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Sous la direction de
N’GUETTA Guillaume
1
Doctorant en Droit Privé
Université Alassane Ouattara de Bouaké
INTRODUCTION
1. La notion de Droit commercial Général
Selon la conception subjective, le Droit commercial est le droit qui régit les
commerçants. En effet, les tenants de cette conception estiment que la plupart des actes
juridiques que font les commerçants sont exactement les mêmes que ceux accomplis dans la
vie civile ; par conséquent s’ils ont la nature d’actes de commerce, cela ne peut être que du
fait de la qualité de leur auteur1, c’est-à-dire un commerçant. Ainsi, cette conception se
prévaut donc de la profession.
Mais elle se heurtait à des objections (critiques) : d’abord, tous les actes accomplis par
un commerçant ne se rapportent pas nécessairement à l’exercice de sa profession .Ensuite,
des non-commerçants peuvent accomplir des actes qui, par nature ou par la forme, sont
commerciaux.
Ce qui implique l’analyse de la nature et de la forme des actes accomplis pour leur
déceler une nature commerciale ; d’où la naissance d’une seconde conception, la conception
dite objective.
Selon la conception objective, le Droit commercial est le droit des actes de commerce.
Elle se prévaut d’une idée simple : compte tenu de l’égalité civile entre tous les citoyens
proclamée par la Révolution française de 1789, si un Code de commerce a été rédigé à une
époque (précisément en 1807), c’est qu’il était appelé à régir non pas une classe particulière
de sujets de droit mais une catégorie d’actes ; d’ailleurs, disait-on, il s’agissait d’un Code de
commerce et non d’un Code des commerçants2.
1
RIPERT (Georges) et ROBLOT (René) par VOGEL (Louis), Traité de Droit Commercial, Tome 1- Volume 1,
18ème édition, éd. LGDJ, p. 2 §, 5 ; GIVERDON, Le droit commercial, droit des commerçants, JCP, 1949,
1,770.
2
RIPERT (Georges) et ROBLOT (René) par VOGEL (Louis), Traité de Droit Commercial, Tome 1- Volume 1,
Op. Cit, p.2 § 6
2
Cependant, cette conception n’est pas exempte de critiques puisque tous les actes
juridiques n’ont pas une nature déterminée par leur forme ou par leur objet ; pour leur
déceler un caractère commercial, il faut alors considérer pour quelle finalité ils sont
effectués ; Or, pour ce faire, il est nécessaire d’analyser l’activité économique des parties en
présence pour dire qu’ils sont commerciaux parce que faits par des commerçants.
Quoi qu’il en soit, afin de bien percevoir le contenu actuel du droit commercial Général,
il convient, d’aborder l’historique et l’évolution de la matière.
2. Historique et évolution
Ainsi, quatorze (14) Etats africains de la zone franc3 vont mettre en place une
organisation dont le rôle principal est de secréter et de veiller à l’application d’un nouveau
droit des affaires moderne, simple et adapté à leurs réalités économiques : l’Organisation
pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) qui compte à ce jour dix-
sept (17) Etats-parties.
Les sources du droit commercial sont à titre principal constituées des Actes
uniformes (a). Par ailleurs, le droit commercial tire ses origines également des lois non
contraires aux Actes uniformes (b), des usages (c), de la jurisprudence (d) et de la doctrine
(e).
Avant de présenter ses différents Actes uniformes (ii), il convient de bien cerner
la structure qui secrète cette légalisation à savoir l’OHADA (i).
i) L’OHADA
3
Benin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Comores, Congo (Brazzaville), Cote d’Ivoire, Gabon, Guinée
équatoriale, Mali, Niger, Sénégal, Tchad et le Togo.
4
autres Etats africains4, l’OHADA compte à ce jour dix-sept (17) Etats membres (Etats
parties) et le Traité l’instituant a fait l’objet d’une révision le 17 octobre 2008 à Québec au
Canada. Les raisons essentielles qui sous-tendent l’existence de cette organisation sont au
nombre de deux : pallier l’insécurité juridique et judicaire en vue de servir l’intégration
économique et la croissance.
Les finalités et le corpus juridique de l’OHADA étant ainsi présentés, quels sont
les différents Actes uniformes, objet de notre étude ?
4
Guinée Conakry, Guinée Bissau et la République Démocratique du Congo (RDC).
5
- l’Acte Uniforme portant sur le Droit Commercial Général (AUDCG) adopté en 1997 et révisé en 2010 ,
l’Acte Uniforme relatif au Droit des Sociétés Commerciales et du GIE (AUDSCOGIE ou AUSCOGIE ou
encoure AUSCOM) adopte en 1997 et révisé en 2014 ; l’Acte Uniforme portant organisation des Sûretés (AUS)
adopté en 1997 et révisé en 2010 ; l’Acte Uniforme portant Organisation des Procédures Simplifiées de
Recouvrement et des Voies d’Exécution (AUPSRVE) adopté en 1998; l’Acte Uniforme portant organisation des
Procédures Collectives d’Apurement du Passif (AUPCAP) adopté en 1998 ;l’Acte Uniforme relatif au Droit de
l’Arbitrage (AUA) adopté 1999 ; l’Acte Uniforme portant Organisation et Harmonisation de la Comptabilité
des Entreprises (AUOHCE) adopté en 2000 ; l’Acte Uniforme relatif aux Contrats de Transport de
Marchandises par Route (AUCTMR) adopté en 2003 et l’Acte uniforme relatif au Droit des Sociétés
Coopératives (AUSCOOP) adopté en 2010.
