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[00:00:03] Episode 73 : l’art de vivre selon les Stoïciens.

[00:00:13] Salut à tous et à tous, c’est Hugo et je suis très content


de vous retrouver pour ce nouvel épisode qui arrive avec une
semaine de retard. J’ai eu un imprévu, la semaine dernière,
quelque chose que je n’avais pas prévu, que je n’avais pas
planifié – un imprévu – et malheureusement, j’ai pas réussi à
publier l’épisode à temps. Donc c’est pour ça qu’il arrive avec
une semaine de retard.

[00:00:39] Mais pour commencer, je voudrais vous rassurer


parce que j’ai reçu pas mal d’emails suite au dernier épisode.
Certains d’entre vous sont inquiets pour moi et pour ma santé
mentale. Bon, pas à cause des idées que j’ai partagées sur
l’héritage (même si certains d’entre vous les ont trouvées un peu
bizarre). Non, ce qui vous inquiète, c’est ce que je vous ai dit sur
l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée. Je vous ai
dit que pour moi, c’est un peu difficile en ce moment de trouver
le juste milieu. Donc, certains s’inquiètent pour ma santé
mentale. C’est très gentil, je suis vraiment touché. Mais ne vous
inquiétez pas. Peut-être que j’ai un peu exagéré dans ce dernier
épisode. Mais vraiment, tout va bien.

[00:01:28] C’est juste que je me suis rendu compte que cette


année, j’ai eu les yeux plus gros que le ventre. Ça, c’est une
bonne expression : « avoir les yeux plus gros que le ventre.»
C’est par exemple quand vous êtes au restaurant et qu’il y a deux
desserts sur la carte qui vous semblent vraiment délicieux. Alors,
comme vous ne savez pas lequel choisir, vous commandez les
deux. Mais une fois que vous avez fini le premier, vous n’avez
plus du tout faim et vous avez pas l’appétit pour manger le
deuxième. Donc ça, c’est « avoir les yeux plus gros que le ventre
». Quand on a trop d’ambition compte-tenu de ses moyens.

[00:02:06] Moi, je vous dis que j’ai les yeux plus gros que le
ventre cette année parce que j’ai lancé plusieurs projets en
même temps et c’étaient vraiment des gros projets. J’ai
commencé par refaire complètement le site Internet et, comme
je suis pas programmeur, ça m’a demandé pas mal de travail.
J’ai passé pas mal d’heures sur les forums à chercher comment
résoudre différents problèmes. J’ai aussi lancé la chaîne
YouTube en faisant une vidéo par semaine. Et puis, comme il y
a de plus en plus de personnes qui s’inscrivent à mon
programme (Build a Strong Core), eh bien là aussi, ça me
demande plus de temps pour répondre aux questions,
accompagner les personnes quand elles font les leçons, etc.

[00:02:50] Et surtout, vous savez que cet été, j’ai lancé la


création de mon deuxième cours. Ça, c’est mon gros chantier en
ce moment. Un chantier, c’est tout simplement un lieu de
construction. Par exemple, quand on construit un nouveau
bâtiment, là où on pose les fondations, où on fait les travaux,
c’est le chantier. Mais on peut utiliser aussi le mot chantier pour
parler d’un projet en cours. Donc moi, mon gros chantier, c’est la
création de mon deuxième programme. Je pensais que ça serait
plus simple vu que je l’ai déjà fait l’année dernière. Mais j’ai
décidé d’utiliser une toute nouvelle plateforme, de changer un
peu le concept des leçons, etc. Donc finalement, ça demande
encore plus de travail.

[00:03:39] Bref, j’ai vraiment sous estimé la quantité de choses à


faire pour pouvoir maintenir tous ces projets en même temps. Ce
qui fait que voilà, en arrivant à la fin de l’année, je suis un peu
fatigué. Mais ne vous inquiétez pas, la situation n’est pas
dramatique. Il n’y a rien de catastrophique. Simplement, je
commence à comprendre un peu mieux où sont mes limites.

