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INRA Prod. Anim.

,
2008, 21 (1), 87-94 Evolution des recherches
en nutrition piscicole à l’INRA :
substitution des produits
d'origine marine dans l'alimentation
des poissons d'élevage
F. MÉDALE, S. KAUSHIK
INRA, IFREMER, Université Bordeaux 1, UMR1067 Nutrition, Aquaculture et Génomique,
F-64310 Saint-Pée-sur-Nivelle, France
Courriel : medale@st-pee.inra.fr

Au cours des 20 dernières années, l'aquaculture mondiale a connu un essor considérable


(+ 9% par an en moyenne) associé à une forte demande d’évolution des aliments piscicoles
(diversification des matières premières, composition). Les recherches de l’INRA sur la nutri-
tion et le métabolisme des poissons se sont attachées à analyser l’intérêt et les limites de
nouvelles formules alimentaires pour favoriser la croissance, limiter les rejets et améliorer la
qualité des produits.

L'objectif commun des recherches jusqu’alors, les poissons d'élevage pêche minotière, elle rendait cependant
sur la nutrition des poissons est d'ac- étaient nourris avec des poissons four- l'aquaculture très dépendante de la
quérir les connaissances fondamentales rage ou des déchets de pêche et de pêche. Ces aliments couvraient les
nécessaires pour développer des ali- conserveries pour mimer l’alimentation besoins alimentaires des poissons
ments répondant aux besoins nutrition- en milieu naturel. Cette pratique, qui mais avec une faible efficacité alimen-
nels des poissons en conditions d'aqua- génère une quantité importante de taire (kg poisson produit/kg aliment
culture. Comme pour les autres déchets, n’était compatible ni avec consommé) du fait du peu d'énergie
animaux d'élevage, les aliments pisci- une intensification de la pisciculture digestible qu'ils contenaient. Des rejets
coles doivent permettre d’allier crois- (approvisionnement fluctuant), ni avec azotés importants résultaient du catabo-
sance optimale, limitation des rejets le respect de l’environnement. La fabri- lisme des protéines excédentaires de la
d’origine alimentaire, santé des pois- cation d’aliments composés sous forme ration, et des fèces abondantes et visi-
sons et qualité des produits, en particu- de granulés a donc permis de franchir bles étaient générées notamment en rai-
lier de la chair destinée à la consom- une étape décisive dans l’élevage inten- son de l'amidon non gélatinisé faible-
mation humaine. Au cours des sif des poissons. Elle a aussi permis ment digéré.
20 dernières années, les objectifs des d’engager des travaux sur les besoins
recherches conduites dans le domaine des poissons, qui ont montré que la plu- Dès les années 80, des travaux ont été
de la nutrition des poissons ont évolué part des poissons d'élevage nécessite un engagés pour s'affranchir de ces
notamment pour prendre en compte les apport élevé en protéines (30% de la inconvénients. Ils ont démontré qu’une
contraintes liées au manque de matières matière sèche de l’aliment pour la part importante des acides aminés
premières marines, ingrédients majeurs carpe, 36-40% pour la truite, jusqu'à d’origine alimentaire était utilisée par
des aliments piscicoles. 55% de la ration pour le turbot contre les poissons pour la production d'éner-
20% maximum pour le poulet de chair gie (Cho et Kaushik 1990). Pour répon-
1 / Contexte par exemple). dre aux enjeux économiques (réduire la
dépendance de la production piscicole
Jusqu'en 1990, les aliments utilisés à la farine de poisson) et écologiques
L’élevage intensif de poissons n’est étaient essentiellement des granulés (limiter les rejets d’origine alimentai-
devenu une pratique courante au niveau pressés. Cette technologie ne permettait re), deux stratégies ont été explorées
mondial qu’au siècle dernier. En pas d'incorporer plus de 15-16% de simultanément : le remplacement de la
France, l’élevage piscicole a débuté lipides. Les aliments étaient riches en farine de poisson spécifiquement par
après l’introduction, au début du protéines (47 à 50% de protéines pour des protéines d'origine végétale et
20ème siècle, de la truite arc-en-ciel un aliment truite par exemple). La fari- l'augmentation du contenu en énergie
(Oncorhynchus mykiss), originaire de ne de poissons, contenant près de 70% digestible du régime par une incorpora-
Californie, qui s’adapte aisément à la de protéines de composition en acides tion optimale de glucides ou de lipides.
captivité. Sa production s’est dévelop- animés idéale pour couvrir les besoins Les objectifs scientifiques étaient d’une
pée à partir des années 60 avec la mise des poissons, était l'ingrédient majori- part, de mieux comprendre les condi-
au point d’aliments composés. En effet, taire. Fabriquée à partir des captures de tions de l’utilisation métabolique des