5
Cette terminologie d’Actes uniformes est issue de l’article 5 alinéa 1 du Traité
OHADA révisé le 17 octobre 2008 et désigne les lois uniformes prises pour l’adoption des
règles communes en matière de droit des affaires applicables dans les dix-sept (17) Etats
parties. Ainsi, Ces différents Actes uniformes ont vocation à régir l’ensemble du droit des
affaires objet de l’OHADA. Mais dans le cadre de ce cours, l’Acte uniforme portant droit
commercial général (AUDCG) retiendra principalement notre attention dans la mesure où il
constitue le texte de loi fondamental duquel découlent les règles relatives au droit commercial
général sans préjudice des autres sources de ce droit. Par ailleurs, d’autres Actes uniformes
seront invoqués dans le cadre de ce cours tels que le nouvel Acte uniforme relatif au droit des
sociétés commerciales (AUSCOM) du 30 janvier 2014, l’Acte Uniforme portant organisation
des Sûretés (AUS) et l’Acte uniforme portant Organisation et Harmonisation de la
Comptabilité des Entreprises (AUOHCE).
L’Acte uniforme portant droit commercial général du 17 avril 1997 (publié au J.O
de l’OHADA du 1er octobre 1997 et au J.O n°53 du 22 décembre 1997 de la République de
Côte d’Ivoire) est entré en vigueur le 1er janvier 1998. Il était applicable jusqu’au 15
décembre 2010 où il a été abrogé et remplacé par un nouvel Acte uniforme portant droit
commercial général adopté à Lomé le 15 décembre 2010 et publié au J.O n°23 de l’OHADA
du 15 février 2011. Conformément aux dispositions de son article 307, le nouvel Acte
Uniforme est entré en vigueur 90 jours après sa publication au J.O de l’OHADA soit le 15
mai 2011.
Par ailleurs, faut-il préciser qu’en vertu de l’article 10 du Traité OHADA, les
Actes uniformes ont abrogé toutes les dispositions des différents Etats parties antérieurement
applicables en matière commerciale. Cependant, ils laissent subsister les dispositions
antérieures qui ne leur sont pas contraires.
Il s’agit des lois relatives au droit commercial non contraires aux Actes uniformes
(i) et du Droit civil (ii).
i) Les lois relatives au droit commercial non contraires aux Actes uniformes
Malheureusement cet avis de la CCJA qui était censé élucider la notion, n’a pas
atteint son objectif en raison de son imprécision. De la sorte, retenons avec Me BEIRA, qu’il
convient de dire que, par principe, le droit commercial antérieur est abrogé par les Actes
uniformes. Autrement dit, la règlementation antérieure ayant le même objet qu’un Acte
uniforme disparait sauf cas de renvoi exprès de la loi nationale ou encore si une disposition
de cette réglementation régit une matière non régie par un Acte uniforme.
Par exemple, aux termes de l’article 140 de l’Acte uniforme relatif au droit
commercial général applicable le 15 mai 2011 :
Dans ce cas de renvoi, on a recours aux peines prévues par la loi n°722-513 du 27
juillet 1972 relative à la location-gérance du fonds de commerce, pourtant abrogées.
Quant aux textes partiellement contraires aux Actes uniformes, toutes les
dispositions partielles non contraires demeurent applicables.
Dans les systèmes juridiques de tradition juridique française, tel que celui de la
Côte d’ivoire, le Droit civil constitue le droit commun qui régit les relations de droit privé ;
c’est lui qui édicte les principes généraux qui président aux relations entre individus et qui
déterminent le statut juridique des personnes.
Ainsi, pour bien comprendre les règles de droit commercial, il faut s’inspirer des
principes généraux du Droit civil et notamment des règles relatives aux obligations en
général. En effet, en matière de conclusion des conventions, les commerçants doivent
respecter les règles relatives à la capacité, au consentement, à la licéité et aux bonnes
mœurs. Ils doivent exécuter leurs obligations sous peine d’engager leur responsabilité ;
laquelle est soumise aux règles de droit commun de la responsabilité contractuelle ou
délictuelle.
6
Avis de la CCJA n°001/2001/EP du 30 avril 2001, www.ohada.com, Ohadata J-02-04.
7
c) Les usages
Ce sont des pratiques liées à la vie des commerçants qui en raison de leur
permanence et de leur application régulière, prennent la valeur de règles de droit.
Certes, il ne s’agit de règles légales. Mais, ils n’en sont pas moins obligatoires.
