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PAR
Albert LEJEUNE
Montréal
Le 28 novembre 1988
et
le 15 mai 1989
REMERCIEMENTS
Enfin, une nouvelle visite entreprise au MIT, en mars 1989, m'a permis
de mieux saisir l'importance des liens entre technologie de l'information et
stratégie à travers les projets de recherche en cours au CISR (Centre de
recherche en systèmes d'information de la «Sloan School of Management»),
et particulièrement les travaux du professeur N. Venkatraman.
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION 1
CHAPITRE 1
LE SYSTÈME STRATÉGIQUE : AUTOMATISATION, INTÉGRATION ET
NOUVELLES STRUCTURES ORGANISATIONNELLES 7
CHAPITRE 2
L'AUTOMATISATION D'UN ESPACE DE REPRÉSENTATION 25
CHAPITRE 3
LA COHÉSION STRATÉGIQUE PAR, AVEC OU DANS LA TECHNOLOGIE
DE L'INFORMATION 52
CONCLUSION 66
BIBLIOGRAPHIE 69
LISTE DES FIGURES
1.1 Trois
échelles pour mesurer l'avantage compétitif 9
1.2
2.1 L'effet
de l'automatisation sur la matrice des produits et des procédés 26
2.2 Les
niveaux d'automatisation d'un espace de représentation atomisé
30
2.3 La
structure générale d'un SIAD par Sprague et Carlson 34
2.4
3.1 Le
modèle général d'Andrews 53
3.2 Le
modèle général des liens entre la stratégie et la TI 56
3.3 La
stratégie par la technologie de l'information ou le chemin critique de
l'espace vide 58
3.4 La
stratégie avec la technologie de l'information ou le chemin critique de
l'espace programmatique 61
3.5 La
stratégie dans la technologie de l'information ou le chemin critique de
l'espace habité 64
INTRODUCTION
Nous voulons dans ce second rapport théorique travailler les liens entre
la technologie de l'information (l'ensemble des technologies de traitement
des données et de la communication) et la stratégie.
Nous voulons travailler ces liens selon selon trois grands thèmes : 1.
automatiser, 2. intégrer et 3. «cohérer», verbe inexistant qui signifierait
apporter de la cohésion.
Automatiser
Intégrer
«Cohérer»
LE SYSTÈME STRATÉGIQUE :
AUTOMATISATION, INTÉGRATION ET
NOUVELLES STRUCTURES ORGANISATIONNELLES
Artificial intelligence
Robotics
Paperless
Customer/supplier
inputs directly
to your system
Plant automation
Mechanized order
entry to an
online system
System parallels
operations flow
Integrated
administrative
support systems
Mechanized order
entry to a
batch system
System follows
operations flow
Mechanized
administrative
support system
Handwritten order
input
to a system
No system
No system
No system
Order entry
Customer/Supplier
Relationship
Process/Operation System
Automation Relationship
Administration Support
Systems Relationship
Figure 1.1
Trois échelles pour mesurer l'avantage compétitif
Child (1987), qui emprunte largement à Williamson (1975), explique
bien pourquoi le système d'information s'étend vers le client, ou le
fournisseur, selon le point de vue. Les conditions compétitives ont mis
l'accent sur le contrôle des coûts, ce qui se traduit notamment sur la ligne de
production par l'utilisation de techniques qui permettent la suppression des
stocks. Ces techniques de just in time, de kanban ou de production à flux
tendu impliquent un accroissement du formalisme des données (Boisot,
1986) utilisées en même temps par le producteur et son fournisseur
(codification) et un partage en temps réel de ces données (diffusion).
Network
Architecture
Support System
Architecture
Information Systems Technical Strategies
Technology
Projections
Business Process and
Information Architecture
Data
Architecture
Application
Architecture
Acquire or Design
and Develop
System
Plans
Guidelines
Standards,
and Support
Business Strategy
Information
Systems
Strategy
Information
Processing
Architecture
Information
Systems Planning
Implementation
Figure 1.2
L'architecture de la technologie de l'information
Source : Devlin et Murphy, 1988
1.2 SYSTÈME STRATÉGIQUE ET CHOIX STRUCTURELS FACE À
LA COMPÉTITION
L'apport de Child est de nous montrer que la TI trouve son sens dans la
gestion des transaction externalisées de l'entreprise ou de l'organisation,
permettant ainsi de simplifier la gestion du noyau (core) restant à l'intérieur
de l'organisation, tout en gardant le contrôle des transactions qui ne sont pas
réellement confiées à l'arbitrage du marché.
