )Cd peut être obtenu en fonction de
)h, hu et w.

Figure 3.26 : Réduction du coefficient de débit pour des déversoirs noyés

)Cd est influencé par :


hu + )h )h
dans les zones a , b ; dans les zones c , d
H H

3.2.5 Déversoirs à seuil épais


Ces déversoirs à géométrie simple sont souvent utilisés pour des ouvrages de moin-
dre importance ou non-permanents. Pendant la construction de barrages notam-
ment, des déversoirs à angle vif peuvent s'imposer dans les brèches laissées ouver-
tes pour dévier les crues.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 101

a) Forme rectangulaire

xa / H
x/H

H
hc
séparation de l’écoulement
ha sous-pressions

Ls

Facteur caractéristique
-. = H / Ls

Figure 3.27 : Ecoulement par dessus un déversoir à seuil épais de forme rectan-
gulaire

Le débit peut être calculé par :


3
Q = Cd b 2 g H 2

Une dizaine d'essais sur modèle réduit ont permis de définir le coefficient de débit :
Cd = 0.326
si 0.1 < -. < 0.4 (seuil large)
ha = 0.20 · H
xa = 0.44 · H

b) Forme trapézoïdale/polygonale
Pour un déversoir à forme trapézoïdale, deux zones de séparation de l'écoulement
peuvent être observées sur le radier (cf. Figure 3.28).

H h0
Zones de
sous-pression

Le

Figure 3.28 : Ecoulement par dessus un déversoir à seuil épais avec zones de
sous-pressions.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


102 Données de base

Pour le calcul du débit, un coefficient de correction est introduit dans la formule du


déversoir à mince paroi :
3
Q = Cd c e b 2 g H 2

où : C d : coefficient de débit (mince paroi)


C dmoyen = 0.42

ce : coefficient de correction
2 sin H w
ce = 1 ; &e =
9 (1 + & e )
4
Le

3.2.6 Aération des déversoirs


Si le déversoir n'est pas suivi par un coursier et l'eau se jette directement dans un
bassin, il faut absolument veiller à ce que l'espace entre la lame déversante et la
structure soit suffisamment aéré. Sinon la lame se plaque temporairement contre la
paroi aval de l'ouvrage et transmet des vibrations. Ce phénomène peut être évité en
choisissant :
• la bonne forme du déversoir
• des dispositifs d'aération

saillie

Figure 3.29 : Importance de l'aération au-dessous de la nappe déversante sur un


déversoir sans coursier

En premier lieu, il faut garantir un espace libre entre la lame et l'ouvrage. Des condui-
tes d'aération doivent ensuite garantir que l'air peut pénétrer dans cet espace libre.
Il y a diverses possibilités d'aérer la lame déversante (cf. Figure 3.30) :
• piliers (ou autres obstacles) sur la crête du déversoir
• conduite d'aération disposée dans le déversoir même
• conduite d'aération disposée dans les murs bajoyers

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 103

Figure 3.30 : Possibilités d'aération d'une lame déversante


Piliers
Conduite d'aération située dans le déversoir
Conduite d'aération située dans les murs bajoyers

La quantité d'air Qa nécessaire à une bonne aération peut être estimée par (cf.
Figure 3.31):
Q
Q a = 0.1 3
hp 2

ho
La hauteur d'eau hp sous la chute peut être calculée à l'aide de la formule empirique
selon Bos pour le ressaut libre (cf. Figure 3.31):
0 .22
hp Q2
=
)z g b 2 )z 3

où : )z : la hauteur de la chute
hp : la hauteur d'eau sous la lame qui est fonction des condi-
tions aval, si l'écoulement est noyé
Pour le ressaut submergé, la hauteur sous la lame est égale à la hauteur à l'aval h2.
Dans ce cas, le débit d'air est instable. Il varie avec la hauteur sous la lame qui dé-
pend du débit passant par le déversoir.
Pour le dimensionnement des conduites d'aération, une différence de pression entre
l'atmosphère et l'espace au-dessous de la nappe de l'ordre de 0.1 m est admise.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


104 Données de base

ho
air p = patm - 0.1 m
(hypothèse de calcul)
2 h2
)z
1

hp

Figure 3.31 : Géométrie à travers un déversoir équipé d'un système d'aération


ressaut libre
ressaut submergé

3.3 Déversoirs contrôlés par des vannes


3.3.1 Rôle d'un seuil ou barrage mobile
Les déversoirs non-équipés d'organes de fermeture mobiles ont le désavantage de
ne pas être réglables. L'évacuation de l'eau nécessite une surélévation du niveau
d'eau amont.
Cette situation peut être évitée en installant des organes de fermeture mobiles sur le
déversoir. La Figure 3.32 en montre un exemple typique.
La vanne est un organe mobile avec lequel la hauteur d'eau amont peut être réglée à
un niveau souhaité. Si la vanne est complètement ouverte, le débit de dimensionne-
ment, le débit de pointe d'une crue centennale par exemple, doit passer le déversoir
sans surélévation notable du niveau amont.
Il est clair que ces organes nécessitent un entretien permanent et une source d'éner-
gie pour les manœuvres. Il y a par conséquent un certain risque qu'une vanne reste
bloquée pendant une crue.

Niveau variable Vanne segment


Pilier

Parafouilles

Figure 3.32 : Déversoir standard équipé d'une vanne segment

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 105

3.3.2 Types et fonctionnement des vannes


Il existe une grande diversité de types de vannes (cf. Figure 3.33).
En général, les organes mobiles sont subdivisés en trois catégories :
• les vannes,
• les clapets,
• les combinaisons.
En outre, les organes prévus pour les aménagements hydroélectriques peuvent être
distingués de ceux utilisés pour les cours d'eau. Dans le premier cas, on parle de
vannes de déversoir, de prise, de fond, de turbine, etc.. Ces organes servent à la
régulation ou au contrôle du débit ainsi qu'à la sécurité.
Selon le type de vanne, le mouvement de l'organe est glissant, roulant ou tournant.
La vanne peut être appuyée latéralement sur des rails, des rouleaux ou des crémail-
lères disposées dans des rainures.

Types d’organes mobiles


Vannes
Clapets
Aménagements Combinaisons
Cours d’eau
hydro -éléctriques

• Vanne de deversoir • Ecluses


• Vanne de prise d’eau •Vannes de canaux découverts
• Vanne de fond - régulation
• Vanne de turbine - contrôle
• Etc... - sécurité

Figure 3.33 : Types d'organes mobiles et leur utilisation

a) les types d'organes mobiles les plus importants sont les suivants :

Vanne ségment Vanne clapet Vanne plane Vannes planes


secteur

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


106 Données de base

b) les positions possibles des organes sont les suivantes :

Déversoir Seuil

Radier
c) la commande de la vanne est normalement automatisée, quelquefois hy-
draulique (en fonction du niveau d'eau) et aujourd'hui très rarement ma-
nuelle.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 107

La Figure 3.34 montre un aperçu des divers types de vannes et clapets.

Vanne levante
verticale Vanne crochet Batardeaux Vanne pointeau

Clapet Vanne segment à Vanne segment Vanne secteur Vanne toit


pression à tension

Vanne crochet Vanne segment- Vanne clapet Seuil à clapet et


levante clapet levante vanne segment

Figure 3.34 : Différents types de vannes et clapets

Concernant le fonctionnement des vannes et clapets, il faut savoir que l'écoulement


peut passer par dessus, au-dessous ou par dessus et au-dessous la vanne. Le fonc-
tionnement dépend du degré d'ouverture de la vanne ou du clapet (cf. Figure 3.35).

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108 Données de base

Q = Qmax
Q=0 Q max > Q > 0

niveau amont constant éventuelle surélévation


du plan d’eau amont
a)

Q=0 0 < Q < Q max Q = Qmax


b)
Figure 3.35: Types de fonctionnement
a) d'un clapet b) d'une vanne

Selon le type d'ouvrage, on distingue les vannes situées sur fond rectiligne, presque
horizontal et celles sur fond convexe (cf. Figure 3.36).

Dans longs canaux: Vannes de déversoir


• canaux d'irrigation
• ouvrages de prise

• vidange de fond

Figure 3.36: Vanne sur fond rectiligne ou convexe

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 109

Pour l'étude des caractéristiques de l'écoulement au-dessous d'une vanne, les deux
types de vannes les plus importantes sont prises comme exemple. Il s'agit de la
vanne plane et de la vanne secteur ou segment.
Une contraction de l'écoulement peut être observée (cf. Figure 3.37) entre l'ouverture
de la vanne a et la hauteur d'eau aval h2 qui est égale à :
h2 = Cc a
où : Cc : coefficient de contraction

Figure 3.37 : Géométrie


a) de la vanne plane inclinée b) de la vanne secteur

Le coefficient de contraction dépend de la géométrie de l'arête inférieure de la vanne.


Quelques formes d'arêtes typiques sont présentées sur la Figure 3.38 :
• à mince paroi amont (Figure 3.38 a))
• à arête inclinée de l'angle / par rapport au fond (Figure 3.38 b))
• à arête arrondie de rayon ra (Figure 3.38 c))
• à arête inclinée, arrondie à l'amont (Figure 3.38 d))

Figure 3.38 : Schémas de types d'arêtes de vannes, 0 inclinaison de la vanne, /


inclinaison de l'arête de la vanne par rapport au fond.

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110 Données de base

3.3.3 Ecoulement dénoyé


L'écoulement par dessous une vanne plane dans un canal rectangulaire prismatique
de largeur b est considéré dans ce paragraphe (cf. Figure 3.39).

h1 H = cte

a
Cc a h2

1 2
Figure 3.39 : Ecoulement au-dessous d'une vanne plane avec une charge H cons-
tante à l'amont

L'écoulement est dénoyé, c'est-à-dire non submergé de l'aval.


En admettant un écoulement potentiel, l'équation de Bernoulli, entre deux sections
amont et aval suffisamment éloignées de la vanne, peut être appliquée. Dans un
écoulement potentiel la charge est constante. Les pertes de charge sont négligées
(comme pour un écoulement souterrain).
L'équation de Bernoulli entre les sections et s'écrit comme suit :
Q2 Q2
H = h1 + = h +
2 g b 2 h12 2
2 g b2 h2
14243 142432
v 12 v 22
2 g 2 g

Q2 1 1
avec : = h2 h1
2 g b2 h12 h 22

1
Q 2 = 2 g b 2 (h 2 h1 )
1 1
h12 h 22
2 2
h1 h 2
= 2 g b 2 (h 2 h1 )
(h 2 h1 ) (h 2 + h1 )
1
6 3 2

4 2 g h 1
Q = b h2 4 1 1

4 Cc a 1
41 + h 1
5 1 2

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 111

avec : h2 = Cc · a
Q = Cd a b 2 g h1 (égale à l'équation de Torricelli)
Cc
avec : Cd = 1
6 Cc a3 2

41 + 1
5 h1 2
où : Cd : coefficient du débit
L'ouverture relative de la vanne est définie par
a
A=
h1
Cc
d'où : Cd =
(1 + C A)
1
2
c

L'ouverture varie entre

{0 7A7 {1
h1>>a vanne complèteme nt ouverte

Si l'ouverture de la vanne est très petite par rapport à h1, A tend vers 0 et
Cc
Cd = 1 = Cc
[1 + 0 ] 2

Pour la vanne plane verticale et une ouverture relative proche de zéro ( A 0 ), Kir-
choff a trouvé le coefficient de débit suivant :

C c = C d0 = = 0.611
+2
Von Mises (1917) a obtenu des solutions pour des vannes planes inclinées (cf.
Figure 3.40).

A 0 C d = C d0
6 4 + 5 e 0.76 0 3
C d0 = & 4 1
5 9 2
& = 0.98 vanne plane
& = 0.96 vanne secteur

Figure 3.40 : Cd0 en fonction de 0 selon von Mises (1917)

Si la vanne est complètement levée, A se rapproche également de l'unité et le coef-


ficient de contraction est égal à 1. Cd devient alors :

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112 Données de base

1
Cd =
2
A ouverture complète, le débit Q est par conséquent égal à :

Q = b (g h13 )
1
2

Ce débit correspond au débit critique qui constitue la limite supérieure d'un écoule-
ment non perturbé.
La Figure 3.41 représente le coefficient de débit pour des vannes inclinées avec une
grande ouverture relative. La figure peut être utilisée pour des vannes planes ou des
vannes secteurs en changeant &.
• vannes planes : & = 0.98
• vannes secteurs : & = 0.96
Il est important de noter que le domaine 0.6 < A < 1 a été exclu de la Figure 3.41 à
cause de l'instabilité de l'écoulement pour ces ouvertures relatives.
Les valeurs de Cd dans la figure 3.41 peuvent également être appliquées pour la
vanne verticale type b) de la figure 3.38 si 0.1 7 d/a 7 4. Pour de telles vannes, soit
l'écoulement ne se sépare donc pas de l'arête inférieure amont, soit la longueur de
séparation est plus courte que l'extension longitudinale de la vanne d/cos0. Pour les
arêtes types c) et d) de la Figure 3.38, les coefficients de débit Cd sont comparables
à ceux de la vanne plane inclinée (& = 0.98) en admettant 0 = /, si / est compris entre
15o 7 e 7 45o et 0.33<d/a<2.
Le profil du jet, c'est-à-dire de la surface de l'eau, est représenté à la page 191 de
Sinniger et Hager (1989). La contraction du jet sortant de la vanne est pratiquement
achevée à une distance x / a = 2 de la vanne.

6A 02 3
Cd = Cdo exp 4 1 1
45 2 b 12

(cf. équation 8.5 Sinniger/Hager)

Figure 3.41 : Coefficient de débit Cd en fonction de l'ouverture relative de la vanne


A et de son inclinaison 0 (& = 0.98 pour vannes planes, & = 0.96
pour vannes inclinées)

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Données de base 113

3.3.4 Forces sur la vanne


La vanne plane étant de géométrie simple, les forces agissant sur ce type d'organe
seront étudiées en premier lieu.

pp v p2
= Hp (pA = 0)
g 2g
a) b) c) q
vp =
4 sp

Figure 3.42 : Forces sur une vanne plane


a) vanne fermée b) vanne ouverte
c) écoulement potentiel – réseau orthogonal

Les forces suivantes agissent sur une vanne plane fermée (cf. Figure 3.42 a)) :
• les pressions d'eau statiques amont W o et aval W u
• la poussée d'Archimède A
• le poids de la vanne G
• les forces sur les paliers B
Si la vanne est ouverte, les forces changent (cf. Figure 3.42 b)) :
• les pressions d'eau dynamique, dont la composante W est horizontale
• la poussée d'Archimède ou les sous-pressions
• la force de levage
• le poids de la vanne
• les forces sur les paliers
La pression d'eau dynamique sur la vanne peut être estimée en admettant un écou-
lement potentiel, c'est-à-dire en négligeant les pertes de charge. Ainsi, la pression
locale sur la vanne peut être calculée à l'aide de l'équation de Bernoulli :
p v2
= Hp
g 2 g
où : Hp : distance du point de la ligne d'énergie
v : vitesse locale
Comme pour l'écoulement potentiel dans les milieux poreux, un réseau d'équipoten-
tiel orthogonal peut être tracé. A l'aide de ce réseau, la vitesse locale au point consi-
déré peut être déterminée dans le tube de courant correspondant.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


114 Données de base

Exemple v=
4 sp
avec quatre tubes et
sp : largeur du tube au point P

Figure 3.43 : Répartition de la pression sur une vanne secteur


a) 0 = 30° b) 0 = 60°

Avec cette méthode graphique, des solutions approximatives peuvent être obtenues
très rapidement même pour des problèmes complexes. A l'arête inférieure, la pres-
sion sur la vanne devient bien entendu nulle (pression atmosphérique).
Une solution précise du problème est obtenue en appliquant le théorème de la quan-
tité de mouvement. Cette solution est présentée en détail par la Figure 3.43 (Sinniger
et Hager, 1989).

3.3.5 Ecoulement noyé


L'écoulement reste dénoyé sous une vanne, si l'écoulement à l'aval est torrentiel,
c'est-à-dire si le nombre de Froude à l'aval F2 est supérieur à l'unité.
L'écoulement noyé est la conséquence d'une submersion depuis l'aval. Quelle est la
hauteur d'eau maximale pour laquelle l'écoulement reste encore dénoyé ? Si l'écou-
lement à l'aval n'est pas torrentiel mais fluvial (F2 < 1), un ressaut hydraulique s'éta-
blit. La submersion aval limite est donc atteinte, si le pied de ce ressaut hydraulique
se trouve dans la section contractée.

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Données de base 115

dénoyé: hu<hs
noyé: hu>hs

Figure 3.44: Conditions limites pour un écoulement sous vanne dénoyé

Le ressaut s'établit entre les hauteurs conjuguées. La limite entre l'écoulement dé-
noyé et l'écoulement noyé est atteint lorsque hs est la hauteur conjuguée de la hau-
teur contractée Cc · a.
Selon Bélanger le rapport entre les hauteurs conjuguées est égal à :
hs 1
= 1 + 8 F12 1
Cc a 2
Q
F1 =
(g b 2
C3c a3 ) 1
2

Pour hu < hs, l'écoulement sous vanne est dénoyé. Il est noyé, si hu > hs.
Il est également intéressant de connaître le débit sous la vanne dans le cas d'une
submersion aval.

Volume de
2
contrôle

Figure 3.45: Ecoulement sous vanne noyé

A l'aval de la vanne noyée, deux zones d'écoulement se forment (cf. Figure 3.45) :
• une zone de haute vitesse située sur le fond

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


116 Données de base

• une zone à la surface, voisine de la vanne


Il s'agit d'une zone de séparation avec un rouleau de surface.
La vitesse maximale à l'aval de la vanne est, selon l'équation de Toricelli, égale à :

v max = 2 g (h1 h v )

où : hv : hauteur d'eau à l'aval de la vanne, proche de cette der-


nière
Le débit se calcule par :

Q = Cc a b 2 g (h1 h v ) h* = Cc a = Q / ( v max b )
123
h*
Le coefficient de contraction Cc est presque égal à la valeur de l'écoulement dénoyé.
En pratique, la hauteur d'eau aval hu est souvent connue, la hauteur hv proche de la
vanne à l'aval est par contre inconnue. La relation entre ces deux hauteurs d'eau est
obtenue en appliquant le théorème de la quantité de mouvement (Stützkraftsatz) :
1 Q v max 1 Q2
b h2v + = b hu2 +
2 g 2 g b hu
1
avec Q = b h* v max = b h* 652 g ( h1 hu ) 32 2

La répartition de la vitesse est supposée uniforme dans le courant principal et égale


à zéro dans la zone de séparation. La résolution de cette équation selon hv se trouve
dans Sinniger et Hager (1989) dans l'équation 8.16. Les résultats sont présentés
dans la Figure 3.46.

h* / hv > 1 : impossible physiquement


h* / hv = 1 : un ressaut dénoyé s’établit

Figure 3.46 : Relation entre hv et hu en fonction de h* = Cc · a


(•) h1 = hu = hv
(---) hu = hv

A l'aide de la Figure 3.46, hv peut être déterminé en fonction de la hauteur d'eau aval
hu et de l'ouverture relative e la vanne h* / h1.

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Données de base 117

3.3.6 Vanne de déversoir


Un déversoir standard peut être équipé d'une vanne plane ou d'une vanne secteur
(cf. Figure 3.47).
L'écoulement est influencé par l'ouverture de la vanne. Si la vanne est complètement
ouverte, le déversoir standard fonctionne bien. Pour des petites ouvertures, le jet a
tendance à se détacher du radier. Pour éviter cette séparation et réduire les sous-
pressions, la vanne est en général placée légèrement à l'aval de la crête du déver-
soir.

Xs 0.2 · HD
xs

Figure 3.47 : Déversoir standard équipé d'une vanne plane ou d'une vanne sec-
teur

3.3.6.1 Vanne plane verticale


Le cas d'un déversoir standard muni d'une vanne située sur la crête du déversoir est
étudié en premier (cf. Figure 3.47).

HD
Ho ze
HD : charge de dimensionnement
Ho : charge en présence d’une
vanne
ze : ouverture de la vanne

Figure 3.48: Ecoulement sous une vanne plane posée sur la crête d'un déversoir
standard

Par une étude expérimentale, la formule suivante a été établie pour le débit Qg :

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


118 Données de base

Qg 6 H 32 Ho ze
3
2 3 1
9
1 ze
=4 o 1 +
Q D 4 HD HD HD 1 6 HD
5 2
3
avec : QD = C dD b 2 g HD2
{
0.495
Qg : débit du déversoir équipé d'une vanne
ze
vérifiée pour : 0< <2
HD
Ho 4 z e
et : >
HD 3 HD
Ho 4 z e
Pour < , la vanne n'est plus immergée. L'écoulement n'est pas influencé
HD 3 HD
par la vanne. Par conséquent Ho / HD est égal à H / HD et le débit devient :
3
Qg Q = Cd b 2 g H 2

3.3.6.2 Vanne secteur ou segment

Figure 3.49 : Vanne secteur installée sur un déversoir standard


a) géométrie normalisée par HD
b) écoulement schématisé

: angle entre la tangente à l'arête inférieure de la vanne et l'horizontale

8: angle entre la tangente au déversoir et l'horizontale

Selon l'équation de Torricelli, le débit du déversoir équipé d'une vanne segment se


calcule par :
Q g = C dg b G HD 2 g He

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 119

6 3
23 6 1.85 3
2 xl 1 4 zl + 1 xl
avec : G = 41 1
4 g HD 1 4 HD 2 HD 1
5 2 5 2
Cdg : coefficient de débit du déversoir équipé d'une vanne seg-
ment
0.12
H
Cd g = 0.908 1 =8
277° HD

avec : HD : charge de dimensionnement


H: charge (opérationnelle)
Xl : distance horizontale entre l'arête inférieure de la
vanne et la crête du déversoir (cf. Figure 3.49)
Zl : ouverture de la vanne
He : charge effective
G: distance minimale adimensionelle entre l'arête
inférieure de la vanne et le déversoir standard
normalisé par HD
Cdg : coefficient de débit de la vanne du déversoir

sous-pressions

Figure 3.50: Sous-pressions sur le fond d'un déversoir standard équipé d'une
vanne secteur

Les pressions négatives sur le fond peuvent atteindre des valeurs importantes.
L'étude expérimentale montre qu'elles n'étaient jamais inférieures à 44% de la
charge de dimensionnement.
Exemple : HD = 6 m
44% de sous-pressions 2.44 m
2
x · · g 24 kN/m

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120 Données de base

Figure 3.51 : Répartition de la pression relative par rapport au fond du déversoir


standard pour diverses ouvertures de vanne (Sinniger, Hager 1989)
Z\=z\/HD et Xs=0.2;
( ) Zt=0.8; R=1;90=1; (—) Zt=1; R=1.25;90=1.25 (à gauche) et
( ) Zt=0.31; R=1;90=1; (—) Zt=0.4; R=1.25;90=1.25 (à droite)
(o) minimum de pression

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 121

3.3.7 Clapet

HR
variable

Figure 3.52 : Déversoir standard muni d'un clapet

Les clapets simples sont en général utilisés uniquement pour des charges relative-
ment faibles, c'est-à-dire jusqu'à environ 3 m. Les clapets secteurs (drum gate, cf.
Figure 3.53) sont utilisés pour des charges plus élevées.

Figure 3.53 : Clapet secteur, géométrie considérée

Le fonctionnement hydraulique du clapet est fortement influencé par l'angle entre


l'arête du clapet et l'horizontale (cf. Figure 3.53). Si > 0, le clapet correspond hy-
drauliquement à un déversoir à mince paroi. Si < 0, il correspond à un déversoir à
radier courbe. Le débit se calcule donc par la formule du déversoir bien connue :
3
Q = C dc b 2 g He 2
où : Cdc : coefficient de débit du clapet
He
C dc = f , (cf. Figure 3.54)
r

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


122 Données de base

Figure 3.54 : Coefficient de débit Cdc en fonction de et He / r selon von Mises


(1917), He / r = 0 ( ····)

3.3.8 Barrage gonflable


La vanne gonflable est une option pour les solutions conventionnelles, surtout pour
les clapets.
Le principe de la vanne gonflable est montré sur la Figure 3.55. La vanne est consti-
tuée par un tuyau en caoutchouc renforcé qui est gonflé par une pression d'eau à
l'intérieur. Selon la pression d'eau à l'intérieur du tuyau, sa forme et par conséquent
le débit déversé changent. Pour garantir des conditions d'écoulement stables, la
pression intérieure doit être bien supérieure à la charge d'eau à l'amont, typiquement
20 à 30% plus élevée. Si le tuyau est dégonflé, le passage est presque libre.

)h , 0.2 à 0.3 h

Tuyau en Puits de
caoutchouc commande
renforcé
Eau pression min.
h
1.2 à 1.3 *h*g

fixation Seuil en béton


Conduite de connexion

Figure 3.55: Vanne gonflable

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 123

Les expériences faites avec des vannes gonflables ont été très concluantes, même
dans des rivières avec beaucoup de corps flottants et de charriage. Ces vannes s'in-
tègrent également bien dans le paysage.

3.3.9 Batardeaux
Pour effectuer des révisions, les vannes de déversoir sont combinées avec des ba-
tardeaux à l'amont et à l'aval (cf. Figure 3.56). Ces derniers sont également appelés
vannes de secours ou de révision.

Rainure
Pilier

Pilier
Vanne
ségment
Batardeau

Rainure
Radier

Figure 3.56 : Disposition de batardeaux sur un déversoir muni d'une vanne

Les batardeaux sont des poutres simples et horizontales, placées dans des rainures
latérales dans les piliers. Selon la dimension de ces poutres, l'appui dans les rainu-
res est glissant ou roulant.
Il est clair que les batardeaux peuvent seulement être placés quand la vanne sur le
déversoir est fermée, c'est-à-dire sans écoulement d'eau. Si les éléments des batar-
deaux sont lourds, il sont installés à l'aide d'un portique ou une grue (pont roulant).

3.4 Effets amont et aval


3.4.1 Ecoulements typiques
En construisant un seuil ou un barrage dans un cours d'eau, le caractère de l'écou-
lement change à l'amont et à l'aval de cet ouvrage. En général deux cas peuvent être
distingués :

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


124 Données de base

ressaut
F<1 F>1 F<1
courbe de remous courbes de remous écoulement uniforme

coursier
hc

h=hN

F>1 F<1 F>1


écoul. uniforme ressaut courbe de remous courbes de remous écoul. uniforme

coursier
hc
h=hN

Figure 3.57 : Courbes de remous possibles à l'amont et à l'aval d'un seuil

Dans ce chapitre les différents types d'écoulement possibles à l'amont et à l'aval d'un
seuil seront traités (cf. Figure 3.57).

3.4.2 Ecoulements stationnaires et uniformes


Dans le cas idéal, un écoulement uniforme s'établit dans un cours d'eau si :
• la pente du lit est constante
• la géométrie (section mouillée) est pratiquement constante
• la rugosité est constante
• le débit est constant (écoulement stationnaire)
Ces conditions se traduisent par :
J = Js = Jf = Je
Pour le calcul de l'écoulement, la formule de Manning-Strickler peut donc être utili-
sée :
1 2
v =K J 2
R 3

où : R : rayon hydraulique
K : coefficient de rugosité de Strickler

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 125

Jf
Je
hn hn : hauteur uniforme
Q de l’écoulement
dh
Js =0
x dx

Figure 3.58 : Ecoulement stationnaire et uniforme

Selon le principe de la continuité, le débit est calculé par


Q=v A
où : A : section mouillée
La combinaison des deux équations ci-dessus donne :
5
1 A 3
Q =K J 2
2
P 3

où : P : périmètre mouillé
La section de l'écoulement et le périmètre mouillé dépendent de la hauteur d'eau. Si
Js, K et Q sont connus, la hauteur uniforme (normale) hN peut être déterminée. Si Js,
K et hN sont connus, le débit Q peut être calculé.
L'écoulement peut être fluvial ou torrentiel :
• fluvial hN > hc (F < 1)
• torrentiel hN < hc (F > 1)
Il est important de savoir que la formule de Manning-Strickler peut uniquement être
appliquée pour des pentes inférieures à 10%.

3.4.3 Ecoulement critique


La condition d'écoulement critique est définie par un nombre de Froude égal à l'unité.
La hauteur d'eau d'un écoulement critique est appelée hauteur critique hc. Pour la
hauteur critique, la charge de l'écoulement est minimale :
Q2
H =h+ avec A = f (h)
2 g A2
dH Q 2 dA
=1 3
= 1 F2 = 0
dh g A dh
F =1
Avec la condition F = 1, la hauteur critique de l'écoulement peut être calculée par :
Q 2 dA
F =1 1=
g A 3 dh

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


126 Données de base

Exemple : section rectangulaire

hc

Calcul de la hauteur critique : b


2
Q
1= b
g b 3 h 3c
Q2
hc = 3
g b2
Calcul du nombre de Froude :
Q 2 dA Q2 Q2
F2 = = b =
g A 3 dh g b 3 h c3 g b 2 h 3c
v 2 b 2 h c2
Q=v b h F =
2
g b 2 h 3c
v
F=
g h
Calcul de la charge critique :
v c2
H c = hc +
2 g
v c2 = g hc
3
Hc = hc
2
Pour des profils ayant d'autres formes géométriques, les formules pour les hauteurs
typiques (normale et critique) sont présentées au paragraphe 4.5 de Sinniger et Ha-
ger (1989). Elles sont développées pour les formes géométriques suivantes :

• trapézoïdale

• trapézoïdale pleine

• en U

• circulaire

• exponentielle

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 127

3.4.4 Courbes de remous

3.4.4.1 Généralités
Les courbes de remous résultent d'un écoulement graduellement varié, mais pas
uniforme (cf. Figure 3.59). L'écoulement devient non uniforme, si la pente du cours
d'eau, sa section ou sa rugosité changent. Comme mentionné ci-dessus, un seuil
provoque une courbe de remous, car la section et la pente de l'écoulement sont mo-
difiées (cf. Figure 3.60).

Ecoulement

stationnaire non stationnaire

graduellement varié rapidement varié

uniforme non uniforme

Figure 3.59 : Résumé des diverses conditions d'écoulement dans des canaux dé-
couverts et des rivières

Jf + Js

hN

Js
courbe de remous

Figure 3.60 : Courbe de remous à l'amont d'un seuil en rivière

Il existe quatre possibilités de courbes de remous ou de types de profils de surface


qui sont représentées sur la Figure 3.61.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


128 Données de base

F < 1 (h > hc, fluvial)


h < hN (accélération)

Exemple :
• rugosité diminue
• pente augmente, chute

F < 1 (h > hc, fluvial)


h > hN (ralentissement)

Exemple :
• rugosité augmente
• pente diminue
• amont d’un seuil, barrage

F > 1 (h < hc, torrentiel)


h < hN (ralentissement)

Exemple :
• rugosité augmente
• pente diminue
• aval d’un seuil, barrage

F > 1 (h < hc, torrentiel)


h > hN (accélération)

Exemple :
• rugosité diminue
• pente augmente
• élargissement de section
• à l’aval d’une crête de seuil

Figure 3.61: Types de courbes de remous

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 129

3.4.4.2 Calcul des courbes de remous - approche pratique de l'ingénieur

a) Procédure de calcul
Dans des canaux naturels ou dans des canaux avec des sections compliquées,
l’écoulement non uniforme, c’est-à-dire la courbe de remous, peut être analysée par
l’équation de Bernoulli généralisée si la pente du fond reste inférieure à 10 % et si
l’écoulement est graduellement varié. En considérant un tronçon )l du cours d'eau, le
calcul se fait pas à pas avec une approche interactive (cf. Figure 3.62).

amont aval

2
vo
hf = Jf · )l
2 g
2
vu
ho 2 g
Q, v
hu

zo
niveau de référence zu

) l (intervalle de calcul)

1 2

Figure 3.62: Tronçon )l d'un cours d'eau avec courbe de remous

La relation hydraulique entre les deux sections amont et aval est donnée par l'équa-
tion de Bernoulli et la condition de la continuité :

v o2 v u2
Bernoulli : z o + ho + = zu + hu + + hf
1442424 g 1444224g44
3 3
Ho Hu
Continuité : Q = vo A o = vu A u
La perte de charge due au frottement peut, en outre, être exprimée par la formule de
Manning-Strickler :
v m2 )l
Manning-Strickler : h f = Jf )l = 4
K m2 Rhm3

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


130 Données de base

v o + vu
avec : vm =
2
Ko + Ku
Km = , si la rugosité varie
2
Rho + Rhu
Rh m = pour des canaux non-prismatiques
2
Puisqu'il s'agit d'un écoulement graduellement varié, un changement brusque de la
rugosité ou de la section est à exclure. De plus, la distance )l entre les sections ne
doit pas être trop grande. Pour un cours d’eau naturel plus ou moins prismatique, la
distance entre deux sections ne devrait pas dépasser 1 à 2 fois sa largeur.
En connaissant la hauteur d'eau dans une section de départ, les trois équations ci-
dessus permettent de calculer la hauteur d'eau dans la section voisine. Il n'est ce-
pendant pas possible de résoudre explicitement les trois équations avec la hauteur
d'eau comme inconnue. Une procédure d'itération doit par conséquent être adoptée,
par exemple une estimation de la hauteur d'eau et ensuite un contrôle de la charge
qui doit être égale à celle dans la section connue.

b) Direction du calcul et point de départ


Au point de départ du calcul, la hauteur d'eau doit être connue. Ceci est le cas si :
• les conditions d'écoulement sont prescrites
écoulement uniforme
contrôle du niveau d'eau par des organes (vannes)
• l'écoulement passe par la hauteur critique (section de contrôle)
Il est bien connu que les ondes provoquées par une pierre jetée dans l'eau se propa-
gent (cf.) :
• dans la direction amont et aval en conditions fluviales
• uniquement vers l'aval dans des écoulements torrentiels.

fluvial critique torrentiel

calcul calcul

v < vc v > vc

Figure 3.63 : Propagation des ondes provoquées par une pierre jetée dans un
cours d'eau

Pour la direction de calcul de la courbe de remous, cela signifie que :


• les écoulements fluviaux se calculent dans la direction contraire à celle de
l'écoulement

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 131

• les écoulements torrentiels doivent être calculés dans la direction de l'écou-


lement

c) Section de contrôle
Une section où la hauteur critique s'établit pour tous les débits considérés est appe-
lée section de contrôle.
Section de contrôle h = hc pour tous les débits Q considérés.
Les sections de contrôles se situent :

hc

• sur la crête d'un déversoir

• sur une chute hc

• sur un changement de pente du hc


radier convexe

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


132 Données de base

• dans un canal de type venturi et


dans un rétrécissement local

section critique

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 133

3.4.4.3 Théorie générale de la courbe de remous


Au chapitre 5 de Sinniger et Hager (1989), la théorie est exposée de manière très
générale. Le résultat du développement est une équation différentielle pour la hau-
teur d'eau inconnue. Cette équation peut être déduite de :
dH
= Jf
dx
Q2
avec : H= z+h+
2 g A2
dA :A :A dh
et : A = f ( x,h) = + (Dérivation partielle)
dx :x :h dx
La pente du radier est égale à :
dz
Js =
dx
Finalement, l'équation différentielle ordinaire du premier ordre suivante obtenue pour
l'inconnue h(x) s'écrit comme suit :
Q 2 :A
Js Jf +
dh g A 3 :x
=
dx Q 2 :A
1
g A 3 :h

Figure 3.64 : Ensemble des solutions pour les courbes de remous généralisées
dans des canaux prismatiques, (- · -) h = hc

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


134 Données de base

Pour des canaux prismatiques, l'équation ci-dessus devient :


dh Js Jf
=
dx 1 F 2
avec : F : nombre de Froude
Q 2 dA
F2 =
g A 3 dh
Dans Sinniger et Hager (1989), l'ensemble des solutions pour les courbes de remous
généralisées est présenté.
A l'aide de la Figure 3.64, une courbe de remous dans un canal prismatique peut être
déterminée très rapidement. Les solutions sont généralisées en utilisant des paramè-
tres adimensionnels par rapport à la hauteur uniforme.

3.4.5 Ecoulement sur le radier du seuil

1 sans perte de charge


H
2 )H
hc 2 avec pertes de charge

v 22 v12
2 1
w v 0 2 g 2 g

z h1
Référence

Figure 3.65 : Ecoulement sur le radier d'un seuil

En principe, l'écoulement sur le coursier est également une courbe de remous, c'est-
à-dire un écoulement accéléré. Souvent, le praticien ne s'intéresse qu'à la hauteur
d'eau h1 à l'aval du coursier.
• Si le coursier est assez court, les pertes de charge peuvent être négligées.
L'équation de Bernoulli s'écrit comme suit :
v 12
H + w + z = Ho = h 1 + = H1
2 g

avec : Q = v 1 (h1 b)

Q2
Ho = h1 + h1
2 g b 2 h12
• Si le coursier est assez long, les pertes de charge doivent être prises en
compte.
Pour la première conception du seuil, l'approximation suivante est souvent
utilisée :

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 135

v2
)h = 0.1
2 g
Pour obtenir des solutions plus précises où pour connaître les hauteurs
d'eau le long du coursier, la courbe de remous doit être déterminée. La
pente des coursiers est en général importante et doit être considérée dans
l'équation de Bernoulli. Il y a en plus l'entraînement d'air.

pente > 10 %
h 1 · cos ( ) h1 v21
H1 = z1 + h1 cos( ) +
2 g

Figure 3.66 : Equation de Bernoulli pour des pentes supérieures à 10%

3.4.6 Ressaut hydraulique

3.4.6.1 Introduction
En observant les conditions d'écoulement à l'amont et à l'aval d'un seuil, il a été
constaté qu'un ressaut peut s'établir. Si le régime d'écoulement dans le cours d'eau
sans seuil est fluvial, un ressaut se produit normalement à l'aval du seuil. Si l'écou-
lement est torrentiel, le ressaut est situé à l'amont du seuil.
Le ressaut est un écoulement stationnaire rapidement varié (cf. Figure 3.59). C'est
un phénomène local et assez complexe du point de vue de la théorie.
Dans quelles conditions, un ressaut hydraulique s'établit-il ? Le passage d'un écou-
lement torrentiel à un écoulement fluvial se fait toujours par un ressaut hydraulique,
c'est-à-dire par un changement brusque de la hauteur d'eau. Les deux hauteurs
d'eau à l'amont et à l'aval du ressaut sont appelées hauteurs conjuguées.

t
s au
res

fluvial h2
h1 torrentiel

Figure 3.67: Passage d'un écoulement torrentiel à un écoulement fluvial par un


ressaut hydraulique

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


136 Données de base

h2 F<1

v2
H= h+
2 g
h2
Q2
H= h+
2 g b2 h2
q2
H= h+
q2 > q 1 2 g h2
hc

h1 q2

F>1 q1
H
3
Hc = Hc=3/2h
hc c
2
123
section rectangulaire

Figure 3.68 : Relation entre la hauteur d'eau et la charge relative (section rectan-
gulaire)

Si la charge est représentée en fonction de la hauteur d'eau pour un débit et une


section donnés, une courbe de forme parabolique est obtenue. Pour une charge H
donnée, deux hauteurs d'eau sont possibles. Il s'agit de la hauteur d'eau corres-
pondant à l'écoulement fluvial et celle correspondant au régime torrentiel.
Exemple : Quel est l'effet d'un pilier situé dans un canal rectangulaire ?

q2 q2 > q 1
F<1 q1
q2 hp < h

h hp

Figure 3.69 : Effet d'un pilier sur l'écoulement dans un canal rectangulaire

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 137

3.4.6.2 Calcul du ressaut - hauteurs conjuguées


Comme mentionné ci-dessus, le début et la fin du ressaut sont définis par les hau-
teurs conjuguées. Le lieu où le ressaut s'établit est également connu. La relation en-
tre les hauteurs conjuguées peut être obtenue en appliquant le théorème de la quan-
tité de mouvement.

)H

v2
M2
v1 M1

Longueur du ressaut
1 2

Figure 3.70 : Théorème de quantité de mouvement entre la section amont et


aval du ressaut

M1 = M2
b h12 Q
M1 = g + Q v 1 avec v 1 =
2 b h1
b h22 Q
M2 = g + Q v 2 avec v 2 =
2 b h2
b h12 Q2 b h22 Q2
g + = g +
2 b h1 2 b h2
équation du deuxième degré pour h1 ou h2

h1 h2 2 Q2
h2 = + 1 +
2 4 g b 2 h1

h2 / h1 peut être exprimé par :


h2 1
= 1 + 1 + 8 F12
h1 2

Q2
avec : F12 =
g b 2 h13

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


138 Données de base

La longueur du ressaut peut être déterminée par la formule empirique suivante :


L = 5 ÷ 6 h2
La dissipation d'énergie ou l'efficacité du ressaut est présenté par la figure ci-
dessous:

Figure 3.71 : Efficacité; $=)H/H1 en fonction de F1 pour les profils rectangulaire


(M=0) et triangulaire (M ;)

La dissipation d'énergie pour des profils rectangulaires se calcule en approximation


comme suit :
2
)H 6 23
= 41 1 valable pour F1 < 2.5
H1 5 F1 2

1 < F1 < 1.7 ressaut ondulé

1.7 < F1 < 2.5 ressaut faible

2.5 < F1 < 4.5 ressaut oscillant

4.5 < F1 < 9 ressaut stationnaire

9 < F1 ressaut fort

Figure 3.72 : Type de ressaut en fonction du nombre de Froude

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 139

La Figure 3.72 donne une classification des ressauts selon le nombre de Froude
amont. Dans la mesure du possible, un ressaut stationnaire doit être envisagé pour
toute conception d'ouvrage, car ce type de ressaut garantit la dissipation d'énergie la
plus élevée.

3.4.6.3 Dimensionnement du bassin amortisseur


L'écoulement à l'intérieur d'un ressaut hydraulique est fortement turbulent avec des
rouleaux à haute vitesse. Pour éviter l'érosion au pied du seuil qui peut mettre la sta-
bilité de cet ouvrage en péril, le lit de la rivière doit être protégé par un bassin amor-
tisseur. Cet ouvrage a, par conséquent, deux objectifs :
• fixer le ressaut hydraulique à une position déterminée pour tous les débits;
• dissiper l'énergie de l'écoulement sans érosion du lit et des rives.
La position fixe du ressaut hydraulique permet également de réduire les dimensions
du bassin amortisseur.
Selon les conditions de l'écoulement à l'aval du seuil, les trois cas de la Figure 3.73
peuvent être distingués :

M 1 = M2
h1=h ’1 h2 hu

ressaut

M: impulsion totale (force de l’écoulement)


M1 > M2
h1 h2 hu h2 hu
h ’1 h ’1

disposition d’une
marche positive
ressaut
s

M 1< M 2
h ’1 h2 hu h ’1 h2 hu

diminuer la pente
ressaut noyé du coursier
h1

Figure 3.73: Différents cas de bassin amortisseur selon les conditions d'écoule-
ment à l'aval du seuil

Cas 1
L'impulsion totale de l'écoulement au pied du seuil M1 est égale à l'impulsion totale à
l'aval du ressaut M2 qui correspond aux conditions naturelles de l'écoulement. Ceci
se traduit également par le fait que la hauteur d'eau à l'aval du seuil correspond à la
hauteur conjuguée de la hauteur au pied du seuil :

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


140 Données de base

h u = h 2 = f (h1 )
Sous ces conditions, le début du ressaut hydraulique se situe au droit du pied du
seuil, ce qui est très favorable. Malheureusement, ce cas est très rare.

Cas 2
En général, l'impulsion totale au pied du seuil ne correspond pas à celle à l'aval du
seuil. La condition la plus défavorable est celle où l'impulsion totale M1 au pied du
seuil est supérieure à celle correspondant aux conditions d'écoulement naturelles à
l'aval du seuil M2. Cela signifie également que la hauteur d'eau à l'aval du seuil est
inférieure à la hauteur conjuguée de la hauteur au pied du seuil :
h u < h 2 = f (h1 )
Par conséquent, le ressaut se déplace vers l'aval jusqu'à ce que la courbe de remous
ait atteint h' qui est la hauteur conjuguée de h . La distance du ressaut au pied du
1 u
seuil se fait par un calcul de la courbe de remous. Le bassin amortisseur doit être
prolongé en conséquence pour garantir la protection du lit. Une telle solution n'est
cependant pas économique. La pose d'une marche positive à l'aval du bassin est
plus efficace. Cette marche force le ressaut à s'établir à l'aval du seuil en augmentant
la hauteur d'eau aval. La hauteur de la marche doit être telle que la nouvelle hauteur
aval corresponde à la hauteur conjuguée de la hauteur au pied du seuil. Elle peut
être déterminée à l'aide du théorème de la quantité de mouvement.
L'équation de la quantité de mouvement pour le volume de contrôle de la s'écrit
comme suit :

b ho2 6 h2 s 3
Mo = g + Q v o = Mu = g b 4 u + hu + s1 + Q vu
2 45 2 2 12
A l'aide de cette équation du second ordre, la hauteur nécessaire de la marche posi-
tive peut être déterminée. La marche influençant les conditions d'écoulement au pied
du seuil (ho, vo), le calcul est itératif.

~hu hu

ressaut
h0 s

(hu+ s)• •g

Figure 3.74 : Ressaut hydraulique sur une marche positive

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 141

Outre la marche positive, d'autres mesures constructives peuvent être utilisées pour
fixer la position du ressaut hydraulique au pied du seuil :
• seuil terminal
• blocs dissipateurs
• bassins dissipateurs non prismatiques
Ces solutions seront traitées plus en détail dans le chapitre sur les évacuateurs de
crues.

Cas 3
L'impulsion totale de l'écoulement au pied du seuil M1 est inférieure à l'impulsion M2
à l'aval du ressaut. Le ressaut est donc poussé en direction du seuil. Ce type de res-
saut est appelé ressaut noyé. La dissipation d'énergie est moins grande dans ce cas.
Cependant, ce type de ressaut se produit que sur des seuils de faible hauteur.
L'énergie à dissiper est par conséquent également faible. Cette situation est donc
moins grave que celle du cas 2.
Il y a peu de possibilités d'éviter un ressaut noyé. La diminution de la pente du cour-
sier est une solution. Une autre consiste en une marche négative au pied du seuil (cf.
Figure 3.75). Pour estimer la hauteur de cette marche négative, la même procédure
que pour la marche positive est utilisée.

Figure 3.75 : Marche négative au pied du coursier pour éviter un ressaut noyé

La longueur du bassin amortisseur est donnée par la longueur du ressaut en ajoutant


encore 20 à 40% de cette longueur.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


142 Données de base

Hydrologie
Détermination du débit Q et niveau d'eau à l'amont du seuil H , H , etc .
Q100 Q1000

Forme du déversoir standard:choix H/HD H / H D = 1 . 0 ÷1 .3


C d / C dD = (H / H D )
0. 12
coefficient de débit Cd

Equation de débit pour le déversoir : Calcul de la largeur


effective totale Btot ou calcul de la charge H maximum sur le Q = C d B tot 2 g H3 / 2
déversoir

Effets des piliers Réduction de Btot B


etot
= (1n42
+ 1)43b 2 n K p + K p H
1 2
B tot

Courbe de remous à l'amont du seuil

Q2
H o = h1 + + )H
2 g b 2 h12
Calcul de la hauteur d'eau au pied du coursier h1 coursier court : )H = 0
v2
coursier long : )H 0.1 (Approximation)
2 g

Comparaison de l’impulsion totale (force de l’écoulement) au h2


M= g B+ Q v
pied du coursier M1 avec celle à l'aval du ressaut M2 2

M1 = M 2 OK
M1 > M 2 marche positive
M1 < M 2 réduire la pente du coursier ou marche
négative

Détermination de la longueur du bassin amortisseur L tot = 5 ÷ 6 h 2 + 20 à 40 %

Figure 3.76 : Récapitulatif de la démarche pour le dimensionnement d'un seuil en


rivière

La Figure 3.76 présente un résumé de la démarche pour le dimensionnement hy-


draulique s'un seuil ou barrage en rivière.

3.5 Aspects constructifs


3.5.1 Protection du radier contre l'érosion
Lorsque l'eau transporte du sable et du gravier, elle dispose d'un pouvoir érosif et
abrasif important. Pour éviter une détérioration du radier, des précautions sont à
prendre. Plusieurs solutions peuvent être envisagées :
• béton de haute qualité : teneur en ciment élevée, granulats durs (basalte),
armature en treillis près de la surface du béton
• béton armé de fibres
• protection par pierres de taille en granite ou en basalte : cette solution était
souvent utilisée autrefois, aujourd'hui elle s'avère trop coûteuse
• couche de béton de résine époxy sur la surface (5 à 10 cm)
• protection par blindage métallique
Dans ce cas une attention particulière est à porter aux vibrations et aux

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 143

sous-pressions de l'écoulement. La fixation du blindage est très importante.


Tout espace entre le blindage et le béton est à éviter également, car les
pressions dynamiques de l'eau peuvent s'y propager.
• protection par des rails de chemin de fer fixés sur le radier en direction de
l'écoulement
Cette solution a été généralisée en Inde par exemple.
• protection en revêtement en bois (blocs ou planches)
Cette solution est souvent utilisée pour des faibles hauteurs de seuils. Le
bois étant élastique et lisse, il favorise le glissement des cailloux
• protection par des carreaux en céramique très résistants et durs
En cas de transport de sédiment important, les parties inférieures des parois et des
piliers doivent également être protégées.

3.5.2 Ecrans d'étanchéité


Selon la perméabilité du terrain de construction du seuil, l'écoulement souterrain est
plus ou moins important. Le résultat est une perte d'eau, des sous-pressions agis-
sant sur l'ouvrage et dans certains cas un risque de mise en boulance ou de renard.
La perméabilité du sol ou du rocher étant connue, le réseau d'écoulement peut être
calculé ou tracé.
Un exemple d'écoulement souterrain simple est présenté sur la Figure 3.77. Une fois
le réseau orthogonal des lignes de courant et des lignes équipotentielles tracé, le
débit spécifique peut être estimé en appliquant la loi de Darcy :
m
q= k )H
n
où : m : nombre de tubes de courant
n : nombre de tranches équipotentielles
Le gradient hydraulique le plus grand se trouve à l'endroit où le réseau est le plus
serré. En connaissant la largeur du tube de courant, le gradient peut être obtenu
par :
q )H
i= =
m s k n s
Pour éviter le phénomène de la boulance, le gradient maximum local doit être infé-
rieur à une valeur critique qui dépend des caractéristiques du sol.
Les écrans d'étanchéité ont deux effets :
• diminution de la perméabilité
• prolongation du chemin d'écoulement souterrain
Un écran d'étanchéité réduit donc d'une par les pertes d'eau et d'autre part le gra-
dient hydraulique

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


144 Données de base

Couche
perméable

Réseau
orthogonal

Figure 3.77 : Réseau d'écoulement souterrain sous un seuil

L'écran est placé au-dessous du déversoir, c'est-à-dire dans la partie amont du seuil.
Selon la situation, il est prolongé latéralement ou vers l'amont le long des rives. Dans
la mesure du possible, la profondeur de l'écran est choisie telle qu'il atteigne une
couche étanche.

Écran d’étanchéité

Figure 3.78: Ecrans d'étanchéité

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 145

écran d’étanchéité

couche assez étanche

Figure 3.79 : Position d'un écran d'étanchéité au-dessous d'un seuil

Les possibilités pratiques pour réaliser un écran d'étanchéité dans un sol sont les
suivantes :
• paroi en béton réalisée en fouille ouverte
• rideau de palplanches
• pieux sécants ou jointifs mis en place par une méthode conventionnelle (fo-
rage) ou par jetting
• paroi moulée réalisée par forage
• injection réalisée par forage
Dans le rocher, seules les injections peuvent en général être utilisées.

3.5.3 Analyse de stabilité

3.5.3.1 Système statique - structure porteuse


Le système statique ou la structure porteuse d'un seuil ou d'un barrage mobile en
rivière dépend fortement de l'exécution des travaux, c'est-à-dire du mode de cons-
truction.
Si le seuil doit être construit en présence de l'eau, la réalisation de l'ouvrage se dé-
roule en plusieurs étapes.
Prenons le cas d'un seuil à trois passes munies de vannes (cf. Figure 3.80).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


146 Données de base

enceinte de la fouille
(palplanches)

pilier 2
HQ
3

étape 1 étape 2 étape 3

Figure 3.80: Etapes de construction d'un seuil à trois passes munies de vannes

Avec ce mode de construction, les piliers et les radiers ne sont pas connectés mais
séparés par des joints de construction (cf. Figure 3.81).

radier indépendant des piles

rubanwaterstop
d’étanchéité

pile seuil, coursier, pile


radier

joints de construction

Figure 3.81 : Joints de construction entre les piliers et les radiers

Statiquement les radiers sont traités comme des poutres ou dalles et les piliers
comme des carreaux ou des parois.
Si la rivière est dérivée pendant l'exécution des travaux ou si la construction du seuil
ou du barrage se fait en-dehors du lit du cours d'eau, les piles et les radiers peuvent
être bétonnés sans joint (cf. Figure 3.82).

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Données de base 147

pendant la construction

après la construction

monobloc cadre

waterstop

pile seuil, coursier, pile seuil, coursier, pile


radier radier
joint de dilatation

Figure 3.82: Construction d'un seuil à sec et ses joints de dilatation

3.5.3.2 Cas de charge


Les cas de charge déterminants résultent des diverses conditions d'écoulement pen-
dant la construction, l'exploitation et le maintien de l'ouvrage. Pour les barrages
mobiles, le cas d'une opération symétrique des vannes doit être distingué d'une
opération asymétrique des vannes.
Pour les cas de charge déterminants, il faut garantir un coefficient de sécurité suffi-
sant :
• à la rupture
• au renversement/basculement
• au glissement
• au tassement, le tassement différentiel étant particulièrement dangereux.
Le calcul des contraintes et des déformations et par conséquent de la sécurité à la
rupture dans la structure se fait aujourd'hui avec la méthode des éléments finis. La
même méthode est également utilisée pour le calcul des tassements. L'analyse de la
stabilité de l'ouvrage se fait en contrôlant la sécurité au renversement et au glisse-
ment.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


148 Données de base

3.5.3.3 Forces agissant sur les seuils


Avant de définir la sécurité au renversement et au glissement, les forces agissant sur
les seuils doivent être analysées. La Figure 3.83 montre l'exemple d'un seuil simple
non-contrôlé par des vannes.

Pilier

Ev
Eo
Pseuil
Eu
Psol
To Tu

Figure 3.83 : Forces agissant sur un seuil simple non-contrôlé par des vannes

Il faut considérer les forces suivantes :


• la poussée de l'eau :
composantes horizontales agissant sur le seuil à l'amont Eo et à l'aval
Eu
composante verticale de l'eau Ev s'écoulant par-dessous le seuil
Cette poussée est souvent négligée pour être du côté de la sécurité
• le poids du seuil et le poids du sol entre les parafouilles (pour le glissement
uniquement)
• la poussée des terres à l'amont et à l'aval du seuil.
Cette poussée est souvent mal connue et petite par rapport à la poussée
d'eau, elle peut donc être négligée.
• le poids des vannes.

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Données de base 149

3.5.3.4 Sécurité au renversement


La sécurité au renversement est définie par le quotient entre les moments stabili-
sants et les moments renversants :
MStab
SR =
MRe nv
Les moments sont calculés par rapport au point de la fondation situé le plus à l'aval.
Les moments stabilisants tournent vers l'amont, les moments renversants vers l'aval.
Pour l'exemple de la Figure 3.83 l'équation s'écrit :
MP + MEu
SR = en négligeant la poussée des terres.
MEo + MS

Si la résultante de toutes les forces passe par le noyau de la semelle de fondation, la


pression entre la fondation et le sol est partout supérieure à zéro, c'est-à-dire en
compression. Dans ce cas, la sécurité au renversement est supérieure à 1.5. Pour
limiter les compressions dans le sol, un coefficient de sécurité de 2.0 est exigé en
général pour des fondations sur terrain meuble. Pour les fondations sur rocher un SR
de 1.5 est suffisant.
Si le déversoir du seuil est contrôlé par des vannes, la stabilité latérale des piles est
la plus critique. Le cas de charge déterminant se manifeste normalement pendant la
révision des vannes.

Niveau des crues pilier

Section vidée par pompage


E

P Coursier
E Ei
N N
C
O

Figure 3.84 : Forces agissant sur une pile pendant la révision d'une vanne

Sur la Figure 3.84 les forces agissant sur une pile pendant la révision d'une vanne
sont présentées. Cette figure montre une coupe où la passe à droite du pilier est vi-
dée par des pompes après l'installation des batardeaux à l'amont et à l'aval de la
vanne.

3.5.3.5 Sécurité au glissement


La sécurité au glissement est calculée par rapport à une surface de glissement. En
général, cette surface est identique à l'interface de la fondation de l'ouvrage et du sol.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


150 Données de base

Si la semelle de fondation est équipée de parafouilles à l'amont et à l'aval, la surface


de glissement se trouve au fond de ces derniers.
La sécurité au glissement se calcule par le quotient entre la résistance de la fonda-
tion et les forces motrices (déstabilisantes) :
Résistance R
SG = =
Forces déstabilisantes E
La résistance d'une surface au glissement s'exprime par le frottement et la cohésion :

R= N tan '' + c ' A

où : N : forces perpendiculaires à la surface de cisaillement


'
c : cohésion en présence d'eau
'
' : angle de frottement en présence d'eau
A : surface
' '
C et ' sont des paramètres du sol obtenus par des essais géotechniques. La force
motrice correspond à la résultante des forces agissantes, parallèle à la surface
considérée. Si la fondation de l'ouvrage est horizontale, la force motrice ne consiste
qu'en la poussée de l'eau.
La sécurité au glissement du seuil simple de la Figure 3.83 devient :

SG =
(PTOT (+ E v ) S ) tan ''+c ' A
Eo Eu
Le coefficient de sécurité adopté est (cas de charge normal):
• SG 1.5 à 3 en négligeant la cohésion
• SG 3.5 avec cohésion
Dans le cas d'un barrage mobile, c'est-à-dire équipé de vannes, le cas de charge
déterminant pour le glissement d'une pile se présente pendant l'exploitation, lorsque
la vanne est fermée pendant l'étiage.
Les forces agissantes sur une pile sous ces conditions sont présentées sur la Figure
3.85.
En analysant la formule du coefficient de sécurité au glissement, les possibilités
constructives pour augmenter cette sécurité peuvent être trouvées : la résistance au
glissement doit être augmentée. Il existe deux possibilités pour ceci (Figure 3.86) :
• l'augmentation du poids
• la diminution des sous-pressions.
L'augmentation du poids peut se faire simplement en agrandissant les dimensions du
seuil, c'est-à-dire l'épaisseur des piles et du radier. Cette mesure n'étant pas très
économique, la surface de glissement est abaissée par des parafouilles. La force
normale est donc augmentée par le poids du sol compris entre les parafouilles.
Une réduction des sous-pressions est réalisée par des écrans d'étanchéité, souvent
combinés avec des drains. L'utilisation de drains se fait avec précaution à cause du
risque de mise en boulance.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Données de base 151

Niveau des crues

PV
Niveau
d’étiage
E P
P EV

S E S

Figure 3.85 : Forces agissant sur une pile pendant l'étiage avec vanne fermée

Augmentation du poids Diminution des sous-pressions

Ecran
S
A
P Conduite de drainage

Filtre

A S
PS Surface de Ecran
cisaillement

Figure 3.86 : Possibilités constructives pour augmenter la sécurité au glissement

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


Seuil et barrage en rivière 153

4 PRISE D'EAU

4.1 Introduction et classification générale


4.1.1 Eléments des aménagements hydrauliques
Tous les ouvrages pour l’utilisation de l’eau sont équipés d’une prise d’eau. Elle est
utilisée pour extraire la matière première, l’eau. La prise d’eau est en général le pre-
mier ouvrage dans un aménagement pour l’exploitation de l’énergie hydraulique,
pour l’irrigation, pour l’approvisionnement en eau ou pour la navigation.

rivi
ère

Ouvrages
Ouvrages d’adduction
de fuite
(conduites d’amenée)

Seuil/ Prise Ouvrage Ouvrage de


Réservoir Barrage Prise d'eau
barrage d'eau d'exploitation restitution

Figure 4.1: Schéma d’un aménagement hydraulique

Schématiquement, tous les aménagements hydrauliques se composent des élé-


ments indiqués sur la 193 :
• la prise d’eau, souvent combinée avec un seuil ou barrage
• les ouvrages d’adduction (conduites d’amenée)
• éventuellement un réservoir
• l’ouvrage d’exploitation (centrale hydroélectrique, écluse, etc.)
• les ouvrages de fuite
• l’ouvrage de restitution.
Le but d’une prise d’eau est donc la dérivation des eaux vers un ouvrage hydrauli-
que.

La conception et le dimensionnement d’une prise d’eau est une des tâches les plus
difficiles et délicates à résoudre par l’ingénieur hydraulicien. Il se voit confronté aux
problèmes suivants :

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


154 Seuil et barrage en rivière

• captage de l’eau et en même temps


• élimination des corps flottants et solides
Ces deux exigences étant contradictoires, la tâche est vraiment délicate. La concep-
tion d’une prise d’eau n’est pas seulement une question des connaissances, mais
surtout de l’expérience et de l’imagination.
La classification des prises d’eau se fait en général de la manière suivante :
• prises d’eau sur les cours d’eau
• prises d’eau dans les lacs et réservoirs
Les premières sont uniquement des prises de surface, les secondes des prises à
faible ou grande profondeur. La Figure 4.2 et la Figure 4.3 représentent le schéma
de ces deux types de prises.

4.1.2 Prise de surface (sur les cours d’eau)

seuil/barrage purge Prise d’eau


vanne

Q Prise seuil
d’eau

Figure 4.2: Schéma d’une prise de surface sur un cours d’eau

Si le débit dérivé est assez important par rapport à l’apport du cours d’eau, un seuil
ou un barrage est indispensable pour forcer l’eau dans la prise d’eau. Le but d’un
seuil ou d’un barrage est donc de :
• garantir un niveau minimum
• régler le débit (rôle d’un éventuel réservoir)
• éventuellement création d’une dénivellation

4.1.3 Prises à faible profondeur (dans les réservoirs)


On distingue les prises horizontales et verticales (cf. Figure 4.3). "Faible profondeur"
signifie que la hauteur d'eau au-dessus de la prise est du même ordre de grandeur
que la hauteur de cette dernière.
Quelques aspects hydrauliques de ces types de prises sont traités dans le chapitre
18 de Sinniger et Hager (1989). Il traite également les prises à grande profondeur.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 155

vanne

Figure 4.3: Types de prises d’eau à faible profondeur (dans les lacs et réser-
voirs)

4.1.4 Prises à grande profondeur (dans les réservoirs)

Figure 4.4: Prise à grande profondeur dans un réservoir (barrage-voûte avec


vidange à mi-hauteur)

4.2 Captage possible


4.2.1 Prises d'eau en rivière
Pour le dimensionnement d'une prise d'eau, on utilise la courbe des débits classés.
L'apport en eau est divisé en deux parties, une partie représente l'eau utilisable, l'au-
tre l'eau non utilisable (cf. Figure 4.4)
L'eau utilisable est donc égale à l'apport total moins le débit de dotation. De plus, le
captage est limité par le débit équipé. Le degré d'équipement d'une prise d'eau est
défini par le quotient entre le débit équipé et le module :
Qe débit équipé
degré d' équipement = =
module débit moyen annuel
Le temps pour lequel le débit dans le cours d'eau est supérieur au débit équipé est
nommé temps d'utilisation te (cf. Figure 4.5).
Le débit restitué
Le débit restitué, c'est à dire sa valeur, est souvent la pièce de résistance dans un
projet. Un équilibre entre l'utilisation de l'eau et les besoins d'une rivière vivante doit

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


156 Seuil et barrage en rivière

être trouvé. A part les exigences écologiques propres à chaque cours d'eau, les be-
soins d'autres utilisateurs de l'eau à l'aval de la prise d'eau doivent être considérés :
• irrigation
• refroidissement
• approvisionnement en eau potable et industrielle
• pêche
• faune et flore
• détente.
De plus, le transport solide, le renouvellement de l'eau souterraine et la dilution des
eaux usées doivent être garantis par un débit minimum.

