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Andromaque

Corrigés
de Jean Racine
Séquence

Séance 1
Pyrrhus selon Pylade
I. Pour guider votre analyse le paradoxe de son attitude envers Andromaque tantôt
A. Les relations d’amour menacée, tantôt séduite, ainsi que vis-à-vis d’Hermione :
1) Pour décrire la relation de Pyrrhus à Andromaque, tantôt il n’en paraît pas flatté (vers 107), tantôt il revient
Pylade reprend le lieu commun des flammes de l’amour : « sous ses lois » (vers 116). C’est ce que soulignent les vers
« ses feux ont éclaté » (vers 108). Cela anticipe la vérité nue 120 et 121 dans leur deuxième hémistiche : « si peu maître
exprimée en trois syllabes « Il l’aime. » (vers 109), reprise de lui / dans ce désordre extrême ». Ici se marque
par le mot « amour » au vers suivant. À la fin de la tirade, une nouveauté de la tragédie racinienne : faire paraître
Andromaque est désignée comme l’objet de son amour : un caractère « constamment inconstant ».
« punir ce qu’il aime. » (vers 122).
2) Oreste utilise lui aussi le vocabulaire de l’amour pour C. Une scène d’exposition de tragédie
parler d’Hermione : « l’ardeur » (vers 93) et les « feux » (vers 95) 1) La tirade d’Oreste se termine par deux questions sur
précèdent la révélation crue, mise en valeur au début du vers le roi chez qui il vient d’arriver. Le lecteur comprend qu’il
99 : « J’aime. » Il dit deux fois son dessein de l’enlever, aux vers s’agit d’un personnage principal, car ces questions sont liées
94 et 99-100. Il est prêt à tout puisqu’il se déclare insensible à de la passion. Pylade, au contraire, répond uniquement
aux « périls les plus grands ». En se vouant à sa passion, avec des phrases déclaratives et informe Oreste : il est
il se « livre en aveugle au destin » (vers 98) et parle déjà dans le rôle du confident qui écoute la passion de son
de « mourir » au vers 100, même si c’est une mort relative. protagoniste et le renseigne.
3) La jalousie d’Oreste s’exprime à la fin de sa réplique. 2) Le vers 98 semble écrit pour exprimer toute la tragédie :
Il y a d’abord l’impatience marquée par deux questions « Je me livre en aveugle au destin qui m’entraîne. »
successives aux vers 103-104. Dans ces deux vers, on note La nouveauté est ici l’apparente passivité du personnage
une opposition très nette entre la première personne, Oreste, devant la fatalité, alors que chez Corneille le héros était
avec le possessif « mon » et les deux pronoms personnels l’acteur de son destin. Le verbe « entraîner » exprime dans
« me », face à la troisième personne qui représente Pyrrhus : ce vers l’aspect inéluctable de la fatalité propre à la tragédie
« Me rendra-t-il, Pylade, un bien qu’il m’a ravi ? » Dans ce dans la Grèce ancienne et qui est réactualisé par Racine.
vers, c’est le vocabulaire du vol ou du rapt qui est employé 3) Pour amorcer le suspens de la pièce, il y a deux grandes
avec le verbe « ravir » utilisé ici au sens de « ravisseur ». zones d’incertitude qui tiennent au caractère changeant de
Pyrrhus : comment va-t-il recevoir l’ambassade d’Oreste ?