[00:04:04] Et puis, surtout, je n’ai pas envie que ce podcast et la


chaîne YouTube deviennent des corvées. Une corvée, c’est une
chose qu’on est obligé de faire, mais qui nous donne pas
vraiment de plaisir. Par exemple, quand on doit faire le ménage
à la maison, on peut dire que c’est une corvée. Enregistrer ce
podcast et puis les vidéos pour la chaîne YouTube, c’est
vraiment quelque chose qui me donne du plaisir. Mais quand j’ai
beaucoup de travail en même temps, eh bien ça devient un peu
des corvées. Et j’ai pas envie que ça se passe comme ça. J’ai
pas envie que ce podcast devienne une corvée. C’est pour ça
que j’ai décidé d’espacer encore un peu plus la publication des
épisodes.

[00:04:46] Donc voilà, je sais pas encore vraiment quelle va être


la fréquence, mais jusqu’à la publication de mon nouveau cours,
je pense qu’il y aura peut-être un épisode toutes les trois
semaines ou tous les mois. Comme ça, ça va me permettre de
retrouver un peu d’énergie et de faire ce podcast toujours avec
beaucoup de plaisir. Et puis, une fois que j’aurai terminé ce
deuxième cours, j’aurai moins de travail, j’aurai les idées plus
claires et on pourra reprendre la fréquence de publication
normale.

[00:05:17] Voilà, c’est tout pour ce préambule. Maintenant, on va


pouvoir vraiment commencer l’épisode. Mais on ne va pas
perdre nos bonnes habitudes. D’abord, on a un témoignage à
écouter, celui de Takunda.

[00:05:31] Bonjour Hugo,


Je m’appelle Takunda. Je te salue depuis le Zimbabwe. Je te
remercie du fond du coeur pour tous les efforts que tu fais pour
partager la langue française dans le monde comme ça.
Tu as raison, il y a beaucoup de ressources en ligne pour
apprendre le français, mais après un certain temps, elles
deviennent trop faciles et je crois que le cerveau devient
paresseux. Et à cause de ça, on s’ennuie de l’apprentissage de
la langue. Mais ça, c’est mon avis. Je ne suis pas psychologue.
De l’autre côté, il y a des articles, des actualités, des vidéos, des
émissions radiophoniques en ligne, vraiment un tas de
ressources pour améliorer la lecture. Enfin, la compréhension
écrite. Mais pour la compréhension orale, il me semble qu’il y a
un tel fossé entre les resources pour les débutants et les
matériels pour les avancés, mais sans pont entre les deux. On
dirait que ton projet est ce pont-ci.
Je l’ai trouvé par hasard quand je cherchais des vidéos sur les
manifestations des Gilets jaunes ou l’incendie de Notre-Dame de
Paris, je ne suis pas sûr. Mais j’ai vu une de tes vidéos et j’étais
très content du contenu. Je passerai l’examen DELF B2 dans
deux semaines et tes vidéos dans mon emploi du temps étaient
parfaites.
Oh, je réapprends le français après l’avoir appris au lycée il y a
dix ans. Mais pour élargir mes horizons, j’ai décidé de
réapprendre le français et d’apprendre l’allemand aussi.
Pourquoi pas ? Je voudrais ajouter le mandarin à mon répertoire,
mais doucement, j’y arriverai.
Continue ton bon travail, Hugo. C’est apprécié dans le monde
entier.
Salut, mon frère.

[00:07:52] Merci beaucoup pour ton message, Takunda. Si je dis


pas de bêtises, c’est la première fois qu’on a un auditeur du
Zimbabwe dans le podcast. En même temps, j’ai l’impression de
dire ça à chaque épisode. À chaque fois, on a un nouveau pays
qui est représenté. Ça me fait super plaisir. Aujourd’hui, la
communauté InnerFrench est vraiment internationale. Et qui sait,
peut-être qu’un jour, on aura eu un auditeur ou une auditrice de
chaque pays dans le podcast. Ça serait vraiment génial ! Il
faudrait que je commence à tenir le compte.

[00:08:24] Bref, Takunda, je trouve que t’as un très bon français.


C’est vraiment très naturel.

[00:08:31] Si vous aussi, vous voulez m’envoyer un message


pour passer dans le podcast, je préfère vous prévenir, il faudrait
mieux attendre l’année prochaine parce que j’ai déjà tellement
d’enregistrements en stock que si vous m’en envoyez un
maintenant, vous n’allez pas vous entendre avant plusieurs
mois. Donc voilà, ce n’est pas la peine. Attendez un peu et
envoyez le moi plutôt l’année prochaine.