Q
1 captage possible, eau utilisable
2 eau déversée (crues)
3 fuite, eau de purge, eau restituée, dotation

2 module
Q e,
débit équipé 3

1
t
0 te 365

Figure 4.5: Répartition de l'apport d'eau à la prise d'eau représenté à l’aide de la


courbe des débits classés

L'eau de purge
Pour éliminer les corps flottants et solides devant la prise d'eau, des purges périodi-
ques sont effectuées.
Les fuites
Les fuites proviennent de l'écoulement souterrain autour de l'ouvrage et des organes
de fermeture perméables.
Le débit équipé
La prise d'eau est dimensionnée pour le débit équipé. Comme toutes les caractéristi-
ques de dimensionnement d'un projet, le débit équipé est fixé par des considérations
économiques. La démarche suivante est suivie : le projet est conçu pour différents
débits équipés (3 à 4), puis, les coûts de construction de ces variantes sont évalués.
En outre, on estime les rendements annuels pour toutes les variantes du projet. Le
taux d'escompte permet de calculer la valeur actuelle des rendements annuels selon
la durée de l'exploitation du projet. Finalement, la différence entre la valeur actuelle
et le coût de construction est déterminée. La différence la plus élevée correspond au
plus grand bénéfice du projet et définit le débit équipé optimum.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 157

rendements annuelles
valeurs actuelles des
coûts de construction

Qe Qe
Q1 Q2 Q3 Q4 Q1 Q2 Q3 Q4

Q optimum
bénéfice

Qe
Q1 Q2 Q3 Q 4

Figure 4.6 : Détermination du débit équipé optimum selon le critère économique

4.2.2 Prises d'eau en lacs/réservoirs


Les problèmes de prise d'eau dans les lacs ou réservoirs ne sont pas examinés avec
la courbe des débits classés, mais avec la courbe des débits cumulés ou les moyen-
nes mensuelles, car le lac ou le réservoir a une fonction d'accumulation d'eau (cf.
Figure 4.7). Il n'existe par conséquent pas de corrélation directe entre le débit captu-
ré et le débit instantané dans le cours d'eau.
L'eau utilisable
L'eau utilisable correspond à la différence entre l'apport total et l'eau non utilisable. A
part le débit des affluents du lac ou du réservoir, il faut également tenir compte des
apports souterrains, des précipitations sur la surface du lac, de l'évaporation et des
glaciers.
L'eau de purge
Le volume d'eau de purge est en général très petit, car la prise d'eau dans le lac ou
le réservoir n'est que très peu affectée par les corps flottants et solides.
Le débit restitué
Concernant le débit restitué, les mêmes remarques que pour les prises d'eau en ri-
vière peuvent être faites.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


158 Seuil et barrage en rivière

Q
moyennes mensuelles
[m3/s]

débit non utilisable


débit utilisable

J F M A M J J A S O N D

V
courbe des débits cumulés
[m3]

apport annuel

débit non utilisable

débit utilisable

J F M A M J J A S O N D

Figure 4.7 : En haut: débit mensuel. En bas: courbe des débits cumulés

4.3 Prise d'eau en rivière


4.3.1 Rôle, disposition, combinaison avec un barrage/seuil
Comme déjà mentionné, une prise d'eau en rivière doit être conçue de telle manière
que l'eau soit captée sans intercepter les corps flottants et solides. Cette tâche est
délicate et difficile à résoudre. La plupart des erreurs commises par les ingénieurs
dans le domaine des constructions hydrauliques concernent les prises d'eau. Mal-
heureusement, il existent de nombreux ouvrages qui ne fonctionnent pas sans dé-
faut.
Pour choisir la disposition d'une prise d'eau, il faut disposer de bonnes connaissan-
ces du caractère de la rivière, c'est-à-dire :
• du régime des débits et des crues (hydrologie)
• du transport solide :
débit et l'apport en solides
composition des matériaux

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 159

• de la morphologie :
zones d'érosion
zones d'alluvionnement.
Pour les ouvrages importants, la solution optimale pour la disposition est souvent
recherchée par des essais sur modèle réduit en laboratoire.
Si une grande partie du débit de la rivière doit être dérivée, la combinaison de la
prise d'eau avec un seuil ou un barrage pour garantir un niveau minimum est indis-
pensable. Ce point est traité ci-après.
4.3.2 Classification des prises d’eau en rivière
Les prises d'eau en rivière peuvent être classées comme suit :
• prise d'eau latérale
• prise d'eau frontale
• prise d'eau par au-dessous.
Chacun de ces trois types de prise est adapté à des conditions topographiques et
morphologiques différentes de la prise d'eau comme présenté dans le Tableau 4.1.
• La largeur de la rivière ne doit en général pas dépasser 50 m. S'il est éco-
nomique de construire un barrage plus long, cette prise peut être utilisée
dans des rivières jusqu'à 500 m de largeur.
• Une prise latérale munie d'une passe à gravier fonctionne également mieux
sur un tronçon en courbe de la rivière. Moyennant des mesures constructi-
ves, l'implantation sur un tronçon rectiligne est possible.

Transport so-
Pente J de la ri- Largeur B de la Situation/plan
lide de la ri-
vière rivière de la rivière
vière
Prise d'eau Charriage fort,
latérale Pour toutes les Courbé très fa- suspension fai-
0.001% < J < 10% ble
Utilisation de largeurs vorable
l'effet de coude (Qe < 50% Qcr )
B < 50 m Rectiligne pos- Charriage fort
sible avec des avec purge
0.01% < J< 10% (B < 500 m)
Passe à gravier mesures continue sus-
à chenal pension forte
Prise d'eau B < 50 m Rectiligne très Charriage très
frontale favorable, cour- fort avec purge
(B < 500 m, si le
0.01% < J < 10% barrage de la ri- bée possible continue, sus-
Passe à gravier vière est économi- avec des mesu- pension très
à tunnel que ) res forte

Prise d'eau par B < 50 m


J > 10% Charriage fort,
au-dessous
(B < 500 m raison- Rectiligne (grains grossiers
Très favorable,
nable avec barrage seulement)
possible dès 2.5%
partiel de la rivière)

Tableau 4.1 : Classification des prises d'eau en rivière

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


160 Seuil et barrage en rivière

Prise d'eau latérale profitant de l'effet de courbe


• Cette prise d'eau utilise l'effet favorable d'un écoulement en courbe.
• Une prise d'eau implantée sur la rive concave profite du courant secondaire
qui dévie le charriage vers la rive intérieure de la courbe. Ce phénomène
sera discuté plus en détail ci-après.
• Cette prise d'eau peut être utilisée avec une grande gamme de pentes et
pour toutes les largeurs d'une rivière,
• Un fort apport en charriage peut être maîtrisé, mais le débit de matières en
suspension doit être faible.
• L'expérience a montré que le débit équipé doit être inférieur à 50% du débit
critique pour éviter que le charriage entre dans la prise. Le débit critique ca-
ractérise le début de charriage dans une rivière (cf. chapitre 2.2.4)
Prise d'eau munie d'une passe à gravier
• Si la prise d'eau est équipée d'une passe à gravier, un fort charriage et un
apport en suspension important peuvent être maîtrisés pour tous les débits
dérivés. C'est-à-dire, il n'y a pas de restriction sur le rapport débit dérivé –
débit critique
• La pente minimum de la rivière doit être de 0.01% afin de disposer d'une
chute suffisante pour la purge.
Prise d'eau frontale
• Ce type de prise doit obligatoirement être muni d'une passe à gravier.
• Contrairement à la prise latérale, la prise frontale est bien adaptée aux
tronçons rectilignes.
• Une purge continue est nécessaire pour évacuer le charriage et les maté-
riaux en suspension.
• Raisonnablement, la largeur de la rivière ne doit pas dépasser 50 m.
Prise d'eau au-dessous
• Ce type de prise est avant tout utilisé dans des rivières à forte pente, c'est-
à-dire dans des torrents.
• La largeur du torrent est limitée à 50 m. Dans des torrents plus larges, l'im-
plantation est pratiquement impossible.
• La prise au-dessous est adaptée aux apports importants par charriage de
matériaux pas trop fins.
• L'implantation d'une prise d'eau au-dessous exige un tronçon rectiligne du
cours d'eau.
Les paragraphes suivants présentent les aspects constructifs de ces trois types de
prises d'eau.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 161

4.3.3 Prise d'eau "latérale"


Parmi les prises d'eau latérales, on distingue les prises qui utilisent l'effet de coude et
celles qui sont munies d'une passe à gravier.

4.3.3.1 Principe de la disposition en courbe


Comme mentionné ci-dessus, la prise d'eau latérale fonctionne le mieux si elle est
implantée sur la rive extérieure d'une courbe. Ceci est dû au courant secondaire de
l'écoulement dans une courbe.
L'écoulement provenant d'un tronçon rectiligne se heurte contre la rive extérieure à
l'entrée en courbe. Ce choc détourne l'écoulement vers l'intérieur de la courbe. Ce
phénomène est comparable au choc d'une boule de billard contre la bande.

déposition des matériaux

a érosion des rives

Section a - a

bc
rive extérieure rive intérieure
g

écoulement de surface acélération latérale v2


bc =
écoulement au fond avec tansport solide (force centripète) r

Figure 4.8: Courant secondaire dans une courbe

L'écoulement est soumis à une accélération latérale due à la courbure et par consé-
quent à une force centripète. Cette force centripète engendre un courant secondaire
qui se dirige au fond vers l'intérieur de la courbe. Le charriage étant transporté au
fond de la rivière est également dévié vers l'intérieur de la courbe. La preuve que ce

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


162 Seuil et barrage en rivière

phénomène peut aisément être rencontré dans la nature. Des bancs de graviers et
de sable peuvent être observés à l'intérieur des courbes, tandis que la rive extérieure
montre des signes d'érosion.
Pour la disposition d'une prise latérale, l'ingénieur peut se servir de cet effet de
courbe.

Une prise d'eau latérale ne doit jamais être implantée sur une rive
convexe.

4.3.3.2 Eléments essentiels d’une prise d’eau latérale


Les éléments essentiels d'une prise d'eau latérale sont :
• seuil/barrage mobile, équipé de vannes de déversoir, d'un bassin amortis-
seur, de piles et de parois latérales
évacuation des crues et de l'eau excédentaire
maintenir un niveau minimum devant la prise d'eau
• passe à gravier à chenal avec un seuil de hauteur de 1.0 à 1.5 m
La pente du chenal doit être au minimum de 2%, mais 5% sont préférables.
La vanne de purge ne doit pas être trop large pour que la vitesse d'écoule-
ment soit suffisante pour entraîner les matériaux et pour que la purge ne
provoque pas une perte de débit trop importante. Le fond du chenal doit
être protégé contre l'abrasion à l'aide d'un béton de haute qualité, un revê-
tement en bois, des pierres de taille ou autres. Une paroi plongeante im-
mergée de 0.8 à 1.0 m forme une barrière à flottants pour qu'uniquement de
l'eau claire entre dans la prise.
évacuation des graviers déposés devant la prise d'eau
opération de purge continue ou discontinue selon l'apport du char-
riage
• prise d'eau avec une vitesse d'approche de l'écoulement devant la grille de
0.5 à 0.8 m/s
En outre elle est munie d'une marche de 0.5 m environ (plus haute que le
seuil de graviers) devant la grille, une grille avec une plate-forme de net-
toyage, un batardeau en aval et une goulotte pour la purge des détritus vers
l'aval du barrage mobile ou dans un container
arrêter les corps flottants de densité voisine de l'eau (bois, feuilles
mortes)
empêcher les poissons de rentrer dans la prise d'eau (grilles fines)
Si le seuil ou le barrage n'est pas équipé par des vannes, la prise d'eau elle-même
doit être équipée d'une vanne de réglage située à l'amont de la grille. Cette dernière
peut par exemple être combinée avec le seuil de graviers et la paroi plongeante.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 163

Vue en plan

vannes de déversoir
b
bassin amortisseur
nd b seuil de barrage mobile
de fo
o u lement
éc
éc
de oule
su me
rfa nt
ce
c
a
r
avie
à gr l
s e
p a s ch e n a vanne de purge
seuil de graviers à
c
plate-forme pour nettoyage
marche
batardeaux
a

grille goulotte
Coupe a - a : Prise d’eau
paroi plongeante
0.8 - 1.0 m
batardeaux
seuil de graviers rainure

1.0 - 1.5 m marche


vanne de purge
chenal de dégravage

Coupe b - b : Seuil/barrage mobile Coupe c - c : Passe àgravier


batardeaux batardeaux

chenal
de dégravage vanne de purge

5% protéction contre l’abrasion

Figure 4.9 : Eléments essentiels d'une prise d'eau latérale

4.3.3.3 Effet du charriage et des purges sur le captage


Comme mentionné ci-dessus, une prise d'eau est concernée par le charriage, si une
grande partie du débit de la rivière doit être captée. L'expérience a montré que le
charriage ne pose pas de problèmes pour une prise d'eau à condition que le débit
équipé ou dérivé soit inférieur à 50% du débit critique qui indique le début de char-
riage. Cette condition est démontrée à l'aide d'une situation hydrologique concrète.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


164 Seuil et barrage en rivière

La Figure 4.10 montre la courbe des débits classés caractérisant une rivière. A gau-
che, le cas d'un débit équipé inférieur à 50% du débit critique est montré. Dans ce
cas, il n'y a pas d'interception du charriage par la prise et par conséquent pas de
perte d'eau pendant les périodes de charriage. En principe, aucune mesure construc-
tive telle que passe à gravier n'est nécessaire.
D'autre part, une prise d'eau sans dispositif constructif pour les purges et un débit
inférieur à 50% du débit critique, ne peut exploiter qu'une partie du débit. Tous les
débits dépassant 50% du débit critique doivent être évacués (rester dans la rivière)
pour éviter que des matériaux solides ne soient entraînés par l'eau captée. Ce cas
conduit à des pertes de débit assez importantes comme cela est présenté au milieu
de la Figure 4.10.
S'il existe des dispositifs de purge, par exemple une passe à gravier à chenal, le dé-
bit perdu est faible (cf. à droite sur la Figure 4.10). Il correspond à l'eau de purge qui
n'atteint pas de grands volumes. L'avantage de cette solution est mis en évidence
sur la Figure 4.10.

Cas A: Qcr > 2 Qe Cas B: Qcr < 2 Qe Cas C: Qcr < 2 Qe


sans purge(sans passe à gravier) avec purge(avec passe à gravier)
Pas de réduction du Réduction importante du Réduction faible du captage
captage par le charriage captage par le charriage par la purge pendant le charriage
Q Q Q

Courbe des débits classés

Eau de dotation
Eau de purge pour
Eau utilisable 2Q e Débit perdu 2Qe
la passe à gravier
Q cr
2Q e Q cr Q cr
50%
Qe Qe
Qe
50%
T T T
Charriage 365 Charriage 365 Charriage 365

Figure 4.10: Perte d'eau pour la purge pour une prise d'eau sur une rivière carac-
térisée par une courbe de débits classés

4.3.4 Grilles

4.3.4.1 Types de grilles et leurs fonctions


Selon l'espacement entre les barreaux on distingue :
• des grilles fines : 5 – 50 mm
• des grilles grossières : 100 – 300 mm
Les grilles doivent protéger les équipements mécaniques d'un ouvrage qui sont
sensibles aux corps flottants, par exemple les turbines, les pompes et les orga-
nes de réglage.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 165

Les écartements maximaux entre les barreaux sont définis en général par les manu-
facturiers des turbines. Les valeurs typiques sont :
• turbines Pelton : 20 – 30 mm
• turbines Francis : 40 – 50 mm
• turbines Kaplan : 80 – 100 mm
Les fonctions d'une grille sont les suivantes :
• essentiellement arrêter les corps flottants
• empêcher les poissons d'entrer dans la prise d'eau (espacement < 30 mm)
• éviter que les cailloux qui n'ont pas été piégés par la passe à gravier n'en-
trent dans la prise d'eau
Une grille est composée de barreaux principaux disposés verticalement et portant
dans la direction de l'écoulement. Ces barreaux principaux sont soutenus latérale-
ment par des supports horizontaux. En général, il s'agit de barreaux ronds, de sec-
tion pleine ou creuse.
Les grilles de grande surface sont constituées de plusieurs éléments. Chaque élé-
ment comporte 10 à 15 barreaux principaux (cf. Figure 4.11).

barreaux principaux,
éventuellement de forme
hydrodynamique
supports horizontaux pannes (supports intermédiaires)
(en général < 20 - < 40 mm)

Figure 4.11 : Eléments d'une grille

4.3.4.2 Pertes de charge à la grille


Les pertes de charge à la grille sont influencées par (cf. Figure 4.12) :
• l'épaisseur et l'espacement des barreaux
• la forme des barreaux
• l'orientation de la grille par rapport à l'écoulement
• l'obstruction par les corps flottants
La perte de charge à la grille est exprimée par la formule bien connue pour les pertes
locales. Elle est proportionnelle au carré de la vitesse amont.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


166 Seuil et barrage en rivière

Le coefficient de perte de charge &g est composé par plusieurs facteurs (selon Kirs-
chner et Mosonyi):
1. facteur de forme des barreaux principaux g

2. facteur de perte de charge & qui est une fonction de la longueur par rapport
à l'épaisseur du barreau et le rapport entre la section d'écoulement à tra-
vers les barreaux et la section aval
Pour la plupart des applications pratiques, ce coefficient peut être calculé
par la formule indiquée à la Figure 4.13.
3. coefficient de grille c qui vaut 1 pour une grille non obstruée
Pour une grille à nettoyage mécanique, donc régulier, l'obstruction admise
est plus petite que celle d'une grille à nettoyage manuel.
4. facteur de direction de l'écoulement =
Les pertes de charge sont plus grandes, si l'écoulement d'approche n'est
pas parallèle à la grille.

Figure 4.12: Paramètres pour le calcul de perte de charge d'une grille

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 167

: facteur de forme du barreau.


v 02 g
)H = % g
2 g
%g = g & c (sin 0 ) =

& : facteur de perte de charge.

&= f L Ag g 1.0 0.76 0.76 0.43 0.37 0.30 0.74


,
d A0
L a> c : coefficient de grille
Pour 5 et 0.5:
d b c = 1 : grille non obstruée.
1.1 c < 1.3 : grille à nettoyage mécanique.
<
4 /3

&=7 a 1
3 b 1.5 < c < 2 : grille à nettoyage manuel.

d/a

Figure 4.13: Calcul de perte de charge d'une grille : les valeurs du tableau ci-
dessus pour = ne sont théoriquement valable que pour des barreaux
rectangulaires, mais l’expérience a montré qu’elles donne une très
bonne approximation pour les autres formes

4.3.4.3 Sollicitation de la grille


Une grille est sollicitée par les effets suivants :
• obstruction (poussée de l'eau)
• nettoyage (impacts locaux)
• vibrations (dues à l'écoulement)
Les grilles sont dimensionnées pour une perte de charge de 2 à 3 m perpendiculaire
à la grille, c'est-à-dire une poussée de 3 t/m2. De plus, un impact local dû au net-
toyage mécanique de la grille par des dégrilleurs est considéré. Les forces importan-
tes agissent pendant le nettoyage, si les corps flottants sont coincés dans la grille.
Pour le dimensionnement, une force de 3 à 5 t agissant en direction d'un barreau
singulier est considérée.
Les vibrations des barreaux sont induites par le détachement de tourbillons à l'aval
des barreaux.
Le détachement se produit périodiquement, une fois à droite, une fois à gauche du
barreau.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


168 Seuil et barrage en rivière

La fréquence de détachement des tourbillons et par conséquent l'excitation des bar-


reaux se calculent par :
V
f = St
d
avec : St : nombre de Strouhal, par exemple :
St = 0.155
St = 0.200

St = 0.275

Du point de vue des vibration, le barreau rectangulaire est le plus favorable.

excitation
V

d
V

Figure 4.14 : Excitation d'un barreau due aux tourbillons de détachement

La fréquence propre des barreaux fp doit être bien supérieure – au minimum 60% – à
celle de l'excitation pour éviter des vibrations de résonance très fortes. Elle est pro-
portionnelle à la flèche du barreau due à une charge unitaire :
1
fp
0
avec : 0 : flèche du barreau pour une charge unitaire

barreaux principaux

vibration (déformation)
supports horizontaux
possible

Figure 4.15 : Vibration (déformation) possible entre deux appuis du barreau

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 169

Les solutions réalisables pour éviter la résonance et limiter les vibrations sont les
suivantes (cf. Figure 4.16):
• fixer les supports horizontaux aux parois/piliers latéraux
• renforcement latéral des éléments de grille avec des barreaux diagonaux
La distance entre les supports horizontaux doit être choisie de telle manière que la
fréquence propre du barreau principal soit supérieure à celle de l'excitation.

1 2
Figure 4.16 : Solution pour éviter des fortes vibrations ou une mise en résonance
des barreaux

4.3.4.4 Nettoyage des grilles


Le nettoyage est une opération fondamentale parce que le degré de propreté d'une
grille joue un rôle essentiel dans la perte de charge à travers la grille. Si la grille est
très propre, les pertes de charge sont très faibles.
Le nettoyage à la main est un travail très pénible et devient presque impossible en
cas de crue avec des apports importants de corps flottants.
Un nettoyage mécanique avec un dégrilleur est donc une opération très rentable. On
distingue :
• les dégrilleurs à râteau (Harcke)
• les dégrilleurs à chariot
Ces derniers sont en général utilisés pour les ouvrages importants.

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170 Seuil et barrage en rivière

Tôle d’arrêt

Râteau
Tôle d ’arrêt
ouvert

Râteau
Rouleaux
fermé
Supports horizontaux

Barreaux
Elément de grille
(faisceaux de barreaux)

Figure 4.17 : Exemple d'un dégrilleur à râteau pivotant

Le principe d'un chariot est montré sur la Figure 4.17. Le chariot est manœuvré par
une machine qui se déplace sur des rails le long de la grille. Le nettoyage est en gé-
néral automatisé. Un détecteur mesure la perte de charge due à la grille. Lorsque la
valeur limite – typiquement 5 cm – est dépassée, le dégrilleur se met en marche.

4.3.5 Prise d'eau "frontale"

4.3.5.1 Principe de la réalisation


Une prise d'eau orientée face à l'écoulement capte forcément également des maté-
riaux solides. Une passe à gravier est donc indispensable pour une telle prise d'eau.
En principe, les matériaux solides entrent également dans la prise d'eau où ils sont
séparés de l'eau et ensuite rendus au cours d'eau.
La séparation d'eau et des sédiments s'effectue verticalement en divisant l'ouvrage
de la prise en une partie ou étage inférieur et supérieur. L'étage inférieur est réservé
aux matériaux solides, l'étage supérieur à l'eau propre. Les matériaux pris dans
l'étage inférieur sont dirigés par un tunnel vers l'aval dans le cours d'eau.

4.3.5.2 Eléments essentiels de la prise d’eau frontale


La Figure 4.18 montre les éléments essentiels d'une prise d'eau frontale.
• seuil/barrage mobile équipé de vannes de déversoir, de piliers et d'un bas-
sin amortisseur
• étage inférieur de la prise d'eau frontale avec une passe à gravier à tunnel
avec un seuil de hauteur entre 1.0 et 1.5 m à l'amont et une vanne de purge
à l'aval
La pente du chenal doit être au minimum de 3%, mais 5% sont préférables.
Le fond du chenal doit être protégé contre l'abrasion à l'aide d'un béton de

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 171

haute qualité, un revêtement en bois, des pierres de taille ou autres. La


vanne de purge doit être ouverte dès que le transport de sédiment com-
mence pour éviter que le tunnel se remplisse de gravier.
• étage supérieur de la prise d'eau avec une vitesse d'approche de l'écoule-
ment devant la grille de 0.5 à 0.8 m/s, une grille avec une plate-forme de
nettoyage et une goulotte pour la purge des détritus vers l'aval du barrage
mobile ou dans un container et une paroi plongeante immergée de 0.8 à
1.0 m formant une barrière à flottants

Vue en plan vannes de déversoir

seuil de barrage mobile

bassin amortisseur

piles
seuil de gravier
vanne de purge
a a
batardeaux
passe à graviers benne de détritus
à tunnel
grille goulotte
Coupe a - a : Prise d’eau
paroi plongeante batardeaux

seuil de graviers rainure

5%
1.0 - 1.5 m

marche vanne de purge


tunnel de dégravage protéction contre l’abrasion

Figure 4.18 : Eléments essentiels d'une prise d'eau frontale

4.3.5.3 Utilisation de la prise "frontale"


Comme mentionné dans le paragraphe concernant la classification des prises d'eau,
la prise frontale n'est adaptée qu'aux cours d'eau rectilignes. En Suisse et en Eu-
rope, ce type est réalisé très rarement. Les seuls exemples connus en Suisse sont
situés dans des canaux artificiels.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


172 Seuil et barrage en rivière

Les avantages de ce type de prise d'eau sont les suivants :


• La prise d'eau frontale maîtrise de transport de charriage et/ou en suspen-
sion très importants. Cette prise utilise le fait que la concentration en solide
la plus élevée se trouve près du fond. Pour cette raison, ce type est très ré-
pandu en Inde et au Pakistan, car les rivières de l'Himalaya sont très char-
gées en sédiments.
Les désavantages sont les suivants :
• La purge doit être continuelle pendant le charriage et par conséquent la
perte d'eau est élevée.
• Pour garantir une charge suffisante pour la purge, la profondeur d'eau doit
être assez grande ( 5 m). Un seuil d'une grande hauteur est donc néces-
saire.
• Le tunnel de chasse est exposé à de grandes forces d'abrasion

4.3.6 Prise d'eau par-dessous

4.3.6.1 Principe
Avec une prise d'eau par-dessous, l'eau est captée au fond de la rivière par un per-
tuis de captage précédé d'une grille. L'eau dérivée est alors reçue dans une fosse de
captage placée sous les grilles. A partir de là, l'eau est dirigée vers l'ouvrage d'utilisa-
tion.
Dans les Alpes, une prise d'eau par-dessous particulière a été développée, nommée
également prise tyrolienne.
Cette prise est utilisée en haute montagne avec accès difficile dans des rivières à
forte pente, les torrents.
Le pertuis situé au fond est dimensionné pour le débit équipé. Pour des débits plus
élevés, l'eau excédante est déversée par dessus la grille.

4.3.6.2 Eléments essentiels de la prise d’eau tyrolienne


La Figure 4.19 montre un exemple d'une prise d'eau tyrolienne.
Les élément essentiels d’une prise d’eau tyrolienne, cités ci-dessous de l'amont vers
l'aval sont (cf. Figure 4.20):
• bassin amortisseur à l'amont de la prise pour garantir que l'écoulement
d'approche soit fluvial, crée par l'ouvrage de prise ou l'excavation du rocher
• prise tyrolienne avec une grille fortement inclinée (30 à 60 °) pour éviter que
les matériaux, blocs et cailloux, ne restent sur la grille
• structure en béton autour de la grille protégée contre l'abrasion, en général
par un revêtement en pierres de taille de granite
• fosse de captage au-dessous la grille qui sert en même temps de dégra-
veur pour les cailloux ayant passés à travers la grille
• ouvrage de dessablage à l'aval de la fosse de captage qui est souvent sou-
terrain en montagne (dans la roche)

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Seuil et barrage en rivière 173

• tunnel de chasse pour effectuer les purges qui sont contrôlées par la vanne
de purge
• orifice de dotation qui contrôle le débit minimum nécessaire pour préserver
la faune du cours d'eau à l'aval
• bassin aval creusé dans le rocher qui constitue un refuge pour les poissons

Coupe longitudinale
Prise
d’eau

batardeau

Vanne de purge
Coupe transversale
grille

Figure 4.19 : Exemple d'une prise d'eau tyrolienne

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174 Seuil et barrage en rivière

Vue en plan
a

torrent
bassin amortisseur grille
amont (excavé) (approximativement 7-8 m2 par m3/s)
système
de dessableurs
b dégraveur b

batardeaux

bassin amortisseur
dotation aval (excavé)
vanne de purge

a tunnel de purge

Coupe a - a : Prise d’eau


Q > Qe entretoise éventuelle

hc
Qe %)
grille (30 à 60°)
bassin
amont protéction contre l’abrasion
Qe
orifice de dotation

fosse de captage bassin aval

Coupe b - b : Dégraveur
batardeaux grille (barreaux)

entretoise (appui)
dégraveur souterrain système de dessablage souterrain

fosse de captage vanne de purge

Figure 4.20 : Eléments essentiels d'une prise d'eau tyrolienne.

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Seuil et barrage en rivière 175

4.3.6.3 Dimensionnement de la prise d’eau tyrolienne


Plusieurs méthodes pour le dimensionnement d'une prise d'eau tyrolienne sont
connues. La plupart de ces méthodes est empirique. La solution approximative selon
Frank (1956) est présentée à la Figure 4.21.

écoulement
2
fluvial
Qe = c µ b L 2 g h
L 3
hcr h
h: hauteur d’eau au début de la grille h = =*hcr
hcr: hauteur critique.
grille c: facteur de la grille.
( ) (cos
c = 0.6 a/b )3 / 2
( en pratique, a/b est entre 1 2 et 1 3)

Qe µ: facteur de débit selon la forme des barreaux.


b: largeur de la grille.
L: longueur de la grille.
µ = 0.62 - 0.65
a b : pente de la grille: 30°< < 60° (en cas de fort
charriage ).
µ = 0.70 - 0.75 µ = 0.75 - 0.85 =: facteur de correction.
µ = 0.80 - 0.90 µ = 0.90 - 0.95 =

1

0.961

0.927
12°
0.894
16°
0.865
20°
0.837
24°
0.812
28° > 30°
0.788 0.88cos

Figure 4.21 : Dimensionnement d'une prise d'eau tyrolienne (solution approxima-


tive selon Frank)

La formule de calcul du débit qui tombe à travers la grille est presque identique à
l’équation de Toricelli. Cette équation donne le débit passant par un orifice. Cette
ressemblance parait logique, si l’on se rappelle que la grille couvre en fait un orifice.
Selon la solution approximative de Frank, le débit est proportionnel aux paramètres
suivants :
• la hauteur d’eau à l'extrémité amont de la grille
• la largeur et la longueur de la grille
• un coefficient de débit dépendant de la forme des barreaux
• un facteur de la grille, respectivement l’espace libre entre les barreaux
Cette formule peut être utilisée à l'unique condition que l’écoulement à l’amont de la
grille soit fluvial. Cette condition doit être garantie par un bassin amont. Le seuil à
l’amont de la grille fonctionne comme un déversoir. La hauteur critique s’établit par
conséquent sur la crête de ce seuil. La hauteur d’eau à l’extrémité amont de la grille
dépend directement de cette hauteur critique. Une relation approximative entre ces
deux valeurs est donnée par le coefficient indiqué en bas de la Figure 4.21 et qui est
fonction de la pente de la grille.
Le facteur de la grille dépend de l'ouverture et de l’espacement entre les barreaux et
par conséquent de la pente de la grille.
Le coefficient de débit finalement est influencé par la forme des barreaux. Il tend vers
l’unité pour des barreaux de forme très hydrodynamique.

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176 Seuil et barrage en rivière

La formule est bien entendu valable uniquement, si la totalité du débit du torrent


tombe à travers la grille comme sur le dessin de la Figure 4.21.
Pour un débit donné, la surface ou la longueur de la grille nécessaire peut être esti-
mée. Une approche préliminaire consiste à prendre 7 à 8 m2 par m3/s de débit capté.
La longueur calculée de la grille est en générale augmentée de 20% à 100% pour
être du coté de la sécurité. Cette réserve doit également tenir compte d’une obstruc-
tion partielle de la grille :
L TOT = L calculé + 20% à 100%

4.3.6.4 Aspects constructifs


a) Emplacement
Il est très important de choisir l’emplacement de la prise d’eau sur un tronçon sans
alluvionnement à l’aide du profil en long de la rivière. Il est plutôt recommandé de
trouver une zone d’érosion pour éviter une obstruction importante de la grille pendant
les crues (cf. Figure 4.22).

tronçon d'érosion tronçon d'alluvionnement tronçon d'érosion

défavorable
favorable

pente forte pente faible pente forte

Figure 4.22 : Tronçons d’alluvionnement ou d’érosion dans un torrent

L’emplacement idéal se trouve aux changements de pente convexes (cf. Figure


4.22). Un tel emplacement favorise également le passage des matériaux par-dessus
la grille et leur transport vers l’aval.
b) Pente
Dans un torrent avec charriage, l'inclinaison minimum de la grille est de 30 °. Au cas
d'un fort charriage elle peut être augmentée jusqu'à 60 °.
Pour des pentes supérieures à 45 ° l'écoulement par-dessus la grille devient forte-
ment torrentiel. La formules de Frank n'est par conséquent plus applicable. Une ap-
proche plus sophistiquée en calculant la courbe de remous le long de la grille doit
être utilisée.

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Seuil et barrage en rivière 177

c) Grille
L'espacement typique entre les barreaux varie entre 80 et 100 mm, l'ouverture cor-
respondante entre 20 et 40 mm.
La structure portante de la grille doit être très solide. Il faut tenir compte du fait qu'un
torrent peut souvent transporter des blocs de 1 à 2 t. Pour le dimensionnement stati-
que de la structure, un poids de l'ordre de 6 t/m2 est admis. La section des barreaux
doit évidemment être assez importante pour supporter une telle charge. Des rails de
chemin de fer ou des profilés soudés avec un moment d'inertie important sont fré-
quemment choisis comme barreaux. Malgré tout, la forme des barreaux doit être hy-
drodynamique.

soudure longitudinale
très désavantageuse

Figure 4.23 : Formes de barreaux soudés utilisés pour les prises tyroliennes

Les barreaux dont la forme se rétrécie vers le bas sont avantageux. Ce type de
forme évite que les cailloux se coincent entre les barreaux. Pour cette raison, les
rails de chemin de fer doivent toujours être posés à l'envers.

cailloux

favorable défavorable

Figure 4.24 : Avantage de barreaux dont la section se rétrécie vers le bas

A cause du risque d'endommagement, la grille doit être facilement démontable, par


exemple vissée sur les parois en béton.

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178 Seuil et barrage en rivière

4.3.7 Champ d'application de la prise tyrolienne par rapport à la


prise latérale
La Figure 4.25 montre les champs d'application des prises d'eau latérales et des pri-
ses d'eau tyroliennes. Le champ d'application est défini à l'aide de deux paramètres :
la pente de la rivière et le débit équipé.

%
prise tyrolienne
15
prise tyrolienne
pente de la rivière

avec seuil aval élevé


10
prise latérale
(avec passe à gravier)

2.5

10 100 m3/s
débit équipé

Figure 4.25: Champs d'application de la prise tyrolienne et de la prise latérale.

Comme déjà mentionné, la prise d'eau par-dessous est surtout adaptée pour les tor-
rents, c'est-à-dire pour des fortes pentes et des débits modérés.
La pente minimum est en général 5% afin de donner une inclinaison suffisante à la
grille (30 ° au minimum). Avec un seuil aval de grande hauteur – ce qui signifie une
augmentation de la hauteur de la structure totale – la prise d'eau tyrolienne peut être
implantée jusqu'à une pente de 2.5%.
Le débit dépasse rarement 10 m3/s. La prise latérale par contre peut avoir des débits
équipés importants allant jusqu'à plusieurs centaines de m3/s. La pente de la rivière
ne doit pas être trop grande. La limite se situe à 10% pour les débits inférieurs à
10 m3/s et entre 2 et 3% pour des débits supérieurs à 100 m3/s.
La prise d'eau frontale a plus ou moins les même limitations que la prise latérale.

4.3.8 Nécessité d'un seuil ou d'un barrage


Le but le plus important d'un seuil ou d'un barrage est de garantir un niveau d'eau
minimum à l'amont de la prise d'eau. Il est évident qu'un tel seuil ou barrage est aus-
si large que la rivière. Il présente par conséquent une barrière qui – sans mesures
spéciales – n'est pas aisée à surmonter pour la faune aquatique comme les pois-
sons. Pour ces raisons écologiques, la construction d'un seuil ou d'un barrage est
uniquement décidée si c'est absolument indispensable. Pour les différents types de
prise d'eau ceci sera le cas dans les conditions suivantes :

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 179

forte pente

risque de dépôts
pente plus faible

Figure 4.26: Ouvrage de prise d'eau tyrolienne pour différentes pentes du torrent

• Prise d'eau latérale : une surélévation du niveau d'eau est nécessaire, si :


1. Plus de 25% de l'apport en débit de la rivière est dérivé (Qe > 0.25 · Q)
2. La pente de la rivière est inférieure à 1 ‰ pour pouvoir procéder à des
purges.
• Prise d'eau frontale : ce type de prise doit presque toujours être combinée
avec un seuil ou un barrage pour faciliter les purges continues.
• Prise d'eau par-dessous : une surélévation du niveau d'eau n'est en général
pas nécessaire.

4.4 Prise d'eau en réservoirs ou lacs


4.4.1 Comparaison aux prises d'eau en rivière
Du point de vue hydraulique, il y a une grande différence entre les prises d'eau en
rivière ou en réservoir/lac. Comme montré ci-dessus, l'eau entre dans les prises en
rivière en écoulement à surface libre. Elles sont appelée prises de surface. Les pri-
ses d'eau en réservoir/lac sont toujours situées au-dessous de la surface d'eau. Le
captage se fait sous pression ou en charge.
En outre, le problème des matériaux solides n'est pas aussi important. Les sédi-
ments décantent dans le réservoir ou le lac. Ils ne portent que rarement préjudice à
la prise d'eau elle même. Evidement, le problème n'est que déplacé : l'alluvionne-
ment de la retenue constitue également un problème. Les corps flottants ne posent
pas non plus un problème en général, car le captage se fait sous l'eau. Par contre il
faut considérer la formation de vortex et l'entraînement d'air induit pour les prises de
faible profondeur.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


180 Seuil et barrage en rivière

4.4.2 Classification et éléments essentiels des prises en réservoir

4.4.2.1 Classification selon l'emplacement


Selon l'emplacement d'une prise d'eau en réservoir ou en lac, on distingue :
• les prises situées aux rives
• les prises indépendantes (située loin des rives)
• les prises combinées avec le barrage
En général une prise d'eau est équipée d'organes de fermeture. La position de la
commande de ces vannes peut être souterraine ou à la surface.

4.4.2.2 Prises situées aux rives


La situation d'une prise d'eau en réservoir/lac est schématiquement présentée sur la
Figure 4.27 et la Figure 4.28.
La solution avec un puits mouillé est uniquement choisie pour les prises d’eau à pro-
fondeur modérée. Pour des profondeurs supérieures à 30 à 50 m, la construction
d’une chambre de vannes est plus économique qu’un bâtiment de commande et un
puits mouillé.

bâtiment de commande/treuil

< 30 - 50 m
puits mouillé

organe de fermeture (vanne)

Figure 4.27 : Prise d'eau en réservoir/lac avec organes de fermeture à la surface

chambre de vannes

vanne

Figure 4.28 : Prise d'eau en réservoir/lac avec organes de fermeture souterrains

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Seuil et barrage en rivière 181

La Figure 4.29 à trois dimensions montre l’exemple d’une prise d’eau de la centrale
Victoria à Sri Lanka. Les éléments essentiels sont :
1. grille
2. structure pour supprimer des vortex
3. pertuis d'entrée à forme hydrodynamique
4. vanne de service (vanne wagon)
5. batardeaux (éventuellement vannes batardeau)
6. puits de commande des vannes
7. dégrilleur
8. voie inclinée pour manœuvrer le chariot du dégrilleur
Souvent cette voie est également utilisée pour placer les batardeaux à
l’amont de la grille.

6
8

2
4
5
1 3
Lac Victoria, Sri Lanka

Figure 4.29 : Eléments essentiels d’une prise d’eau sur la rive.

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182 Seuil et barrage en rivière

4.4.2.3 Prises indépendantes


Si la prise est indépendante des rives ou du barrage, elle est en général combinée
avec une tour appelée tour de prise d'eau.
La commande pour les vannes se trouve tout en haut de la tour. L'organe de service
est souvent une vanne cylindrique.
La Figure 4.30 montre un exemple d'une telle tour de prise d'eau; il s'agit de la prise
de la centrale de Schiffenen au canton de Fribourg. La vanne de service est cylindri-
que. En outre, il y a une vanne de garde en forme de demi-sphère ce qui est une so-
lution particulière et rare.

commande de vanne pont d’accès

barrage

pertuis d’entrée

galerie en
charge

vanne
cylindrique

grille

pilier

Figure 4.30: Exemple d'une tour de prise d'eau (lac de Schiffenen, Fribourg)

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Seuil et barrage en rivière 183

La tour peut être supprimée, si le pertuis d'entrée n'est pas équipé d'une vanne de
service ou de garde. La prise peut alors être construite totalement noyée, mais elle
devient inaccessible.
Pour éviter les vortex, les pertuis d'entrée sont orientés verticalement. Ceci est éga-
lement avantageux du point de vue de l'obstruction de la grille.

couverture grille

pertuis d’entrée pilier

Figure 4.31: Prise totalement noyée

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


184 Seuil et barrage en rivière

4.4.2.4 Prises combinées avec barrages


La prise d'eau d'une retenue avec un barrage en béton peut facilement être conçue
dans la structure. Cette combinaison est surtout favorable avec des barrages épais
tel que les barrages-poids ou les barrages à voûte épaisse. Dans le cas d'un barrage
élancé, par exemple un barrage à voûte mince, la prise d'eau est placée dans une
structure supplémentaire au barrage.
La commande des vannes se fait de tout en haut du barrage à l'aide d'un puits ou
prés de la vanne dans une chambre de vanne intégrée au barrage.

commande de vanne

puits mouillé chambre de vanne

grille ev. grille vanne

a)
commande de la vanne

grille grille

structure attachée vanne

b) c)
Figure 4.32: Exemples d'emplacement pour une prise d'eau combinée avec le
barrage :
a) barrage poids
b) barrage à voûte épaisse
c) barrage à voûte mince

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Seuil et barrage en rivière 185

4.4.3 Dimensionnement et géométrie de l'entrée d'une prise

4.4.3.1 But
Le but du dimensionnement est de trouver une géométrie idéale pour que :
• les pressions soient positives en tout point
• les pertes de charge soient petites
• l'écoulement reste potentiel (pas de turbulences)
• aucune zone de cavitation ou de sous-pressions n'apparaisse
• l'écoulement ne provoque pas de vibrations des grilles ou des vannes

4.4.3.2 Vitesse d'entrée


Si la prise d'eau alimente une centrale hydroélectrique, la vitesse à l'entrée de la
prise d'eau est limitée à :
Vmax = 0.5 - 1.0 m/s
Il est évident que cette condition conduit à des sections d'entrée importantes, mais
les pertes de charge deviennent très faibles, car le coefficient de perte de charge est
petit :
% e 7 0.1
La perte de charge se calcule par :
V2
)H = % e
2 g
avec : V : vitesse dans la conduite de la prise
Si les pertes de charge ne jouent pas un rôle important, les vitesses à l'entrée peu-
vent être plus élevées, par exemple dans le cas d'une prise de vidange de fond d'un
réservoir. Même dans ce cas, une section d'entrée minimum est demandée pour évi-
ter les sous-pressions.

4.4.3.3 Géométrie de l'entrée


Comparée à la géométrie d'un déversoir standard, la géométrie de l'entrée d'une
prise d'eau peut être modélisée à partir de la forme d'un jet dans l'air sortant d'un
trous dans une mince paroi.
La pression à la paroi à l'entrée est égale à la pression atmosphérique. Par consé-
quent, il n'y a aucune sous-pression le long du jet.
Le coefficient de contraction Cc dépend uniquement du rapport d / D, si d est plus
petit par rapport à D, ce qui sera le cas pour une prise d'eau de réservoir
d
C c = 0.611 pour 0
D
La largeur ou la hauteur d'une section d'entrée doit par conséquent toujours être au
minimum 65% (1 / 0.611) plus grande que la section contractée pour éviter des sous-
pressions.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


186 Seuil et barrage en rivière

Figure 4.33: Définition de la géométrie d'une prise d'eau profonde

1.65 · d d

Figure 4.34: Profil minimal d’entrée pour éviter des sous-pressions sur les parois

La définition de la forme d'une jet dans l'air sortant d'une mince paroi peut être trou-
vée chez Sinniger et Hager (1989). La forme étant trop difficile à construire elle est
approchée par des ellipses.

Figure 4.35: Entrée de prise rectangulaire schématisée


face amont du pilier d'entrée batardeau
courbe de transition niche de vanne
conduite de la prise

A la Figure 4.35 les éléments essentiels d'une prise d'eau sont présentés :
• la section d'entrée en général équipée avec des batardeaux
• la courbe de transition
• les niches ou les rainures pour la vanne de garde
• la conduite d'eau
Pour les raison suivantes l'entrée d'une prise d'eau est en général réalisée par un
tronçon à section rectangulaire :

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Seuil et barrage en rivière 187

• l'installation et le nettoyage d'une grille sont facilités


• la fermeture par des batardeaux est possible
• la section de la vanne de garde doit être rectangulaire
Les courbes de transition sont définies par l'USCE :
a) contraction sur les quatre côtés de l'entrée :
( X 1) 2 + ( 3 Y + 1) 2 = 1
Cette transition à une seule ellipse n'est pas une approche très précise de
forme théorique d'un jet sortant d'une mince paroi. La pression le long de la
paroi ne correspond pas à l'idéal à quelques endroits. Pour éviter ceci, une
transition composée de deux ellipses peut être choisie :
2
Y
( X 1) +2
+1 =1 0 7 X 7 0.33
0.32
2
Y
( X 12
. ) +
2
+1 =1 0.33 < X 7 1
0.16
Si le tronçon de l'entrée présente une section rectangulaire (au lieu d'une
section circulaire), le coffrage du béton devient compliqué à cause de la
contraction sur les quatre côtés.
b) contraction uniquement sur le plafond :
L'USCE recommande la géométrie de l'ellipse suivante :
2
3
( X 1) +
2
Y +1 =1 0 7 X 71
2
Concernant la répartition de la pression, cette forme est acceptable mais
pas satisfaisante à cent pour-cent. Pour obtenir des meilleurs résultats il
faut prolonger l'ellipse :
2 2
3 3
X 1 + Y +1 =1 0 7 X 7 1.5
2 2
Si seul le plafond de l'entrée est arrondi, il est recommandé de prévoir des piliers (cf.
Figure 4.36).
La largeur des piliers doit être au minimum égale à la dimension de la conduite.
d
d
pilier
latéral

Figure 4.36: Entrée de prise avec plafond arrondi et piliers

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


188 Seuil et barrage en rivière

Transition section rectangulaire-circulaire


La longueur de la transition entre la section rectangulaire de la vanne et la section
circulaire de la conduite doit être deux fois le diamètre de la conduite (cf. Figure
4.37).

vanne

1÷ 2 · >

>

conduite

Figure 4.37: Transition section rectangulaire-circulaire

4.4.4 Prises à faible profondeur

4.4.4.1 Introduction
Pour les raisons suivantes, les prises d’eau en réservoir fonctionnent souvent à faible
profondeur :
• le réservoir lui-même est peu profond
• le niveau d’eau dans le réservoir varie entre une retenue minimum et
maximum
Le réservoir étant exploité à niveau constant, la prise d’eau devrait être la plus pro-
che possible de la surface libre pour que la construction soit économique. Par contre,
une submersion minimale de la prise d’eau doit être garantie pour éviter la formation
de vortex qui peut porter préjudice à la prise d’eau de la manière suivante :
• réduction de l’efficacité
• entraînement d’air et de corps flottants dans l’écoulement

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 189

• propagation des mouvements rotationnels de la surface vers l’écoulement


en charge dans la conduite
• mise en vibration des structures

4.4.4.2 Classification et origine de la formation des vortex


Avant de passer en revue quelques formules pour la détermination de la submersion
minimale d’une prise d’eau, quelques remarques générales sur les vortex sont pré-
sentées ici.
Il existent quatre possibilités de classifier les vortex :
• la position du vortex relative à l’ouvrage de prise
• les caractéristiques de l’écoulement dues aux vortex
• la variation temporelle de son intensité
• la forme géométrique du vortex
a) Position du vortex
Quant à la position du vortex, on distingue le vortex de surface et le vortex de
sous-surface.
Le vortex de surface crée un écoulement tourbillonnaire et un éventuel entraînement
d’air. Ce qui n’est pas le cas pour le vortex de sous-surface qui se développe près du
fond ou près des parois.

Figure 4.38 : Position du vortex relative à l’ouvrage de prise


vortex de surface
vortex de sous-surface

vortex de surface vortex de sous-surface


prises d‘eau

Figure 4.39 : Exemples de différentes positions de vortex

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


190 Seuil et barrage en rivière

b) Géométrie du vortex
La géométrie du vortex dépend de son intensité qui peut changer au cours du temps.
Par rapport à une prise à axe verticale (baignoire) on distingue les cas de la Figure
4.40.

Figure 4.40 : Divers types de vortex de surface stables pour prises à axe vertical :
a) vortex faible
b) vortex à submersion critique
c) vortex fort avec entraînement d’air

c) Intensité du vortex
L’intensité du vortex est également décrite par sa forme géométrique. La distinction
et la classification se fait selon la Figure 4.41.

Figure 4.41 : Classification de l’intensité des vortex de surface :


tourbillon de surface non cohérent
fossette de surface
noyau vers la prise, tourbillon cohérent le long de la colonne
d’eau entière
vortex qui entraîne des corps flottants, mais pas d’air
vortex qui entraîne des bulles d’air vers la prise
noyau d’air continu vers la prise

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 191

d) Origine de la formation des vortex


La cause principale de la formation des vortex est l’excentricité de l’écoulement
amont relative à la prise. Cette dernière cause trois conditions fondamentales de la
vorticité :

a) la répartition asymétrique des vites-


ses d’approche due à l’orientation
géométrique de l’ouvrage

écoulement secondaire
(eau stagnante)

b) la présence de couches
d’écoulement à gradient de vitesse
élevé

c) des ondes rotationelles générées


par des objets perturbant
l’écoulement d’approche

Figure 4.42 : Formation de vortex due à l’écoulement d’approche asymétrique

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


192 Seuil et barrage en rivière

La Figure 4.42 montre quelques exemples de prises conduisant à la formation de


vortex. Les trois exemples en haut de la figure, a), c) et e), représentent des cas où
l’ouvrage est asymétrique par rapport à l’axe du canal d’approche.
La vorticité montrée sur les trois schémas en bas de la Figure 4.42, b), d) et f), est
imposée par un changement de direction principale de l’écoulement immédiatement
à l’amont de l’ouvrage de prise.
Dans le cas d’un écoulement d’approche parfaitement symétrique, une répartition
asymétrique de vitesses peut être provoquée par le vent.

4.4.4.3 Hauteur de submersion critique


Si une rotation de l’écoulement est susceptible de se former à l’amont de la prise –
ce qui est toujours le cas en pratique – la hauteur de submersion critique doit être
respectée.
La submersion critique d’une prise d’eau correspond à la hauteur de submersion
pour laquelle aucun vortex fort ne s’établit. En général, le but de la conception ne
sera donc pas d’éviter toute formation de vortex, mais de prévenir les vortex forts car
ces derniers peuvent entraîner de l’air dans la prise d’eau.
Jusqu’à présent, aucune théorie pour déterminer la hauteur de submersion critique
d’une prise d’eau n’est connue. Par contre, diverses formules approximatives pour
estimer cette hauteur ont été établies par différents auteurs. La plupart de ces formu-
les sont basées sur des observations sur des prototypes ou sur modèle réduit.
Pour une prise d’eau horizontale ou légèrement inclinée, la submersion est en géné-
ral définie géométriquement comme la distance verticale entre la conduite d’eau à
l’aval de l’entrée et la surface d’eau.

ht : submersion critique
ht Fp : nombre de Froude de la prise
V
Fp =
(g D) 12
D

Figure 4.43 : Définition géométrique de la hauteur de submersion d’une prise


d’eau horizontale ou à axe légèrement incliné

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Seuil et barrage en rivière 193

V
Knauss: ht D 1 + 2. 3
g D

Nagarkar: h t 4.4 (V D0 .50 )


0.54

Rohan: ht 1. 474 V 0.48 D0 .76

Gordon ht c V D
où c = 0.7245 approche asymétrique
c = 0.5434 approche symétrique

Figure 4.44 : Formules empiriques pour déterminer la hauteur critique de submer-


sion (V en [m/s], D en [m])

La Figure 4.44 présente quelques formules empiriques souvent utilisées par les in-
génieurs praticiens. L’auteur recommande les formules de Knauss et de Nagarkar
avec lesquelles il a personnellement fait des bonnes expériences.
La formule de Nagarkar donne des hauteurs critiques de submersion assez impor-
tantes. Même pour des fortes rotations de l’écoulement d'approche, les résultats se
trouvent du côté de la sécurité.

4.4.4.4 Mesures constructives


La formation de vortex peut être évitée en garantissant une hauteur de submersion
minimum, comme il a été présenté au paragraphe ci-dessus. Une autre possibilité
est l’agrandissement de la section d’entrée de la prise d’eau. Souvent, ces mesures
ne sont pas réalisables économiquement, car une partie du volume utile du réservoir
est perdue. En pratique, le problème est plutôt résolu par des mesures constructives
permettant d’éviter la formation de vortex ou – au minimum – de prévenir leurs effets
néfastes.
Les mesures constructives peuvent être classées en trois catégories différentes :
a) Mesures contre la formation de vortex
choisir l’emplacement de la prise d’eau de telle manière que les vites-
ses d’approche ne soient pas asymétriques
réduire les courants secondaires et les zones d’eau stagnante près de
l’entrée de la prise d’eau (cf. Figure 4.45)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


194 Seuil et barrage en rivière

mieux

Figure 4.45 : Mesure pour réduire les courants secondaires et les zones d’eau
stagnante près de l’entrée de la prise d’eau

b) Correction de l’excentricité de l’écoulement


sucer les zones de tourbillon ou d’eau stagnante par des
puits/appareils d’injections (cf. Figure 4.46)
interrompre la circulation par des parois verticales, piliers, poutres
plongeantes, grilles ou treillis flottants ou immergées
agrandir la section d’entrée de la prise d’eau

Figure 4.46 : Destruction des zones d’eau stagnantes par un appareil d’injection

c) Mesures contre l’entraînement d’air : prolonger ou détourner la queue du


vortex de la prise
élever la retenue minimum du réservoir
prévoir un plafond au-dessus de l’entrée de la prise
grilles/treillis flottants ou radeaux au-dessus de la prise d’eau
piliers plongeant dans le noyau pour les vortex stationnaires
L’effet de toutes ces mesures est difficile à prévoir. Des essais sur modèle réduit sont
par conséquent indispensables.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Dessableurs 195

5 DESSABLEURS

5.1 But
Les prises d’eau sont en général construites de telle manière qu’elles puissent élimi-
ner les corps flottants et solides. En rappel, les éléments essentiels servant à maîtri-
ser les corps flottants et les solides sont les suivants:
• emplacement, disposition de la prise d’eau: évitant les zones
d’alluvionnement, utilisant l’effet de coude
• seuils à gravier et passe à gravier à chenal ou tunnel évacuant le charriage
• grilles pour arrêter les corps flottants
Avec ces mesures il n’est par contre pas possible d’éliminer les matériaux en sus-
pension. Ceci se fait à l’aide de dessableurs situés en aval d’une prise d’eau.
Le but d’un dessableur est donc de faciliter la décantation du sable. L’eau captée par
une prise d’eau est transportée par des ouvrages d’adduction vers l’ouvrage
d’exploitation. Les objectifs d’un dessableur sont par conséquent les suivants:
• éviter l’alluvionnement ou l’ensablement des ouvrages d’adduction tels que
les canaux et galeries d’amenée
• limiter l’usure de l’équipement hydromécanique tel que les turbines ou
pompes

5.2 Principe de fonctionnement


L’écoulement est ralenti et calmé par un dessableur et sa turbulence diminue. La dé-
cantation des matières en suspension est facilitée.
Canal d’amenée Tronçon de transition

Espace de décantation Déversoir

Espace de dépôts Chenal


de sable de purge

Figure 5.1: Disposition d’un dessableur (Vischer, Huber, 1993)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


196 Dessableurs

espace de décantation

espace de dépôts de sable


purgeur, dispositif de dessablage
chenal de purge

Figure 5.2: Coupe transversal d’un dessableur

En principe, le dessableur est un bassin de décantation qui est formée par un élar-
gissement du canal (cf. Figure 5.1). L’élargissement de la section se fait sur une cer-
taine longueur. A l’aval de ce long bassin, le débit et le niveau d’eau sont contrôlés
par un seuil/déversoir.
La partie supérieure de la section d’un dessableur sert comme espace de décanta-
tion. Il est en générale rectangulaire. Au-dessous, la section se rétrécie pour former
l’espace des dépôts de sable. Au travers d’un purgeur ou un dispositif de dessa-
blage, les dépôts de sable peuvent être évacués par un chenal de purge (cf. Figure
5.2).

5.3 Choix de l'efficacité du dessablage


L’efficacité du dessablage est définie selon la dimension des matériaux décantés
dans le dessableur. Une efficacité de 0.2 mm, par exemple, signifie que les maté-
riaux d’une dimension supérieure à 0.2 mm sont éliminés dans le dessableur.
Le choix de l’efficacité dépend d’une part du type d’équipement hydromécanique et
d’autre part de la chute de l’aménagement. Le pouvoir d’abrasion des grains de ma-
tériaux en suspension peut être estimé pour une turbine du type Francis selon la
formule suivante:

Pe = µ ? S E
v3
R
avec: µ: coefficient de friction entre l’aube et les grains
? : volume des grains
S: masse spécifique des grains
E: masse spécifique de l’eau
R: rayon de l’aube de la roue
v: vitesse des grains
Le pouvoir d’abrasion augmente en fonction de la puissance cubique de la vitesse
des grains qui est une fonction de la chute de l’aménagement. D’autre part, le pou-
voir d’abrasion dépend directement du volume des grains, c’est-à-dire de l’efficacité
du dessablage.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Dessableurs 197

Le tableau suivant montre l’usure d’une turbine du type Francis en fonction de


l’efficacité du dessablage.

Intervalle de réparation
Efficacité du dessablage
des turbines
[mm] [ans]
0.2 6–7
0.3 3–4
0.4 2–3
0.5 1-2

Tableau 5.1: Usure d’une turbine du type Francis en fonction de l’efficacité du


dessablage

Le prix de l’installation d’un dessableur augmente avec son efficacité. Par consé-
quent, un optimum doit être trouvé entre les coûts de construction et les coûts
d’exploitation – c’est-à-dire les coûts de réparation de l’équipement hydromécani-
ques – y inclus la perte d’énergie. On obtient ainsi une efficacité économique.
La Figure 5.3 montre un exemple d’une telle optimisation. L’efficacité économique
dans ce cas est de 0.3 mm.
L’expérience a montrée que l’efficacité économique du dessablage est de 0.2 mm
pour des conditions sévères (chute importante, grains de quartz) et de 0.3 mm pour
des conditions normales. Ceci peut être utilisé comme règle approximative.

Coût total
Coût ( millions $US )

Coût dessableur

Coût turbine

Diamètre des particules déplacées (mm)

Figure 5.3: Choix de l’efficacité économique d’un dessableur.

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198 Dessableurs

5.4 Dimensionnement hydraulique


5.4.1 Longueur du dessableur
La longueur nécessaire d’un dessableur est basée sur:
• le débit équipé de la prise d’eau, Q
• la dimension des grains à décanter (efficacité choisie), dD
Le dessableur doit avoir une longueur permettant aux particules de décanter, c’est-à-
dire que les trajectoires de tous les grains à décanter doivent se trouver à l’intérieur
du dessableur.
Pour que chaque particule atteint le fond du dessableur avant son extrémité aval, le
temps de chute ou de décantation doit être égal au temps de translation. Par consé-
quent:
tD = tt
h
avec: tD: temps de décantation, t D =
vD
L
tt: temps de translation, t t =
vT
h L L B h
= = (section rectangulaire)
vD vT Q
Q
L
vD B

vT

vD
trajectoire
Q pour dD h

Figure 5.4: Trajectoire théorique d’une particule de diamètre dD

5.4.2 Vitesse de chute des grains de sable (vitesse de décantation)

5.4.2.1 Eau calme


La vitesse de chute d’une particule sphérique dans de l’eau calme pourrait en prin-
cipe être estimé en appliquant l’équilibre des forces:

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Dessableurs 199

Fw
FA
G – FW – FA = 0

Ainsi, on obtient la formule de Newton ou de Prandtl :

4
v D0 = g d S
1
3 CW E

avec: vD0: vitesse de chute en eau calme


d: diamètre de la particule sphérique (masse volumique)
S: densité de la particule
E: densité de l’eau
CW: coefficient de traînée, ( C W = f (R e ) )
Pour des particules d’un diamètre entre 0.1 et 1.0 mm, le coefficient de traînée dé-
pend fortement du nombre de Reynolds:
vD d
Re =
"
avec: @: viscosité cinématique de l’eau (106 m2/s pour T = 20 °C)
Par conséquent, elle dépend également de la vitesse de chute.
CW n’est connu que pour des grains sphériques singuliers sous des conditions idéa-
les, c’est-à-dire dans de l’eau propre et sans influence des parois. Pour des particu-
les de forme quelconque sous des conditions réelles, aucune formule universelle-
ment acceptée n’est connue.
Par conséquent, des essais de décantation avec des grains ayant le diamètre de di-
mensionnement doivent en principe être exécutés pour chaque projet. Une autre
possibilité consiste à utiliser les résultats d’essais publiés ou des relations empiri-
ques. Sur la Figure 5.5 la vitesse de chutes de particules de sable dans l'eau calme
selon différents auteurs est représentée.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


200 Dessableurs

En pratique, la formule empirique de Zanke est souvent utilisée:

v D0 =
100
9 d
(
1 + 1.57 10 2 d 3 1)
avec: vD0: vitesse de chute en eau calme [mm/s]
d: diamètre du grain [mm]
Cette formule est valable pour les conditions suivantes:
S
= 2.65, T = 20 o C
E

et dans l’eau calme.


diamètre des particules [mm]

vitesse de chute en eau calme [cm/s]

Figure 5.5: Vitesses de chute de grains de sables selon différents auteurs (Bou-
vard, 1984)

5.4.2.2 Eau agitée


Dans de l’eau agitée, la vitesse de chute diminue due à la turbulence de
l’écoulement. Cette diminution est donnée par l’approche suivante:
v D = v D0 vT 0

avec: vD: vitesse de chute dans de l’eau agitée [m/s]


vT: vitesse de translation dans le dessableur [m/s]

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Dessableurs 201

: facteur de réduction [1/m½]


0.132
=
h
h: hauteur d’eau, du dessableur [m]

5.4.3 Vitesse critique de translation


La vitesse critique de translation définit la transition entre les régimes de suspension
et de décantation. Pour que les particules décantent, la vitesse de chute doit être
supérieure à zéro (VD > 0). Si la vitesse de translation dans le dessableur est trop
grande, il existe le risque que les particules déposées au fond soient transportées
par charriage ou même remise en suspension. La vitesse de translation dans le des-
sableur ne doit par conséquent ne pas dépasser une limite critique.
Cette valeur critique peut être obtenue à l’aide de la théorie du charriage en utilisant
la condition pour le début de mouvement:
R = cr

g R J= cr ( S ) g d
avec: R: contrainte de cisaillement
cr: contrainte de cisaillement critique
cr = 0.03 (aucun mouvement selon le diagramme de Shields)
v2
J= 4
(selon Strickler)
2
K Rh 3

1
v cr = K R h 6 0.03 S
1 d

Pour K = 60 m1/3/s et S / = 2.65, la formule se simplifie et devient:


1 1
v cr = 13 R h 6 d 2

Typiquement vcr varie entre 0.2 et 0.3 m/s.