B. La complexité de ces relations Qui va-t-il choisir entre Hermione et Andromaque ? C’est
1) Astyanax est l’objet d’un chantage. Oreste rappelle pourquoi les antithèses de la tirade de Pylade ont une
d’abord dans les vers 91-92 qu’il est venu pour livrer fonction dramatique importante ; elles lancent le suspens
Astyanax aux Grecs. L’enjeu politique est souligné avec le de la pièce.
mot « États ». Ensuite, Pyrrhus en fait l’objet d’un chantage
vis-à-vis d’Andromaque aux vers 112-113 : « De son fils (…)
il menace la tête ». L’objet est bien de l’ordre du chantage : III. À vous d’écrire
« Pour fléchir sa captive. » On comprend que l’arrivée Écriture d’invention
d’Oreste va donner un sens politique à ce qui n’était Il faudra être attentif aux points suivants :
auparavant qu’un chantage affectif. • La clarté de l’exposition de la situation amoureuse : Oreste
2) On note de nombreuses antithèses : « amour/haine » aime Hermione qui aime Pyrrhus qui aime Andromaque,
(vers 110), « couler des pleurs/qu’aussitôt il arrête » sans retour.
(vers 114), « amour/rage » (vers 118) et surtout • La clarté des enjeux autour d’Astyanax.
« épouser/punir » et « hait/aime » (vers 122). • L’expression d’un vrai dialogue de théâtre dans lequel
3) Pylade se sert de ces antithèses pour montrer le Pyrrhus exprime la passion qui l’anime, alors que Phœnix
caractère extrême et inconstant de Pyrrhus. Il souligne est plus neutre dans le rapport qu’il fait à Pyrrhus.

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Séance 2
Provoquer la compassion pour Andromaque
I. Pour guider votre analyse C. L’idéal aristocratique et galant de Pyrrhus
A. L’avancement de l’intrigue 1) Pyrrhus s’exprime brutalement face à Andromaque
1) Dans ce passage, la contrainte exercée par Pyrrhus sur en lui parlant de la menace grecque sans ménagement.
Andromaque et son fils est exprimée par le verbe « souffrir » En outre, les vers 287-288 sont ceux d’un guerrier : « je vole
dont le sujet est à la deuxième personne : « Puisqu’une fois à son secours / Je défendrai sa vie aux dépens de mes jours ».
le jour vous souffrez que je voie / [mon fils] » (vers 261). 2) Pyrrhus fait d’abord comprendre son impatience de
Racine rappelle donc que tous deux sont au pouvoir du roi voir Andromaque par les deux vers du début de la scène,
d’Épire. Par ailleurs, la première phrase de Pyrrhus le pose en vers très galants (vers 258-259). Plus loin, son empressement
amoureux d’Andromaque. à sauver la vie d’Astyanax est l’expression de son amour.
2) Pyrrhus informe Andromaque de la menace qui pèse 3) Dans les vers 283-288, Pyrrhus exprime de façon
sur Astyanax en trois temps : aux vers 265-266, il laisse hyperbolique ce qu’il est prêt à faire pour défendre
planer un doute ; aux vers 269-270, il annonce qu’Astyanax Astyanax. Il utilise l’imparfait du subjonctif avec une
est l’objet de la crainte des Grecs, et il précise aux vers 273- inversion du sujet pour exprimer l’hypothèse qu’il formule :
274 exactement le risque de mort qui plane sur lui. Cette « dussent-ils », « Coûtât-il », « Dussé-je ». Cette forme
rapidité et ce court suspens, juste après un compliment, aujourd’hui vieillie est ici très efficace. Sur le fond, il est
montrent la brutalité de Pyrrhus. prêt à subir le sort de la ville de Troie pour protéger le fils
3) Dès le vers 281, Pyrrhus s’engage très clairement à d’Andromaque. On peut y voir l’expression d’un sentiment
défendre le fils d’Andromaque ; il est à la fois ferme et délicat. de culpabilité pour avoir lui-même conduit le massacre
de Troie.
B. Le pathétique d’Andromaque
1) La première tirade d’Andromaque provoque l’émotion,
elle doit aller embrasser son fils. Comme ils sont tous deux III. De l’écrit à l’oral
prisonniers, cette idée est exprimée avec une négation : « Je Exemples d’axes de lecture possibles :
ne l’ai point encore embrassé d’aujourd’hui. » (vers 264). • En quoi cette scène est-elle encore une scène d’exposition ?