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acides aminés afin de réduire leur utili- 1995, Regost et al 1999, Burel et al et diminution de l’activité des déiodi-
sation à des fins énergétiques, et d’au- 2000c, Kaushik et al 2004). nases de type III (Burel et al 1998,
tre part, d’explorer les conditions et les 2000a et b).
limites d’utilisation des glucides et des Le potentiel et les limites d’utilisa-
lipides comme source d’énergie et tion d’ingrédients tels que le soja, le L’équilibre en acides aminés de l’ali-
épargnants protéiques. La truite arc-en- pois, le lupin, les glutens de blé et de ment a fait l’objet d’une attention parti-
ciel a été notre principal modèle d'étu- maïs, le colza ont ainsi été mis en évi- culière. En cas de carence par rapport
de en raison de la prépondérance de sa dence. Cependant, des taux de substitu- aux besoins, on observe une baisse de
production en France. Cependant, nous tion supérieurs à 30 à 50% (selon les l'ingestion d'aliment, une augmentation
avons conduit des études comparatives ingrédients) entrainaient une diminu- des rejets azotés en relation avec une
pour tirer des lois générales et évaluer tion des performances de croissance activité accrue de la glutamate dés-
les possibilités de transposer à d'autres des animaux. Cet effet négatif sur la hydrogénase dans le foie. Le principal
espèces d'intérêt économique les croissance résultait principalement de effet sur le bilan énergétique est une
connaissances acquises sur les salmoni- la diminution de consommation d'ali- augmentation de la fourniture d'énergie
dés. ment donc d'une réduction de l'apport par les protéines (Médale et al 1998,
en énergie digestible. Les recherches se figure 1). La synthèse des protéines,
2 / Remplacement de la sont alors attachées à identifier les fac- évaluée par incorporation de 3H-phény-
teurs antinutritionnels responsables de lalanine dans les protéines corporelles,
farine de poisson par des cette baisse d’ingestion, à étudier leurs est alors réduite. Pour limiter ces per-
protéines d'origine végétale actions et les moyens d’y remédier. turbations, il faut ajouter, dans le régi-
L'originalité des travaux conduits à me, l'acide aminé indispensable défi-
l’INRA a été d'allier des approches des- cient dans la matière première (par
La composition en Acides Aminés criptives permettant de générer des exemple, méthionine dans le cas du
Indispensables (AAI) des poissons connaissances pratiques et des appro- soja). L'acide aminé libre sous forme
entiers est très proche des profils de ches mécanistes permettant d'éprouver cristalline semble être métabolisé aussi
besoins en acides aminés des différen- les hypothèses pouvant expliquer les efficacement que la forme liée aux pro-
tes espèces de poissons (Kaushik effets négatifs observés. Dans le cas du téines (Kim et al 1998, Médale et al
1998). C’est pourquoi, la farine de soja et de ses produits, outre le facteur 1998). Les ingrédients testés s’avérant
poisson couvre de façon idéale les antitrypsique, nous avons mis en évi- déficients en un ou plusieurs AAI au
besoins en AAI des poissons. Afin de dence pour la première fois l'effet néga- regard des besoins des poissons, il est
limiter l’emploi de cette matière pre- tif lié à la présence de grandes quanti- apparu nécessaire de remplacer la fari-
mière issue de la pêche, le potentiel tés de phyto-œstrogènes (daidzéine et ne de poisson par un mélange de diffé-
d’utilisation de différentes sources pro- génistéine) (Kaushik et al 1995). Dans rentes sources végétales plutôt que par
téiques végétales a fait l’objet de nom- le cas du colza, nous avons décrit la une seule matière première (Gomes et
breux travaux. On a étudié en premier façon dont l’axe thyroïdien est affecté al 1993, 1995, Kaushik et al 2004). Sur
lieu le profil en acides aminés de diffé- par les glucosinolates et ses dérivés, les la base de ces résultats ainsi que ceux
rentes sources végétales, leur digestibi- hormones thyroïdiennes étant des régu- de nos collègues étrangers, rapidement
lité puis l’effet sur la croissance des lateurs potentiels de l’ingestion chez le transférés aux fabricants d’aliments
poissons et l’excrétion azotée (figure 1) poisson : compétition des ions thiocya- piscicoles, des sources protéiques végé-
de niveaux croissants de substitution de nates avec l’iode lors de la formation de tales ont pu être incorporées dans les
la farine de poisson par l’une ou l’autre thyroglobuline, hyperactivité des folli- régimes pour poisson d’élevage.
des sources protéiques d’origine végé- cules thyroïdiens, augmentation de Cependant, la farine de poisson restait
tale (Kaushik 1990, 1998, Gomes et al l’activité des déiodinases de type I et II l’ingrédient majeur des aliments pisci-
coles en 2001, lorsque a débuté le
Figure 1. Excrétion d’azote ammoniacal (% de l’azote digestible ingéré) chez la truite programme européen PEPPA («Pers-
arc-en-ciel en fonction de la source protéique du régime FP : farine de poisson, FP/S : pectives of plant protein usage in aqua-
50% farine de poisson/50% soja, S+Met : soja avec supplémentation en méthionine, culture»), coordonné par notre unité et
S substitution totale de la farine de poisson par du soja.
qui a permis de conforter sa position de
leader international sur ce thème.