[00:09:01] Il y a quelques mois, j’ai reçu un message d’un autre


auditeur du podcast qui s’appelle Mark, qui m’avait conseillé un
podcast de philosophie en anglais dont le titre est Philosophize
this! En fait, c’est un podcast qui vulgarise les grands penseurs
de la philosophie pour qu’on puisse adapter leurs idées à notre
vie quotidienne.

[00:09:27] Et justement, il y a une école de philosophie qui s’y


prête bien. C’est celle du stoïcisme. Le stoïcisme, c’est une
philosophie qui est née en Grèce il y a 2500 ans. Alors, quand
on pense au stoïcisme, on a plusieurs aprioris. Ah oui, un apriori,
c’est une idée préconçue, un préjugé. D’ailleurs, on peut aussi
l’utiliser comme locution, je le dis parfois. Quand on dit : « a priori,
cette idée est fausse ». « A priori », ici, quand on l’utilise comme
locution, ça veut dire « à première vue.» Mais quand on utilise «
apriori » comme nom, ça veut dire « une idée préconçue », « un
préjugé » – un apriori.

[00:10:14] Alors, c’est vrai qu’on a souvent des aprioris sur le


stoïcisme. On pense qu’un stoïque, c’est quelqu’un qui n’a
aucune réaction, dont le visage impassible (autrement dit, qui ne
montre aucune émotion, pas même face à la douleur physique),
quelqu’un qui peut rester sous la pluie pendant des heures sans
bouger. Bref, c’est pas vraiment quelqu’un qu’on a envie d’inviter
à dîner !

[00:10:40] Pourtant, le stoïcisme fait un retour en force depuis


quelques années. C’est devenu très à la mode parce que cette
philosophie a été remise au goût du jour par des entrepreneurs
de la Silicon Valley. À première vue, ce retour en force peut
sembler un peu surprenant. On peut se demander comment ça
se fait qu’une philosophie née dans la Grèce antique soit
devenue une source d’inspiration pour les entrepreneurs du
XXIème siècle. C’est ce qu’on va essayer de voir dans cet
épisode. Et puis, on va aussi se demander pourquoi les conseils
des stoïciens peuvent nous aider à vivre une vie meilleure.

[00:11:22] Et surtout, je vous montrerai, à la fin de cet épisode,


que lire les Stoïciens peut être un très bon exercice de français.
Moi, personnellement, c’est quelque chose que je fais en
polonais et ça m’aide beaucoup. Donc voilà, à la fin de l’épisode,
je partagerai avec vous quelques recommandations et quelques
ressources sur le stoïcisme et sur la philosophie en général pour
vous aider à apprendre le français en lisant des choses
intéressantes.

[00:11:59] Pour commencer, on va remonter dans le temps pour


s’intéresser aux origines du stoïcisme. Comme je vous l’ai dit, le
stoïcisme est né en Grèce au IVème siècle avant Jésus-Christ,
grâce à un homme qui s’appelle Zénon de Citium. Citium, c’était
une ville de Chypre où Zénon vivait dans une riche famille de
marchands (un marchand, c’est quelqu’un qui vend des produits,
qui vend des choses, mais maintenant, on dit plutôt « un
commerçant »). Donc Zénon venait d’une riche famille de
marchands à Citium. Et quand il était adolescent, il est parti faire
ses études à Athènes.

[00:12:42] Ce qu’il faut savoir, c’est que les philosophies


antiques comme le stoïcisme, l’épicurisme, le scepticisme, le
cynisme, etc. étaient des philosophies qui prescrivaient un
certain mode de vie. Elles étaiten très orientées sur la pratique.
Bien sûr, elles s’intéressaient aussi aux idées, aux concepts, etc.
Mais elles avaient vraiment vocation à guider les hommes dans
leurs choix et leur vie de tous les jours.

[00:13:13] Zénon, lui, il voulait mener une vie exemplaire. Il


rejetait les passions comme des maladies. Il mangeait et
s’habillait simplement, modestement. Il parlait peu et, en général,
c’était une personne assez facile à vivre. C’était agréable de
passer du temps avec lui parce qu’il n’allait pas vous déranger, il
n’était pas très exigeant, etc. Et en fait, c’est cette austérité
légendaire qui est devenue un peu la base du stoïcisme et qui l’a
rendu célèbre.