Dans sa demande, elle s’adresse à Pyrrhus avec le verbe A. La découverte d’Andromaque par le spectateur
« souffrez » qui veut à la fois dire « acceptez » et est connoté B. La réaction de Pyrrhus face au nouveau chantage
par la souffrance. Ce pathétique associé à l’enfant se des Grecs
retrouve dans le vers 278. On y retrouve les pleurs, deux fois C. Le caractère emporté et galant de Pyrrhus
mentionnés (vers 263 et 278). • Comment
 Racine provoque-t-il la compassion et la pitié
2) Hector est toujours évoqué par son absence. Il définit du spectateur ?
d’abord Astyanax, comme « le seul bien qui (…) reste et A. Compassion pour Andromaque et pour l’amour
d’Hector et de Troie» (vers 263). Pour Andromaque, il est de Pyrrhus
à nouveau « fils d’Hector » (vers 272), et la relation s’inverse B. Terreur devant l’évocation de la guerre et le chantage
même, puisqu’elle dit que son fils lui « aurait tenu lieu d’un sur Astyanax, mais…
père et d’un époux » (vers 279). Astyanax ne semble vivre C. Ton tendre d’Andromaque pour son fils et galanterie
aux yeux de sa mère que comme substitut d’Hector. Mais de Pyrrhus vis-à-vis d’Andromaque.
la place de l’enfant dans les mentalités depuis Jean-Jacques • Comment
 l’opposition entre Andromaque et Pyrrhus
Rousseau ayant été renforcée, le pathétique s’en trouve se manifeste-t-elle ?
aujourd’hui plus fort qu’à la création de la pièce. Dans A. Les réponses négatives d’Andromaque et son obsession
la réplique de Pyrrhus, Hector est l’équivalent de la ville du deuil
de Troie (vers 269). B. Les efforts vains de Pyrrhus, de la galanterie
3) Pyrrhus exprime le fait d’être repoussé dans sa et de la défense du guerrier
demande à Andromaque, au dernier vers du passage • Comment
 les vocabulaires pathétique, galant et guerrier
(vers 290) : avec l’expression « un regard moins sévère, » se complètent-ils dans cet extrait ?
il sous-entend que son amour est rejeté, tandis qu’avec A. La galanterie de Pyrrhus envers Andromaque
l’interrogation « Me refuserez-vous » il formule une B. Les dénégations pathétiques d’Andromaque
demande de façon élégante. C. Les hyperboles guerrières de Pyrrhus

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Séance 3
La volte-face de Pyrrhus
I. Pour guider votre analyse C. Les jeux scéniques
A. Les étapes de la volte-face 1) Au début de la scène VI, il y a en fait deux entretiens
1) Le vers 921 montre l’état d’esprit des Grecs indépendants et simultanés : Andromaque et Céphise d’un
vis-à-vis de Pyrrhus : il est haï parce qu’il veut protéger côté, Pyrrhus et Phœnix de l’autre. Aux vers 924-926,
le descendant d’Hector et méprisé parce qu’ils pensent Andromaque reprend son dialogue avec Céphise.
que c’est pour l’amour d’une femme. Au vers 922, 2) Pyrrhus donne deux ordres à Phœnix. Vers 924,
« Vous me haïssez » exprime le fait que Pyrrhus est ils font mine de sortir tous les deux. Cela confère à la phrase
repoussé par Andromaque. précédente l’allure de la fin d’une scène qui se termine sur
2) Andromaque veut susciter la pitié de Pyrrhus en le mot très fort de « courroux », ce qui met Andromaque
rappelant le massacre de sa famille (vers 928-929) et en sous pression. Au vers 947, le roi demande à son ancien
évoquant son désir de retrouver Hector, son mari mort. gouverneur de partir afin de ne pas se dédire devant lui de
Mais surtout elle le flatte en disant avoir espéré qu’il serait la résolution prise à la fin de l’acte II : « Faisons tout ce que
généreux envers son fils : « J’ai cru que sa prison deviendrait j’ai promis.»
