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liberté
Texte écrit dans le cadre des travaux pratiques (FILO 1140, dirigés par M. Lambert) rattachés
au cours Morale générale (FILO 1350, O. Deprez) à l’Institut Supérieur de
Philosophie (UCLouvain, année ac. 2002-2003).
1. Introduction
Liberté. De nos jours, ce mot est utilisé quotidiennement, nous sommes libres de faire ceci, pas
libres de faire cela etc. Mais au fond, nous ne nous posons que rarement la question de savoir
ce qu’est la liberté et ce qu’elle implique. On retrouve dans la philosophie de Sartre – comme
on le retrouve d’ailleurs dans beaucoup d’autres – ce thème de la liberté. Sa philosophie est «
existentialiste », c’est-à-dire qu’elle repose sur la subjectivité, sur la personne consciente qu’est
chaque individu humain. C’est au sein de cette subjectivité que nous retrouverons les valeurs
fondatrices de la liberté sartrienne.
Nous nous proposons ici de parcourir cette thématique de la liberté et des questions qui
l’accompagnent. La première partie présente une brève biographie de Sartre ; elle nous apparaît
utile car elle nous permet de positionner sa philosophie dans un contexte temporel et sociétaire
plus large que celui évoqué dans ses textes. La deuxième partie est une analyse du concept de
la liberté telle qu’il nous est présenté dans un extrait de L’être et le néant. Enfin, la troisième
partie, abordera le thème de la liberté chez Sartre d’une manière plus transversale au travers
d’autres écrits de Sartre (et particulièrement L’existentialisme est un humanisme). Ces trois
parties seront suivies d’une brève conclusion ainsi que d’une bibliographie non exhaustive à
laquelle nous renvoyons le lecteur pour approfondir sa recherche.
Mobilisé en 1939, il est fait prisonnier, puis revient à Paris. Après la guerre, il s’engage alors
politiquement, contre le colonialisme notamment, et devient proche des communistes, qu’il
soutient sans jamais adhérer au Parti, jusqu’à la répression de l’insurrection hongroise en 1956.
C’est dans L’être et le néant, publié en 1943, que Sartre fonde à proprement parler
l’existentialisme français athée. Dans cette œuvre majeure de sa philosophie, le monde y est
décrit comme le résultat du travail néantisant du Pour-soi sur l’En-soi. Le Pour-soi désigne le
mode d’être de la conscience, propre à l’existant humain. La conscience se projette hors de soi,
dans les choses et dans l’avenir. Elle n’est pas, mais existe, c’est-à-dire qu’elle est pure
puissance d’échappement, toujours à distance d’elle-même. Cette conscience fait apparaître le
monde en se projetant sur l’En-soi, lui prêtant son absence d’être, tout en étant elle-même
hantée par cette plénitude d’être aveugle qui l’attire et la rejette en même temps. L’homme se
définit ainsi par le vain projet de fonder son être, pour échapper à la contingence de son
existence.
Sartre décède à Paris en 1980, à l’âge de 75 ans ; laissant derrière lui l’œuvre d’un des derniers
grands intellectuels français engagés. Ses funérailles rassemblèrent la communauté
intellectuelle et le peuple de gauche français.
Une autre façon de dire serait : quand je pose un acte, je choisis mon acte parce que je me
choisis. Choisir, c’est se choisir.
S’il faut définir la liberté, c’est donc une capacité à me choisir moi-même et de différer de celui
que je suis. Si on veut changer notre condition, cela n’appartient qu’à nous. La liberté est «
l’étoffe de mon être ». Elle implique nécessairement la responsabilité, le choix. Comme nous
allons le voir immédiatement, « l’homme n’est rien d’autre que ce qu’il se fait ».11)
Ces questions sont légitimes, car nous ne pouvons nier qu’en dehors de nous, il y a un monde
et un agencement des choses selon certaines circonstances. Mais pour Sartre, on ne peut pas
dire que les situations dans lesquelles je me trouve « déterminent » ma conduite. En projetant
– Sartre part du « projet » de tout homme – mes intentions, mes visées d’avenir sur la situation
actuelle, je la transforme librement, ou bien je transformerai ma situation en motif d’action. Ce
sont donc mes libres projets qui donnent une signification aux situations. Le monde n’est jamais
que le miroir de ma liberté et cette liberté est absolue. C’est pourquoi nous pouvons répondre
par l’affirmative ; oui, l’homme est responsable de ce qu’il est, indépendamment des
circonstances.
« L’homme ne saurait être tantôt libre, et tantôt esclave : il est tout entier et toujours libre ou
ne l’est pas » 17), ce qui se résume par « l’homme est condamné à être libre » 18). Ainsi la liberté
n’est pas quelque chose dont je puisse jouir à mon gré : je ne suis pas plus ou moins libre
comme je suis plus ou moins riche, plus ou moins compétent, etc.
