10 clés
pour réussir sa création
d’entreprise innovante
INTRODUCTION
2005 pourrait marquer le début d'un nouvel élan pour les jeunes entreprises innovantes.
Les mesures publiques prises en faveur de ces sociétés en 2004 - en particulier, le statut légal
de "Jeune Entreprise Innovante" - associées aux indices d'une reprise des financements en amorçage
et premier tour, dessinent un contexte favorable aux chercheurs et porteurs de projets.
Aussi révolutionnaire que puisse apparaître une innovation technologique, le défi - long et difficile
à relever - est de construire l'entreprise qui va la porter sur le marché. Depuis plus de 15 ans,
au sein d'Ernst & Young, une équipe dédiée aux créateurs accompagne les entrepreneurs
dans ce processus de transformation d'un projet en entreprise performante. Forte d'une expérience
acquise dans l'accompagnement de plus d'une centaine de créateurs d'entreprises innovantes,
notre équipe a fait le recensement des bonnes (et moins bonnes !) pratiques. Elle a ainsi pu
extraire de ces expériences vécues un véritable vademecum de l'entrepreneur innovant.
"10 clés pour réussir sa création d'entreprise innovante" présente les axes de travail majeurs
à intégrer pour déjouer les pièges de l'entrepreneuriat. Tout au long de cette publication,
des professionnels de la création d'entreprise innovante (investisseurs, entrepreneurs, acteurs
de l'accompagnement, les incubateurs…) témoignent de l'ensemble du processus de mise
en oeuvre en décrivant les préparatifs, les anticipations nécessaires, les obstacles à surmonter
et les opportunités à saisir selon leur propre perspective. Nous les remercions chaleureusement
pour leur contribution.
Nous vous souhaitons une lecture agréable et utile de cet opuscule : 10 clés pour réussir
sa création d'entreprise innovante.
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Témoignage "Une entreprise doit lever des fonds
quand elle n'en a pas encore besoin."
Antoine David, fondateur et ex-PDG de Sport Universal
Fournisseur de solutions de statistiques et d'animations Flash pour les sites sportifs
Dans un projet innovant, il est souvent difficile pour l'entrepreneur d'évaluer
correctement à l'avance le niveau exact d'investissements qu'il faudra mettre
en oeuvre et de prévoir en amont le plan de financement qui en découle.
Dans le cadre de Sport Universal, les fondateurs anticipaient deux à trois
ans de R&D avant de pouvoir réaliser du chiffre d'affaires sur la base de
l'innovation développée. En réalité, trois ans après la création de l'entreprise
en 1995 (qui bénéficiait déjà, avant sa création, de 2 ans de pré-R&D
en université), elle ne disposait que d'un prototype qui n'était pas
commercialisable. Il a fallu trois années supplémentaires pour pouvoir
mettre une solution sur le marché.
Plusieurs éléments sous ou mal estimés ont ainsi contribué à l'augmentation non prévue
du "burn-rate" :
O le temps nécessaire pour trouver les experts pertinents dans les questions de droit à
l'image par exemple afin d'accompagner efficacement l'entreprise.
O la longueur du processus commercial (délai de mise sur le marché et processus d'achat des
clients) et le choix de mauvais partenaires commerciaux sur le marché anglais pénalisant
ansi le démarrage de l'activité.
O l'impact de la gestion des ressources humaines : au lieu d'une équipe de 5 personnes sur 3 ans,
l'équipe a compté de 10 à 12 ingénieurs pendant 8 ans, impliquant des charges de structures
importantes non prévues au départ. En parallèle, nous n'avons pas suffisamment anticipé
les besoins en compétences marketing et commerciales, en considérant à tort que
les avantages-produit suffiraient à générer des ventes.
Face à ce décalage entre les charges et les ressources, Sport Universal a rapidement été confrontée
à l'obligation de chercher des fonds externes. Lors de nos trois premiers tours de table, nous avons
anticipé les besoins avec ce que nous estimions être une bonne marge de manoeuvre.
Pourtant, nous nous sommes trouvés dans une situation délicate lors des "closings", en raison
d'une trésorerie insuffisante qui ne nous permettait pas d'être en position de force dans
les négociations.
Finalement, pour faire face aux besoins financiers et, bien que cela ait été extrêmement défavorable
aux actionnaires historiques de la société, la cession (après plan de redressement) s'est avérée
être la seule sortie à même d'assurer la viabilité de l'activité. Sport Universal a donc vendu
ses actifs en février 2004 à SUP.
A mon sens, trois leçons sont à retirer de cette expérience :
O premièrement, une entreprise doit lever des fonds lorsqu'elle n'en a pas (encore) besoin !
O deuxièmement, il est important de réfléchir en amont et de manière approfondie au type
de partenaire recherché : Sport Universal aurait certainement gagné beaucoup de temps
si elle avait cherché des partenaires qui, outre un soutien financier, pouvaient lui apporter
un relationnel commercial et un support opérationnel, en particulier via un réseau
de contacts déjà établi (des partenaires industriels liés au milieu du sport par exemple).
J'estime que ceci nous aurait permis de réduire de près d'un tiers le temps qui a été nécessaire
pour construire le réseau essentiel au développement de l'activité.
O troisièmement, mener une réflexion de fond sur la gestion des ressources humaines. Ainsi,
on aurait pu réduire les équipes de R&D à 4 ou 5 ingénieurs clés en plus de quelques
“sous traitants stratégiques” et, par ailleurs, recruter davantage de compétences
commerciales et marketing.