son asile » (vers 937). Elle place Pyrrhus en situation 3) Les deux tirades suggèrent des jeux de scène : les
d’incarner un idéal, qui est aussi celui des spectateurs trois interlocuteurs d’Andromaque exigent des attitudes
de 1667. différentes. De même, Pyrrhus est tour à tour suppliant
3) Pyrrhus propose non seulement à Andromaque (vers 959) et menaçant (vers 968). Donc le metteur en scène
de sauver son fils, mais encore de faire la guerre pour peut aller de la distance froide aux jeux de scène les plus
le défendre. Il lui propose aussi de l’épouser (vers 966). expressifs, jusqu’à faire s’agenouiller le roi.

B. La force des arguments


1) Andromaque s’adresse d’abord à Céphise aux vers III. Pour aller plus loin
925-926, puis vers 927-939, à Pyrrhus avec l’apostrophe Exemples d’arguments :
« Seigneur ». Enfin, elle s’adresse à Hector mort, dans une 1) Cette scène est une scène de tragédie car :
apostrophe rhétorique (vers 940-946). Dans ce dernier • Il y a la présence de la mort (vers 928-929 et 968).
temps, elle peut exprimer à la troisième personne ce • Elle provoque la pitié pour Andromaque au rappel de ses
qu’elle demande en réalité à Pyrrhus. malheurs, la terreur au récit de la prise de Troie et la crainte
2) Au vers 936, le parfait gentilhomme élève ses pour la vie d’Astyanax.
prisonniers au rang d’hôtes et leur offre donc sa protection. • Elle est rédigée en alexandrins d’une haute tenue.
Le mot « bonté » est mis à la rime (vers 939) et Andromaque Les sentiments exprimés sont également en adéquation
établit une comparaison entre Pyrrhus et Achille. Au vers avec ce qu’on attend de princes, et sont liés à l’honneur,
942, l’adjectif « magnanime », qui exprime la générosité, à la guerre, à la passion.
est placé à la rime. 2) Voir les documents de la séance 6
3) Les trois interrogations directes de Pyrrhus à 3) et 4) Ce revirement est une surprise et un coup de
Andromaque (vers 955, 958-959) visent à la ramener à son théâtre car il rebat les cartes par rapport à ce qu’avait décidé
devoir de mère. Mais de façon sous-jacente, elles reprennent Pyrrhus à la fin de l’acte II. C’est la deuxième fois qu’il change
le chantage de Pyrrhus de manière perverse : « Ce n’est pas d’avis, puisque sa réponse à Oreste avait d’abord été
moi qui vous fais du chantage, c’est vous qui refusez de négative, à l’acte I, scène II, alors qu’à la fin de l’acte II,
vous sacrifier pour votre fils » sous-entend Pyrrhus. il avait décidé de livrer Astyanax.

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Séance 4
La fin de la pièce
I. Pour guider votre analyse C. L’évocation de la folie
A. Les étapes d’une déchéance 1) Oreste est confronté à cinq images délirantes
1) Vers 1612-1620 : il peut s’agir d’une complainte, successives : 1. « les ruisseaux de sang », 2. le retour de
Oreste se plaint de son sort. Pyrrhus, 3. l’étreinte de Pyrrhus et d’Hermione, 4. les Érinyes,
2) Vers 1621-1644 : Oreste est aux prises avec des 5. Hermione lui déchire le cœur.
