Copyright 2007 by [Smail Amghrous and Hamida Kheffache]. All rights reserved. Readers may make verbatim copies
of this document for non-commercial purposes by any means, provided that this copyright notice appears on all such
copies.
L’aviculture algérienne en milieu rural, quel devenir après la libéralisation des
échanges ?
AMGHROUS Smail 1
KHEFFACHE Hamida 2
Introduction et problématique
Les difficultés financières induites par la libération du marché, apparition des nouvelles
conditions d’approvisionnement des facteurs de production ainsi que l’augmentation des prix
ont poussé les petits éleveurs à restreindre leurs investissements en quête de profits
immédiats.
Les enquêtes menées ces dernières années montrent que la majorité des élevages sont loin
d’être industriels dans leur conduite et dans les performances enregistrées. Les conditions de
l’habitat, de l’alimentation, d’hygiène et de prophylaxie ne répondent pas aux normes
zootechniques préconisées, ceci entraîne l’abandon de l’activité jugée peu rentable et par
conséquent, l’augmentation des prix des produits de la volaille sur le marché.
Nous avons choisi deux régions rurales, une région montagneuse, qui est la subdivision de
Freha dans la Wilaya de Tizi Ouzou, une autre steppique, qui est la subdivision d’Aflou dans
la wilaya de Laghouat.
1
Chercheur au CREAD (Centre de Recherche en Economie Appliquée pour le Développement, Alger, Algérie)
2
Chercheur au CREAD (Centre de Recherche en Economie Appliquée pour le Développement, Alger, Algérie)
Méthodologie
85% des élevages enquêtés sont de taille inférieure à la moyenne nationale qui est de 3000
sujets, cela trouve son explication dans le manque d’investissement des éleveurs en raison de
ce que peut engendrer l’activité comme risque (difficulté d’approvisionnement en aliment et
poussins, manque d’intégration de la filière…).
L’élevage du poulet de chair dans notre région d’étude est une activité secondaire. Malgré
le manque de moyens financiers, aucun crédit n’est sollicité par les éleveurs enquêtés.
1
OFAL (2001) : Filières et marchés des produits avicoles en Algérie, rapport annuel, ITELV.
2
Ministère de l’Agriculture et du Développement Rural
Tableau n°02 : Taille des ateliers d’élevages
Les performances réalisées dans notre région d’étude sont médiocres. L’age avancé à
l’abattage (62 et 55,5 jours) entraînent des pertes économiques considérables, ajouté à cela le
taux de mortalité élevé, notamment pour la région de Freha. La non disponibilité d’aliment de
qualité fabriqué par l’ONAB pousse les éleveurs à s’approvisionner auprès de petites unités
de fabrication d’aliments, mais de moindre qualité (formule de fabrication ne répondant pas
aux besoins des animaux). La mauvaise qualité de l’aliment associée aux mauvaises
conditions d’élevages fait que le GMQ est faible et l’indice de consommation très élevée.
Les ateliers d’élevage dans notre région d’étude sont caractérisés par :
• des mauvaises conditions d’ambiance
• Hétérogénéité du matériel biologique
• Stress des animaux notamment lors du transport
3
OFAL 2000 : Filières et marchés des produits avicoles en Algérie, rapport annuel, ITELV
1-4 Performances économiques
L’aliment, le matériel biologique et les produits vétérinaires représentent plus de 80% du
coût de production du poulet de chair (tableau 04). Ces trois facteurs de production échappent
au contrôle des opérateurs locaux, puisqu’ils sont importés, ce qui accentue la fragilité de la
filière.
Tableau n°04 : structure du coût de production du poulet de chair dans la région d’étude
charges FREHA AFLOU Moyenne nationale
DA/kg % DA/Kg % DA/Kg %
Amortissement 5,96 5,22 0,09 0,10 2,07 2,00
Autres charges 0 0,00 0,97 1,12 0,39 0,38
fixes
Frais financiers 0 0,00 0,00 0,00 0,78 0,75
Total charges fixes 5,96 5,22 1,06 1,22 3,23 3,13
Aliment 68,31 59,84 53,40 61,74 68,29 66,08
Matériel biologique 22,84 20,01 19,64 22,71 18,76 18,15
Main d’œuvre 4,99 4,37 3,20 3,70 2,61 2,53
Frais vétérinaires 7,43 6,51 4,10 4,74 5,04 4,88
Electricité, eau 2,75 2,41 1,69 1,95 2,46 2,38
chauffage
Frais divers 1,87 1,64 3,41 3,94 2,95 2,86
Total des charges 108,19 94,78 85,43 98,78 100,12 96,87
variables
Total du coût de 114,15 100 86,49 100 103,35 100
production
Source : Tableau élaboré à partir de notre enquête
Une approche comparative des coûts de production du poulet en Algérie montre qu’ils sont
très élevés. Ils sont 3 fois supérieurs à ceux du Brésil, 2 fois à ceux des USA et 1,77 à ceux de
la France. Cela trouve son explication dans :
• Prix élevé des intrants dû principalement à la dévaluation du dinar algérien.