L’objectif de ce programme était de


remplacer la plus grande proportion
possible de farine de poisson par des
sources protéiques végétales dans les
aliments pour la truite arc-en-ciel et la
daurade sans altérer la croissance, les
métabolismes, le système immunitaire
et la reproduction des animaux, ni la
qualité de leur chair et la qualité de
l’environnement. La stagnation de la
production de farine de poisson rendait
urgent de poursuivre les efforts dans ce
domaine (figure 2). La stratégie adop-
tée a été de reproduire aussi précisé-
ment que possible la composition en
acides aminés de la farine de poisson en
utilisant des mélanges de diverses sour-

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Figure 2. La quantité d’aliments utilisés pour les productions aquacoles (poissons et alimentaire ont cependant été poursui-
crustacés) augmente avec l’essor de l’aquaculture intensive en Asie alors que la pro- vis, car l’incorporation de sources pro-
duction de farine de poisson, issue de la pêche stagne depuis plus de 20 ans, car les téiques végétales s’accompagne d’un
ressources naturelles marines sont limitées. apport en glucides dont il convient de
préciser les conditions d’utilisation.

3.1 / Les glucides


Les sources glucidiques étant nom-
breuses et d’un coût relativement
modéré, nous avons, dans les années
90, envisagé de les incorporer dans les
aliments piscicoles pour augmenter
l’énergie digestible des régimes. Il est
rapidement apparu que, chez la plupart
des poissons réputés «carnivores» tels
que la truite, la première limite à l’uti-
lisation des glucides alimentaires est
l’étape digestive. En effet, en raison
Production mondiale de farines de poisson d’une faible activité de l’amylase, les
Quantités d’aliments utilisés pour les productions aquacoles glucides complexes tels que l’amidon
natif sont faiblement digérés (Kim et
ces protéiques végétales, supplémentés res des poissons. Enfin, l'effet du rem- Kaushik 1991, Bergot 1993). Un traite-
en acides aminés. Les recherches placement de la farine de poisson par ment hydrothermique comme l’extru-
conduites ont, dans un premier temps, des ingrédients végétaux sur les quali- sion est nécessaire pour gélatiniser
permis de définir les limites à respecter tés nutritionnelles et sensorielles des l’amidon et améliorer sa digestibilité
en terme d’équilibre entre Acides produits ont aussi été analysées : la par les poissons. La seconde limite est
Aminés Indispensables et Non Indis- suppression totale (truite) ou le rempla- l’utilisation de l’énergie digestible des
pensables (AANI) dans le régime ali- cement de 75% de la farine de poisson glucides pour la couverture des besoins
mentaire. La daurade paraît plus sensi- (daurade) modifie les compositions énergétiques des poissons et l’épargne
ble au rapport AAI/AANI de l'aliment lipidiques et la teneur en acides aminés des protéines.
que la truite (Gomez-Requeni et al libres dans les muscles de la truite et de
2004). Aucun effet bénéfique d’une la daurade mais n’affecte pas de façon Les premiers travaux ont montré que
augmentation de l’apport en AANI n’a notable l’évolution post mortem de la l’apport en glucides digestibles permet
pu être démontré chez ces deux espè- chair (de Francesco et al 2004, 2007). de favoriser l’épargne protéique
ces. (figure 3, Kaushik et Oliva-Teles
L’ensemble des résultats rend possi- 1986). Cependant, des résultats varia-
L’analyse de l’utilisation de l’apport ble la substitution de 75% (daurade) à bles ont été obtenus en fonction des
azoté et énergétique par approche bio- 90% (bar, truite) de la farine de poisson espèces et de leur température d’éleva-
chimique et par analyse du protéome de l’aliment par un mélange de sources ge (Médale et al 1991, 1995, Brauge et