[00:13:48] Mais à la fin du IIème siècle avant Jésus-Christ, le


stoïcisme a trouvé une deuxième jeunesse quand il a été importé
à Rome avec le reste de la civilisation grecque. Quand le
stoïcisme est arrivé à Rome, il a fait des adeptes. Ça, c’est une
bonne expression. « Faire des adeptes », ça veut dire qu’une
idée ou qu’un groupe réussit à convaincre d’autres personnes de
les adopter. Donc le stoïcisme a fait des adeptes. Il y a beaucoup
de Romains qui se sont, on pourrait dire, « convertis » au
stoïcisme, qui ont adopté cette philosophie.

[00:14:30] Et parmi les plus célèbres d’entre eux, on trouve


notamment Sénèque. Alors Sénèque, c’était un philosophe, un
dramaturge (il a écrit des tragédies comme Œdipe et Phèdre). Et
l’œuvre la plus célèbre de Sénèque en rapport avec le stoïcisme,
c’est un ensemble de lettres qu’il avait écrites à un ami : Les
lettres à Lucilius.

[00:14:56] On trouve également Épictète. Alors, Épictète, il avait


un statut complètement différent parce qu’il était esclave. Il a été
esclave jusqu’à l’âge de 18 ans et ensuite, il a retrouvé sa liberté
et il en a profité pour ouvrir une école stoïcienne qui a eu un
grand succès dans l’Empire romain. Malheureusement, Épictète
n’a pas laissé d’écrits, mais un de ses élèves a rassemblé ses
principaux enseignements dans un livre qui s’appelle
« Manuel », le manuel d’Épictète. Et ça, c’est une des œuvres
les plus influentes du stoïcisme.

[00:15:36] Et puis une autre figure très importante pour le


stoïcisme, c’est Marc Aurèle. Marc Aurèle, c’était bien
évidemment l’empereur de Rome au moment où l’empire était à
son apogée. Donc, on peut dire que c’était l’homme le plus
puissant du monde à cette époque. Et on a de la chance parce
que Marc Aurèle avait un journal intime dans lequel il écrivait
toutes ses pensées. Il analysait ses actes, sa conduite. Il se
donnait des conseils à lui-même pour essayer d’agir de manière
plus rationnelle, d’une manière qui soit en accord avec le
stoïcisme. Et on a de la chance parce qu’on a accès, aujourd’hui,
à ce journal qui s’appelle Pensées pour moi-même. Donc
vraiment, Pensées pour moi-même, c’est une sorte de guide de
la vie quotidienne à la sauce stoïcienne, écrit par l’homme le plus
puissant de son époque, Marc Aurèle. Donc, ça aussi, c’est
vraiment un livre important pour le stoïcisme.
[00:16:40] Mais ce qui est fascinant, c’est que le stoïcisme n’a
jamais vraiment disparu de la carte. C’est une philosophie qui a
inspiré pendant des siècles et des siècles les philosophes à
différentes époques. On peut dire que c’est une philosophie qui
a traversé les âges. Par exemple, elle a eu une certaine influence
sur le christianisme. On peut trouver, effectivement, des
parallèles entre certains préceptes chrétiens, certaines valeurs
et certaines idées qui viennent du stoïcisme. Il y a aussi un
auteur français très célèbre, Michel de Montaigne, qui a écrit Les
Essais. Et il faut savoir que Michel de Montaigne a été beaucoup
inspiré par les penseurs stoïciens. On a également Descartes.
Descartes qui a écrit qu’il faut « changer ses désirs plutôt que
l’ordre du monde.» Et ça, c’est vraiment une valeur centrale dans
le stoïcisme. On va en reparler un peu plus tard. Mais il y a aussi
le philosophe allemand Nietzsche, au XIXème siècle, qui a repris
certains concepts stoïciens pour son concept à lui d’Amor Fati,
son concept qu’il appelle « Amor Fati ».

[00:17:58] Bref, on peut dire que le stoïcisme a eu une très bonne


longévité, qu’il a continué d’inspirer les philosophes bien après
sa création dans la Grèce et la Rome antiques.

[00:18:12] Et comme je vous l’ai dit en introduction, aujourd’hui,


le stoïcisme fait un véritable retour en force depuis quelques
années. Il a été popularisé par un auteur et entrepreneur
américain qui s’appelle Tim Ferriss. C’est l’auteur d’un best seller
qui s’appelle La semaine de quatre heures. Peut-être que
certains d’entre vous l’ont lu. Tim Ferriss, il donne sa propre
définition du stoïcisme. Pour lui, le stoïcisme, c’est une sorte de
système de productivité qui permet d’atteindre ses objectifs dans
un environnement très incertain.