5.4.4 Récapitulation de la démarche pour le dimensionnement


hydraulique
La démarche de dimensionnement hydraulique d’un dessableur se résume comme suit:
1. Choix de l’efficacité du dessablage, c’est-à-dire du diamètre de dimension-
nement des particules (en générale entre 0.2 et 0.3 mm)
2. Choix de la section du dessableur (largeur B, hauteur h). Pour les débits
importants plusieurs bassins parallèles sont souvent prévus pour limiter la
profondeur d'excavation.
3. Calcul de la vitesse de translation et comparaison avec la vitesse critique.
Si vT > vcr, les dimensions de la section doivent être agrandies.
4. Détermination de la longueur nécessaire du dessableur.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


202 Dessableurs

5.5 Aspects constructifs


5.5.1 Définitions

grille tranquilisatrices dispositif de dessablage, purgeur

h
t

JS
retour à la rivière

canal
d’amenée chenal de purge vanne de purge
(section
L
rectangulaire) transition dessableur

Figure 5.6: Coupe longitudinale d’un dessableur

h
4 t
5

a dispositif de dessablage, purgeur

chenal de purge

Figure 5.7: Coupe transversale d’un dessableur (Vischer, Huber, 1993)

5.5.2 Profondeur du dessableur


La profondeur du dessableur est déterminée par les conditions topographiques, en
particulier par la restitution de l’eau du chenal de purge dans la rivière. Comme men-
tionné ci-dessus, la disposition de plusieurs bassins en parallèle est nécessaire en
cas de débit important (cf. Figure 5.8).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Dessableurs 203

5.5.3 Largeur du dessableur


La largeur du bassin doit être plus petite qu’un huitième de la longueur du dessa-
bleur:
L
B7
8
En outre, la largeur ne devrait pas dépasser deux fois la profondeur:
B 7 2 h (typiquement entre 1.25 h et 1.5 h )
Pour ne pas dépasser la vitesse critique et pour limiter la profondeur des bassins
dans en cas de débit important, plusieurs bassins de dessablage sont disposés en
parallèle comme déjà indiqué au paragraphe 5.5.2 (cf. Figure 5.8).

Figure 5.8: Solution avec des bassins en parallèle pour des débits importants

5.5.4 Inclinaison des parois inférieures


Les matériaux déposés roulent ou glissent sur les plans inclinés de la partie infé-
rieure du dessableur vers une rigole centrale au fond de laquelle se trouve le disposi-
tif de dessablage. Par conséquent, l’inclinaison minimum de ces parois est de 4: 5.

5.5.5 Chenal de purge


Les dimension minimums d’un chenal de purge sont:
• hauteur: a = 1.0 m
• largeur: b = 0.8 m
Ces dimensions doivent garantir un écoulement à nappe libre pendant la purge.
La pente minimum du fond est de:
• pente: JS = 1.5%
En combinaison avec des purgeurs, la pente est souvent de 2 à 3%. La pente doit
assurer une vitesse d’écoulement suffisante pour ne pas avoir de dépôts dans le
chenal de purge.

5.5.6 Tronçon de transition - grilles tranquillisatrices


En fait, le dimensionnement de la longueur du dessableur se fait sous l’hypothèse
d’un écoulement calme. Il faut par conséquent assurer une répartition de vitesse uni-
forme sans turbulences à l’intérieure du dessableur. Le tronçon de transition et la
grille tranquillisatrice servent à atteindre cet objectif au mieux.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


204 Dessableurs

L'expérience montre, que le tronçon de transition entre le canal d’amenée et le des-


sableur doit avoir une longueur de deux fois la largeur du dessableur au minimum.
L’angle de l’élargissement du profil doit être inférieure à 15 °.
Dans la section du canal d’amenée, la vitesse est de l’ordre de 1 à 2 m/s. La vitesse
dans le dessableur par contre est de l’ordre de 0.2 à 0.3 m/s. Même avec un élargis-
sement doux – c’est-à-dire avec un angle inférieure à 15 ° - le ralentissement de
l’écoulement est considérable. Ceci entraîné une perte de charge remarquable. Cette
perte de charge correspond à une transformation en énergie turbulente qui engendre
des tourbillons dans le dessableur ce qui gêne évidemment la décantation. Pour
cette raison, des grilles tranquillisatrices doivent être disposées à l’entrée des dessa-
bleurs.

Figure 5.9: Disposition des grilles tranquillisatrices (Bouvard, 1984)

Une disposition typique des grilles tranquillisatrices est montrée sur la Figure 5.9. En
générale, trois à quatre grilles sont placées dans le tronçon de transition. Des corniè-
res inversées sont souvent utilisées comme barreaux. La distance entre les grilles,
les dimensions des cornières et leur espacement diminuent vers l’aval. Avec une
telle disposition, la taille des tourbillons est limité et ils dissipent leur énergie par
conséquent plus rapidement.
Les barreaux ne doivent en aucun cas toucher le radier. Sinon ils risquent de retenir
des cailloux et de gêner les purges.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Dessableurs 205

5.6 Systèmes de purge


5.6.1 Possibilités
Plusieurs systèmes de purge développés par des ingénieurs suisses sont connus
dans le monde entier. Les trois les plus importants sont présentés sur la Figure 5.10.

rigole de purge vanne de purge

grilles tranquillisatrices déversoir

plaques métalliques vanne


vérin à huile
(purgeur mécanique) de purge

ailettes (purgeur) vanne de purge

Figure 5.10: Systèmes de purge les plus connus (Vischer, Huber, 1993)
a) dessableur "Büchi"
b) dessableur "Bieri"
c) dessableur "Dufour"

Le dessableur "Büchi" fonctionne comme dessableur à purge concentrée tandis que


les deux autre fonctionnent à purge répartie.

5.6.2 Dessableur "Büchi"


Le dessableur du type "Büchi" possède un système de purge très simple. Dès que la
rigole au fond du dessableur est remplie de sable, le dessableur est vidé complète-
ment par la vanne de purge située à l'aval de la rigole. En même temps la vanne de
la prise d'eau est fermée. A la fin de la vidange, le sable est transporté par un écou-
lement torrentiel de la rigole à la rivière. Pour garantir cette condition, la pente de la
rigole doit être assez importante, de l'ordre de 2 à 3%.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


206 Dessableurs

L'inconvénient du système est la vidange complète du dessableur et la fermeture de


la prise d'eau qui sont nécessaires. Par conséquent, la centrale hydroélectrique ali-
mentée par la prise d'eau doit interrompre sa production d'énergie pendant la purge
du dessableur. Au cas de plusieurs bassins parallèles l'arrêt complet de l'usine peut
être évité en purgeant un bassin après l'autre.

5.6.3 Dessableur "Dufour"


Le dessableur du type "Dufour" est équipé d'un purgeur constitué de petites ailettes.
L'écartement de ces ailettes limite le volume d'eau qui passe à travers le purgeur. Le
chenal au-dessous du purgeur évacue l'eau chargé de sable à nappe libre.
La forme des ailettes facilité la purge en dirigeant l'eau dans la bonne direction.
Les ailettes sont souvent réalisée en bois, car ce dernier est très résistant à l'usure
par l'abrasion due au sable.
La purge est en générale continue et la perte d'eau est par conséquent assez impor-
tante. Elle est de l'ordre de 10% du débit équipé.

5.6.4 Dessableur "Bieri"


L'avantage du dessableur du type "Bieri" est que la purge ne doit pas être continue.
Le purgeur consiste en deux plaques métalliques ayant des trous d'une dimension de
l'ordre de 20 x 20 cm (cf. Figure 5.11).
L'une des deux plaques est mobiles, commandée par des vérins à huile. Ceci permet
d'ouvrir et de fermer les orifices (cf. Figure 5.11). Dès que les dépôts de sable au-
dessus du purgeur atteignent un volume critique, la purge est déclenchée automati-
quement en ouvrant les orifices. Le volume ou l'épaisseur des dépôts de sable est
mesuré à l'aide de sonde ultrason, des capteur de pressions placés sous des mem-
branes au fond ou des tiges.

Figure 5.11: Schéma d'un purgeur du type "Bieri"

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 207

6 CANAUX ET GALERIES

6.1 Introduction et utilisation


6.1.1 But
Le but principal d'un canal ou d'une galerie est d'amener l'eau d'un lieu A vers un
lieu B. Cette adduction d'eau peut faire partie d'un ouvrage de protection ou d'un ou-
vrage de production. Regardons deux exemples:

rivière
A

canal ou galerie de
village
contournement

lac

Figure 6.1: Ouvrage de protection

Une rivière passe par un village situé au bord d'un lac. Pendant les événements de
fortes précipitations, le village est menacé par des inondations. En conséquence du
danger, la rivière en crue est dérivée de A directement dans le lac pour protéger le
village. Selon la topographie, le contournement est réalisé par un canal (terrain plat)
ou en galerie (terrain montueux).
Dans le cadre d'un aménagement hydroélectrique, l'eau est amenée par des galeries
et canaux soit dans les réservoirs, soit dans les centrales. D'une part l'eau des bas-
sins versants voisins est captée par des prises d'eau (par exemple prise tyrolienne)
et amenée par une adduction dans le réservoir. En montagne on utilise normalement
des galeries d'adduction, les canaux doivent suivre à peu près les courbes de ni-
veau. D'autre part, l'adduction du réservoir à la centrale se fait par des galeries ou
puits en charge. L'écoulement est évidemment en charge, car le captage se fait au-
dessous du niveau d'eau dans le réservoir.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


208 Canaux et galeries

bassin versant du réservoir réservoir

prises d ’eau en rivière prise d ’eau en lac

galerie en charge

B chambre d ’équilibre
canal ou galerie
à écoulement libre puits en charge

centrale

A
B

Figure 6.2: Ouvrage de production

6.1.2 Utilisation
L'utilisation des canaux et galeries dépend:
• du type d'ouvrage de dérivation
• du type d'écoulement

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 209

Prise d ’eau en rivière Prise d ’eau en lac Déversoir

Ecoulement à surface libre Ecoulement à surface libre


Ecoulement en charge
Ecoulement fluvial Ecoulement torrentiel

Canaux ouverts Galeries en charge Coursiers


Evacuateurs
Canaux couverts Puits en charge Galeries de crue
(enterrés) Puits
Galeries à écoulement
libre

Figure 6.3: Utilisation de canaux et galeries

En combinaison avec une prise d'eau en rivière, l'écoulement doit être forcément à
surface libre. En plus, l'écoulement est fluvial pour limiter les pertes de charge et
chute.
Selon la topographie, les ouvrages peuvent être subdivisés en:
• canaux ouverts (en excavation ou en remblai)
• canaux couverts (enterrés)
• galeries (excavée dans le rocher)
Dans les galeries et puits à l'aval d'une prise d'eau en lac (réservoir) l'écoulement y
est en charge.
Comme déjà mentionné, à l'aval d'un déversoir l'eau est évacuée par un coursier
dans lequel l'écoulement est torrentiel. Dans certains cas le coursier est situé dans
une galerie. Avec un déversoir à crête circulaire l'évacuation de l'eau nécessite un
puits.
Les particularités des coursiers seront traité dans le chapitre sur les évacuateurs de
crue (chapitre 8 Evacuateurs).

6.1.3 Paramètres impliqués


Les paramètres intervenant dans la conception d'une adduction d'eau de A à B en-
globent:
• sa fonction et ses contraintes
• sa réalisation
• son exploitation

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


210 Canaux et galeries

Exigences de Q, pression, qualité


Fonctions et Cas de charges normale et exceptionnelle
contraintes Sécurité
Perte, ) Q, charge etc...

Matériaux (rugosité, durabilité, quantité)


Durée de construction
Réalisation Coût de construction
Impact sur l’environnement

Entretien
Charges annuelles fixes (amortissement,
taxes, impôts etc...)
Exploitation Charges annuelles variables (pertes de
charge)
Impact sur l’environnement

Figure 6.4: Paramètre intervenant dans la conception d'une adduction

Choix de la solution optimale d'une adduction


Concrètement, le choix de la solution optimale d'une adduction doit considérer les
parmètres suivants:
• Paramètres géométriques
Le profil longitudinal est défini par la pente JS est fonction de la topo-
graphie et de la géologie.
Le tracé est fonction de la topographie et de la géologie et détermine
la longueur L.
La forme de la section détermine la surface S.

(en charge)

Figure 6.5: Possibilités de formes de section

• Paramètres hydrauliques
La forme de la section détermine le rayon hydraulique Rh et indirecte-
ment la capacité.
1 2
La pente JS influe sur la vitesse d'écoulement: V = K JS2 R h 3 .
La vitesse d'écoulement V détermine la capacité hydraulique.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 211

La rugosité K dépend du type de revêtement et influence la vitesse


d'écoulement.
V2
Le tracé peut impliquer des pertes de charge locales: )H = %
2 g
• Paramètres d'exécution et d'exploitation
coûts de réalisation
durée de réalisation
stabilité sous la pression intérieure et extérieure
étanchéité (infiltration ou pertes d'eau)
durabilité
coûts annuels fixes de l'exploitation
coûts annuels variables de l'exploitation

6.2 Canaux découverts


6.2.1 Dimensionnement hydraulique

6.2.1.1 Ecoulement uniforme


Les canaux ouverts sont en général dimensionnés pour des conditions stationnaires.
Sur les tronçons de longueur importante sans changement de la géométrie, de la
pente ou de la rugosité, l'écoulement devient par conséquent uniforme. Ceci se tra-
duit par:
J = JS = Jf = Je

Jf
Je

Js
Figure 6.6: Définition d'un écoulement uniforme

Les calculs se font à l'aide de la formule de Strickler:


1 2
V = K J S2 R h 3
et du principe de continuité:
Q=V·A
avec: A: section mouillée
La combinaison des deux équations donne:

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


212 Canaux et galeries

5
1 A 3
Q=K J S
2
2
P 3

avec: P: périmètre mouillé


Pour le dimensionnement hydraulique d'un canal, seul la capacité souhaitée ou le
débit de dimensionnement Qd est connu. Les autres paramètres tels que K, J, A et P
sont les caractéristiques constructives du canal. Un de ces paramètres doit être dé-
terminé à l'aide du dimensionnement hydrauliques, les autres doivent être choisi à
l'aide de contraintes non-hydrauliques.

6.2.1.2 Section optimale du point de vue hydraulique


Comme mentionné au paragraphe précédent, la capacité d'un long canal prismati-
que, de pente et de rugosité uniforme est donnée par:
5
1 A 3
Q=K J S
2
2
P 3

Pour K, J et A données, le débit atteint un maximum au minimum du périmètre mouil-


lé. Théoriquement, le demi-cercle est la section optimale concernant la capacité hy-
draulique. Pratiquement, toutes les formes de sections qui circonscrivent un demi-
cercle sont dites "optimales" (cf. Figure 6.7).
Le facteur de forme ou rayon hydraulique adimensionnel suivant est défini:
Rh A
rF = =
A P
Avec cette définition, le débit devient:
1 4 2
Q = K JS2 A 3 rF 3
La capacité d'un canal augmente donc avec rF.

r = 0.399 r = 0.380 r = 0.354 r = 0.354


F F F F
r

r
r

60°
45°
Q = 100 % Q = 97 % Q = 92 % Q = 92 %

Figure 6.7: Formes de section "optimales" du point de vue capacité hydraulique

La section hydrauliquement optimale n'est cependant pas forcément la plus écono-


mique à construire. Les contraintes non-hydrauliques doivent également être consi-
dérés lors de la conception de l'ouvrage. Ces contraintes concernent les aspect
constructifs et d'exploitation suivants:

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 213

• volume d'excavation
• stabilité des talus
• coûts du revêtement
• acquisition du terrain

6.2.1.3 Ecoulement non-uniforme


S'il s'agit d'un canal court ou d'un canal de pente ou de section variable, l'écoulement
n'est plus uniforme:
J + JS + Jf + Je
amont aval

2
vo
hf = Jf · )l
2 g
2
vu
ho 2 g
Q, v
hu

zo
niveau de référence zu

)l (intervalle de calcul)

1 2

Figure 6.8: Principe de calcul des courbes de remous

Selon l'approche pratique présentée au chapitre sur les seuils et barrages (cf. chapi-
tre 3.4.4.2), l'équation de Bernoulli et le principe de la continuité sont utilisés pour
calculer les courbes de remous.
V12 V2
Bernoulli: z 1 + h1 + = z 2 + h2 + 2 + hf
2 g 2 g
Vm2
avec: h f = J f )L = 4
)L
2
K m R m
3

selon la formule de Manning-Strickler


V1 + V2
Vm =
2
K1 + K 2
Km = , si la rugosité varie
2

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214 Canaux et galeries

R1 + R 2
Rm = pour des canaux non prismatiques
2
Continuité: Q = V1 A 1 = V2 A 2
Au point de départ du calcul, la hauteur d'eau doit être connue. Ceci sera le cas, si
les conditions de l'écoulement sont imposées ou s'il s'agit d'une section de contrôle.
Le calcul est effectué pas à pas, d'une section à l'autre avec la hauteur d'eau calcu-
lée précédemment. Il est impossible de résoudre les deux équation explicitement.
Une procédure itérative doit par conséquent être choisie. La hauteur d'eau inconnue
est par exemple estimée et la charge est calculée selon l'équation de Bernoulli en
considérant les pertes de charge selon Strickler. La charge doit être égale à la
charge du point précédent, sinon l'estimation est corrigée.
L'intervalle de calcul à choisir dépend du nombre de profils à travers connues ou re-
levés. Sans changements brusques de la section, l'intervalle doit être inférieure à un
à deux fois la largeur du canal. La direction du calcul est de l'aval vers l'amont pour
un écoulement fluvial et de l'amont vers l'aval pour un écoulement torrentiel.

6.2.1.4 Canaux courbes (conditions fluviales)


Au chapitre sur les prises d'eau se servant de l'effet de coude, il a été mentionné que
l'écoulement dans les canaux courbes est un phénomène spatial. Ici l'écoulement
fluvial en courbe est examiné.
En admettant des lignes de courant parallèles aux parois latérales du canal, la répar-
tition transversale des vitesses suit la loi suivante:
c
V (r ) =
r
avec: c: constante de la circulation
r: coordonnée radiale
Le niveau d'eau le long des parois latérales du canal courbe est un paramètre inté-
ressant à connaître. La force centripète cause une inclinaison du plan d'eau et par
conséquent une surélévation du plan d'eau à la paroi extérieure (cf. Figure 6.9).

)h
R
hm he
hi

Figure 6.9: Effet de courbe sur le plan d'eau dans la section transversale (écou-
lement fluvial)

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 215

Le théorème de la quantité de mouvement pour un élément de volume radial donne


en tenant compte de la force centripète:
b )0 V 2 b )0
hi2 R + b R hm )0 = h2e R+
2 2 g R 2 2

volume de contrôle (R + b / 2 ) )0

)0

Figure 6.10: Volume de contrôle pour formuler le théorème de la quantité de


mouvement

L'équation ci-dessus peut être simplifiée par )0:

hi2 b V2 h2 b
R + b R hm = e R+
2 2 g R 2 2
Pour b / R << 1, l'expression devient:
h i2 V2 h2
R+ b R hm = e R
2 g R 2
Cette équation peut être simplifiée par R:
he2 hi2 V2
= b hm
2 g R
1 V2
(hi + he ) (1
he hi ) =
4243
b hm
2
14243 g R
)h
hm

V2
avec: F2 =
g hm

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


216 Canaux et galeries

)h b 2
= F
hm R
Cette dernière équation ne donne qu'une valeur théorique de la surélévation du plan
d'eau en courbe. Les observations in situ montrent qu'avec cette équation )h est
souvent sous-estimé. Ceci est due à la distribution non-uniforme de la vitesse trans-
versale.
La dénivellation maximale entre les hauteurs d'eau intérieure et extérieure peut at-
teindre deux fois la valeur donnée par l'équation ci-dessus dans le cas d'un écoule-
ment torrentiel (effet des ondes de choc):
La perte de charge de l'écoulement dans une courbe peut être exprimée comme
perte de charge locale:
V2
)z p = & p
2 g

où &p =
2 ( 2)
2 sin 0

(1+ 2 R b)
2

avec: 0: angle de déviation du canal courbe


&p devient négligeable pour un rayon R grand par rapport à la largeur b du canal.

6.2.1.5 Ecoulement non stationnaire - intumescences dans les canaux (on-


des de translation)
Le changement brusque du débit dans un canal, c'est-à-dire un débit non-
stationnaire avec variation rapide dans le temps, conduit à des intumescences. Ces
derniers sont des ondes de translation soit positives, soit négatives qui remontent ou
descendent le canal.
Un changement brusque du débit peut être provoqués par les manœuvres d'un or-
gane de contrôle tel qu'une vanne. La Figure 6.11 montre le cas d'une diminution du
débit dans le canal par la fermeture d'une vanne.
Par la fermeture partielle de la vanne le débit diminue de Q0 à Q. Une onde négative
se propage vers l'amont avec une surélévation du plan d'eau. Une onde positive
descend vers l'aval avec un abaissement du plan d'eau. La vitesse relative de propa-
gation d'une onde peu profonde est donnée par:
w rel = g h 0
La vitesse effective (célérité) de l'onde est par conséquent égale à:
w = g h 0 ± V0
où: V0 est soustrait pour l'onde négative
V0 est additionnée pour l'onde positive

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Canaux et galeries 217

Onde négative 1 Onde positive

w
hw

l w

h0
Q0 Q0
V0 V0
Q
V

Section -
B

hw

Figure 6.11: Intumescences induit dans un canal par le mouvement d'une vanne

La hauteur hw de l'onde peut approximativement être calculée selon le principe de


continuité (le changement du débit pendant la durée t doit être égal au volume d'eau
au temps t):
t (Q 0 Q) = h w l B
avec: l=w·t
Q0 Q
hw =
w B
avec: Q0: débit avant fermeture de la vanne
Q: débit après fermeture de la vanne
B: largeur moyenne de l'onde
h0: hauteur d'eau initiale
V0: vitesse initiale
t: durée de voyage de l'onde
l: longueur de l'onde

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218 Canaux et galeries

Exemple: Prenons un canal rectangulaire de largeur B = 25 m


hauteur initiale h0 = 4m
3
débit initial Q0 = 100 m /s
vitesse initiale V0 = 1 m/s
3
Le débit diminue à 50 m /s lors de la fermeture d'une vanne de réglage.
La vitesse relative de propagation de l'onde est:
g h 0 = 10 4 = 6.25 m/s
La vitesse effective de l'intumescence qui remonte est de:
w = 6.25 1 = 5.25 m/s
La hauteur de l'onde devient:
50
hw = = 0.38m
25 5.25
Les intumescences peuvent donc atteindre des hauteurs importantes.
La Figure 6.13 montre également le cas de l'ouverture des vannes. Les formules in-
diquées ne donnent qu'une première idée sur les intumescences.
A l'aide de l'équation intégrale de la quantité de mouvement, la vitesse de propaga-
tion de l'onde peut être déterminée plus précisément.
Pour des conditions réelles, les paramètres suivants doivent également être considé-
rés:
• la caractéristique du manœuvre de la vanne (en fonction du temps)
• le frottement dans le canal
• la réflexion de l'onde aux obstacles (par exemple un rétrécissement local) et
à la fin du canal, soit aux parois (sans changement de signe), soit dans le
réservoir (avec changement de signe)
En réalité, l'onde est amortie par le frottement et les pertes de charge.

Temps de réaction d'un canal


Un certain temps après le changement brusque du débit dans un canal, l'écoulement
devient à nouveau stationnaire. Cette durée est appelée temps de réaction du canal.

Organe de
intumescence w réglage )Q

réservoir canal

Figure 6.12: Canal d'amenée d'un réservoir avec organe de réglage à l’aval

Prenons un cas réel. L'eau est captée dans un réservoir et amenée par un canal
dans une zone d'irrigation. Le débit est contrôlé par une vanne de réglage à l'aval du
canal (cf. Figure 6.12).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 219

Fermeture Ouverture
des vannes des vannes

w hw
hw w
h0
h0 V0, Q 0
V0, Q 0
V, Q V, Q

Q0 Q Q0 Q
hW = w = g h0 V0 hW = w = g h0 V0
B w B w

hw w
w hw
h0
V0, Q 0 V0, Q 0 h0
V, Q V, Q
Q0 Q Q0 Q
hW = w = g h0 + V0 hW = w = g h 0 + V0
B w B w

Figure 6.13: Exemple de propagation d'onde dans les cas de la fermeture et de


l'ouverture des vannes

Suite à un changement du débit les conditions stationnaire ne s'établissent qu'après


le temps de réaction. L'information du changement de débit a passée sur tout la lon-
gueur du canal, lorsque l'intumescence a fait un aller et retour. Le temps de réaction
peut par conséquent être écrit comme:
2 L
T=
w
Exemple: L = 1000 m
w = 5 m/s
temps de réaction
T = 400 s
Après 400 s (7 min. environ), un écoulement stationnaire se rétabli.

6.2.1.6 Revanche nécessaire


Le dimensionnement final de la section en travers d'un canal est basé sur le niveau
d'eau maximum stationnaire. Les effets d'écoulement non-stationnaire tels que les
intumescences sont pris en compte en rajoutant une revanche.
Le niveau maximum n'apparaît pas forcément pour les conditions du débit de dimen-
sionnement. Prenons encore une fois l'exemple discuté ci-dessus (cf. Figure 6.12).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


220 Canaux et galeries

Q=0 vanne de
Q = Qd réglage

réservoir canal

Figure 6.14: Canal d'amenée avec organe de réglage fermé sortant d'un réservoir

Si le niveau d'eau à l'amont du canal est donnée par un réservoir, le cas avec la
vanne de réglage fermée (cf. Figure 6.14) est déterminant pour le niveau d'eau dans
le canal (égal au niveau dans le réservoir).
La revanche nécessaire est la somme de la hauteur de l'onde maximale et une
marge de sécurité (cf. Figure 6.15):
f = hw + s

marge de
revanche f sécurité s

hw

niveau maximum en
considérant les
vagues niveau maximum
stationnaire

Figure 6.15: Revanche nécessaire

La hauteur maximum des ondes considère la superposition d'ondes d'origine divers:


• intumescences
• bateaux
• vent
La revanche varie typiquement entre 0.5 et 2.0 m.

6.2.1.7 Stabilité hydraulique de l'écoulement


La transition de l'écoulement torrentiel à l'écoulement fluvial se fait par un ressaut
hydraulique. Dans des canaux, de telles transitions sont en général évité à cause de
l'érosion locale qui s'ensuit.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 221

Un écoulement proche de la condition d'écoulement critique est souvent caractérisé


par une surface ondulée avec des ondes stationnaires. Par conséquent, cette situa-
tion est également à éviter dans un canal à concevoir. Ceci sera le cas pour des
nombre de Froude entre 0.65 et 1.7.
L'intervalle 0.65 < F <1.7 peut conduire à des phénomènes non souhaita-
bles (ondes de surface) dans un canal.

6.2.2 Dimensionnement économique

6.2.2.1 Optimisation économique


Comme mentionnée ci-dessus (paragraphe 6.1.3 sur les paramètres impliqués), un
canal ne peut pas être dimensionnée en considérant uniquement les conditions hy-
drauliques.
Dans le cas d'un écoulement uniforme, la capacité d'un canal est donnée par l'équa-
tion:
1 4 2
Q=K J 2
A 3
rF 3
1
)z 2 4 2
Q=K A 3
rF 3
L

A
avec: rF: facteur de forme, rF =
P
La capacité hydraulique d'un canal dépend par conséquent de cinq paramètres:
• rugosité de la section
• longueur du canal
• différence de niveau le long du canal
• surface de la section
• forme de la section
Le problème de transport de l'eau n'est défini en général que par le débit de dimen-
sionnement, le point de départ et le point d'arrivée du canal (cf. Figure 6.16).

Qd B
A L, )z
Figure 6.16: Données disponibles pour l'optimisation économiques

Pour le choix de la solution optimale d'une adduction, des critères supplémentaires


sont donc nécessaires. Il faut connaître d'une part les contraintes, y inclus les exi-
gences de la protection de l'environnement, et d'autre part les critères économiques.
Les critères économiques concernent essentiellement une minimisation des coûts ou
des charges annuelles. La fonction objective peut s'écrire comme suit:

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


222 Canaux et galeries

C = C(K, )z,L, A, rF ) = min!


avec: C: coûts ou charges annuels
En fait, il s'agit de choisir la forme de la section et le revêtement du canal. Le pro-
blème se réduit donc à deux paramètres:
C = C()z, A ) = min!
Ensuite )z est remplacé par l'équation hydraulique de Strickler:
2
Q
)z = 4 2
L
K A 3
rF 3

Finalement la fonction à optimiser a la section du canal comme seul paramètre:


C = C(A ) = min!
En pratique, les charges annuelles fixes et les frais d'exploitation sont calculés pour
différentes formes (surfaces) de la section transversale du canal. En superposant les
deux courbes, la forme de section optimale du point de vue économique peut être
trouvé.

C [Fr]
Charges annuelles

Charges annuelles totales

Charges annuelles fixes

Frais d'exploitation

A [m2 ]
A1 A2 A3 A4 A5 A6
Aopt
Surface mouillée de la section

Figure 6.17: Forme de section optimale du point de vue économique

En outre des critères économiques, le choix de la solution d'une adduction est éga-
lement influencée par des critères techniques qui limitent par exemple les vitesse
d'écoulement dans le canal.

6.2.2.2 Limitation de la vitesse


Des vitesses d'écoulement trop élevés dans le canal entraînent un risque d'érosion.
D'autre part, des vitesses trop faibles peuvent conduire à des alluvionnements. En

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 223

pratique, ces problèmes sont pris en compte en vérifiant que la vitesse se trouve en-
tre la limite inférieure et la limite supérieure déterminées par expérience.

a) Vitesse maximale pour éviter l'érosion dans les canaux en terrain meuble
Le fond et les rives d'un canal en terrain meuble doivent résister aux contraintes de
cisaillement de l'écoulement. Cette condition s'écrit comme suit:
R 7 cr

Selon la théorie du charriage (cf. paragraphe 2.2.4.4), la contrainte de cisaillement


de l'écoulement est donnée par l'équation suivante:
R = g R h JF
Pour un terrain caractérisé par le diamètre moyen des grains, la contrainte de cisail-
lement critique s'écrit selon le critère de Shields:
cr = cr ( S ) g dm
avec: cr: facteur de Shields ( cr = 0.03 sans aucun mouvement)
Avec la formule de Strickler et de Müller:
V2
Jf = 4
K 2 Rh 3
26
K= 1
dm6
La condition de limitation de la vitesse pour éviter l'érosion peut être écrite comme
suit avec S = 2600 kg/m3:
1 1
V 7 5.7 dm3 Rh 6 = Vcr
Cette équation donne des résultats suffisamment fiables pour des grains de diamètre
dm supérieure à 0.1 mm.

dm = 1 mm dm = 10 mm dm = 100 mm
Rh = 1 m 0.6 1.2 2.7
Rh = 3 m 0.7 1.5 3.2

Tableau 6.1: Vitesses critiques en [m/s] pour une masse spécifique des grains de
3
S = 2600 kg/m

Les vitesses critiques pour des terrain cohésif se trouvent entre 0.5 et 1.4 m/s
(comme pour des sables grossiers).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


224 Canaux et galeries

b) Vitesse maximale pour éviter l'abrasion dans les canaux revêtus


L'abrasion est une fonction de la vitesse d'écoulement et de la composition ainsi que
des caractéristiques mécaniques des sédiments.
En général, le charriage ne traverse pas la prise d'eau. Uniquement les matériaux en
suspension pourraient par conséquent entrer dans le canal. Si la concentration est
assez élevée et si les grains sont dures, comme par exemple le quartz, la vitesse
maximale dans un canal en béton ne doit pas dépasser 4 à 10 m/s.

c) Vitesse minimale pour éviter l'alluvionnement des canaux


Comme mentionné au paragraphe sur les dessableurs, l'objectif de ces derniers est
d'empêcher l'ensablement des canaux à l'aval. Toutes les particules de diamètre in-
férieur au diamètre de dimensionnement restent en suspension néanmoins et pénè-
trent dans le canal. Pour éviter qu'ils décantent, la vitesse d'écoulement dans le ca-
nal doit dépasser une valeur minimale. Selon la théorie du dessableurs, les particu-
les ne décantent pas, si leur vitesse de chute est égale à zéro, par conséquent:
VD = VD0 VT = 0

avec: VD: vitesse de chute des grains dans l'eau agitée [m/s]
VD0: vitesse de chute des grains dans l'eau calme, calculée par
exemple selon la formule de Zanke [m/s]
VT: vitesse de translation (ici: vitesse d'écoulement dans le
canal) [m/s]
: facteur de réduction
0.132
=
h
h: hauteur d'eau dans le canal [m]
Pour le diamètre de dimensionnement, la vitesse minimale peut donc être écrite
comme suit:
VD0
Vmin

Pour un diamètre de dimensionnement de d = 0.2 mm par exemple, la vitesse de


chute selon la formule de Zanke est égale à 0.028 m/s. La vitesse minimale dans le
canal pour éviter la décantation des particules de diamètre inférieur à 0.2 mm
correspond aux valeurs présentées au Tableau 6.2.

h Vmin
[m] [m/s]
1 0.132 0.21
2 0.093 0.30
3 0.076 0.37

Tableau 6.2: Vitesse d'écoulement minimale dans un canal pour éviter la décanta-
tion des particules de diamètre inférieur à 0.2 mm

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 225

d) Vitesse et profondeur d'eau minimales pour éviter la croissance de plantes


aquatiques
La croissances de plantes aquatiques dans un canal dépend des paramètres sui-
vants:
• la vitesse d'écoulement
• la profondeur d'eau
• le climat et la température de l'eau
• la qualité de l'eau
Pour les conditions climatiques de nos régions, les vitesses et les profondeurs mini-
males suivantes sont indiquées dans la littérature :
Vmin = 0.50 ÷ 0.75 m/s
hmin = 1.5 ÷ 2.0 m

6.2.2.3 Conclusions concernant les vitesses d’écoulement optimales


La vitesse d'écoulement optimale dans les canaux revêtus varie entre les valeurs
suivantes:
V = = 1.0 ÷ 2.0 m/s
La vitesse d'écoulement optimale dans les canaux non revêtus varie entre les va-
leurs suivantes:
V = = 0.5 ÷ 1.0 m/s

6.2.3 Canaux trapézoïdaux

6.2.3.1 Canaux en excavation ou en remblai


Pour des raison économiques les canaux découverts sont en général réalisés en
forme trapézoïdale. Selon les conditions topographiques, les canaux sont construit
en excavation ou en remblai.
Les problèmes constructifs suivants sont à considérer:
• stabilité des berges
• protection contre l'érosion (érodibilité)
• étanchéité et interaction avec la nappe phréatique (perméabilité)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


226 Canaux et galeries

Figure 6.18: Canaux en excavation ou en remblai (Vischer, Huber,1993) :


a canal excavé c avec compensation des masses
b canal remblayé d sur du terrain légèrement incliné
e sur du terrain à forte pente
f idem e avec mur de soutènement

6.2.3.2 Stabilité des rives


La stabilité des berges des canaux trapézoïdaux est un problème de stabilité de ta-
lus. La sécurité au glissement est contrôlée à l'aide des méthodes et critères de la
mécanique des sols et des roches.
Le coefficient de sécurité au glissement admis est en général de 1.5. Si le canal n'est
pas muni d'un revêtement étanche, l'effet de l'eau souterraine est à considérer. Elle a
tendance à augmenter le risque de glissement des berges. Les variations du niveau
d'eau dans le canal sont particulièrement dangereuses (cf. Figure 6.19).

variation du plan d'eau

surface de glissement

Figure 6.19: Glissement de berge dans un canal trapézoïdal

Le Tableau 6.3 montre les valeurs de pente de talus stable en fonction du matériaux
en guise de règle approximative.

sable fin 1: 3 et plus plat


sable grossier 1: 2 à 1: 2.5
gravier grossier 1: 1.5 à 1: 2
rocher stable 10: 1 à 5: 1

Tableau 6.3: Pente de talus stable en fonction du matériaux

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 227

6.2.3.3 Protection contre l'érosion - érodibilité des rives


Comme mentionné au paragraphe 6.2.2.2, la vitesse d'écoulement est limitée dans
les canaux non revêtus pour éviter l'érosion. La réduction de l'érodibilité des rives par
la mise en place d'un revêtement en est une autre possibilité. Le revêtement doit pro-
téger les berges contre l'érosion due à l'écoulement. En outre, il doit également résis-
ter aux effets instationnaires tels que les intumescences, le battement des vagues
dues au vent et aux bateaux.
Les différentes possibilités de protection des berges sont énumérées ci-dessous:

a) Stabilisation végétale
La stabilisation se fait par des saules, des aunes ou simplement par des couches
d'herbe.
L'entretien d'une protection végétale est essentielle, car les plantes augment la rugo-
sité et par conséquent le niveau d'eau. Il faut donc régulièrement couper les saules
et les arbres pour qu'ils restent flexibles. En principe, un tiers reste intouché tandis
que les deux tiers sont coupés.
Les contraintes de cisaillement admissibles (résistance au cisaillement) corres-
pondent aux valeurs suivantes:
• couche d'herbe: 50 à 80 N/m2
• saules et aunes: 140 N/m2

b) Enrochements (sans mortier)

enrochements (sans mortier)

1 - 1.5 m minimum
geotextile ou filtre

protection contre
l’affouillement du pied

Figure 6.20: Protection des berges par des enrochements sans mortier

Un géotextile ou un filtre mis en place sous la couche d'enrochement empêche le


processus de délavage des matériaux fins du terrain naturels. Le pied du talus doit
être protégé contre l'affouillement par une fondation suffisamment profonde.
Le dimensionnement des enrochements a été traité au paragraphe 2.2.4.7. La mé-
thode de Stevens est bien adaptée.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


228 Canaux et galeries

c) Empierrement avec du mortier

blocs de rocher (placés dans une couche de mortier)

mortier

év. protection du pied par des


traverses de chemin de fer ou
des pieux en bois.

Figure 6.21: Protection des berges par un empierrement avec du mortier

d) Revêtement en bitume

bitume

couche de
drainage
tuyau de
drainage

Figure 6.22: Protection des berges par un revêtement bitumineux

Une couche de drainage sous la couche de bitume est indispensable au cas de ris-
que de surpressions à canal vide.
La protection à l'aide de bitume est choisi pour un canal qui doit être étanche. Le
fond est par conséquent également revêtu.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 229

e) Revêtement en béton (ev. gunite, éléments de béton préfabriqués)

béton (avec armature de treillis,


dosage 200 à 300 kg/m3)

joint de construction
remplis avec du
bitume

couche de év. tuyau de


drainage év. écran d’étanchéité
drainage
(palplanches)

Figure 6.23: Protection des berges par un revêtement en béton

Du point de vue écologique et de l'environnement les revêtement complètement


étanche comme l'empierrement avec du mortier, le bitume ou le béton sont moins
favorables. Ils empêchent toute infiltration dans la nappe phréatique et pratiquement
toute vie aquatique.
La surface de tels revêtements est souvent cachée par des enrochements ou des
couches de terre (cf. Figure 6.24).
Dans la mesure du possible, les canaux artificiels sont de nos jours protégés par une
combinaison de stabilisation végétale et d'enrochement pour leur donner une fonc-
tion écologique aussi grande que possible.

Coupe à travers du canal

Niveau d ’eau d ’exploitation

Recouvert par terre végétale

20 cm de terre végétale
15 cm Empierrement placé dans l ’asphalte
Couche d ’étanchéité de 8 cm en asphalte
Couche de portance de 10 cm en asphalte
Couche de protection de 8 cm en asphalte
Consolidation du sol avec du ciment

Figure 6.24: Exemple du canal du Rhin au Danube

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


230 Canaux et galeries

6.2.3.4 Etanchéité – interaction avec la nappe souterraine


La question de l'étanchéité d'un canal dépend avant tout de l'interaction avec la
nappe souterraine. En principe, les deux cas suivants peuvent être distingués:
1. Le plan d'eau dans le canal est plus haut que la nappe souterraine.
2. Le niveau d'eau dans le canal est plus bas que la nappe phréatique.
Le cas, où les deux niveaux sont identiques sont rare pour les canaux artificiels.

Cas 1: Niveau d'eau du canal plus haut que le niveau de la nappe


Si le canal n'est pas rendu étanche par un revêtement, l'eau du canal s'infiltre dans le
terrain pour s'écouler vers la nappe souterraine. Les lignes de courants pour des di-
vers types de canaux sont présenté sur la Figure 6.25.

canal

ev. résurgence

nappe phréatique pérméable


nappe phréatique impérméable

ev. résurgence

pérméable

Figure 6.25: Ecoulements souterrains autour d'un canal artificiel en présence


d'une nappe phréatique (Vischer , Huber, 1993)
a) niveau de la nappe inférieur au niveau d'eau dans le canal, canal
en remblai sur terrain imperméable
b) niveau de la nappe inférieur au niveau d'eau dans le canal, canal
en remblai sur terrain perméable
c) niveau de la nappe inférieur au niveau d'eau dans le canal, canal
en excavation dans terrain perméable
d) supérieure au niveau d'eau dans le canal, canal en excavation
dans terrain perméable

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Canaux et galeries 231

L'infiltration de l'eau dans le terrain voisin du canal peut poser les problèmes sui-
vants:
• érosion interne de la digue par le phénomène du renard (instabilité hydrau-
lique) et par conséquent mise en danger de sa stabilité (glissements)
• alimentation de la nappe souterraine avec les conséquences positives ou
négatives suivantes:
le niveau de la nappe monte presque à la surface du terrain qui
conduit à des dégâts aux bâtiments environnants dus à l'humidité et
une transformation du terrain en marais
pollution de l'eau souterraine ou toute au moins une réduction de sa
qualité
Deux mesures préventives différentes contre l'infiltration sont en principe possibles:
• éviter ou limiter les fuites d'eau à l'aide de système d'étanchéité
• canal de drainage le long du canal principal (contre canal)
• combinaison des deux solutions
La Figure 6.26 montre différents systèmes d'étanchéité:
a) revêtement du canal
dalles en béton avec armature en treillis et un dosage en ciment entre
200 à 300 kg/m3, écartement des joints de construction jusqu'à 8 m,
étanchéité des joints au bitume
enrobé, masque en béton bitumineux, éventuellement en plusieurs
couches (fondation, étanchéité, protection)
b) écrans d'étanchéité dont la profondeur doit atteindre les couches imperméa-
bles (cf. également paragraphe 3.5.2):
parois en béton
rideau de palplanches
parois moulées
parois mince en argile
injections
c) digues homogènes étanches dans le cas d'un terrain de fondation imperméa-
ble
d) digues à noyau étanche:
couches d'argile recouvert et protégé par des enrochements

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232 Canaux et galeries

revêtement étanche remblais

fond perméable

ev. canal de drainage remblais

rocher voile
dense fond perméable étanche

filtre digue
étanche

fond imperméable

noyau en
argile
remblais

fond perméable

Figure 6.26: Systèmes d'étanchéité (Vischer, Huber, 1993)


a) revêtement étanche
b) voiles étanches
c) digue en matériaux étanches sur fond étanche
d) digue à noyau étanche

La deuxième méthode d'éviter des problèmes dus aux infiltration consiste en la cons-
truction d'un canal de drainage le long du canal principal, qui est appelé contre canal
(cf. Figure 6.27).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 233

canal de drainage
limitation du niveau
de la nappe supérieure

Figure 6.27: Lignes équipotentielles de l'écoulement souterrain autour d'un canal


avec contre canal

Cette solution est pratiquement toujours combinée avec un des systèmes d'étanchéi-
té discutés ci-dessus.

Cas 2: Niveau d'eau dans le canal est plus bas que le niveau de la nappe (cf.
Figure 6.25 d))
Si le plan d'eau dans le canal se trouve en dessous du niveau de la nappe phréati-
que, le canal se comporte comme canal de drainage. Les conséquences peuvent en
être les suivantes:
• érosion interne des talus de la digue par l'effet du renard et par conséquent
instabilité des berges
• abaissement de la nappe souterraine proche du canal avec les conséquen-
ces positives ou négatives suivantes:
diminution de l'eau souterraine utilisable pour l'alimentation en eau po-
table
dégâts au bâtiment et structures environnants dus aux tassements
(consolidation du terrain)

10 cm canal vide
1.5
terrain saturé 1
enrobé bitumineux
Pmax
= 0.2 m
g

Figure 6.28: Sous-pressions maximale admissible pour un enrobe en béton bitu-


mineux

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


234 Canaux et galeries

Les mesures préventives contre le drainage du terrain par le canal consiste surtout
en la construction d'écrans d'étanchéité. Le revêtement du canal est une solution peu
praticable, car il est constamment soumis à des sous-pressions (poussée d'Archi-
mède) dues à l'eau souterraine. Un enrobé en béton bitumineux de 10 cm d'épais-
seur ne résiste qu'à des sous-pressions de 20 cm au cas d'une pente de talus de
1: 1.5.

6.2.4 Canaux rectangulaires


Si le terrain disponible ne permet pas de réaliser des canaux trapézoïdaux, la cons-
truction d'un canal rectangulaire avec des parois résistant aux sollicitations intérieu-
res (eau) et extérieures (poussée des terres, sous-pressions) s'avère être la solution
adéquate.

Figure 6.29: Canaux rectangulaires avec des parois résistantes à la flexion (Vis-
cher, Huber, 1993)

La Figure 6.29 montre schématiquement quelques types de solution pour des ca-
naux rectangulaires avec des parois résistantes à la flexion:
a) mur de soutènement unilatéral
b) mur de soutènement bilatéral
c) mur de soutènement bilatéral avec revêtement du fond (lissage)

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Canaux et galeries 235

d) auge
e) auge avec raidisseurs
f) combinaison auge - mur de soutènement avec semelle arrière
g) paroi moulée ou pieux jointifs ev. ancrés
Les problèmes constructifs de ce type de canaux sont les suivants:
• stabilité des parois surtout à canal vide
• résistance à l'érosion et à l'abrasion
• étanchéité
Au cas de murs en béton, l'étanchéité est assez facile à réaliser en utilisant des
étanchements du type "waterstop" pour les joints de construction. La formation des
fissures excessive peut être empêché par la pose d'une armature minimale.

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236 Canaux et galeries

6.3 Canaux recouverts et galeries à écoulement libre


6.3.1 Comparaison canaux - galeries
En Suisse, les galeries à écoulement libre sont souvent préférées aux canaux pour
les raisons suivantes:
• topographie souvent défavorable dans les régions alpines
• danger de glissement de terrain, de chute de pierres et d'avalanches
• croisement d'ouvrages existants (routes, chemin de fer, etc.)
• protection du paysage
• acquisition du terrain
• en rocher stable une galerie est plus économique
D'autre part dans le cadre des projets étrangers, on donne souvent la préférence aux
canaux pour les raisons suivantes:
• topographie souvent plutôt favorable
• manque d'ouvriers compétents pour l'excavation des galeries (mineurs)
• problème de durée du chantier (un canal peut être commencé à plusieurs
endroits
• section minimale d'une galerie (sécurité du travail)

6.3.2 Dimensionnement hydraulique


Il existe une grande différence entre les canaux ouverts et les galeries ou les canaux
couverts à écoulements libre:
Dans les galeries et les canaux couverts à écoulement libre, le degré de
remplissage influence l'écoulement.
La forme circulaire étant fréquente pour les galeries, elle est étudiée plus en détail ci-
dessous.

6.3.2.1 Ecoulement uniforme


Le paramètres géométrique d'une section circulaire sont définis comme suit (cf. éga-
lement Figure 6.30):
D
h= (1 cos 0)
2
P=D 0
D2
A= (0 sin 0 cos 0 )
4

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Canaux et galeries 237

D
0

Figure 6.30: Paramètres géométriques d'une section circulaire

En admettant un écoulement uniforme, l'équation de Manning-Strickler s'écrit:


5
Q 1 0 sin 0 cos 0 3

1 8
= 2
K Js 2 D 3
0 3 4

Pour le remplissage complet, on peut écrire:


h=D 0 = 180°
1 8
K Js 2 D 3
QP = 5
4 3

Le débit relatif devient:

Q (0 sin 0 cos 0 )
5
3
q= = 2
QP 0 3
La Figure 6.31 montre la relation entre le débit relatif et la hauteur d'eau normalisée
par le diamètre dans une galerie circulaire partiellement remplie. Dans le domaine
h
0.8 < < 1 deux hauteurs uniformes existent pour un même débit.
D

Figure 6.31: Relation entre le débit relatif q = Q / Qp et la hauteur d'eau normali-


sée h / D dans une galerie circulaire partiellement remplie (Sinniger
et Hager, 1989)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


238 Canaux et galeries

Cette ambiguïté a été vérifiée par des essais en laboratoire, mais avec une relation
un peu différente à cause de l'effet de l'air, les ondes de surface et l'absence d'un
écoulement uniforme. Une bonne approximation des observations est donnée par les
équations suivantes:
12 2 7 2
q= y 1 y
5 12
1
62
( 3
)
2
où: y=4 3 9 28 q 1 (valable pour y < 0.95)
57 2
Q
q= 1 8
K Js 2 D 3
En pratique, les phénomènes d'un écoulement proche du remplissage complet sont
évité dans la mesure du possible. L'ambiguïté des deux hauteurs d'eau pour un seul
débit peut conduire à des vibration et des chocs. La hauteur d'eau est par consé-
quent limité en dessous de cette zone. Pour une galerie circulaire, cette limitation
s'écrit comme suit:
h 7 0.75 D
Les hauteurs d'eau admissible pour les autres formes de section sont montrées sur
la Figure 6.32.

Section rectangulaire Section circulaire Section en fer à cheval Section en arc de voûte

r r
H D D
D

hB hB hB
H
hB
m
B
B

Qplein: h = 0.86 H Q plein: h = 0.82 D Q plein: h = 0.85 D m=B:


Qmax: h = 1.00 H Q max: h = 0.92 D Q max: h = 0.95 D Qplein: h = 0.85 H
Qprat: hD = 0.80 H Q prat: hD = 0.75 D Q prat: hD = 0.83 D Qmax: h = 0.95 H
Qprat: hD = 0.83 H
m+B: r
hD = m +
2

Figure 6.32: Hauteurs d'eau admissible pour éviter les phénomènes d'écoulement
dus à un remplissage quasi complet d'une galerie ou d'un canal re-
couvert

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 239

6.3.2.2 Sections optimales et réserve de capacité


Analogue aux canaux découverts, la section optimale des canaux recouverts est
proche du cercle pour le remplissage complet (cf. Figure 6.33).

rF = 0.282 rF = 0.265 rF = 0.250 rF = 0.399

r r r
2 r

Q = 79% Q = 76% Q = 73% Q = 100%

Figure 6.33: Section transversale optimale d'un canal couvert

Si l'on compare le facteur de forme de différentes section de même surface, on cons-


tate que la capacité des canaux découverts est toujours supérieure à celle des ca-
naux recouverts. Les conséquences de ce fait sont décrit dans le paragraphe ci-
dessous.
Le débit de dimensionnement d'un aménagement d'exploitation (hydroélectrique, irri-
gation, alimentation) est en général bien défini. Pour les ouvrages de protection – par
exemple une déviation de crues – le débit de dimensionnement est par contre une
grandeur statistique soumise à des incertitudes. Dans ces cas, le risque de dépas-
sement de la capacité est plus élevée pour un canal recouvert ou une galerie, car
leur réserve de capacité est inférieure à celle d'un canal ouvert.

64 m3/s
1.00

48 m3/s 110 m3 /s
1.00

48 m3/s
3.00

2.25

4.00 m 2.00 m

Figure 6.34: Comparaison de la réserve de capacité entre un canal rectangulaire


recouvert et un canal trapézoïdal ouvert

La Figure 6.34 représente la comparaison de la capacité entre un canal rectangulaire


recouvert et un canal trapézoïdal ouvert. La réserve de capacité de ce dernier est
presque le double de celle du canal couvert, surtout dû au dA / dh plus grand du ca-
nal ouvert et à la rugosité du plafond du canal couvert.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


240 Canaux et galeries

6.3.2.3 Ecoulement non-uniforme


Le calcul des écoulements non-uniforme se fait de la même manière comme pour les
canaux découverts. Les phénomènes suivants sont appelés écoulement non-
uniforme:
• les courbes de remous
• les ressauts hydrauliques
Les phénomènes de remplissage presque complet, du remplissage brusque et la
capacité réserve limitée peuvent poser des problèmes lors d'un écoulement non-
uniforme.
La formation d'un ressaut a des conséquences importante lors du choix de la hauteur
du canal recouvert (cf. Figure 6.35 b)).

6.3.3 Dimensionnement économique


Le dimensionnement économique d'une galerie ou d'un canal couvert se fait ici selon
la même démarche qu'au paragraphe 6.2.2 en examinant un exemple concret.

a) écoulement fluvial

ralentissement débit uniforme

hcr

long tronçon

b)

torrentiel ressaut fluvial

ralentissement

hcr

c) fluvial torrentiel

hcr
hcr

Figure 6.35: Influence de la formation d'un ressaut sur le choix de la hauteur d'un
canal couvert

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Canaux et galeries 241

conduite en charge

socle

Jopt = ?

Figure 6.36: Dimensionnement économique d'une conduite de dérivation

C [Fr]
coûts de construction
Cmin

coûts de construction totaux

coûts d’excavation CE

coûts du canal ou de la conduite CC

J
J opt
pente [%]

Figure 6.37: Optimisation des coûts de construction du canal de dérivation

Une petite rivière doit être dérivée dans la rivière principale à l'aide d'une conduite
circulaire rectiligne (cf. Figure 6.36). Le tracé doit être aussi court que possible. Plus
grande la pente choisie, plus petit est le diamètre nécessaire en considérant une
conduite enterrée. Par contre le volume d'excavation augmente avec la pente. Il
existe par conséquent une pente optimale du canal qui détermine la longueur, c'est-
à-dire le profil en long et en même temps le diamètre optimale.
La fonction objectif peut être écrite comme suit:
C(J) = C C + CE = min(C)
avec: C: coûts de construction
CC: coûts du canal (conduite enterrée)
CE: coûts d'excavation
Il est clair qu'il existe des contraintes techniques – par exemple la vitesse maximum
d'écoulement pour éviter l'abrasion – qui doivent être considérés également dans ce
cas.

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242 Canaux et galeries

6.3.4 Galeries en écoulement libre


La forme de la section d'une galerie dépend surtout de la méthode d'excavation. En
combinaison avec la méthode traditionnelle à l'explosif (forage, minage, marinage)
les profils à radier horizontal sont préférable. Le profil est forcement circulaire pour
une galerie excavée au tunnelier.

cintre métallique section minimale

Figure 6.38: Formes de section transversale d'une galerie (excavée à l'explosif)

Le type de revêtement est choisi selon la qualité du rocher et de la rugosité de la sur-


face souhaitée. La Figure 6.38 montre quelques profils en U ou en fer à cheval typi-
ques et souvent utilisés.
• Le profil type I est utilisé dans le rocher stable. Le radier et la rigole sont
bétonnées pour que l'eau s'écoule plus facilement pendant la phase d'ex-
cavation et la vidange. Pour protéger la surface du rocher et la rendre plus
lisse, les parois et la calotte sont souvent revêtu par du béton projeté. La
rugosité selon Strickler varie entre 25 et 35 m1/3/s.
• Le profil type II consiste en un revêtement de la calotte en béton dans un
rocher légèrement friable. Il s'agit de béton coffré ou de béton projeté avec
un dosage en ciment de 250 à 300 kg/m3.
• Le profil type III est utilisé dans un rocher friable où un revêtement complet
est indispensable. En général, du béton coffré avec un dosage en ciment
de 250 à 300 kg/m3 est choisi. La rugosité d'une telle surface varie entre 75
et 85 m1/3/s selon Manning-Strickler.

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Canaux et galeries 243

• Le profil type IV s'adapte bien à un rocher de mauvaise qualité avec des


éboulement et une forte poussée active où un revêtement de forme circu-
laire s'avère nécessaire. L'excavation du profil se fait avec un radier hori-
zontal. Pendant l'excavation la pose d'un soutènement en continu (cintres
métalliques, béton projeté) au front d'attaque est en général nécessaire.
Pour faciliter l'excavation et le marinage du rocher ainsi que pour permettre un pas-
sage à pied sec lors des contrôles de la galerie, un gabarit minimum est en général
garanti même pour les débits de dimensionnement faibles. La largeur et la hauteur
minimales sont de 2.3 m pour permettre la circulation des machines de chantier.
Dans le cas d'une excavation au tunnelier le diamètre minimum est de 2.8 à 3.0 m en
rocher stable. Pour un rocher friable, le diamètre doit être plus grand pour disposer
d'une place suffisante pour l'installation d'un soutènement provisoire. Ce dernier
consiste par exemple en:
• béton projeté (ev. armé avec un treillis)
• boulons d'ancrage
• cintres métalliques
• tôles spéciales

6.4 Ouvrages particuliers – traversées


Des ouvrages particuliers sont nécessaires, si le canal doit traverser d'autres amé-
nagements tels que les routes (cf. Figure 6.39).
Suivant les conditions, les ouvrages suivants peuvent être choisis:
1) ponts à canal, aqueducs
L'étanchéité au raccordement avec le terrain naturel constitue le problème
majeur de ce type d'ouvrage.
2) siphons
Le transport de sédiments (vitesse minimum pour toute la gamme de dé-
bits) et l'entraînement d'air constituent les problèmes majeurs de ce type
d'ouvrage.
3) ponceaux
La réserve de capacité limitée à remplissage complet constitue le problème
majeur de ce type d'ouvrage.

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244 Canaux et galeries

pont canal

entrée, évacuation d'air exutoire

vidange siphon

ouvrage de mise en charge exutoire

siphon vidange

route / rail

canal ouvert canal fermé


ou ruisseau

vanne rivière
niveau de crue

niveau moyen
niveau d'étiage
canal ouvert canal fermé
ou ruisseau avec réservoir

Figure 6.39: Ouvrages particuliers pour les traversées (Vischer, Huber, 1993)
a) aqueduc b) siphon c) siphon
d) ponceau e) ponceau avec organe de contrôle

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 245

6.5 Conduites et systèmes d’adduction en charge


6.5.1 Ouvrages des systèmes d'adduction d'eau
Les systèmes d'adduction d'eau en charge pour les aménagements hydrauliques
consistent en des ouvrages suivants:
• galeries en charge
• puits en charge
• conduites forcées
• chambres d'équilibre.
Ces ouvrages sont habituellement réalisés dans le cadre d'un aménagement hydroé-
lectrique, mais parfois également pour des adductions d'eau potable ou d'irrigation.
Dans le cas d'un aménagement hydroélectrique, le rôle des galeries, puits et condui-
tes forcées est évidemment de relier la retenue – ou le bassin de compensation –
avec la centrale hydroélectrique. Les objectifs sont les suivants :
• limitation des pertes de charge dans la mesure du possible
• limitation des pertes d'eau dans la mesure du possible.
Ces deux objectifs sont fonction des critères économiques du projet.
Un ouvrage est appelé galerie en charge, si la pente du radier est faible (< 10 %) et
la pression intérieure modérée (< 20 à 40 bar).
Les puits en charge, par contre, ont des fortes pentes, jusqu'à 100% ou approchant
la verticale. La pression intérieure augmente par conséquent de haut en bas et de-
vient importante selon la chute totale.
L'importante pression dans les puits en charge nécessite en général un revêtement à
haute résistance tel que les blindages en acier. Par contre, un revêtement simple en
béton est suffisant pour les galeries en charge. Dans des conditions hydrogéologi-
ques et géologiques favorables, le revêtement peut être omis, surtout dans le cas
d'une excavation par tunnelier.

6.5.2 Dimensionnement hydraulique

6.5.2.1 Régime d'écoulement


Pour les écoulement à surface libre, on distingue entre le régime fluvial et le régime
torrentiel. Pour les écoulements en charge, ces régimes n'existent pas. Il peut par
contre être également être distingué entre un écoulement laminaire et un écoulement
turbulent.
L'écoulement laminaire est caractérisé par des lignes de courant parallèles. Dans un
écoulement turbulent par contre, les trajectoires sont aléatoires. La transition entre
les deux régimes a été trouvé par Reynolds. Selon ses essais physiques en 1883 (cf.
Figure 6.41), l'écoulement turbulent s'établit pour des nombres de Reynolds supé-
rieurs à 2300.
Le nombre de Reynolds R est définit comme suit:

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


246 Canaux et galeries

V D
R=
"
avec: V: vitesse moyenne
D: diamètre du tuyau/conduite
@: viscosité cinématique
@ = 1.316 · 10-6 m2/s pour de l'eau à 10°C
La signification de cette limite peut être étudiée à l'aide d'un exemple. Prenons une
conduite de diamètre de 1 m. La vitesse à la limite de la turbulence se calcule par:
@ 2300
V2300 =
D
= 1.316 10 6 2300
= 0.003 m/s
Dans les conduites des constructions hydrauliques l'écoulement est en général
turbulent !