Ainsi, les usages tiennent une place importante en droit commercial car ils interviennent pour
pallier les insuffisances des différentes règlementations. La loi, elle-même, renvoie aux
usages ; Ainsi, aux termes de l’article 1873 du Code civil « les dispositions relatives aux
sociétés de commerce ne s’appliquent que dans les points qui n’ont rien de contraire aux
lois et usages du commerce ».
Les usages de fait ou les usages conventionnels sont des pratiques restreintes à un
nombre limité ou à un petit nombre de commerçants qui se conforment toujours à la même
manière d’agir lorsque les circonstances sont identiques.
Quant aux usage de droit ou coutume, ils renvoient également des pratiques ou des manières
de procéder mais qui cette fois, s’imposent dans les rapports entre commerçants comme une
règle, une norme objective.
La différence entre ces deux usages peut s’effectuer suivant quatre (04) critères :
leur portée (domaine d’application), leur valeur juridique, la preuve de leur existence et
la sanction de leur méconnaissance ou de leur ignorance par le juge du fond.
Tandis que l’usage conventionnel à une portée limitée car ne s’appliquant qu’à un
cercle restreint de commerçants (par exemple, les commerçants exerçant dans le domaine de
la vente de tissus), l’usage de droit a une portée élargie puisqu’il s’applique à tous les
commerçants sans distinction de leur secteur d’activité. Toutefois, en aucun cas, il n’est
opposable à de simples consommateurs.
Du point de vue de leur valeur juridique, il faut retenir que l’usage conventionnel
a une valeur supplétive ; c’est-à-dire que son application ou sa mise à l’écart dépend de la
volonté des parties contractantes. Dans le silence du contrat, il convient de présumer que
ceux qui avait la possibilité de l’écarter et qui ne l’ont pas fait, ont souhaité que cet usage
s’applique dans leur relation contractuelle. L’article 1160 du Code civil confirme cette
présomption lorsqu’il dispose qu’ « on doit suppléer dans le contrat des clauses qui y sont
d’usage, quoiqu’elles n’y soient pas exprimées ». Quant à l’usage de droit, il a une valeur
impérative en ce qu’il s’applique aux relations entre commerçants en l’absence
d’expression de leur volonté de ne pas voir cet usage leur être appliqué. Mieux, faut-il
préciser que l’usage de droit permet de déroger à des dispositions du droit civil. Ainsi,
contrairement aux dispositions de l’article 1202 alinéa 1 du Code civil qui dispose que « la
8
solidarité7 ne se présume point ; il faut qu’elle soit expressément stipulée », la solidarité se
présume en matière commerciale en vertu d’un usage de droit consacré par des arrêts de la
Cour de cassation française en date du 20 octobre 1920 et du 18 juillet 1929 8 et rappelé par
un arrêt de la Cour d’appel d’Abidjan du 6 mars 20059.
Néanmoins, il faut préciser que l’usage de droit ou de fait, pure habitude entre les
commerçants qui par l’effet du temps s’impose comme une règle à suivre, ne peut déroger à
une loi commerciale ayant un caractère impératif10.
d) La jurisprudence
7
C’est la situation juridique de plusieurs débiteurs qui sont tenus à l’égard d’un même créancier (solidarité
passive) ou de plusieurs créanciers qui ont le même débiteur (solidarité active)
8
Req. 20 octobre 1920, aff. Robin c./ Serenon, S. 1922. 1. 201, note j. Hamel ; Civ. 18 juillet 1929, aff.
Délicourt c./ Martinot et autres , D.H. 1929.556.
9
C.A.A. 6 mai 2005, in Repertoire quinquenal OHADA 2006-2010, T.2, p.11
10
Civ 3ème, 7 juillet 1975, aff. Mathieu c./ Epoux Donadieu et autres, D.1975, IR 194, Bull. civ. III , n°238,
p.181
11
GUILLIEN (R), VINCENT (J), Lexique des termes juridiques, éditions DALLOZ, 14ème édition, mai
2003.p.343
9
décisions rendues par les tribunaux, les Cour d’appel12 et la Cour de commune de justice et
d’arbitrage ( CCJA) , ensuite aux sentences arbitrales rendues par la Cour d’Arbitrage de
Côte d’Ivoire ( CACI) et la CCJA, enfin aux avis rendus par la CCJA lorsqu’elle est
consultée pour l’interprétation et l’application du Traité OHADA, ses règlements
d’application et les Actes uniformes .
Au niveau des tribunaux, il faut préciser qu’en droit ivoirien, les décisions en
matière commerciale étaient rendues par les tribunaux de première instance ou leurs sections
détachées statuant en matière commerciale. Désormais, cette compétence est dévolue à des
juridictions spéciales : les tribunaux de commerce constitués par la Décision 001/PR du 11
janvier 2012 portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux de commerce.
Mais cette décision a été remplacée par la loi organique n°2014-424 du 1er juillet 2014
portant création, organisation et fonctionnement des juridictions de commerce13 modifiée en
ses articles 5 et 22 par la loi organique n° 2016-11 du 13 janvier 201614.
