Périménopause
Geneviève Plu-Bureau, Brigitte Raccah-Tebeka
PLAN D U C H A P IT RE
Périménopause : définition et épidémiologie
De la physiopathologie à la clinique
Quels symptômes peuvent être les témoins de la
périménopause ?
Prise en charge de la périménopause
Traitement de la périménopause
La périménopause est une période de transi-
tion très particulière de la vie des femmes, qui
s'achève à la date de la ménopause. Cette dernière
commence, par définition, un  an après les der-
nières règles. La périménopause comprend donc
deux  périodes successives  : la première se situe
avant que les règles ne cessent, la seconde corres-
pond à l'année qui suit les dernières menstrua-
tions. La périménopause est caractérisée par des
modifications hormonales à l'origine d'une symp-
tomatologie clinique parfois floride et invalidante
pour nombre de femmes.
Périménopause : définition
et épidémiologie
La périménopause, période de bouleversements
hormonaux précédant la ménopause, résulte de
l'altération des fonctions exocrine et endocrine
ovariennes responsable de grandes fluctuations
hormonales [1–3].
Son diagnostic est avant tout clinique. Elle
est, en effet, évoquée devant l'association d'une
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altération des cycles (raccourcissement ou irré-
gularité) et de signes cliniques d'hyper-, puis
d'hypo-estrogénie.
En raison de l'importante variabilité des taux
hormonaux, il n'y a que peu d'indications à réaliser
des dosages hormonaux à visée diagnostique dans
La ménopause en pratique
ce contexte.
En se fondant sur la survenue des premiers
troubles du cycle, l'âge médian du début de la
périménopause se situe autour de 47  ans [4,
5]. Néanmoins, il existe une grande variabilité
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Chapitre 1
interindividuelle quant à sa durée et son expres-
sion. En effet, sa durée est largement influencée
par l'âge de début des troubles du cycle, l'eth-
nie et l'indice de masse corporelle (IMC) des
femmes [6]. Elle peut alors osciller entre 4,37
et 8,57  ans, avec une durée médiane d'environ
quatre ans. Plus rarement, cette phase de tran-
sition se réduit à son minimum pour entraîner
un arrêt brutal des règles sans troubles du cycle
préalables.
La périménopause est la période qui précède
la ménopause. Sa durée médiane est d'environ
quatre ans.
De la physiopathologie
à la clinique
Un groupe de travail constitué d'experts
(Reproductive Aging Workshop) a initialement
publié en 2001 (version révisée en 2011) une repré-
sentation schématique des différentes périodes de
la vie des femmes particulièrement axée sur la
période de transition ménopausique (figure  1.1)
[7, 8]. Ainsi, 10  différentes phases combinent de
manière subtile les symptômes cliniques, biolo-
giques et échographiques  : longueur et régularité
des cycles, modifications hormonales ([FSH],
[AMH]) et compte des follicules antraux (CFA).
Si cette classification est importante, notamment
pour unifier les travaux de recherche, en pratique
clinique il n'est souvent pas nécessaire de combi-
ner ces trois aspects pour comprendre, expliquer
et informer les femmes.
Ainsi, plus classiquement, la périménopause
se décompose schématiquement en trois  grandes
phases successives, responsables de symptômes
d'hyperestrogénie, puis d'hypo-estrogénie, ce qui
aboutit à la ménopause, lorsque les règles ont défi-
nitivement disparu [9].
3
réservés.
 Partie I. Généralités

A B
Stades –5 –4 –3b –3a –2 –1 +1a +1b +1c +2

Vie reproductive Transition Postménopause

Terminologie

ménopausique
Précoce Acmé Tardive Débutante Tardive Débutante Tardive

PÉRIMÉNOPAUSE
Durée Variable Variable 1–3 ans 1 an 3–6 Reste de la vie
ans

Critère principal (cycle menstruel)

Cycle Régulier Régulier Régulier Changement Variable Irrégulier Aménorrhée définitive
menstruel (variable) discret Règles > 7 Cycles > 60
jours jours
Irréguliers

Critères complémentaires (Biologie, échographie)

FSH Basse Variable ↑ variable ↑ > 25 ↑ ↑ Variable ↑↑↑
AMH Basse Basse Basse Basse Basse Très bas
Inhibine B Basse Basse Basse Basse Très bas

CFA Faible Faible Faible Faible Très faible Très faible

Caractéristiques cliniques
Symptômes Symptômes Symptômes vasomoteurs Atrophie
vasomoteurs Très probables urogénitale
possibles

Âge moyen
(rang) 46 ans (34–54) 51 ans (40–60)
Figure 1.1 Les différents stades de la période de transition.
(A) premières règles, (B) dernières règles. CFA : compte des follicules antraux. Source : adapté de Soules et al. 2001 [7] et de Harlow
et al. 2012 [8].