évocations délirantes d’Hermione, de Pyrrhus, des Érinyes. 2) On trouve essentiellement des phrases interrogatives :
Il sombre dans la folie. quatre sont destinées au ciel (vers 1625, 1626, 1627), trois
3) « Il perd le sentiment » (vers 1645) veut dire qu’Oreste à Pyrrhus (vers 1628, 1629, 1631), deux à lui-même (vers
s’évanouit. Quand on le voit tomber, on peut le croire 1633, 1634) et enfin quatre aux Érinyes (vers1637-1641).
mort. Cette plongée dans la folie et cet évanouissement On trouve quelques exclamations pures : « Dieux » est
permettent de respecter le récit mythologique qui veut répété en anaphore aux vers 1628 et 1635, « Quoi »
qu’Oreste soit devenu fou et de conclure la pièce par ce qui (vers 1629) et « Eh bien ! » (vers 1637). Les autres phrases
ressemble à un enterrement : l’enlèvement d’un corps inerte. sont déclaratives, mais sont très souvent ponctuées par
des points d’exclamation. Tout cela exprime l’agitation
B. La fin d’une tragédie extrême d’Oreste.
1) Les vers 1614-1620 forment une apostrophe rhétorique 3) On remarque une allitération en « c » et en « r »
au « ciel », c’est-à-dire ici au destin et aux dieux qui font de sa au vers 1629. La plus connue est celle en « s » du vers 1638.
vie un tissu de malheurs.
2) Vers 1637 à 1641 : Oreste voit les Érinyes, déesses de la
vengeance du sang versé en Grèce ancienne. Leurs cheveux III. À vous d’écrire
sont des serpents (vers 1638), elles poursuivent les assassins Dans la correction, on sera attentif à trois points :
et les déchirent avec leurs griffes, ce qui les rend fous. • La clarté du récit
Les mots « mains », « enlever » et « fureurs » donnent l’image • La dignité et le tact
de la violence de sa démence. • La création d’un vrai dialogue, avec l’expression des
3) Hermione et Pyrrhus sont les deux amants du vers 1620 intérêts réels de Ménélas pour son honneur – Pyrrhus a
et ils sont morts. Dans son délire, Oreste voit Pyrrhus revenir bafoué les Grecs et trahi son engagement envers sa fille
d’entre les morts et veut le tuer à nouveau (vers 1629-1633). Hermione – et affectif : il aimait (ou n’aimait pas) sa fille.
Hermione et Pyrrhus s'embrassent, ce qui montre qu’Oreste On valorisera les références au destin.
est fou de jalousie et c’est à Hermione qu’il donne son cœur
à dévorer (vers 1642-1643). Andromaque, personnage
éponyme de la pièce, n’est pas évoquée.

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Séance 5
Autour de l’œuvre : la question de la tragédie
I. Les exigences du théâtre au xviie siècle Corneille, on craint pour Cinna et Émilie. On a pitié de la
1) Les deux pièces respectent l’unité de temps : folie d’Oreste. La peur plus que la pitié est exprimée par
le déroulement se fait en une journée. Il n’y a pas de repère le chantage autour Astyanax. La terreur elle-même, comme
temporel précis. L’unité de lieu découle de l’unité de temps. on peut la voir avec les yeux crevés d’Œdipe à la fin de la
Dans la pièce de Racine, il s’agit d’« une salle du palais de pièce de Sophocle Œdipe roi, était bannie au xviie siècle pour
Pyrrhus » ; Corneille est plus attentif à la vraisemblance ne pas choquer la bienséance.
et, bien que l’action impose deux lieux différents – 3) Deux personnages sont « constamment inconstants » :
l’appartement d’Émilie et le cabinet d’Auguste –, tous deux Pyrrhus, dont les changements d’avis entraînent tout le
sont à Rome et l’unité de lieu est respectée. L’unité d’action déroulement dramatique de la pièce, et Hermione, qui
est respectée dans les deux pièces puisque toutes les demande à Oreste la vie de Pyrrhus avant de se rétracter.
intrigues sont étroitement liées entre elles.