Ainsi, désormais les contestations relatives aux actes de commerce accomplis par
les commerçants à l’occasion de leur commerce et l’ensemble de leurs contestations
commerciales comportant même un objet civil sont de la compétence des juridictions de
commerce sous réserve d’un respect d’une tentative de règlement amiable obligatoire.
12
Lorsque l’intérêt du litige excède un milliard de francs CFA.
13
Journal officiel de la république de Côte d’Ivoire (JORCI) n °11 du 15 juillet 2014. Cf.
http://www.ccesp.ci/ccesp2/img_articles/loi_%20juridictions_de_commerce.PDF
14
JORCI n°5 du 26 février 2016. cf.
http://www.tribunalcommerceabidjan.org/documents/publications/JO0002.pdf
10
indéterminé15; ce qui implique qu’en cas de contestation, ces décisions peuvent faire l’objet
d’un appel près la Cour d’Appel d’Abidjan. Par ailleurs, si l’arrêt de la Cour d’Appel n’est
pas accepté par toutes les parties au litige, elles peuvent former un pourvoi en cassation près
la CCJA.
Quant à la CCJA, elle constitue l’organe suprême des Etats parties à l’OHADA
qui assure une interprétation commune des textes de l’OHADA (Traité, Règlements
d’application et les Actes uniformes) face aux éventuelles contradictions des juridictions
de fond des différents Etats parties. Elle assume ainsi trois (03) fonctions essentielles :
judiciaire (en rendant des Arrêts), arbitrale (en rendant des Sentences arbitrales) et
consultative (en rendant des Avis)17.
e) La Doctrine
15
Cf. article 8 de loi organique n°2014-424 du 1er juillet 2014 portant création, organisation et fonctionnement
des juridictions de commerce
16
Idem
17
Cf. articles 7, 13 et 14 du Traité OHADA révisé
18
CORNU (Gérard), Vocabulaire juridique, France 2010, éd. Presse Universitaires Françaises (PUF), p.324
19
En ce sens, AKUETE (Pedro Santos) et TOE (Jean Yado), Droit Commercial Général, Editons Bruylant,
2002 ; FIENI (Pacôme), « Droit commercial général dans l'espace OHADA : étude comparative de l'ancien et
du nouvel Acte uniforme », extrait de Actualités juridique Edition économique n°3/2012, p.22,
http://www.ohada.com/doctrine/ohadata/D-13-34.html; BITSAMANA (H.), Dictionnaire de droit OHADA,
Brazzaville, éditions IPC.
11
doctrine française pourra servir de référence puisque les actes uniformes de l’OHADA sont
largement inspirés des dispositions déjà en vigueur en France 20».
20
BEIRA (Ehi Marc), Droit commercial : Droit commercial général et Droit des sociétés commerciales,
Abidjan, édition 2014, éditions ABC, 2013, p. 39
12
CHAPITRE I : LES ACTES DE COMMERCE
Le souci de distinction des actes de commerce des actes de nature civile se justifie par
le fait que ces différents actes juridiques ne sont pas toujours assujettis aux mêmes règles
juridiques ; c’est en cela que réside les intérêts de leur distinction.
Il le définit comme un acte « …par lequel une personne s’entremet dans la circulation
des biens qu’elle produit ou achète ou par lequel elle fournit des prestations de service avec
l’intention d’en tirer profit pécuniaire ». Ainsi, l’acte de commerce par nature est tout acte
qui soit contribue à la circulation des richesses soit traduit une intention de spéculation
(recherche du profit).
Même si cette démarche est salutaire en ce qu’elle innove par rapport au droit français
qui continue à se fier à une énumération légale pour désigner les actes de commerce 21, il
21
Cf. les articles L. 110-1 et L.110-2 du Code de commerce français
13
convient de constater qu’elle est lacunaire puisqu’elle ne permet pas d’appréhender de
manière exhaustive les actes de commerce.
Le législateur OHADA est bien conscient de cette réalité ; c’est sans doute la raison
pour laquelle il a maintenu en vigueur dans les articles 3 (alinéa 2) et 4 de l’AUDCG,
l’énumération indicative des actes de commerce qu’il avait jadis consacré dans la première
version de ce texte de loi.
Par ailleurs, sont considérés comme des actes de commerce par la forme, « la lettre
de change, le billet à ordre et le warrant ».
Même avec cette énumération légale, identifier de manière claire et précise les actes
de commerce, n’est pas chose aisée au regard de leur absence d’exhaustivité et de leur
caractère disparate.
14
Section I : Les différentes catégories d’actes de commerce
De l’analyse menée par la doctrine, il s’infère que les actes de commerce énumérés
par la loi ont été regroupés en quatre (04) grandes catégories.
Les deux autres sont issues de la qualité de leurs auteurs ou de leur réalisation avec
non-professionnels, c’est-à-dire les consommateurs : les actes de commerce par accessoire et
les actes mixtes (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les actes de commerce par nature et les actes de commerce par la forme
Les articles 3 et 4 de l’AUDCG de 2010 les identifient déjà dans leurs énumérations.