hépatique (Martin et al 2003, protéiques végétales sans effet négatif al 1995, Enes et al 2006). L'analyse des
Vilhelmsson et al 2004) associée aux sur le poisson et son environnement. cinétiques postprandiales de la glycé-
Les travaux sont actuellement poursui- mie a fait aussi apparaître d'importantes
travaux sur le contrôle endocrinien de différences entre espèces de téléos-
l’utilisation de nutriments réalisés par vis pour identifier les facteurs limitant
le remplacement total de la farine de téens. Chez la carpe recevant 30%
nos collaborateurs espagnols (Gomez- d'amidon digestible, la glycémie post-
Requeni et al 2005) a mis en évidence poisson dans les aliments piscicoles. prandiale ne dépasse pas 1 g/L ; chez
l'importance de la digestibilité de la daurade et la truite, on observe un pic
l’énergie apportée par les ingrédients 3 / L’augmentation du d’hyperglycémie postprandiale (pic >
végétaux et de la quantité d’acides ami- 2,5 g/L) qui se prolonge d'autant plus
nés ajoutés aux régimes. Ces résultats contenu en énergie digesti- que la température de l'eau est faible
nous ont permis de progresser dans la ble du régime (Brauge et al 1995, Panserat et al
formulation des aliments. En utilisant 1999). Bien que l’intérêt des glucides
des aliments extrudés, supplémentés en même digestibles pour augmenter
AAI dans la stricte limite des besoins En parallèle des efforts pour limiter l’énergie nette ne soit pas concluant,
des poissons, le taux de remplacement l’emploi de la farine de poisson comme nous nous sommes attachés à analyser
de la farine de poisson par un mélange source protéique, la stratégie adoptée les étapes d'utilisation métabolique du
de sources protéiques végétales a pu pour épargner les protéines alimentai- glucose car l’incorporation de matières
passer de 30% à 75% sans modifier les res et réduire la production de déchets premières d’origine végétale dans les
performances de croissance. Les consé- azotés polluants a été d'augmenter les aliments s’accompagne inévitablement
quences de l'utilisation de matières pre- proportions des autres sources d'éner- d’un apport en glucides.
mières végétales sur le système immu- gie de l'aliment. Comme la plupart des
nitaire des poissons ont été évaluées espèces de poisson élevées en Europe Différentes hypothèses ont été envi-
(Sitja-Bobadilla et al 2005). Bien que utilisent les sources glucidiques de sagées pour expliquer l’hyperglycémie
des différences liées au régime alimen- façon peu efficace, l'apport supplémen- prolongée consécutive à l’ingestion
taire aient été observées, de forts taux taire d'énergie a été réalisé par ad- d’un fort taux de glucides digestibles :
de protéines végétales dans le régime jonction de lipides. Les travaux sur une faible sécrétion d’insuline, un
n’altèrent pas les défenses immunitai- l’utilisation métabolique du glucose défaut de réceptivité à l’insuline des

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Figure 3. L’incorporation d’amidon digestible (gélatinisé) dans l’aliment permet de synthétisé par la néoglucogénèse) et
réduire les rejets azotés chez la truite arc-en-ciel (Kaushik et Oliva-Teles 1986). celui d’origine exogène (alimentaire).
Les résultats obtenus chez deux autres
espèces réputées avoir une meilleure
capacité d’utilisation des glucides
(carpe commune et daurade royale)
montrent l’existence d’une inhibition
par les glucides alimentaires de l’ex-
pression moléculaire d’au moins une
enzyme néoglucogénique chez ces
espèces (Panserat et al 2002b). Ces
résultats originaux confortent l’hypo-
thèse d’une compétition entre le gluco-
se endogène et le glucose exogène, par-
ticulièrement chez les salmonidés.