[00:18:56] Un peu plus tard, on a aussi Ryan Holiday, qui est lui
aussi un auteur, qui écrit beaucoup sur le marketing et les
médias, qui a décidé de vulgariser le stoïcisme à travers
plusieurs livres, dont le plus célèbre, qui s’appelle The Daily
Stoic. En fait, dans ce livre, on trouve des leçons inspirées des
grands auteurs stoïciens qui partagent des conseils, qui
partagent leur sagesse, pour nous guider dans notre vie
quotidienne. Ces deux auteurs ont inspiré pas mal
d’entrepreneurs et c’est vraiment devenu à la mode de dire qu’on
est stoïcien.

[00:29:36] Ce qui fait qu’aujourd’hui, le stoïcisme retrouve une


seconde jeunesse et on a l’impression que cette philosophie est
devenue une sorte de développement personnel. En fait, pour
ces auteurs, le stoïcisme permet d’apprendre à mieux gérer ses
incertitudes et ses peurs pour rester concentré et être plus
productif.

[00:20:00] Alors, il faut savoir qu’en France, on n’est pas trop fan
de développement personnel. Je sais pas si j’ai déjà raconté ça
dans le podcast, mais quand je suis allé aux États-Unis pour la
première fois, j’étais surpris parce que dans les librairies, il y avait
énormément de livres sur le développement personnel ou sur la
création d’entreprise, alors qu’en France, dans les librairies, on
trouve principalement des romans. Donc on voit ici deux
attitudes, deux approches qui sont assez différentes.

[00:20:31] Donc, c’est vrai qu’en France, on n’est pas trop fan de
développement personnel. Mais ça aussi, c’est quelque chose
qui est en train de changer. Et maintenant, on voit de plus en
plus ce type de livres dans les librairies. Mais même aujourd’hui,
ça reste mieux vu de dire qu’on s’intéresse au stoïcisme plutôt
qu’au développement personnel. C’est un peu plus classe.

[00:20:53] Mais les spécialistes, les universitaires qui étudient le


stoïcisme disent que c’est un peu réducteur d’avoir cette vision
du stoïcisme. Ils disent que le stoïcisme ne peut pas se résumer
à une compilation de slogans pour mieux vivre sa vie. C’est une
philosophie qui est riche, qui s’est aussi intéressée à d’autres
domaines comme la logique, l’éthique, la connaissance, la
physique, etc. Donc, on ne peut pas vraiment la réduire à un
ensemble de conseils pour vivre sa vie.
[00:21:31] Alors, effectivement, c’est une vision un peu
réductrice, mais c’est ça qui fait le succès du stoïcisme
aujourd’hui. C’est cette recette du bonheur que nous proposent
les Stoïciens. Parce qu’il faut savoir que la finalité du stoïcisme,
c’est d’obtenir le bonheur en acceptant l’ordre du monde et les
événements que nous vivons. Donc maintenant, on va
s’intéresser un peu plus en détail à la philosophie en elle-même.
On va voir quelles sont les grandes idées des Stoïciens.

[00:22:09] Dans le stoïcisme, il y a un concept central qui est


celui du détachement. Les Stoïciens disent qu’il faut distinguer
d’un côté les choses qui dépendent de nous et sur lesquelles on
doit concentrer nos efforts et de l’autre, les choses qui ne
dépendent pas de nous. Et en fait, il est inutile, il est vain,
d’essayer de lutter contre ces choses parce qu’on ne peut pas
les changer. Épictète dit : « Il faut vouloir que les choses arrivent
comme elles arrivent.».

[00:22:42] Alors là, vous vous demandez peut-être à quoi ils font
référence quand ils font cette distinction entre les choses que l’on
contrôle et celles que l’on ne contrôle pas.
[00:22:52] Les choses que l’on contrôle, ce sont par exemple nos
pensées, notre jugement, notre attitude vis-à-vis des autres,
notre comportement, nos actions, etc.