L’analyse préalable des actes de commerce par nature (A) avant celle des actes de
commerce par la forme (B) constitue une partie importante de l’identification des actes de
commerce car d’une part, elle mobilise la majorité des actes de commerce et c’est leur
accomplissement professionnel et indépendante qui confèrent la qualité de commerçant22.
Les actes de commerce par nature étant la catégorie d’actes de commerce qui mobilise la
majorité des actes de commerce, la doctrine les a classé en suivant une sous –catégorisation,
à l’instar des tiroirs d’un meuble qui s’emboite les uns dans les autres ou encore une série de
soupières qui se range les plus petites dans les plus grandes.
L’achat en vue de la revente de biens meubles avant l‘OHADA, était considéré comme
un acte de commerce. Mais depuis l’avènement de l’OHADA, l’achat en vue de la revente
22
Article 2 du nouvel AUDCG
15
de biens immeubles est désormais un acte de commerce. Le nouvel Acte uniforme relatif au
droit commercial de 2010 a confirmé cette règle puisqu’il n’a apporté aucune modification
sur ce point.
L’article 46 alinéa 2 de la même loi dispose que le promoteur « est aussi habilité à
procéder à la vente d’immeuble à construire pour le compte du maître de l’ouvrage et de ce
fait est considéré comme vendeur d’immeuble… ».
Ainsi en droit OHADA, l’achat en vue de la revente de biens meubles ou immeubles est
un acte de commerce par nature sous réserve que certaines conditions cumulatives soient
observées en principe (a). Mais il faut avouer que dans certains cas toutes les conditions
n’ont pas à être toutes observées pour conférer le caractère commercial à certaines ventes (b).
Essentiellement, trois (03) conditions doivent être respectées pour qu’une vente puisse
être considérée comme un acte de commerce.
D’abord, l’objet de la vente doit faire l’objet d’un achat préalable. Ainsi, la vente de
produits agricoles n’est pas en principe considéré comme un acte de comme puisqu’il n’y a
pas d’achat préalable de ces produits qui tire gratuitement profit du sol, un élément naturel. Il
en est de même de la vente de produits d’activités assimilable à l’agriculture tel que
l’élevage, la pêche, l’horticulture (culture des plantes, des légumes, des fleurs, des arbres ou
arbustes et des ornements).
Ensuite, l’acheteur doit avoir au moment de l’achat une intention de revente, peu
importe que par la suite le bien n’ait pas été vendu. Selon Me BEHIRA, cette intention de
revente résulte généralement de l’activité professionnelle de l’acheteur24.
Enfin, l’intention de revente doit traduire chez le vendeur, une recherche de profit
pécuniaire ; peu importe qu’il y ait eu perte à la suite de la revente. Dès lors, les ventes de
produits effectuées par les associations, les syndicats ou les coopératives à leurs membres ne
23
JORCI n° 37 du jeudi 16 septembre 1999, cf. http://abidjan.net/JO/JO/5901999.asp
24
BEIRA (Ehi Marc), Droit commercial : Droit commercial général et Droit des sociétés commerciales Op. Cit.
p.50
16
sont pas considérées comme des actes de commerce puisque ces structures sont dénuées en
principe de toute volonté de rechercher le profit.
En clair, la vente d’un bien meuble ou immeuble n’est pas considérée comme un acte
de commerce par nature que si le bien a fait l’objet d’un achat préalable effectué dans
l’intention de le vendre en vue de faire un profit pécuniaire.
Par ailleurs, l’horticulteur qui vend ses plantes, fleurs ou légumes, n’accomplit pas
d’acte de commerce puisqu’il vend des produits du sol qu’il n’a pas préalablement acheté.
Cependant, l’horticulteur qui achète les produits des autres horticulteurs dans une
proportion nettement supérieure à sa propre production et qui revend le tout par la
suite, il est considéré comme accomplissant des actes de commerce27.Il en est de même du
pépiniériste qui achète des plants et les revend sans transformation appréciable28.
25
Civ. 21 avril 1891, aff. Banque de consignation c. / Lareinty, S. 1981.1. 201
26
Req .11 décembre 1944, D. 1944, p.213
27
Cass. Soc. 13 février 1959, Bull IV, n°220.
28
Paris 2 déc. 19922, DP 1923, somm.1
17
Toutefois, une vente des produits de la pêche ou de l’élevage est considérée
exceptionnellement comme un acte de commerce dans deux hypothèses. La première se
résume au cas où les éleveurs achètent les animaux et les revendent rapidement sans que
ceux-ci n’aient véritablement profité du sol. La seconde hypothèse renvoie au cas où
l’éleveur engraisse exclusivement ou en majeure partie son cheptel ou ses poissons avec
des produits achetés en dehors de l’exploitation avant de les vendre29. Dans ces deux
hypothèses, la recherche du profit dont fait preuve les éleveurs, pousse à une requalification
de ces ventes en acte de commerce par nature.