6.5.2.2 Pertes de charge


Les pertes de charge dues au frottement sont calculées selon l'équation de Darcy-
Weissbach:
v2 L v2 1
)h f = f Jf = f
2g D 2g D
avec: f: coefficient de frottement
Le coefficient de frottement dépend des deux paramètres suivants:
a) la rugosité de la paroi qui a été exprimé par une rugosité équivalent de sa-
ble selon Nikuradse (cf. Figure 6.40)
b) du liquide et du type d'écoulement caractérisé par le nombre de Reynolds R
(cf. paragraphe 6.5.2.1).

ks rugosité équivalent sable

k rugosité réelle

Figure 6.40: Définition de la rugosité équivalent de sable selon Nikuradse

En définissant une rugosité relative par


kS
/=
D

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 247

le coefficient de frottement devient une fonction de / et de R:


f = f (/,R )
Pour les conduites commerciales avec un écoulement en régime turbulent, Cole-
brook et White propose la formule suivante:
1 6 / 2.51 3
= 2 log 4 + 1
f 5 3.71 R f 2
kS
/= caractérise la rugosité relative des parois. kS, appelée rugosité équivalente de
D
sable, est égale au diamètres des grains de sable qui engendraient la même perte
de charge que la rugosité naturelle de la conduite commerciale (cf. Figure 6.40).
Cette formule était présentée pour la première fois par une abaque adimensionnel
par Moody (cf. Figure 6.41). Cette représentation de l'équation en coordonnées loga-
rithmiques est encore de nos jours appelé diagramme de Moody.
Les zones suivantes peuvent être distinguées sur le diagramme à la Figure 6.41:
64
• écoulement laminaire: f= (pratiquement inexistant)
R
• écoulement turbulent:
zone hydrauliquement rugueuse: f (/ )
zone de transition: f (/,R )
zone hydrauliquement lisse: f (R )

écoulement zone zone tuyaux rugueux


laminaire critique de transition
coefficient de frottement

rugosité relative

tuyaux lisses

nombre de Reynolds

Figure 6.41: Diagramme de Moody

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248 Canaux et galeries

Zone hydrauliquement rugueuse


Les conduites avec un écoulement caractérisé par cette zone sont appelée rugueu-
ses. Cela signifie que la viscosité peut être négligée est le facteur de rugosité s'ex-
prime par:
1 6 / 3
= 2 log 4 1
f 5 3.712
L'influence de la pesanteur, et par conséquent du nombre de Froude devient égale-
ment négligeable.
Dans le domaine rugueux, les pertes de charge peuvent également être calculée se-
lon la formule de Strickler:
10
hf v2 4 3 Q2
= Jf = 4
= 16
L K 2 Rh 3 K 2 D 3 2

La relation entre f et K est donnée par:


V2 V2 D
f D= 4
Rh =
2 g K2 R 3 4
h

1
avec: f= 2
6 / 3
4 2 log 3.71 1
5 2
kS
/=
D
on obtient:
1
K Rh 6 6 / 3
= 8 4 2 log
g 5 3.71 12
6 kS 3
= 8 4 2 log 1
5 14.84 R h 2

en posant:
1
ks K ks6 1 6 /' 3
= /' = 8 /' 6
4 2 log 14.84 1
Rh g 5 2

Pour une large gamme de /', il peut être écrit:


25.7
K, 1
pour 104 < R < 107
k S
6

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 249

a
K= 1
dn 6

avec: a: constante
dn: diamètre représentatif des particules du lit
n: pourcentage des particules de diamètre inférieur à dn
En posant:
kS = dn
on obtient:
25.7
K= 1
dn 6

Selon les essais de différents auteurs, a = 25.7 impose:


n = 84%
et par conséquent:
25.7
K= 1
d 846
En comparaison, Meyer-Peter et Müller proposent (couche de pavage intacte, sinon
avec dm):
26
K= 1
(lit plat)
d 6
90

Strickler propose la formule suivante (couche de pavage intacte, sinon avec dm):
21.1
K= 1
(lit naturel)
d 6
90

Figure 6.42: Formules empirique pour la définition de K en fonction de kS dans les


canaux selon divers auteurs

Zone de transition
Selon Colebrook-White l'expression analytique de f (/,R ) s'écrit comme suit:
2
1 6 5.74 3
= 42 log 1
f 5 R 0.9 2
Cette expression n'a pas de solution explicite.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


250 Canaux et galeries

Zone hydrauliquement lisse


Les conduites avec un écoulement représenté par cette zone sont appelées condui-
tes lisses. Ceci signifie que la rugosité équivalent sable kS tend vers zéro et que par
conséquent la rugosité relative s'approche également de cette valeur.
1 6 2.51 3
kS 0 / 0 = 2 log 4 1
f 5R f 2
Une approximation de cette formule a été proposée par Swamec et Jain :
2
1 6 5.74 3
= 42 log 1
f 5 R 0.9 2
Exemple: D = 3.0 m
V = 3.0 m/s
-6 2
n = 1.3 ·10 m /s
kS = 1 mm
Le coefficient de frottement f et la pente de la ligne d'énergie
V2 f
Jf = sont à calculer.
2 g D
k
/ = S = 1 10 3
D 3
V D
R= 6
= 6.92 10 6
1.3 10
Hypothèse: écoulement pratiquement rugueux
1 6 / 3
= 2 log4 1 f = 0.0153
f 5 3.712
Vérification avec le nombre de Reynolds f = 0.01548
La pente de frottement Jf est finalement égale à 0.0023, donc 2.3 mm sur
1 m ou 2.3 m/km.
Le coefficient de Manning-Strickler correspondant devient:
V2 f
Jf = 0.0023 =
2 g D
V2 1
= 4
K = 76 m 3 /s

K 2 Rh 3

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 251

6.5.2.3 Calcul de l'écoulement en section prismatique

v 2 )L
2 hf = f
v 1 2g D
2 g ligne de charge

v 22
2 g
p1
g ligne de pression
p2
g

z1
z2

niveau de référence
L

1 2

Figure 6.43: Exemple d'une conduite cylindrique ou prismatique

Le dimensionnement hydraulique d'un tuyau ou d'une conduite se base sur l'équation


de Bernoulli et la condition de continuité:
2 2
v1 p v p
Bernoulli: + 1 + z1 = 2 + 2 + z 2 + h f
2g g 2g g
Continuité: Q = v1 A1 = v 2 A 2
La seule grandeur connue lors du dimensionnement hydraulique est le débit Q.
L'équation de Bernoulli ne suffit donc pas pour déterminer les grandeurs nécessai-
res:
• pente de frottement hf
• diamètre D ou rayon hydraulique Rh
• rugosité / ou kS
• longueur L
Les conditions ou les contraintes non hydrauliques doivent par conséquent être
connues. En pratique, hf et L sont souvent le résultat du dimensionnement économi-
que. / ou kS sont fonction du choix du matériau de la conduite. Finalement D ou Rh
est le seul paramètre à déterminer lors du dimensionnement.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


252 Canaux et galeries

6.5.2.4 Calcul de l'écoulement en section variable


Pour le dimensionnement hydraulique d'une conduite à section variable, le coefficient
de perte de charge généralisé est utilisé:
A u2
*
i (
& = & L i + & Ri ) A i2
avec: &Li: coefficient de perte de charge locale
&Ri: coefficient de perte de charge due au frottement
Au: section de référence (section de sortie)
L'indice u se réfère à la section de référence de la conduite, en générale située à la
sortie:
1
2

2 g H
Q = Au N
1+ &*i
0

Les pertes de charge locales résultent:


• d'un élargissement brusque ou graduel
• d'un rétrécissement
• d'une jonction
• d'une bifurcation
• d'un coude
Les coefficients de pertes de charges locales sont présentés dans le TGC 15 de Sin-
niger et Hager (1989).

6.5.3 Dimensionnement économique

6.5.3.1 Tracé
En pratique, le tracé optimal peut être trouvé à l'aide d'une comparaison de varian-
tes. Ces variantes sont basées sur des considérations théoriques suivantes:

Les coûts de la conduite par mètre linéaire sont fonction du lieu

cher
B

Figure 6.44: Le coût de la conduite par mètre linéaire est fonction du lieu ; le tracé
optimal du point de vue économique n'est souvent pas le plus court

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 253

Le tracé optimum qui entraîne les coûts de constructions minimaux ne correspond


par conséquent pas forcément au tracé le plus court (cf. Figure 6.44). La fonction
objective devient:
B
C = P ds = min !
A

avec: C: coûts totaux de la conduite


P: coûts locaux de la conduite
s: longueur curviligne de la conduite
La solution de ce problème est pour certain cas identique à la loi de réfraction en op-
tique. La Figure 6.45 illustre deux de ces cas sous le numéro b) et c).
b) La conduite entre dans un terrain où les coûts d'achat et/ou d'excavation
sont plus élevés.
c) La conduite travers un terrain où les coûts d'achat et/ou d'excavation sont
moins élevés.
d) La conduite évite un terrain où les coûts d'achat et/ou d'excavation sont très
élevés.

pA pB
a c

A B A B
ds
sin pB
=
p économique sin pA cher

b sin 0 p p pS p d pG pG économique
= sin / =
sin / p S p
0
A / B
/
/
0 /
A B
cher cher p cher
économique

Figure 6.45: Détermination du tracé optimal

Les coûts de la conduite par mètre linéaire dépend du tronçon


Si la conduite doit non seulement lier les deux points A et B, mais également le point
C, la situation devient plus compliquée.
Si les coûts de construction dépendent uniquement du tronçon et ne varient pas
localement, la fonction objective devient:

C = A pi Li = min !
par exemple: C = pA LA + pB LB + pc LC = min !

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


254 Canaux et galeries

Le résultat du calcul montre que le point X doit se trouver au point, où la somme vec-
torielle des prix est nulle. Il existe par conséquence une analogie avec la statique, en
particulier avec l'équilibre de cordes.
L'exemple a) de la Figure 6.46 montre des tronçon à coûts différents, b) à coûts iden-
tiques. Dans l'exemple c) les coûts d'un tronçon sont beaucoup plus élevés que ceux
des autres tronçons.
En outre des coûts d'un tronçon, la rapidité d'exécution joue également un rôle
important en pratique. En faite, la durée de construction influence indirectement les
coûts (mise en fonction de l'ouvrage).

a b c
B
B
9 LB A B
pb 120° LA LB
A LA
A pA pb
pA X 120°

LC 120°
pC X=C
C
p C
pA
pC pA
pC p p
pb
pb

Figure 6.46: Tracé économique pour une conduite liant trois points

6.5.3.2 Section
La section transversale ou le diamètre d'une conduite peut souvent être optimisé in-
dépendamment de son tracé. La fonction objective pour trouver le diamètre optimale
est la même que pour un canal:
C = C(D) = min !
Examinons l'exemple de la Figure 6.47. Une station de pompage est connecté par
une galerie avec le réservoir. Le tracé de la galerie est donnée, le diamètre optimal à
chercher.
Pour résoudre la fonction objective mentionnée, différentes variantes définies par
des diamètres différents sont comparées.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 255

hf

Hp
réservoir
A

QD
P
1m
B

Figure 6.47: Exemple d'une conduite d'une station de pompage avec un tronçon
horizontal et un tronçon vertical

Le diamètre influence d'une part les coûts de construction de l'ouvrage et d'autre part
les frais d'exploitation. Deux paramètres jouent un grand rôle: premièrement les
coûts d'excavation et ensuite les pertes de charge dans la galerie qui s'expriment en
coûts du pompage. Tous les deux dépendent du diamètre de la galerie. En agrandis-
sant le diamètre, les coûts d'excavation – et éventuellement les frais d'entretien –
augmentent. Les pertes de charge cependant deviennent plus petites et par consé-
quent les frais de pompage également.

C [Fr]

charges annuelles
Cmin
de l‘ouvrage
(coûts de la galerie)

frais d‘exploitation
point B (pertes de charge
point A frais de pompage)

D [m]
D1 D2 D3 D4 D5 D6
Dopt B Dopt A

Figure 6.48: Optimisation économique du diamètre d'une conduite ou galerie

La recherche du diamètre optimum revient à une comparaison des charges annuel-


les fixes de l'ouvrage et les frais d'exploitation.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


256 Canaux et galeries

Les charges annuelles fixes se composent des postes suivants:


• intérêt du capital investi
• amortissement de l'ouvrage
• entretien
• charges diverses tels que les taxes et les impôts
Typiquement, les charges annuelles fixes sont de l'ordre de 7 à 10% des coûts de
construction.
L'addition des deux courbes, représentant les coûts fixes et les frais d'exploitation en
fonction du diamètre de la galerie, donne le coût total. Le diamètre correspondant
aux coûts minimum est le plus économique.
En général cette optimisation se réfère à un point ou un tronçon particulier de la gale-
rie (point B). Le calcul se fait pour un tronçon unitaire de la galerie. Dans un autre
point ou sur un autre tronçon, le diamètre optimal peut être différent, si les conditions
hydrauliques telles que la pression intérieure changent.
Examinons le point A. En ce point, la pression est moins élevée. Le revêtement de la
galerie devient donc moins coûteux, c'est-à-dire les charges fixes annuelles de l'ou-
vrage sont moins élevés. Par conséquent, le diamètre optimum au point A est plus
grand que celui au point B.
En règle générale, plus les coûts de construction d'une galerie en charge deviennent
chers, plus son diamètre optimum est petit. Le diamètre optimale d'une conduite en
charge inclinée décroît donc de haut en bas.
Il est également vrai, que le diamètre optimum décroît avec l'augmentation du prix du
revêtement.

paramètre de dimensionnement diamètre optimal


coûts de constructions
taux d'intérêt
débit
pression
prix d'énergie

Tableau 6.4: Influence de différents paramètre du dimensionnement sur le diamè-


tre optimal

6.5.4 Coups de bélier


Les coups de bélier dans une conduite en charge sont le résultat d'un changement
brusque de débit. Il s'agit d'ondes de pression qui se déplacent à haute vitesse. Il
existe donc une analogie avec les intumescences dans les canaux dont la vitesse de
propagation est cependant largement inférieure.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 257

6.5.4.1 Changement instantané du débit


Admettons que le débit d'une conduite est modifiée instantanément par la fermeture
d'une vanne situé à l'aval (cf. Figure 6.49).

dilatation
de la conduite

vanne

vanne

V V - )V
A

l = (a - V) · )t

onde de surpression
a-V )p
après )t

force de pression
p· A (p + )p) · A

Figure 6.49: Modification du débit d'une conduite par la fermeture d'une vanne à
l'aval et coup de bélier résultant

Examinons le court tronçon de la conduite à l'amont de la vanne qui réduit le débit de


Q à Q – )Q. L'écoulement dans la conduite est ralenti instantanément de V à V - )V.
Ceci conduit à une surpression )P dans la conduite et par conséquence à une com-
pression infime de l'eau et une dilatation de la conduite. Ce phénomène qui se pro-

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


258 Canaux et galeries

page vers l'amont est appelé coup de bélier. La vitesse de propagation du coup de
bélier égale la différence:
a–V
Où: a: célérité d'onde en eau calme
Après le temps )t, l'onde de surpression a donc parcouru la distance l = (a - V) · )t.
La grandeur du coup de bélier peut être dérivé du théorème de la quantité de mou-
vement. Ce théorème exprime l'équilibre entre le changement temporel de l'impulsion
et la force de pression résultante.
• impulsion avant la fermeture (t = 0)
644masse
444du44volume
7444 d'4
eau
444 8
A (1
a V ) )t
4243
V
longueur du volume considéré
• impulsion après la fermeture (t = )t)
A (a V ) )t (V )V )
changement de l'impulsion
A (a V ) )t )V
• force de pression résultante
)p A
Selon le théorème de la quantité de mouvement, il peut être écrit:
A (a V ) )t )V
= )p A
)t
)p = (a V ) )V
Pour a >> V on obtient
)p = a )V
Cette formule est connue sous le nom équation de Joukowski.
La surpression peut également s'exprimer comme hauteur d'eau:
)p a )V
=
g g
Le développement ci-dessus peut également se faire pour l'ouverture d'une vanne.
Le résultat ne se distingue que par un signe négatif (sous-pressions):
)p a )V
=
g g
Si la conduite n'est pas terminé à l'aval de la vanne, le coups de bélier se manifeste
également à l'aval. A la place de la vanne, le débit peut évidemment également être
modifié par une turbine ou une pompe.
Le coup de bélier maximum se manifeste au cas d'une fermeture ou d'une ouverture
totale de l'organe de réglage:

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 259

)V = Vd

)p max a Vd

g g
avec: Vd: vitesse de dimensionnement (vitesse pour le débit équipé)
Exemple: célérité d'onde a = 1000 m/s
vitesse: Vd = 2 m/s
)p max 1000 2
=± , ±200 m
g 9.81

6.5.4.2 Célérité de l'onde de pression – vitesse de propagation du coup de


bélier
La célérité de l'onde de pression, c'est-à-dire la vitesse de propagation du coup de
bélier, peut être déterminée à partir de la déformation de l'eau et de la conduite.
Comme déjà mentionnée ci-dessus, l'eau est comprimée et la conduite dilatée lors
d'une fermeture de la vanne.

vanne
)l l a •)t

)u ()r)
)?T
V
V-)V A

)?E
)?T

Figure 6.50: Déformation de l'eau et de la conduite lors d'un coup de bélier du à la


fermeture de la vanne

L'équation de continuité pour ce cas s'écrit:


)
1V42A43)t = )
{?T + )
{?E
changement du volume d'eau dilatation du tuyau compressio n de l'eau

En exprimant )? T et )?E en fonction du coup de bélier, une équation pour la dé-


termination de la vitesse de propagation du coup de bélier peut être obtenue. Pour
un tube mince par exemple, )? T s'écrit:
)? T = )u D l
-t D )p D D
où: )u = =
ET 2 2 e ET 2

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


260 Canaux et galeries

)p 1 D 2
)? T = D l
ET e 4
avec: ET: module d'élasticité du tube (2.1 · 1011 N/m2 pour l'acier)
D: diamètre du tube
e: épaisseur de la paroi du tube
La compression de l'eau s'exprime comme suit:
-
)?E = )l A = l A
EE

)p D 2
= l
EE 4
avec: EE: module d'élasticité de l'eau (2 · 109 N/m2)
L'équation de la continuité peut donc également s'écrire comme suit:
)p D2 l )p 1 D 2 )p D 2
)V A )t = = )? T + )?E = D l+ l
E a 4 a ET e 4 EE 4
1 1 D 1
2
= +
E a E T e EE

La célérité de l'onde de pression devient finalement:

1 1
a=
D 1
E +
e E T EE

1 D
Exemple: Prenons une conduite complètement rigide ( 0 ):
ET e

EE 2 10 9
a= = , 1400 m/s
E 1000
La célérité d'onde est donc égale à la vitesse de son dans l'eau. Pour
une conduite avec D / e = 100, la vitesse de propagation du coup de bé-
lier devient:
a = 1000 m/s

6.5.4.3 Réflexion du coup de bélier


Si le coup de bélier passe un rétrécissement ou un élargissement de la conduite, il
est réfléchi partiellement. Ces réflexions se manifestent également aux extrémités de
la conduite qui sont définis soit par un réservoir soit par une vanne. Dans un réser-
voir à surface libre la réflexion se fait avec changement de signe, à la vanne sans
changement de signe.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 261

Ligne de pres
sio n après l’arrê
t rapide
Ligne d
e press
ion ava
nt l’arrê
t rapide
réservoir

vanne

a
t<
L + +)p
1 a v v- ) v

L + +)p
2 t=
v- )v
a

a
L
<t<
2 L + +) p
3 a a v-2 ) v v- ) v

2 L
4 t= 0
a v-2 ) v

2 L 3 L v-2 ) v v- )v
5 <t<
a a a - )p

3 L v- ) v
6 t=
- )p
a

3 L 4 L v v- ) v
7 <t<
a a a - )p

4 L v
8 t= 0
a

Figure 6.51: Réflexion du coup de bélier aux extrémités de la conduite (fermeture


partielle brusque)

Un cas typique de coup de bélier est présenté à la Figure 6.51. Suite à la fermeture
partielle brusque de la vanne, le coup de bélier se manifeste d'abord comme sur-
pression se propageant vers l'amont, vers le réservoir. Au temps L / a la conduite
entière est soumise à la surpression. Arrivé au réservoir, le coup de bélier est réflé-
chit avec changement de signe. Les surpressions deviennent nulle. Au temps
2 · L / a, le coup de bélier est redescendu la conduite et cette dernière n'est plus sol-

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


262 Canaux et galeries

licitée. Le coup de bélier se réfléchi à la vanne sans changement de signe. Il remonte


par conséquent sous forme d'une onde de sous-pressions vers le réservoir. La ré-
flexion dans le réservoir avec changement de signe amortie les sous-pression ce qui
annule la sollicitation de la conduite à nouveau. Ainsi le coup de bélier monte et re-
descend entre la vanne et le réservoir. Il s'agit d'une oscillation d'un front de pression
avec une période de 4 · L / a. Il est clair, qu'en réalité le coup de bélier est amorti as-
sez rapidement sous l'effet du frottement.

6.5.4.4 Fermetures et ouverture linéaires


En cas d'un changement instantané du débit le front du coup de bélier est très raide,
pratiquement vertical. Pour un changement linéaire du débit, le front du coup de bé-
lier est également incliné.
Le changement linéaire peut être approché par un changement brusque en petites
étapes. Finalement, le résultat pour le coup de bélier reste le même.
)V = )Vi

)p )p i a a )V
= = )Vi =
g g g g
Evidemment, l'onde de pression n'atteint cette valeur qu'après le temps de fermeture
Tf, la longueur du triangle sur la Figure 6.52 devient L=a*Tf :

conduite vanne

)pi
)P
g
g

Longueur du triangle L = aTf


V )vi

Tf : temps de )v
fermeture
t
Tf

Figure 6.52: Front d'un coup de bélier du à une fermeture progressive de la vanne

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 263

6.5.4.5 Changement lent du débit


Une conduite de longueur inférieure à la moitié de la base du triangle, ne sera jamais
soumis au coup de bélier maximum selon la formule de Joukowski. Ceci peut être
démontré en analysant les images de réflexion d'un coup de bélier dans le cas d'une
fermeture lente de la vanne.
La formule ci-dessus est connue comme l'équation de Michaud-Allievi.

réservoir
conduite vanne

L L
1 t< a t
a + )p* = )p
v v-)v < vR < v Tf
L
2 t= L
a + )p* = )p
a Tf
v-)v < vR < v
L 2 L t
3 <t< + )p* = )p
Tf
a a -
2 L 2 )v L
)p* = )p =

4 t=
2 L + a Tf Tf

a - (valeur max.)
v-2)v < vR < v- )v

t
5
2 L
<t<
3 L + )p* = )p
Tf
a a -
-

Figure 6.53: Oscillation d'un coup de bélier dû à une fermeture lente de la vanne

Le coup de bélier maximum se produit au temps 2 · L / a. Au réservoir il est nul,


tandis qu'il atteint la valeur maximum à la vanne.
)p* 2 )V L
=
g g Tf
avec: Tf: temps de fermeture de la vanne
Au cas d'une fermeture progressive, il n'y a pas de pressions négatives lors du coup
de bélier.
Une ouverture lente de la vanne, conduit a un phénomène analogue avec des sous-
pressions à cause du coup de bélier:
)p* 2 )V L
=
g g To
avec: To: temps d'ouverture de la vanne
Les coups de bélier extrêmes se produisent en cas de fermeture ou d'ouverture to-
tale de la vanne:

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


264 Canaux et galeries

)p*max 2 Vd L
=
g g Tf ,0
avec: Vd: vitesse du débit de dimensionnement ou équipé
Il est important de savoir que le coup de bélier ne dépend pas de sa vitesse de pro-
pagation au cas d'une fermeture ou d'une ouverture lente.
Exemple: Vd = 2 m/s
L = 1000 m
Tf = 10 s
)p max
*
2 2 1000
=± , ±40 m
g 9.81 10
(positif pour une vanne à l'aval, négatif pour une vanne à l'amont)

6.5.4.6 Résumé des différentes formules


La formule de Joukowski est applicable aux cas suivants:
• changement instantané du débit, Tf ou T0 = 0
Ce cas n'existe pas en pratique
2 L a Tf ,0
• changement linéaire du débit, 0 < Tf ,0 < ou L >
a 2
Si le temps d'ouverture ou de fermeture est court ou la longueur de la
conduite est longue, la formule de Joukowski est applicable
La formule de Michaud-Allievi est uniquement applicable aux changements de débits
2 L a Tf ,0
lents ou aux conduites courtes ( Tf ,0 ou L 7 )
a 2
La plupart des cas pratique satisfont ces conditions. La valeur 2 · L / a correspond au
temps de réflexion du coup de bélier.
Les formules ci-dessus ne constituent qu'une introduction dans la théorie du coup de
bélier. Le sujet est traité plus profondément dans le cours "Réseaux hydrauliques"
(Boillat, 1995).

6.5.5 Charge de dimensionnement

6.5.5.1 Conditions stationnaires


Pour les ouvrages d'exploitation, c'est-à-dire les centrales hydroélectriques, la pres-
sion à l'intérieure des conduite est maximale en cas d'arrêt des turbines et le niveau
est maximal dans le réservoir (cf. Figure 6.54).
La pression minimale se présente pendant l'exploitation et pour le niveau minimal
dans le réservoir (cf. Figure 6.54).
Pour les ouvrages de pompage, la pression intérieure par contre est maximale pen-
dant l'exploitation des pompes. Après l'arrêt des pompes, la sollicitation de la
conduite est minimale avec un niveau minimal dans le réservoir (cf. Figure 6.55).
Les lignes de pression sur la Figure 6.54 et la Figure 6.55 correspondent à la pres-
sion relative, c'est à dire à la pression intérieure absolue réduite par la pression at-
mosphérique.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 265

max.
ligne de pression (arrêt des turbines)

min. K

réservoir

W ligne de pression
(pleine puissance)

vanne V

Figure 6.54: Lignes de pression de la conduite d'amenée pendant le fonctionne-


ment et l'arrêt des turbines (Vischer, Huber, 1993)

max.

ligne de pression (pleine puissance)


min.
ligne de pression (arrêt des turbines)

réservoir

Figure 6.55: Lignes de pression de la conduite pendant le fonctionnement et l'ar-


rêt des pompes (Vischer, Huber, 1993)

Si l'axe de la conduite se trouve au-dessus de la ligne de pression relative comme


montré sur Figure 6.54, des investigations plus détaillées sont nécessaires. Exami-
nons ce tronçon coudé à une échelle plus grande.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


266 Canaux et galeries

La ligne de pression relative est complétée par deux autres lignes:


• ligne de pression absolue qui est supérieure et parallèle à la ligne de pres-
sion relative, à une distance correspondant à la pression atmosphérique
• ligne de pression de vapeur qui se trouve au-dessous de la ligne de pres-
sion absolue avec un écartement correspondant à la pression de vapeur

ligne de pression absolue


ligne de pression de vapeur
ligne de pression relative

cavitation

Figure 6.56 : Répartition de pressions dans le coude de la Figure 6.54. (Vischer,


Huber, 1993)
1 zone de surpression intérieure
2 zone de surpression extérieure (sous-pressions à l'intérieur de la
conduite)
3 zone de vacuum à l'intérieur de la conduite ( cavitation)

La pression atmosphérique dépend de l'altitude. Le Tableau 6.5 donne quelques va-


leurs moyennes.

Altitude [m s. m.] 0 500 1000 1500 2000 3000

p 'A
[m] 10.33 9.73 9.20 8.60 8.10 7.00
g

Tableau 6.5: Pression atmosphérique en fonction de l'altitude

La pression de vapeur indique la pression pour laquelle l'eau se transforme en va-


peur, c'est-à-dire la pression à laquelle elle se met en ébullition. La pression de va-
peur varie avec la température de l'eau (cf. Tableau 6.6).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 267

Température [°C] 0 10 20 40 60 80 100

p D'
[m] 0.06 0.13 0.24 0.75 2.03 4.83 10.33
g

Tableau 6.6: Pression de vapeur en fonction de la température à une pression


atmosphérique correspondant au niveau de la mer

Entre 0 et 20 °C, la pression de vapeur est très petite par rapport à la pression at-
mosphérique et par conséquent négligeable. La ligne de pression atmosphérique et
la ligne de pression de vapeur sont pratiquement identiques.
Les lignes de pression relative et absolue définissent les trois zones suivantes:
1) La pression intérieure absolue p'i est supérieure à la pression atmosphéri-
que ( p'i > p'A ). La conduite est soumise à une surpression:
p i = p'i p'A
2) La pression à l'intérieur de la conduite est inférieure à la pression atmos-
phérique mais supérieure à la pression de vapeur ( p'A > p'i > p'D ). La
conduite est soumise à une surpression extérieure de:
p e = p'A p'i
En générale, on parle d'une sous-pression dans la conduite ou d'une pres-
sion intérieure négative:
p i = p'i p'A < 0

3) La pression absolue p'i est égale à la pression de vapeur ( p'i = p'D ou


p'i 0 ). Des bulles de vapeur se forment dans l'eau. L'eau se met en ébulli-
tion et perd son homogénéité. Au cas échéant, l'eau se transforme entière-
ment en vapeur. La conduite est soumise à une surpression extérieure:
p e = p'A p'D ou p e p'A
Dans la pratique, ce cas est appelé vacuum dans la conduite ou pression
intérieure négative
p i = p'i p'A < 0
Cette pression négative est au maximum égale à la pression atmosphéri-
que. La formation de bulles de vapeur dans l'eau est appelée cavitation. En
générale, ce phénomène est évité, car les bulles de vapeur peuvent revenir
brusquement à l'état liquide en se déplaçant de la zone 3 vers la zone 2. Il
en résulte une implosion des bulles qui libère localement une énergie
considérable. Cette dernière peut conduire à des dommages de la conduite
par érosion de cavitation.
Par conséquent, il est conseillé de placer l'axe de la conduite au-dessous de la ligne
de pression de vapeur et également au-dessous de la ligne de pression absolue. Afin
d'avoir une marge de sécurité, l'axe de la conduite peut se trouver au maximum 7 à
8 m au-dessus de la ligne de pression relative (zadm). Le domaine 3 limite également
l'efficacité des siphons. Un siphon ne fonctionne que si son axe se trouve au-
dessous de la ligne de pression de vapeur.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


268 Canaux et galeries

500 m s. m. siphon

zmax
T = 20 º

Figure 6.57: Exemple d'un siphon

Exemple: De l'eau est transportée d'un canal d'irrigation à un autre à l'aide d'un si-
phon. Le canal se trouve à 500 m s. m.. La température de l'eau est de
20 °C.
Quelle est la distance maximale du siphon par rapport à la ligne de pres-
sion relative, si l'on exige que tout risque de cavitation soit exclu ?
Pression atmosphérique pour 500 m s. m. :
p'A
= 9.73 m
g

Pression de vapeur pour 20°C :


pD'
= 0.24 m
g
L'altitude zmax pour que il n’y a pas de cavitation en point B devient:
p'A pD'
zmax = = 9.73 0.24 = 9.49 m
g
La marge de sécurité tient compte des vitesses locales élevées dans la
conduite:
zadm , 7 à 8 m

6.5.5.2 Conditions non-stationnaires


Les changements brusques de débit dans les conduites dus à la fermeture ou à l'ou-
verture des organes de réglage provoquent des coups de bélier, soit positifs, soit né-
gatifs. La pression engendrée se superpose à la pression intérieure déterminante.
Comme présenté au paragraphe précédent, les coups de bélier peuvent être carac-
térisés par la formule de Michaud-Allievi pour la plupart des cas pratiques. Ils peu-
vent par conséquent être représentés par une pression supplémentaire en forme de
triangle le long de la conduite, si bien entendu la conduite est de diamètre constant
(sans changement de section).
Le schéma en haut de la Figure 6.58 montre la ligne de pression stationnaire qui se
superpose au coup de bélier non-stationnaire en cas d'arrêt d'une turbine. En bas de
la Figure 6.58, le cas d'arrêt d'une pompe est représenté. Le coup de bélier négatif
peut provoquer des sous-pressions et par conséquent de la cavitation dans la
conduite sur les tronçons critiques.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 269

La valeur maximale de la pression se manifeste toujours à l'amont de l'organe de


réglage. La valeur minimale, c'est-à-dire le coup de bélier zéro, apparaît à la surface
libre par exemple dans le réservoir ou dans la chambre d'équilibre.
La chambre d'équilibre évite la progression du coup de bélier vers l'amont. S'il s'agit
d'une compression de l'eau, le coup de bélier est positif. Il est négatif dans le cas
contraire.

Chambre d’équilibre

Ligne de
pression
stationn
aire

distributeur
centrale

Ligne
de pre
ssion
statio
nnaire

Tronçon réservoir
critique
pour la
cavitation

Figure 6.58: Superposition du coup de bélier avec la pression de dimensionne-


ment pour une centrale hydroélectrique (en haut) et une centrale de
pompage (en bas) (Vischer, Huber, 1993)
1 coup de bélier pour une fermeture totale
2 ligne de pression en exploitation (débit max.)
3 coup de bélier en cas d'arrêt brusque des pompes

6.5.5.3 Conditions pendant la construction ou la révision


Evidemment, les cas de charge pendant la construction ou la révision de la conduite
doivent également être considérés. Il s'agit de vérifier que ces cas de charge ne
soient pas plus défavorables que les conditions d'exploitation stationnaires ou non-
stationnaire. Les processus de remplissage ou de vidange peuvent être particulière-
ment critiques.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


270 Canaux et galeries

En regardant la conduite sur la Figure 6.54, on s'aperçoit qu'un remplissage est uni-
quement possible, si le sommet K est équipé par une soupape pour évacuer l'air. De
même manière, la conduite ne peut être vidée sans qu'une soupape garantisse l'aé-
ration. Autrement, il y a risque de sous-pressions qui peuvent aller jusqu'au vacuum
dans la conduite. Si la conduite n'a pas été dimensionnée pour ces sous-pressions,
la paroi peut flamber.

6.5.6 Dimensionnement statique

6.5.6.1 Tube épais étanche


La théorie d'un tube épais étanche était déjà publiée en 1852 par Lamé et est
connue sous forme de la formule de Lamé.

Compression
Traction

Figure 6.59: Tube épais étanche: dynamique des forces agissant sur un élément
infinitésimal.

En négligeant les termes du deuxième ordre, la dynamique des forces agissant sur
un élément infinitésimal (Figure 6.59) conduit, pour cet état radial symétrique des
contraintes, à:
d-r -t -r
=
dr r
En admettant que le matériau est homogène et que son comportement est purement
élastique, la loi de Hook peut être appliquée:
du 1
/r = = 6-r @ ( -t + -l ) 32
dr E 5
u 1
/t = = 6-t @ ( -r + -l ) 32
r E 5
dw 1
/l = = 6-l @ ( -r + -t ) 32
dl E 5
/l = 0 -l = @ ( -r + -t )
En introduisant les contraintes selon la loi de Hook dans l'équation d'équilibre, on
obtient l'équation différentielle du type Euler suivante :

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 271

d2u 1 du u
2
+ =0
dr r dr r2
La solution de cette équation peut s'écrire :
1
u (r) = c1 r + c 2
r
Finalement, les conditions aux limites suivantes sont introduites, pour trouver les
constants c1 et c2 :
- r (ri ) = p i
- r (ra ) = p a
On obtient ainsi les formules de Lamé:

1 6 2 ri2 ra2 3
contraintes tangentielles : -t = 4p r
a a 1 + pi ri2 1 + 1
ra2 ri2 45 r2 r 2 12

1 6 2 ri2 ra2 3
contraintes radiales : -r = 4p r
a a 1 pi ri2 1 1
ra2 ri2 45 r2 r 2 12

Si le tube ne peut pas se déformer dans le sens longitudinal, l'état de contraintes


devient tri-dimensionnel avec une contrainte longitudinale qui s'exprime comme suit :
2 @ 6
contrainte longitudinale : -l = p r 2 pi ri2 3
2 5 a a
ra2 ri 2

Cas spécial : tube infiniment épais ( ra ;)


Si le tube est infiniment épais, la contrainte longitudinale tend vers zéro et les
contraintes radiales et tangentielles s'écrivent comme suit :
2
ri
- t = pi
r2
2
ri
- r = +p i 2 - t = -r
r
2
1 + @ ri
u(r ) = pi
E r
La déformation du massif rocheux autour d'une galerie peut être traitée comme un
tube infiniment épais (roche homogène et élastique).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


272 Canaux et galeries

Contraintes maximales
Les contraintes maximales apparaissent sur la paroi intérieure si pi > pa. Pour le cas
pa = 0, ont obtient:
2
r
1+ i
ra2 + ri2 ra
-t ( ri ) = -tmax = pi = pi
ra2 ri2 ri
2
1
ra
-r ( ri ) = -r max = pi
La contrainte tangentielle est donc toujours une traction, la contrainte radiale une
compression.

Dimensionnement
Approximativement, la théorie de rupture peut être appliquée pour les contraintes
principales les plus élevées:
- t max 7 - adm

avec: -adm: résistance du matériaux diminuée par un facteur de sécu-


rité
La formule de dimensionnement de l'épaisseur du tube s'écrit alors:
- adm p i
e = ri 1
- adm + p i
Exemple: Un tube en béton de diamètre intérieur de 700 mm et d'une contrainte
2
admissible à la traction de -1 N/mm est soumis à une pression intérieure
2
de 0.25 N/mm .
épaisseur de tube e = 102 mm

6.5.6.2 Tube mince

Pression intérieure
Pour un tube mince, il peut être admis que:
ra + ri
r=
2
e = ra ri
En introduisant ces deux valeurs dans les formules de Lamé, on obtient avec pa = 0:
r r
- t = pi (1 + 1) = pi
2 e e
r
-r = pi (1 1) = 0
2 e
En pratique, le calcul se fait avec le rayon intérieur au lieu du rayon moyen. Cette
simplification est suffisamment précise pour r / e > 10.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 273

La formule du tube mince peut également être obtenue en exprimant l'équilibre du


demi tube sous l'action des forces intérieures et extérieures (cf. Figure 6.60):
2 r pi = 2 F
F = -t e
r
- t = pi
e

2r
F F

pi

Figure 6.60: Equilibre du demi tube

Pression extérieure (surpression pa > pi)


Dans le cas d'un tube mince la surpression extérieure n'est plus un problème de
contraintes admissibles, mais un problème de stabilité.
La résistance d'un tube mince au voilement sous l'effet de la pression extérieure peut
être déterminée par la formule de von Mises :
3
E e
p acr =
4 1 "2( ) r
Si la surpression extérieure atteint cette pression critique, un flambement des parois
a lieu. Le tuyau prend la forme présentée à la Figure 6.61 à cause du voilement.
p acr
p aadm 7
S

Figure 6.61: Premier mode de voilement d'une conduite (m=2)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


274 Canaux et galeries

La formule de dimensionnement pour l'épaisseur stable de la paroi du tube devient:

(
4 S p amax 1 " 2 )
e=r 3
E
avec: S: facteur de sécurité, en général S = 1.5
pamax: pression extérieure maximale

B PA' PB'
g

Figure 6.62: Exemple de dimensionnement d'un tube mince pour la pression exté-
rieure

Exemple: Si l'on ferme la vanne A sur la Figure 6.62 sans aération en aval de cette
vanne, une sous-pression s'établit dans la conduite entre les points A et
B. Elle peut au maximum atteindre le vacuum.
On cherche l'épaisseur minimum du tuyau pour qu'il résiste au vacuum
avec un facteur de sécurité de 4.
r = 350 mm
S = 4
5 2
E = 2.1 · 10 N/mm (acier)
@ = 0.3 (acier)
2
pa = 1.0 bar , 0.1 N/mm (sur pression extérieure due au vacuum)
4 4 0.1 0.91
e=r 3 = 0.019 r
2.1 10 5
2% du rayon e = 7 mm
Jusqu'ici, il a été question des contraintes dans la conduite dues à la pression inté-
rieure et/ou extérieure uniforme. Les conduite sont cependant également sollicitées
par:
• le poids propre (eau et revêtement)
• l'effet de température
• les forces de frottement
• l'effet de la dilatation empêchée en direction longitudinale

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 275

Toutes ces sollicitions se traduisent par des contraintes longitudinales. Avant de par-
ler de ces contraintes longitudinales, quelques remarques sont faites sur les détails
constructifs qui influent également l'état de contrainte dans la direction longitudinale.

6.5.7 Conduites forcées - aspects constructifs

6.5.7.1 Forme de section et matériaux


Comme expliqué ci-dessus, les conduites forcées sont obligatoirement circulaires. Le
commerce propose des conduites préfabriquées à diamètre et longueur standards.
Les matériaux utilisés sont les suivants:
• métal (acier, fonte)
• béton
• asbeste, amiante
• matériaux composites/synthétiques renforcés par des fibres

6.5.7.2 Support des conduites


Les conduites forcées reposent sur des supports soit continus soit ponctuels. Dans le
premier cas, les conduites sont placées directement dans le terrain meuble ou sur
une couche de fondation qui peut être en béton.

béton terrain meuble

Figure 6.63: Conduite avec support continue en béton ou sur terrain meuble

Les conduites de diamètre important ont plutôt des supports ponctuels: les points
d'ancrage et les supports intermédiaires qui peuvent être des supports glissants ou
articulés (diamètres supérieurs à 2 m).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


276 Canaux et galeries

F: point d’ancrage
D: joint de dilatation
Z: support intermédiaire

Figure 6.64: Disposition typique des supports d'une conduite forcée de gros dia-
mètre (Vischer, Huber, 1993)

La Figure 6.64 montre un exemple typique. Les forces qui sont introduites par le
changement de pente de la conduite nécessitent en général la construction de points
d'ancrage.

support
glissant support
articulé

Figure 6.65: Types de supports intermédiaires (Vischer, Huber, 1993)

Les deux solutions suivantes peuvent être utilisées (cf. Figure 6.66):
a) points d'ancrage en béton:
Les forces sont transmises par le poids du bloc en béton dans le sol ou le ro-
cher de fondation. Le béton est fortement armé.
b) points d'ancrage avec socle en acier sur une fondation en béton:
La conduite est fixée à l'aide de tirants d'ancrage qui transmettent les forces
dans le sol de fondation.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 277

béton coupe A - A

coupe B - B
anneaux

Socle en acier

béton

Figure 6.66: Solutions de points d'ancrage d'une conduite forcée

Le dimensionnement d'un point d'ancrage est assez complexe. Toutes les forces
agissant sur la conduite au point d'ancrage doivent être considérées, telle que:
• le poids propre du tube vide
• le poids de l'eau
• les forces longitudinales dues au changement local du diamètre
• les forces induites par les joints de dilatation (frottement, pression d'eau)
• les forces dynamiques dans les coudes
• le frottement sur les parois de la conduite dû à l'écoulement
• l'effet de température (raccourcissement ou allongement de la conduite si
elle n'est pas munie de joints de dilatation)
• le frottement dans les joints de dilatation (tuyau sans joint de dilatation)
• blocage de la déformation longitudinale (même effet que la température si
la conduite n'est pas munie de joints de dilatation)
Pour éviter des contraintes résiduelles importantes – surtout dues à l'effet de tempé-
rature – la conduite est munie de joints de dilatation. Ces joints sont toujours placé à

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


278 Canaux et galeries

l'aval d'un point d'ancrage. Chaque point d'ancrage reprend par conséquent les for-
ces du tronçon entre le joint de dilatation amont et celui aval.
La Figure 6.67 représente schématiquement le détail constructif d'un joint de dilata-
tion d'une conduite en acier. L'étanchéité est assuré par des anneaux en caoutchouc
synthétique.

étanchéité

tuyau A tuyau B

Figure 6.67: Schéma d'un joint de dilatation (Vischer, Huber, 1993)

6.5.8 Dimensionnement au regard des contraintes longitudinales et


de cisaillement
Les formules du tube ne tiennent pas compte des contraintes longitudinales et de
cisaillement. Celles-ci sont le résultat des efforts longitudinaux, des moments et de
l'effort tranchant dû à l'effet de la température, l'empêchement de la déformation lon-
gitudinale ainsi que d'autres sollicitations. L'état de contraintes devient ainsi spatial,
c'est-à-dire avec des composantes dans trois directions.

-r
-l

-t

Figure 6.68: Etat de contrainte spatial

Selon la théorie de rupture, la contrainte équivalente qui peut être déterminée par
calcul doit être inférieure à la contrainte admissible:
- equi 7 - adm

- equi = - l2 + - 2t -l - t + 3 2

Examinons les efforts principaux qui engendrent des contraintes longitudinales.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 279

Poids propre et
poids de l’eau

Moments

Efforts tranchants

Figure 6.69: Moments et effort tranchant

Les conduites à supports ponctuels se comportent dans la direction longitudinale


comme les poutres continues. Les moments et l'effort tranchant dus au poids propre
et au poids de l'eau dans la conduite peuvent ainsi être déterminés. En outre, il
existe des efforts qui engendrent directement une contrainte longitudinale.

Composante normale du poids de l’eau U = force de


déviation

KD = force dans le connecteur KR = force de frottement

Figure 6.70: Forces qui engendrent des moments et/ou un effort tranchant. (Vis-
cher, Huber, 1993)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


280 Canaux et galeries

a) Le poids de l'eau dans la conduite influence les moments et l'effort tranchant


par sa composante perpendiculaire à l'axe. La composante longitudinale du
poids propre de l'eau n'a aucune influence sur l'état de contraintes. Elle conduit
à la pression intérieure.
b) Un coude provoque des forces dues au changement de direction de l'écoule-
ment. Ces forces d'écoulement provoquent une force de déviation. Un chan-
gement de la section conduit également à des forces longitudinales.
La force résultante peut être calculée en appliquant le théorème de la quantité
de mouvement:
So = Q v o + p io A o
Su = Q v u + p iu A u
avec So,u: force à l'amont, à l'aval du coude
Q: débit
vo,u: vitesse à l'amont, à l'aval du coude
pio,u: pression intérieure à l'amont, à l'aval du coude
Ao,u: section à l'amont, à l'aval du coude
c) Le joint de dilatation nécessite un agrandissement local du diamètre. L'anneau
ainsi formé avec une surface AD est sollicité par la pression locale piD. Par
conséquent, il peut être écrit:
K D = A D p iD

avec: AD: section d'acier de la conduite

piD

Figure 6.71: Forces dans un joint de dilatation

d) La force de frottement de l'écoulement aux parois de la conduite dépend de la


contrainte de cisaillement:
r
KR = R 2 r L= g Jf 2r L= g Jf A L
2
r
avec: R = g Jf
2
v2
et: Jf = 4
(Strickler)
r 3
K2
2

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 281

• Pour les vitesses habituelles (< 10 m/s), la force de frottement est négli-
geable.
e) Sous l'effet de la pression intérieure, un gonflement de la conduite peut se pro-
duire et par conséquent un raccourcissement en direction longitudinale. Si
cette déformation est empêchée, parce que les supports sont rigides ou les
joints de dilatation ne fonctionnent pas, il en résulte une force longitudinale.
Comme déjà montré, cette force est égale, dans le cas d'une pression inté-
rieure seule, à:
2 "
-l = 2 2
p i ri2
r ri
a

Pour le tube mince, il peut être écrit:


ra ri = r
ra ri = e
ra + ri = 2 r
et on obtient:
2 "
-l = p i ri2
(ra ri )(ra + ri )
2 " " r
-l = pi r 2 = p i (traction)
e 2 r e
La force longitudinale devient:
Fl = -l · AD
avec: AD: section d'acier
• Ces forces peuvent atteindre des valeurs très importantes.
Exemple: conduite en acier
r = 350 mm
e = 7 mm
2
pi = 2.8 N/mm (hauteur de la pression 280 m)
@ = 0.3 (nombre de Poisson)
350
- l = 2 .8 0 .3 = 42 N/mm 2
7
AD = 2 r e = 700 7 = 15400 mm 2
Fl = 42 15400 = 646 kN
Les joints de dilatation sont très importants.
f) L'effet de la température produit également un raccourcissement (diminution
de la température) ou un prolongation (augmentation de la température) de la
conduite. Sans joints de dilatation, des forces longitudinales très importantes
en résultent.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


282 Canaux et galeries

6.6 Galeries et puits en charge


6.6.1 Caractéristique des écoulements en charge
L'écoulement en charge présente des avantages déterminants :

a) Temps de réaction du système d'adduction


Le système d'adduction réagit presque instantanément aux variations de débit des
turbines imposées par le réseau électrique. L'écoulement en charge réagit en fonc-
tion de la célérité d'onde de pression ( 1000 m/s). L'écoulement en charge assure
par conséquent une grande souplesse d'exploitation.

b) Pertes de charge en fonction du débit instantané


Les pertes de charge sont fonction du débit instantané. Elles diminuent par consé-
quent avec ce dernier. Par contre, pour un écoulement libre, les pertes de charges
sont déterminées par le débit maximal qui doit transiter par la galerie et elles impo-
sent ainsi la pente du radier.

c) Profil en long à pentes variables


Du point de vue constructif, il est possible de réaliser un profil en long à pentes va-
riables, ce qui facilite l'écoulement des eaux pendant les travaux. L'avancement de
l'excavation des galeries se fait, si possible, toujours en montant. Il en résulte un pro-
fil en "dents de scie" dans le cas de plusieurs fenêtres d'attaque (Figure 6.72).

Puits de captage intermédiaire


et d'aération

Retenue
Chambre d'équilibre
max.
Prise d'eau
min.

Fenêtre d'attaque
Galerie en charge

Fenêtres d'attaque
Puits en
charge

Centrale
souterraine

Figure 6.72: Profil en long schématique et verticalement surélevé.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 283

6.6.2 Evolution de la disposition des aménagements à haute chute

6.6.2.1 Généralités
Un aménagement hydroélectrique est dit à haute chute, si celle-ci est supérieure à
200 m.
La Figure 6.73 montre différentes dispositions possibles de l'adduction d'eau d'un
aménagement à haute chute et son évolution au cours du 20ème siècle.
1. Les premiers aménagements à haute chute ont été réalisés à la fin du 19ème
siècle et construits selon le schéma de la Figure 6.73: galerie d'amenée,
souvent en écoulement libre suivie d'une conduite forcée à l'air libre qui conduit
l'eau dans une centrale également à l'air libre.
Cette disposition était conditionnée par les moyens techniques qui ne permet-
taient pas l'excavation de puits inclinés ou de cavernes de grandes dimen-
sions.
2. Après la deuxième guerre mondiale, le schéma a été remplacé par le type
: galerie en charge suivie d'un puits blindé en combinaison avec une cen-
trale à l'air libre,
et le type : avec une adduction équivalente au type , mais en combinaison
avec une centrale souterraine.
3. Pour des conditions topographiques particulières associant des chutes relati-
vement importantes à des courtes distances horizontales, le schéma a été
développé. De telles réalisations se trouvent surtout en Scandinavie où l'eau
est récoltée sur les hauts-plateaux et exploitée au fond des fjords.
Depuis une dizaine d'années, le puits incliné des schémas et est de plus
en plus remplacé par un puits vertical. Ce développement est le résultat de
nouvelles méthodes d'excavation à la verticale, appelées "raise-boring" en bon
français. Cette méthode permet d'excaver le puits de bas en haut après la per-
foration d'un forage pilote. L'excavation se fait à l'aide d'une tête de forage
tournante fixée à un axe de transmission. Ainsi, il est aujourd'hui possible de
réaliser des puits jusqu'à une hauteur de 700 m avec un diamètre maximal de
6 à 7 m.
4. A partir de 1960, l'excellente qualité du rocher (granite) sur des nombreux si-
tes, essentiellement en Norvège, a permis de renoncer au revêtement de la
galerie. Dès 1975, le tracé a fait son apparition souvent sans revêtement ou
avec un revêtement partiel.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


284 Canaux et galeries

Chambre d'équilibre

Conduite forcée

Galerie en charge

Centrale

Puits en charge

Chambre
d'équilibre

Centrale souterraine

Galerie de restitution
(év. en écoulement libre)
Puits en charge
Caverne Chambre d'équilibre

Chambre d'équilibre à coussin


d'air comprimé

Galerie en charge
Centrale souterraine

Figure 6.73: Différentes dispositions d'un aménagement à haute chute et l'évolu-


tion pendant le 20ème siècle

6.6.2.2 Fonction de la chambre d'équilibre


Chaque installation à haute chute représentée est équipée d'une chambre d'équili-
bre, qui se trouve au bout de la galerie en charge pour les schémas à , c'est à
dire directement à l'amont du puits incliné. Les deux objectifs principaux d'une cham-
bre d'équilibre sont les suivants :
a) Protection de la galerie en charge contre les coups de bélier
Les variations instantanées de débit des turbines provoquent des coups de bélier.
Comme déjà présenté dans le paragraphe précédent, la valeur du coup de bélier dé-
pend directement de la longueur de la conduite:
p max 2 )V L
=
g g Tf ,o

avec )V: changement de la vitesse

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 285

Tf,o: temps d'ouverture ou de fermeture de la turbine


Le coup de bélier est réfléchi à la surface libre la plus proche de l'organe de réglage
(fermeture ou ouverture de la turbine). La chambre d'équilibre présente une telle sur-
face libre et le coup de bélier ne peut pas se propager vers l'amont de cette dernière.
Il n'a plus aucun effet dans la galerie en charge. La longueur de la galerie en charge
est en général beaucoup plus importante que celle du puits incliné (typiquement 10 à
20 km). Il y a donc un grand intérêt à protéger la galerie en charge contre les coups
de bélier à l'aide d'une chambre d'équilibre.
b) Faciliter le réglage des turbines et augmenter la souplesse d'exploitation
Puisque le débit des turbines est déterminé par le réseau électrique, c'est-à-dire par
la demande momentanée en électricité, le système d'adduction devrait réagir instan-
tanément. Le temps de réaction d'un système d'adduction en charge peut être calcu-
lé approximativement par :
2 L
Tr =
a
avec : L : longueur du système
a: célérité d'onde de pression ( 1000 m/s)
Exemple :
L = 20 km
40000
Tr = = 40 s
1000
La turbine doit en général réagir plus rapidement à la demande du réseau. Jusqu'à
ce que la galerie en charge ait réagi, c'est-à-dire jusqu'à ce que la vitesse station-
naire s'établisse, la chambre d'équilibre sert de réservoir pour couvrir le manque
d'eau. L'augmentation du débit des turbines se manifeste par conséquent par un
abaissement du niveau d'eau dans la chambre d'équilibre. Le niveau stationnaire
s'établit après plusieurs oscillations. La fermeture des turbines se manifeste par
contre par un rehaussement du niveau dans la chambre d'équilibre.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


286 Canaux et galeries

6.6.2.3 Dispositions courantes en Suisse

Figure 6.74: Aménagement de la Lienne en Valais

La Figure 6.74 représente schématiquement l'aménagement de la Lienne en Valais.


Il s'agit d'un exemple de l'aménagement à deux paliers, une disposition très souvent
choisie pour les aménagements réalisés dans les Alpes suisses entre 1950 et 1970.
Le palier inférieur est un exemple du type , le palier supérieur de la solution .
Dès 1960/70 le puits blindé en combinaison avec une centrale souterraine est deve-
nu la solution est la plus courante pour les réalisations en Suisse. Un des avantages
le plus important est la préservation de l'environnement grâce à la mise sous terre de
la quasi totalité des installations.
Quelques chiffres caractérisant les installations à haute chute peuvent être intéres-
sants :
• longueur des galeries en charge :
en Suisse : jusqu'à 25 km par galerie, longueur totale de toutes
les galeries
environ 2000 km
à l'étranger : 30 à 40 km par galerie
• chute :
le record mondial est tenu par l'usine de Bieudron de Cleuson-Dixence
avec une chute brute de 1883 m, la surpression dynamique dépasse
2000 m de colonne d'eau lors du coup de bélier

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 287

• diamètre intérieur :
en Suisse: la plupart des diamètres des galeries réalisées se situent
entre 3 et 4 m, les plus grands atteignent 6 m. Réalisations et projets
récents: Galerie de Cleuson-Dixence (1999), longueur totale 15.5 km,
diamètre de 5.50 m, revêtue en béton, débit 75 m3/s; pour le projet
Mauvoisin II (1994), le diamètre de 4.75 m a été prévu sans revête-
ment et de 4.15 m avec un revêtement en béton, ceci pour un débit de
46 m3/s;
à l'étranger: les plus grands diamètres se trouvent dans les réalisa-
tions en Himalaya, avec un record proche de 12 m.

Figure 6.75: Variation du diamètre en fonction du débit pour 35 galeries suisses


(revêtues en béton).

6.6.2.4 Tendances actuelles


Les tendances actuelles peuvent être résumées comme suit:
• tracés profonds des galeries en charge pour profiter des contraintes initiales
et de la nappe phréatique dans un rocher permettant de renoncer au revê-
tement (galerie excavée par tunnelier);
• puits et chambres d'équilibre verticaux construits avec la méthode de "raise
boring" suivis par une galerie inférieure en charge (à pression élevée);
• renoncement au blindage dans ces puits verticaux et partiellement dans les
galeries inférieures (situées à l'aval).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


288 Canaux et galeries

6.6.3 Critères généraux de conception et de dimensionnement


Comme pour tout ouvrage de génie civil, la conception d'une galerie en charge fait
appel à des considérations dans les domaines suivants :
• économie
• statique (résistance de matériaux)
• aspect constructif
• environnement.
Une galerie en charge étant par nature souterraine, les problèmes d'impact et de pro-
tection de l'environnement se limitent essentiellement aux accès pendant la construc-
tion (routes, téléphériques provisoires, portails des fenêtres d'attaque) et l'aménage-
ment des décharges de matériaux d'excavation. Le seul risque important pendant
l'exploitation de l'ouvrage concerne l'hydrogéologie. La galerie en charge peut in-
fluencer la nappe phréatique et, selon le cas, également les sources.
Les facteurs les plus importants influençant l'économie du projet sont les suivants :

a) Les coûts de construction et d'exploitation


Les coûts de construction dépendent directement de critères topographiques, géolo-
giques, hydrogéologiques et géotechniques. Ils sont fonction des paramètres sui-
vants :
• choix du tracé
• choix du diamètre
• choix du revêtement
• problèmes constructifs.

b) Les pertes de charge


• Les pertes de charge dans la galerie sont fonction :
• de la longueur
• du diamètre
• du type de revêtement.

c) Les pertes d'eau


Les pertes d'eau sont influencées essentiellement par les paramètres suivants :
• choix du tracé en plan et en élévation (surtout par rapport à la nappe sou-
terraine naturelle)
• choix du revêtement y inclus les injections
• géologie et surtout hydrogéologie
• mécanique des roches (l'état initial des contraintes).
La résistance de l'ouvrage est à considérer sous deux aspects :
• résistance du massif rocheux

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 289

• résistance du revêtement
Ces deux aspects sont fortement influencés par l'effet des pertes d'eau, c'est-à-dire
de l'écoulement souterrain qui sollicite le revêtement et le rocher par des forces vo-
lumétriques de la percolation. La résistance de l'ouvrage dépend également des cri-
tères suivants :
Enfin la construction est également un facteur déterminant au niveau de la concep-
tion d'une galerie en charge. Le mode et les méthodes de réalisation influent sur :
• la résistance de l'ouvrage et la qualité du revêtement (après construction)
• le choix du tracé (avant construction)
• la résistance du massif rocheux excavé (en utilisant un tunnelier par exem-
ple).
Pour conclure, il peut être constaté que les critères du dimensionnement sont étroi-
tement interdépendants et ne peuvent, par conséquent, jamais être dissociés les uns
des autres.
La conception, le dimensionnement et la réalisation d'une galerie en charge repré-
sentent à chaque fois un cas unique, difficilement comparable aux constructions an-
térieures.

6.6.4 Choix du tracé

6.6.4.1 Facteurs déterminants


Les critères de choix du tracé sont les suivants :
• la résistance du massif rocheux
• la limitation des pertes d'eau de la galerie
• l'aspect économique, lié au coût de construction, aux pertes de charge et à
la pression intérieure
• les exigences de la construction (emplacement des fenêtre d'accès, pentes,
etc.).
Tous ces critères ci-dessus sont influencés par: la topographie, la géologie, l'hydro-
géologie et la géotechnique.

6.6.4.2 Résistance du massif rocheux

a) Influence des contraintes initiales


Le massif rocheux doit reprendre les efforts qui lui sont transmis par la pression inté-
rieure dans la galerie.
La résistance du massif rocheux est conditionnée essentiellement par les contraintes
initiales. Si la pression transmise par la galerie est supérieure à la contrainte princi-
pale minimale du massif, l'équilibre peut être rompu par ouverture de joints existants
ou la formation de nouvelles fissures dans le rocher. Pour éviter cette rupture du ro-
cher autour de la galerie, les contraintes initiales doivent avoir une valeur minimale.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


290 Canaux et galeries

Figure 6.76: Etat de contraintes,


influencées principa-
lement par la couver-
Dv ture, admis dans un
-v massif rocheux.

-h
Dans la phase de prédimensionnement, la contrainte initiale dans le rocher est ad-
mise hydrostatique, c'est-à-dire qu'elle est directement proportionnelle à la couver-
ture en rocher :
-v = Dv R g
La contrainte minimale se trouve souvent dans la direction horizontale. Sa valeur est
en général inférieure à celle de la contrainte verticale :
-h = k o - v
Le coefficient de la contrainte minimale ko = varie généralement entre 0.4 à 1.0 dans
les massifs alpins.
Une relation entre -v et -h, généralement applicable, n'existe pas en raison de l'hété-
rogénéité des massifs rocheux.
La Figure 6.77 montre les valeurs k0 = -h/-v en fonction de la profondeur mesurée in
situ partout dans le monde. On constate que la relation est -h < -v pour des profon-
deurs importantes, et celle près de la surface -h > -v.

Coefficient de la contrainte minimale k 0 = - h /- v

k 0 = 0.1/h + 0.3
Profondeur h [km]

k 0 = 1.5/h + 0.5

k 0 = 0.422/h + 0.37

Figure 6.77: Mesures in situ des contraintes initiales horizontales par rapport aux
contraintes verticales initiales en fonction de la profondeur (recou-
vrement). Courbes A et B représentent l'enveloppe des mesures,
courbe C une approche théorique selon McCutchen (Schleiss, 1985)

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 291

Près de la surface, à proximité des vallées, les contraintes principales ne sont plus
orientées dans la direction verticale ou horizontale et la contrainte horizontale ne
peut plus être dérivée de la contrainte verticale (resp. de la couverture présente). La
topographie de la vallée et de ses alentours influence fortement les contraintes initia-
les dans le rocher (cf. Figure 6.78).

Figure 6.78: Grandeur et direction des contraintes initiales caractéristiques pour


les terrains entourant une vallée. A gauche: ➀ au-dessous d'un ter-
rain plat; ➁ au-dessous d'un tertre; ➂ au-dessous d'un flanc; ➃ au
dessous du fond de la vallée. A droite: recouvrement déterminant en
cas de couches du rocher fortement inclinées.

b) Recouvrement minimal des galeries ou puits


Pour éviter la rupture du rocher, une couverture minimale en roche doit être assurée
au-dessus de la galerie. Deux cas peuvent être distingués pour la détermination de
la couverture minimale nécessaire :
• galerie avec revêtement étanche (blindage en acier)
• galerie avec revêtement perméable (béton non-armé et armé).
Dans le cas d'un revêtement complètement étanche, la pression intérieure est ré-
partie entre le revêtement et le massif du rocher :
pi = pA + pR
avec : pi : pression d'eau à l'intérieur de la galerie
pA : partie de la pression reprise par le revêtement
pR : partie de la pression reprise par le rocher
Comme mentionné ci-dessus, il y a risque de fissures, si la partie de la pression qui
doit être reprise par le massif rocheux est supérieure à la contrainte principale mini-
male.
Les contraintes principales minimales dans le rocher à la limite de la zone fissurée
valent (Figure 6.79):
-h = k o R g (D v rf )

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


292 Canaux et galeries

En exigeant
Dv
rf < ,
10

-v = R g (Dv rf )

-h = k o -v
zone fissurée
DV

tube infiniment épais


rf
ra

pR

ra
pR
rf

Figure 6.79: Modèle de calcul pour l'estimation du recouvrement minimal dans le


cas d'une galerie étanche, avec: ra : rayon extérieur du revêtement; rf
: rayon de la zone fissurée; Dv : couverture verticale de la galerie (Dv
> 10 rf).

la contrainte tangentielle est, en bonne approximation, égale à celle dans un tube


infiniment épais. Par conséquent :
ra
- t = pR
rf
Si on limite la zone fissurée à :
rf = 3 ra
on obtient avec -t 7 -h :
p R,max 7 3 k o R g (D v 3 ra )

Si le revêtement a une résistance maximale de pA,max, on obtient la couverture mini-


male nécessaire suivante pour une galerie ou un puits étanches:
pR,max
647 48
p i p A,max
DV + 3 ra
3 ko R g

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 293

En général, la couverture minimale est multipliée par un facteur de sécurité S entre


1.5 et 2.
Dans le cas d'un revêtement perméable, la situation est complètement différente. A
cause de la percolation de l'eau dans le revêtement, une partie de la pression inté-
rieure s'applique directement au rocher entourant la galerie (Figure 6.80).