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2 ESTIMER LE TEMPS D’ACCÈS
AU MARCHÉ
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Témoignage “On a tendance à être systématiquement
en avance sur le marché”
Stéphane Lavallée, Fondateur et Président Directeur Général de Praxim
Solutions logicielles de chirurgie assistée par ordinateur
Dans notre domaine de la chirurgie assistée par ordinateur,
le "time-to-market" doit être décomposé en deux parties.
O “Marché des leaders d'opinion” : pour intéresser le marché, il faut
sensibiliser les leaders d'opinion, pays par pays, spécialité par spécialité.
Nous devons donc avoir la capacité de sortir rapidement des produits
innovants, en collant à la recherche. C'est une véritable course à
l'innovation (brevets, marketing, communication,...).
O “Le vrai marché”. L'adoption de ces produits par le grand nombre
des utilisateurs nécessite ensuite beaucoup de temps : publications
cliniques, prise de confiance après utilisation, digestion des inévitables
difficultés inhérentes à tout produit médical, diffusion internationale par région, mise en évidence
claire et précise des avantages avérés du produit, image de l'entreprise, etc. Créer la confiance
dans le monde chirurgical pour une PME innovante requiert beaucoup d'efforts et beaucoup
de temps.
Au début, on équipe donc les chirurgiens un par un, en mettant en avant les nombreuses valeurs
dérivées de nos produits (outil de recherche, leadership pour le chirurgien utilisateur, valeur
marketing pour l'établissement, impact commercial pour nos partenaires industriels, etc),
cette phase demande un poids fort de notre R&D. Au bout d'un temps donné, dans telle ou
telle autre région, il faut, en matière d'équipement des systèmes, avoir franchit un certain
seuil avant de déclencher le vrai marché. La neurochirurgie assistée par ordinateur en est
un bon exemple. Une autre organisation doit se mettre en place renforçant le service client,
le marketing et la force commerciale.
Je pense que l'on a tendance à être systématiquement trop en avance sur le marché réel car
on supporte difficilement le décalage entre la sortie d'un produit innovant, qui se fait sous
la pression chaude de la compétition et le “ramp up”, c’est-à-dire l’actualisation du vrai marché.
J'ai, pour ma part, fait l'erreur de confondre pendant plusieurs années le marché des leaders
d'opinion avec le vrai marché et ainsi de surestimer mes prévisions. Nous sommes désormais
en position d'attente du décollage du vrai marché, patiemment, sans excès, prudemment, en nous
finançant par le marché des leaders d'opinion, en augmentant chaque jour la confiance de nos
clients, en renforçant chaque jour la qualité de nos produits, en communicant sur leurs avantages,
en mettant en place progressivement une organisation commerciale et un service client
internationaux.
Un facteur clé de succès me paraît donc être la capacité financière et organisationnelle de l'entreprise
à comprendre, apprécier et gérer ce décalage et, en particulier, à muter au bon moment.
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3 CONNAÎTRE SON MARCHÉ CIBLE
la trésorerie,
l’image de marque,
l'atteinte de la taille critique,
le refinancement.
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“Plus que réaliser une étude de marché,
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4 ORIENTER SON PROJET VERS LA “VENTE”
PLUTÔT QUE VERS LA “TECHNOLOGIE”
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Témoignage “Il est essentiel de s'entourer
de personnes extérieures au projet.”
Dominique Marciniak, Déléguée Régionale Adjointe de l'ANVAR, Région Nord Pas de Calais
Agence Nationale de Valorisation de la Recherche
Avant la création de l’entreprise, il est indispensable d’anticiper la façon
dont le produit va être commercialisé. En effet, dans les projets innovants,
plus de la moitié des échecs sont dus à une appréhension insuffisante
du marché.
Les entrepreneurs innovants sont souvent focalisés sur les aspects
technologiques, alors qu’il est nécessaire d’appréhender le projet
dans sa globalité. Ils ont souvent tendance à sous-évaluer les moyens
financiers nécessaires et le temps d’accès au marché.
Dans cette phase préalable, il ne s’agit pas de se limiter à une étude
de marché quantitative qui estimerait la taille du marché et la part que l’entreprise peut en prendre,
mais bien d’avoir une vision qualitative des segments de marché à toucher en priorité et
des modalités d’accès.
Il est essentiel aussi de s’entourer de personnes extérieures au projet. Elles prennent davantage
de recul que le créateur et sont en mesure d’apporter une validation complémentaire et critique
sur les études menées par l’entrepreneur auprès de ses clients (analyse des besoins, évaluation
de la réceptivité des clients au produit, stratégie commerciale…).
C’est l’un des rôles de l’Anvar, qui intervient au moment de l’étude de faisabilité par
un accompagnement personnalisé et des aides financières pour consolider le projet de création.
Par ailleurs, même après la création de l’entreprise et avant le lancement du produit, l’entrepreneur
doit rester à l’écoute de ses clients, pour ajuster continuellement son offre. Il est capital également
d’analyser les décalages entre les prévisions et les résultats réels, permettant ainsi de réajuster
son produit par rapport aux attentes.
L’Anvar continue à accompagner les entrepreneurs “post-création”, pour les aider à développer
leur projet technologique et recruter les premiers collaborateurs de l’équipe de R & D.
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5 SE DOTER D'UNE BONNE STRATÉGIE
MARKETING ET COMMERCIALE
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