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Mot parthe : yātūk alors qu’en moyen-perse : jādūg
Ils portent un message et disent : « Menez-nous devant le roi Vištasp »
Et le roi Vištasp dit : « Qu’on me les introduise »
Ils furent introduits, firent hommage à Vištasp, lui tendirent le message
Awraham, secrétaire, se levant devant lui et en donna lecture
Et dans ce message, il était ainsi dit :
« Sire, j’ai entendu que vous avez reçu la pure foi d’Ohrmazd
Sinon, que vous y tenez, bien qu’un lourd préjudice doive en naitre pour nous.
Si votre majesté abandonne sa foi et reviens à nos dieux, nous nous révèrerons
Et nous offrirons beaucoup d’or et d’argent, beaucoup de beaux chevaux et
bien des trônes royaux
Si fidèle à cette fois, vous refuser nos dieux, nous nous élancerons, brûlant et
dévastant
De bêtes et d’humains, dépeuplant le pays, imposant à vous-même un dur
labeur d’esclave
Entendant ces paroles, lourde fut son angoisse
Quand le fier général, le preux Zarēr, apprit l’abattement du roi, il entra au
palais
Et dit au roi Vištasp : « Sire, daignez permettre que je fasse moi-même réponse
à ce message
Et le roi Vištasp dit : « réponds à ce message »
Vers la forêt blanche et Marv la mazdéenne, région sans mont ni lac, dans cette
plaine de Hāmūm s’avanceront nos chevaux
Vous partirez de là, d’ici nous partirons, jusqu’à ce que vous nous voyiez et que
nous vous voyions
Puis nous vous montrerons, quelle fin ont les démons
Awraham, secrétaire, y apposa son sceau et le sorcier Vidrafš, Namxāst fils de
Hazār, reçurent le message, saluèrent et s’en furent »6
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Benveniste, 1932
Vištāsp ordonne alors à Zarēr de faire allumer des feux sur la montagne des
Dieux afin de convoquer au palais dans un mois tous les hommes valides, de dix
à quatre-vingt ans, à l’exception des prêtres qui s’occupent du feu Wahram 7. A
celui qui ne s’y rendrait pas, il promet qu’il sera empalé.
Tous les hommes forment une armée avançant sur des bêtes, des chevaux et
des chars. Ils portent des haches, des carquois et des flèches, des cuirasses
quadruples brillantes. Ils se mettent en marche, et le jour et la nuit se
confondent.
Vištāsp fait alors venir son ministre, le visionnaire astrologue Jāmāsp pour
l’interroger sur l’issue du combat.
« Puissé-je n’être pas né, ou né, que mon destin m’eût fait mourir au loin ; ou
que je fusse un oiseau pour tomber à la mer !
Ou sire, que cette question ne me fut pas posée. Mais puisqu’elle m’est posée,
je n’ai d’autre désir que d’y répondre au vrai. »8
Les prévisions du sage sont funestes et il prédit :
« Heureux celui qu’aucune mère n’enfantera, qui naquit pour mourir ou qui,
resté au loin, échappe à ce destin.
Car au jour de l’assaut mainte mère sera sans fils et plus d’un fils sans son père,
plus d’un frère sans son frère, plus d’une femme sans son époux.
Nombreux sont les chevaux qui, furieux, erreront parmi les Chionites sans
retrouver leur maître.
Heureux qui ne peut voir ce sorcier de Vidrafš. Il vient, rallume la lutte et abat,
par traitrise, le valeureux Zarēr dont on prend le coursier. »
Ne voulant pas y croire, le roi s’élance sur l’astronome et le menace de lui
couper la tête. Revenant à la raison, il se rassied et lui ordonne de continuer le
récit de sa vision. L’astrologue annonce : alors que tout semble perdu, le fils de
Zarēr, Bastwar, pourtant toujours enfant à dix ans, se rend devant le roi et le
prie de le laisser aller terrasser l’ennemi pour venger son père. Elu d’Ohrmazd
et guidé par l’âme de son père qui commande à ses jambes de diriger son
cheval et à ses mains de savoir tirer à la manière d’un archer, il se rend sur le
champ de bataille et prononce cette incantation à la flèche qui liera son destin,
le fera vaincre les chionites et leur sorcier Vidrafš :
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Dieu du feu et feu hiérarchiquement le plus important pour les Zoroastriens.
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Benveniste, 1932
« Or, flèche, quitte mes mains, victorieuse de tous ; que tu frappes ou ripostes,
porte ton nom vaillant, porte l’ennemi à la mort !
Or coursier et bannière de cette armée d’Iran, demeurez à la tête, procurez-
nous la gloire jusqu’à l’éternité. »9
Quelques liens
Benveniste, Emile (1932), "Le mémorial de Zarēr, poème pehlevi mazdéen",
Journal Asiatique: pp.245–293
Boyce, Mary (1983), "Parthian Writings and Literature", in Yarshatar, Ehsan
(ed.), The Seleucid, Parthian and Sassanian Periods, Cambridge History of Iran,
Vol. 3(2), Cambridge University Press, pp. 1151–1165
Jamasp-Asana J. M. (1971-72), The Pahlavi Texts Contained in the Codex MK II,
Bombay, 1913, repr. Tehran, pp. 1-16
Lazard G. (1985), “La métrique de la poésie parthe,” in Acta Iranica 25, 1985,
pp. 371-99
Monchi-Zadeh D.(1981), Die Geschichte Zarēr’s, Uppsala, (reviewed by
MacKenzie D. N. (1984), IIJ 27, , pp. 155-63)
Utas B. (1975), “On the Composition of the Ayyātkār ī Zarēran,” in Acta Iranica
5, 1975, pp. 399-418; and
http://www.iranicaonline.org/articles/ayadgar-i-zareran
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