REVETEMENT REVETEMENT
IMPERMEABLE PERMEABLE

pR (ra) = f (pa)

Gradient de la percolation

pi pa
pi
pi

pR(ra)
réaction du
rocher Pression interstitielle
(pression
mécanique)

Figure 6.80: Sollicitation du rocher en cas d'un revêtement imperméable (à gau-


che) et perméable (à droite).

Si cette pression est plus élevée que la contrainte initiale minimale dans le rocher, ce
dernier va également se fissurer. A cause de la pénétration de l'eau dans les fissu-
res, la rupture est progressive et très dangereuse. Ce phénomène est appelé "hy-
draulic jacking". Il peut aller jusqu'au soulèvement du terrain accompagné par des
fuites d'eau catastrophiques (Figure 6.81).

-h
-v

-h < -v -h > -v

Figure 6.81: Mode de rupture du rocher autour d'une galerie sans revêtement
étanche ("hydraulic jacking")

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


294 Canaux et galeries

Les contraintes principales minimales dans le rocher doivent par conséquent être
supérieures à la pression de l'eau à l'extérieur du revêtement :
- min = D v k o R g p a (7 p i )
pa
Dv
ko R g
Cette couverture minimale est en général multipliée par un facteur de sécurité de 1.2
à 1.5.
Dans le cas de la présence d'une nappe d'eau souterraine dans le massif, la pres-
sion intérieure peut être réduite par la pression extérieure de la nappe.
Pour des conditions "hydrostatiques" concernant les contraintes initiales dans le ro-
cher (-v = -h), donc ko = 1, Bergh-Christensen a établi une formule qui tient égale-
ment compte de la couverture et de l'épaulement, c'est-à-dire de la distance latérale
(Figure 6.82):

pi (ou pa )
D> Dv : Distance verticale entre
cos R g galerie et surface du radier
D : Distance la plus courte (perpendiculaire)
entre galerie et surface du radier
: Pente moyenne du flanc de la vallée
(surface du radier)
DV
D

Figure 6.82: "Critère norvégien" de Bergh-Christensen (1982), uniquement appli-


cable si ko = 1, conditions que l'on retrouve souvent dans les massifs
scandinaves.

Ces méthodes ne son applicables que pour le prédimensionnement du tracé. Le pro-


jet détaillé doit être basé sur des mesures de contraintes initiales in situ dans le ro-
cher (méthode de la fracturation hydraulique.
A part la couverture minimale, le tracé d'une galerie ou d'un puits pourra également
être influencé par d'autres contraintes, telles que par exemple :
• Les zones à forte couverture sont à éviter dans le cas de roches de mau-
vaise qualité. Des pressions extérieures importantes peuvent en résulter et
par conséquent des grandes déformations (risque de coincer le tunnelier)
• Le choix du tracé devra réduire les risques de la présence de mauvaises
roches et d'accidents géologiques :
en les évitant dans la mesure du possible
en les traversant perpendiculairement dans une région où ces roches
sont de faible épaisseur.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 295

• La position de la nappe phréatique par rapport à l'axe de la galerie doit être


choisie judicieusement : si le niveau de la nappe est suffisamment élevé, la
pression intérieure est annulée, mais les venues d'eau peuvent être impor-
tantes.

6.6.4.3 Limitation des pertes d'eau et leur rayon d'influence

a) Estimation des pertes d'eau


Les pertes d'eau d'une galerie en charge dépendent des facteurs suivants :
• différence entre la pression hydrostatique extérieure, donc entre le niveau
de la nappe souterraine et la pression intérieure
• perméabilité du revêtement (fissuration)
• perméabilité du massif rocheux (en tenant compte des zones proches de la
galerie améliorées par des injections).
Selon la positon de la nappe phréatique les formules suivantes peuvent être utilisées
pour estimer les pertes d'eau des galeries et puits sans revêtement (ou avec un revê-
tement très perméable par rapport au rocher):

Cas 1: Galerie au-dessous de la nappe phréatique


surface du rocher

nappe
phréatique

pi
percolation
Figure 6.83: Galerie au-
dessous de la
nappe phréati-
que.

pi
2 kR b+
g
q=
2
b ri
ln 1+ 1
ri b

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296 Canaux et galeries

avec: q: fuites d'eau par une longueur de 1 m de la galerie


kR: perméabilité du rocher
pi: pression intérieure
ri: rayon intérieur
b: profondeur de la galerie par rapport à la nappe phréatique

Cas 2: Puits verticaux (distance b inférieure au niveau de la nappe phréatique)

ri
Figure 6.84: Puits verticaux (distance b
inférieure au niveau de la
R nappe phréatique) avec un
écoulement radial- symétri-
que.

pi
2 kR b+
g
q=
R
ln
ri
avec : R : rayon d'influence de la percolation dû à une pression pi à
l'intérieur du puits (R C 10 ÷ 100 · ri)

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Canaux et galeries 297

Cas 3: Galerie au-dessus de la nappe phréatique (située en terrain sec)

surface du rocher

ligne de saturation

bB

aB/3

aB

Figure 6.85: Galerie au-dessus de la nappe phréatique (située en terrain sec).

Selon la théorie de Niquet-Bouvard, les pertes d'eau peuvent être calculées comme
suit (aB, bB = valeurs caractéristiques selon Bouvard):
q = aB k R
aB
bB = ln 2

pi 3 a aB
ri = B ln aB
g 4 2 ri

Effet d'un revêtement sur les fuites


Avec un revêtement, les fuites d'une galerie ou d'un puits peuvent être réduites si sa
perméabilité est faible par rapport au rocher entourant. La percolation à travers le
revêtement produit une certaine perte de charge (cf. Figure 6.80) et réduit ainsi la
pression d'eau de pi à pa, qui est finalement à l'origine des fuites dans le massif ro-
cheux.
D'une manière générale, les fuites à travers un revêtement (ou une zone annulaire
quelconque) se calculent sous l'hypothèse d'une percolation radial-symétrique (ce
qui est justifié).

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298 Canaux et galeries

qB
(p
= i
p a ) (2a )3 n (p a pi ) 2 k B
E (ra ri ) 12 "E E g ln (ra / ri )
qB: fuites à travers le revêtement (par m de longueur de la ga-
lerie)
pi: pression intérieure
pa: pression extérieure (inconnue)
ri: rayon intérieur du revêtement
ra: rayon extérieur du revêtement
(2a): ouverture des fissures (radiales) dans le béton
n: nombre de fissures
E: densité de l'eau
"E: viscosité cinématique de l'eau (pour 20oC env. 10-6 m2/s)
kB: perméabilité du béton (sans fissures) (typiquement 10-8
m/s)
Le premier terme tient compte des fuites dues aux fissures dans le béton (si le revê-
tement est fissuré). Le deuxième terme tient compte de la perméabilité du béton en-
tre les fissures.
La pression pa, à l'extérieur du revêtement, est inconnue et doit être déterminée à
l'aide de la condition de continuité. Les fuites à travers le revêtement sont égales aux
fuites dans le massif rocheux (selon les cas 1,2 et 3 pour pi = pa):
qB (fonction de pi et pa) = qR (fonction de pa)
Cette condition permet de calculer la pression d'eau qui agit à l'extérieur du revête-
ment et d'obtenir ainsi les fuites (selon les cas 1, 2 et 3 avec p = pa).
A part le revêtement, d'autres zones annulaires autour de la galerie peuvent être
considérées (par exemple zone fissurée par l'excavation, zone injectée, etc.). Le
gradient de la percolation à travers chacune de ces zones est obtenu à l'aide de la
condition de continuité.

b) Rayon d'influence des pertes d'eau


Le tracé d'une galerie doit être choisi de telle manière que les pertes d'eau soient
encore tolérables et que leur rayon d'influence n'atteigne pas la surface du terrain.
Le rayon d'influence de l'écoulement à partir de la galerie peut devenir critique dans
le cas où la galerie se trouve dans un massif sec (absence d'eau souterraine ou ni-
veau au-dessous de la galerie.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 299

zone de suintement

risque d'instabilité
glissement de terrain

galerie en
massif "sec"

ligne de saturation

Figure 6.86: Rayon d'influence de la percolation en cas d'un massif sec atteint la
surface du rocher et la couverture en terrain meuble.

Si les matériaux près de la surface sont peu perméables, ils peuvent être soumis à
des sous-pressions qui provoquent un glissement de terrain dans la zone de suinte-
ment. Même dans le cas de très faibles pertes d'eau, le risque d'instabilité des flancs
existe si la percolation atteint des zones peu perméables près de la surface. L'expé-
rience montre que les glissements ont souvent lieu quelques années après la mise
en charge de la galerie.
Si la galerie est située au-dessous de la nappe souterraine, les fuites d'eau de la ga-
lerie peuvent augmenter le niveau de cette dernière.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


300 Canaux et galeries

alimentation par les fuites


de la galerie

nappe phréatique initiale

Figure 6.87: Alimentation de la nappe phréatique par les fuites d'eau d'une galerie
en charge.

En général, la nappe est influencée uniquement localement (cf. Figure 6.87). Par
conséquent, le cas de la Figure 6.87 n'est que très rarement critique.
Le choix d'un tracé visant à limiter les pertes d'eau consistera par conséquent, dans
la mesure du possible, à implanter la galerie dans des zones où le niveau de la
nappe est suffisamment haut ou dans des formations géologiques peu perméables.

c) Limitation des pertes d'eau pour des raisons économiques


Outre pour des raisons de stabilité des versants, l'exigence de la limitation des pertes
d'eau est également justifiée par des considérations économiques. En règle géné-
rale, une perte d'eau de :
l (1 à 10 litres d'eau par seconde par kilomètre de galerie et par
q = 1 à 10
s km bar bar de pression intérieure)

est admise comme tolérable en Suisse et à l'étranger.


Si cette limite est dépassée, les pertes d'eau peuvent être diminuées par les moyens
ou mesures suivants :
• changement du tracé
• diminution de la perméabilité du rocher par des injections
• choix de revêtements plus étanches tels que le béton armé, les mem-
branes synthétiques étanches, le blindage en acier.
La prévision des pertes d'eau est très difficile à réaliser à cause des paramètres mal
connus tels que la géologie (joints, fissures dans le massif), la perméabilité du massif
rocheux, l'hydrogéologie (niveau et fluctuation du niveau de la nappe souterraine).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 301

d) Conclusions
Les pertes d'eau ne sont pas seulement un problème économique, mais elles peu-
vent également représenter un danger pour :
• la stabilité du massif rocheux
• la stabilité des versants (spécialement en ce qui concerne le risque de glis-
sement de leur couche meuble de surface).

6.6.4.4 Coût, pertes de charge et mode de construction


A part les critères de stabilité, le tracé est fortement influencé par des coûts et mode
de construction. Le plan économique est étroitement lié aux trois points suivants :
• coûts de construction
• pertes de charge
• mode de construction.
La diminution du coût de construction et des pertes de charge sera évidemment ob-
tenue en choisissant le tracé en plan le plus court possible, en tenant compte des
contraintes primordiales discutées ci-dessus (couverture, pertes d'eau et leur rayon
d'influence).
Le mode et la méthode de construction interviennent également. Il ne s'agit pas uni-
quement de réduire la longueur de la galerie elle-même, mais de l'ensemble de gale-
ries y inclus les accès depuis les fenêtres d'attaque (Figure 6.88).

retenue (chambre d'équilibre)


A galerie en charge B

C
A - D - B : galerie
fenêtre d'attaque
C - D : fenêtre d'attaque

Figure 6.88: Longueur minimale d'une galerie du point A au point B avec une fe-
nêtre d'attaque en C et une galerie d'accès (C – D).

Le mode de construction et l'emplacement des fenêtres d'attaque influencent direc-


tement la durée de la construction et indirectement l'économie du projet. Dans le cas
d'un aménagement hydroélectrique, la date de mise en service joue un rôle impor-
tant, chaque jour peut signifier plusieurs dizaines de milliers de francs.
Le nombre de fenêtres est déterminé par les paramètres suivants :
• la minimisation de la durée de construction
• le coût de construction

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


302 Canaux et galeries

• la méthode de construction
• la protection de l'environnement (emplacement des fenêtre et décharges
possibles).
En cas d'excavation conventionnelle, la distance entre les fenêtres est plus courte,
selon les conditions géologiques typiquement entre 4 et 8 km. Pour une excavation
au tunnelier, les tronçons sont limités à 10 à 15 km, autrement l'approvisionnement
du front d'attaque, la ventilation et le marinages deviennent les facteurs critiques
pour l'avancement.
Il est toujours judicieux de prévoir suffisamment de fenêtres d'attaque pour assurer
une progression aussi rapide que possible. Si un front d'attaque est bloqué ou freiné
par exemple, le travail peut continuer normalement sur les autres fronts.
Le choix du tracé en plan tient compte des conditions géotechniques du massif ro-
cheux. Des zones avec du rocher de mauvaise qualité sont évitées ou traversées, si
possible perpendiculairement (analogie à la loi de réfraction en optique). Des tracés
assez complexes sont ainsi obtenus (cf. Figure 6.89).
Le choix du tracé en élévation dépend des mêmes facteurs que le tracé en plan.
La pente à l'amont ou à l'aval est souvent donnée par l'emplacement de la chambre
d'équilibre et sa hauteur nécessaire (le niveau d'eau pendant les oscillations ne doit
pas tomber au-dessous de la calotte du tunnel pour éviter un entraînement d'air). La
pente à l'amont ou à l'aval est choisie aussi faible que possible pour limiter l'augmen-
tation de la pression dans la partie inférieure de la galerie.
La pente uniforme à l'amont et à l'aval est souvent remplacée par un profil en dents
de scie (cf. Figure 6.72). Ceci permet d'effectuer l'excavation en montant à partir de
chaque fenêtre d'attaque et d'assurer ainsi un écoulement gravitaire des eaux pen-
dant l'excavation. Dans ce cas il faut prévoir l'évacuation de l'air aux points hauts de
la galerie lors du remplissage.
Les pentes habituelles sont entre 0.5 et 1.0%. Elles permettent l'évacuation des ve-
nues d'eau pendant l'excavation. Si les matériaux excavés sont transportés avec des
trains de marinage sur des rails, la pente ne doit pas dépasser 2 %.

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Canaux et galeries 303

Figure 6.89 : Situation et profil en long de la galerie en charge de l’aménagement


hydroélectrique de Walgau en Autriche

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


304 Canaux et galeries

6.6.5 Choix du diamètre


Les galeries les plus anciennes (construites avant 1920) ont souvent eu des sections
en fer à cheval (Figure 6.90). De plus, le soutènement et le revêtement étaient réali-
sés de pierres taillées (briques) consolidés par des injections de ciment (Figure
6.90). L'étanchéité était souvent garantie par des couches de gunite ou de crépi ap-
pliquées à l'intérieur du revêtement (Figure 6.90).

Figure 6.90: Section type de la galerie de l'aménagement hydroélectrique d'Ams-


teg (1924). A gauche: revêtement en béton avec crépi lissé. Au mi-
lieu: revêtement en béton avec crépi lissé (moitié gauche) et revête-
ment en béton avec gunite armée (moitié droite). A droite: revê-
tement en béton avec une couche de béton projeté armé (moitié
gauche); revêtement en pierres taillées et revêtement en béton armé
avec crépi lisse (moitié droite).

Aujourd'hui, pour des galeries ou puits en charge, une section circulaire du revête-
ment est la règle. C'est en effet le profil idéal des points de vue statique (pression
intérieure et extérieure), hydraulique et économique.
Les Figure 6.91 et Figure 6.92 montrent des conceptions modernes des galeries en
charge. Pendant l'excavation, le radier est protégé par un voussoir préfabriqué avec
une rigole intégrée pour évacuer aisément les venues d'eau du massif rocheux. Le
voussoir est intégré dans le revêtement définitif (Figure 6.91). Dans un rocher de
bonne qualité, la galerie excavée par un tunnelier peut être laissée sans revêtement
(Figure 6.92).

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Canaux et galeries 305

Figure 6.91: Section type de la galerie de l'aménagement hydroélectrique de


Walgau (1984). A gauche: excavation conventionnelle, revêtement
en béton, soutènement par cintres métalliques et béton projeté. A
droite: excavation par tunnelier, revêtement en béton, soutènement
avec du béton projeté. Radier revêtu par un voussoir préfabriqué.

Figure 6.92: Section type de la galerie de Mauvoisin II (projet 1994). Excavation


par tunnelier. A gauche: galerie non revêtue avec radier préfabriqué.
A droite: galerie revêtue en béton avec voussoir (radier) préfabriqué.

La procédure pour le calcul de la section économique est la même que pour les
conduites en charge.
Pour différents diamètres, les charges annuelles qui varient proportionnellement au
diamètre et les pertes d'énergie annuelles exprimées en francs qui sont inversement
proportionnelles au diamètres sont calculées. La somme de ces deux courbes pré-
sente un minimum pour le diamètre économique.

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306 Canaux et galeries

1 80
Total (C+P )
1 60

1 40
Coû ts, Pe rte s de ch ar ge

1 20
Pertes de c harge (P ) (Pertes d'énergie)
1 00

80
Coûts (C)
60

40 C oûts
P erte s d e charges
20
Tota l
0
1 .5 2 .0 2 .5 3 .0 3 .5 4 .0 4 .5 5.0 5 .5 6 .0
Dia mè tre

Figure 6.93: Exemple de calcul du diamètre optimal.

La courbe obtenue est souvent très plate et l'optimal difficile à trouver. L'étude de
l'influence des variations possibles des différents paramètres est par conséquence
indispensable. Avant tout, il faut déterminer l'influence des facteurs suivants :
• coût de construction
• taux d'intérêt
• prix de l'énergie
• rugosité du revêtement.
Comme première approximation, les formules suivantes peuvent être utilisées. Elles
sont basées sur une étude statistique de 394 galeries et puits en charge :
• galerie ou puits revêtus en béton
D = 0.62 Q 0.48
• galerie ou puits blindés
0.12
D = 1.12 H Q 0.45
avec : D : diamètre optimal [m]
Q : débit installé [m3/s]
H : pression statique intérieure [m]
Vu les diamètres importants, les galeries sont normalement à considérer comme hy-
drauliquement lisses. Les pertes de charge doivent donc être calculées avec la loi de
frottement selon Colbrook et White (normalement Manning-Strickler n'est pas appli-
cable!)

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 307

6.6.6 Types de revêtement

6.6.6.1 Objectifs des revêtements


Selon les conditions, le revêtement d'une galerie ou d'un puits doit satisfaire une cer-
taine combinaison de quelques unes des exigences suivantes :
• étanchéité
• limitation des pertes d'eau
• préservation de la nappe phréatique
• limitation des pertes de charge
• durabilité de la galerie (chutes de pierres, abrasion etc.)
• minimisation des travaux de maintenance et d'entretien
• garantir la solidité mécanique et chimique du massif rocheux
• garantir la stabilité de la galerie pendant l'exploitation.

6.6.6.2 Profil non revêtu


Il est possible de renoncer à un revêtement dans les conditions suivantes :
• le profil excavé est stable sans soutènement
• le rocher est peu perméable (typiquement < 10-6 m/s)
• les conditions hydrogéologiques sont favorables
• le comportement du rocher ne se détériore pas sous l'action de l'eau (par
exemple transformation d'anhydrite en gypse)
• il n'y a pas de délavage des matériaux fins dans les fissures du rocher à
l'intérieur du tunnel.
Un profil non revêtu, excavé à l'explosif présente un coefficient de rugosité selon
Manning-Strickler de l'ordre de 30 m1/3/s. Pour limiter les pertes de charge à celles
d'un profil revêtu de béton, la section non-revêtue doit être environ 50 % plus grande.
L'excavation au tunnelier permet d'obtenir une valeur de K entre 50 et 65 m1/3/s, se-
lon la fracturation du rocher. L'augmentation de la section nécessaire dans ce cas se
limite par conséquent à 15 à 20 %. Dans le cas d'une excavation au tunnelier, le pro-
fil non-revêtu est donc devenu à nouveau compétitif. Pourtant le revêtement du ra-
dier avec un voussoir préfabriqué est recommandé pour faciliter la fixation des rails
pour les trains de marinage et l'évacuation des eaux dans une rigole lisse (cf. Figure
6.92 à gauche).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


308 Canaux et galeries

6.6.6.3 Gunite et béton projeté


Le gunite ou le béton projeté sont parfois utilisés comme revêtement définitifs, si les
conditions géologiques permettent cette solution et la rendent économiquement inté-
ressante (Figure 6.94).
Les épaisseurs habituelles varient entre 5 et 15 cm. Une armature en treillis avec des
diamètres des barres de 5 à 10 mm est souvent incorporée. Une technologie plus
récente consiste en l'utilisation du béton projeté armé des fibres en acier.
Dans le cas d'un profil excavé à l'explosif, le revêtement en béton projeté améliore le
coefficient de rugosité d'environ 30 à 40 à 45 m1/3/s. En procédant à un lissage du
béton frais, des valeurs de 50 à 55 m1/3/s peuvent être atteint, mais le lissage est dif-
ficile à exécuter.

Figure 6.94: Revêtement en béton


projeté (exemple:
projet de Mauvoisin
II). Soutènement par
classe d'excavation
III selon norme SIA
198.

6.6.6.4 Béton coffré non armé


Ce type de revêtement peut garantir la stabilité vis-à-vis des pressions extérieures,
mais jamais l'étanchéité vis-à-vis de la pression intérieure.
La contrainte limite de traction du béton est très rapidement atteinte, même pour des
pressions intérieures assez faibles (< 10 bar) et un module de déformation du rocher
élevé. Augmenter l'épaisseur des parois de la galerie dans le but d'éviter la fissura-
tion n'est pas une solution économique.
L'épaisseur minimale du point de vue constructif est de 20 à 25 cm pour des galeries
excavées au tunnelier et de 30 à 35 cm pour une excavation à l'explosif. les épais-
seurs courants sont de l'ordre de D / 10 pour des diamètres inférieurs à 4 m et de D /
15 pour des diamètres plus grands.
Les revêtements en béton sont toujours complétés par des injections de remplissage
(contact) et de consolidation.
Le coefficient de rugosité est de l'ordre de 70 à 80 m1/3/s (rugosité équivalente de
sable entre ks = 0.5 et 2.0 mm).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 309

Figure 6.95: Revêtement en béton


non armé. (Exemple:
projet Mauvoisin II):
Soutènement pour
classe d'excavation
II. Selon norme SIA
198.

Ce type de revêtement peut garantir la stabilité vis-à-vis des pressions extérieures,


mais jamais l'étanchéité vis-à-vis de la pression intérieure.
La contrainte limite de traction du béton est très rapidement atteinte, même pour des
pressions intérieures assez faibles (< 10 bar) et un module de déformation du rocher
élevé. Augmenter l'épaisseur des parois de la galerie dans le but d'éviter la fissura-
tion n'est pas une solution économique.
L'épaisseur minimale du point de vue constructif est de 20 à 25 cm pour des galeries
excavées au tunnelier et de 30 à 35 cm pour une excavation à l'explosif. les épais-
seurs courants sont de l'ordre de D / 10 pour des diamètres inférieurs à 4 m et de D /
15 pour des diamètres plus grands.
Les revêtements en béton sont toujours complétés par des injections de remplissage
(contact) et de consolidation.
Le coefficient de rugosité est de l'ordre de 70 à 80 m1/3/s (rugosité équivalente de
sable entre ks = 0.5 et 2.0 mm).

6.6.6.5 Béton coffré armé


Une armature n'améliore que très peu la résistance du revêtement à la fissuration. Le
seul but d'une armature est donc la répartition uniforme des fissures et la limitation
de leur ouverture et ainsi les fuites d'eau. Cet effet est atteint le plus efficacement
avec des barres de petits diamètres et un faible espacement (15 à 20 cm). A part
l'armature annulaire, une armature longitudinale est nécessaire pour limiter la fissura-
tion due au retrait du béton. La couverture minimale de béton de l'armature est de 5
à 10 mm (Figure 6.96).
Dans des tronçons d'une galerie où le profil d'excavation doit être stabilisé par des
cintres métalliques, le revêtement en béton doit être armé pour obtenir un compor-
tement homogène (Figure 6.97).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


310 Canaux et galeries

Figure 6.96: Revêtement en béton


armé. (Exemple: pro-
jet Mauvoisin II): Sou-
tènement pour classe
d'excavation III. Se-
lon norme SIA 198.

Figure 6.97: Revêtement en béton


armé. (Exemple: pro-
jet Mauvoisin II): Sou-
tènement pour classe
d'excavation IV. Se-
lon norme SIA 198.

6.6.6.6 Béton précontraint (précontrainte active ou passive)


Si une fissuration du revêtement n'est pas acceptable, deux méthodes pour la pré-
contrainte du béton sont connues, la précontrainte passive à l'aide d'injections et la
précontrainte active à l'aide de câbles annulaires.

a) Précontrainte passive
Si la fissuration d'un revêtement en béton doit être évitée pour garantir une parfaite
étanchéité, une précontrainte annulaire du béton est envisageable.
La précontrainte passive est le résultat d'injections à haute pression entre un pré-
revêtement et l'anneau intérieur définitif ou directement entre le rocher et le béton.
Ainsi la poussée passive du rocher est mobilisée et le béton est soumis à une com-

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 311

pression évitant la fissuration. Cette poussée passive du rocher ne peut être mobili-
sée qu'à condition que les contraintes initiales dans le rocher soient suffisamment
grandes.
Le procédé le plus connu a été développé en Autriche par l'entreprise électrique TI-
WAG (Figure 6.98). L'espace entre le rocher (ou le soutènement) et le revêtement
est injecté par l'intermédiaire de tubes équipés de manchettes d'injection. Ces tubes
sont disposés radialement et espacés longitudinalement de 2 à 3 m. Ainsi, non seu-
lement l'espace annulaire est injecté mais également les fissures du massif. Ceci
améliore les caractéristiques mécaniques de ce dernier. La mise en œuvre de ce
procédé présuppose un rocher de qualité adéquate et comme mentionné ci-dessus,
la certitude que la contrainte initiale minimale est supérieure à la pression d'injection.
Le contrôle de la mise en précontrainte du béton est difficile. La contrainte peut être
mesurée indirectement en déterminant la convergence du revêtement.
Pour compenser le fluage du rocher, la précontrainte initiale est choisie 40 à 60 %
(Figure 6.98) plus élevée que la compression nécessaire pour éviter la fissuration
dans le béton.

Longueur du tronçon (étape de bétonnage)


Joint de
Direction d'injection
construction

Section de mesure

Orifices
Manchette Fixation Soupape à Revêtement
manchette en béton
d'injection > 4 mm

Tube d'injection

Soupape à manchette 1. Pompe Feuille de Tube


2. Malaxeur séparation d'injection
3. Tube d'approvisionnement ou étanchéité
du coulis

Figure 6.98: Précontrainte passive d'un revêtement en béton, système TIWAG.

b) Précontrainte active
Cette méthode développée par l'entreprise suisse VSL (Figure 6.99 et Figure 6.100)
consiste en une précontrainte du revêtement au moyen de câbles annulaires. Elle est
limitée à des pressions intérieure de l'ordre de 20 bar. Pour des pressions plus éle-

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


312 Canaux et galeries

vées, le nombre et le tonnage des câbles deviennent excessifs et la méthode n'est


plus économique.

Profil théorique
d'excavation

Tirant de
Niche
précontrainte

Ancrage en Z

Figure 6.99: Précontrainte active d'un revêtement en béton, système VSL.

Vérin
Sellette de déviation
Ancrage en Z
Niche d'ancrage

Figure 6.100: Précontrainte active d'un revêtement en béton.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 313

La précontrainte active représente une alternative intéressant au blindage en acier


avec les avantages suivants :
• coûts inférieurs pour des courts tronçons
• transport et mise en œuvre plus simple et plus rapides
• le risque de flambement à galerie vide est supprimé
• grande flexibilité dans le cas d'une géométrie compliquée (intersection de
deux galeries).
Du point de vue sécurité pendant la mise en précontrainte, une armature de réparti-
tion annulaire et longitudinale est nécessaire dans le revêtement en béton.

6.6.6.7 Membranes et blindages minces (profils "sandwich")


Dans le cas où il est nécessaire de garantir uniquement l'étanchéité, c'est-à-dire la
résistance du massif rocheux est suffisante, des membranes synthétiques étanches
ou un blindage mince sont parfois utilisés. Pour les protéger de l'usure, la membrane
ou le blindage sont posés entre deux couches de béton comme le jambon dans un
sandwich. L'anneau intérieur en béton garantit la stabilité de la membrane dans le
cas d'une pression extérieure pendant la vidange de la galerie et la protège contre
l'abrasion (Figure 6.101).

Figure 6.101: Revêtement en béton


avec membrane
d'étanchéité (Exem-
ple: projet Mauvoisin
II) : Soutènement
pour classe d'excava-
tion III, selon norme
SIA 198.

La solution avec une membrane synthétique pose malheureusement les difficultés


suivantes lors de l'exécution :
• fixation de la membrane
• risque d'endommagement
• soudures.
Dans le cas d'un puits incliné, le blindage mince et l'anneau de béton intérieur sont
préfabriqués en viroles. Ces derniers sont soudés sur place et l'espace entre la virole
et le rocher est rempli par du béton. Pendant la préfabrication, le blindage mince est

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


314 Canaux et galeries

chauffé. Le refroidissement fournit la précontrainte du béton nécessaire pour le


transport.
L'épaisseur minimale des membranes synthétiques est 3 mm.
Les blindages en acier mince peuvent être de faible épaisseur de 5 à 10 mm en cas
de la préfabrication avec anneau intérieur en béton. En cas de mise en place de viro-
les, l'épaisseur minimale est de 10 à 12 mm.

6.6.6.8 Blindage
La mise en œuvre d'un blindage épais en acier s'avère nécessaire, lorsque le massif
rocheux ne peut pas reprendre la pression intérieure à cause d'une pression élevée
ou d'une petite couverture en rocher. C'est généralement le cas pour des puits incli-
nés, rarement pour des galeries (Figure 6.102).
Le montage du blindage dans un puits incliné commence au pied du puits et continue
vers le haut. Des viroles de 6 à 12 m de longueur sont placées dans le puits et sou-
dées (soudure circulaire) à la virole déjà placée. Puis l'espace entre le blindage et le
soutènement est rempli par du béton. L'épaisseur minimale de ce béton de remplis-
sage est de 50 cm (espace minimal pour des soudures de l'extérieur).

Figure 6.102: Exemple: Projet Mauvoisin II. A gauche: galerie blindée, excavation à
l'explosif. A droite: puits blindé, excavation à tunnelier, soutènement
avec voussoirs préfabriqués.

Du point de vue constructif, l'épaisseur minimale d'un blindage est de 10 à 12 mm.


La résistance au flambage est souvent déterminante pour l'épaisseur du blindage.

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Canaux et galeries 315

6.6.7 Dimensionnement des revêtements étanches (ou supposés


étanches)

6.6.7.1 Revêtement en béton (non armé, non fissuré)


Une galerie revêtue en béton peut être considérée comme un système porteur com-
posé d'un tube épais (revêtement) et d'un tube infiniment épais (massif rocheux).

ER, @R

pR, (ra)

Figure 6.103: Galerie en charge revêtue


en béton; réaction du massif
rocheux pR(ra).

A l'interface du revêtement en béton et du massif rocheux, la déformation de l'an-


neau en béton et de la roche doit être égale :
uB (ra) = uR (ra)
En posant cette condition de compatibilité des déformations, la réaction du rocher
peut être déduite :
• déformation du revêtement en béton (tube épais) :
1 + @ B ri2 ra2 1 6 ra2 3
uB (ra ) = 42 p i (1 @ B ) p R (1 2 @B ) + 1 1
EB ri2 ra2 ra 45 ri2 12

• déformation du rocher (tube infiniment épais)


1+ @R
uR (ra ) = ra p R (ra )
ER
Avec uB = uR on obtient la réaction, respectivement la participation du rocher:
2p i (1 @ B )
p R (ra ) =
1 + @ R EB ra2 ra2
1 + (1 2 @B ) + 1
1 + @ B ER ri2 ri2
En connaissant pR (ra), les contraintes dans le béton et dans le rocher peuvent être
calculées l'aide des formules du tube.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


316 Canaux et galeries

6.6.7.2 Considération des injections


Les calculs peuvent être poursuivis en introduisant un 3ème milieu, une zone du mas-
sif rocheux traitée par des injections avec ses caractéristiques Ec, @c pour déterminer
de la même manière la réaction du rocher injecté pR(ra) et celle du massif au-delà,
pR(ri) (Figure 6.104).

Zone traitée
par injections

ER, @R
Compatibilité des déformations
uB(ra) = uc(ra)
uc(rc) = uR(rc)
pR (r
a)
pR (r
c)

Figure 6.104 : Galerie en charge revêtue en béton avec zone traitée par injections.

6.6.8 Puits blindés

a) Modèle de calcul pour pression intérieure


Le modèle utilisé en pratique pour le dimensionnement d'un blindage en acier est
composé des zones suivantes (Figure 6.105) :
• le blindage
• le béton de remplissage supposé fissuré
• une zone de rocher fissuré
• le rocher, massif rocheux
Le blindage est fabriqué en viroles de 6 à 12 m de longueur dans l'usine. Les viroles
sont ensuite descendues dans le puits incliné et liées par une soudure circonféren-
cielle au précédent. Finalement, l'espace entre le rocher et le blindage est remplis de
béton, c'est-à-dire la virole est noyée dans le béton. Après la mise en place du puits
incliné complet, le joint entre le blindage et le béton de remplissage qui est du au re-
trait du béton, est rempli par des injections au coulis de ciment.
La température initiale du blindage, après le montage, est typiquement entre 20 et
30°C. Elle est influencée par la température initiale du massif rocheux et le réchauf-
fement du béton de remplissage par la prise du ciment. La mise en charge du puits
blindé avec de l'eau froide, typiquement entre 5 et 10°C, provoque un rétrécissement
du blindage et par conséquent un vide entre le blindage et le béton de remplissage.
Pour le dimensionnement, un refroidissement du blindage de 20°C est en général
admis ce qui conduit à un vide de :

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Canaux et galeries 317

)r = 0.00025 r
)r
= 0.25 ‰
r
avec un coefficient de température de l'acier de 1.25 · 10-5/°C.

pB ri
r pB
pB i rf
ra
pi
ri

ra
massif rocheux
(non fissuré par pi)
rf
blindage
vide )r

béton de remplissage
(fissuré)
rocher fissuré

Figure 6.105: Modèle pour le dimensionnement d'un blindage en acier.

La résistance à la traction du béton étant faible (1 à 2 N/mm2), le béton de remplis-


sage se fissure sous l'action de la pression intérieure. La fissuration a également lieu
dans la zone du rocher, dans laquelle l'état de contraintes initiales est perturbé par
l'excavation et ne peut plus transmettre des contraintes tangentielles dues à la pres-
sion intérieure agissant sur le blindage.
Le rayon de cette zone dépend de la méthode d'excavation. En pratique, les hypo-
thèses suivantes sont souvent admises :
• excavation à l'explosif : zone 1 à 2 m autour de la galerie
• excavation au tunnelier : zone de 0.5 à 1.0 m autour de la galerie
La répartition de la pression intérieure sur le blindage et les zones autour est déter-
minée à l'aide de la condition de la compatibilité des déformations :
uAcier = uBéton de remplissage + uRocher fissuré + uMassif rocheux + )r (vide initial)
uA = uB + uR + uM + )r = utot + )r

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318 Canaux et galeries

Déformation radiale du blindage (tube mince)


p A ri2
uA =
EA e
avec : pA = pi - pB
pB : réaction du béton de remplissage, resp. participation du massif
entourant
pA : partie de la pression intérieure prise par le blindage
e : épaisseur du blindage
pi : pression intérieure
EA : module d'élasticité d'acier
La contrainte tangentielle dans le blindage s'écrit comme suit :
ri u
- t = (pi pB ) = EA A
e ri
Déformation radiale du béton de remplissage
Le béton de remplissage étant fissuré, il ne transmet que des contraintes radiales :
ri
-r = pB
r
Avec -t = 0, la loi de Hook permet d'écrire la déformation radiale de la zone fissuré
comme suit :
duB 1
= [-r @ B -l ]
dr EB
-l = @ B -r
L'intégration de cette équation entre les limites ri et ra donne la déformation radiale du
béton de remplissage (compression) :
1 @ B2 r
uB = ln a ri pB
EB ri
Déformation radiale du rocher fissuré
La même dérivation appliquée à la zone du rocher fissuré donne :
2
1 @R r
uR = ln f ri pB
ER ra
Déformation radiale du massif rocheux (tube infiniment épais)
1 + @R
uM = ri p B
ER
Avec la condition de la compatibilité des déformations définie ci-dessus, la réaction
pB peut être trouvée.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 319

La résolution de cette équation est plus aisée à l'aide d'une méthode graphique qui
permet également de faire une étude paramétrique rapide (Figure 6.106).

p B [N /mm 2 ] u tot 1 "B


2
ra 1 "R
2
rf 1+ "R
= pB ln + ln +
ri EB ri ER ra ER
P artie de la pressio n intérie ure prise p ar

le ro cher

)r pB
joint initial = 0 . 25 0 00
r
u
[‰ ] Déformation
ri radiale relative
1‰ 2‰ 3‰
pi = pB + pA
le blindag e

pA

uA ri
= pA
p A [N /mm 2 ] ri EA e

Figure 6.106: Méthode graphique pour trouver la pression sollicitant le béton de


remplissage.

b) Critères de dimensionnement
Les critères généraux pour le dimensionnement d'un blindage sont:
I Contraintes dans le blindage et sa déformation (durabilité)

II Résistance du massif rocheux (cf: 6.6.4.2) (résistance du système blindage-roche à la


rupture

Le critère (I) concerne la durabilité du blindage en service et englobe


Ia Résistance au voilement pour pressions extérieures

Ib Limitation des contraintes dans le blindage

Ic Limitation des déformations locales du blindage (critère de portance sur fissures)

Selon le critère (Ib), les contraintes tangentielles (ou contraintes équivalentes) sont
normalement limitées à 50% de la limite élastique de l'acier.
Le critère (Ic) concerne la capacité du blindage de faire le pont à travers des fissures
potentielles dans le béton de remplissage. Par l'expérience, ce critère de portance
sur fissure est satisfait si le blindage est plus épais que deux fois la largeur de la fis-
sure maximale dans le béton de remplissage. Pour des raisons de symétrie, au mi-
nimum deux fissures se forment dans le béton de remplissage, dont la largeur dé-

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


320 Canaux et galeries

pend de la déformation radiale du béton de remplissage. Par conséquent, sous l'hy-


pothèse de deux fissures, la largeur maximale des fissures dans le béton de remplis-
sage devient:
2 df = 2 u
df max = u
u : déformation radiale du béton de remplissage
Critère (1c): e 2 df max = 2 u
e: épaisseur du blindage
df max : largeur maximale des fissures dans le béton de remplis-
sage.
Le critère de portance sur fissures normalement n'est que déterminant dans le cas
des blindages minces.

Contribution limite
du massif rocheux

Pr max = 3 k o q r g (z rf )
Pression prise par le massif rocheux

Exemple
Co
eff
ici
e nt
de Exemple
séc
uri

S =2 Exemple
vide

Déformation radiale relative

Dz

Contraintes dans l'acier


Pression prise par le blindage

Couverture effective du
massif rocheux

Portance
sur fissure

Epaisseur du blindage

Figure 6.107: Diagramme de dimensionnement pour la détermination de l'épais-


seur d'un blindage (Exemple: Collierville Tunnel de l'aménagement
hydroélectrique de North Fork Stanislaus River en Californie): diamè-
tre intérieur du blindage
di = 3.25 m; qualité de l'acier ASTM 517 avec limite élastique fy = 680
N/mm2.

A la Figure 6.107, les critères de dimensionnement d'un blindage (Ib), (Ic) et (II) sont
représentés dans un seul diagramme de dimensionnement. Exemple 1 montre qu'un
blindage de 5/8 in. (env. 16 mm) est suffisant si la couverture du massif rocheux est

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 321

supérieure à 135 m (contrainte maximale dans l'acier limitée à 50% de la limite élas-
tique). Pour cette couverture, la participation du rocher atteint 53%.
La participation du rocher peut être augmentée en augmentant sa couverture, mais
seulement à une valeur limite qui correspond à la participation maximale élastique du
rocher. Pour un module de rocher de 20 GPa, cette participation maximale est at-
teinte à partir d'une couverture de 195 m. La participation maximale élastique du ro-
cher vaut 79% (Figure 6.107, Exemple (2)).

c) Résistance au voilement sous l'effet de la pression extérieure


dans le cas de la vidange du puits blindé (Critère (Ia))
Dans le cas de la vidange du puits blindé, le blindage relativement mince est soumis
à une pression d'eau extérieure qui dépend de la position de la nappe phréatique
dans le massif rocheux.
La théorie du voilement d'un blindage noyé dans le béton est assez complexe. Les
théories les plus connues et appropriées (Amstutz; Jacobsen; Montel) se basent sur
l'hypothèse que le voilement se produit sous forme d'un "lobe" simple.

Pe
béton de remplissage

voilement
blindage

Figure 6.108: Voilement du blindage sous l'action d'une pression extérieure.

La pression critique de voilement pK est présenté sur la Figure 6.109 en fonction de


l'élancement du blindage r / e (rapport rayon-épaisseur) et pour différentes qualités
d'acier -F (limites d'écoulement) selon la théorie d'Amstutz .
Montel a proposé une formule qui peut être appliquée pour le prédimensionnement :
5 -F
pK =
1.2 (u + 2 )r )
1 .5
r
1+
e e
avec : pK : pression d'instabilité
-F : limite élastique de l'acier
r : rayon extérieur du blindage
e : épaisseur

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


322 Canaux et galeries

u : écart radial au gabarit pour un segment de 50º (imperfec-


tion initiale)
)r : jeu radial entre tôle et (joint initial)
Domaine de validité :
r
30 7 7 170 250 7 - F 7 500 N / mm 2
e
u )r
0 .1 7 7 0 .5 7 0.025
e r

r/e

Figure 6.109: Pression critique de voilement pk selon la théorie d'Amstutz (1 MPa =


10 bar).

Si la résistance au voilement sous l'effet de la pression extérieure (galerie vide) de-


vient critique, les mesures suivantes peuvent être prises :
• augmenter l'épaisseur du blindage (souvent pas économique)

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 323

• équiper le blindage avec des raidisseurs (anneaux, ancrages)


• drainage avec soupapes (unidirectionnel)

6.6.9 Dimensionnement des revêtements perméables


Un revêtement en béton est rarement imperméable, parce qu'il est poreux. Une
pression supplémentaire de percolation agit par conséquent sur le béton et le rocher.

gradient de la percolation
ri
pi
pa
pi

ra R: rayon d'influence
pR(ra)
de la percolation

béton massif rocheux

Figure 6.110: Pression supplémentaire due à la percolation d'eau dans le béton et


le rocher

Cette pression supplémentaire est proportionnelle au gradient hydraulique de l'écou-


lement et modifie très sensiblement les contraintes calculées en admettant le revê-
tement étanche.
En considérant l'effet du gradient hydraulique dans un tube épais, l'équation différen-
tielle du type Euler qui décrit la déformation devient non-homogène.
du 2 1 du u dp (1 + ") (1 2 ")
+ =$
dr 2 r dr r 2
dr E (1 ")
avec: $: efficacité des pressions interstitielles
= 0 pour un tube étanche
= 1 pour un tube perméable
En fait, la contrainte radiale dans un tube épais, qui est évidemment une compres-
sion pour un tube étanche, s'annule et peut même devenir une traction. Elle peut at-
teindre une valeur qui correspond à 20% de la pression intérieure en admettant un
revêtement perméable. Les tractions tangentielles augmentent d'un facteur 1.5 à 2.5
environ.
En calculant la réaction du rocher pour le cas d'un revêtement perméable, il faut
considérer non seulement la condition de compatibilité des déformations, mais éga-
lement la continuité de l'eau de percolation.
compatibilité des déformations
u B (ra ) = u R (ra ) pB (ra )
continuité de l'eau de percolation
qB = q R pa

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


324 Canaux et galeries

Avec la condition de la continuité de la percolation dans le revêtement et le massif


rocheux contigu, la pression d'eau agissant à l'extérieur du revêtement peut être cal-
culée.

6.6.10 Première mise en eau des galeries et puits en charge


Le premier remplissage des galeries et puits perméables représente souvent les cas
de charge la plus critique. Il peut s'accompagner d'une fissuration locale du rocher
autour de la galerie, ou même, dans un cas extrême, d'une instabilité à grande
échelle ("hydraulic jacking"), entraînant d'importantes pertes d'eau. La première mise
en eau d'une galerie doit donc être effectuée très soigneusement en respectant quel-
ques critères pour éviter de tels dégâts.
En principe, la mise en eau d'un système d'adduction d'eau doit être basée sur trois
critères suivantes (Schleiss 1991):
a) vitesse de remplissage ou vitesse d'augmentation de la pression intérieure;
b) nombre et grandeur des gradins des étapes de pression;
c) durée des pauses de saturation entre les gradins des étapes de pression.
Ces critères sont représentés par un programme de mise en eau schématique pré-
senté à la Figure 6.111.
Niveau d'eau resp. hauteur de la pression

Temps

Figure 6.111: Programme de mise en eau schématique d'une galerie avec indica-
tion des critères.

a) Limitation de la vitesse de remplissage ou de la vitesse d'augmentation de


la pression intérieure
Ce critère tient compte des contraintes liées aux organes de contrôle (vanne de prise
d'eau) et au danger du renfermement de l'air. Les vannes de prise d'eau ne sont
normalement pas utilisables pour la première mise en eau puisqu'elles ne sont pas
réglables avec assez de précision.
En général, les prises d'eau sont équipées de vannes ou soupapes spéciales (by-
pass) qui permettent un réglage précis du débit pendant le remplissage du système.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Canaux et galeries 325

Pour les systèmes d'adduction d'eau longs et à pentes variables (profil en "dents de
scie"), le risque de l'enfermement de l'air existe en cas d'un remplissage rapide en-
traînant beaucoup de turbulences. Les bulles d'air captées dans le système et com-
primées par la pression d'eau peuvent créer des explosions dangereuses par la dé-
compression instantanée de l'eau arrivée à la turbine.
En pratique, les vitesses d'augmentation de la pression suivantes sont acceptées:
• Galeries en béton : 1.0 à 1.5 m/h
• Galeries revêtues en béton
en cas de l'eau très froide : 0.3 à 0.5 m/h
• Galeries non revêtues dans
un massif rocheux cristallin : 5.0 à 10 m/h
• Puits revêtus en béton : jusqu'à 10 m/h
• Puits blindés en acier : jusqu'à 100 m/h

b) Nombre et grandeur des gradins des étapes de pression


Pendant l'excavation de la galerie, la nappe phréatique est normalement abaissée
jusqu'à l'axe du tunnel par son effet drainant. Si la pression intérieure est augmentée
très vite lors de la mise en eau d'une galerie avec un revêtement perméable, des
gradients très élevés de la percolation vers le massif rocheux en résultent. Ces im-
portants gradients peuvent provoquer une fissuration du massif rocheux dans le voi-
sinage de la galerie et, à la limite, une rupture globale par le phénomène de "hydrau-
lic jacking".
Ces gradients des fuites d'eau pendant la première mise en eau ne doivent pas dé-
passer le gradient stationnaire pendant l'exploitation de la galerie. Les gradients
d'une galerie en service n'atteignent que rarement 1.5 (la pression intérieure dépasse
de 150% la pression extérieure due à la nappe phréatique).

c) Durée des pauses de saturation entre les gradins des étapes de pression
Pour éviter des gradients de percolation trop importants dans le massif rocheux (fui-
tes d'eau), la mise en pression doit comporter des pauses de saturation du massif
rocheux. La durée de ces pauses est donnée par la condition stipulant qu'au début
d'une prochaine étape d'augmentation de pression, la nappe phréatique doit être at-
teinte à peu près au niveau stationnaire. Ce niveau stationnaire s'établit dès que les
fuites d'eau deviennent constantes pour une certaine pression intérieure. Les pertes
d'eau d'un système d'adduction d'eau peuvent être déterminées en mesurant le
changement du niveau d'eau dans la chambre d'équilibre pendant la pause de satu-
ration.
Selon l'expérience des pauses de saturation de 12 à 24 heures sont nécessaires en-
tre les diverses étapes d'augmentation de pression, en fonction de la longueur des
galeries.
La Figure 6.112 montre le programme de la première mise en eau du système d'ad-
duction d'eau de l'aménagement hydroélectrique de North Fork en Califorie (Schleiss
1991).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


326 Canaux et galeries

Niveau de pression intérieure (m s.m.)

Puits de la prise
Chambre d'équilibre
prévu Galerie en charge
Chambre d'équilibre

réalisé

Puits en charge

Galerie inférieure
en charge

jours

Figure 6.112: Programme de la première mise en eau du système d'adduction


d'eau de l'aménagement North Fork en Californie (Collierville Tun-
nel).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Ouvrages de dérivation temporaires 327

7 OUVRAGES DE DERIVATION TEMPORAIRES

7.1 Types de dérivations


7.1.1 Objectifs
Les chantiers des constructions hydrauliques sont par définition situés dans le gaba-
rit de cours d'eau. L'endroit du futur ouvrage doit être mise à sec avant le début de sa
réalisation. La fouille à sec permet d'effectuer les travaux suivants:
• des sondages géologiques finales
• l'excavation pour les fondations
• l'assainissement du sous-sol par des injections
• la réalisation de la partie inférieure de l'ouvrage
La notion "dérivation" englobe toutes les mesures pour maîtriser le cours d'eau pen-
dant la période des travaux. Le but des dérivations est de dériver les crues probables
pendant les travaux pour protéger le chantier contre des dégâts. La dérivation doit
également empêcher que la présence du chantier agrandit le risque d'inondation à
l'aval ou à l'amont.

7.1.2 Dérivation intégrale

2
1

Figure 7.1: Dérivation intégrale


barrage en construction galerie de dérivation
batardeau amont batardeau aval

Cette méthode consiste à dériver intégralement le cours d'eau à l'aide d'une galerie,
d'un canal ou d'une conduite pour mettre le lit du cours d'eau complètement à sec
sur un certain tronçon. L'ouvrage peut par la suite être réalisé indépendant du débit

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


328 Ouvrages de dérivation temporaires

dans le cours d'eau. Des travaux supplémentaires importants sont par contre néces-
saire pour réaliser la dérivation intégrale.
En général, ces travaux sont réalisé par les étapes suivantes:
a) construction des batardeaux pour la protection de l'entrée et de la sortie de
l'ouvrage de dérivation
Dans le cas d'une topographie favorable, il peut être renoncé à ces batardeaux
dont la fonction est repris par le terrain naturel qui sera excavé plus tard.
b) réalisation de l'ouvrage de dérivation ( sur la Figure 7.1) et préparation de
l'organe de fermeture (batardeau en béton)
c) coupure de la rivière par remblai de la partie inférieur des batardeaux et
(cf. Figure 7.1) pour la forcer de quitter son lit original et d'entrer dans l'ouvrage
de dérivation
La coupure n'est en général réalisable que pendant des périodes à faible débit,
c'est-à-dire une période d'étiage
d) mise à sec de la fouille entre les batardeaux et (cf. Figure 7.1) par pom-
page et abaissement de la nappe phréatique et finition des batardeaux
e) réalisation de l'ouvrage définitif (barrage, prise d'eau, barrage mobile, centrale,
etc.)
f) démolition des batardeaux (batardeau aval en général complètement, amont
uniquement partiellement)
g) coupure de la dérivation
La coupure de la rivière et de la dérivation provisoire est souvent une opération criti-
que qui peut fortement influencer la durée des travaux.

7.1.3 Dérivation en plusieurs phases à travers le chantier

Figure 7.2: Dérivation à travers le chantier


construction galerie de dérivation

L'ouvrage de dérivation de type galerie en béton, canal ouvert ou couvert traverse le


chantier. Cette méthode n'est en général applicable que dans des vallées larges.
L'ouvrage de dérivation doit être construit pendant une période d'étiage. Le chantier
est également protégé par des batardeaux à l'aval de l'entrée en galerie et à l'amont
de sa sortie.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Ouvrages de dérivation temporaires 329

7.1.4 Balancement de la rivière


Avec la méthode de balancement de la rivière, cette dernière reste dans son lit origi-
nal qui est rétrécit localement par des batardeaux qui protègent la zone des travaux.
Cette méthode permet de minimiser les travaux liés à la dérivation et elle essaye
d'éviter une perturbation majeure du régime de la rivière. Ce dernier point est impor-
tant dans le cas où la navigation sur la rivière doit être maintenu pendant les travaux.

2
5
1 3 6 4

1 3 4

2 5

Figure 7.3: Balancement de la rivière


zone des travaux batardeau
section de la dérivation zone des travaux
batardeau ouvertures

Le balancement de la rivière comporte les phases suivantes:


a) construction du batardeaux (cf. Figure 7.3) pour la première phase qui
permet de mettra à sec la première zone du chantier
Le lit de la rivière est éventuellement élargi par excavation de la rive en
face.
b) réalisation des ouvrage hydrauliques (cf. Figure 7.3, barrage, barrage
mobile, centrale, évacuateur de crue)
Cette partie de l'ouvrage contient des organes d'évacuation (cf. Figure
7.3) qui servent d'évacuateurs de crues provisoires (ouverture dans un bar-
rage en béton) ou permanents (déversoirs contrôlés par des vannes)
c) démolition partielle ou complète du batardeau (cf. Figure 7.3) et cons-
truction du batardeau (cf. Figure 7.3) pour la deuxième étape de cons-
truction, ensuite dérivation de la rivière à travers les ouvertures dans l'ou-
vrage déjà en place (cf. Figure 7.3)
d) construction de la partie restante de l'ouvrage définitif (cf. Figure 7.3)
e) mise en service de l’évacuateur de crue permanent et fermeture des ouver-
tures provisoires
f) démolition des batardeaux

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


330 Ouvrages de dérivation temporaires

7.2 Eléments de dérivation


7.2.1 Eléments permanents ou provisoires
En général, une dérivation est réalisée avec les éléments principaux suivants:
• batardeaux
• ouvrages de dérivation
galeries, conduites
canaux
orifices ou ouvertures dans l'ouvrage définitif
• organes de fermeture
Ces éléments peuvent être provisoires ou permanents. Pour des considérations éco-
nomiques, il est toujours préférables d'utiliser des organes de l'ouvrage définitif
comme éléments de dérivation (vidange de fond, évacuateur de crues). Dans le cas
d'un barrage en remblai, les batardeaux sont souvent intégrés dans l'ouvrage défini-
tif.

7.2.2 Batardeaux
Les batardeaux sont des ouvrages provisoires qui entourent la zone des travaux ou
coupent complètement la rivière et protègent ainsi le chantier et permettent sa mise à
sec.
Les types de batardeaux sont très nombreux, souvent un batardeau est constitué de
plusieurs types. En général, les batardeaux sont construit à l'aide de matériaux dis-
ponible sur le site (enrochements, sol, béton). Les palplanches servent comme élé-
ment d'étanchéité ou comme protection contre l'érosion de ces batardeaux.

7.2.2.1 Batardeaux en remblai


Les batardeaux les plus simples sont ceux en remblai avec des matériaux peu per-
méables. Il s'agit par conséquent de digues homogènes.
La réalisation se fait par remblai sur arête dans l'eau ce qui n'est possible qu'en pré-
sence d'un écoulement à faible vitesse. Un compactage soigneux étant difficile à ré-
aliser, la digue homogène doit avoir une base large pour garantir la stabilité et l'étan-
chéité (cf. Figure 7.4).
L'inconvénient du volume très élevé de matériaux nécessaire pour une digue homo-
gène peut être évité en utilisant des palplanches battues dans la digue après rem-
blai. Ces palplanches servent comme éléments d'étanchéité et de protection contre
l'érosion.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Ouvrages de dérivation temporaires 331

Digue homogène Remblai sur arête


6-12 m

2 1:
2
H 1:

L>3 -4 H

Figure 7.4: Réalisation d'un batardeaux en remblai

batardeaux

palplanches

Figure 7.5: Digues homogènes avec palplanches comme éléments d'étanchéité


et de protection contre l'érosion

Des enrochements sont souvent utilisés comme matériaux de remblai pour la cons-
truction de digues avec palplanches. Dans certains cas, il peut être partiellement ou
complètement être renoncé au corps d'appui amont.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


332 Ouvrages de dérivation temporaires

7.2.2.2 Batardeaux avec palplanches


Les batardeaux avec palplanches nécessitent moins de place que les digues homo-
gènes. Ils sont par conséquent presque toujours utilisés pour limiter le rétrécisse-
ment dû à la méthode de balancement de la rivière.
Le batardeau double est composé de deux rangées de palplanches qui sont fixés
ensembles. L'espace entre les palplanches est rempli par des matériaux qui peut
garantir la stabilité. Ils sont caractérisés par un angle de frottement D et un poids
spécifique 8 élevés (gravier, sable grossier, enrochements). Ces matériaux garantis-
sent la stabilité sous la poussée de l'eau, tandis que l'étanchéité est assuré par les
palplanches amonts. Ils sont donc enfoncés jusqu'à une couche peu perméable et
non soumise à l'érosion interne ce qui signifie que cette couche correspond de préfé-
rence au rocher. Dans certain cas le batardeaux est fondé sur une couche de béton.
Les palplanches aval sont équipé d'un drain situé au pied pour éviter le soulèvement.

Batardeau simple Batardeau double

1
2 H Drain
H H Couche
1
2 H de béton
d

Rocher Rocher b

Batardeau double ancré


Exemple: Seujet à Genève

Rocher
b
b
, 0 .75 ÷ 0. 9
H
Figure 7.6: Batardeaux avec palplanches

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Ouvrages de dérivation temporaires 333

La stabilité au glissement du batardeaux peut être améliorée par des tirants d'an-
crage qui fixent les palplanches aux rocher.
La largeur nécessaire des batardeaux avec palplanches atteint typiquement 75 à
90% de leur hauteur pour que la stabilité soit assurée.

7.2.2.3 Batardeaux submergés ou submersibles


Les batardeaux en remblai dans le cadre de constructions de barrages sont souvent
conçus comme batardeau submergés. La submersion se passe sans problèmes, si
le parement aval du batardeaux est renforcé pour qu'il résiste à la force érosive de
l'eau. Cette protection de surface peut être réalisée à l'aide des moyens suivants:
• des enrochements (rip-rap)
• plaques en béton préfabriqués
• ancrage de la surface des enrochement par des treillis d'armatures
• gabions

a) Protection avec enrochements


Puisque les dimensions des blocs de rocher sont pratiquement limités (abattage en
carrière, mise en place), cette protection ne résiste qu'au faible débits spécifique et
par conséquent aux vitesses faibles. Lors de la submersion l'eau pénètre à travers
les enrochements dans les matériaux de la digue. Ceci conduit à des sous-pressions
sous les blocs. En combinaison avec des vitesse d'écoulement élevées au pied du
batardeaux, ces sous-pressions sont souvent à l'origine d'instabilité des blocs qui
sont ensuite emportés par l'écoulement.

Selon Isbash, la vitesse critique pour l'instabilité des blocs peut être estimé avec
2g( )
v cr = 1.2 B E
dB cos(')
E

avec: dB : diamètre caractéristique des blocs


B : densité des blocs (typiquement 2650 kg/m3)
E : densité de l'eau (1000 kg/m3)
' : pente du talus / batardeau

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334 Ouvrages de dérivation temporaires

b) Protection avec des plaques en béton

D C
E
B
A

Figure 7.7: Protection en plaque en béton d'un batardeaux submersible (Cabora-


Bassa)
A alluvions B injections

C plaques en béton, 7 x 7 m D palplanches


E enrochement

Le problème des sous-pression mentionnés ci-dessus existe également pour les sur-
faces protégées par des plaques en béton.
Néanmoins, cette méthode de protection était appliqué plusieurs fois avec succès
par exemple pour les batardeaux du barrage voûte de Cabora-Bassa en Mozambi-
que. Des plaques de béton avec des dimensions de 7 x 7 m et une épaisseur de 3 m
(bétonnés sur place) permettaient un déversement de débits spécifique jusqu'à
74 m3/s m avec des vitesses maximales de 13 m/s.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Ouvrages de dérivation temporaires 335

c) Protection avec treillis d'armature (enrochement armé)


L'enrochement des batardeaux peut être protégé par des treillis d'armatures fixés
avec des barres d'armatures dans les matériaux de la digue (cf. Figure 7.8).

A
10 m
C
2

1
3

Figure 7.8: Fixation des enrochements par des treillis d'armature


1 barres d'armature de 4 et A treillis d'armature
10 m de longueur
2 treillis d'armature B barre d'armature épaisse

3 enrochement C barre d'ancrage

d) Protection avec gabions


Les gabions peuvent également servir comme protection de surface des parement
d'un batardeaux. Ces gabions sont ancrés avec des barres d'ancrage dans l'enro-
chement de la digue.

A
C
B
.7 5
1 :1 1:2
D E
F 1 :2 E

0 20 100 m

Figure 7.9: Protection avec des gabions


A batardeau amont B barrage en construction

C batardeau aval D rip-rap

E gabions F pied du batardeau

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


336 Ouvrages de dérivation temporaires

7.2.3 Organes de dérivation

7.2.3.1 Galerie de dérivation


Dans une vallée étroite, une galerie de dérivation est en général nécessaire pour ré-
aliser une dérivation intégrale.

Figure 7.10: Exemple d'un système de galeries de dérivation (Cabora-Bassa)

Souvent, plusieurs galeries en parallèle sont nécessaires. Les galeries les plus gran-
des réalisées jusqu'aujourd'hui ont une capacité maximale de 2500 m3/s et un dia-
mètre de 16 m.
Le diamètre maximal réalisable dépend de la qualité du rocher:
• excellente qualité: Dmax 16 m
• bonne qualité: Dmax = 8 ÷ 11 m
• qualité moyenne: Dmax < 8 m
En général, les galeries sont revêtu en béton pour limiter les pertes de charge dues
au frottement et pour éviter l'abrasion du rocher. La vitesse est limitée à 10 m/s en
cas de charriage (risque d'abrasion du béton).
Pour le débit de dimensionnement les galeries fonctionnent à l'écoulement libre.

