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la friche, le maintien ou l'extension des formes d'exploitation traditionnelles avec de très faibles
rendements, le nombre de maisons en ruine. Quel bilan peut-on actuellement dresser de cette
évolution agraire, présentant de telles contradictions, et comment les expliquer?
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de travail s'ajoutaient les revenus d'un artisanat traditionnel très répandu et varié, ainsi que le
contrôle de quelques grandes routes commerciales conduisant des hautes plaines et bassins
intérieurs aux petits ports méditerranéens. Cependant, malgré la proximité des rivages, les
montagnards ont toujours tourné le dos à la mer.
Jusqu'à l'indépendance des trois pays, ces montagnes sont restées en marge de l'évolution des
plaines voisines; leur économie stagne et leur population croît lentement, plus rapidement
cependant dans l'Algérie coloniale par suite du refoulement des populations des plaines; elles
sont considérées comme des réserves de main-d'œuvre ou des contrées recherchées pour leurs
ressources naturelles, minières, forestières, hydrauliques, touristiques, et dans certains cas pour
leur production céréalière. L'ouverture de la montagne depuis les dernières décennies est rapide;
les équipements de base sont mis en place (routes et electrification, sans oublier écoles, centres
de santé et adduction d'eau potable); la multiplication des circonscriptions administratives facilite
la dissémination des services; une armature urbaine s'esquisse et en Algérie l'implantation par
l'Etat d'industries contribue à la naissance et à la croissance des villes.
C'est cependant l'augmentation rapide de la population qui est le fait le plus remarquable de ces
dernières années et qui différencie ces montagnes de celles des rives nord de la Méditerranée.
Les recensements et les sondages les plus récents montrent une croissance générale du nombre
des habitants; elle est en moyenne de l'ordre de 0,5 à 1,5 % par an. Avec actuellement près de 9
millions d'habitants, elles sont de 2 à 3 fois plus peuplées que les montagnes atlasiques. Ce sont
encore pour la plupart des ruraux, les viles ne rassemblant généralement qu'environ 10 à 20 %
de la population. Les densités les plus fortes atteignent 100 à 200 hab/km2, et souvent plus; les
anciens vides se comblent, et rares sont maintenant les secteurs qui ne comptent pas 60
hab/km2. Cette augmentation est d'autant plus remarquable que la mobilité des hommes
s'accroît; elle est ancienne, mais l'ampleur des mouvements actuels est considérable, ayant été
accentuée en Algérie par les bouleversements dus à la guerre de libération. L'exode rural et
l'émigration temporaire, nationale ou internationale, prélèvent entre 1/3 et 2/3 du croît naturel.
Dans un tel contexte, on a la surprise de constater que l'agriculture est loin d'être en perdition;
elle s'adapte aux nouvelles conditions économiques et sociales.
Les montagnes rifaines et telliennes
TELLIENNES
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sont nombreuses. Les déprises sont moins importantes qu'en Kabylie, mais les friches peuvent
localement occuper le tiers des terres. Elles sont irrégulièrement réparties, plus importantes sur
les terres médiocres des massifs gréseux et des secteurs les plus élevés, également sur les
versants situés à proximité des plaines du nord. Le contraste est grand entre petits pays où
l'agriculture est en recul et d'autres, au contraire, où elle se maintient et même se développe
avec une forte densité de population (Brûlé, 1976).
D'autres exemples de fortes déprises agraires peuvent être signalés; Béni Chougrane de l'ouest,
Titteri, Bibans, montagnes du nord de Sétif en Algérie, partiellement les Béni Snassène au
Maroc.
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l'importance des défrichements dans le matorral des Mogods, tandis que dans le nord du Haut-
Tell le mouvement de conquête se poursuit localement.
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cependant pas générale; une partie appréciable des formes d'érosion est le résultat d'un héritage
(grands ravins déjà fonctionnels au Quaternaire récent, par exemple); d'autre part, des processus
comme les glissements de terrains se produisent actuellement sous couvert végétal dense. Par
ailleurs, défrichement et conquête agricole ne sont pas systématiquement condamnables: bien
maîtrisés ils maintiennent l'équilibre des versants.
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individus ou des autorités officielles : DERRO au Maroc, barrage fruitier en Algérie dans le but de
diversifier la production du Tell méridional céréalier, plantations systématiques dans le nord du
Haut-Tell tunisien. Epars dans les champs complantés, ou regroupés en vergers, amandiers,
figuiers et oliviers, sans oublier les vignobles anciens en cours de rénovation, occupent de vastes
espaces: Rif méridional, Traras, Kabylie, monts de Miliana, pays de Guelma et ceux de la
Medjerda. Des plantations apparaissent autour des fermes et des hameaux dans les campagnes
céréalières. Dans les petites exploitations familiales des clairières forestières du pays jbala, de
Kroumirie et des Mogods, la culture spécialisée du tabac stagne, mais dans le Rif, le haschich ou
chanvre indien, communément appelé kif, connaît par contre une progression fulgurante.
Longtemps réservé aux terres irriguées des vallées du haut pays, il s'étend maintenant vers
l'Ouest et sur le versant méditerranéen en culture sèche extensive, mettant à profit une humidité
atmosphérique suffisante pour assurer des rendements honorables. Actuellement, environ 200
000 personnes vivent de la production, de la transformation et du commerce de ce stupéfiant, qui
procure des revenus considérables.