C'est dans ce contexte que nous voulons examiner ce que la TI offre aux
gestionnaires pour soutenir l'élaboration et la mise en oeuvre de stratégies
dans l'organisation.
D'un niveau d'automatisation nul (l'époque des rapports MIS remis sur le
bureau du gestionnaire qui utilise alors ses propres heuristiques pour
solutionner le ou les problèmes détectés), on est passé à un niveau de semi-
automatisation (avec les systèmes interactifs d'aide à la prise de décision
(SIAD ou DSS) qui permettent au gestionnaire d'utiliser ses propres
heuristiques et, de façon interactive, des modèles et des données basées sur
ordinateur) et à un système d'automatisation complète avec le système
expert (système qui exclut l'interactivité par le transfert complet de faits et
de règles relatifs à un domaine, dans un ordinateur).
Nous sommes ici dans la cas d'un ER mixte, qui se construit entre
l'usager et son ordinateur qui contient des modèles et des données
pertinents au problème à analyser. Pour construire cet ER mixte, un logiciel
interactif unit le coupe homme/machine; ce logiciel forme avec l'ordinateur
et les données un système interactif d'aide à la décision (SIAD) ou un
Decision Support System (DSS).
Bâtir un système d'aide à la décision est une chose très différente que de
bâtir un système de traitement des transactions. Camillus et Lederer (1985)
soulignent que les exigences en matériel et en logiciel ainsi que le
personnel-expert, et plus encore, le style de management rendent ces deux
tâches profondément différentes.
Le SIAD fonctionnel
Cette nature différente exige des méthodes adaptées pour leur mise en
oeuvre. Les SIAD imposent un processus de mise en oeuvre souple, flexible
et évolutif (voir Hawgood, 1982), partant des besoins exprimés par l'usager.
Besoins toujours réactualisés en fonction du développement d'un prototype.
L'objectif même d'un SIAD est l'efficacité (faire la bonne chose au bon
moment) plutôt que l'efficience (faire plus vite et moins cher).
Figure
2.3
La structure générale d'un SIAD, par Sprague et Carlson (1982)
reproduit par Huff (1986)
Les résultats cités par Huff (1986) et qui reprennent Alter (1980), Huff et
al. (1984), Hogue et Watson (1983), Barkl et Huff (1984) ainsi que Meador et
Keen (1984) sont unanimes à trouver que :
Dans son article, King (1983) présente plus précisément deux systèmes
SICIS (Strategic Issue Competitive Information System) et le système
d'analyse économique de Data Resource. Il mentionne, par ailleurs, comme
SIAD stratégique : CAUSE, de Equitable Life Assurance Society et GADS
(Geodata Analysis and Display System) développé par IBM. Il mentionne
également des systèmes développés par RCA, Citibank, Louisiana National
Bank, American Airlines et la First National Bank of Chicago.
Pour King (1983), les exigences en volume de données ainsi que la façon
d'utiliser ces systèmes (affichage graphique et interface «convivial»), font
que les SIAD stratégiques ne peuvent raisonnablement être développés et
utilisés que comme un élément d'un système informatisé plus large. Cette
constatation impose à l'organisation qui veut se doter d'un SIAD stratégique
un vrai (et long) processus de planification du système stratégique d'aide à
la décision.
Pour Frederiks et Venkatraman (1988), le concept de business strategy
est en perte de vitesse. Coupure dans les équipes de planifications et
dégringolade du concept même de stratégie.