Comme nous l’avons vu dans notre extrait, la liberté se confond pratiquement avec l’existence
de la conscience c’est-à-dire, pour Sartre, avec celle du Pour-soi. L’existence est liberté et
même elle ne peut être que liberté.
Chez Sartre, la contingence se confond avec la liberté, car, pour lui, l’acte d’un individu engage
la personne entière de cet individu. Je suis lié à mon acte, ma liberté de le poser n’est que ma
liberté d’être moi.
5. Conclusion
La liberté, comme nous avons pu le voir, n’est donc pas quelque chose que nous pourrions
obtenir en l’achetant ou même en la méritant. La liberté s’inscrit dans cette idée de néant ou de
manque qu’exprime Sartre. La liberté est toujours à faire, elle n’est donc concevable qu’en
terme de projet ou de fin de l’individu.
Même si nous avons tenté cette approche de la liberté d’une manière relativement indépendante
par rapport à la philosophie de Sartre, et même si pour lui la liberté de nos actions ne dépend
pas, comme nous venons de le voir, du contexte, il faut tout de même préciser que les rapports
avec autrui ne sont pas inexistants. Au contraire, autrui procure à l’individu de nombreuses
raisons d’être ce qu’il est ; son regard posé sur nous peut être à la source de l’angoisse ou de la
mauvaise foi. Et c’est parfois dans ces rapports que l’on peut alors prendre conscience de la
liberté dont nous disposons. Sartre a d’ailleurs consacré un nombre conséquent de pages de ses
ouvrages philosophiques à cette étude.
Bibliographie
Ouvrages philosophiques de Sartre :
▪ La Transcendance de l’Ego (1936)
▪ Esquisse d’une théorie des émotions (1938)
▪ L’Imaginaire (1940)
▪ L’Être et le Néant « essai d’ontologie phénoménologique » (1943)
▪ L’existentialisme est un humanisme (1945)
▪ Questions de méthode (1957)
▪ Critique de la raison dialectique I : Théorie des ensembles pratiques (1960)
Éditions critiques :
▪ Claude POULETTE, Sartre ou les aventures du sujet, L’Harmattan, Paris, 2001 ;
▪ Colette AUDRY, Sartre et la réalité humaine, Cinquième édition, Seghers, Paris, 1966 ;
▪ Annie COHEN-SOLAL, Sartre 1905-1980, Folio, Essais, Paris, 1985 ;
▪ M. CONTAT et M. RYBALKA, Les écrits de Sartre, chronologie, Gallimard, Paris, 1970 ;
▪ Ph. CABESTAN et A. TOMES, Le vocabulaire de Sartre, Ellipses, Paris, 2001 ;
Licence
Ce texte est disponible sous licence Creative Commons-BY-SA – Alexis Jurdant 2003
Notes
1)
D’après les biographies de Sartre de Colette AUDRY (Sartre et la réalité humaine, Cinquième
édition, Seghers, Paris, 1966) et de Françoise KINOT (dans Philosophie contemporaine, Sous
la dir. de Françoise KINOT, France Loisirs, Paris, 2002), ainsi que d’éléments de
l’Encyclopædia Universalis électronique (Cinquième édition, article « Sartre »).
2)
Jean-Paul SARTRE, L’être et le néant, Gallimard, NRF, Paris, 1943, pp. 529 – 531.
, , Jean-Paul SARTRE, L’être et le néant, p. 529
3) 4) 5)
9)
Jean-Paul SARTRE, L’être et le néant, p. 531
10)
Jean-Paul SARTRE, L’existentialisme est un humanisme, Nagel, Paris, 1946, p. 37.
, Jean-Paul SARTRE, L’existentialisme est un humanisme, p. 22
11) 16)
12)
Jean-Paul SARTRE, L’existentialisme est un humanisme, p. 17
13)
Jean-Paul SARTRE, L’existentialisme est un humanisme, pp.17-18
14)
Jean-Paul SARTRE, L’existentialisme est un humanisme, pp.19-20
15)
Jean-Paul SARTRE, L’existentialisme est un humanisme, p. 21
17)
Jean-Paul SARTRE, L’être et le néant, Gallimard, NRF, Paris, 194
18)
Cfr point a. ci-dessus
19)
Jean-Paul SARTRE, L’être et le néant, Gallimard, NRF, Paris, 1943, p. 530.
21 Responses
• Comments 21
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1. Léopold MIMMINdit :
28 décembre 2019 à 19 h 15 min
Personnellement, je crois en cette position existentialiste, car elle éloigne de l’humanité l’idée
d’un destin tout tracé et renforce le sens de responsabilité de tout un chacun.
Répondre
2. Pr S. Feyedit :
17 décembre 2019 à 14 h 01 min
Bonjour,
Peut-être ceci pourrait-il vous intéresser.
https://www.youtube.com/watch?v=kBCDU_PnavQ
Cordialement
Répondre
3. Réflexiondit :
16 avril 2017 à 17 h 29 min
Mais du coup, si comme le déclare Sartre, l’homme est totalement libre dans ses choix, et que
la liberté des autres dépend de la notre, peut-on dire que l’homme est libre de commettre un
meurtre?