• Faibles performances zootechniques.
4
Taux de change en 2003 : 1$=79,68 DA
2- Calcul des Coefficients de Protection Nominaux (CPN)
Les accords d’association de l’Algérie avec l’UE ratifiés en 2002, stipulent que les droits
de douane actuels (30 %), connaîtront une réduction de 50 % dans un délai de cinq ans à
compter de l’entrée en vigueur de l’accord et ceci dans la limite d’un contingent tarifaire
annuel de 2500 tonnes par an5 .
Pour pouvoir mesurer la compétitivité-prix des produits locaux, on essayera d’estimer les prix
des produits provenant de l’UE qui, éventuellement, peuvent atterrir sur le sol algérien au
niveau de l’un des principaux ports d’Algérie.
Il s’agit donc de comparer le prix moyen affiché sur le marché principal du pays fournisseur
augmenté des frais du transport et de manutention avec le prix de gros moyen du produit
local.
Le coefficient de protection nominal (CPN) est le rapport entre le prix du produit local et celui
provenant de l’étranger. Il nous indiquera le degré de protection et de compétitivité des
produits locaux. Trois cas pourraient se présenter:
1) CPN <1: ce qui veut dire que le producteur local reçoit un prix inférieur à celui qu’il doit
recevoir dans une situation de libre échange. On dit qu’il y’a une protection négative du
produit local.
2) CPN >1: ce qui veut dire que le producteur reçoit un prix plus élevé que dans une situation
de libre échange. On dit qu’il y a une protection positive du produit local.
3) CPN =1: cala signifie qu’il y a une neutralité de la protection, le producteur reçoit un prix
égal à celui du marché.
Pour évaluer le degré de compétitivité des produits avicoles algériens, on a envisagé 03
scénarios avec des taux de change stables.
Scénario 01 :
5
Rapport de l’accord d’association de l’Algérie avec l’UE/Pays méditerranéens
Tableau n°05: Comparaison entre le prix moyen de viande de poulet entier en provenance de
L’UE et le prix moyen du poulet local au niveau de l’un des ports d’Algérie. U : (euro/kg).
prix CAF hors droits de douane 1.5 1.55 1.56 1.57 1.58 1.59
prix CAF + droits de douane 1.95 2.02 2.03 2.04 2.05 1.83
Scénario 02 :
6
Projections de l’USDA
7
Calculé sur la base des frais de transport maritime de l’agneau d’Alger à Marseille (tous frais compris jusqu’au
débarquement), soit 1200 $/14 tonnes
8
Coefficient de protection nominal hors droits de douane
9
Coefficient de protection nominal avec des droits de douane
Tableau n°06: Comparaison entre le prix moyen de viande de poulet entier en provenance de
L’UE et le prix moyen du poulet local au niveau de l’un des ports d’Algérie. U : ( euro/kg ).
Tableau n°7: Comparaison entre le prix moyen de viande de poulet entier en provenance de
L’UE et le prix moyen du poulet local au niveau de l’un des ports d’Algérie. U : ( euro/kg ).
Globalement, on peut dire que sans droits de douane, les produits locaux ne seraient pas
compétitifs et que la manière la plus efficace pour améliorer la compétitivité des produits
locaux est d’améliorer la productivité des élevages algériens. Cependant, l’instauration de
contingents tarifaires (2500 tonnes par an, soit 1.70 % de la production nationale) protégerait
à moyen terme la production locale de la concurrence étrangère.
En conclusion, le CPN est supérieur à 1 avec et sans droits de douane, cela signifie que le
produit local n’est pas compétitif au produit brésilien. Par conséquent, la protection du
marché local de la concurrence étrangère (Brésil) nécessiterait l’instauration d’un droit de
douane d’au moins 60 %, ce qui inacceptable. En Algérie, le droit de douane consolidé est de
30 %.