Première phase : Troubles du cycle

raccourcissement des cycles,
ou « phase folliculaire courte »
Cette première phase résulte de la diminution
progressive du capital folliculaire ovarien et
de l'appauvrissement de la qualité ovocytaire.
Cela engendre une altération du recrutement
et de la dominance folliculaire. La sensibilité de
la réponse des cellules de la granulosa à la FSH
va diminuer progressivement. Dans un premier
temps, une baisse des sécrétions d'inhibine B
et d'AMH va survenir, puis, seulement dans un
second temps, apparaît une augmentation de
libération de la FSH [10–13]. L'absence de modi-
fication initiale de la LH témoigne de la diffé-
rence des rétrocontrôles inhibiteurs exercés par
l'ovaire sur la sécrétion hypophysaire des deux
gonadotrophines.
Cliniquement, cette maturation folliculaire accélé-
rée provoque un raccourcissement progressif des
cycles, principalement par réduction de la phase
folliculaire. Les cycles deviennent plus courts
(< 25  jours). La phase folliculaire est raccourcie
(9–10 jours), l'ovulation, plus précoce, alors que la
phase lutéale reste de durée normale.
Autres symptômes
Ce phénomène peut être responsable de la for-
mation de kystes fonctionnels, particulièrement
fréquente dans cette phase de la périménopause.
Secondairement, une maturation multifollicu-
laire associée à une augmentation de l'activité de
l'aromatase peut être responsable d'une hyperes-
trogénie. Elle se caractérise par l'apparition de
différents symptômes tels que des mastodynies,

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des troubles de l'humeur (irritabilité, angoisse,
troubles du sommeil), des troubles neurovégé-
tatifs (troubles du transit, nausées, asthénie),
des céphalées ou encore une prise de poids [14,
15]. Par ailleurs, cette hyperestrogénie peut
également révéler ou aggraver des pathologies
mammaires et/ou utérines estrogénodépen-
­
dantes. En effet, il est fréquent de voir s'aggraver à
cette période une pathologie mammaire (masto-
dynies invalidantes, mastopathie fibrokystique),
une hyperplasie endométriale, des myomes, une
adénomyose, une endométriose ou une patholo-
gie néoplasique.
Fertilité
Lors de cette première phase, l'ovulation per-
siste de qualité variable. Il est donc essentiel de
maintenir une contraception efficace si néces-
saire [16].
Deuxième phase : « phase
de corps jaune inadéquat »
Cette deuxième phase est caractérisée par la
raréfaction des follicules, leur mauvaise qualité,
ainsi qu'une inefficacité croissante de la FSH à
parvenir à une maturation folliculaire cyclique
normale.
Troubles du cycle
La durée des cycles est alors très aléatoire,
alternant des phases courtes et plus longues.
Les cycles sont anarchiques, associant des
phases folliculaires prolongées et des phases
lutéales courtes.
Autres symptômes
Lors de cette phase, tous les symptômes cli-
niques peuvent s'observer. En effet, les ovu-
lations ne surviennent plus que de façon
anecdotique et imprévisible. L'élévation de
la FSH, amorcée lors de la première phase,
s'accentue. Le corps jaune de mauvaise qua-
lité entraîne une phase lutéale plutôt courte,
durant de 10 à 12  jours, et une concentra-
tion de progestérone plasmatique diminuée.
Parallèlement, le taux d'estradiol plasmatique
est fréquemment élevé (> 200  pg/ml), secon-
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Chapitre 1. Périménopause
daire à l'hyperstimulation de la FSH. Ainsi, il
est fréquemment observé des signes d'hyperes-
trogénie, en particulier des mastodynies par-
fois invalidantes.
Fertilité
La diminution du capital folliculaire entraîne
des ovulations de moins bonne qualité, res-
ponsables de la baisse de la fertilité. Le corps
jaune, caractérisé par une sécrétion moindre
de progestérone, devient inadéquat. La baisse
de la fertilité est largement amorcée. Il peut
néanmoins persister une ovulation suffisam-
ment adéquate pour aboutir à une grossesse,
ce qui impose le maintien d'une contraception
efficace.
Troisième phase : allongement
des cycles
Les follicules deviennent progressivement résis-
tants à la FSH, ne permettant pas une matura-
tion folliculaire complète à chaque cycle.
Troubles du cycle
Lors de cette dernière phase, les cycles
deviennent de plus en plus irréguliers, le plus
souvent très longs. De façon aléatoire, une
maturation folliculaire aura lieu, avec, éven-
tuellement, une ovulation. Les menstruations
deviendront de plus en plus rares.
Autres symptômes
Une alternance de phases d'hyperestrogénie et
d'hypo-estrogénie peut apparaître, avant une
phase d'hypo-estrogénie complète traduisant la
ménopause (tableau 1.1). Cliniquement, un syn-
drome climatérique peut émerger  : bouffées de
chaleur, sueurs nocturnes, troubles de l'humeur
et du sommeil, baisse de la libido, sécheresse
vaginale, etc. Ces symptômes peuvent exister
bien avant la phase de ménopause chez certaines
femmes, comme l'ont montré plusieurs études
longitudinales analysant des femmes durant la
période de transition de la périménopause vers la
ménopause [17].
 Partie I. Généralités