En effet, d’un côté il est libre de ses choix, donc libre de décider de commettre un meurtre,
mais de l’autre, si il commet un meurtre, alors il met nécessairement fin à la liberté d’autrui,
donc il n’est pas libre ou « moins » libre.
Répondre
4. adama sangarédit :
25 janvier 2017 à 23 h 09 min
ho!! maitre Sartre actuellement il n’y a pas de liberté
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5. Paulin Tsoualadit :
23 novembre 2016 à 4 h 13 min
Si Sartre nie l’existence de Dieu et toutes valeurs universelle.N y’a t- il pas possibilité de
verser dans du postmodernisme ??
Répondre
6. Koua Jacobdit :
26 septembre 2016 à 10 h 44 min
Oui avec ce travail de Jean Paul Sartre nous constatons que l’homme est vraiment libre. Mais
avec les différents actes de terrorisme que nous voyons dans notre monde d’aujourd’hui tels
que ceux de Nice EN France, de Grand Bassam en Cote d’Ivoire et bien d’autres, ne limitent-
ils pas cette liberté humaine?
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o Normand Labrecquedit :
21 février 2017 à 19 h 06 min
Non, car vous êtes encore libre de vous promener dans la rue et dans tout les endroit dont
vous avez peur d’aller. Il faudra simplement vivre avec les conséquences de ces actes. Vous
êtes encore libre d’avoir peur et de rester chez vous terrorisé, autant que vous pouvez aussi ne
pas avoir peur et d’aller où vous voulez.
Répondre
7. Kdit :
21 septembre 2016 à 15 h 15 min
Il n’y a pas de liberté mais seulement l’illusion d’être libre.
Répondre
8. Ousmane Sowdit :
17 avril 2016 à 14 h 44 min
Merci! Sartre, le philosophe et écrivain nous invite à nous questionner sur la liberté.
Couramment définie comme la capacité d’agir, de penser et de exprimer selon ses propres
choix…
Répondre
9. Modeste DJEGNIdit :
7 mars 2016 à 21 h 42 min
Il est vrai que l’homme est libre mais il bénéficie d’une liberté participative. C’est-à-dire que
sa liberté participe d’une liberté transendantale et cette liberté transcendantale est en un être
suprême qui est Dieu. Et c’est de lui qu’il reçoit son existence, sa liberté, etc
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12. Naydadit :
26 mai 2015 à 4 h 27 min
Super commentaire, très éclairante merci bcp davoir pris le temps de le publié.
Répondre
13. benelhadjdit :
31 juillet 2014 à 19 h 48 min
la vraie liberté prend fin là où commence celle des autres. C’est comme une propriété, si on
autorise pas, que personne n’aura l’accès. Hélas la liberté aujourd’hui avec les puissances est
piétinée, où elle est remplacée par la raison des plus fort est toujours la meilleurs. On a un
exemple concret de la liberté totale on tue les enfants, les vieillards, les femmes et les
hommes civils donc Israël ce pays sanguinaire a piétiné toutes les lois internationales, toutes
les résolutions de l’ONU dont la cause principale est le soutien total de ces puissances alors
de quelle liberté il s’agit…..
Répondre
14. tojoniainadit :
4 juin 2014 à 12 h 26 min
nous sommes tous libres et on ne peut en faire autrement, parce que la liberté est né avec
nous. en refusant notre liberté c’est comme refuser notre existence. » l’homme (le pour-soi)
est un être qui se découvre par ses actions ». c’est à dire qu’il n’y a pas de futur prédestiné
pour nous, « L’homme n’est rien d’autre que ce qu’il se fait ».
bon courage pour les sartrienne, vous fait tous de ma famille.
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17. bm wildit :
11 février 2014 à 13 h 02 min
si on part du principe logique selon lequel il y a des atomes et des cellules, qui sont
infiniment petits et que l’homme soit au dessus de ces particules du fait qu’il les manipule on
peut également en déduire qu’il soit lui aussi en dessous d’un etre. comme avec plus et moins
l’infini. tout les corps et toutes les matières étant ce moins, cet etre et la nature étant ce plus et
l’homme l’intervalle entre le moins que sont tout ce qu’il maitrise et le plus qu’est celui
qu’on appelle conventionnellement et universellement dieu. et si on veut obstinément penser
son origine, il faudrait aussi penser le point d’origine de moins l’infini et la finitude de plus
l’infini.
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o mohameddit :
4 août 2015 à 17 h 54 min
tres claire
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18. yassaminedit :
7 février 2014 à 13 h 16 min
merci..c’est vraiment utile et intéressant.
Répondre
o bm wildit :
11 février 2014 à 12 h 05 min
d’accord avec sartre mais la foi doit rester inébranlable. la foi en un etrel’etre superieur
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