Un SIE, pour Friend (1986), est aussi différent d'un MIS traditionnel qu'il
est différent du SIAD. Le SIE est un concept distinct du MIS parce qu'il n'est
pas basé sur les transactions ni sur l'approche comptable qui surcharge le
manager au sommet de montagnes de données inutiles; sans compter que le
PDG d'une grande organisation n'a pas trois jours à perdre pour apprendre la
structure des données dans sa base de données corporative. Pour le même
auteur, le SIE est distinct du SIAD, car le manager au sommet n'est pas un
utilisateur de modèle (il laisse les modèles à son staff) et les SIAD sont trop
orientés vers la finance. De plus, le téléchargement à l'aide du lien micro-
ordinateur - ordinateur central est loin de remplir toutes ses promesses. Le
SIE doit mettre le focus sur l'obtention d'informations spécifiques, d'origine
externe ou interne à l'organisation, et sur l'accès au statut des données : «it
filters, compresses, and tracks critical data as determined by each executive
end user.» Friend (1986)
Reck et Hall (1986) vont encore plus loin : «The EIS concept represents a
total break from traditional DP design and a mean to gather and assess
relevant management information.» (p. 24) (Nous soulignons.) Pour ces
derniers, le concept de MIS s'oppose à celui de SAM (Système d'aide au
management ou MSS pour Management Support Systems, qui comprennent,
d'une part, les technologies de l'ordinateur personnel, les logiciels de tableur
et les centres d'information pour supporter l'usager et, d'autre part, les
systèmes SIE et SIAD). Les auteurs insistent sur le fait que les organisations
qui comprennent comment les concepts de SAM et de SIE diffèrent de
l'approche traditionnelle peuvent dériver tout le potentiel de ces nouveaux
systèmes.
Un bon système SIE taillé pour les besoins et le style cognitif du manager
au sommet devrait remplir une fonction à la fois distincte du MIS et du SIAD.
Le manager au sommet n'y est plus prisonnier de la base de données
corporative : il a défini ses besoins pour de l'information interne et externe, à
partir des facteurs de succès critiques dans son organisation (voir la
méthode CSF de Rockart).
Nous avons vu que le concept de SIE est un effort important pour offrir
au manager au sommet un support à la construction d'un espace de
représentation, non pas d'un problème particulier susceptible d'être modélisé
parce qu'il appartient à un domaine précis, mais bien d'une problématique
qui relève des domaines variés (finance, marchés, technologie, socio-
politique, ...) contenant les facteurs critiques pour la croissance et la survie
de l'organisation.
Et enfin,
Si, dans le paradigme MIS, l'organisation est une structure figée sur
laquelle on peut établir un système de pilotage, dans le paradigme
concurrent de système d'information organisationnel ou SIO (OIS pour
Organization Information System), l'organisation est d'abord un processus
continu plutôt qu'un résultat. C'est un processus entre trois fonctions
récursives fondamentales : maintenir et se maintenir, relier et se relier,
produire et se produire.
Pour qu'il y ait organisation, il faut qu'une action entre plusieurs acteurs
soit représentée par la production d'un artéfact appelé « information »,
représentation que s'approprie et que commémorise ce groupe
d'acteurs. (Le Moigne, 1986) (Nous soulignons.)
Figure 3.1
Le modèle général d'Andrews (1971, 1980)
PREMIÈRE ÉTAPE : LA TI
Cette première étape nous amène en fait à définir une « aire technique
» où les questions de standards, de compatibilité, de capacité et de rapports
coûts/performance doivent être résolues.
Nous verrons plus loin que cette flexibilité peut être atteinte :
1. en vidant l'espace de la stratégie et en misant exclusivement sur une
architecture de la TI,
2. en programmant cet espace de la stratégie, ou
3. en en faisant une source d'actions coopératives (au sens de Barnard,
1938) conduisant à la flexibilité organisationnelle.
Les figures suivantes 3.3, 3.4, et 3.5 décrivent des liens différents entre
les variables proposées dans le schéma 3.2; ces nouvelles figures vont
illustrer trois grands chemins qui mènent à la performance quand la stratégie
veut y tendre par la TI, avec la TI ou dans la TI.
Figure 3.3
La stratégie par la technologie de l'information
ou le chemin critique de l'espace vide
Points remarquables
Grâce à ces gains, le défi externe peut être relevé dans certaines limites,
tandis que le défi interne de mobilisation des forces et des chances de
succès est partiellement relevé par le bénéfice d'une architecture de la TI
calquée sur la structure et par l'abondance des systèmes d'aide au
management.
Points remarquables
Points remarquables
Dans ce second rapport théorique, nous avons voulu montrer que les
développements rapides en TI imposent une vision plus large des systèmes
d'information et de leurs impacts sur la structure et la stratégie
organisationnelles.
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