Tableau 1.1 Les signes d'hypo- cycle, un certain nombre de conséquences patho-
et d'hyperestrogénie. logiques au niveau des organes cibles.

Hyperestrogénie Hypoestrogénie
Sur le plan mammaire
Mastodynies Bouffées vasomotrices
Ménorragies (↗ FSH) On observe régulièrement des mastodynies (ten-
Prise de poids Sueurs nocturnes sion mammaire cyclique des seins, traduisant
Gonflement abdominal Douleurs articulaires l'œdème tissulaire) et une plus grande fréquence
Frilosité de mastopathies bénignes, en particulier de mala-
Troubles de l'humeur
Asthénie dies fibrokystiques.
Troubles du sommeil
Troubles de la libido
Sécheresse vaginale Sur le plan utérin
Dyspareunie L'insuffisance en progestérone peut être responsable
d'une hyperplasie endométriale glandulokystique et
de fibromyomes utérins. Ainsi, il n'est pas rare d'ob-
Fertilité server des ménorragies, voire des hémorragies en
Une étude de N. Santoro et al. publiée récemment lien avec l'hypertrophie endométriale, ou des phé-
montre que les ovulations persistent jusqu'à quatre nomènes d'adénomyose diffuse particulièrement
à cinq  ans avant la dernière menstruation, dimi- fréquents à cette période. Le déséquilibre estropro-
nuent ensuite jusqu'à ne plus concerner « que » gestatif, aux dépens de la progestérone, entraîne
environ 22  % des femmes à un  an des dernières aussi un certain nombre de symptômes prémens-
règles [18]. La contraception devra donc être truels (sensation de gonflement généralisé avec prise
adaptée aux signes fonctionnels de chaque femme, de poids, sensation de pesanteur abdominale et des
sans, bien sûr, l'interrompre prématurément. membres inférieurs, anxiété).

Sur le plan ovarien

La périménopause est constituée de plusieurs
phases alternant des modifications hormo-
nales qui engendrent des troubles du cycle très
variables. Ces phases s'accompagnent de symp-
tômes d'hyper- ou d'hypo-estrogénie.
La fréquence des kystes fonctionnels ovariens aug-
mente habituellement dans cette période. Ils sont
secondaires à l'existence d'un corps jaune inadé-
quat et s'observent le plus souvent dans les phases
d'hyperestrogénie clinique.

Quels symptômes peuvent Sur le plan cérébral

être les témoins
de la périménopause ?
Les signes de la périménopause peuvent être extrê-
mement variés, à la fois dans leur présentation et
leur intensité. Certaines femmes décrivent une
symptomatologie foisonnante alors que d'autres
ne s'aperçoivent qu'à peine de cette transition.
Enfin, plus rarement, chez certaines femmes,
l'aménorrhée va s'installer définitivement direc-
tement sans succéder à une phase de troubles du
cycle. L'insuffisance lutéale, principale consé-
quence de la périménopause, réalisant le plus
souvent un état d'hyperestrogénie soit absolue,
soit relative, entraîne, en dehors des troubles du
Il n'est pas exceptionnel de voir apparaître les
symptômes vasomoteurs dès la périménopause
tardive au cours des phases d'hypoestrogénie [17].
Ceux-ci peuvent être accompagnés de troubles
de l'humeur et de troubles du sommeil, souvent
transitoires. En effet, ils disparaissent spontané-
ment lorsque les phases d'hyperestrogénie ou de
sécrétion adéquate d'estradiol reprennent.
La période de périménopause s'accompagne fré-
quemment de symptômes mammaires (mastody-
nies et/ou mastopathies fibrokystiques), ovariens
(kystes fonctionnels) ou utérins (hypertrophie de
l'endomètre).