Perte totale en azote L’autre hypothèse que nous explo-


(% de l’azote ingéré) rons pour expliquer la faible efficacité
d’utilisation du glucose d’origine ali-
mentaire est la compétition avec les
lipides et les acides aminés, présents en
forte proportion dans les aliments pour
poissons. Nous avons initié l’étude de
la régulation du métabolisme hépatique
du glucose par ces nutriments. Nous
avons montré une induction de la der-
nière enzyme de la néoglucogenèse par
un fort taux de lipides alimentaires,
puis confirmé le rôle négatif des lipides
tissus périphériques, une déficience des mammifères, l’activité de phosphoryla- (huile de poisson) sur l’utilisation des
capacités de phosphorylation du gluco- tion du glucose est contrôlée positive- glucides alimentaires (Panserat et al
se en glucose-6-phosphate, première ment par les glucides alimentaires via 2002a, Tapia-Salazar et al 2005). Les
étape de l’utilisation métabolique du l’induction de la transcription du gène travaux sur l’effet des acides aminés
glucose ou encore un défaut de régula- glucokinase (hexokinase IV). Ce gène conduits dans le cadre de la thèse de
tion de la glycolyse ou de la néogluco- est exprimé spécifiquement dans le foie S. Kirchner ont suggéré que les capaci-
genèse hépatique. Nous avons testé ces (et pas dans le muscle blanc) des pois- tés néoglucogéniques de la truite
hypothèses en adoptant une démarche sons nourris avec des taux élevés de étaient favorisées par de forts taux de
comparative entre plusieurs espèces. glucides digestibles (Panserat et al protéines alimentaires (Kirchner et al
2000). Les travaux sur la régulation 2003). Ces résultats nous ont conduits à
En collaboration avec nos collègues nutritionnelle de la glycolyse ont mon- renforcer l’effort de recherche sur ce
de l'Université de Barcelone, nous tré que, dans le foie de la truite, les thème (S. Cassy-Skiba). Les travaux se
avons montré que l'apport alimentaire enzymes glycolytiques (glucokinase, poursuivent par la recherche des fac-
en glucides digestibles induisait bien pyruvate kinase et l’enzyme bifonc- teurs métaboliques limitant l’utilisation
une stimulation de la sécrétion d'insuli- tionnelle) ainsi que le transporteur du des glucides alimentaires en étudiant
ne se traduisant par une élévation des glucose (Glut2) sont fortement expri- les interactions acides aminés – signali-
taux plasmatiques chez les différentes més suite à un repas riche en glucides sation insuline – néoglucogenèse hépa-
espèces. Le nombre des récepteurs (Panserat et Kaushik 2002). Ces résul- tique chez la truite, en collaboration
insuline et leur activité tyrosine kinase tats réfutent donc l’hypothèse d’un avec des équipes étrangères (USA,
sont augmentés dans le muscle des trui- défaut de cette voie pour expliquer Espagne).
tes nourries avec des régimes riches en l'hyperglycémie postprandiale.
glucides ; chez la carpe, alors qu'ils L’ensemble des résultats acquis jus-
sont plus nombreux, leur stimulation La régulation des enzymes clés de la qu’à présent nous conduisent à recom-
par l'apport glucidique alimentaire est néoglucogenèse (phosphoenolpyru- mander aux fabricants d’aliments de
moins prononcée (Capilla et al 2003, vate carboxykinase, fructose-1.6-bi- choisir des matières premières végéta-
2004). phosphatase et glucose-6-phosphatase) les contenant des proportions limitées
a été étudiée. Contrairement à ce qui est d’amidon et de veiller à la digestibilité
Nous avons aussi recherché des diffé- observé chez les mammifères, aucune de l’amidon en recourant à l’extrusion.
rences entre espèces au niveau des répression de l’expression de ces enzy-
capacités de phosphorylation du gluco- mes par l’apport en glucides alimentai- 3.2 / Les lipides
se. En effet, d'après les données biblio- res n’a été montrée chez la truite
graphiques de l’époque, la truite sem- (Panserat et Kaushik 2002). La mauvai- Pour obtenir des aliments à haute
blait se caractériser par une très faible se utilisation métabolique des glucides teneur en graisses de texture compati-
activité des enzymes de la famille des alimentaires par la truite pourrait donc ble avec un séjour dans l'eau sans dis-
hexokinases qui contrôlent la phospho- être causée par la persistance d’une solution immédiate, il a fallu recourir à
rylation du glucose. En combinant des forte néoglucogenèse hépatique quel la technique d'extrusion. Il s'agit de
approches de biochimie et de biologie que soit l’apport en glucides alimentai- traitements thermiques associés à des
moléculaire, nous avons pu démontrer res ; il y aurait ainsi compétition entre conditions de pression et d'humidité qui
que, chez les poissons comme chez les le glucose d’origine endogène (toujours modifient la structure des molécules et