[00:23:04] Au contraire, les choses que l’on ne contrôle pas, ce


sont le passé (en fait, à quoi bon avoir des regrets ? A quoi ça
sert d’avoir des regrets ? Parce que ce qui est fait est fait et on
ne peut pas changer le passé), de la même manière, il est inutile
de s’inquiéter par rapport au futur (on ne sait pas comment les
choses vont se produire, comment les choses vont arriver et tant
qu’elles ne sont pas arrivées, eh bah c’est Inutile de s’inquiéter).
On n’a pas non plus de contrôle sur l’environnement dans lequel
on est né. Par exemple, comme Épictète, on peut naître esclave
(bon, à notre époque, c’est un peu plus rare, heureusement, de
naître esclave). Mais on peut naître dans une famille très pauvre
ou dans une famille très riche. On n’a aucun contrôle sur ça. On
n’a pas non plus de contrôle sur le temps qu’il fait, sur l’attitude
des autres à notre égard. C’est pour ça qu’il ne faut pas faire
dépendre son bonheur des autres. Si on veut à tout prix être
populaire, on risque de souffrir parce qu’on ne peut pas vraiment
contrôler la façon dont les autres nous voient et quelle opinion ils
ont de nous.

[00:24:18] Ça, c’est vraiment la clé du bonheur, selon les


Stoïciens : distinguer les choses que l’on contrôle et celles que
l’on ne contrôle pas, et se concentrer sur les choses que l’on
contrôle en se détachant du reste.

[00:24:31] Alors, cette distinction, elle nous permet d’avoir un


certain cadre pour prendre nos décisions. Mais les Stoïciens
disent aussi qu’il est très important de mettre en pratique ces
enseignements dans notre vie quotidienne et qu’il faut en
permanence évaluer l’attitude qu’on a par rapport aux choses.

[00:24:52] En fait ça, c’est une idée intéressante. Épictète dit : «


ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, mais les
opinions qu’ils en ont.» Si on est triste ou si on est heureux, c’est
pas forcément à cause des événements extérieurs, à cause de
ce qui nous arrive, mais à cause de notre attitude par rapport à
toutes ces choses. Les Stoïciens disent que notre souffrance
existe seulement dans notre imagination, que l’homme est lui-
même la cause principale de son malheur.

[00:25:24] Par exemple, je suis sûr que certaines nuits, vous


n’arrivez pas à trouver le sommeil. Peut-être que vous avez une
réunion importante le lendemain, alors vous commencez à y
penser. Et puis ça vous stresse, alors vous vous mettez à penser
d’autres choses qui vous stressent. Vous voyez les heures qui
passent. Il est 4h du matin, vous ne dormez toujours pas. Et le
lendemain, quand vous vous réveillez, vous avez mal dormi,
vous avez pas eu assez de sommeil. Donc vous allez passer une
mauvaise journée, vous allez rater la réunion que vous aviez,
etc. etc. Et là, vous voyez que vous avez vous-mêmes créé votre
malheur parce que vous auriez pu tout aussi bien ne pas penser
à ces choses-là et dormir comme un bébé, être en forme pour
votre réunion et tout se serait bien passé.

[00:26:14] De la même manière, il y a des matins où on se lève,


on est de très bonne humeur. On se dit qu’on va passer une
bonne journée. Et effectivement, tout va bien. Et puis, le
lendemain, rien n’a changé. Vous avez toujours la même vie, le
même travail. Il fait le même temps dehors. Mais vous vous levez
du pied gauche, vous êtes de mauvaise humeur. Et là, il y a de
grandes chances que vous passiez une mauvaise journée. C’est
en ça que les Stoïciens disent que notre malheur existe
seulement dans notre imagination.

[00:26:48] Et ils parlent aussi de la souffrance physique. Ils


disent qu’on peut s’entraîner à résister à la souffrance physique.
Évidemment, ça, c’est un peu plus compliqué.

[00:26:59] Les Stoïciens conseillent de restreindre nos ambitions


au sens où il ne faut pas trop en demander aux hommes. Il ne
faut pas trop en attendre des hommes. Parce que, si l’on
considère que les hommes sont bons, alors on sera forcément
déçu et malheureux. Au contraire, si on considère que les
hommes ont des défauts, alors là, on sera pas surpris, on sera
pas attristé, quand on verra des exemples de ces défauts ou de
ces imperfections.

[00:27:32] D’ailleurs, Marc Aurèle encourageait à se préparer


dès le matin aux mauvaises rencontres qu’on pourrait faire
pendant la journée. Par exemple (bon, pas à son époque, mais
plutôt maintenant), on peut penser au caissier malpoli qu’on va
voir au supermarché, ou alors au collègue qui veut prendre notre
place et qui est désagréable avec nous. Si, dès le matin, on
pense à ces situations et qu’on s’y prépare. On ne sera pas
surpris quand elles vont arriver et ce sera plus facile pour nous
d’y être insensible et de ne pas se laisser influencer par elles.