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Prise en charge
de la périménopause
Comment faire le diagnostic
de périménopause ?
L'association de l'âge et de troubles du cycle suf-
fit souvent à en établir le diagnostic. Cependant,
il convient de rechercher l'existence de patho-
logies (mammaires ou utérines) nécessitant
une prise en charge plus spécifique dans cette
période de la vie.
Les périodes d'aménorrhée longues posent
parfois un problème diagnostique : s'agit-il d'une
ménopause sans symptômes vasomoteurs ou d'une
phase de périménopause avec sécrétion d'estradiol
non contrebalancée par un taux suffisant de pro-
gestérone ? Cette dernière situation peut faire le lit
de réelles pathologies, notamment endométriales.
D'où l'importance, devant toute aménorrhée chez
une femme âgée de plus de 45 ans, de vérifier l'ab-
sence d'hyperestrogénie relative, à l'aide d'un test
au progestatif qui sera alors positif.
La situation de la femme hystérectomisée est
plus délicate. L'apport des tests hormonaux (FSH
et estradiol) conserve un intérêt, uniquement
ponctuel, en raison des grandes fluctuations au
cours du temps de cette période.
Des examens complémentaires
sont-ils nécessaires ?
C'est principalement l'examen clinique qui
guidera la prescription éventuelle d'examens
complémentaires.
Comme nous l'avons vu plus haut, les dosages
hormonaux sont inutiles du fait des grandes fluc-
tuations au cours du temps. L'examen clinique,
notamment pelvien, permet de s'assurer de la
persistance d'une certaine imprégnation hor-
monale au niveau des muqueuses, notamment
vaginales. L'imagerie sénologique peut être com-
mencée avant 50  ans, âge de début du dépistage
généralisé, si les symptômes cliniques le justifient
(mastodynies, palpation de nodules mammaires,
par exemple). Il en est de même de l'imagerie pel-
vienne : une échographie par voie vaginale devra
être réalisée dès qu'il y aura un doute quant à
l'existence d'une pathologie utérine ou ovarienne,
fréquente dans cette période. Elle permettra de
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Chapitre 1. Périménopause
rechercher, en cas de ménorragies, de douleurs
pelviennes ou de métrorragies, l'existence d'une
pathologie de la cavité utérine ou des ovaires.
La prise en charge de la périménopause est le plus
souvent clinique et ne nécessite pas dans la grande
majorité des cas d'examens complémentaires.
Traitement de la périménopause
Les traitements à proposer dans cette période
dépendent à la fois des symptômes cliniques et de
l'éventuel besoin contraceptif. Aucun traitement
n'est recommandé en l'absence de symptômes.
Aucun besoin contraceptif
Les phases d'hyperestrogénie discrètes (relatives
ou absolues) peuvent être gérées simplement par la
prescription de séquences de 10 jours de progesté-
rone ou de progestatif, ce qui permet de régulari-
ser les cycles et de minimiser les effets secondaires
utérins ou mammaires de cet état hormonal.
Si les symptômes utérins ou mammaires sont
plus sévères, il est habituellement proposé des
thérapies progestatives à doses antigonadotropes.
Le cas particulier de l'adénomyose diffuse comme
symptôme isolé peut aussi faire appel au dispositif
intra-utérin au lévonorgestrel [19].
Nécessité de maintenir
une contraception
Ces sont les dispositifs intra-utérins au cuivre ou
au lévonorgestrel qui constituent la contracep-
tion de premier choix (en dehors d'une éventuelle
contraception définitive) dans cette période de la
vie. En effet, la prescription d'une contraception
estroprogestative nécessite l'absence de tout fac-
teur de risque vasculaire, ce qui est peu fréquent
dans ce contexte. La contraception progestative
microdosée est souvent source d'hyperestrogénie
du fait d'un blocage ovarien souvent insuffisant.
L'utilisation de progestatifs à doses antigona-
dotropes n'a pas d'AMM dans l'indication de la
contraception mais peut être utile en cas de patho-
logie mammaire ou utérine associée.
 Partie I. Généralités
Les traitements de la périménopause dépendent
des symptômes cliniques et de la nécessité de
conserver ou non une contraception.
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