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permettent l'adsorption des graisses. La marin. Ces AGLPI ω3 confèrent à la La substitution n’a pas de conséquen-
modification de la structure conduit chair des poissons ses qualités diété- ces sur les teneurs en lipides totaux des
aussi à une amélioration de la digestibi- tiques en tant que protecteurs contre tissus. D’ailleurs, les mécanismes
lité des ingrédients alimentaires car les accidents cardio-vasculaires et impliqués dans la constitution des
l'accès des enzymes digestives à leur indispensables au développement céré- dépôts lipidiques (néosynthèse des aci-
substrat est facilité. L'avènement de la bral. L'aquaculture doit relever le défi des gras, captage, beta-oxydation) sont
technologie d'extrusion et d'enrobage, de continuer à produire des poissons de peu affectés par le remplacement de
au début des années 90, a permis d'in- haute valeur nutritionnelle en utilisant l’huile de poisson par des huiles végé-
corporer davantage de lipides (> 25%) moins d'huile de poisson. Des recher- tales (Regost 2001, Richard et al 2006a
dans les aliments commerciaux et de ches sont conduites sur ce thème depuis et b). La seule étape du métabolisme
produire des granulés avec de hauts plusieurs années. lipidique significativement affectée par
niveaux d'énergie digestible. Ces ali- la nature des lipides ingérés est le
ments extrudés, d'un prix au kg plus L’urgence de trouver des alternatives transport des lipides : on observe une
élevé, ont amélioré considérablement à l’huile de poisson dans les aliments diminution du taux de cholestérol plas-
l'efficacité alimentaire conduisant à une piscicoles a justifié d’orienter les matique avec les régimes à base d’hui-
meilleure performance économique et recherches vers l’étude de la régulation les végétales. Cette diminution du taux
environnementale. Ils se sont donc petit des étapes clés du métabolisme lipi- de cholestérol est retrouvée dans toutes
à petit imposés, d'abord en salmonicul- dique tissulaire en fonction de la nature les classes de lipoprotéines chez la trui-
ture, puis pour la majorité des espèces des acides gras alimentaires en combi- te (Richard et al 2006a) et seulement
élevées, en particulier en Europe. nant des approches zootechniques, bio- dans les VLDL et LDL chez le bar
chimiques et moléculaires. En effet, de (Richard et al 2006b). Des études com-
L'effet d'épargne protéique par l'aug- nombreux résultats obtenus en particu- plémentaires sont nécessaires afin de
mentation du taux de lipides de l'ali- lier chez les rongeurs montrent des préciser l’origine des modifications
ment, mis en évidence chez la truite dès modifications du métabolisme en fonc- dans le transport des lipides qui pour-
le début des années 80 par nos collè- tion de l’équilibre AGPI ω6/ω3 de raient être liées à la présence de phyto-
gues américains et japonais, a été l’aliment. Ces travaux ont été conduits stérols dans les huiles végétales.
confirmé chez les salmonidés et notamment dans le cadre de deux
démontré chez la plupart des autres programmes européens RAFOA Si la nature des lipides alimentaires
espèces (Company et al 1999, Santinha (Researching Alternatives to Fish Oils n’a pas d’effet sur la teneur en lipides
et al 1999, Boujard et al 2004). for Aquaculture) et GUTINTEGRITY totaux des tissus, par contre la compo-
L’augmentation de l’apport en énergie (Gastro-intestinal functions and food sition en acides gras des poissons et du
digestible sous forme de lipides ali- intake regulation in salmonids: impact muscle reflète celle des huiles ingé-
mentaires se traduit par une stimulation of dietary vegetable lipids). Ils ont per- rées : on observe une augmentation des