Les actes qui permettent de s’entremettre dans la circulation des richesses qui ont été pour
la majorité, prévus par l’AUDCG, renvoie aux opérations de manufacture (a), aux industries
extractives (b) , à l’édition (c) et aux spectacles publics (d).
29
Cass. Civ 30 novembre 1931, D.H. 1932 p.83 ; Cass. Civ. 27 1878, D.01879, p.38
18
Quid des industries extractives ?
En droit OHADA, les activités extractives (exploitation des mines, carrière et de tout
gisement de ressources naturelles) ont un caractère commercial lorsque la production est
réalisée industriellement c’est-à-dire dans des ateliers ou des usines avec usage de machines
et de matériels techniques appropriés.
c) L’édition
L’édition n’a curieusement pas été expressément visée par l’AUDCG (tant celui de
1997 que celui de 2010) comme un acte de commerce.
Cependant, en considérant que les actes d’entremise dans la production des biens sont
de façon générale, des actes de commerce par nature suivant les prescriptions de l’article 3
alinéa 1 de l’AUDCG de 2010, on peut valablement l’admettre comme un acte de commerce
par nature ; il ne peut en être autrement puisque l’éditeur spécule (recherche le profit) sur le
travail d’autrui.
Par ailleurs, faut-il préciser que les relations de l’éditeur et de l’auteur d’une œuvre
littéraire ou artistique sont régies par un droit spécial à savoir le droit de la propriété
intellectuelle.
19
Hormis, l’achat en vue de la revente, l’entremise dans la circulation des biens
produits, les actes qui favorisent la prestation de services motivés par la recherche d’un profit,
sont considérés également comme des actes de commerce par nature.
Ce tiroir des actes de commerce par nature constitue la plus grande sous-catégorie des
actes de commerce par nature ; on comprend d’ailleurs pourquoi elle figure même dans la
définition légale de l’acte de commerce par nature.
Quoi qu’il en soit, ces actes de prestations de service peuvent s’effectuer dans les
domaines :
- Financier (a) ;
- de prestation de services matériels (b) ;
- de la réalisation de spectacles publics ou encore de l’évènementiel (c) ;
- et d’intermédiation (d).
Ces opérations sont relatives à la banque (i), au change (ii), à la bourse (iii) et à
l’assurance (iv)
Les opérations crédit renvoient aux opérations de prêt, d’escompte30 des effets de
commerce31, de prise de pension, d’acquisition de créances, de garantie32, de financements,
de vente à crédit33et de crédit –bail34.
30
Technique bancaire de financement consistant à mettre à disposition du bénéficiaire d’un effet de commerce
la contre-valeur avant l’échéance. Le banquier accomplit cette opération moyennant une commission (un certain
pourcentage de la somme).
31
Titre négociable circulant librement et donnant droit au paiement d’une somme d’argent dès présentation ou à
l’expiration d’un certain délai (exemple : lettre de change ou billet à ordre).
32
Il s’agit des sûretés que la banque confère à ses clients moyennant rémunération (exemple : cautionnement)
ou prend sur eux (exemple : hypothèque) pour garantir l’exécution dans des obligations de ces derniers.
33
Opération par laquelle le transfert de propriété de l’objet de la vente est réalisé immédiatement mais dont le
prix est n’exigible qu’au terme du contrat
20
Sont considérées comme opérations de placement, les prises de participation dans les
entreprises existantes ou en formation (acquisition d’actions ou de parts sociales).
Cependant, il faut nuancer ces propos car les opérations d’assurance mutuelle, telles
que celles de la MUGEFCI37, demeurent des actes de nature civile car elles ne permettent pas
de réaliser de bénéfices.
Les prestations de services matériels peuvent également être considérées comme des
actes de commerce.
34
Opération par laquelle une société achète un bien et le met à la disposition du preneur qui lui paie des
redevances. En fin de bail, le preneur pourra acquérir le bien moyennant le paiement d’une somme résiduelle
35
Titres négociables représentant soit des actions (droits d’actionnaires) soit des obligations (des prêts à long
terme)
36
Req. 4 juillet 1881, S. 1882.1.15
37
Mutuelle Générale des Fonctionnaires de Côte d’Ivoire (MUGEFCI)
21
b) Les opérations de prestations de services matériels
- transport (ii) ;
- télécommunication (iii) ;
Les opérations de location de biens immeubles sont également des actes de commerce
par nature mais relevant d’une autre catégorie : les actes d’intermédiation.
Par opérations de transport, il faut entendre les actes liés au transport des personnes et
des marchandises que ce soit par voie terrestre, maritime ou aérienne.
Elles sont commerciales lorsqu’elles sont accomplies dans le but d’en tirer un profit
pécuniaire que ce soit de manière occasionnelle ou habituelle. Ainsi, le particulier qui utilise
son véhicule personnel pour faire du transport en commun de personnes moyennant un profit
pécuniaire, accomplit des actes de commerce.