7.2.3.2 Canaux de dérivation


Les canaux de dérivation peuvent être réalisés, si l'espace disponible dans la vallée
le permet et si les crues à dériver sont très importantes.
Les canaux sont en général excavé dans le terrain meuble ou le rocher. Pour des
faibles débits des canaux en bois ou en acier peuvent également être utilisés.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Ouvrages de dérivation temporaires 337

La dérivation à l'aide d'un canal se fait avec la démarche suivante (cf. Figure 7.11):
Phase 1
Le canal de dérivation est excavé au sec en laissant en place le rocher à l'entrée et à
la sortie. A l'emplacement du futur barrage un ouvrage de contrôle est construit ce
qui permet la coupure du canal à la fin du chantier.
Phase 2
Le rocher laissé en place est excavé et la rivière est forcée dans le canal par la cons-
truction d'un batardeaux en remblai. Cette opération peut uniquement se faire à ni-
veau d'eau bas.
Phase 3
Si le barrage a atteint une certaine hauteur, la dérivation est fermée par période
d'étiage et la rivière est contrôlée à l'aide de la vidange de fond du barrage. Le rem-
plissage de la retenue peut commencer.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


338 Ouvrages de dérivation temporaires

3 8
1 4
9
7
2

11
10 12

13

14

Figure 7.11: Dérivation du Rio Parana pendant la construction du barrage d'Itaipu

1 axe du barrage 2 excavation: évacuateur de crues

3 excavation: canal de 4 digue en enrochement


dérivation
5 ouvrage de contrôle 6 rocher laissé en place

7 batardeaux principaux 8 canal de dérivation

9 ouvrage de contrôle 10 construction digue latérale

11 construction digue 12 fin des travaux: l'ouvrage de


principale contrôle
13 salle des machines 14 démolition partielle du batardeau
aval

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Ouvrages de dérivation temporaires 339

7.2.3.3 Ouvertures dans l'ouvrage final

Figure 7.12: Exemple d'une transformation d'une ouverture pendant la construc-


tion (à gauche) en vidange de fond (à droite) (La Barthe, F)

Si les crues à maîtriser pendant le chantier sont trop importantes, la dérivation inté-
grale de la rivière n'est plus possible pour des raisons techniques et économiques.
Dans ce cas, la dérivation à travers le chantier en laissant des ouvertures dans l'ou-
vrage final doit être envisagé.
Les éléments suivants peuvent servir de dérivation contrôlée à travers le chantier:
• grandes ouvertures dans l'ouvrage final (barrage)
• brèches
• rétrécissement de la rivière
• déversement par dessus l'ouvrage en construction (barrage)
A la fin du chantier, les ouvertures dans le barrage sont souvent transformé en vi-
dange de fond.

7.2.4 Organes de fermeture


Les galeries de dérivation sont équipés à l'entrée d'un dispositif de batardeaux en
béton glissant dans des rainures latérales, qui permet de fermer provisoirement la
galerie à la fin du chantier. Ensuite, la galerie est fermée à l'aide d'un bouchon en
béton qui doit résister à la poussée de l'eau à retenue maximale. Souvent les gale-
ries sont transformés en vidange de fond.
Les canaux de dérivation de grandes dimensions doivent être équipé d'un ouvrage
de contrôle qui permet la fermeture à la fin du chantier. Cet ouvrage de contrôle
contient également des ouvertures qui peuvent être fermées à l'aide de batardeaux
en béton ou des vannes glissantes (cf. Figure 7.11).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


340 Ouvrages de dérivation temporaires

7.3 Coupure de la rivière


La dérivation d'une rivière dans une galerie ou un canal de dérivation nécessite la
coupure de la rivière par des batardeaux. En général, la rivière est forcée à entrer
dans l'ouvrage de dérivation par une surélévation du plan d'eau. Celle-ci est crée par
la coupure de la rivière, c'est à dire par un remblai sur arête du batardeau amont.

niveau amont
la dérivation
longueur de

batardeau:
remblai sur arête
niveau aval

ouvrage de
dérivation

Figure 7.13: Dérivation avec coupure de la rivière

Selon la longueur de la dérivation, la coupure influence le niveau d'eau à l'amont et à


l'aval du batardeau.

Dérivation courte
Dans le cas d'une dérivation courte, le niveau aval de la rivière n'est pas influencée
par l'opération de coupure. La chute obtenue ne dépend que de la surélévation du
niveau amont. La capacité de la dérivation dépend directement de cette chute.

h
niveau à l'amont
du batardeau
)h
niveau à l'aval
du batardeau

t
début fin de la coupure
)h : chute disponible pour la capacité de la dérivation

Figure 7.14: Niveaux d'eau amont et aval d'une dérivation courte

Dérivation longue
Dans le cas d'une dérivation longue, le niveau à l'amont et à l'aval sont influencés
par l'opération de coupure. Le niveau à l'aval s'abaisse à cause de la mise à sèche
de la rivière. La chute crée par l'opération de coupure devient plus importante.

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Ouvrages de dérivation temporaires 341

h
niveau à l'amont
du batardeau
)h
niveau à l'aval
du batardeau
t
début fin de la coupure
)h : chute disponible pour la capacité de la dérivation

Figure 7.15: Niveaux d'eau amont et aval d'une dérivation longue

L'expérience montre qu'avec un seul batardeau en remblai sur arête une chute
maximale de 2 m peut être réalisée en utilisant des blocs de 2 à 5 t. Si la chute de-
vient plus importante, les matériaux rocheux à la tête du batardeau sont emporté par
l'écoulement rétrécie à cet endroit (cf. Figure 7.16).
Si une chute plus élevée est nécessaire pendant la coupure pour forcer l'eau dans
l'ouvrage de dérivation, plusieurs batardeaux doivent être construits simultanément.
Chacun de ces batardeaux peut créer une chute de 2 m environ.

batardeau: érosion de la tête


remblai sur arête
V0

V >> V0

Limite téchnique
Surélévation maximale du plan d ’eau à l ’aide d ’un seul batardeau
)hmax = 2.0 m

Figure 7.16: Augmentation de la vitesse d'écoulement due au rétrécissement lo-


cal par le remblai en arête

La coupure d'une rivière est en général une opération délicate est coûteuse. En gé-
néral, la coupure d'une rivière ne peut se faire qu'en période d'étiage. Une planifica-
tion soigneuse du stock de blocs, du transport de ces dernier et du remblai est né-
cessaire pour garantir le succès de l'opération. En cas d'échec, il faut attendre la
prochaine période d'étiage, ce qui prolonge la durée du chantier et augmente les
coûts de l'ouvrages.

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342 Ouvrages de dérivation temporaires

7.4 Aspects hydrauliques


7.4.1 Balancement de la rivière
Du point de vue hydraulique, le balancement d'une rivière se comporte comme un
rétrécissement local.
Selon la géométrie du rétrécissement, une séparation de l'écoulement plus ou moins
importante peut être observée (cf. Figure 7.17). La séparation conduit à des zones
d'eau morte qui diminuent la zone d'écoulement principal.

zone d’écoulement principal


µb b
B séparation de l’écoulement

L zone d’eau morte

Figure 7.17: Effets d'un rétrécissement local sur l'écoulement

Si le rétrécissement est important (b / B << 1), l'écoulement initialement fluvial est


contrôlé par le rétrécissement. Une transition de l'écoulement fluvial à l'écoulement
torrentiel est provoquée. La section critique s'établit à l'endroit de la plus grande
contraction de l'écoulement de largeur µb (cf. Figure 7.17). En considérant un canal
rectangulaire, la hauteur critique hc correspondant peut s'écrire:

Q2
hc = 3
g µ2 b2

Le coefficient de contraction µ est influencé par l'angle d'entrée , le rapport E = b / B


et la longueur relative du rétrécissement F = L / b. Il peut être calculé par l'équation
suivante selon Sinniger et Hager (1989):
E + 2 E4
ˆ + (1 µ
µ=µ ˆ)
3

avec: µˆ =
6
1 4 1 + 2 sin 2 ( )
+F 1
3
sin 0.8 ( )
3
1
4
(
1 + F 1 + 2 sin
45 2
( ))
2 8 2 1
12

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Ouvrages de dérivation temporaires 343

La Figure 7.18 représente l'équation ci-dessus pour F = 1.

Figure 7.18: Coefficient de contraction µ en fonction de et E pour F = 1, condi-


tion d'écoulement dénoyé

Le rétrécissement provoque une surélévation du plan d'eau amont. Selon Bernoulli,


la charge amont Ho est égale à la charge critique Hc. Pour un canal rectangulaire, il
peut par conséquent être écrit:
1
Q2 3 Q2 3
Ho = h o + = = Hc
2 2
2 g B ho 2 g µ 2 b2
Ainsi, le niveau d'eau amont ho peut être calculé.
Après le passage de la section critique (contractée), l'écoulement retrouve à l'aval
ses condition initiales fluviales en passant par un ressaut.
L'influence d'un rétrécissement sur un écoulement initialement fluvial est montré sur
la Figure 7.19 à l'aide d'un diagramme de la charge spécifique d'un canal rectangu-
laire.

µb b
B
profondeur
L

1 2 2
retrécissement

1 hn 1
hN

3 h' c 3
hn
hc hNn hc
hc 5
4 h’c hc 5 4
Hc H'c
charge

Figure 7.19: Ligne d'eau dans un rétrécissement local important avec des condi-
tions fluviales à l'amont

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344 Ouvrages de dérivation temporaires

V2 Q2
H=h+ =h+
2 g 2 g b2 h2

Q q2
avec: q= H=h+
b 2 g h2
Comme qb >qB, la courbe de charge spécifique caractérisant le rétrécissement se
trouve à droite de la courbe pour la rivière.
conditions initiales: écoulement fluvial et profondeur normale
surélévation du plan d'eau par accumulation d'eau (= énergie) pour pouvoir
passer le rétrécissement avec la charge critique Hc
accélération de l'écoulement à la profondeur critique dans la section de
contrôle
transition à l'écoulement torrentiel à l'aval du rétrécissement
surélévation du niveau jusqu'à ce que la profondeur conjuguée à la hauteur
uniforme est atteinte et transition à avec un ressaut
Dans le cas d'un écoulement initialement torrentiel, le ressaut se produit à l'amont du
rétrécissement. La surélévation du plan d'eau à l'amont du rétrécissement corres-
pond comme pour les conditions fluviales à la charge critique dans la section de
contrôle.

µb b
B

hc
ho

Figure 7.20: Ligne d'eau dans un rétrécissement local important avec des condi-
tions torrentielles à l'amont

La Figure 7.20 montre schématiquement le passage de l'écoulement à travers un


rétrécissement dans le cas d'un balancement d'un torrent. Ce cas est rare en prati-
que.
Si le rétrécissement est faible (b / B 1) ou si l'écoulement est noyé (submersion de
l'aval), l'écoulement est contrôlé par les conditions avals. Le rétrécissement ne donc
provoque pas une transition de l'écoulement fluvial à l'écoulement torrentiel. Le rétré-

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Ouvrages de dérivation temporaires 345

cissement conduit à un abaissement du plan d'eau dans la section contractée dans


le cas d'un écoulement fluvial et une surélévation du plan d'eau, comparable à une
vague stationnaire, dans le cas d'un écoulement torrentiel (cf. Figure 7.20).
L'ensemble des cas possibles pour les conditions fluviales est résumé sur la Figure
7.21.

Figure 7.21: Possibilités de l'écoulement à travers un rétrécissement local dans


un canal à faible pente
transition de conditions fluviales à des conditions torrentielles avec
ressaut hydraulique à l'aval
écoulement purement fluvial
a) b / B variable à débit fixé et hu = hNu
b) b / B fixé et hu variable

7.4.2 Galeries de dérivation


Pour un débit de dérivation donné, la section de la galerie est dimensionné en géné-
ral sous l'hypothèse d'un écoulement uniforme.
La vitesse de l'écoulement uniforme peut être calculée avec la formule de Manning-
Strickler:
1 2
Vu = K J 2
R 3

La vitesse d'approche dans la rivière à l'amont de l'entrée de la galerie de dérivation


est en général plus faible que la vitesse dans la galerie. Un tronçon d'accélération est
par conséquent nécessaire. Ce dernier est souvent construit en forme d'entonnoir à
pente raide.
La longueur et la chute nécessaire de ce tronçon permettant d'accélérer l'eau à la
vitesse uniforme doivent être dimensionnés en pratique.

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346 Ouvrages de dérivation temporaires

V2
2 g
V0 , 0
Hcr
hcr
hcr

hN

(1) (2)

b0 bu

Figure 7.22: Tronçon d'accélération à l'entrée d'une galerie de dérivation

Dans l'entonnement, l'écoulement passe par la profondeur critique. Cette section cri-
tique correspond à la section avec la charge critique la plus élevée (cf. Figure 7.22).
Pour une section rectangulaire, la section critique peut être calculée par:

Q2
h cr = 3
g b o2
avec la charge
Hcr = 3 h cr
2
En admettant un tronçon d'accélération avec une pente constante , la longueur né-
cessaire du tronçon Lnéc peut être déterminée en appliquant l'équation de Bernoulli
entre la section (1) et (2) de la Figure 7.22:
(1) H1 = 3 h cr + L néc sin
2 14243
)z
Vu2
(2) H2 = h N + + )H f
2 g
En posant H1 = H2, on obtient:

3 Vu2
hN h + + )H f
2 cr 2 g
L néc =
sin

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Ouvrages de dérivation temporaires 347

La perte due au frottement )Hf peut être négligée pour des tronçons d'accélération
très court et raid. Pour les autres cas, )Hf peut être exprimé approximativement par
la formule de Manning-Strickler:
Vm2 L néc
)H f = 4
K 2 R m3
Vo + Vu
avec: Vm =
2
Ro + Ru
Rm =
2
pour un entonnement linéaire.
Ainsi, on obtient:

3 Vu2
hN h cr +
2 2 g
L néc =
Vm2
sin 4
K 2 R m3
Il est également à contrôler, si la coupure de la rivière est possible avec la forme
(Lnéc, ) de tronçon d'accélération choisi.
La section critique sur le tronçon d'accélération ne peut pas s'installer, que si le plan
d'eau à l'amont correspond à l'énergie correspondante Hcr, car la vitesse à l'amont
est négligeable.
Comme mentionné au paragraphe 7.3 ci-dessus, la rivière peut uniquement être
coupé par un seul batardeau en remblai sur arête, si la surélévation du plan d'eau ne
dépasse pas 2.0 m (cf. Figure 7.23).

B
V2
)Hmax= 2 m 2g
A
hcr
Qétiage

Figure 7.23: Modification du plan d'eau par la dérivation


A plan d'eau dans la rivière avant la dérivation (période d'étiage)
B plan d'eau surélevé après la dérivation (ou coupure de rivière)

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348 Ouvrages de dérivation temporaires

7.4.3 Brèches, orifices et ponceaux du système


La dérivation à travers le chantier se fait normalement à l'aide de brèches, ouvertures
ou orifices laissés ouverts dans l'ouvrage définitif.
Les brèches et les orifices sont souvent utilisés pour dériver les crues pendant la
construction des barrages. Dans certains cas, les brèches et les orifices servent
d'évacuateurs de crues, si la capacité de la galerie de dérivation est dépassée.
Hydrauliquement, le problème correspond au balancement d'une rivière. L'écoule-
ment doit passer à travers un rétrécissement ce qui nécessite une surélévation du
plan d'eau à l'amont de la brèche ou de l'ouverture.
Dans le cas d'une vitesse d'approche faible, cette surélévation correspond à la hau-
teur de la charge correspondant à la vitesse à travers la brèche ou l'ouverture (cf.
Figure 7.24).
Deux types d'écoulement à travers une brèche ou une ouverture sont possible:
• écoulement à surface libre
• écoulement en charge

V 0 V2
H2
2 g
H H1 V
V

écoulement à surface libre écoulement en charge


Q H3/2 1
Q H 2

Figure 7.24: Surélévation à l'amont d'une brèche

Ecoulement à surface libre


La brèche ou l'ouverture dans le barrage se comporte comme un déversoir à seuil
épais (cf. paragraphe 3.2.5). En outre, l'écoulement se contracte latéralement sous
l'effet des parois (cf. paragraphe 3.2.3). Le débit est une fonction de H3/2.

Ecoulement en charge
L'ouverture dans le barrage se comporte comme un orifice. Le débit est une fonction
1
de H 2 .
La transition entre ces deux conditions se fait avec plusieurs types d'écoulement se-
lon la géométrie de la brèche ou de l'ouverture. Ces types d'écoulement sont traités
dans le chapitre concernant les ponceaux dans Sinniger et Hager (1989) (chapitre
5.6).

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Ouvrages de dérivation temporaires 349

7.5 Choix du système


7.5.1 Crues de dérivation
La crue de dérivation d'un chantier est choisi de telle manière que le risque d'inonda-
tion du chantier pendant la période des travaux est minimisé en fonction des dégâts
possibles. La capacité de la dérivation est déterminée selon le principe suivant:
Le passage d'une crue ne doit pas être à l'origine de dégâts à l'aval du
chantier plus sévères que si le chantier n'existait pas.
La crue de dimensionnement pour la dérivation dépend de la vulnérabilité de l'ou-
vrage en construction dans le cas d'une inondation. Un déversement par dessus un
barrage en remblai pendant une crue est inévitablement la cause de son destruction
complète par l'érosion. Un barrage en béton par contre, peut supporter un déverse-
ment lors d'une crue sans dégâts critiques.
Le potentiel de dégâts influence par conséquent le choix de la crue de dimension-
nement pour un chantier. Selon le potentiel, des crues de période de retour suivantes
sont choisies:
• faible potentiel de dégâts: ouvrages en béton
HQ5 … HQ20
• grand potentiel de dégâts: ouvrages en remblai, fouilles profondes
HQ20 … HQ50

7.5.2 Risque d'inondation du chantier


Pour une crue de période de retour déterminée, le risque d'inondation du chantier
peut être calculée en fonction de la durée des travaux à l'aide de la formule suivante:
m
1
r =1 1
n
avec: r: risque d'inondation
n: période de retour de la crue de dimensionnement
m: durée du chantier
Exemple: n = 10, m = 5 r = 40 %
n = 50, m = 5 r = 10 %
Le risque qu'un chantier avec un dérivation dimensionnée pour une crue
décennale est inondé pendant la durée de construction de 5 ans est de
40% environ.

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350 Ouvrages de dérivation temporaires

7.5.3 Capacité économique de la dérivation


Par définition, il n'y a pas de dégâts pour les crues ne dépassant pas la crue de di-
mensionnement de la dérivation. Si les conséquences financières des dégâts en
fonction du débit sont connues, la valeur du dégât probable dépend du risque d'inon-
dation:
VD = r CD
avec: VD: valeur de dégât probable
r: risque d'inondation
CD: conséquences financières en cas d'inondation
La valeur du dégât probable diminue avec l'augmentation de la période de retour de
la crue de dimensionnement. L'investissement pour la construction des ouvrages de
dérivation augmentent par contre. Il existe donc une crue de dimensionnement opti-
male, c'est-à-dire une capacité économique, pour une méthode de dérivation choisi
(cf. Figure 7.25).

A Cc + Vd
Cc

Q opt
Coûts

Vd

Crue de dimensionnement de la dérivation

Figure 7.25: Optimisation de la capacité d'une dérivation

Souvent la capacité de la dérivation est choisie selon les phases de construction et la


saison. Les travaux critique sont en générale exécutes pendant les périodes d'étia-
ges où les débits à maîtriser sont plus petits.

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Ouvrages de vidanges 351

8 OUVRAGES DE VIDANGE

8.1 Philosophie des vidanges


Les barrages de retenue construits aujourd'hui font souvent partie d'aménagements
à buts multiples. Ces aménagements servent à:
• l'approvisionnement en eau potable et industrielle
• la protection contre les crues
• la production d'énergie hydroélectrique
Les ouvrages de vidange constituent des éléments très importants et indispensables
à un barrage de retenue. La vidange de fond doit assurer:
• la vidange complète du bassin pour effectuer des purges ou des révisons
• la montée contrôlée du plan d'eau pendant le premier remplissage du ré-
servoir, pour vérifier le comportement du barrage et des rives inondées
• le contrôle du plan d'eau en cas d'événements particuliers tels que les ins-
tabilités des rives
• un abaissement du plan d'eau en périodes de dangers (naturels ou conflits
armés)
• l'évacuation de dépôts de sédiments
• l'alimentation du cours d'eau dans des cas exceptionnels (révision de la
centrale hydroélectrique)
Selon la profondeur de la retenue, les vitesse d'écoulement peuvent atteindre des
valeurs très importantes à la sortie de la vidange de fond. Elles dépassent souvent
quelques dizaines de m/s avec des valeurs maximales de 40 à 50 /s.
De telles vitesses conduisent à des sous-pressions dynamiques importantes. Par
conséquent, les phénomènes de cavitation et de vibration sont à prendre en compte
lors de la conception de l'ouvrage.

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352 Ouvrages de vidange

8.2 Eléments de vidange de fond


8.2.1 Introduction

1
2 3 4 5 6 7

Figure 8.1: Exemple d'une vidange de fond (aménagements Alicura en Argen-


tine)
1 ouvrage d'entrée 5 aération du fond
(avec grille grossière) (rainure d'aération)
2 galerie de vidange 6 galerie de vidange
amont (Ø 9.0 m) aval bétonnée
3 chambre des vannes 7 ouvrage de restitution
(saut de ski)
4 galerie de vidange 8 axe de la digue
aval blindée (75 m)

La vidange de fond de l'aménagement hydroélectrique Alicura en Argentine est un


exemple typique d'un tel organe (cf. Figure 8.1).
La galerie prévue pour la dérivation du cours d'eau pendant la construction de la di-
gue a été transformée en vidange de fond. Cet ouvrage se compose des éléments
suivants:
l'ouvrage d'entrée (ici une prise verticale équipée d'une grille grossière en
béton)
la galerie ou conduite de vidange amont en charge
la chambre de vannes
le rétrécissement de la section à l'aval des vannes
les vannes de fond, en général au nombre de deux pour des raisons de
sécurité (une vanne de service et une vanne de garde)
le système d'aération à l'aval des vannes
la galerie ou conduite de vidange aval avec écoulement à surface libre
l'ouvrage de sortie (bassin amortisseur)
Les éléments principaux sont analysés ci-dessous.

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Ouvrages de vidanges 353

8.2.2 Ouvrage d'entrée


Les exigences concernant la forme de l'entrée ne sont pas aussi nombreuses que
pour une prise d'eau qui sert à alimenter une centrale hydroélectrique. Les vitesses à
l'entrée de ces ouvrages sont limitées de 0.5 à 1.0 m/s dans l'objectif de limiter les
pertes de charge. Dans le cas d'une entrée d'une vidange de fond, des vitesses plus
élevées peuvent être acceptées. La forme de l'entrée doit, par contre, être choisie de
telle manière qu'il n'y ait pas de sous-pressions le long des parois.
Selon l'expérience acquise lors d'essais sur modèles réduits, des pressions négati-
ves peuvent être évitées en choisissant la forme elliptique suivante pour les parois
(cf. Figure 8.2):
x2 y2
entrée rectangulaire: + =1
D2 0.25 D2
x2 y2
entrée circulaire: + =1
0.5 D2 0.15 D2

x
y

Figure 8.2: Forme d'entrée d'une vidange de fond

En général, les entrées sont équipées d'une grille grossière pour protéger les vannes
contre l'endommagement et l'obstruction par les corps flottants (troncs d'arbres).
Les barreaux sont construit de manière massive, c'est-à-dire en béton (poutres verti-
cales ou horizontales).
Selon les conditions, l'écartement des barreaux est situé entre 0.5 et 2.0 m. L'écar-
tement doit être inférieur à 2 3 de la dimension minimale de la vanne.

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354 Ouvrages de vidange

8.2.3 Galerie de vidange amont (en charge)


Si la galerie de vidange est située au-dessous des appuis du barrage, c'est-à-dire
dans le rocher, sa section est en général circulaire, dans certains cas voûtée ou en
fer à cheval.
Les galeries courtes traversant directement le barrage en béton sont souvent rectan-
gulaires.
Dans le cas de grandes vitesses, supérieures à 10 ÷ 20 m/s, les parois des galeries
doivent être munies d'un blindage en acier. Les rétrécissements et les tronçons de
transition à l'amont des vannes ainsi que les galeries traversant le barrage sont tou-
jours blindés. Le blindage doit être soigneusement fixé dans le béton à l'aide de rai-
disseurs pour assurer la résistance aux vibrations dues à l'écoulement à haute vi-
tesse.

8.2.4 Vannes de fond


Les types de vannes suivants sont utilisés dans les vidanges de fond:
• vanne à glissières (vanne plane)
• vanne wagon (vanne plane)
• vanne segment
• vanne à jet creux divergent

Figure 8.3: Type de vanne en fonction de la charge due à la retenue Hr [m] et de


la section de la vanne Av [m2], (Sinniger, Hager, 1989)
vanne à glissière vanne wagon
vanne segment

Les vannes à glissières s'imposent surtout pour des charges importantes. Par
conséquent, la section de cette vanne reste assez petite. Elle repose sur des glissiè-
res verticales, implantées à l'aval, qui servent également de dispositif d'étanchéité.
Comme le montre la Figure 8.4, l'épaisseur de la vanne diminue vers les niches de
vannes. La force principale nécessaire pour la commande des vannes est indispen-
sable pour vaincre la résistance au glissement. Elle est introduite par un servomo-
teur.

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Ouvrages de vidanges 355

Figure 8.4: Vannes de fond schématisées, vue en coupe (en haut) et en plan (en
bas), (Sinniger, Hager, 1989)
a) vanne à glissières avec r = 0.4 · d
b) vanne wagon

La vanne wagon convient comme vanne de fond pour les charges moyennes
(< 100 m). Elle s'appuie sur des roues posées sur des rail verticaux dans les niches.
Par conséquent, la force de frottement est réduite, mais le danger de vibrations
augmente. Dans ce cas les niches sont beaucoup plus longues que pour les vannes
glissières et le risque de cavitation augmente. La crête inférieure d'une telle vanne
est souvent en mince paroi pour éviter des vibrations.
Le domaine d'application de la vanne segment est proche de celui de la vanne wa-
gon. Cette vanne est en général très sensible aux vibrations et ne doit donc pas être
submergée par l'aval. Un des avantages de ce type de vanne est l'absence de niches
et la précision de sa commande. Si la vidange de fond est utilisée pour effectuer des
purges régulières, les niches sont exposées à l'abrasion. La vanne segment s'impose
dans ces cas.
Les vannes à jet creux divergent sont utilisées pour des charges dues à une retenue
très importante. La sortie du jet à l'air libre doit être garantie.
Pour des raisons de sécurité, il y a toujours deux vannes, une vanne de service et
une vanne de garde.

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356 Ouvrages de vidange

8.2.5 Galerie de vidange aval (écoulement en nappe libre) et aéra-


tion

Figure 8.5: Vidange de fond schématisée, (Sinniger, Hager, 1989)


transition du profil circulaire au profil rectangulaire
chambre de vannes canal d'aération
galerie de vidange sortie de la galerie

Une vanne de fond crée en général une transition entre un écoulement en charge et
un écoulement à surface libre. Cette transition est garantie d'une part par une section
suffisante de la galerie à l'aval de la vanne, d'autre part par un apport d'air suffisam-
ment important. Dans le cas d'une galerie de vidange aval relativement courte et d'un
écoulement occupant qu'une partie de la section, l'apport d'air peut provenir de la
sortie de la galerie.
Dans la plupart des cas, des canaux d'aération séparés qui débouchent immédiate-
ment à l'aval de la vanne sont nécessaires.

Figure 8.6: Schéma des écoulements d'air Qa et d'eau Qe dans une vidange de
fond, (Sinniger, Hager, 1989)
aération de la nappe supérieure
aération de la nappe inférieure
entraînement d'air dans le ressaut hydraulique éventuel

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Ouvrages de vidanges 357

Concernant l'érosion par cavitation, il faut surtout veiller à ce que l'air puisse pénétrer
dans les zones de sous-pression notamment près du fond.

Figure 8.7: Chambres des vannes de la vidange de fond : Exemple Alicura en


Argentine

Le fond de la galerie de vidange aval est en général plan et les parois verticales sur
la hauteur de l'écoulement. Cette section rectangulaire (partie mouillée), de la même
largeur que les vannes, évite la présence d'un élargissement brusque de la section et
ainsi la formation d'ondes de choc. Les vitesses d'écoulement étant importantes, des
courbes provoqueraient des surélévations importantes du plan d'eau et une mise en
charge de la section.
L'écoulement dans la galerie de vidange en aval des vannes est en générale torren-
tiel.

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358 Ouvrages de vidange

8.2.6 Sortie (ouvrage de restitution)


L'ouvrage de restitution consiste selon les conditions soit à un bassin amortisseur
soit à un saut de ski.

j et

e
ydrauliqu
re ss aut h

Figure 8.8: Sortie avec saut de ski (en haut) ou bassin amortisseur (en bas)

Si les vitesses sont très élevées et le lit du cours d'eau constitué de rocher, le saut
de ski est la solution la plus économique. Si le fond du cours d'eau est érodible, un
bassin amortisseur peut s'avérer nécessaire. Les vitesse d'écoulement à la sortie de
la vidange de fond sont en général assez élevées. Un bassin à marche positive ou
non-prismatique est par conséquent nécessaire pour fixer la position du ressaut dans
le bassin.

8.3 Conceptions des vidanges de fond


8.3.1 Vidange de fond combinée avec le barrage
Dans le cas d'un barrage en béton, la vidange de fond peut être intégrée dans le bar-
rage.
Pour pouvoir également placer la chambre de vannes dans le barrage, l'épaisseur au
pied du parement doit être au minimum de 18 à 25 m (Qmax 7 200 m3/s). La conduite
à l'amont des vannes est entièrement blindée en acier. La chambre est fortement
armée.
Si le barrage est trop mince à la base, comme c'est souvent le cas pour les barrages-
voûtes, la chambre de vannes est placée à l'extérieur.
Les vidanges de fond sont souvent noyées dans les orifices provisoires, qui servent
à dévier les crues pendant la construction.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Ouvrages de vidanges 359

8.3.2 Vidange de fond combinée avec la fondation du barrage


Dans le cas des digues en terre, la vidange de fond ne doit jamais traverser le rem-
blai et surtout le noyau d'étanchéité pour les raisons suivantes:
• tassements différentiels (galerie en béton beaucoup plus rigide que le rem-
blai)
• chemin de percolation préférentiel le long de la galerie en béton (risque
d'érosion interne)
• compactage délicat proche de la galerie en béton
Une possibilité est la combinaison de la vidange de fond avec la fondation de la di-
gue. La galerie est construite dans une tranchée dans le rocher au-dessous de la
digue. La chambre de vannes doit être située le plus près possible du parement
amont pour éviter que la conduite sous la digue soit en charge.

8.3.3 Vidange de fond combinée avec la galerie de déviation


Une solution souvent adoptée est la combinaison de la vidange de fond avec la gale-
rie de dérivation. A la fin de la construction, la galerie de dérivation est transformée
en vidange de fond. Cette transformation nécessite la modification de l'entrée, la
construction de la chambre de vannes, la modification de la galerie à l'aval des van-
nes et l'implantation d'un ouvrage de restitution.
L'emplacement de la chambre de vannes doit être à l’aval de l'écran d'étanchéité
pour ne pas être soumise à la pression d’eau de la retenue.

digue

noyau

chambre des vannes

écran d’étanchéité

Figure 8.9: Schéma d'une galerie de dérivation transformée en vidange de fond

8.4 Dimensionnement hydraulique


8.4.1 Débit de dimensionnement
Le débit de vidange dépend des paramètres suivants:
• des besoins d'irrigation et/ou de nettoyage de la retenue
• risques particuliers du bassin

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


360 Ouvrages de vidange

• volume du bassin
• apports dans le bassin
• capacité du lit aval
Les critères pour déterminer le débit de dimensionnement concernent par exemple
les exigences suivantes:
• le niveau du plan d'eau dans la retenue doit être maintenu constant pen-
dant une certaine période
• le niveau du plan d'eau dans la retenue doit être abaissé avec une vitesse
déterminée
Une règle approximative exige que la capacité de la vidange de fond doit être deux
fois plus grande que le module des apports dans le bassin.

8.5 Calcul de débit


8.5.1.1 Détermination de la section nécessaire de la vanne
Pour un débit de dimensionnement donné, la section nécessaire de la vanne doit
être déterminée.

ligne de charge

)HV
H
VV2
2 g

Figure 8.10: Schéma d'un réservoir avec vidange de fond

Pour un écoulement libre, à l'aval de la vanne, à pression atmosphérique, l'équation


de Bernoulli s'écrit:
Vv2
H= + )H V
2 g
avec: Vv: vitesse dans la section de la vanne
Vv2
)H v = )H v i = % *
i
2 g
2
Av
% = %i
*
i
Ai

avec: )Hvi: pertes de charge locales et réparties

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Ouvrages de vidanges 361

2 g H
Vv =
1 + % *i
Q = Vv a b = Vv A v
avec: a: hauteur de la vanne
b: largeur de la vanne
Q
Av =
2 g H
1 + % *i

Le calcul de la section nécessaire est itératif, car les coefficients de pertes de charge
dépendent de la section des vannes.
Les pertes de charge réparties correspondent aux pertes de charge dues au frotte-
ment. Les pertes de charge locales sont dues à l'entrée, aux coudes, au rétrécisse-
ment, etc..

8.5.1.2 Caractéristiques du débit par-dessous la vanne partiellement fermée


L'écoulement par-dessous des vanne peut être soit libre, soit submergé (cf. Figure
8.11). L'écoulement libre est caractérisé par la pression constante à la surface du jet.
Cette condition implique que le coefficient de contraction Cc du jet ne dépend pas
seulement de l'ouverture relative de la vanne, mais également du nombre de Froude
dans la section contractée.

Figure 8.11: Ecoulement par-dessous une vanne de fond


a) écoulement libre à pression p0 de surface constante
b) écoulement submergé à vitesse V0 constante le long de la (---)
surface de séparation

La Figure 8.12 montre le coefficient de contraction en fonction de l'ouverture relative


et le nombre de Froude.
Pour F > 10, l'effet du nombre de Froude, c'est-à-dire de la gravité, disparaît et la
vitesse le long de la ligne de séparation reste constante comme dans le cas de la
vanne submergée.

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362 Ouvrages de vidange

Figure 8.12: Effet du nombre de Froude Fc sur le coefficient de contraction Cc


pour diverses ouvertures relatives a / to d'une vanne de fond selon
Naudascher (1987).
(· · · · ·) nombre de Froude d'approche F1 ;

Selon l'équation de Bernoulli, le débit se calcule par les formules suivantes:


• écoulement libre

)p
Q = Cc a b 2 g H )H v Cc a
g

)p
avec : dépression éventuelle à l'aval de la vanne
g
• écoulement noyé
Q = Cc a b 2 g (H )Hv hv )
avec: hv: hauteur de pression dans la section contractée du jet

8.5.2 Ecoulement aval


En général, l'écoulement à l'aval des vannes de la vidange de fond est torrentiel.
air

courbe de remous

hN , F 1

Figure 8.13: Courbe de remous à l'aval des vannes de la vidange de fond avec
écoulement normal en régime torrentiel

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Ouvrages de vidanges 363

Une courbe de remous relie la hauteur d'eau dans la section contractée à l'écoule-
ment uniforme torrentiel dans la galerie.
Un ressaut hydraulique se forme dans la galerie dans le cas d'une submersion par
l'aval ou dans le cas d'une pente trop faible par rapport aux pertes de charge. En gé-
néral, on essaie d'éviter cette situation.
L'aération de l'écoulement peut considérablement influencer ses mêmes caractéristi-
ques.
La Figure 8.14 présente une classification des types d'écoulement dans une galerie à
aération forcée. Le débit augmente progressivement en ouvrant la vanne.
a) L'ouverture relative de la vanne est inférieure à 10%: l'écoulement
s'échappe comme un spray, c'est-à-dire le jet se vaporise.
b) L'écoulement libre peut apparaître sous la forme de pulsations, d'ondes ou
d'écoulement stratifié.
c) La galerie est presque remplie d'un mélange eau-air. On parle d'un écou-
lement écumeux.
d) Un ressaut hydraulique s'établit, suivi d'un écoulement libre.
e) Un ressaut hydraulique s'établit, suivi d'un écoulement en charge.
f) Un ressaut hydraulique immergé s'établit, suivi d'un écoulement en charge.

Figure 8.14: Classification de types d'écoulement dans une galerie à aération for-
cée superficielle (Sinniger, Hager, 1989)

Comme déjà mentionné, un ressaut hydraulique suivi d'un écoulement en charge doit
être évité par une pente assez raide de la galerie et une section assez grande.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


364 Ouvrages de vidange

8.6 Aération
8.6.1 Objectifs
Comme mentionné ci-dessus, la vitesse à l'aval des vannes de fond peut atteindre
40 à 60 m/s. Sans aération, la pression à l'aval de la vanne peut tomber près de la
pression de vapeur. Ce phénomène se produit par pulsation. Par conséquent, il y a
un risque de dégâts des vannes et des parois de la galerie dû aux vibrations. De
plus, les pressions négatives peuvent entraîner une érosion par cavitation.

Figure 8.15: Aération superficielle de l'écoulement à l'aval d'une vanne de fond


(Sinniger, Hager, 1989)
a) provenant de la sortie pour une galerie partiellement remplie
b) avec une conduite d'aération en complément.
Répartition type de
la vitesse d'air la concentration d'air
de la sous-pression d'air par rapport à l'atmosphère
du débit d'air Qa dans le mélange

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Ouvrages de vidanges 365

Les effets destructifs ne peuvent être évité qu'avec une aération appropriée de
l'écoulement.
Si l'écoulement n'occupe qu'une partie de la section de la galerie aval, un débit d'air
peut provenir de la sortie de la galerie et aérer la zone proche de la vanne. Ce type
d'aération est uniquement satisfaisant, si la section de la galerie est suffisamment
grande et si la distance entre la vanne et la sortie ne dépasse pas 50 m.
L'apport d'air auprès de la vanne de fond peut être augmenté ou assuré à l'aide
d'une conduite d'aération.

8.6.2 Mécanismes d'aération


Pour éviter la mise en charge de la galerie et la pulsation de l'écoulement et par
conséquent la vibration de la vanne, l'aération de l'écoulement libre dans la galerie
doit être assurée.
Pour éviter en même temps la cavitation, une aération près du fond est indispensa-
ble.
Quant au débit d'air, on peut distinguer:
• Qae: débit d'air entraîné par l'écoulement bi-phasique
• Qau: débit d'air mis en mouvement au-dessus de l'écoulement
• Qe: débit de l'écoulement
• Qao: débit d'air aspiré depuis la sortie aval
• Qav: débit d'air provenant des conduites d'aération ("vent")
• Qaf: débit d'air provenant des conduites de fond
Les deux derniers débits sont évidemment des quantités définies de manière univo-
que.
Si un ressaut hydraulique s'installe dans la galerie de vidange, la quantité d'air aspi-
rée depuis la sortie aval devient nulle.

Figure 8.16: Aération de l'écoulement par un aérateur (Sinniger, Hager, 1989)

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366 Ouvrages de vidange

8.6.3 Calcul du débit d'air nécessaire


Plusieurs chercheurs ont proposé des formules empiriques avec lesquelles le débit
d'air peut être estimé. Ces formules concernent le débit d'air provenant des conduites
d'aération et des aérateurs de fond.

8.6.3.1 Ecoulement libre


Rabben a établi l'équation de corrélation suivante à l'aide d'essais en laboratoire:
0.90
Q A *a 0.62 a
= a = 0.94 Fc , pour 0.12 7 7 1 et Fc 7 40
Qe Au t0
avec: Aa*: section réduite du canal d'aération pour tenir compte des
pertes de charge
A *a = A a 1 + ( % *i ) 1
2

Au: section aval de la galerie


Fc: nombre de Froude dans la section contractée
q
Fc =
g (Cc a )
3

Sharma propose une approximation pour ß=0.09·Fc


Si l'ouverture relative de la vanne est très petite (a / to 7 0.06) et si le nombre de
Froude est simultanément grand (Fc >20), le jet sortant de la vanne est vaporisé:
A *a
= Fc (Rabben)
Au
Sharma donne la formule suivante:
, 0.2 Fc

8.6.3.2 Ecoulement à ressaut

section contractée

h1 h2 hN

courbe
de remous

Figure 8.17: Ecoulement à ressaut

Dans le cas d'un écoulement à ressaut, il faut connaître soit la hauteur d'eau h2 soit
la hauteur de pression hp à l'aval du ressaut hydraulique. La détermination de la posi-

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Ouvrages de vidanges 367

tion du ressaut résulte d'un calcul de la courbe de remous en partant de la section


contractée pour le tronçon amont et d'une section de contrôle aval.
Selon Rabben le débit d'air relatif devient:
0.099
Q A *a 0.969 Cc a
= a = 0.019 Fc , pour > 0.04
Qe Au hP

8.6.3.3 Aérateur de fond


Par expérience, le risque d'abrasion dû à la cavitation peut être fortement diminué si
le jet sortant de la vanne est aéré depuis le fond (cf. Figure 8.18).
La solution la plus courante consiste en un gradin incliné.
Le débit d'air relatif entraîné par la nappe inférieure du jet, introduit par l'aérateur de
fond, dépend de la distance de l'impact du jet:
C1 C2
A af L
f = C0
A max Cc a
avec: Aaf: section de la conduite d'aération
Amax: section maximale au-dessous de la nappe inférieure
b · smax
L: distance effective de l'impact du jet (60% de la valeur
théorique)

Figure 8.18: Géométrie du jet d'eau provenant d'une vanne de fond avec aérateur
de fond, (Sinniger, Hager, 1989)

Les coefficients C0, C1 et C2 sont fonction de l'angle du déflecteur:

C0 C1 C2
0° 0.046 0.43 1.25
4.5 ° 0.042 0.38 1.13
9.0 ° 0.041 0.47 1.20

Tableau 8.1: Coefficients C0, C1 et C2 en fonction de l'angle du déflecteur

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368 Ouvrages de vidange

Le calcul de f est évidemment implicite. En admettant une valeur Qaf du même ordre
de grandeur que le débit d'eau Qe, on déduit )p du calcul des conduites d'aération.
Par la suite, max et L peuvent être calculés. Puis on vérifie, si la valeur f calculée
correspond à la valeur admise.
Pour le jet non-compact, où il y a un échange d'air entre les deux nappes, l'équation
suivante a été trouvée expérimentalement:
1.02
A *a 0.26
f = 13.44 Fc
Au
Si un jet est aéré simultanément par des conduites d'aération situées au-dessus et
au-dessous de l'écoulement, l'apport d'air total se calcul par la somme des deux ap-
ports séparés.

8.7 Dispositif d'évacuation de sédiments


Si les sédiments doivent être évacués par la vidange de fond, des dispositifs particu-
liers sont en général nécessaires.

Figure 8.19: Processus d'évacuation des sédiments par la vidange, à lac abaissé
(Santo Domingo, Venezuela)
prise d'eau déviation du jet vers l'amont

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Ouvrages de vidanges 369

D'une part, la vidange de fond est équipée d'une vanne segment qui facilite la purge.
D'autre part, l'entrée est munie d'un puits d'injection pour démarrer l'érosion des sé-
diments à l'amont de la vanne.
L'effet de la purge est limitée pour des niveaux d'eaux élevés dans le réservoir. Seu-
lement un cône autour de l'entrée est érodé. La pente du cône dépend de l'angle de
frottement des matériaux.

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Evacuateurs de crues 371

9 EVACUATEURS DE CRUES

9.1 But et objectifs


Un évacuateur de crue est un organe de sécurité qui évite le débordement non-
contrôlé d'une retenue. Il protège donc le barrage, les ouvrages annexes et la popu-
lation à l'aval du barrage contre un déversement qui provoquerait des dégâts dus à
l'érosion, à l'instabilité et aux inondations.
En règle général, chaque barrage alimenté par des apports d'eau naturels doit être
protégé par un évacuateur de crue.

9.2 Critères de sécurité - débit de dimensionnement


En Suisse, la sécurité des barrages en cas de crues se base sur deux critères.
Le premier critère définit les exigences pour l'évacuation de la crue millénale. Le di-
mensionnement se fait en admettant une retenue pleine et dans le cas d'un évacua-
teur équipé de vanne, il prévoit que l'organe avec la capacité la plus élevée puisse
être hors service et fermé. Cette règle est appelée n – 1. Le plan d'eau doit toujours
rester au-dessous du niveau du couronnement. La revanche entre le niveau maximal
(niveau surélevé par rapport au niveau normal) pour la crue millénale et le couron-
nement doit être choisi en tenant compte des vagues. Selon les conditions, les re-
vanches suivantes sont exigées:
• barrages en béton: min. 1.5 m
• digues en terre: min. 2.0 m
Le deuxième critère concerne la crue maximale probable, c'est-à-dire le déluge. Le
plan d'eau ne doit pas dépasser le niveau dit de risque. Pour les niveaux d'eau au-
dessous de cette cote, il n'y a pas de dégâts critiques.
Dans le cas des barrages en béton, cette cote de risque se situe au-dessus du cou-
ronnement, car le déversement ne provoque en général pas de dégâts critiques.
Lorsque la hauteur de déversement ne dépasse pas 0.5 à 1.0 m, des affouillements
importants au pied du barrage ne sont pas à craindre.
Dans le cas des barrages en remblai, un déversement est toujours inacceptable, car
le parement aval de la digue peut être rapidement érodé. Le cote de risque se situe
par conséquent au-dessous du niveau du couronnement.
La règle n – 1 doit être respectée même dans le cas d'une crue extrême pour les bar-
rages en remblai, mais pas pour les barrages en béton.

9.3 Types d'évacuateurs


Les évacuateurs peuvent être classés selon différents critères. La classification se
fait souvent en distinguant les trois éléments suivants (ouvrages partiels):
• ouvrage d'entrée
• ouvrage de transport
• ouvrage de sortie

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


496 Evacuateurs de crues

En outre, les évacuateurs équipés de vanne ou d'éléments fusibles (digue ou vanne


fusibles) sont distingués des évacuateurs sans organe mobile.
Le Tableau 9.1 donne une vue d'ensemble des différents types d'évacuateurs.

Elément Possibilité de conception

Evacuation
sans vanne avec vanne vanne fusible digue fusible

Ouvrage
déversoir déversoir déversoir à siphon orifice
d'entrée
frontal latéral crête circulaire

Ouvrage de nappe galerie à galerie ou


transport déversante en cascade coursier écoulement puits en
chute libre libre charge

Ouvrage de
bassin
sortie manque saut de ski
amortisseur

Tableau 9.1: Matrice morphologique des types d'évacuateurs de crues

Théoriquement, il existe 300 (4 · 5 · 5 · 3) possibilités de combinaison. Mais seule-


ment un tiers est réalisables et seulement un quart représente des solutions raison-
nables.

Exemples: Type 1111: déversoir sans vanne avec nappe déversante en chute
libre
barrage Maè en Italie

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Evacuateurs de crues 373

Type 2133: déversoir avec vannes et coursier, saut de ski


barrage Jaguara au Brésil

Type 1342: déversoir à crête circulaire avec galerie à écoulement li-


bre et bassin amortisseur (évacuateur en tulipe)
barrage Heart-Butte aux Etats Unis

Type 2513: orifice avec vannes et saut de ski à jet (évacuateur en


charge de fond)
barrage Cabora Bassa en Mozambique

La conception hydraulique d'un évacuateur de crue doit tenir compte des problèmes
suivants:
• passage de corps flottants
• sécurité au gel

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496 Evacuateurs de crues

• dégâts d'abrasion dus aux matériaux en suspension


• dégâts dus à la cavitation
• aération sur les coursiers
• vibrations
• dissipation d'énergie
• ondes de choc
En général, le bon fonctionnement des évacuateurs de crues importants est vérifié
sur modèle physique.

9.4 Eléments particuliers


9.4.1 Coursiers

9.4.1.1 Ondes de choc


Les déversoirs frontaux sont souvent suivis d'un coursier. La largeur du déversoir est
donnée par l'écoulement critique par dessus le seuil. Sur le coursier, la vitesse est
plus élevée, la largeur peut par conséquent être diminuée. Ce rétrécissement s'im-
pose en général pour des raisons topographiques et économiques. Les rétrécisse-
ments perturbent l'écoulement torrentiel et provoquent des ondes stationnaires sur le
coursier.
Le développement d'ondes stationnaires dans un écoulement torrentiel est expliqué
dans les paragraphes qui suivent.
Dans le cas d'un écoulement torrentiel, la vitesse v est plus grande que la célérité
d'onde de surface w. Les intumescences ne se propagent que dans la direction de
l'écoulement.

ligne enveloppe, onde stationnaire


(Analogie avec la ligne de Mach
pour une onde de pression en gaz)

Figure 9.1: Développement d'ondes stationnaires dans un écoulement torrentiel

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Evacuateurs de crues 375

Au point fixe S, l'écoulement torrentiel est perturbé. Cette perturbation se propage


sous forme de petites ondes circulaires. La ligne enveloppe est visible comme onde
stationnaire (cf. Figure 9.1). Elle est analogue à une ligne de Mach.
L'angle de cette ligne enveloppe avec l'horizontale correspond à:

w g h 1
sin = = =
v v Fr
pour un écoulement de gaz, on obtient par analogie
1
sin =
Ma
avec: Ma: nombre de Mach

a) Ondes de choc dues au changement de la direction de l'écoulement


Un changement de direction des parois latérales (rétrécissement ou élargissement)
perturbe l'écoulement torrentiel. Cette perturbation se manifeste par des ondes sta-
tionnaires qui sont également appelées ondes de choc.

v1
A
v2

ondes stationnaires ligne intermédiaire

section A-A:

v2 · sin( ) h2
h1 v1 · sin

Figure 9.2: Ondes de choc dues à un changement de direction

Si l'angle du changement de direction est petit, les deux ondes stationnaires sont
très peu écartées et peuvent être remplacées par une seule.
L'angle , c'est-à-dire la direction de l'onde de choc, peut être déterminé en établis-
sant l'équation de la quantité de mouvement et de continuité pour la section A-A:

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496 Evacuateurs de crues

h12 h 22
v 1 sin q+ g = v 2 sin ( ) q+ g
2 2
avec: q: débit spécifique
q = h1 v1 sin = h2 v 2 sin( )
On obtient l'équation suivante:
g h1 1 h2 h2
sin = 1+
v1 2 h1 h1

Pour des petites perturbations h1 h2 et l'équation se simplifie comme suit:


g h1 1
sin = =
v1 Fr1

Les ondes de choc sur les coursiers sont provoquées par:


• un élargissement
• un rétrécissement
• une courbe/un changement de direction
Elles s'établissent également à l'aval de piliers.

sin =
g h min
v max
max u creux
max min crête
min v
min
max

Figure 9.3: Ondes de choc sur un coursier dans une courbe et à l'aval de piliers.

Les ondes de choc heurtent les parois du coursier et sont réfléchies. Ceci conduit à
des effets d'interférence.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Evacuateurs de crues 377

b) Inconvénients des ondes de choc


a) la section du coursier est mal utilisée, puisque la profondeur de l'eau varie à
cause des ondes de choc. La hauteur des parois doit être plus grande

revanche
revanche

écoulement sans écoulement avec


ondes de choc ondes de choc
b) les ouvrages de sortie tels que les bassins amortisseurs ou les sauts de ski
sont soumis à un débit très variable au travers de la section ce qui perturbe
leur fonctionnement.

c) Mesures préventives dans des rétrécissements


a) Si une transition du déversoir au coursier correspondant à un rétrécisse-
ment est nécessaire, sa forme est définie de telle manière que les ondes de
choc soient fortement réduites ou même amorties par des effet d'interfé-
rence. (cf. Figure 9.4)
En pratique, les formes suivantes sont utilisées:
entrée en buse
entrée en éventail
entrée en entonnoir
Pour ces trois types d'entrée, il existe dans la littérature des recommanda-
tions de conception par différents auteurs.
b) Les ondes de choc provoquées par un rétrécissement du coursier peuvent
être supprimées par une forme particulière du radier. A l'aide de déflec-
teurs, également appelés compensateurs, ou un radier bombé, l'écoule-
ment est soumis à une accélération latérale qui compense les ondes de
choc.
c) Un ressaut est provoqué sur le coursier en établissant une section de
contrôle à l'aval. Cette mesure n'est en général pas économique.

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496 Evacuateurs de crues

entrée en buse

r’ r’
r r
coursier

déversoir

entrée en éventail

r
r

coursier

déversoir

entrée en entonnoir

coursier

déversoir

Figure 9.4: Formes possibles pour un rétrécissement liant le déversoir au cour-


sier

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Evacuateurs de crues 379

d) Mesures préventives dans des courbes


Les ondes de choc sur les coursiers courbes peuvent être supprimés par un fond
d'inclinaison transversale. L'angle nécessaire peut être déterminé par:
V2
tan =
R g

V2
R

Figure 9.5: Fond incliné pour éviter les ondes de choc sur un coursier courbe

e) Entrée en entonnoir (rétrécissement linéaire)

Figure 9.6: Rétrécissement linéaire à écoulement torrentiel pour Q = QD. Elimi-


nation des ondes de choc au point C
a) plan b) coupe longitudinale
____
( ) profil de surface le long des parois
(-----) profil de surface le long de l'axe du canal

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496 Evacuateurs de crues

Les deux ondes de choc qui partent des points A sous un angle 1 se rencontrent au
point B situé sur l'axe du canal. Pour un certain choix de , les ondes de choc à l'aval
de B touchent exactement les points C sous l'angle 2 à l'entrée du canal prismati-
que. Au point C, une interférence avec l'onde engendrée en ce point se produit. Par
conséquent, à l'aval d'un tel rétrécissement, il n'y a pas d'ondes de choc et la surface
d'eau est plane.
Le choix de pour éviter les ondes de choc sur le coursier dépend du nombre de
Froude amont et du rapport des largeurs b / B.
L'application du théorème de la quantité de mouvement longitudinalement et perpen-
diculairement au front d'onde A – B et l'équation de continuité fournissent une rela-
tion entre b / B, F1 et .

Figure 9.7: Relation entre


a) E = b / B et b) h3 / h1 et en fonction de F1
(---) F3 = 1
(···) ressaut hydraulique à l'amont du rétrécissement
Dans la zone tramée, des effets d'hystérèse peuvent apparaître.

La Figure 9.7 représente la condition pour que les ondes de choc touchent la paroi
au point C.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Evacuateurs de crues 381

9.4.1.2 Aération superficielle

Figure 9.8: Mécanisme de l'entraînement de l'air dans un écoulement à grande


vitesse
a) la haute turbulence crée des composantes latérales importantes
b) et éjecte des gouttes d'eau dans l'air en retombant,
c) elles ouvrent la surface qui,
d) en se refermant, emprisonne de l'air avec la goutte

Si la vitesse de surface de l'eau est grande par rapport à la vitesse moyenne de l'air,
une surface rugueuse de l'eau peut être observée. Des gouttes d'eau sont prises
dans l'air et des bulles d'air peuvent être emprisonnées par l'eau. Par conséquent un
mélange d'eau et d'air se forme (cf. Figure 9.8). Ce phénomène est appelé aération
superficielle de l'eau.

Figure 9.9: Développement d'un écoulement bi-phasique dans un long canal à


forte pente constante.

L'écoulement dans un long canal à forte pente constante peut être réparti dans les
trois zones suivantes (cf. Figure 9.9):
• zone d'écoulement non aéré
• zone d'écoulement non uniforme aéré
• zone d'écoulement uniformément aéré

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496 Evacuateurs de crues

Le débit de l'aération superficielle coïncide avec le point où la couche limite turbu-


lente atteint la surface libre de l'eau. La couche limite turbulente croît approximative-
ment de 1% avec la distance.

Figure 9.10: Mécanisme conduisant à l'aération superficielle


écoulement potentiel couche limite turbulente
début de l'aération superficielle
zone d'écoulement non uniforme aéré

Selon des essais et des calculs détaillés, la position de ss peut être exprimée en
fonction des paramètres suivants (cf. Figure 9.11):
• la rugosité équivalente de sable du radier ks
• la pente Js du radier
• le débit spécifique d'eau qe

Figure 9.11: Distance ss entre la crête du déversoir et le début de l'aération super-


ficielle en fonction de la rugosité équivalente de sable ks, du débit
spécifique d'eau qe et de la pente Js [°]

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Evacuateurs de crues 383

Zone d'aération uniforme


Pour l'écoulement uniforme aéré, il existe un équilibre entre l'air entraîné et l'air ex-
pulsé.
La concentration moyenne du mélange est définie par:
Qa
C=
Qm
avec: Qa: débit d'air
Qm: débit de mélange
La masse volumique moyenne du mélange m peut être exprimée par la relation
semi-empirique suivante:

m
= 1 1 .1 C
e

Une relation entre le nombre de Froude relatif à l'eau pure et C pour un canal rec-
tangulaire est donnée par l'équation suivante (selon Rao et Kobus):
1
1 C=
1.35
1 + Fe 2
3

K
Pour un écoulement d'eau pure, dont les caractéristiques hydrauliques he et K sont
connues, cette équation permet d'estimer C ainsi que la hauteur uniforme du mé-
lange:
he
hm =
1 C
Les hauteurs he et hm sont mesurées perpendiculairement au fond du canal.
Le nombre de Froude du mélange Fm est donné par l'expression empirique suivante:
Fe
Fm
= 1 C ( ) 1
7

La démarche pour l'estimation des caractéristiques de l'écoulement uniforme aéré


est donnée par Sinniger et Hager (1989) dans le TGC 15.

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496 Evacuateurs de crues

9.4.1.3 Phénomène de l'érosion de cavitation


L'eau est très sensible aux sous-pressions dont la limite inférieure est fixée par la
pression de vapeur pv. Si la pression dans un écoulement décroît au-dessous de
cette limite, des particules d'eau autour de germes s'évaporent à température am-
biante. L'eau perd son homogénéité et l'écoulement devient bi-phasique, c'est-à-dire
il se transforme en mélange eau-vapeur. Ce phénomène est appelé cavitation. L'effet
de cavitation se manifeste uniquement dans un écoulement à lignes de courant
courbes. Si la pression dans l'écoulement augmente toujours, les bulles de vapeur
reviennent brusquement à l'état liquide. Il en résulte une implosion des bulles qui li-
bère localement une énergie considérable. Ce phénomène peut conduire à des
dommages du matériau en contact avec l'écoulement. Il est appelé érosion de cavita-
tion.

Figure 9.12: Implosion des bulles de vapeur dans un écoulement avec cavitation

Le phénomène de cavitation peut être caractérisé par l'indice de cavitation défini par:
pe
hv
pe pv g
-= =
Vo2 Vo2
2 2 g
avec: Vo: vitesse de référence
pv: pression de vapeur
pe: pression locale = pe + pe’ (moyenne + fluctuations)
- > 0 si pe > pv: pas de cavitation
- < 0 si pe < pv: cavitation
La cavitation joue un rôle important dans les constructions hydrauliques notamment
pour les canaux à haute vitesse (coursiers), les sorties de galeries, les parties pro-
ches des vannes de fond, les déversoirs, les dissipateurs (seuils et blocs) et les en-
trées de prises d'eau.

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Evacuateurs de crues 385

La Figure 9.13 montre les cas typiques d'apparition du phénomène de la cavitation:


• déversoir
• obstacle dans un canal ou dans une conduite
• marche négative
• marche positive

Figure 9.13: Apparition typiques des effets de cavitation:


a) déversoir b) obstacle dans un canal ou une conduite
c) marche négative d)marche positive

Les écoulements à hautes vitesses et les lignes de courant courbes peuvent provo-
quer des pressions proches de la pression de vapeur. Sur les coursiers, de petites
irrégularités de surface par rapport à la hauteur d'eau constituent déjà un potentiel de
danger (cf. Figure 9.14).
La Figure 9.14 montre des cas typiques dans lesquels l'érosion de cavitation peut se
manifester.

Figure 9.14: Cas typiques où l'irrégularité de la surface d'un canal ou d'une


conduite produit des zones de cavitation et par conséquent des zo-
nes d'érosion (en noir); direction de l'écoulement de gauche à droite

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496 Evacuateurs de crues

Pour diverses hauteurs relatives s / h de seuils ou de marches positifs, la Figure 9.15


représente la hauteur de pression minimale hmin nécessaire pour que la cavitation
n'apparaisse pas.
Exemple: pour une vitesse de 25 m/s et une pression absolue minimale hmin de
11 m (1 m de profondeur d'eau); la hauteur acceptable du seuil est égale
à:
1
m = 3 cm
32

Figure 9.15: Pression absolue minimale hmin [m] nécessaire pour que des effets
de cavitation soient évités dans des canaux avec élévation
a) brusque du fond b) progressive du fond
(---) pression atmosphérique

9.4.1.4 Aération forcée des coursiers


Pour des vitesses élevées (> 30 m/s), chaque petite irrégularité du fond ou d'une pa-
roi latérale rectiligne peut créer des lignes de courant courbes et ainsi conduire à une
érosion de cavitation.
Il existe plusieurs moyens d'éviter ce phénomène:
• canal strictement rectiligne
• fond et paroi du canal extrêmement lisses
• amortir les chocs provenant de l'implosion
En pratique, les deux premières possibilités ne sont pas réalisables pour des vites-
ses élevées à cause des tolérances de construction irréalistes. Par conséquent, il
faut viser la troisième s'il y a risque de cavitation. Le moyen le plus simple est d'aérer
artificiellement l'écoulement près du fond. Le résultat est un écoulement à pression
atmosphérique en surface et sur le fond. L'aération de la zone inférieure du jet peut
être réalisée au moyen de différents types d'aérateurs.

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Evacuateurs de crues 387

Les trois types de base suivants peuvent être distingués:


• déflecteur
• gradin
• fente

Figure 9.16: Coupe longitudinale de types d'aérateurs


a) déflecteur b) gradin
c) fente

Une combinaison des trois types d'aérateurs est possible.


L'espace créé sous le jet doit être relié à l'air libre par des canaux ou conduites d'aé-
ration. Cette connexion doit permettre un apport d'air suffisant. L'expérience (essais
in-situ) a montré qu'une concentration d'air de 6 – 8% près du fond (20 cm au-
dessus) est suffisante pour prévenir tout dégât de cavitation. Les dispositifs répon-
dant au mieux aux besoins, sont réalisés à l'aide d'une combinaison gradin-
déflecteur (cf. Figure 9.17).

8° - 12°
0.1 - 1.0 m

0.5 - 2.0 m

Figure 9.17: Aérateur formé par une combinaison d'un gradin avec un déflecteur

Les dimensions typiques d'un tel aérateur sont les suivantes (Fig. 9.17):
• angle du déflecteur: 8 à 12°
• hauteur du déflecteur: 0.1 à 1.0 m
• hauteur du gradin: 0.5 à 2.0 m
La distance requise entre les dispositifs d'aération se situe entre 20 et 40 m. Les va-
leurs de ces distances sont en général déterminées à l'aide de modèles réduits. Le
débit d'air entraîné par la nappe inférieure du jet dépend de la distance de lancement
du jet.

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496 Evacuateurs de crues

Le mécanisme d'aération de l'écoulement provoqué par un aérateur est représenté


par la Figure 9.18.