du catabolisme des lipides pour la four- mis d’analyser l’incidence du rempla- acides gras caractéristiques de l’huile
niture d'énergie et une diminution de cement de l’huile de poisson par des végétale incorporée et une réduction
l'excrétion azotée. Il semble que le tur- huiles végétales sur l’ingestion volon- du 20:5 n-3 (EPA) et 22:6 n-3 (DHA)
bot fasse exception puisque la croissan- taire, la croissance, la qualité nutrition- caractéristiques de l’huile de poisson
ce est altérée lorsque le taux de lipides nelle et organoleptique de la chair (figure 4). Cependant les teneurs en
du régime passe de 10 à 17% (Regost ainsi que sur les principales voies du AGLPI n-3 sont plus élevées dans les
2001). Dans tous les cas, l’augmenta- métabolisme lipidique (absorption, tissus et la composition des phospholi-
tion du taux de lipides des aliments transport, captage, synthèse, catabolis- pides est relativement stable (Regost et
conduit à un accroissement des teneurs me) chez différentes espèces (truites al 2003). Les données accumulées ont
en lipides tissulaires, ce qui a justifié un arc-en-ciel et fario, saumon, bar, tur- permis de décrire l’évolution dans le
effort de recherches important sur la bot). Les équipes INRA et Ifremer de temps des acides gras des lipides totaux
genèse des dépôts lipidiques et sa l’UMR Nutrition Aquaculture et par un modèle basé sur une dilution des
régulation par l’apport alimentaire Génomique ont pris en charge les tra- acides gras initiaux par ceux incorporés
(Gélineau et al 2001, Regost 2001, vaux sur la truite et le bar. pendant l’essai d’alimentation. La
Rollin et al 2003 pour exemples). façon dont les acides gras s’incorporent
Les résultats obtenus démontrent la dans le poisson a été évaluée en dédui-
L'apport supplémentaire d'énergie grande tolérance des poissons vis-à-vis sant pour chaque acide gras une incor-
par adjonction de lipides a rendu de l’incorporation de lipides d’origine poration relative. Le modèle de dilution
l’aquaculture dépendante des huiles de végétale dans les aliments. Dans la et le ratio PL/LN du muscle permettent
poissons, principale source de lipides mesure où la couverture des besoins en d’expliquer la plus forte présence des
utilisée. Sous l'effet conjugué de phé- Acides Gras Essentiels (AGE) est assu- AGLPI dans le muscle comparé à l’ap-
nomènes climatiques tels que El Niño, rée (apport lipidique par la farine de port alimentaire (Robin et al 2003). Ce
de l'accroissement de la demande résul- poissons), il paraît possible de substi- modèle sera complété pour permettre, à
tant de l'essor de l'aquaculture mondia- tuer entièrement l’huile de poisson par terme, une modélisation prédictive de
le et de quotas de capture étendus à cer- des huiles végétales dans l'alimentation la qualité des acides gras de la chair en
taines espèces de pêche minotière telles des salmonidés voire du turbot sans fonction de l’alimentation.
que l'anchois du Pérou, la disponibilité altérer leurs performances de croissan-
en huile de poisson est devenue très ce. La substitution totale de l’huile de Nos résultats soulignent d’ores et
limitée. La quasi-totalité (> 90%) des poisson par des huiles végétales (colza, déjà l’intérêt d’utiliser un mélange
stocks est aujourd'hui utilisée (FAO lin) ou un mélange d’huiles végétales d’huiles végétales au lieu d’huiles
2006). Or, l’huile de poisson apporte (colza 55%/palme 30%/lin 15%) n’en- pures (lin, colza) pour minimiser les
aux poissons les acides gras longs poly- traîne pas de modifications de l’inges- variations de composition en AG de la
insaturés (AGLPI) de la famille des ω3 tion volontaire, des performances de chair, en particulier le 18:2 n-6 (acide
(ou n-3) caractéristiques du monde croissance et de l’efficacité alimentaire. linoléique). Les modifications de la