Elles désignent tous les actes liés aux moyens modernes de communication que sont
le téléphone, le fax, la télécopie, la téléphonie mobile, l’internet, etc.
S’investir dans l’évènementiel en réalisant des spectacles publics peut constituer un acte de
commerce par nature.
Même si certains auteurs les classent parmi les activités des prestations de service, et que
d’autres estiment qu’ils constituent une catégorie spécifique d’actes de commerce, il faut
retenir que les spectacles ne peuvent être considérés comme des actes de commerce que
lorsqu’ils satisfont aux critères cumulatifs suivants :
Dès lors, les spectacles organisés par les associations ou fondation dans un but éducatif
ou dans un élan de générosité, ne sont pas des actes de commerce.
Tant les opérations des intermédiaires de commerce (i) ou non (ii) ainsi que de transit
(iii) sont visées par l’AUDCG de 2010.
Selon l’article 169 de l’AUDCG de 2010 « l’intermédiaire de commerce est une personne
physique ou morale qui a le pouvoir d’agir, ou entend agir habituellement et
professionnellement pour le compte d’une autre personne, commerçante ou non, afin de
conclure avec un tiers un acte juridique à caractère commercial ».
Même s’il est curieux que le nouvel Acte uniforme ait maintenu les expressions
« habituellement et professionnellement » dans la définition des intermédiaires de commerce
alors qu’il les a élagué dans la définition consacrée au commerçant, force est de constater que
les opérations effectuées par les intermédiaires de commerce sont inévitablement des actes
de commerce par nature.
23
Dans nos développements ultérieurs, nous reviendrons sur ces acteurs du monde des
affaires qui de plus en plus, semblent gagner de l’importance dans l’espace OHADA en
général et en Côte d’Ivoire en particulier.
Ces autres intermédiaires ne sont rien d’autres que d’une part, les personnes qui se
chargent professionnellement de gérer les affaires d’autrui, d’administrer ses biens,
notamment les agences immobilières pour les opérations concernant l’achat, la vente ou la
location d’immeubles.
D’autre part, sont considérés comme ces autres intermédiaires, les prestataires de
services qui interviennent dans les transactions comme les agences de renseignements
commerciaux, les cabinets ou agences d’affaires, pour la conclusion des contrats d’achats
ou de vendre d’actions, de parts sociales ou de parts d’intérêt pour le compte de leurs clients.
En clair, les actes qu’ils accomplissent et qui sont considérés comme des actes de
commerce renvoie à l’achat, la souscription, la vente ou la location de :
- Immeubles ;
- Fonds de commerce ;
- Actions ou parts de sociétés commerciales ou immobilières.
Les opérations de transit désignent les actes accomplis par des professionnels tels que
les commissionnaires en douanes ou transitaires.
24
En droit commercial français, il semble que la majorité de ces actes ne soient
commerciaux que lorsqu’ils sont accomplis dans le cadre d’une entreprise (location de
meuble, manufacture, commission, transport par eau ou par terre ; fourniture)38.
Par ailleurs, cette catégorie d’acte de commerce par nature qui accomplis dans le
cadre d’une entreprise, est élargie en droit français, puisqu’elle comporte également les
entreprises d’agence, de bureau d’affaires, de vente à l’encan (ou aux enchères publiques)39.
Certaines opérations sont considérées comme des actes de commerce par nature bien
qu’ils soient accomplies par des commerçants personnes physiques ou morales. Il en est ainsi
des actes accomplis par les sociétés commerciales (i) et les contrats conclus par les
commerçants pour les besoins de leurs activités (ii).
Il peut paraître curieux de considérer ces opérations comme des actes de commerce
par nature quand on sait qu’il existe une catégorie d’actes de commerce qui aurait pu
parfaitement les accueillir (les actes de commerce par accessoire).
Sont considérés comme des actes de commerce par nature, les actes accomplis tant par
les sociétés commerciales par la forme (SNC40, SCS41, SARL42, SA43, SAS44) ou par leur
objet social (ou encore par leurs activités menées).
38
Cf. article L.110-1, 4° ; 5° ; 6° du Code de commerce français
39
Idem
40
La Société en Nom Collectif est une société dans laquelle tous les associés sont commerçants et répondent
indéfiniment et solidairement des dettes sociales. Cf. article 270 AUSCOM de 2014
41
La Société en Commandite Simple est une société dans laquelle coexistent un ou plusieurs associés
indéfiniment et solidairement responsables des dettes sociales dénommées "associés commandités", avec un ou
plusieurs associés responsables des dettes sociales dans la limite de leurs apports dénommés "associés
commanditaires" ou "associés en commandite" et dont le capital est divisé en parts sociales. Cf. article 293
AUSCOM de 2014
42
La Société à Responsabilité Limitée est une société dans laquelle les associés ne sont responsables des dettes
sociales qu’à concurrence de leurs apports et dont les droits sont représentés par des parts sociales. Cf. article
309 AUSCOM de 2014
25
ii) Les contrats entre commerçants
Lorsque des commerçants concluent un contrat pour les besoins de leurs commerces
respectifs, ce contrat est un acte de commerce par nature.