Figure 9.18: Comportement hydraulique d'un gradin-déflecteur


a) zones d'écoulement et mécanismes d'entraînement d'air
b) répartition longitudinale:
(______) de la pression a fond pf
(· · · ·) de la concentration moyenne d'air au fond C f

Le coefficient d'entraînement d'air


Qa
=
Qe
dépend en premier lieu de la géométrie de l'aérateur et du système d'aération, des
conditions d'approche et de la géométrie de la cavité produite.
A l'aide d'essais sur prototypes, la relation suivante a été établie:
li
=K
ho
avec: li: longueur de la trajectoire du jet
ho: hauteur d'eau à l'amont du dispositif

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Evacuateurs de crues 389

K : coefficient dépendant de la géométrie de l'aérateur et du


système d'aération
0.023 7 K 7 0.033
La Figure 9.19 représente différents types de systèmes d'approvisionnement en air.
La variante avec une conduite d'air (tour dans les parois) donne les meilleurs résul-
tats et l'écoulement n'est pas perturbé par des ondes de choc.

Figure 9.19: Disposition d'approvisionnement en air

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496 Evacuateurs de crues

9.4.2 Evacuateur en tulipe


Le fonctionnement d'un évacuateur en tulipe change complètement si le niveau d'eau
dans la retenue augmente.
Pour le débit de dimensionnement, l'écoulement est en général dénoyé et contrôlé
par un déversoir à crête arrondie. Si le débit augmente continuellement, le déversoir
est finalement complètement submergé et le débit est contrôlé par la section de
contrôle au fond du puits, à l'aval du coude.
Pour éviter des pressions négatives et la cavitation dans le puits, cette section de
contrôle est absolument indispensable.

ms. m
72 C) Déversoir noyé,
section de contrôle
B 70
au pied du puit
A 68

66
C
64

62 B) déversoir
60

58
A) orifices
56

54

52

50
0 200 400 600 800 1000 12001400 1600 1800 2000
Q [m 3/s]

Figure 9.20: Courbe niveau d'eau dans la retenue – débit de l'évacuateur en tulipe
(El Makkhazine)

La Figure 9.20 montre la relation hauteur d'eau dans la retenue – débit de l'évacua-
teur en tulipe du barrage El Makkhazine.
Dès que l'écoulement est noyé, le niveau d'eau dans la retenue s'élève de beaucoup
pour une petite augmentation du débit évacué.
Les évacuateurs en tulipe possèdent par conséquent une réserve de capacité très
limitée en cas de crues extrêmes (supérieures à la crue de dimensionnement) puis-
qu'ils se mettent en charge. L'utilisation d'un tel type d'évacuateur est par conséquent
uniquement conseillée sous les conditions suivantes:
• Le climat et l'exploitation de la retenue conduisent à un fonctionnement rare
de l'évacuateur de crue.
• La crue de dimensionnement ne dépasse pas 1500 m3/s.
• La chute est inférieure à 60 m.
A l'aval de la section de contrôle, un écoulement à surface libre est à garantir à l'aide
d'une aération forcée.

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Evacuateurs de crues 391

9.5 Dissipation d'énergie


9.5.1 Jet libre
Le jet libre provoque des affouillements dans la zone d'impact. L'érosion proche des
ouvrages peut mettre leur stabilité en danger.

"barre"

affouillement
écoulement
souterrain

zone influencée par la fondation

Figure 9.21: Affouillement provoqué au pied du barrage par un jet libre

Le risque dépend des facteurs suivants:


• la profondeur de l'affouillement
• l'emplacement de la zone d'impact
L'emplacement de la zone d'impact se détermine en calculant la trajectoire du jet.
La profondeur de l'affouillement peut être estimée à l'aide de formules empiriques qui
expriment la profondeur maximale après l'établissement de conditions stationnaires.
Il existe un grand nombre de formules dont deux sont présentées ci-après:
• jet de saut de ski (Chian):
t + h 2 = 1.18 q0.51 h 0.235
avec: t: profondeur de l'affouillement
h2: profondeur de la couche d'eau aval
q: débit spécifique
h: différence de hauteur entre la retenue et le niveau d'eau
aval

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496 Evacuateurs de crues

• jet de déversoir sur le couronnement (Veronese):


t + h 2 = 1.90 q0.54 h 0.225
Ces formules ne donnent que des valeurs approximatives. Pour un ouvrage particu-
lier, des essais sur modèle réduit s'avèrent en général nécessaires.

9.5.2 Saut de ski


Deux cas d'écoulement peuvent être distingués:
• auge noyée
• auge dénoyée

Figure 9.22: Types d'écoulement


a) auge noyée b) auge dénoyée

Le premier cas apparaît pour des débits relativement faibles et se manifeste par un
ressaut hydraulique dans l'auge et un déversement à son extrémité aval ce qui peut
provoquer des affouillements très proches du saut de ski.
La limite entre l'auge noyée et dénoyée peut être déterminée en appliquant le théo-
rème de la quantité de mouvement entre la section amont et aval de l'auge. Le jet se
sépare si so > su.
Concernant les aspects constructifs, les ordres de grandeurs des différentes dimen-
sions peuvent être indiqués:
• angle d'ouverture de l'auge: 15 º < < 35 º
• angle de départ du jet: en général 0 =

R
d 0

• rayon de courbure: R > 5 ÷ 10 · d

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Evacuateurs de crues 393

• bec de départ (chanfrein pour éviter des sous-pressions locales): / 35 º

/ 35°

9.5.3 Bassins amortisseurs


Des informations plus détaillées sur les bassins amortisseurs et les ressauts peuvent
être trouvées dans Sinniger et Hager (1989).

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Aménagements hydroélectriques 395

10 AMENAGEMENTS HYDROELECTRIQUES

10.1 Types des aménagements hydroélectriques


10.1.1 Critères de classification
La classification des aménagements hydroélectriques tient compte des critères sui-
vants:
• disposition
• chute
• possibilité d'accumulation et d'utilisation de l'eau
• types de turbines

Disposition Aménagements sans Aménagements avec


dérivation de l'eau dérivation de l'eau

Chute Basse chute Moyenne chute Haute chute


H < 40 m 40 m < H < 200 > 200 m

Possibilité Aménagements Aménagements


Aménagements
d'accumulation de pompage- avec
au fil de l'eau
Utilisation de turbinage accumulation
l'eau

Turbine Kaplan
Types de
Turbine "Bulbe" Turbine Francis Turbine Pelton
turbines
Turbine "Straflo"

Figure 10.1: Critères de classification des aménagements hydroélectriques

10.1.2 Disposition de l'aménagement


En fonction de leur disposition, deux types d'aménagements peuvent être distingués:
• sans dérivation de l'eau

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396 Aménagements hydroélectriques

• avec dérivation de l'eau.


Ces deux possibilités de disposition sont représentées schématiquement à la Figure
10.2.
Pour les aménagements hydroélectriques sans dérivation de l'eau, la chute est prin-
cipalement créée par une surélévation du plan d'eau à l'aide d'une retenue. La vi-
tesse d'écoulement est fortement réduite et le rayon hydraulique est augmenté
considérablement par la présence de la retenue.

SITUATION COUPE LONGITUDINALE

Sans dérivation retenue


de l‘eau
centrale centrale

a)

Avec dérivation
centrale centrale
de l‘eau
b)

Figure 10.2: Disposition de l'aménagement sans et avec dérivation de l’eau

En écrivant les pertes de frottement selon la formule de Strickler


L v2
hf =
K 2 R4 / 3
il peut facilement être remarqué que la retenue, grâce à l'effet cité ci-dessus (réduc-
tion de la vitesse et augmentation du rayon hydraulique) diminue les pertes de frot-
tement à une valeur presque négligeable.
En principe, la retenue transforme l'énergie cinétique en énergie potentielle. La dis-
position d'un aménagement hydroélectrique a donc pour but de réduire au maximum
les pertes de frottement afin que la force hydraulique nette soit la plus élevée. Pour
le cas d'un aménagement hydroélectrique avec dérivation de l'eau ce but est atteint
d'une part par dérivation de l'eau dans des conduites d'amenée spéciales dans les-
quelles les pertes de frottement sont faibles (parois à faible rugosité) et d'autre part
par la coupure des courbes de la rivière, la longueur des conduites d'amenée peut
également être réduite. Par conséquent, les pertes de frottement sont réduites grâce
à un faible coefficient de frottement dans les conduites d'amenée et à leur longueur
réduite.
Des combinaisons de ces deux principales dispositions sont possibles et souvent
appliquées.

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Aménagements hydroélectriques 397

10.1.3 Chute de l'aménagement


Les aménagements hydroélectriques sont souvent classés selon le critère de la
chute (cf. Figure 10.2) en distinguant entre les aménagements:
• à haute chute (H > 200 m)
• à chute moyenne (200 m > H > 40 m)
• à basse chute (H < 40 m).

10.1.4 Possibilité d'accumulation et utilisation de l'eau

10.1.4.1 Aménagements au fil de l'eau


Un aménagement ne permettant le stockage de l'eau est appelé "un aménagement
au fil de l'eau". Ce sont des aménagements qui conduisent les eaux d'un cours d'eau
naturel directement vers les turbines, sans avoir recours (passer par) à un réservoir.
La production d'électricité dépend donc directement du débit naturel du cours d'eau.

Débit turbiné
Qe (turbines peu réglables)
Écoulement dans la rivière
Nombre de turbines

5
4
3

2
1
t

Figure 10.3: Représentation graphique de l'utilisation de l'eau s'écoulant dans la


rivière.

Les aménagements en rivière sont les plus connus parmi ce type d'aménagements.
Souvent ils sont disposés en paliers successifs dans le lit d'un cours d'eau (cf. Figure
10.4). La plupart de temps il s'agit des aménagements à basse chute.

Figure 10.4: Aménagement du Haut-Rhône.

Les aménagements au fil de l'eau, sans dérivation de l'eau, (cf. Figure 10.5) sont si-
tués directement sur la rivière et se composent d'un barrage en rivière combiné avec
une centrale. Le plan d'eau dans la rivière est surélevé par le barrage. Ceci nécessite

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


398 Aménagements hydroélectriques

l'endiguement de la rivière à l'amont du barrage dans le tronçon de la courbe de re-


mous. Souvent, la chute est augmentée par le dragage du lit à l'aval de la centrale.

centrale

rivière barrage
en rivière SITUATION

endiguement

COUPE
LONGITUDINALE

dragage

Figure 10.5: Aménagement au fil de l'eau sans dérivation de l'eau

Dans le cas d'un aménagement au fil de l'eau avec dérivation de l'eau (cf. Figure
10.6), le barrage et la centrale sont séparés. Le barrage en rivière provoque une su-
rélévation du plan d'eau et force l'eau d'entrer dans le canal d'adduction à la centrale.
La centrale est située à n'importe quel endroit favorable à son implantation le long de
ce canal. De ce fait, ce genre d'aménagement est souvent appelé "aménagement
hydroélectrique au canal".
Cette disposition présente deux avantages:
• le canal peut raccourcir (p. ex. en coupant les courbes) le chemin que l'eau
doit emprunter pour arriver jusqu'aux turbines et ainsi réduire les pertes de
charge
la centrale peut être construite "au sec".

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Aménagements hydroélectriques 399

barrage rivière
en rivière

SITUATION

canal amont centrale canal aval

COUPE
LONGITUDINALE

dragage

Figure 10.6: Aménagement au fil de l'eau avec dérivation de l'eau

10.1.4.2 Aménagements avec accumulation


Ces aménagements comportent un réservoir servant à accumuler les eaux s'écou-
lant dans le cours d'eau naturel pendant un laps de temps plus ou moins grand. La
production d'énergie électrique peut ainsi être mieux adaptée aux besoins du réseau.
Un aménagement avec accumulation peut donc produire de l'énergie de pointe
quand la demande dans le réseau électrique est la plus élevée (par exemple pendant
les heures de midi).
Selon l'importance des apports et/ou la capacité du réservoir, le stockage peut être
journalier, hebdomadaire, saisonnier, voire annuel.
Les réservoirs importants sont créés par les barrages ce qui permet une production
indépendamment des apports, souvent même avec des débits turbinés supérieurs à
ceux d'un cours d'eau naturel.

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400 Aménagements hydroélectriques

Qe = débit équipé
Q écoulement dans la rivière

débit turbiné

l'eau accumulée dans le réservoir

Figure 10.7: Représentation graphique de l'utilisation de l'eau d'un aménagement


avec une retenue

Dans les Alpes suisses, la plupart des aménagements avec accumulation permet un
stockage saisonnier. En été, quand les débits sont les plus élevés (précipitations et
fonte de neige), l'eau est accumulée dans les retenues et en hiver, quand les débits
sont faibles, elle est utilisée pour produire de l'énergie quand la demande est la plus
élevée (chauffage, éclairage).
La plupart des aménagements avec accumulation est du type aménagement à haute
chute ou chute moyenne.
Dans les Alpes, les aménagements d'accumulation avec dérivation de l'eau sont la
règle (cf. Figure 10.8 à gauche). L'eau de la retenue est dérivée par un système
d'adduction (galeries, puits) vers la centrale. La dérivation de l'eau d'un bassin ver-
sant à un autre est également possible.
La centrale d'un aménagement d'accumulation sans dérivation de l'eau est située
directement au pied du barrage (ou à l'aval de la retenue) (cf. Figure 10.8 à droite).

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Aménagements hydroélectriques 401

Avec dérivation de l‘eau Sans dérivation de l‘eau


centrale
barrage
niveau amont

niveau aval

1 prise d‘eau en rivière


2 galerie d‘adduction
3 retenue
4 galerie en charge
5 chambre d‘équilibre
6 puits en charge
7 centrale
8 galerie de fuite

Figure 10.8: Aménagement d'accumulation

10.1.4.3 Aménagement de pompage-turbinage


Ces aménagements ont également une accumulation mais disposent également, à
l'aval des turbines, d'un stock d'eau (réservoir). Ainsi, des pompes ou même des
pompes-turbines (groupes réversibles) peuvent faire circuler l'eau entre le bassin
aval et le bassin amont.

bassin supérieur

bassin inférieur
1 galerie/puits en charge
2 centrale avec pompe-turbines
3 galerie en charge aval

Figure 10.9: Aménagement de pompage-turbinage

Le bassin supérieur peut être alimenté par des apports naturels ou rempli unique-
ment par pompage.

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402 Aménagements hydroélectriques

Pendant les périodes d'énergie excédante, l'eau est pompée du bassin inférieur au
bassin supérieur. Pendant la haute demande d'énergie, l'eau stockée dans le bassin
supérieur est turbinée. Cette opération est déficitaire du point de vue de production
d'énergie à cause des pertes de charge dans les galeries et conduites.
Pour obtenir 1 kWh en mode de turbinage, selon les pertes de charge dans les gale-
ries, environ 1.3 kWh d'énergie de pompage est nécessaire. L'opération de turbi-
nage-pompage n'est donc rentable que si l'énergie pendant le pompage est très bon
marché et le prix de vente de l'énergie de turbinage est plus élevé.

Q
turbinage
QT

Qp = débit équipé des pompes


VT pompage QT = débit équipé des turbines
VP = VT

VP

t
Période de pompage: prix d'énergie est bon marché

Période de turbinage: prix d'énergie est plus élevé

Figure 10.10: Représentation graphique des apports uniquement par pompage et


de l'utilisation par turbinage

L'aménagement de pompage-turbinage permet alors, tout comme l'aménagement


d'accumulation, de produire de l'énergie de pointe. En plus, l'énergie excédante,
dans un réseau électrique peut être stockée par le pompage et être ainsi valorisée.

10.1.5 Classification selon les turbines


Les types de turbines (cf. Figure 10.11) peuvent également être utilisés pour classi-
fier les aménagements hydroélectriques. Selon la chute de l'aménagement, la classi-
fication peut être la suivante (cf. 6)
• H entre 200 et 1850 m: turbine Pelton (turbine à action)
• H entre 40 et 700 m: turbine Francis (turbine à réaction)
• H entre 3 et 80 m: turbines Kaplan, "Bulbe", "Straflo"
Les aménagements à haute chute sont donc équipés avec des turbines Pelton ou
Francis, les chutes moyennes avec Francis et les basses chutes avec les Kaplan,
"bulbe" ou "straflo".

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 403

Les turbines Pelton (cf. Figure 10.12) et Francis (cf. Figure 10.13) peuvent être ins-
tallées soit à l'axe horizontal, soit à l'axe vertical (règle pour les grands aménage-
ments).
Les turbines Kaplan ont toujours un axe vertical, les turbines "Bulbe" ou "Straflo" tou-
jours un axe horizontal (cf. Figure 10.14 et Figure 10.15).

Pelton Francis Kaplan

Figure 10.11 : Types de turbines

Roue Pelton avec augets


Injecteur avec pointeau

Buse

Canal de fuite

Figure 10.12 : Coupe transversale d’une turbine Pelton à axe horizontale de la cen-
trale de CIMEGO en Italie, Q=8.9 m3/s, P=55.2 MW

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404 Aménagements hydroélectriques

Alternateur

Distributeur

Bâche spirale

Roue Francis avec aubes

Diffuseur

Figure 10.13 :Coupe transversale d’une turbine Francis à l’axe verticale de la cen-
trale de BOUCA en Portugal, Q=51.1 m3/s, P=25 MW

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Aménagements hydroélectriques 405

niveau amont
niveau aval

1 turbine Kaplan
2 distributeur
3 alternateur
4 grue portique
5 dégrilleur à chariot

Figure 10.14: Aménagement à basse chute avec turbine Kaplan (à axe vertical)

niveau amont

niveau aval

1 turbine bulbe
2 distributeur
3 alternateur
4 grue portique
5 dégrilleur

Figure 10.15: Aménagement à basse chute avec turbine "bulbe" (à axe horizontal)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


406 Aménagements hydroélectriques

10.1.6 Aménagements à basse chute

10.1.6.1 Caractéristiques
Les aménagements à basse chute sont caractérisés par des faibles chutes, moins de
40 m. Ils sont souvent combinés avec des débits équipés importants.
Les aménagements comportent normalement un barrage "mobile" pouvant être effa-
cé en cas de crue (pour réduire l'importance des submersions en amont).
Le barrage ne crée pas, en général, de retenue saisonnière (à cause de la hauteur
relativement faible de la chute et de la forme de la vallée dans le cours inférieur des
rivières).
Les ouvrages de dérivation (canal d'amenée et canal de fuite) sont des canaux à
écoulement libre du fait de la faible pente et de la topographie de plaine. Ils sont
presque toujours construits à l'air libre, excepté lorsque le relief local impose une ga-
lerie (Exemple: aménagement de Rheinau sur le Rhin).
Ces aménagements sont souvent établis sur des cours d'eau navigables (pentes fai-
bles) et doivent de ce fait, être prévus de façon à assurer le passage des bateaux de
navigation intérieure.
On distingue (cf. 10.1.6.2) deux types principaux d'aménagements, suivant le type de
dérivation (canal d'amenée et canal de fuite):
les aménagements avec canal de dérivation (la répartition de la lon-
gueur de la dérivation entre les deux canaux dépend de la topogra-
phie);
les aménagements sans canal de dérivation: barrage-usine.
Pour assurer le passage de la navigation, ces aménagements comportent souvent
une ou plusieurs écluses permettant le franchissement de la dénivellation créée par
le barrage.
Les écluses peuvent être aménagées, soit dans le cours d'eau, soit sur un canal af-
fecté spécialement à la navigation, soit sur la dérivation usinière.
Les usines électriques construites sur les aménagements de basse chute sont équi-
pées de turbines à hélices (Kaplan, Bulbe, Straflo), moins fréquemment de turbines à
réaction (Francis). Le nombre de groupes (composés de turbines et alternateurs) est
fonction du débit, de ses caractéristiques (courbe des débits classés) et du mode
d'exploitation (isolé ou en cascade dans le réseau électrique interconnecté).
Les aménagements à basse chute sont très souvent conçus comme aménagements
à buts multiples. Ils peuvent servir à:
la production d'électricité,
la protection contre les crues,
la stabilisation du lit de la rivière,
la navigation,
l'irrigation,
l'alimentation de la nappe phréatique.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 407

10.1.6.2 Éléments essentiels d'un aménagement à basse chute


La figure 10.16 présente le schéma-type d'un aménagement au fil de l'eau équipé
d'un canal de dérivation.

Figure 10.16: Schéma-type d'un aménagement à basse chute avec canal de déri-
vation.

Les éléments essentiels d'un aménagement au fil de l'eau sont:


Barrage, avec piles et vannes permettant de maintenir à peu près le plan d'eau en
période de crues.
Plan d'eau amont; il peut fournir une petite réserve pour une compensation journa-
lière ou hebdomadaire; à l'amont, courbe d'écoulement dite "courbe de remous", dont
la limite amont A forme la limite supérieure de la concession.
Prise d'eau, avec grille pour de petits aménagements, avec seuil pour des aména-
gements plus importants.
Canal d'amenée à écoulement libre, dit aussi "canal de dérivation" ou "dérivation usi-
nière"; la pente est faible, la vitesse également.
Bassin de distribution d'eau aux turbines; éventuellement conduites forcées.
Usine comprenant des grilles amont et, généralement, plusieurs groupes turbo-
alternateurs.
Canal de fuite, dit aussi "canal de restitution".
Éventuellement une écluse pour la navigation, qui utilise ainsi les canaux à l'amont et
l'aval.

La concession s'étend de A à B .

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


408 Aménagements hydroélectriques

10.1.6.3 Variation de la chute en fonction du débit de la rivière et de la pro-


duction d'énergie
Les niveaux d'eau à l'amont et à l'aval de l'aménagement sont présentés par le profil
en long à la figure 10.17 pour les cas de crues et d'étiage.

Figure 10.17: Profil en long d'un aménagement à basse chute avec canal de déri-
vation.

La chute brute HB dépend du niveau dans la rivière à l'amont et à l'aval:


Niveau à l'amont
Deux possibilités pour la concession:
Le point limite A atteint par le remous est fixe.

Le niveau maximal N de la retenue est fixe; la longueur du remous varie avec la


chute, la surface des berges inondées est plus petite; on perd de la chute pour un
débit élevé, mais il n'est plus nécessaire de surélever les rives du canal et le barrage.
Niveau à l'aval
Le niveau de restitution monte si le débit de la rivière augmente; la chute brute en
subit une diminution plus grande que l'augmentation de chute entraînée par l'éléva-
tion du niveau amont; donc la chute brute diminue lorsque le débit de la rivière aug-
mente.
La chute nette tient compte des pertes de charge dans le canal d'amenée et dans le
canal de fuite.
Pour le cas où le point limite A atteint par la courbe de remous est fixe, la chute
nette HN en fonction du débit de la rivière QR est présentée à la figure 10.18.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 409

Figure 10.18: HN
Chute nette HN en fonction du débit de la rivière QR.

On constate que la chute nette diminue considérablement avec l'augmentation du


débit.
La puissance installée est donnée par
Pe = g Q e H Ne $tot ( = Pmax )
Qe: débit équipé (installé); débit maximal turbiné
HNe: chute nette pour débit équipé
$tot: rendement total des machines
Le degré d'équipement d'un aménagement au fil de l'eau à basse chute est caracté-
risé normalement par le temps d'utilisation égal à la durée pendant laquelle le débit
maximal turbiné est disponible en année moyenne (courbe des débits classés).
La puissance maximale est limitée par le débit équipé (maximal turbiné). Pour
QR < Qe ou QR > Qe la puissance de l'aménagement diminue (Fig. 10.19).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


410 Aménagements hydroélectriques

Puissance

Pe

Fig. 10.19: Variation de la puissance


Temps pour une année moyenne.
te 365 jours

Exemples des temps d'utilisation:

Aménagement Rivière Année de mise en ser- Temps d'utili-


vice / renouvellement sation (jours
par année)
Rheinfelden Rhin 1898/1976 300
Angst Rhin 1912/1994 55
Laufenburg Rhin 1914/1992 60
Birsfelden Rhin 1955 52
Albbruck-Dogern Rhin 1933/1978 138
Eglisau Rhin 1920/1927 175
Ruppolingen Aare 1896/1927 243
Ruppoldingen (nou- Aare 2000 42
velle construction)
Flumental Aare 1970 84
Lavey Rhône 1950/1981 85
Seujet Rhône 1994 30

Les projets de renouvellement tendent à réduire le temps d'utilisation au dessous de


60 jours.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 411

10.1.6.4 Aménagements sans canal de dérivation

10.1.6.4.1 Généralités

Les aménagements sans canal sont construits directement dans la rivière. Le bar-
rage en rivière et la centrale créent la retenue amont. Ces aménagements convien-
nent surtout aux rivières à forts débits et faibles pentes (< 2‰).
Le meilleur rendement est atteint si toute la chute disponible sur un tronçon de cours
d'eau est utilisée par des paliers successifs. Ce mode d'aménagement est préférable
pour les voies navigables puisqu'un tirant d'eau minimal peut être garantie partout le
long de la rivière.
Aussi bien pour les aménagements en paliers successifs que pour les aménage-
ments en cascade, trois configurations sont possibles, selon l'utilisation de la chute et
la succession des courbes de remous (Fig. 10.20):
a) retenues interrompues par des tronçons non aménagés,
b) retenues mises à la file,
c) retenues chevauchantes.

Limite du remous Limite du remous


Limite du remous
Barrage Barrage
Barrage

Figure 10.20: Aménagements en paliers successifs. a) retenues interrompues par


des tronçons non aménagés; b) retenues mises à la file; c) retenues
chevauchantes.

Selon la disposition de la centrale, du barrage mobile et d'une éventuelle écluse, plu-


sieurs types d'aménagements peuvent être envisagés, lesquels peuvent être classés
selon les catégories suivantes:
Conception contiguë
aménagement en bloc
aménagement en baie
Conception décomposée
aménagement avec centrales jumelles
aménagement en piliers (centrale en piliers)
Conception submergée (centrale submergée)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


412 Aménagements hydroélectriques

1 2 3 4 5

Figure 10.21: Principales conceptions de divers types d'aménagements: amé-


nagement en bloc, aménagement avec centrales jumelles,
aménagement en pilier, aménagement submergé, aménage-
ment en baie.

10.1.6.4.2 Aménagement en bloc

Pour cette conception, toutes les machines hydroélectriques sont disposées sur un
socle central qui est situé sur un côté de la rive (cf. Fig. 10.21 ). Cette conception
présente des avantages pour la construction ainsi que pour le montage et l'entretien
des machines.
Dans les segments de rivières en courbe, il est judicieux de placer la centrale avec la
machine à l'extérieur de la courbe où le charriage est moins important.
L'aménagement en bloc n'est réalisable que si la maîtrise des crues est possible
sans l'élargissement de la section avec le barrage mobile projeté. Dans le cas
contraire, un aménagement en baie s'avère incontournable.
A cause de la disposition asymétrique, l'écoulement d'approche à la centrale n'est
souvent pas idéal. Pour éviter un écoulement transversal devant la centrale en cas
de crue, une paroi de séparation prolongée vers l'amont doit être prévue. La disposi-
tion de ces éléments est normalement optimisée à l'aide d'essais sur modèle physi-
que.

10.1.6.4.3 Aménagement en baie

L'aménagement en baie est la disposition la plus fréquente. La centrale hydroélectri-


que est située dans une baie artificielle créée par un élargissement local de la rivière
(cf. Fig. 10.21 ).
Comme pour l'aménagement en bloc, la centrale devrait se trouver, si possible, à
l'extérieur d'une courbe.
Par rapport à l'aménagement en bloc, la section de la rivière n'est pas réduite par la
présence de la centrale. Le passage des crues est assuré, lorsque les vannes du
barrage mobile sont effacées comme dans l'état naturel. Un autre avantage de
l'aménagement en baie est la construction à sec de la centrale dans un élargisse-
ment à côté de la rivière. Cette disposition facilite les travaux et la maîtrise des crues
pendant le chantier et compense largement les coûts de construction plus élevés dus
à l'élargissement.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 413

Il existe trois possibilités pour implanter la centrale par rapport au barrage (Fig.
10.22)
a) centrale placée dans le prolongement du barrage mobile,
b) axe de la centrale à l'amont de l'axe du barrage mobile,
c) axe de la centrale à l'aval de l'axe du barrage mobile.

Centrale
Grille Pilier de
séparation
Barrage
mobile

Figure 10.22: Trois possibilités d'implémentation de la centrale par rapport au bar-


rage mobile.

L'emplacement le plus favorable de la centrale est dans l'axe du barrage mobile ou


légèrement déplacé vers l'aval (cf. point a) de la Fig. 10.22). Lorsque la centrale est
située plus à l'aval, le champ de vitesses n'est pas régulièrement réparti à travers la
section amont de la centrale (cf. point c) de la Fig. 10.22). L'emplacement à l'amont
est très défavorable car l'écoulement présente plusieurs changements de direction.
La longueur de la baie ou de l'élargissement local doit être suffisante pour obtenir un
écoulement lisse, sans tourbillons ni zones d'eau morte. La pile qui sépare la cen-
trale du barrage mobile joue un rôle primordial, sa longueur doit être au moins égale
à 1/3 de la longueur totale de la centrale.

10.1.6.4.4 Aménagements jumeaux

Pour les rivières à débits importants et à faibles chutes, la disposition avec deux cen-
trales s'avère nécessaire puisque avec le nombre de machines élevé implique une
longueur de centrale trop grande. L'aménagement en baie conduirait à une dispro-
portion entre la baie ou l'élargissement local et la largeur initiale de la rivière. La dis-
position symétrique d'un aménagement avec centrales jumelles représente des
avantages du point de vue de l'écoulement d'approche. Cette disposition est souvent
adoptée pour des rivières-frontières; chaque pays possède ainsi sa propre centrale,
tandis que le barrage mobile peut être partagé.
A la figure 10.23 quelques dispositions possibles sont présentées schématiquement.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


414 Aménagements hydroélectriques

Ecluses
Ecluse Centrales
Centrales

Barrage mobile
Barrage mobile Barrage mobile

Centrales

Endiguement

Figure 10.23: Dispositions possible d'un aménagement avec centrales jumelles.

10.1.6.4.5 Aménagements en piliers

Les aménagements en piliers sont caractérisés par une disposition en alternance


entre groupes hydroélectriques et passes du barrage mobile. Les groupes de ce type
de centrales constituent en même temps les appuis latéraux des vannes du barrage
mobile et remplacent les piles de ce dernier. Dans ce cas, l'écoulement d'approche
est très bien réparti à travers la section, même si le barrage mobile est complètement
fermé.
Cette disposition permet de faire des économies dans la construction du bassin
amortisseur à l'aval du barrage mobile en profitant de l'effet positif du ressaut spatial
(réduction de la longueur).
Au lieu de construire une salle à machines, les groupes sont protégés par un couver-
cle qui est enlevé pour l'entretien des machines. La grue portique circule au-dessous
de ces couvercles.
La figure 10.24 montre l'exemple de la centrale en piliers de Lavamünd en Allema-
gne sur le Drau.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 415

Figure 10.24: Centrale en piliers de Lavamünd en Allemagne sur le Drau.

10.1.6.4.6 Aménagements submergés

Au lieu de construire un barrage mobile indépendant de la centrale, ces deux ouvra-


ges sont combinés dans un seul. On parle alors d'un aménagement submergé qui
satisfait en même temps les trois objectifs suivants:
accueil des machines,
création de la retenue,
évacuation des crues.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


416 Aménagements hydroélectriques

L'emprise d'un tel aménagement submergé est minimale, ce qui se traduit par des
économies lors de sa réalisation et par une bonne intégration dans le paysage sans
élargissement de la rivière.
L'ouvrage s'étend sur toute la largeur de la rivière. Il es composé d'un certain nombre
de groupes hydroélectriques et de vidanges de fond (Fig. 10.25). Ces dernières doi-
vent garantir le passage du charriage lors des crues. Sur cette structure, composée
de groupes et de vidanges de fond, un déversoir équipé de vannes-clapets est ins-
tallé. En cas de crue, la structure est submergée et complètement noyée sous l'eau.
L'aménagement submergé est normalement équipé de turbines bulbes ou Straflo qui
permettent la réalisation des structures à faible hauteur.

Figure 10.25: Centrale submergée sur le Lech en Allemagne.

10.1.6.5 Aménagements avec un canal de dérivation


Les aménagements avec un canal de dérivation représentent un type particulier
parmi les aménagements à basse chute. L'eau est dérivée par un barrage mobile
vers un canal sur lequel la centrale est implantée (Fig. 10.26).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 417

Rivière

Barrage
mobile

Canal d'amenée Centrale Canal de fuite

Figure 10.26: Situation et coupe verticale schématique d'un aménagement avec un


canal de dérivation.

Pour les débits inférieurs au débit équipé (QR<Qe), un débit minimal fixé par des
considérations écologiques doit être maintenu dans le lit initial de la rivière.
Les avantages des aménagements avec un canal de dérivation sont:
réduction des pertes de charge par une section régulière et lisse du
canal de dérivation;
réduction des pertes de charge grâce à la longueur réduite du canal
de dérivation par rapport au tronçon de la rivière naturelle (coupure
des méandres);
construction "au sec" de la centrale.
Les inconvénients de cette solution sont: les pertes d'énergie dues au débit minimal
maintenu dans le lit initial et les travaux importants qu'implique la réalisation du canal
(coûts, intégration du canal dans le paysage).
Selon la disposition du canal de dérivation par rapport à la rivière (Fig. 10.27), on
peut distinguer:
a) les canaux qui coupent plusieurs méandres d'une rivière,
b) ceux qui créent eux-mêmes une boucle à côté du lit initial,
c) enfin ceux qui coupent une simple boucle (courbe) de la rivière.
Dans certaines situations, plusieurs centrales peuvent être installées sur un même
canal de dérivation, particulièrement long (Fig. 10.27 a).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


418 Aménagements hydroélectriques

Barrage
Barrage
mobile
mobile

Barrage Centrale
mobile
év. Centrale
centrale

Centrale

Figure 10.27: Aménagements à basse chute avec divers types de canaux de déri-
vation.

10.1.6.6 Aménagements à basse chute combinés avec des écluses


La figure 10.28 représente les principales variantes des aménagements à basse
chute comportant une écluse:
a) dérivation usinière, écluse en rivière;
b) dérivation navigable et dérivation usinière séparées;
c) centrale et écluse sur un canal de dérivation mixte;
d) centrale en rivière, dérivation navigable;
e) centrale et écluse en rivière, pas de dérivation.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 419

Barrage mobile
a Ecluse

Centrale

Barrage mobile

Centrale

b
Ecluse
Barrage "de garde"

c
Centrale

Barrage "de garde" Ecluse

Barrage mobile

d Centrale

Barrage "de garde" Ecluse

Ecluse
e Barrage mobile

Centrale

Figure 10.28: Principaux types d'aménagements à basse chute sur une rivière na-
vigable.

10.1.6.7 Modes d'exploitation des paliers en série


Les modes de fonctionnement permettent d'amplifier artificiellement et temporaire-
ment la production totale des chaînes de centrales en série sur un cours d'eau. C'est
le fonctionnement en programme de débit qui consiste à imposer des débits à cha-
que palier de l'aménagement à des moments prédéterminés de la journée.
En principe, il existe deux différents modes de fonctionnement:

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


420 Aménagements hydroélectriques

a) passage d'un volume d'eau tirée d'une retenue située à l'amont de la chaîne à
travers les paliers en série (Fig. 10.29);
b) léger déstockage simultané de toutes les retenues (Fig. 10.30).
Pour le mode d'exploitation a) une retenue à l'amont de la chaîne est remplie pen-
dant la nuit et utilisée pendant le jour pour lâcher un certain volume d'eau. Ce volume
d'eau supplémentaire augmente la production lors du passage dans chaque palier de
la chaîne. Normalement, l'onde doit être laminée dans le dernier palier. La figure
10.29 représente schématiquement une chaîne avec 5 retenues et l'influence du
mode a) sur la production d'électricité.

R1

Palier 1 R5

Palier 2

Palier 3

Palier 4
P
[MW] Palier 5

t
0 24 h

Figure 10.29: Profil en long d'un aménagement en chaîne avec 5 paliers et produc-
tion résultante, mode d'exploitation a).

Pour le mode d'exploitation b), tous les paliers de la chaîne augmentent leur produc-
tion simultanément. Le palier situé à l'amont tire le volume d'eau d'une retenue de
tête éventuelle. Le palier à l'aval lamine l'onde causée par le léger déstockage de
toutes les retenues à l'amont. La figure 10.30 représente schématiquement l'effet de
ce mode d'exploitation sur la production.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 421

onde
néga
tive
onde p
ositive
w
w
onde onde
vo négative positiv
e

P
[MW] 3

t
0 24 h

Figure 10.30: Profil en long d'un aménagement en chaîne avec 3 paliers et produc-
tion résultante, mode d'exploitation b).

A titre d'exemple, mentionnons que ces modes d'exploitation permettent d'augmenter


de 800 MW la puissance pendant les heures de pointe dans l'ensemble des aména-
gements sur le Rhône depuis la Suisse jusqu'à la Méditerranée par rapport à la puis-
sance installée totale de 3000 MW.
Un changement brusque du débit produit des intumescences dans les retenues. La
vitesse de déplacement de ces intumescences correspond approximativement à

A 3 z bz 2
w = vo ± g + +
b 2 2A
vo ± g h pour petit z
avec w: vitesse de propagation des intumescences

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422 Aménagements hydroélectriques

A: section mouillée
vo: vitesse initiale
z: hauteur de l'onde
b: largeur moyenne de l'onde
h: profondeur de l'eau

A
h

Figure 10.31: Définitions pour calculer la vitesse de déplacement des intumescen-


ces et leurs hauteurs dans les retenues.

La hauteur de l'onde peut être déduite de la condition de continuité


Qo Q
z= .
w b

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 423

10.1.7 Aménagements à moyenne et haute chutes

10.1.7.1 Caractéristiques
Les aménagements à moyenne chute (comprise entre 40 et 200 m) sont construits
sur les cours d'eau moyens des rivières, tandis que les aménagements à haute chute
ne peuvent être réalisés économiquement que sur les sections de cours d'eau si-
tuées dans la partie amont des bassins versants, c'est-à-dire en haute montagne.
Pour les aménagements à haute chute (chute dépassant 200 m), l'écoulement dans
les ouvrages d'amenée (galeries, puits conduites) est en charge lorsque l'ouvrage de
retenue crée une retenue d'accumulation, ce qui est la configuration la plus fré-
quente. Plus rarement, ces ouvrages d'amenée sont aménagés à l'écoulement libre,
en particulier lorsque le barrage ou l'ouvrage de dérivation a pour seul but d'alimenter
la prise d'eau sans créer de volume de stockage important. Les conduites forcées en
surface ou les puits blindés souterrains ont, en général, une longueur du même ordre
de grandeur que la hauteur de chute.

10.1.7.2 Disposition des aménagements à moyenne chute


Selon la capacité de la retenue, les aménagements à moyenne chute sont utilisés
comme aménagements au fil de l'eau ou à accumulation. Suivant la topographie du
terrain, les possibilités de submersion des berges et la hauteur de chute, deux types
d'aménagements, très différents, peuvent être réalisés:
aménagement avec canal ou galerie d'amenée; la centrale est amé-
nagée jusqu'à quelques kilomètres à l'aval du barrage,
aménagement sans canal ou galerie d'amenée avec une centrale si-
tuée directement au pied du barrage.
Dans les aménagements sans accumulation importante d'eau, c'est-à-dire sans fluc-
tuations importantes du niveau de la retenue, les canaux et les galeries d'amenée
fonctionnement à écoulement à surface libre, pour autant qu'ils soient courts par rap-
port à la conduite forcée ou puits blindé.
La disposition la plus répondue est celle du deuxième type. Le barrage-usine, sché-
matiquement illustré à la figure 10.32 en est un exemple caractéristique.

Barrage
Retenue

Centrale / Usine

Figure 10.32: Barrage-usine. Coupe principale à travers un aménagement de


moyenne chute.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


424 Aménagements hydroélectriques

Le tableau suivant donne les caractéristiques de quelques aménagements à


moyenne chute de type barrage-usine.

Aménagement Chute Débit équi- Puis- Volume Type de Année


(Pays) brute pé sance utile barrage d'achè-
installée de la rete- vement
nue
Schiffenen 44 m 123 m3/s 71 MW 35 x 106 m3 poids- 1964
(Suisse) voûte
Zervreila 127 m 20 m3/s 22.4 MW 100 x 106 voûte 1958
(Suisse) m3
Hoover 195 m 850 m3/s 1'345 35'200 x poids- 1936
(Etats Unis) MW 106 m3 voûte
Shahid Abbas- 170 m 760 m3/s 1'000 1'420 x 106 voûte 1976
pour MW m3
(Iran)
Génissiat 70 m 720 m3/s 425 MW 12 x 106 m3 poids 1949
(France)
Itaipu 120 m 12'600 12'600 29'000 x à contre- 1982
(Brésil) m3/s MW 106 m3 forts
Trois Gorges 113 m 25'250 18'200 39'000 x poids 2010
(Chine) m3/s MW 106 m3
Tableau: Caractéristiques de quelques aménagements à moyenne chute du type
barrage-usine.

Comme les centrales à basse chute, les centrales à moyenne chute peuvent être
intégrées à des aménagements en cascade, composés:
soit d'une série d'usines sur un même cours d'eau;
soit d'une série d'usines sur un canal d'amenée commun et distinct du
cours d'eau.
L'aménagement de La Grande (Baie James) au Canada est un exemple d'un grou-
pement "en cascade" d'aménagements à moyenne chute (Fig. 10.33).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 425

Figure 10.33: Aménagement de La Grande.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


426 Aménagements hydroélectriques

La Grande Rivière, fleuve principal, se jetant dans le baie James, est caractérisée,
dans son cours inférieur, par une pente moyenne de 0.8‰. Son débit naturel est de
1700 m3/s à l'embouchure. Il sera porté à 3300 m3/s par le détournement de deux
rivières voisines, la Caniapiscau à l'est et l'Eastmain au sud (Fig. 10.33).
Le tableau ci-après donne les caractéristiques des huit centrales du complexe de La
Grande dont la réalisation s'est échelonnée entre 1973 à 1997.

Centrale/Usine Puissance ins- Chute Débit Année d'achè-


tallée nette équipé vement
La Grande 2 5328 MW 142 m 4800 m3/s 1978
La Grande 3 2304 MW 76 m 2900 m3/s 1981
La Grande 4 2650 MW 119 m 2100 m3/s 1984
La Grande 2A 1998 MW 138.5 m 1620 m3/s 1992
La Grande 1 1368 MW 27.5 m 595 m3/s 1995
3
La Forge 1 820 MW 57.3 m 1613 m /s 1994
La Forge 2 280 MW 26.9 m 1200 m3/s 1997
Brisbay 460 MW 37.5 m 1133 m3/s 1993
Tableau: Caractéristiques des centrales du complexe de La Grande au Canada.

10.1.7.3 Disposition des aménagements à haute chute

10.1.7.3.1 Généralités

Comme mentionné sous 10.1.7.1, les aménagements à haute chute sont situés dans
la partie amont des bassins versants. Il est, en effet, indispensable que la pente du
cours d'eau soit forte pour que les ouvrages de dérivation soient aussi courts que
possible.
Les aménagements de haute chute comportent en général des ouvrages de dériva-
tion de grande longueur (plusieurs kilomètres). Les aménagements sans dérivation
de l'eau, c'est-à-dire barrages-usines, constituent un cas exceptionnel où la topogra-
phie se prête à la réalisation des conduites d'amenée très courtes.
Les ouvrages d'amenée sont à écoulement en charge lorsque l'ouvrage de retenue
crée une retenue d'accumulation, ce qui est le cas le plus fréquent. De plus, pour des
ouvrages d'amenée de grande longueur, l'écoulement en charge est incontournable
pour donner une plus grande souplesse à l'exploitation de la centrale (le temps de
réaction du système d'amenée est court, permettant de répondre instantanément à la
demande du réseau électrique).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 427

10.1.7.3.2 Evolution de la disposition des aménagements à haute chute

La figure 10.34 montre différentes dispositions possibles de l'adduction d'un aména-


gement à haute chute et son évolution au cours du 20ème siècle.
• Les premiers aménagements à haute chute ont été réalisés à la fin du 19ème
siècle et construits selon le schéma de la figure 10.34: galerie d'amenée,
souvent à écoulement libre suivie d'une conduite forcée à l'air libre qui
conduit l'eau dans une centrale également à l'air libre.
Cette disposition était conditionnée par les moyens techniques qui ne per-
mettaient pas l'excavation de puits inclinés ou de cavernes de grandes di-
mensions.
• Après la deuxième guerre mondiale, le schéma a été remplacé par le
type : galerie en charge suivie d'un puits blindé en combinaison avec une
centrale à l'air libre,
et le type : avec une adduction équivalente au type , mais en combi-
naison avec une centrale souterraine.
• Pour des conditions topographiques particulières, associant des chutes re-
lativement importantes à des courtes distances horizontales, le schéma a
été développé. De telles réalisations se trouvent surtout en Scandinavie où
l'eau est récoltée sur les hauts-plateaux et exploitée au fond des fjords.
Depuis une dizaine d'années, le puits incliné des schémas et est de
plus en plus souvent remplacé par un puits vertical. Ce développement est
le résultat de nouvelles méthodes d'excavation de puits verticaux, appelées
"raise-boring" en bon français. Cette méthode permet d'excaver le puits de
bas en haut après la perforation d'un forage pilote. L'excavation se fait à
l'aide d'une tête de forage tournante fixée à un axe de transmission. Ainsi, il
est aujourd'hui possible de réaliser des puits jusqu'à une hauteur de 700 m
avec un diamètre maximal de 6 à 7 m, par alésages successifs.
• A partir de 1960, l'excellente qualité du rocher (granite) sur des nombreux
sites, essentiellement en Norvège, a permis de renoncer au revêtement de
la galerie. Dès 1975, le tracé a fait son apparition souvent sans revête-
ment ou avec un revêtement partiel.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


428 Aménagements hydroélectriques

Chambre d'équilibre

Conduite forcée

Galerie en charge

Centrale

Puits en charge

Chambre
d'équilibre

Centrale souterraine

Galerie de restitution
(év. en écoulement libre)
Puits en charge
Caverne Chambre d'équilibre

Chambre d'équilibre à coussin


d'air comprimé

Galerie en charge
Centrale souterraine

Fig. 10.34: Différentes dispositions d'un aménagement à haute chute et évolu-


tion durant le 20ème siècle

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 429

10.1.7.3.3 Dispositions courantes en Suisse

Fig. 10.35: Aménagement de la Lienne en Valais (Suisse), achevé en 1957.

La figure 10.35 représente schématiquement l'aménagement de la Lienne en Valais.


Il s'agit d'un exemple d'aménagement à deux paliers, une disposition très souvent
choisie pour les aménagements réalisés dans les Alpes suisses entre 1950 et 1970.
Le palier inférieur est un exemple du type , le palier supérieur de la solution .
Dès 1960/70 le puits blindé en combinaison avec une centrale souterraine est deve-
nu la solution est la plus courante pour les réalisations en Suisse. Un des avantages
le plus important est la préservation de l'environnement grâce à la mise sous terre de
la quasi totalité des installations.

10.1.7.3.4 Aménagement d'ensemble d'un bassin versant par un complexe à haute chute

Les aménagements à haute chute, ne sont, en général, pas limités à un équipement


élémentaire comprenant une seule prise d'eau et une seule galerie d'amenée.
La recherche de l'équipement optimal sur le plan économique d'un bassin versant ou
d'un ensemble de bassins versants conduit à réaliser des aménagements complexes
dont les principes sont également applicables aux aménagements à moyenne chute.
Les principaux types de solutions utilisées sont les suivantes:
aménagements en "Y"
aménagements avec prises secondaires

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


430 Aménagements hydroélectriques

alimentation d'un réservoir par des bassins versants latéraux (par gra-
vité ou par pompage)
prise d'eau et restitution dans deux cours d'eau différents (transfert de
l'eau d'un bassin versant à un autre)
aménagements en paliers successifs
aménagements à retenues multiples

a) Aménagements en "Y"
Pour accroître la superficie du bassin versant alimentant une usine et, par consé-
quent, le débit dérivé, on rassemble les eaux prélevées sur deux cours d'eau en un
point d'où part une galerie d'amenée unique vers l'usine.

b) Aménagements avec prises secondaires


Lorsqu'une galerie d'amenée est établie parallèlement à l'axe d'une vallée, elle passe
en profondeur sous les affluents du cours d'eau principal. Il est alors intéressant,
pour augmenter le débit dérivé, de réaliser des prises dites secondaires sur ces af-
fluents.
L'eau de ces prises secondaires est amenée soit directement à travers des puits
dans la galerie d'amenée principale, qui lie la retenue avec la centrale, soit indirec-
tement dans une galerie collectrice qui transfère l'eau dans la retenue. L'ouvrage col-
lecteur (galerie) peut être en charge ou à écoulement libre (ce qui est le plus souvent
le cas).
L'aménagement de Mauvoisin en Suisse (Canton du Valais) illustre l'exemple d'un
aménagement avec prises secondaires (Fig. 10.36 et 10.37).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 431

Fig. 10.36: Situation de l'aménagement de Mauvoisin dans le canton du Valais


en Suisse.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


432 Aménagements hydroélectriques

Fig. 10.37: Profils en long de l'aménagement de Mauvoisin.

1. Galerie d'adduction Crête Sèche – 8. Galerie d'amenée de l'usine de


Otemma – Breney, Fionnay,
I = 3299 m, < = 2 m I = 4755 m, < = 3.2 ÷ 3.06 m
Galerie d'amenée de l'usine de 9. Chambre d'équilibre. Puits blindé,
Chanrion,
I = 443 m, < = 2.4 m, pente 80%
I = 5606 m, < = 2 m
10. Centrale de Fionnay, puissance
2. Chambre d'équilibre , puits blindé, 127'500 kW
I = 490 m, < = 1.6 m, pente 90% (3 groupes)
3. Centrale de Chanrion, puissance 11. Bassin de compensation, volume
28'000 kW utile
(1 groupe) 170'000 m3
4. Bassin d'accumulation, volume 12. Galerie d'amenée de l'usine de
utile 180 millions de m3. Surface Riddes,
de la retenue à la cote
I = 14'720 m, < = 3.25 ÷ 3.10 m
1961.5 = 208 ha

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 433

5. Adduction rive droite, I = 6860 m, 13. Chambres d'équilibre


section 4.67 m2
14. 2 conduites forcées, I = 1768 m, <
6. Adduction rive gauche, I = 6560 m, = 1.7 ÷ 1.5 m
section 4.67 m2
15. Centrale de Riddes, puissance
7. Barrage de Mauvoisin, h= 237 m 225'000 kW
(5 groupes)
16. Canal de fuite, I = 1200 m

c) Alimentation d'un réservoir par des bassins versants latéraux


(par gravité ou par pompage)
Il arrive que la topographie d'une centrale est telle qu'elle permet de créer une rete-
nue de grande capacité en tête d'une vallée, mais que le bassin versant naturel ali-
mentant cette retenue est insuffisant pour remplir ce dernier en une année hydrauli-
que moyenne. Dans un tel cas, il convient de chercher à dériver dans la retenue des
eaux prélevées dans des bassins latéraux.
Cette dérivation peut être effectuée par gravité ou par pompage, selon que le niveau
des prises latérales est plus ou moins élevé que celui du plan d'eau de la retenue.
Des bassins de compensation intermédiaires peuvent s'avérer nécessaires. Un
exemple typique d'alimentation d'une retenue par des bassins latéraux est l'aména-
gement de la Grande Dixence, avec des galeries d'adduction d'eau d'une longueur
totale de plus de 120 km (Fig. 10.38).

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


434 Aménagements hydroélectriques

Fig. 10.38: Aménagement de la Grande-Dixence dans le canton du Valais en


Suisse.

d) Prise d'eau et restitution dans deux cours d'eau différents


(transfert de l'eau d'un bassin versant à un autre)
La longueur de la galerie d'amenée permettant d'exploiter une chute de hauteur don-
née peut être nettement réduite en installant une usine et une galerie ou canal de
restitution dans une vallée différente de celle dans laquelle est située la retenue et la
prise d'eau principale.
Les répercussions de ces dérivations de débit d'une vallée dans une autre peuvent
être importantes, en particulier en ce qui concerne l'agriculture. Pour cette raison, les
législations des pays alpins prévoient que le détournement des eaux d'un bassin hy-
drographique dans un autre doit être autorisé par une loi spéciale, et non par un sim-
ple décret (concession) comme les autres cas.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 435

Dans les pays dans lesquels la distribution géographique des précipitations très diffé-
renciée, le transfert d'eau d'un bassin versant avec précipitations abondantes dans
un bassin versant plutôt sec, est souhaitable pour favoriser l'irrigation. De tels amé-
nagements, combinés avec des centrales hydroélectriques, constituent des "aména-
gements à buts multiples". A titre d'exemple, le complexe de Lesotho Hig-
hlands/Afrique du Sud est représenté à la figure 10.39.

Fig. 10.39: Complexe de Lesotho Highlands en Afrique du Sud

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


436 Aménagements hydroélectriques

e) Aménagements en paliers successifs


Lorsque la chute disponible dans un bassin versant dépassait 1500 à 2000 m, elle
était souvent répartie sur deux paliers avec un bassin de compensation entre les
deux bassins. Ce dernier permet le stockage de l'eau turbinée du palier supérieur
pendant quelques heures. Dans certains cas, ce bassin de compensation est alimen-
té par une prise d'eau sur la rivière, augmentant ainsi le débit dérivé dans le palier
inférieur. La plupart des aménagements à haute chute en Suisse sont situés dans
des vallées latérales des grandes rivières comme le Rhône en Valais et le Rhin aux
Grisons. Beaucoup ont été réalisés entre 1950 et 1970 et conçus comme aménage-
ment à deux paliers. Les projets les plus récents, dont l'objectif est l'augmentation de
la puissance dans des aménagements existants, consistent en la construction d'un
nouveau système d'adduction d'eau parallèle à l'ancien en utilisant la chute en un
seul palier. Cette disposition est devenue possible grâce au développement des ma-
chines équipées de turbines Pelton pour hautes chutes et débits importants. Le re-
cord mondial est actuellement détenu par l'aménagement de la Cleuson-Dixence
avec une chute maximale de 1883 m et des turbines Pelton de 400 MW de puis-
sance.

f) Aménagements à retenues multiples


Les aménagement plus complexes sont caractérisés par de plusieurs retenues si-
tuées dans les bassins versants exploités. Souvent, des aménagements de pom-
page et de turbinage-pompage lient les différentes retenues. L'aménagement
d'Oberhasli est un exemple d'aménagement à retenues multiples (Fig. 10.40 et
10.41).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 437

Fig. 10.40: Situation du complexe de l'aménagement d'Oberhasli dans le canton


de Berne en Suisse.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


438 Aménagements hydroélectriques

Fig. 10.41: Schéma de l'aménagement d'Oberhasli

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 439

10.1.7.4 Puissance et production

10.1.7.4.1 Puissance installée

La puissance installée peut être rattachée aux valeurs du débit équipé (ou aménagé)
Qe et de la hauteur de chute nette maximale HN par la relation
Pi = $g g Qe H N

$g désignant le rendement global des machines (turbines et alternateurs)

10.1.7.4.2 Energie productible

La notion d'énergie productible, ou de productibilité caractérise la possibilité de pro-


duction d'un aménagement hydroélectrique pendant une période déterminée:

E= P dt
Période

a) Energie productible en une année d'hydraulicité moyenne Epm


L'énergie productible en une année d'hydraulicité moyenne d'une usine est la quanti-
té maximale d'énergie électrique, mesurée aux bornes de sortie des usines (alterna-
teurs), , que les apports naturels permettent de produire en une année d'hydraulicité
moyenne, dans des conditions d'exploitation idéales. Elle exprimée en kWh ou en
GWh.
L'année d'hydraulicité moyenne est une année fictive définie par une courbe de dé-
bits classés moyenne (le débit moyen journalier Qe du jour considéré est la moyenne
des débits observés ce même jour pendant le plus grand nombre d'années possible).
Les conditions idéales d'exploitation sont les suivantes:
toutes les installations sont en état de marche
la totalité des apports naturels sont utilisés et
toute l'énergie productible est absorbée.

b) Energie productible pendant une année déterminée Ep


C'est la quantité maximale d'énergie électrique que les apports naturels effectifs de
l'année considérée permettent de produire dans des conditions idéales d'exploitation.
Le rapport ip = Ep/Epm est appelé indice de productibilité de l'année considérée pour
la centrale considérée.

c) Energie produite (ou production) Eeff


Pendant une année déterminée, l'énergie effectivement produite Eeff est normale-
ment inférieure à l'énergie productible Ep. La différence Ep – Eeff résulte des causes
énumérées ci-après qui traduisent l'écart entre les conditions d'exploitations idéales
et les conditions d'exploitation réelles:
sujétions d'exploitation (fonctionnement en réserve tournante, fourniture de puis-
sance réactive, réglage de la fréquence, essais),

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


440 Aménagements hydroélectriques

arrêt des groupes (pour permettre l'entretien ou le renouvellement),


impossibilité d'évacuer l'énergie produite (du fait du réseau de transport ou des cen-
tres consommateurs).

10.1.7.4.3 Temps d'utilisation idéal

Le rapport entre la production annuelle (énergie productible Epm ou Ep) et la puis-


sance installée (Pi) est défini comme temps d'utilisation idéal:
Tid = E pm (ou E p ) / Pi [h ]

Les temps d'utilisation idéaux typiques Tid pour des aménagements à haute chute
sont:
aménagement avec bassins de compensation (retenue jour- 4000 à 5000 h
nalière)
aménagement avec stockage partiel (retenue ne permet pas 2000 à 3000 h
le stockage saisonnier complet)
aménagement avec stockage saisonnier complet < 2000 h
aménagement avec réservoir saisonnier et production < 1000 h
concentrée sur les heures de demande de pointe (tendance
actuelle pour des projets d'extension)

10.1.7.4.4 Puissance garantie – Puissance de pointe

La notion de puissance garantie sert à caractériser la participation d'une usine débi-


tant sur un réseau d'interconnexion au passage de la période critique (en Europe
généralement l'hiver); cette notion est liée à la forme particulière des diagrammes de
charge du réseau.
On appelle puissance garantie Pg d'une usine la puissance qu'elle est susceptible de
fournir, à coup sûr, pour contribuer à la satisfaction de la demande pendant cette pé-
riode critique.
Cette puissance dépend, en particulier, du régime du cours d'eau, des possibilités
d'accumulation de la retenue alimentant l'usine et des conditions d'exploitation.
Cette grandeur intervient notamment dans la détermination du coefficient de valeur
d'un aménagement qui sert à classer celui-ci dans un programme d'équipement.
La notion de puissance de pointe Pp d'une usine est définie de façon analogue: c'est
la puissance susceptible d'être débitée par l'usine pour satisfaire à la fourniture de la
puissance de pointe appelée par le réseau consommateur.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 441

10.1.8 Aménagements pompage-turbinage et pompage

10.1.8.1 Caractéristiques et conception


Certaines centrales hydroélectriques sont utilisées pour le pompage de l’eau,
conjointement ou non avec du turbinage.
Les groupes de pompage sont composés de pompes et moteurs. Ils peuvent être
combinés de diverses manières avec des groupes turbines et générateurs (par ex.
alternateur) ; des vannes permettent de passer de l’écoulement amont – aval (turbi-
nage) à l’écoulement aval – amont (pompage).
Pompes et turbines peuvent aussi être combinées dans une seule machine, on parle
de groupes réversibles.
Rappelons que le pompage de grands volumes d’eau dans un bassin situé quelques
centaines de mètres (200 à 500 m) plus haut est jusqu’à aujourd’hui encore le seul
moyen à disposition pour stocker à grande échelle l’énergie électrique. Les aména-
gements à haute chute se prêtent particulièrement bien pour cette opération.
Deux dispositions principales peuvent être distinguées :

• Centrales de pompage et de turbinage séparées (aménagement hydroélectrique avec


pompage) (Fig. 10.42)
• Pompes et turbines combinées dans une seule centrale (aménagement de pompage-
turbinage) ( Fig. 10.43)

Fig. 10.42 : Pompage pour accumulation dans une vallée voisine

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


442 Aménagements hydroélectriques

Fig. 10.43 : Aménagement de pompage-turbinage. Pompage pour stockage tempo-


raire d’énergie

10.1.8.2 Exemples
Aménagements de Vianden (vallée de l’Our, Luxembourg et Allemagne)
L’eau retenue dans l’Our par le barrage de Lohmühle (alt. 220-227 – bassin inférieur)
est pompée dans le bassin artificiel supérieur (alt. 494-510).
Cet aménagement est uniquement destiné à stocker temporairement l’énergie cor-
respondant à l'énergie potentielle de l’eau accumulée dans le bassin supérieur (Fig.
10.44).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 443

Fig. 10.44 : Aménagement de pompage-turbinage de Vianden, Luxembourg

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


444 Aménagements hydroélectriques

Aménagement du Val d’Anniviers (vallée du Rhône, Suisse)


Il s’agit d’un aménagement hydroélectrique comprenant 3 paliers principaux (Fig.
10.45) :
accumulation de Moiry (D), avec turbinage à Motec (A) ; chute brute
de 685 m.
chute Motec (A) – Vissoie (B) ; chute brute de 439 m.
chute Vissoie (B) – Chippis (C) ; chute brute de 590 m.
L’eau captée dans la vallée voisine de Tourtemagne (E) est turbinée à Motec (A),
sous une chute brute de 613 m. Cette eau peut également être refoulée par pom-
page, à travers la centrale de Motec, de la vallée de Tourtemagne (alt. 2177) dans
l’accumulation de Moiry (alt. 2249). En outre l’eau de la Navisance, captée à Motec
(A) (alt. 1564), est également pompée dans l'accumulation de Moiry (alt. 2249).
Le pompage permet ainsi une meilleure utilisation des eaux de la Tourtemagne et de
la Navisance par stockage dans la retenue de Moiry. On notera que les divers paliers
ont des adductions en charge, à l’exception de la galerie du palier inférieur, partant
de Vissoie, qui est à écoulement libre (construction plus ancienne, tracé en tunnel au
voisinage de la surface).

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 445

Fig. 10.45 : Aménagement du Val d’Anniviers avec pompage (canton du Valais,


Suisse)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


446 Aménagements hydroélectriques

10.1.8.3 Principe de l’accumulation par pompage


A la différence des aménagements hydroélectriques gravitaires, les centrales de
pompage n’exploitent pas une ressource naturelle. Elles n’apportent pas d’énergie,
mais en assurent un simple transfert dans le temps au prix d’une certaine perte.
Le principe d’utilisation des centrales de pompage consiste à échanger une même
eau entre deux bassins de même contenance situés à des altitudes différentes.
L’eau du bassin inférieur est pompée dans le bassin supérieur pendant les heures
creuses de la consommation, la nuit en particulier, et elle est déstockée du bassin
supérieur dans le bassin inférieur pendant les heures de pointe de consommation.
Le rendement global de l'opération pompage-turbinage dans le cas d’un groupe tur-
bine-pompe réversible est d’environ 70 %. Il faut consommer à peu près 1,4 kWh
pour fournir 1 kWh.
Le bilan économique est favorable malgré les pertes, car la valeur du kWh produit
est supérieure à celle du kWh consommé en raison de la différence de tarif entre les
heures auxquelles ces énergies sont produites respectivement consommées.
Le pompage et le turbinage sont assurés par des groupes pompes-turbines ou des
groupes réversibles. On évite ainsi un suréquipement par l’installation d’une usine
thermique équivalente dont le coût peut être nettement plus élevé que celui de
l’équipement de pompage.
Certains pays (le Japon par exemple) étudient la possibilité d’utiliser la mer comme
réservoir inférieur. Cette solution est particulièrement onéreuse en raison des carac-
téristiques physico-chimiques de l'eau de mer.