[00:28:10] Plus généralement, les Stoïciens disent qu’il faut se


préparer mentalement aux difficultés en imaginant les pires
scénarios possibles et en se demandant ce qu’on pourrait faire
s’ils se produisaient. Par exemple, on peut imaginer qu’on va se
faire licencier, qu’on va perdre notre travail. Et à ce moment-là,
on se demande ce qu’on pourrait faire pour retrouver du travail
rapidement, comment on pourrait réduire nos dépenses pour
tenir plus longtemps sans emploi. On essaye de, peut-être,
mettre à jour notre CV, de regarder dans nos contacts s’il y a des
personnes qui peuvent nous aider, mais aussi de développer
d’autres sources de revenus pour ne pas être complètement
dépendant de son travail. Bref, imaginer ces scénarios, ça nous
permet d’être mieux préparé et de mieux appréhender les
difficultés quand elles se présentent.

[00:29:06] L’exercice ultime pour ça, c’est quelque chose qui


s’appelle le « memento mori ». Autrement dit, se rappeler qu’on
va tous mourir un jour. Le but avec cet exercice, c’est pas de
sombrer dans la tristesse et la dépression, mais au contraire
d’essayer de vivre dans le présent, d’apprécier chaque moment
comme un cadeau parce qu’on sait que tout peut s’arrêter
demain. C’est pour ça qu’il ne faut pas se contenter de la
médiocrité, de faire un travail qu’on déteste ou d’être fâché avec
des personnes qu’on aime. Il faut vraiment essayer d’être la
meilleure version de soi-même possible dès aujourd’hui, et ne
pas tout repousser au lendemain. Quand on fait cet exercice, ça
nous permet de savoir quelles sont nos priorités et de travailler
dessus dès maintenant au lieu de procrastiner.

[00:30:07] Bref, vous voyez que dans le stoïcisme, il y a plein de


conseils très pratiques pour nous permettre de mieux vivre notre
vie, de prendre du recul, de se poser les bonnes questions.

[00:30:19] Et c’est d’ailleurs pour ça que le stoïcisme est un très


bon sujet pour apprendre les langues étrangères. Parce qu’en
général, ça concerne la vie quotidienne donc il y a du vocabulaire
qui est vraiment utile au quotidien. D’ailleurs, moi, j’ai récemment
fini un livre en polonais qui s’appelle Sztuka życia według
stoików (autrement dit, l’art de vivre selon les Stoïciens).
L’auteur, c’est Piotr Stankiewicz. Et j’ai trouvé que c’était
vraiment un très bon livre parce que c’est un guide pratique avec
plein de mots sur les émotions, par exemple, plein de verbes très
utiles également, qui peuvent nous servir au quotidien.

[00:31:07] Alors je vous déconseille de lire les classiques, de lire


Marc Aurèle, Sénèque ou Épictète, parce que c’est une langue
qui est un peu datée. Même dans les versions modernes, c’est
pas du français vraiment quotidien. Et puis, il y a aussi du
vocabulaire qui n’est pas toujours très utile parce qu’il parle de la
vie quotidienne, mais dans la Rome antique, donc les conditions
de vie étaient un peu différentes.

[00:31:37] Non, je vous conseille plutôt de lire des livres des


vulgarisateurs (donc des auteurs qui adaptent le stoïcisme au
XXIème siècle). Malheureusement, à ma connaissance, il y a
pas de bon vulgarisateur francophone du stoïcisme. Par contre,
il y a cet auteur américain dont je vous ai parlé, Ryan Holiday,
dont les livres sont traduits en français. Donc moi, je vous
conseille de lire celui qui s’appelle L’obstacle est le chemin. J’ai
un élève, d’ailleurs, qui le lit en ce moment et c’est lui qui m’en a
parlé. J’ai trouvé que c’était une très bonne idée.
[00:32:18] Et puis, vous pouvez aussi regarder des vidéos sur le
stoïcisme sur YouTube. Par exemple, il y a un YouTubeur que
j’adore, qui s’appelle Cyrus North, qui fait plein de petites vidéos
sur la philosophie où il explique différents concepts. Et enfin,
pour ceux d’entre vous qui ont un niveau vraiment avancé, je
vous conseille le podcast de France Culture, qui s’appelle Les
chemins de la philosophie. Je vais mettre tous les liens dans la
description de l’épisode. Donc si vous avez pas bien entendu,
vous pouvez aller sur mon site innerfrench.com et là, vous verrez
les liens pour ces chaînes YouTube, ces podcasts, ce livre, etc.
etc.