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92 / F. MÉDALE, S. KAUSHIK

Figure 4. Relation entre acides gras du régime alimentaire et acides gras de la chair
de la truite (d’après Corraze et Kaushik 1999).
Conclusions
% %
Sur la base des résultats issus des
recherches, la substitution des matières
premières marines dans l’alimentation
des poissons d’élevage est déjà enga-
gée. Cette évolution est inéluctable car
la quantité de produits marins disponi-
bles pour l’alimentation animale pla-
fonne autour de 30 MT alors que
l'aquaculture mondiale continue à se
développer et s'intensifier. Réduire
l'utilisation des produits de la pêche
pour l'alimentation des poissons d'éle-
vage par des substitutions répondant
aux critères de développement durable
est un des défis majeurs pour l’avenir
de l’aquaculture, en France comme
composition en AG de la chair ne s’ac- avons étudié ses effets sur la composi- dans le monde. Nos recherches sur ce
compagnent pas de changements tion en acides gras de poissons ayant thème seront poursuivies en étudiant
importants dans les qualités organolep- préalablement reçu des aliments à base les effets du remplacement conjoint de
tiques des produits évaluées par des d’huiles végétales. Nos résultats mon- la farine de poisson et de l’huile
tests d’analyse sensorielle (Regost trent qu’il est possible par ce biais de de poisson (programme européen
2001, Corraze communication person- réduire les teneurs en AG caractéris- «AQUAMAX»). Dans ce cadre, nous
nelle). Par contre, les profils olfactifs tiques des huiles végétales et de restau- étudierons aussi les interactions géno-
analysés par nez électronique sont dif- rer les teneurs en AGPI n-3 dans les tis- type-nutrition dans le but de sélection-
férents en fonction de la nature des hui- sus à un niveau comparable à celui ner des animaux ayant de fortes capaci-
les (végétales vs poisson). d’animaux n’ayant reçu que de l’huile tés à utiliser les matières premières
de poisson (Regost et al 2003, Corraze végétales. L’établissement de modèles
Afin de préserver la richesse en AGPI communication personnelle). Cette prédictifs de la qualité en acides gras de
n-3 de la chair de poisson, la stratégie stratégie permettrait donc de préserver la chair de poissons en fonction des
proposée est une alimentation de fini- la valeur nutritionnelle de la chair des conditions d’alimentation sera égale-
tion (quelques mois avant commerciali- poissons tout en limitant l’emploi ment une priorité.
sation) à base d’huile de poisson. Nous d’huile de poisson.

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Résumé

La farine de poisson et l’huile de poisson sont les principaux ingrédients des aliments piscicoles. L’essor de l’aquaculture mondiale a
engendré une forte demande de ces matières premières fabriquées à partir des captures de pêches et dont la production stagne. Une par-
tie des recherches sur la nutrition des poissons a été orientée par le besoin de diversifier les ingrédients des aliments piscicoles, pour rédui-
re la dépendance de l’aquaculture aux matières premières marines. Cet article décrit l’évolution des recherches sur la nutrition des pois-
sons : de l’étude des besoins nutritionnels à la compréhension des mécanismes de l’utilisation des nutriments et leur régulation par les
ingrédients alimentaires pour répondre à des enjeux environnementaux et économiques. Les objectifs scientifiques ont été d’une part, de

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mieux comprendre les conditions de l’utilisation métabolique de l’apport azoté afin de réduire l’utilisation des acides aminés à des fins
énergétiques, d’autre part, d’explorer les limites d’utilisation des sources énergétiques glucidiques et lipidiques. A titre d’illustration, il
montre les progrès que les résultats de recherche ont permis de réaliser spécifiquement dans le domaine du remplacement des farines et
huiles de poissons dans les aliments aquacoles, contribuant ainsi au développement durable de la filière piscicole.

Abstract

Evolution of INRA research in the field of fish nutrition: exploring alternatives to marine fishery-derived ingredients

Fish meal and oil are major ingredients in the feeds for intensively farmed fish. Current global aquaculture development leads to greater
demands for these ingredients originating from wild fishery resources that have themselves been stagnant over the past several decades.
A major part of our research efforts in the field of fish nutrition has thus focussed on research for alternatives to the marine fishery-based
raw materials. We present here a small overview of the evolution of research in this area : from estimating nutrient requirements to explo-
ring the mechanisms underlying nutrient utilisation as affected by dietary factors and addressing economic and environmental issues. The
scientific objectives have been to better understand protein and amino acid utilisation in order to reduce the contribution of protein for
energy purposes and to explore the limits in the utilisation of dietary non-protein energy sources such as fats and carbohydrates. The
paper tries to illustrate the achievements in the area of replacement of fishmeal and fish oil in fish feeds contributing thus towards the
sustainable development of fish farming.

MÉDALE F., KAUSHIK S., 2008. Evolution des recherches en nutrition piscicole à l’INRA : substitution des produits
d'origine marine dans l'alimentation des poissons d'élevage. INRA Prod. Anim., 21, 87-94.

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