2) Racine ne représente aucune mort. La mort de Pyrrhus III. La question de la fatalité dans Andromaque
est rapportée par Oreste et celle d’Hermione par Pylade. 1) Les personnages cherchent à obtenir le bonheur :
3) La pièce est écrite en alexandrins. C’est la manière Pyrrhus veut épouser Andromaque, Hermione veut que
noble de s’exprimer au xviie siècle, les mots ont une grande Pyrrhus l’épouse et Oreste fait tout ce qu’il peut pour gagner
dignité, le vocabulaire est très soutenu. Les réalités les plus l’amour d’Hermione. Seule Andromaque n’exprime d’autre
crues sont souvent suggérées. désir que de pouvoir pleurer Hector avec Astyanax à ses
côtés.
II. La définition aristotélicienne de la tragédie 2) La pièce se termine mal pour Pyrrhus et Hermione qui
selon les auteurs du xviie siècle sont morts, et Oreste qui sombre dans la folie. En revanche,
1) Andromaque est tirée de la mythologie : de l’Énéide elle se termine bien pour Andromaque qui devient reine
de Virgile, créée avec des personnages de la guerre de d’Épire et dont le fils est reconnu « roi des Troyens ».
Troie, l’Iliade d’Homère, l’Orestie d’Eschyle, les tragédies 3) Raymond Picard met bien en évidence le paradoxe
d’Euripide, etc. Cinna est tirée de l’histoire réelle suivant : la fin tragique existe dès le début de la pièce,
de l’empereur Auguste et en particulier d’un épisode mais les personnages doivent croire à une échappatoire
rapporté par le philosophe Sénèque, précepteur de possible pour susciter l’intérêt du spectateur qui prendra
l’empereur Néron. progressivement conscience de l’aspect inéluctable de
2) Les deux tragédies provoquent la pitié, notamment la tragédie. Ici, Oreste fait le bilan de la tragédie au début
chez Racine pour le personnage d’Andromaque ; chez de sa dernière tirade.

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Séance 6
Mettre en scène Andromaque
I. Pour guider votre analyse Les corps expriment ici la violence des rapports humains.
A. Les décors Ce choix rapproche le théâtre de la chorégraphie
1) Racine écrit à la fin de la didascalie initiale ( p.34 ) : contemporaine. Anne Théron incarne fortement les corps
« La scène est à Buthrot, ville d’Épire, dans une salle du qui viennent amplifier la violence sous-jacente des paroles.
palais de Pyrrhus ». De la tirade de Pylade, on déduit que
le palais surplombe la mer : « Vous voyez que la mer en vient C. La diction
battre les murs » (vers 792). 1) On rappelle brièvement les règles de la diction de
2) La scénographie d’Yves Bernard alterne l’horizontalité l’alexandrin : présence d’une vraie respiration à l’hémistiche
des marches avec la verticalité de colonnes démesurées qui et insistance sur la rime qui doit « sonner ». Au xviie siècle,
correspondent à une « salle du palais ». Dans le dossier p.24, toutes les lettres étaient prononcées, y compris le « e »
on voit que le fond bleu et les grands voilages agités par muet atone en fin de vers. Mais ce dernier point risque de
le vent évoquent la proximité de la mer. Il répond donc perturber les élèves. On peut aussi le dire en le rappant 6/6.
aux indications de Racine. L’expérience est à la fois surprenante et féconde pour
3) Il n’y a pas de fond, les éléments du décor sont des les élèves.
cubes et des parallélépipèdes rectangles ajourés. Leur 2) Dans les extraits de la mise en scène d’Anne Théron,
aspect géométrique et anguleux fait de la scène un espace on voit bien que la diction s’efforce de faire sentir la
symbolique, sans forme courbe, qui sert de support à puissance des vers de Racine. La violence est suggérée par
l’expression des corps. le texte. Ici, elle est exprimée avec une force contenue qui
fait entendre les deux niveaux de l’alexandrin : la retenue
B. Les corps et les costumes et la bienséance du vers, la puissance des forces qui sous-
1) Les costumes de Virginie Merlin reprennent des tendent la tragédie.
grandes robes à l’antique et des vêtements amples qui 3) Lors de la représentation, les acteurs de Muriel Mayette
rappellent la statuaire antique. On reste donc, avec les donnaient à l’alexandrin une force musicale très importante.
colonnes du palais, dans une stylisation de la Grèce Cette musique servait de cadre au sens des vers et était plus
ancienne, d’ailleurs fort belle. Pour Anne Théron, Barbara importante que l’expression psychologique des sentiments.