Tableau n°08 : Comparaison entre le prix moyen de viande de poulet entier en Provenance
de Brésil et le prix moyen du poulet local au niveau de l’un des ports d’Algérie
Frais (euro/kg)
10
Prix de gros au Brésil en 2003 0.78
11
Transport et manutention 0.16
Prix CAF 0.94
Prix de gros en Algérie en 2003 1.95
Ecart 1.01
CPN1 2.07
Prix CAF 1.22
Ecart 0.73
CPN2 1.60
Source : Fait par nous même.
10
Une étude réalisée par l’INRA de France, montre que le différentiel prix sortie abattoir entre l’UE et le Brésil est estimé à
45 % au début 2003
11
Sur la base des frais de transport de viande de poulet du Brésil à Djeddah (0,24 euro/kg), on a estimé que les frais de
transport (Brésil–Algérie) reviendrait à 0,16 euro/kg.( La distance entre Brésil et l’Algérie fait approximativement 2/3 la
distance entre Brésil et Djeddah)
Pour répondre à la problématique du coût de production du poulet de chair, nous avons
proposé un projet pilote qui s’inscrit dans une logique d’économie d’échelle. Le projet
consiste en un élevage de 12000 sujets/bande, et 5 bandes par an d’une durée de 57 jours
chacune. Le type de bâtiment et la conduite d’élevage, nous permettent de réaliser des
performances meilleures, taux de mortalité de 5%, indice de consommation de 2.5..
Notre projet vise une part de marché régionale de 20%, ce qui représente 114 121 kg de
poulet par an12 (tableau n°9)
marché 0,20 570 606,6 582 018,7 593 659,11 605 532,29 617 642,93
Vol. ventes 114 121,3 116 403,7 118 731,8 121 106,5 123 528,6
Var. vol. stock 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0
Vol. production 114 121,3 116 403,7 118 731,8 121 106,5 123 528,6
Vol. investissement 1,0 0,0 0,0 0,0 0,0
vol. immobilisation
1,00 1,00 1,00 1,00 1,00
sup
vol, structure 1,0 1,0 1,00 1,00 1,00
Source : notre analyse à partir du logiciel evalpro
Le tableau ci-dessous nous montre les résultats prévisionnels de l’activité sur 5 ans. Le
nombre de bande par an et le nombre de sujets installés sont les principaux éléments retenus
dans ce projet, on vise à augmenter la productivité des ateliers et réduire les coûts de
production.
Scénario 04 :
L’examen des deux tableau fait ressortir un coût de production de : 79.15 ; 76.36 ; 74.62 ;
73.38 et 72,79 DA respectivement de la première à la cinquième année du lancement du projet. La
marge que détient les différents intermédiaires est en moyenne de 60% du coût de production 13 . Il
ressort du tableau n°11 que le prix de vente du poulet de chair produit après lancement du projet est
compétitif à celui du poulet provenant de l’UE à partir de la première année du projet si on ne tient pas
compte des droits de douane, et à partir de la première année en intégrant dans nos calculs les droits de
douane.
12
Nos calculs tiennent compte du taux de mortalité (5%) et du rendement en carcasse de 73%.
13
Diverses enquêtes
Tableau n°10 : Les résultats analytiques
Production vendue Vol. ventes 100 11 412 132 11 640 375 11 873 182 12 110 646 12 352 859
Ventes de marchandises Vol. ventes
Production stockée Var. vol. stock
Total des produits d’exploitation 11 412 132 11 640 375 11 873 182 12 110 646 12 352 859
Consom. De Mat. Stockées Vol. production 51 5 820 187 5 936 591 6 055 323 6 176 429 6 299 958
Main d’oeuvre productive Vol. production
Personnel d’encadrement Vol. structure 600 000 600 000 600 000 600 000 600 000 600 000
Frais divers Vol. structure 500 000 500 000 500 000 500 000 500 000 500 000
Taxes et impôts Vol. production 9 1 027 092 1 047 634 1 068 586 1 089 958 1 111 757
Dotation aux amortissements 1 085 075 803 806 635 605 520 454 479 840
Coût de production /kg après impôt 79,15 76,36 74,62 73,38 72,79
Source : notre analyse à partir du logiciel evalpro
Tableau n°11 : Comparaison entre le prix moyen de viande de poulet entier en provenance de
L’UE et le prix moyen du poulet algérien après la réalisation du projet. U : (euro/kg).
Conclusion :
OFAL 2000 : Filières et marchés des produits avicoles en Algérie, rapport annuel, ITELV.
Algérie
OFAL 2001 : Filières et marchés des produits avicoles en Algérie, rapport annuel, ITELV.
Algérie
USDA : www.USDA.gov