La forêt est une des grandes richesses de la montagne. La grande difficulté est de préserver les
intérêts des habitants qui y trouvent depuis toujours de multiples ressources: pâturage,
ramassage de liège, bois d'œuvre et de chauffage, charbon de bois. La protection et
l'aménagement de la forêt restent dans ces conditions difficiles, mais peuvent procurer de
nouveaux revenus grâce à l'amélioration sylvo-pastorale du matorral, au travail dans les
chantiers forestiers et au développement du tourisme.
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roirs irriguées des fonds de vallée ; on commence maintenant à les trouver sur versants en
culture sèche. Depuis les années 50, ces initiatives individuelles sont relayées par des
interventions gouvernementales, souvent spectaculaires par leur ampleur, sinon toujours
efficaces, commes les banquettes pour lutter contre l'érosion.
Assez paradoxalement, ces montagnes, pourtant très arrosées, manquent de réserves d'eau et
les terres irriguées représentent souvent moins de 2 % de la surface agricole. L'écoulement
rapide sur des terrains de forte pente et en majorité imperméables explique la médiocre
utilisation des eaux superficielles. Les réserves souterraines, sauf dans de rares massifs
calcaires, sont limitées; quelques plaines littorales ou bassins intérieurs sont mieux dotés. Les
sources, pourtant très nombreuses, sont de très faible débit et tarissent en été... Pour profiter de
l'énorme potentiel hydraulique on commence à multiplier les retenues. Des lacs collinaires sont
aménagés dans les trois pays, mais c'est en Algérie que leur nombre est le plus important (plus
de 800 achevés en 1989, dont une grande part dans les régions telliennes, Kouti, Taabni, Tihay,
1990). Une réalisation précipitée et souvent défectueuse, l'absence d'entretien, le
dimensionnement insuffisant des ouvrages par rapport à la taille des bassins-versants, expliquent
leur envasement rapide et leur faible taux d'utilisation; ils jouent plus le rôle de pièges à sédiment
que de réserves d'eau. Quant à l'eau des grands barrages, elle est destinée aux villes, aux
industries et aux cultures des plaines voisines.
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de la Grande Kabylie et du Haut-Rif central). Les vieux usages communautaires de travail
disparaissent ou se dégradent. Les différences entre les catégories sociales du monde agricole
ne cessent de s'accroître.
L'habitat est un facteur important de l'attachement des paysans à leur terre. On assiste dans les
montagnes des trois pays à une extraordinaire frénésie de constructions, rénovations ou
agrandissements, mais aussi à une multiplication des maisons nouvelles, en préservant le style
architectural traditionnel. Un peu partout, cependant, le grand cube de béton et de parpaing, à
étage débordant et toit en terrasse, d'allure citadine, est la forme la plus visible de
l'investissement de l'argent gagné à l'extérieur. La dispersion en hameaux ou en maisons isolées
gagne rapidement, expression d'un relâchement des liens sociaux et de la vie en groupe.
Parallèlement, l'évolution vers la citadinité, avec le développement des petits centres et des
villes, montre une autre forme de détachement de la terre; les centres des villages kabyles
prennent l'allure de petites médinas (Fontaine, 1982).
Conclusion
L'étude détaillée de l'utilisation du sol montre une grande différence de comportement de ces
montagnes en raison de la diversité des conditions naturelles et des héritages de l'histoire. Les
unes sont céréalières, d'autres arboricoles; ailleurs l'herbe et la forêt dominent. Tantôt
l'agriculture occupe la majorité des habitants, tantôt une large pluriactivité la relègue à un rang
modeste. L'augmentation rapide de la population et de ses besoins oblige à envisager une mise
en valeur plus efficace des ressources locales. Malgré les initiatives officielles, durant les
dernières décennies, les équipements restent insuffisants et les doléances à ce sujet sont
générales. Mais par ailleurs subsistent, et même se renforcent, les contrastes entre secteurs en
développement et d'autres, délaissés, où l'on retrouve encore la plupart des marques de
l'ancienne vie rurale. Plusieurs niveaux de marginalisation coexistent (Cherrad, 1 990) ; dans les
communes, sont négligées les parties éloignées du centre administratif privilégié par les
investissements et où se concentre la population; dans un cadre régional, les groupes de
communes isolées au cœur de la montagne sont désavantagés; à l'échelle nationale, enfin,
certaines régions sont moins aidées par l'Etat. La place de ces montagnes dans l'économie de
chacun des trois Etats n'est pas comparable. Le Rif, vaste ensemble de relief imposant et
longtemps isolé au nord du Maroc, reste à l'écart des grands axes commerciaux modernes et
apparaît comme un conservatoire de traditions agricoles avec déficience des équipements,
notamment pour le réseau routier et ('electrification. En Algérie, l'imbrication des montagnes et
des plaines telliennes est très forte et la vie rurale de la montagne est profondément marquée par
les activités de ces dernières avec leurs villes et leurs industries. En Tunisie, le Tell maritime et le
Haut-Tell, très morcelés topographiquement et mal structurés, sont sous l'étroite dépendance de
Tunis ; ils ont cependant l'avantage d'être
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les seules régions montagneuses bien arrosées et boisées du pays; cependant, malgré les
efforts des autorités, les productions agricoles ne sont pas à la hauteur des potentialités.
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