Kraft a créé des tee-shirts et des pantalons noirs, proches
de costumes de danseurs, résolument contemporains.
2) Les acteurs de la Comédie-Française sont éloignés III. Vers l’oral
les uns des autres : Andromaque tourne le dos à Pyrrhus, 1) et 2) On aura avantage à faire ces exercices avec
et Céphise est spectatrice, mais du côté d’Andromaque. des groupes restreints d’élèves.
Cette disposition reproduit la situation des personnages 3) L’idéal est de faire apprendre quelques vers par cœur
les uns par rapport aux autres. aux élèves pour qu’ils se rendent compte que l’artificialité
3) Sur la photo, (Acte I, scène II) Oreste et Pyrrhus font de l’alexandrin met en valeur les mots, qui prennent ainsi
un bras de fer. Cela exprime physiquement le duel qu’ils davantage de force. Ils comprendront alors que l’alexandrin
vont se livrer pour la vie d’Astyanax et l’amour d’Hermione. est un allié dans une mise en scène contemporaine.

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Évaluation
I. Question sur le corpus (4 points) B. Dissertation
Éléments de correction : Partir du paradoxe : le personnage meurt, l’acteur survit.
• Il faut opposer le pur récit chez Racine à la I. Analyse de la représentation de la mort
représentation en scène des événements chez Hugo 1) Des morts violentes
et chez Ionesco. 2) Des morts naturelles
• Il faut aussi prendre en compte chez Hugo et Ionesco 3) Des morts symboliques
l’importance des décors : le « cabinet » de Ruy Blas, les II. La mort est le résultat de l’intrigue
éléments du décor et les lumières dans Le Roi se meurt. 1) L’inéluctabilité de la mort dans la tragédie
• On valorisera la mise en valeur de l’opposition de la 2) La mort comme résultat de la violence passée :
brutalité représentée chez Hugo avec l’aspect cérémoniel les souvenirs de la guerre de Troie dans Andromaque
présent dans l’alexandrin de Racine et dans le rituel que 3) La mort comme mouvement révolutionnaire dans
met en place Marguerite, maîtresse de cérémonie dans Ruy Blas
la mort du roi chez Ionesco. III. La mort comme fin de la vie elle-même
1) La mort naturelle progressive par l’extinction des sens
et du mouvement chez Ionesco
II. Travail d’écriture (16 points) 2) La nécessaire stylisation du théâtre : la mort en deux heures
A. Commentaire 3) Le théâtre comme « miroir de concentration » de la vie
Plan : (Victor Hugo)
I. Un récit par étapes
1) Dialogue initial (vers 1494-1495)
2) La préparation et le couronnement d’Andromaque C. Écriture d’invention
avec le discours de Pyrrhus (vers 1496-1512) Consignes de correction :
3) L’assassinat proprement dit (vers 1513-1524) • Bien observer le respect complet de la consigne dans
II. Les provocations de Pyrrhus la répartition de la parole
1) Analyse du discours direct de Pyrrhus • S’assurer que les différents niveaux de création au
2) La provocation vis-à-vis des Grecs théâtre, le texte, la mise en scène, le jeu des acteurs
3) Ses infidélités vis-à-vis d’Hermione soient bien distingués
III. La violence du récit • Vérifier que les statuts des acteurs par rapport à l’action
1) L’irritation des Grecs sont différents : Hermione est destinatrice de la mort de
2) La violence de l’assassinat lui-même Pyrrhus, Ruy Blas est celui qui met à mort et Marguerite
3) L’enlèvement prévu d’Hermione est maîtresse de cérémonie.

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