[00:33:04] Maintenant, avant de se quitter, on va écouter un


deuxième témoignage, celui d’Amy.
Bonjour Hugo,
Je m’appelle Amy. D’abord, je voudrais dire un immense merci
pour tout ce que vous faites pour nous, les étudiants
intermédiaires.
Je veux vous raconter un peu mon histoire. J’habite à Cape
Town, en Afrique du Sud. Ma langue maternelle est l’anglais et
ma deuxième langue est l’espagnol grâce à ma mère qui est
argentine. Je sors depuis 8 ans avec un homme suisse, franco-
suisse, et chaque année, nous allons passer quelques semaines
avec sa famille à Genève (normalement, pendant les mois de
juillet et août). Ce n’est pas facile de trouver la motivation
d’apprendre le français parce que presque toutes les personnes
que je connais à Genève parlent anglais. Mais dans la famille de
mon copain, ils parlent surtout le français.
Pendant six ans, j’ai entendu beaucoup le français et comme je
parle déjà espagnol, j’étais capable de comprendre un petit peu
de la conversation. Mais comme je ne pratiquais pas
régulièrement le français, c’était impossible de l’améliorer.
Début 2018, les deux parents de mon copain étaient un peu
malades et j’ai décidé d’améliorer mon français pour être capable
de communiquer avec eux en français. En mai 2018, j’ai
commencé un cours de français, mais malheureusement, c’était
un peu tard dans l’année et le cours était déjà avancé ([ils en
avaient déjà fait] plus de la moitié). Mais j’ai essayé, même s’il
ne restait pas beaucoup de temps. Bref, cet été-là, je n’arrivais
pas à parler français. J’étais complètement bloquée. C’est
comme tu dis : la langue est comme le marathon, pas un sprint.
Comme tu peux imaginer, j’étais très démotivée.
J’ai découvert ton podcast au début de l’année et j’étais très
contente de voir que je pouvais comprendre presque tout. Ça
m’a donné la confiance nécessaire pour réessayer. J’espère que
cet été, j’arriverai à parler un peu plus avec ma belle-famille.
Merci encore Hugo.
À bientôt.

[00:35:30] Merci beaucoup, Amy, pour ton message. J’ai deux


amis qui sont allés à Cape Town récemment. Ils m’ont montré
leurs photos, j’ai trouvé ça magnifique. Je pense qu’il y a de très
beaux paysages et une belle diversité. J’aimerais bien y aller un
jour. Je suis vraiment content de savoir que mon podcast t’a
remotivée après cette première expérience. Bon, pour être
honnête, c’est souvent comme ça. Quand on apprend une
langue, la première fois qu’on est confronté à la vie réelle avec
des locuteurs natifs, ça peut nous sembler vraiment difficile
parce que, dans les cours, les choses sont simplifiées donc voilà,
on a l’impression de comprendre un peu. Mais comme tu le sais,
c’est un marathon et ça demande des mois, voire des années,
avant d’être vraiment capable d’utiliser la langue dans la vie
réelle. Mais il ne faut pas se décourager. Il ne faut pas
abandonner. Donc, je suis content que tu aies repris ton
apprentissage.

[00:36:23] Tu m’as envoyé ce témoignage il y a quelques mois


donc, entre-temps, j’imagine que tu es allée voir ta belle-famille
en Suisse. Je suis sûr que c’était plus facile que la première fois.
Envoie-moi, un petit message pour me dire comment ça s’est
passé. Je suis curieux de le savoir. Et merci encore d’avoir fait
cet enregistrement pour moi.

[00:36:52] Voilà, on va terminer cet épisode sur le stoïcisme.


J’espère que ça vous a plu. Comme d’habitude, si vous voulez
me soutenir, vous pouvez laisser une petite évaluation sur
iTunes ou sur Facebook, ça me fera très plaisir. On se retrouve
dans trois semaines ou un mois, je sais pas encore. Et en
attendant, n’oubliez pas de faire un peu de français tous les
jours.
Merci et à bientôt !

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