10.1.8.4 Disposition des aménagements de pompage–turbinage


Normalement les aménagements de pompage–turbinage proprement dits sont des
aménagements sans apports d’eau d’un bassin versant. Le même volume d’eau est
simplement pompé et turbiné alternativement entre deux bassins. Les pertes d’eau et
l’évaporation sont compensées par une rivière proche qui sert également pour le
premier remplissage.
Les conceptions suivantes peuvent être distinguées :
• disposition avec deux bassins artificiels (supérieur et inférieur) (Fig. 10.46)
• disposition avec bassin supérieur artificiel et bassin inférieur naturel (lac ou retenue d’un
aménagement au fil de l’eau) (Fig. 10.47)
• disposition avec basin supérieur naturel et bassin inférieur artificiel (par exemple réservoir
en caverne) (Fig. 10.48)

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 447

Bassin supérieure (artificiel)

Bassin inférieure
Puits en
charge (retenue artificielle)

Galerie de
fuite
Fig. 10.46 : Disposition avec deux bassins artificiels (supérieur et inférieur)

Bassin supérieure (artificiel)

Puits en
charge

Lac naturel

Galerie de

fuite

Fig. 10.47 : Disposition avec bassin supérieur artificiel et bassin inférieur naturel (lac
ou retenue d’un aménagement au fil de l’eau)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


448 Aménagements hydroélectriques

Lac natu-

Puits en Bassin inférieure


en caverne


Fig. 10.48 : Disposition avec basin supérieur naturel et bassin inférieur artificiel (par
exemple réservoir en caverne)

10.1.8.5 Classification des aménagements de pompage–turbinage et modes


d’exploitation
On distingue quatre grandes catégories selon la capacité des réservoirs :
• a) le pompage pur à accumulation journalière
Il nécessite 7 à 10 h de pompage par jour ouvrable pour un temps de production à
pleine charge de 4 à 6 h.
• b) le pompage pur à accumulation hebdomadaire
Il demande 25 à 60 h de pompage en fin de semaine généralement en plus des 7 à
10 h de pompage par jour, pour une production journalière à pleine charge de 7 à
12h.
• c) le pompage associé à une retenue saisonnière
L’usine de pompage peut temporairement "emprunter" de l'eau au réservoir saison-
nier qui lui est associé et réaliser ainsi, au total, dans l'année, une compensation
hebdomadaire des aléas.
• d) le pompage saisonnier
Tout en bénéficiant du même effet de compensation d'une semaine à l'autre, ce type
d'usines peut offrir un surcroît de production journalière de 2 à 3 h, modulable sur
tout l'hiver grâce au remplissage du réservoir en été, par pompage d'apports disponi-
bles au niveau inférieur.
Pour les modes d'exploitation on distingue par conséquent :
• mode journalier
• mode hebdomadaire
• mode week-end
• mode de réserve

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 449

Le mode journalier nécessite le réservoir le plus petit, le mode week-end le plus


grand. Le mode de réserve est conditionné par l'arrêt d'un autre aménagement de
production d'électricité et un grand réservoir est normalement nécessaire.
Mode journalier :
Le bassin supérieur est plein le matin et son volume est ainsi turbiné (pleine puis-
sance idéalisée des turbines pendant 4 à 6 heures). Pendant la nuit le bassin est
rempli jusqu'au lendemain matin (pleine puissance idéalisée des pompes pendant 7
à 10 heures).

Turbinage
Volume accumulation supérieure [Mio
3
lu ma me jeu v s di
Plein Plein

Vide Vide
h

Pompage

Fig. 10.49 : Exemple d'exploitation selon un mode journalier

Mode hebdomadaire :
Le mode de pompage pendant la nuit des jours ouvrables (7 à 12 heures) est combi-
né avec le pompage pendant le week-end (25 à 30 heures) de sorte que le bassin
supérieur soit vide vendredi soir et re-rempli lundi matin.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


450 Aménagements hydroélectriques

Volume accumulation supérieur [Mio m3]


lu ma me jeu v s di
Plein Plein

Vide Vide
Pompage h

Turbinage

Fig. 10.50 : Exemple d'exploitation selon un mode hebdomadaire

Mode week-end
Le pompage de l'eau dans le bassin supérieur n'a lieu que pendant le week-end (en-
viron 60 heures du vendredi soir au lundi matin).
Volume accumulation supérieur [Mio
3
lu ma me jeu v s di
Plein Plein

Vide Vide
h
Pompage
h

Turbinage
Fig. 10.51 : Exemple d'exploitation selon un mode week-end

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 451

Mode de réserve
En cas d'arrêt imprévu d'une centrale de production d'électricité, l'aménagement de
pompage–turbinage doit palier à cette défaillance jusqu'à ce que, par exemple, une
ancienne centrale thermique ait démarré. Cette opération peut durer une à deux se-
maines, le volume nécessaire du bassin supérieure devient donc considérable.
A l'inverse, l'aménagement de pompage-turbinage peut être appelé à absorber très
rapidement l'énergie produite par une centrale thermique (nucléaire par exemple) en
cas de défaillance soudaine du réseau de transport (rupture de ligne haute tension),
jusqu'à l'arrêt de la centrale thermique.

10.1.8.6 Avantages du pompage


Les centrales hydroélectriques de pompage, qui constituent en quelque sorte un pro-
longement et un relais des centrales gravitaires, présentent les avantages suivants :
Modulation de la production d'énergie
La base du diagramme journalier de charge (fig. 10.52) ou de la monotone annuelle
de charge (ou courbe des charges classées) (fig. 10.53)1 est assurée par les usines
au fil de l'eau et par les équipements thermiques "lourds"2 (centrales au charbon, au
fuel, nucléaire) qui se prêtent mal aux variations de puissance. Comme la consom-
mation électrique est essentiellement variable, et que l'énergie électrique ne peut
être stockée, il faut à tout instant ajuster la production à cette consommation en vue
de maintenir la qualité du produit livré (tension, fréquence).
Cette fonction de réglage est assurée normalement par le thermique "léger" (diesel et
turbines à gaz) et surtout par les centrales hydrauliques alimentées par une retenue
(usines d'éclusées = stockage journalier ou hebdomadaire et de lacs = stockage sai-
sonnier).

Mais la puissance unitaire des groupes diesel et des turbines à gaz étant relative-
ment faible et les sites hydrauliques classiques pratiquement épuisés en Europe, les
installations de transfert d'énergie par pompage ont désormais un rôle à jouer dans
cet effet de modulation.

Régulation de la production
Les équipements de production "lourds" sont conçus pour un fonctionnement continu
à puissance pratiquement constante ; en utilisant l'énergie disponible en heures
creuses, les centrales de pompage favorisent donc ce régime de marche et contri-

1
La monotone annuelle de charge (ou la courbe des charges classées) s'obtient en découpant cha-
cune des courbes de charge journalières en fines aiguilles verticales de même largeur et en les
rangeant, pour toute l'année par rang de taille décroissant, à partir de la gauche. Chaque point de
la courbe ainsi tracée, exprime que, pendant t (heures), la puissance appelée, pendant l'année
considérée, a été au moins égale à P (GW)

2
Juste au-dessus des usines au fil de l'eau se placent les centrales thermiques de base qui consom-
ment des combustibles. On commence par "empiler", de bas en haut, les centrales les plus éco-
nomiques, c'est-à-dire dans l'ordre, les tranches nucléaires, les tranches thermiques classiques les
plus récentes, qui ont le meilleur rendement, puis le thermique ancien.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


452 Aménagements hydroélectriques

buent à régulariser la production.

Le pompage permet ainsi d'améliorer l'utilisation de la puissance disponible des cen-


trales thermiques. Cet effet de régularisation est particulièrement intéressant lors-
qu'on réalise des unités nucléaires de grande puissance, dès que ces centrales ne
sont plus utilisées à la base de la monotone annuelle et présentent des disponibilités
à bas coût proportionnel (Fig. 10.53).
Sécurité et réglage du réseau
La souplesse de fonctionnement constitue l'avantage principal des groupes hydroé-
lectriques. S'ils se trouvent à l'arrêt, ils peuvent, à la demande, atteindre la charge
maximale en quelques minutes ; s'ils sont couplés au réseau, cette puissance est
atteinte en quelques dizaines de secondes.
Implantation
Les stations de pompage, qui ne sont pas soumises aux aléas de l'hydraulicité puis-
qu'elles utilisent toujours le même volume d'eau, peuvent être implantées près des
centres de consommation – dans la mesure où la géographie, la topographie et la
géologie le permettent – souvent dans des régions dépourvues d'équipements hy-
drauliques classiques.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 453

Fig. 10.52 : Courbe de charge du réseau français avec la puissances cumulées


(mercredi 17 décembre 1975)
1 Centrales hydroélectriques au fil de l'eau, 2 et 3 Centrales ther-
miques,
4 Aménagements au fil de l'eau avec stockage journalier, 5 Amé-
nagement à accumulation saisonnière

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


454 Aménagements hydroélectriques

Fig. 10.53 : Monotone de charge d'un réseau (courbe des charges classées) (Exem-
ple de la France)

10.1.8.7 Rendement du pompage-turbinage et de l'aménagement


Rendement du stockage d'énergie :
)H T
$ aménagement =
ET
EP
H
= T
H P + )H P
$ $
T P

avec
EP = énergie nécessaire pour pomper 1 m3 d'eau
ET = énergie produite par turbinage d'1 m3 d'eau
H = chute brute
)H = pertes de charge
$ = coefficient de rendement
Indices : T pour turbinage
P pour pompage
Remarque : pour un aménagement de pompage-turbinage (fig. 10.43), HT = HP
Le rendement de l'aménagement est fortement influencé par le rapport, la durée et la
longueur des conduites charge (Fig. 10.54)

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 455

Vo

vo

Lo
Vu

vu
Lu
L

Fig. 10.54 : Définitions géométriques d'un aménagement pompage-turbinage

Calcul approximatif :
Pertes de charge dans le puit en charge :
2 2
)H , Lo co vo H co vo

Pertes de charge dans la galerie de fuite :


2 2
)H , Lu cu vu L cu vu
avec C : coefficient de frottement
o = indice pour amont
u = indice pour aval
2 2

$ aménagement =
H H co voT
2
L cu vuT
2
$T $ P
H + H co voP + L cu vuP

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


456 Aménagements hydroélectriques

H 2 2
(1 co voT ) cu vuT
$aménagement = L $T $P
H 2 2
(1 + co voP ) cu vuP
L

Coefficients de rendement typiques


$ aménagement
Rendement de l’aménagement

H
J=
L
Pente 1

Valeurs maximales groupes à trois piè- groupes réversibles


ces
- mode turbinage $ T
0,92 0,91

$ T .$ G 0,89 0,87

- mode pompage $ P
0,90 0,89
$ P .$ M
0,86 0,84

10.1.8.8 Valeurs
moyen-
nes
- mode turbinage $ T .$ G
0,87 0,85

- mode pompage $ P .$ M
0,84 0,82

indices : T = turbine, G = générateur, P = pompe, M = moteur


Rendements des transformateurs : $transfo = 0.99

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 457

10.2 Aménagement systématique d'un cours d'eau avec


des centrales hydroélectriques

flancs de la vallée
Talweg

aménagement à accumulation aménagement au fil de l‘eau

haute chute > 200 m moyenne chute basse chute <40 m

Figure 10.16: Aménagement systématique d'un cours d'eau avec des centrales
hydroélectriques

Si un cours d'eau est systématiquement aménagé avec des centrales hydroélectri-


ques, les caractéristiques suivantes peuvent être notées:
• les aménagements situés dans la partie supérieure du bassin versant (Al-
pes) sont des aménagements à haute chute (sans ou avec dérivation de
l'eau), souvent combinés avec des retenues;
• ils sont suivis par les aménagements au fil de l'eau à haute chute;
• dans la partie du bassin versant à moyenne altitude (Pré-Alpes) des amé-
nagements à chute moyenne au fil de l'eau sont installés (sans ou avec dé-
rivation de l'eau);
• dans la partie aval du bassin versant, les aménagements à basse chute
sont prédominants.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


458 Aménagements hydroélectriques

10.3 Eléments essentiels d'un aménagement hydroélec-


trique
Les éléments essentiels d'un aménagement hydroélectrique sont présentés à l'aide
d'un aménagement à accumulation à haute chute avec dérivation de l'eau ci-après
(solution la plus utilisée dans les Alpes).

Figure 10.17: Eléments essentiels d'un aménagement à haute chute

Les éléments essentiels d'un aménagement à haute chute sont les suivants:
• prise d'eau (en rivière)
• galerie d'adduction
• réservoir/retenue
• prise d'eau en lac (usinière)
• barrage
• galerie d'amenée
• éventuellement avec prises d'eau intermédiaires et dessableurs
• chambre d'équilibre
• conduite forcée ou puits blindé
• centrale (à l'air libre ou souterraine)
• canal de fuite ou galerie de fuite

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 459

• vannes de réglage et de secours (vannes papillon et sphériques).

10.4 Méthodes d'évaluation du potentiel hydroélectrique


10.4.1 Principe physique de la force hydraulique
L'utilisation de la force hydraulique de l'eau constitue le principal objectif des aména-
gements hydroélectriques. En premier lieu il s'agit de transformer l'énergie hydrauli-
que en énergie électrique.
L'énergie hydraulique potentielle d'un tronçon d'un cours d'eau naturel est fonction de
la chute brute et du débit.

v o2
2g
HB (chute brute)

hauteur de charge
v u2
Puissance brute
Q ( 2g hydraulique
zo = Ho + ho

B dé
bit brut
)
PB = ·g ·QB · HB
Zu = Hu + hu
Tronçon d'exploitation

o u
2
v v2
zo + o
= zu + u + HB
{ 2g 2g
Bernoulli: Energie {
potentiell e Energie
cinétique

v2 v2
g QB z o + 0 g QB zu + u = g QB HB
Conservation de l'énergie: 2g 2g 142
4 43 4
14442444 3 14442444 3 PB
PO Pu

Figure 10.18: Principe de la force hydraulique

Selon l'équation de Bernoulli, la chute brute est égale aux pertes de frottement dans
le tronçon considéré. (cf. Figure 10.9). Si la vitesse d'écoulement reste presque
constante (vo = vu) dans le tronçon, la chute brute est égale à la différence entre le
niveau d'eau amont et aval.
Avec le principe de la conservation de l'énergie, la valeur qui peut être obtenue pour
la puissance hydraulique dans un tronçon se calcule avec la formule
PB = g QB HB
Dans un cours d'eau naturel, cette puissance est amortie par les pertes de charge
(frottement, pertes locales) c'est-à-dire par la transformation en chaleur.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


460 Aménagements hydroélectriques

10.4.2 Méthodes d'évaluation du potentiel


Pour une exploitation efficace et économique de la force hydraulique, une bonne
connaissance de sa distribution dans l'espace et dans le temps est indispensable.
Seulement cette connaissance permet de trouver la conception optimale d'un amé-
nagement. Les aspects environnementaux doivent être identifiés et pris en considé-
ration dès le début de la conception de l'aménagement.
Trois méthodes utilisées pour évaluer le potentiel sont présentées ci-après.

10.4.2.1 Potentiel de surface


Cette méthode conduit à une estimation soit du potentiel de la puissance moyenne
Pm, soit du potentiel de l'énergie E produite pour une surface donnée (cf. Figure
10.19).

P = puissance moyenne annuelle


E = potentiel d‘énergie
moyenne annuelle

Pi = g hPi A i )hi
A tot
Ptot = g hPi A i )hi
0

E tot = Ptot T
)hi hP i = moyenne annuelle
de la hauteur de pluie
A i = surface unitaire
)h i = différence de niveau par
rapport au niveau de l‘exutoire
du bassin versant
A tot = surface totale du bassin versant

Figure 10.19: Potentiel de surface

En principe, l'énergie potentielle de la pluie nette (moyenne annuelle) tombée sur


une surface unitaire Ai doit être évaluée par rapport au niveau de l'exutoire du bassin
versant. La somme des contributions de toutes les surfaces unitaires sur la totalité du
bassin versant donne la puissance ou l'énergie totale.
Avec cette méthode les potentiels sont évalués uniquement sur la base des condi-
tions topographiques et hydrologiques. La méthode fournit alors une limite supé-
rieure du potentiel théoriquement exploitable, connue également sous le nom du po-
tentiel théorique (gross theoretical hydropower potential).
Les informations hydrologiques concernent normalement les précipitations moyen-
nes annuelles. Il est également possible de tenir compte des pertes d'eau dues à
l'évaporation et à l'infiltration (si connues). Dans ce cas, il s'agit des précipitations
nettes.
La chute brute )hi de l'eau de la surface Ai considérée est définie par rapport à un
point défini au préalable, habituellement l'exutoire du bassin versant.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 461

10.4.2.2 Potentiel linéaire


Cette méthode fournit le potentiel théorique le long des cours d'eau en supposant
que tous les cours d'eau à partir d'une certaine taille sont entièrement exploités dans
un bassin versant considéré (cf. Figure 10.20). Ce but est atteint par une chaîne hy-
pothétique d'aménagements successifs au fil de l'eau.
Le potentiel linéaire ainsi obtenu est inférieur au potentiel de surface mais supérieur
au potentiel techniquement exploitable.
Puissance moyenne (d‘un tronçon)
Pm = g Qm )hi [W]

Potentiel d‘énergie (d‘un tronçon)


g VN )hi
E tot = [Wh]
3600
= densité de l‘eau [1000 kg/m3]
)hi g = 9.81 m/s2
Qm = débit moyen annuel du tronçon
considéré
Qm i )hi = charge totale entre le début
et la fin du tronçon
VN = volume d‘eau utilisable d‘un tronçon

Figure 10.20: Potentiel linéaire

Pour chaque tronçon de rivière ainsi choisi, le débit et la pente doivent être plus ou
moins constants.
Le potentiel de puissance moyenne Pm et le potentiel d'énergie E se calculent de
manière suivante pour chaque tronçon:
Pm = g Qm )hi [W]
E= g VN )hi / 3600 [Wh]
Le volume utilisable VN d'un tronçon (pendant une année) est obtenu à l'aide de la
courbe des débits classés en considérant
• le débit équipé
• le débit restitué.
Les potentiels linéaires sont souvent graphiquement représentés par des bandes ou
cercles. Ainsi peuvent facilement être détectés les tronçons les plus favorables à la
construction d'un aménagement hydroélectrique.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


462 Aménagements hydroélectriques

potentiel proportionnel
1 GWh E
au diamètre ou surface du cercle

Figure 10.21: Représentation graphique des potentiels hydrauliques

10.4.2.3 Potentiel utilisable (ou techniquement réalisable)


Les premières deux méthodes fournissent des valeurs théoriques du potentiel exploi-
table. Le potentiel pratiquement utilisable est bien inférieur. Pour l'obtenir, la concep-
tion préliminaire des aménagements est indispensable.
Cette approche nécessite alors un ou plusieurs projet(s) préliminaire(s) basé(s) sur
les informations concernant
• l'hydrologie
• la topographie
• la géologie
• les pertes de charge
• les coûts de l'aménagement.
L'étude doit démontrer la faisabilité technique et économique de l'aménagement et
permettre une analyse de l'impact sur l'environnement.
Selon les étapes des études, la distinction est faite entre:
• le potentiel techniquement utilisable
• le potentiel économiquement utilisable
• le potentiel écologiquement réalisable.
L'évaluation du potentiel, basée sur des projets d'aménagement concrets, permet de
tenir compte des pertes inévitables d'énergie.
La puissance brute du tronçon est égale à:
PB = g QB HB
La puissance nette de l'aménagement devient:
P= g QN HN $
avec: QN: débit net QN = QB – QR

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 463

QR: débit restitué


HN: chute nette
$: coefficient de rendement de l'équipement électromécani-
que (généralement 90 – 95%)
La puissance perdue est égale à la différence entre la puissance brute et la puis-
sance nette:
PV = PB - P
Cette puissance perdue se compose de pertes:
• dues à l'eau non utilisée:
PV1 = g QR HB
• de charge dans le système d'adduction d'eau
PV2 = g QN h V
• dans les turbines, alternateurs, transformateurs
PV3 = g QN HN (1 – $)

1. Puissance brute du tronçon: PB = ·g ·Q B ·HB


H
2. Puissance nette de l'aménagement: P = ·g ·QN · HN · $
3. Puissance perdue: PV = PB – P HB
PV = ·g (QN · HN – QN·HN· $)
hV
avec: QB = QN + QR; HB = HN +hV PV2
PV = g [QR HB + QN hV + QN HN ( 1 $ )]
PV1
avec: PV1 = ·g·QR ·HB = Pertes dues à l'eau non
QB
utilisée (QR = débit restitué) HN
PV2 = ·g·QN ·hV = Pertes de charge dans le Puissance nette PV3
système d'adduction d'eau
(canaux, galeries,
puits, conduites) Q
PV3 = ·g·QN ·HN (1- $) = Pertes dans les turbines, QR
alternateurs, transformateurs
QN

Figure 10.22: Puissance nette d'un aménagement

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


464 Aménagements hydroélectriques

HB
)h
HNN

Figure 10.23: Représentation schématique du potentiel utilisable

10.4.2.4 Exemples

3'600

775
535
1'000
740 727

1'000
68
1'600

496
105
41

Potentiel économiquement Potentiel réalisé


réa lisable (en TWh) (en TWh)

Figure 10.24: Potentiel hydroélectrique économiquement réalisable et déjà exploité


dans le monde (1999)

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Aménagements hydroélectriques 465

Suisse Brésil
Potentiel théorique selon la méthode de surface
144'000 GWh/a 3'020'400 GWh/a
(Gross theoretical hydropower potential)
Potentiel techniquement utilisable (selon 2.2.3) 41'000 GWh/a 1'300'000 GWh/a
(Technically feasible) (100%) (100%)
Potentiel économiquement réalisable (1999)
37'000 GWh/a 763'500 GWh/a
(Economically feasible)
34'000 GWh/a 266'000 GWh/a
Potentiel exploité (1999)
(83%) (20%)

Tableau 10.1: Potentiel hydroélectrique en Suisse et au Brésil

10.5 Critères d'évaluation d'un aménagement hydroélec-


trique

Financement Technique Economie

Faisabilité

Politique Société Environnement

Techniquement réalisable?
Projet d'un aménagement
Economiquement justifiable?
hydroélectrique
Ecologiquement défendable?

Figure 10.25: Critères d'évaluation d'un aménagement

En général, les critères d'évaluation d'un aménagement sont les suivants:


• TECHNIQUE: Est-ce que les objectifs purement techniques peuvent être at-
teints par un aménagement?
• ECONOMIE: Est-ce que les bénéfices en cas de réalisation d'un aména-
gement sont supérieurs à ceux en cas de renoncement au projet?

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


466 Aménagements hydroélectriques

• FINANCEMENT: Est-ce que les moyens financiers sont suffisants (pendant


la construction d'un aménagement et lors de son exploitation)?
• POLITIQUE: Est-ce que le projet est soutenu par les instances politiques?
• SOCIETE: Est-ce que les utilisateurs potentiels peuvent tirer profit de ce
projet?
• ENVIRONNEMENT: Est-ce que l'impact du projet sur l'environnement est
défendable/supportable?
La faisabilité d'un aménagement résulte certainement du résultat de l'étude de ces
critères.
Les contre-indications à la réalisation d'un aménagement hydroélectrique peuvent
être écartées en étudiant si le projet est:
• techniquement réalisable
• économiquement justifiable
• écologiquement défendable.
Commentaires:
• les conditions physiques du site doivent être telles que la réalisation des
ouvrages, avec des moyens techniques à disposition, soit possible et les
objectifs prévus soient atteints
• les coûts de réalisation, d'exploitation et d'entretien doivent être en rapport
avec le gain provenant de la production
• l'atteinte au milieu naturel doit être compatible au gain réalisé.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 467

11 RETENUES ET BARRAGES

11.1 Rôle des réservoirs


Les réservoirs créés par un barrage sont parmi les ouvrages les plus importants et
les plus grands réalisés par l'homme dans le domaine de constructions (cf. Chapitre
1.2). Par la création d'un réservoir artificiel, l'homme influence de manière prépondé-
rante l'écoulement naturel de ruissellement. Quatre raisons principales peuvent justi-
fier cette intervention:
1. La création d'une retenue
selon le volume utile de la retenue et le débit des apports, les accumulations
peuvent être journalières, hebdomadaires, saisonnières ou inter-saisonniè-
res.
2. La régulation des apports
dans la plupart des régions du monde, les précipitations sont concentrées
sur des périodes courtes. Souvent, ces apports sont très irréguliers d'une
année à l'autre, tandis que les besoins en eau sont répartis de manière
beaucoup plus homogène sur l'année, ce qui résulte en une succession de
périodes de pénurie et d'excès. Le seul moyen d'équilibrer l'offre et la de-
mande est la réalisation d'une retenue.
3. La surélévation du plan d'eau d'une rivière
la mise en place d'un barrage en travers d'un cours d'eau a pour effet de su-
rélever le plan d'eau à l'amont. Cet effet est bien entendu exploité pour la
production hydroélectrique mais également pour gérer la dérivation des eaux
d'une rivière vers une prise d'eau puis vers un canal d'amenée qui, à son
tour, sera utilisé pour l'irrigation ou l'alimentation en eau.
4. La création d'un plan d'eau
c'est-à-dire la création d'un lac artificiel pour les loisirs, le tourisme, la pisci-
culture, la navigation, etc.

11.2 Fonction des réservoirs


Avec un réservoir artificiel, le bilan d'eau peut être modifié localement dans un bassin
versant. Le débit est ainsi influencé et réglé à deux fins: l'utilisation de l'eau ou la pro-
tection contre l'eau. Les retenues protègent la population non seulement de l'ex-
cédent d'eau mais également préviennent les pénuries (Figure 11.1, à droite).
Un excédent d'eau provoque des crues et par conséquent des inondations et l'éro-
sion du sol. Une pénurie porte préjudice à l'agronomie et conduit à un manque d'eau
potable. Elle a également des effets néfastes sur le microclimat. De l'autre côté, l'eau
accumulée dans le réservoir peut être utilisée pour la production d'énergie hydrauli-
que, l'irrigation ou le transport (navigation) (Figure 11.1, à gauche). Le transport flu-
vial est rendu possible par la régulation du débit des cours d'eau à l'aval du réservoir.
La plupart des réservoirs dans le monde servent en même temps à l'irrigation et à la
production d'énergie. La présence d'un réservoir ou d'un lac artificiel prédestine le
site au tourisme, loisirs, pisciculture qui, après quelques aménagements, peuvent
également en tirer profit.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


468 Retenues et barrages

Réservoirs

Utilisation Protection

Excédent d'eau Pénurie d'eau


Hydroélectricité
(énergie)

Crues Eau potable

Irrigation
(alimentation) Inondations Agriculture

Loisirs Erosions Microclimat


Tourisme
Pisciculture

Figure 11.1: Fonctions des réservoirs

De nos jours dans le monde, presque 45'000 barrages (> 15 m) créent des retenues
dont le volume total est de 6'000 km3 dont 3'600 km3 sont directement utilisés pour la
régulation des apports. Pour comparaison, le volume global stocké dans tous les
cours d'eau dans le monde est de l'ordre de 1'000 à 2'000 km3. Par conséquent, les
réservoirs artificiels jouent un rôle important dans l'approvisionnement en eau visant
à satisfaire les besoins vitaux de l'homme en énergie-nourriture-eau-transport.
La Figure 11.2 met en évidence la variabilité des précipitations dans le monde. Dans
les pays subtropicaux et arides, les pluies sont concentrées sur des périodes très
courtes. La réalisation de retenues dans ces pays est la seule voie pour développer
l'irrigation et par conséquent l'agriculture.

Précipitations en mm
Moyenne annuelle Mois le plus sec Mois le plus humide
Marrakech, Maroc 253 5 40
Beyrouth, Liban 893 0 190
Zanzibar, Tanzanie 1486 35 335
Calicut, Inde 3085 10 830
Cherrapanji, Inde 10824 10 2560

Figure 11.2: Répartition temporelle des précipitations dans le monde

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 469

Dans les régions alpines, les débits des cours d'eau sont les plus élevés durant les
mois d'été. Ce fait est dû à la répartition des précipitations sur l'année et surtout à la
fonte des neiges. Par contre, la consommation d'énergie électrique est plus impor-
tante en hiver. En été, pour pallier ce décalage dans le temps, les grands barrages
alpins accumulent l'eau dans des retenues d'altitude. Le potentiel énergétique de
cette eau est utilisé pour produire de l'électricité. Ce mode d'exploitation des rete-
nues correspond typiquement à une accumulation saisonnière.
En résumant, les réservoirs peuvent être classés selon leur affectation principale et
notamment par:
• production d'énergie électrique,
• approvisionnement en eau potable et industrielle,
• irrigation,
• protection contre les crues (inondation, érosion),
• soutien d'étiage (garantie d'un débit minimal),
• pêche, pisciculture (élément économique essentiel pour certains pays),
• navigation fluviale (garantie d'un tirant d'eau minimal),
• loisirs et tourisme.
Il convient toutefois de noter que pour la plupart de ces cas, les affectations sont
combinées et de ce fait ces réservoirs sont appelés des aménagements à buts multi-
ples.

11.3 Critères généraux du choix de l'aménagement d'un


réservoir
11.3.1 Critères du point de vue de l'économie des eaux
L'emplacement d'un réservoir dans un grand bassin versant dépend avant tout de sa
destination du point de vue de l'économie des eaux.
a) Réservoir pour la production d'énergie électrique
Un réservoir d'un aménagement hydroélectrique est principalement un réservoir
énergétique.
Son contenu en énergie E se calcule par le produit de la densité de l'eau , l'accélé-
ration gravitationnelle g, le volume utile de la retenue S et la chute utilisable H:
E= g S H
Afin de trouver l'emplacement optimal d'un réservoir énergétique dans un bassin ver-
sant donné, il faut tout d'abord constater que l'énergie électrique peut être transpor-
tée avec des coûts relativement modérés et des pertes insignifiantes de la centrale
au centre de consommation. Le critère de distance de transport peut donc être né-
gligé lors du choix préliminaire de l'emplacement d'un réservoir. Le produit S H est
influencé surtout par des conditions morphologiques et hydrologiques d'un cours
d'eau. Par exemple, un réservoir destiné à stocker 80% des apports d'été pour les
transférer en hiver, doit avoir un volume utile correspondant à 80% des apports en
été. (Vischer, 1977)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


470 Retenues et barrages

L'apport en été augmente le long d'un bassin versant, de haut en bas (cf. Figure
11.3). Par contre, la chute utile se réduit pour des raisons topographiques.

S1

"Talweg" S2
du cours d'eau H1

niveau de référence H2

exutoire
du bassin versant

Figure 11.3: Emplacement schématique d'un réservoir le long d'un cours d'eau

En admettant que toute l'eau stockée le long du tronçon considéré peut être utilisée,
le produit SiHi peut être calculé pour tous les sites possibles de réservoirs. En prin-
cipe, il existe un site où ce produit est maximal, c'est-à-dire optimal pour l'emplace-
ment d'un réservoir. A part ces critères topographiques et hydrologiques, les condi-
tions géologiques et démographiques jouent également un rôle déterminant.
b) Réservoir de maîtrise des crues
Un réservoir de maîtrise de crues doit contrôler ou limiter le débit vers l'aval dans une
zone d'inondations potentielles. Cette tâche peut être accomplie de la manière la
plus optimale si le réservoir est situé juste à l'amont de la zone d'inondations poten-
tielles ce qui lui permet de retenir le plus grand volume d'une crue.
La Figure 11.4 montre l'exemple d'un bassin versant idéalisé avec quatre sites des
réservoirs de rétention. Si tous ces réservoirs sont dimensionnés pour un volume qui
correspond à 30% du volume total de l'hydrogramme de crue, l'effet de laminage
peut être obtenu comme indiqué à la Figure 11.5. Dans l'axe vertical, l'effet de lami-
nage est caractérisé par le rapport de la pointe maximale de la crue laminée à la sor-
tie du réservoir et la pointe maximale naturelle à l'entrée. L'axe horizontal représente
la partie du bassin versant qui est influencée par le réservoir (Vischer, 1977)
En fonction de la partie du bassin versant contrôlée, l'effet de laminage d'un réservoir
de rétention peut être caractérisé par un exemple idéalisé suivant (Figure 11.4 et
Figure 11.5).
• L'effet de laminage augmente en fonction du rapprochement du réservoir de
la zone d'inondation. Toutefois, si le débit de sortie n'est pas contrôlé par
une vanne de réglage, le site optimal se trouve un peu à l'amont (selon
l'exemple à 80%).
• L'effet de laminage dans un réservoir contrôlé est amélioré, comparé à celui
du bassin versant non contrôlé, si la partie du bassin versant contrôlé est

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 471

plus grande qu'une certaine limite (dans l'exemple de la Figure 11.5, la li-
mite est fixée à 80%).
• Si la partie contrôlée du bassin versant est plus petite que cette limite (dans
l'exemple la limite est de 80%), il n'y a presque pas de différence entre l'ef-
fet de laminage d'un réservoir contrôlé et celui du bassin non contrôlé.

zone d'inondation

Figure 11.4: Basin versant schématisé avec l'emplacement des réservoirs de ré-
tention (Vischer, 1977)

Figure 11.5: Effet de laminage d'un réservoir de rétention en fonction de la partie


du bassin versant contrôlée (cf. Figure 11.4)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


472 Retenues et barrages

11.3.2 Critères du point de vue de la morphologie du réservoir


Les réservoirs se caractérisent par la relation volume-niveau d'eau. Il s'agit d'une
relation typique pour une forme donnée d'un réservoir. Cette relation peut être décrite
en bonne approximation par une fonction exponentielle
S = a hm
où a et m sont des coefficients constants qui peuvent être considérés comme para-
mètres morphologiques d'un réservoir.
L'exposant m est par la suite analysé pour quelques formes idéalisées des réservoirs
avec quatre coupes longitudinales et transversales (Figure 11.6). Toutes les combi-
naisons donnent 16 formes idéalisées.

Coupes Coupes à
le long de travers la
la vallée vallée

Figure 11.6: Formes idéalisées des réservoirs pour 4 coupes longitudinales et


transversales différentes, (Vischer, 1977)

La surface de la section longitudinale ressort d'une fonction du type


Al = C h l
et la surface de la section transversale du type
Aq = C h q
C, l et q sont toujours de nouveaux coefficients constants.
L'exposant m de la courbe volumétrique du réservoir est une combinaison
de l et q:
m=l+q-1
Cette relation est correcte pour les formes de la vallée obtenues par les combinai-
sons marquées en gras à la tabelle suivante. Pour les autres combinaisons, la rela-
tion ci-dessus n'est qu'approximative.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 473

Coupes le long de la vallée


Coupes à travers la vallée
I II III IV
1 1 1.5 2 2.5
2 1.5 2 2.5 3
3 2 2.5 3 3.5
4 2.5 3 3.5 4

Tableau 10.1: Exposant m pour des formes idéalisées des réservoirs (1 à 4 et I à


IV), (en gras: exposants corrects, autres combinaisons: exposants
approximatifs)

La fonction S = a hm représentée par une échelle double logarithmique devient une


droite:
log (S) = log (a) + (m) log (h)
La Figure 11.7 montre que les réservoirs du bassin versant du Rhône peuvent, en
bonne approximation, être calculés par la fonction S = a hm.
Ce résultat donne une idée de la forme de la vallée dans laquelle des volumes favo-
rables pour des réservoirs peuvent être trouvés. En plus, la définition de la morpho-
logie d'un réservoir par une fonction exponentielle facilite les calculs préliminaires.
h

Figure 11.7: Représentation par échelle double logarithmique de la fonction


S = a · hm pour des réservoirs dans le bassin du Rhône en Suisse

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


474 Retenues et barrages

Smax a m
3 3-b
Réservoir (Mio m ) (m ) (-)

Lac des Dix 401.00 2.40 103 2.24


Lac d'Emosson 227.00 9.66 102 2.44
Lac de Mauvoisin 181.50 5.30 103 2.01
Mattmarksee 101.00 8.45 104 1.56
Lac de Moiry 78.00 1.46 104 1.83
Figure 11.7 bis: Coefficients carac- Lac de Zeuzier 51.00 2.46 103 2.07
téristiques des ré-
Lac de Salanfe 40.10 3.42 103 2.47
servoirs dans le
bassin Lac des Toules 20.15 7.21 102 2.38
du Rhône Lac de Cleuson 20.00 7.23 103 1.82

11.4 Fonctionnement et dimensionnement des réser-


voirs de production
11.4.1 Données de base
Les apports aux réservoirs sont représentés par des courbes de débits cumulés
pour la période de dimensionnement envisagée (accumulations journalières, hebdo-
madaires, saisonnières ou inter-saisonnières). Cette courbe est obtenue à partir des
enregistrements continuels des débits, c'est-à-dire de la courbe chronologique
(Figure 11.8). Lorsque les débits sont connus depuis le début jusqu'à la fin d'une pé-
riode, la courbe des débits cumulés peut être établie à l'aide de l'intégration suivante:
T
VT = Q dt [m ]
3
0

La pente de cette courbe est égale au débit


dVT
=Q
dt
Les débits de tirage dépendent de la gestion d'un réservoir et correspondent à l'eau
turbinée, l'eau tirée pour l'irrigation, etc. Normalement, ce débit n'est pas une fonction
du niveau d'eau dans le réservoir.
La morphologie du réservoir est caractérisée par les relations (cf. Figure 11.3 et
Figure 11.9):
• volume – niveau d'eau
surface – niveau d'eau.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 475

VT [m3]
3
Q [m /s]
pointe annuelle

3
apport annuel [m ]

débits cumulés
moyenne annuelle

moyenne mensuelle

t
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

1 année

Figure 11.8: Représentations possibles de débits mesurés


Courbes chronologiques et courbes des débits cumulés (mass curve)

niveau maximum
A

niveau minimum

Figure 11.9: Volume et surface du réservoir "Göscheneralpsee"


en fonction du niveau d'eau

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


476 Retenues et barrages

11.4.2 Equation de rétention


Comme déjà mentionné au § 11.1, les réservoirs servent à la régulation des apports
et par conséquent à mieux satisfaire les demandes en eau. Les réservoirs permet-
tent une accumulation d'eau pendant une période limitée. Cette accumulation est
appelée rétention. La variation de l'accumulation avec le temps est calculée avec
l'équation de rétention. Elle donne le bilan d'eau pour un pas de temps dt.
dz dJ
Qe Qs = A =
dt dt

avec: A = A(z) : surface du plan d'eau du réservoir


z = z(t) : niveau du plan d'eau
J = J(z) : volume du réservoir
Qe = Qe(t) : débit entrant dans le réservoir
Qs = Qs(t) : débit sortant du réservoir
La Figure 11.10 présente schématiquement un tel réservoir.

Qe

dz dV

z Qs

Figure 11.10: Coupe verticale schématique d'un réservoir avec débit sortant contrôlé

A part les débits entrant Qe et sortant Qs, il faut tenir compte des infiltrations et exfil-
trations dans la retenue, ainsi que de l'évaporation et des précipitations directement
sur la surface de la retenue. Dans certains cas, la couche de glace retenant une par-
tie de l'eau doit être prise en considération.

11.4.3 Dimensionnement à l'aide des courbes des débits cumulés


En pratique, pour le dimensionnement rapide et préliminaire, la courbe des débits
cumulés peut être utilisée. L'intégration de l'équation de rétention pour une période T
donne

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 477

Qe dt Qs dt = ) J
T T

) J = Ve Vs = D

avec Ve: somme des débits entrants = Qe dt


T

Vs : somme des débits entrants = Qs dt


T
D: différence = ) J
Le réservoir doit être tout le temps capable d'accumuler ou de fournir la différence D.
La valeur extrême de cette différence D peut être trouvée à l'aide de l'équation
dD dVe dVs
= = Qe Qs = 0
dt dt dt
c'est-à-dire pour Qs = Qe, resp. tan s = tan e (tangentes parallèles à la Figure
11.11).
Volume dès t = 0

Ve

Vs
s

Période T
Volume du réservoir

Jnéc

Temps

Figure 11.11: Courbes de débits cumulés pour les débits entrants Ve


et sortants Vs d'un réservoir (en haut) et le volume
du réservoir en fonction du temps (en bas), (Vischer, Huber, 1993)

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


478 Retenues et barrages

Pour tmax on obtient la plus grande différence positive Dmax et pour tmin la plus grande
différence négative Dmin. Le réservoir doit alors avoir au minimum le volume
Jnéc = Dmax + |Dmin|
La Figure 11.11 illustre cette condition pour le volume nécessaire d'un réservoir.
Pour les temps marqués avec tG, les apports d'eau (somme des débits entrants) sont
égaux à la somme des débits sortants, mais Qe + Qs.

11.4.4 Exemples: Réservoir avec apport naturel


1 Un réservoir doit être dimensionné de telle manière qu'un débit constant
puisse être tiré pendant une année moyenne. En pratique, une telle politique
de gestion est rarement appliquée (év. régulation du débit pour la navigation),
mais elle est quand même discutée pour des raisons didactiques.
La Figure 11.12 indique les apports naturels (somme des débits entrants) et la
somme des débits sortants (constants). Le volume nécessaire Jnéc du réser-
voir est obtenu en additionnant Dmax + |Dmin| comme le montre le graphique.

Vs

Ve
Volumes dès t = 0

Jnéc

temps T=1 année

Figure 11.12: Dimensionnement d'un réservoir: tous les débits entrants (apports)
sont transformés en débit sortant uniforme (débit de tirage uniforme)

2 Un réservoir doit être dimensionné de telle manière qu'il puisse être utilisé
pendant la période sèche. Il faut partir avec la courbe des débits cumulés qui
représente une année sèche. La Figure 11.13 montre le dimensionnement
graphique du volume nécessaire Jnéc pour ce cas.
Souvent, la courbe des débits cumulés ne représente pas une année calen-
drier mais une année hydrologique qui tient compte de pluies et de périodes
sèches (ou prend en considération les périodes d'été et d'hiver en Suisse).
Cette manière de représentation facilite l'analyse, mais évidemment ne

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 479

change rien à la valeur du volume nécessaire Jnéc. Le volume nécessaire peut


alors être exprimé Jnéc = Dmax (cf. Figure 11.15).

Volume dès t = 0

Vs

Ve

T = 1 année

période sèche
Contenu du réservoir

Jnéc

temps T = 1 année

Figure 11.13: Dimensionnement d'un réservoir: tous les débits entrants (apports)
sont utilisés pendant la période sèche avec un débit sortant constant

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


480 Retenues et barrages

3 Le réservoir de l'exemple 2 était dimensionné pour une année sèche. Son


volume est donc donné (Jdisp). Comment ce réservoir fonctionne-t-il pendant
une année moyenne? La réponse est donnée à la Figure 11.14.

e
oy enn
nnée m
a
Volume dès t = 0

e
ée sèch
ann
Vs

Jdisp Jdisp

T = 1 année
période de pluies période sèche

Jdisp Jdisp

temps de lac plein temps de


remplissage vidange

Figure 11.14: Gestion d'un réservoir avec un volume donné (Jdisp). Le volume dis-
ponible doit être utilisé pendant la période sèche avec un débit sor-
tant Qs. A la fin de la période de pluies, le réservoir est plein, le débit
doit donc être évacué (soit par la centrale hydroélectrique, soit par
l'évacuateur de crues

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 481

Dans les exemples 2 et 3 il a été admis qu'aucun débit ne doit être lâché pen-
dant certaines périodes. Normalement, pendant tout ce temps, un débit mini-
mum (résiduel) à l'aval du réservoir doit être garanti. Ce débit minimum peut
être facilement considéré par une représentation graphique des débits cumu-
lés.

Volume dès t = 0

Ve

Vs
Vs

T = 1 année
période de pluie période
sèche
du réservoir
Contenu

Jnéc

temps

Figure 11.15: Représentation alternative de la Figure 11.13.

11.5 Simulations numériques des réservoirs de produc-


tion
La méthode graphique des courbes de débits cumulés (mass curve analysis) pour le
dimensionnement d'un seul réservoir est très rapide et puissante. L'analyse peut
également être faite numériquement en utilisant des tableurs. Pour un système avec
plusieurs réservoirs, le calcul devient plus complexe.
L'analyse préliminaire se fait normalement à l'aide des courbes de débits cumulés
caractéristiques par exemple basé sur:

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


482 Retenues et barrages

• une année moyenne,


• une année sèche,
• une année humide,
qui sont obtenus par l'analyse hydrologique historique.
Pour les analyses détaillées, on utilise les courbes de débits cumulés établies pour
une certaine période de retour et en considérant la probabilité d'une variation des
débits. Pour y arriver, à partir d'une série des courbes observées historiquement, il
faut créer aléatoirement des séries synthétiques en étendant ainsi artificiellement les
données de base. Ces séries étendues permettent une simulation de la performance
du réservoir. Pour un volume disponible et une exploitation prescrite, la probabilité de
défaillance du réservoir peut être déterminée (volume du réservoir ne peut plus sa-
tisfaire la demande).

11.6 Diminution du volume utile par l'alluvionnement


Le volume utile d'un réservoir peut être diminué, avec le temps, par l'alluvionnement.
En pratique, une partie du fond du réservoir, dite la tranche morte, est réservée pour
accueillir les dépôts de sédiments. Le volume de cette tranche doit être estimé sur la
base
• de l'érosion de surface dans le bassin versant,
• des apports en sédiments par les cours d'eau dans le réservoir,
• du transport des sédiments à l'intérieur du réservoir,
• du degré de transit des sédiments par l'exploitation et les purges du réser-
voir.
En moyenne, le volume des retenues dans le monde est diminué de 1 à 2% chaque
année par l'alluvionnement. Le chiffre correspondant en Suisse est environ 10 fois
plus faible (0.2%).

11.7 Fonctionnement et dimensionnement des réser-


voirs pour la protection contre les crues – laminage
des crues par le réservoir
Le laminage d'une crue entrante dans un réservoir est également décrit par l'équa-
tion de rétention (cf. 11.4.2):
dz d?
Qe Qs = A =
dt dt
où ?: volume stocké dans le réservoir
Qe : débit entrant dans le réservoir
Qs : débit sortant du réservoir
La relation entre le volume stocké et le débit de sortie d'un réservoir est particulière-
ment importante. Elle peut être invariable ou variable comme indiqué sur la Figure
11.16.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 483

Figure 11.16: Relation entre le volume stocké et le débit de sortie


Relation invariable (à gauche) et variable (à droite), (Boillat, 1997)

Une relation invariable a la forme de l'équation ci-dessus, elle s'applique aux rete-
nues où la surface libre reste pratiquement horizontale lors du passage des crues
? = f(Qs)
Cette relation requiert qu'il existe une relation biunivoque entre stockage et dé-
charge. Cela implique que les structures hydrauliques de sortie soient libres ou
contrôlées par des vannes maintenues dans une position fixe.
Dans un tel cas, le débit maximum de sortie correspond au niveau maximum atteint
dans la retenue, c'est-à-dire lorsque l'équation de rétention est identiquement nulle, il
en résulte, selon l'équation ci-dessous, que les débits d'entrée et de sortie sont
égaux à cet instant (Figure 11.16 à gauche).
d?
= Qe Qs = 0
dt
Une relation volume stocké-débit de sortie variable est rencontrée dans les retenues
étroites et longues et dans les canaux où le profil de la surface libre peut être incurvé
significativement. L'importance du stockage amont supplémentaire lié à cette cour-
bure dépend de la vitesse de passage du flux à travers le système.
La relation volume stocké-débit de sortie n'est pas biunivoque dans ce cas, elle est
caractérisée par une boucle d'hystérèse. En raison du retard provoqué par le stoc-
kage amont, le débit maximum de sortie se trouve après l'intersection des hydro-
grammes d'entrée et de sortie (Figure 11.16 à droite).

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484 Retenues et barrages

Le phénomène de rétention correspond au cas de la Figure 11.16 à gauche, le rou-


tage de crue avec rétention à celui de la Figure 11.16 à droite.
Les diverses méthodes pour résoudre l'équation de rétention sont traitées dans le
cours analyse des réseaux.
Le problème de laminage de crues se distingue du dimensionnement du volume utile
d'une retenue, pour des raisons suivantes:
• des événements concernés par le laminage sont des événements de courte
durée (hydrogrammes de crues);
• le débit sortant du réservoir varie et n'est pas connu; il dépend du niveau
d'eau dans le réservoir et de la fonction de débits dans les organes de dé-
charge (déversoir, orifice);
• la problématique de laminage ne se pose que lorsque le niveau se situe au-
dessus du niveau normal de la retenue; il s'agit d'un surremplissage de
crue.

11.8 Les différents types de barrages


Selon la nature du matériau de construction utilisé, on classe les barrages selon 2
grandes familles (Figure 11.17):
les barrages en béton;
les barrages en remblai (digues).
Certains anciens barrages, datant pour la plupart du XIXème siècle, ont été réalisés
en maçonnerie. Nous les assimilerons en règle générale aux barrages en béton. Ils
se classent presque toujours parmi les barrages-poids.
On verra également que certains grands barrages peuvent être constitués de sec-
tions en béton et de sections en remblai mises côte à côte, ce qui complique la clas-
sification.

Barrages
Barrages

Barrages en béton Barrages en remblai

Barrage-poids Barrage en terre

Barrage à contreforts Barrage en enrochement

Barrage-voûte Barrage homogène

Barrage à voûtes Barrage à noyau d'argile


ou dômes multiples
Barrage à masque amont
Barrage en béton compacté (béton ou bitume)
au rouleau (BCR)
Barrage à membrane interne
(béton bitumineux)

Figure 11.17: Les familles de barrages en béton

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 485

11.8.1 Les barrages en béton


Les barrages en béton sont toujours fondés sur une fondation rocheuse, de module
d'élasticité élevé. Comme l'illustre la Figure 11.17, on distingue trois grandes familles
de barrages en béton et deux principales sous-familles.
Les trois principaux types de barrages en béton se distinguent par leur forme, la na-
ture de leur système statique et leur manière de s'opposer à la poussée de l'eau.
Le barrage-poids, comme son nom l'indique, résiste à la poussée de l'eau par son
propre poids. Le barrage-poids est constitué d'éléments massifs juxtaposés.
Le barrage à contreforts résiste également à la poussée de l'eau par son poids pro-
pre, mais un certain nombre de dispositions permettent de diminuer le volume de
béton par rapport au barrage-poids. Ce type de barrage est formé d'éléments juxta-
posés, nommés contreforts, dont la géométrie est complexe. Chaque contrefort est
constitué d'un masque continu à l'amont et d'une âme, le contrefort, qui reprend l'ef-
fort exercé par la poussée de l'eau. Les contraintes dans le corps du barrage et au
contact avec la fondation sont plus élevées que pour un barrage-poids de même
hauteur.
Le barrage-voûte est une structure tridimensionnelle agissant comme une voile ou
une coque. Il présente une forte courbure en plan et transmet une partie importante
des efforts sur les flancs de la vallée. Lorsque toutes les conditions nécessaires sont
réunies, il permet d'économiser un volume important de béton par rapport aux 2 ty-
pes précédents.
Relevons quelques points communs à tous les types de barrages en béton :
L'ouvrage est constitué de béton de masse, non armé, mis en place à une cadence
élevée avec des moyens fortement mécanisés.
De manière générale, la géométrie est optimisée de sorte à éviter l'apparition de trac-
tions dans le béton en quelque point que ce soit de l'ouvrage, et sous toutes les
conditions de charge.

11.8.1.1 Les barrages-poids


La plupart des barrages poids sont massifs, sans vides significatifs. Le parement
amont est vertical ou légèrement incliné (moins de 5%). Le parement aval est incliné
avec un fruit de 75 à 80%. Cette géométrie lui permet de résister par son propre
poids au renversement et au glissement sous l'action des forces extérieures.

75 ÷ 80%
0 ÷ 5%

[1:0.75 ÷ 1:0.8]

0.75 ÷ 0.8 H

Figure 11.18: Barrage-poids : profil-type

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


486 Retenues et barrages

Dans certains cas, pour économiser du béton, le barrage-poids comporte des évide-
ments. On parle alors de barrages-poids évidés. Pour compenser le poids de béton
supprimé, le parement amont est incliné (jusqu'à 10%) pour bénéficier d'une compo-
sante verticale de la poussée de l'eau.
Le barrage-poids n'est pas limité dans sa longueur. Il peut être rectiligne, polygonal
ou légèrement incurvé pour s'adapter aux besoins de la géologie et de la topogra-
phie. Lorsque la courbure est forte, celle-ci influence la statique de l'ouvrage par un
effet tridimensionnel. Le terme de barrage-poids incurvé ou de barrage poids-voûte
est alors utilisé.
Les barrages-poids sont constitués d'une succession de plots (parfois aussi appelés
blocs), de 12 à 19 m de largeur. Ces blocs sont séparés par des joints (1 à 3 mm) qui
sont libres de s'ouvrir ou de se fermer selon les conditions. Ces joints de dilatation
sont en fait les joints de retrait qui s'ouvrent lors du refroidissement du béton. Ces
joints sont munis d'un système d'étanchéité à l'amont (par exemple bandes wa-
terstop).

11.8.1.2 Les barrages à contreforts


Le barrage à contreforts est toujours réalisé en béton. De par les évidements qu'il
comporte, le volume de béton qui le constitue est plus faible que pour un barrage-
poids équivalent. Par contre, la surface de coffrage est plus importante, ainsi que la
difficulté de mise en place du coffrage.
Comme dans le cas des barrages-poids, les contreforts sont construits côte-à-côte et
sont séparés par un joint vertical doté d'une bande d'étanchéité à l'amont.

Amont Aval
20÷40% 60÷80%
1/3 2/3
12÷14 m

tête âme

0.95 ÷ 1.0 H

Figure 11.19: Barrage à contrefort : profil-type et section horizontale

On distingue plusieurs types de barrages à contrefort selon la forme même du con-


trefort. La solution la plus aboutie, avec contrefort à tête élargie, est la plus répan-
due. La Figure 11.19 illustre la coupe horizontale schématique dans un barrage à
contrefort.
Sur une coupe horizontale, on distingue clairement les 2 zones du contrefort :
La tête, dont la largeur est de 12 à 14 m. La bande d'étanchéité est située dans le
joint entre 2 têtes juxtaposées.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 487

L'âme, dont l'épaisseur est le plus souvent constante et de l'ordre du tiers de la lar-
geur de la tête. Dans certains cas, l'âme est élargie à l'aval pour diminuer les
contraintes. Le changement de section doit alors être progressif pour limiter les
concentrations de contraintes dans l'angle.

a) b)

c) d)

Figure 11.20: Formes de la tête des contreforts - différentes solutions

a) à tête ronde
b) à tête en forme de marteau
c) à tête en forme de T
d) à dalles planes.

L'épaississement de l'âme à l'aval peut dans certain cas atteindre la largeur de la


tête, de sorte que le barrage forme à l'aval un parement continu. Ce masque aval
peut être souhaité pour rendre les contreforts plus résistants aux sollicitations dy-
namiques ou pour protéger l'âme des effets du gel.
La tête du contrefort de la Figure 11.19 est appelée tête élargie ou tête en forme de
diamant. D'autres formes sont parfois choisies. La Figure 11.20 montre différentes
solutions pour la forme de la tête.
Pour limiter encore le volume de béton, certaines solutions originales ont été déve-
loppées pour des cas particuliers :
Les contreforts à dalles planes, mais ces ouvrages sont particulièrement sensibles
aux séismes
Les barrages à voûtes multiples ou à dômes multiples, constitués de voûtes minces
s'appuyant sur des contreforts (cf. Figure 11.21). Dans ce type d'ouvrages, les effets
de température provoquent des contraintes de tractions importantes dans les voûtes,
lesquelles doivent être armées en conséquence.
Parmi tous les types de barrages évoqués jusqu'à présent, ces 2 derniers types
constituent certainement les plus légers. Pour assurer la stabilité au glissement du
contrefort, il est nécessaire de compenser le manque de charge verticale due au
poids propre par une composante verticale importante de la poussée de l'eau. Cette
force est mise en œuvre en inclinant très fortement le parement amont du barrage,
jusqu'à 100%, comme le montre la Figure 11.19.

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488 Retenues et barrages

Figure 11.21: Barrage à voûtes multiples

11.8.1.3 Les barrages-voûtes


Le barrage-voûte est incurvé en plan. Il est dans tous les cas construit en béton. Du
fait de sa courbure, une part importante des efforts dus à la poussée de l'eau est
transmise aux flancs de la vallée.
Pour illustrer cet effet tridimensionnel, on peut modéliser le barrage-voûte par une
série d'éléments porteurs horizontaux et verticaux, selon la Figure 11.22:
Les éléments porteurs horizontaux sont des poutres courbes à 2 appuis, les arcs.
Les éléments porteurs verticaux sont des poutres consoles.
Dans un tel modèle très simplifié, la poussée de l'eau appliquée au point d'intersec-
tion de 2 éléments se répartit selon le rapport de leurs rigidités respectives. Il appa-
raît évident dans ce contexte que les arcs sont des éléments beaucoup plus rigides
que les consoles (de par leur hyperstaticité), et que les efforts dus à la poussée de
l'eau sont par conséquent guidés de manière préférentielle vers les flancs de la val-
lée.

arc
console

Figure 11.22: Barrages-voûtes : modèle statique simplifié

Plus la voûte est mince, plus le rapport des rigidités tend à diriger les efforts vers les
flancs de la vallée. On distingue ainsi les barrages à voûte mince, dont l'épaisseur à

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 489

la base est de l'ordre de 10 à 20% de la hauteur, et les barrages à voûte épaisse,


dont l'épaisseur à la base dépasse 25% de la hauteur.
D'autre part, on distingue les barrages-voûtes cylindriques (à courbure horizontale
seulement, simple courbure) et les barrages-voûtes à double courbure (horizontale et
verticale).
Dans la première moitié du XXème siècle, plusieurs barrages à voûtes cylindriques ont
été réalisés dans des vallées particulièrement étroites. Ces barrages ont une cour-
bure constante de la fondation jusqu'au couronnement.

0.15÷0.20 H >0.25 H
Voûte mince Voûte épaisse Voûte cylindrique

Figure 11.23: Profils-types de barrages-voûtes

Comme le barrage-poids, le barrage-voûte est construit en plots juxtaposés, mais


une différence constructive essentielle les distingue : alors que les joints séparant les
plots du barrage-poids sont ouverts, les joints d'un barrage-voûte sont injectés avec
du lait de ciment pour rendre la voûte monolithique et assurer la transmission des
efforts horizontaux jusqu'aux rives. Cette injection s'effectue avant le premier rem-
plissage de la retenue et en hiver, de sorte que la résultante des charges extérieures
crée toujours une compression dans ces joints (voir Figure 11.24).

Niveau du couronnement

joints verticaux
joints verticaux

plots en construction

Figure 11.24: Joints verticaux injectés

A priori, le barrage-voûte nécessite la mise en place de sensiblement moins de béton


que le barrage-poids. Le matériau est également beaucoup mieux utilisé.
De par son système statique, le barrage-voûte sollicite de manière importante la fon-
dation sur les flancs de la vallée. Ceux-ci doivent être résistants et peu déformables.

Schleiss Aménagements hydrauliques LCH


490 Retenues et barrages

Alors que les barrages poids peuvent s'adapter à n'importe quelle forme et n'importe
quelle largeur de vallée, le barrage-voûte nécessite des caractéristiques topographi-
ques bien particulières et ne peut se concevoir que dans des vallées relativement
étroites.
On définit l'élancement d'un barrage F :
longueur développée du couronnement
F=
hauteur du barrage
En règle générale, on admet que l'élancement F ne doit pas dépasser 4 à 5 (excep-
tionnellement 6). Ce facteur limite dépendra en particulier de la géologie du site.

11.8.1.4 Les barrages en béton compacté au rouleau BCR


Depuis la fin des années 1970, une nouvelle technologie s'est développée pour op-
timiser la construction de barrages-poids: le béton compacté au rouleau BCR (roll
compacted concrete RCC). La mise en place de béton BCR permet d'utiliser des bé-
ton très secs, très faiblement dosés en ciment. Les résistances obtenues, particu-
lièrement faibles, sont compatibles avec les exigences des barrages-poids qui s'op-
posent à la poussée de l'eau par leur poids propre. On exploite au mieux les pro-
priétés du béton en mettant en œuvre des techniques de mise en place et de com-
pactage qui sont issues des barrages en remblai.

11.8.2 Les barrages en remblai


Les barrages en remblai sont constitués essentiellement de matériaux granulaires
naturels meubles prélevés à proximité immédiate de l'ouvrage.
On distingue 2 catégories de barrages en remblai:
Les barrages en terre, réalisés essentiellement à partir de sols naturels meubles pré-
levés dans des gravières;
Les barrages en enrochement, dont la majeure partie est constituée de matériau de
carrière concassé.
Comme pour les autres types de barrages, les barrages en remblai doivent répondre
à 2 fonctions essentielles: la fonction statique, qui consiste à transmettre à la fonda-
tion la poussée de la masse d'eau retenue à l'amont, et la fonction d'étanchéité.
Les sols meubles des barrages en terre peuvent, selon leur caractéristiques géo-
techniques, être suffisamment imperméables pour suffire aux 2 fonctions. Il existe de
ce fait un grand nombre de barrages ou de digues en terre homogène.
Lorsque la perméabilité du sol d'emprunt principal est trop importante, la solution
consiste à concevoir un barrage en remblai zoné, c'est à dire constitué de plusieurs
matériaux répartis par zones dans le corps du barrage.
Les matériaux de carrière avec lesquels sont constitués les barrages en enroche-
ment sont toujours perméables (à des degrés divers). Ces enrochements sont donc
toujours associés à un autre élément assurant la fonction d'étanchéité.

LCH Aménagements hydrauliques Schleiss


Retenues et barrages 491

La Figure 11.25 montre une section schématique des dispositions les plus utilisées.

Barrage en terre homogène Barrage en enrochement


à noyau central

Barrage en enrochement Barrage en enrochement à


à masque amont membrane interne
Figure 11.25: Barrages en remblai - disposition de l'élément d'étanchéité

Par rapport aux barrages en béton, les barrages en remblai présentent les avantages
suivants :
La grande majorité, voire la totalité des matériaux constituant le corps du barrage
provient de la proximité immédiate du site ;
La mise en œuvre des matériaux peut être très fortement mécanisée et les cadences
très importantes, même si le volume à mettre en place est sensiblement plus impor-
tant ;
La sollicitation de la fondation (contraintes) est beaucoup plus faible ;
Les tassements de fondation ne posent pas de difficultés majeures, les matériaux
étant suffisamment plastiques pour s'adapter.
Ces 2 dernières considérations sont essentielles pour le choix du type de barrage :
certains types de barrages en remblai peuvent être placés aussi bien sur une fonda-
tion rocheuse que sur une fondation en terrain meuble, pour autant que la continuité
de l'étanchéité soit assurée entre le barrage et la fondation.

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