Cependant, lorsqu’un contrat est conclu soit entre un commerçant et un civil soit entre
des commerçants dont l’un n’agit pas pour les besoins de son commerce, ce contrat ne peut
être considéré comme un acte de commerce par accessoire c’est-à-dire en raison de son
auteur.
La deuxième catégorie d’actes de commerce se trouve être les actes de commerce par la
forme ou encore acte de commerce objectifs.
Les actes de commerce par la forme ou les actes de commerce objectifs s’identifient aux
effets de commerce visés d’une part à l’article 4 du nouvel AUDCG (1) et d’autre part aux
sociétés commerciales par la forme prévues à l’article 6 alinéa 2 de l’AUSCOM (2).
Ils sont considérés comme objectifs puisque les accomplir même professionnellement ne
confère jamais la qualité de commerçant.
Les effets de commerce peuvent être considérés comme des actes de commerce. Certains
sont énumérés par l’article 4 de l’AUDCG sans en constituer une exhaustivité. Il s’agit en
clair de la lettre de change, du billet à ordre et du warrant.
La lettre de change ou traite est un effet de commerce par lequel une personne appelée
tireur donne l’ordre à une autre personne appelée tiré, de payer une certaine somme d’argent
à une troisième personne appelée bénéficiaire ou porteur de la lettre de change.
Le billet à ordre est un titre par lequel une personne s’engage à payer une somme
déterminée à un bénéficiaire ou à l’ordre de celui-ci.
43
La Société Anonyme est une société dans laquelle les actionnaires ne sont responsables des dettes sociales
qu'à concurrence de leurs apports et dont les droits des actionnaires sont représentés par des actions. Cf. article
385 AUSCOM de 2014
44
La Société par Actions Simplifiée est une société instituée par un ou plusieurs associés et dont les statuts
prévoient librement l’organisation et le fonctionnement de la société sous réserve des règles impératives de
l’AUSCOM. Cf. article 853-1 AUSCOM de 2014
26
Ainsi, signer l’un de ces instruments de crédit et/ ou de paiement revient à accomplir un
acte de commerce par la forme. Cependant, la signature même habituelle ou professionnelle
de ces instruments ne confère jamais la qualité de commerçant. Selon Me BEHIRA, cette
règle a été instituée pour faciliter la circulation de ces effets de commerce45.
Constituer une société commerciale par la forme, c’est accomplir un acte de commerce
par la forme.
Bien sûr, l’accomplissement de cet acte de commerce par la forme ne confère jamais la
qualité de commerçant, même s’il est effectué de manière habituelle. L’article 6 alinéa 2 de
l’AUSCOM énumère les différentes sociétés commerciales existantes en droit OHADA.
Ainsi, sont commerciales en raison de leur forme et quel que soit leur objet, les sociétés en
nom collectif, les sociétés en commandite simple, les sociétés à responsabilité limitée, les
sociétés anonymes et les sociétés par actions simplifiées.
Un agriculteur qui constitue donc une société à responsabilité limitée (SARL) même
pour vendre ses produits agricoles, accomplit un acte de commerce par la forme mais il
n’est pas commerçant.
Les deux premières catégories d’actes de commerce sont suivies de deux autres : les
actes de commerce par accessoire et les actes mixtes.
Catégorie d’actes de commerce résultant purement de l’analyse menée par la doctrine, les
actes de commerce par accessoire tire leur commercialité de la qualité de celui qui les
accomplit (A).
Quant aux actes mixtes, ils présentent une double nature juridique qui influence
inexorablement son régime juridique (B).
Ainsi, un acte ou un fait juridique qui en principe est de nature civile, sera considéré
comme présentant un caractère commercial parce qu’il est accompli par un commerçant pour
les besoins (lorsqu’il s’agit d’un acte juridique) ou à l’occasion de son commerce (lorsqu’il
s’agit d’un fait juridique). Par exemple, l’achat d’un véhicule est en principe un acte de
45
BEIRA (Ehi Marc), Droit commercial : Droit commercial général et Droit des sociétés commerciales Op. Cit.
p.61
27
nature civile ; cependant, lorsqu’il est effectué par un commerçant (spécialisé dans l’achat et
la revente d’appareils électro-ménagers) pour les besoins de son commerce (le transport de sa
marchandise), cet achat est considéré comme un acte de commerce par accessoire ou en
raison de son auteur.
Cette règle empruntée par l’AUDCG au Code de commerce46 de 1807, établit une
présomption de commercialité pour tous les actes et faits juridiques accomplis par un
commerçant. Toutefois, faut-il préciser que cette présomption ne s’applique qu’à une double
condition :
Cette présomption de commercialité pesant sur les actes ou les faits du commerçant n’est
qu’une présomption simple ; cela implique que ce dernier peut prouver qu’un acte ou un fait
qu’il accomplit ne présente pas un caractère commercial.
Si cette preuve peut être aisée à rapporter pour l’acte juridique, en démontrant qu’il a été
accompli pour un usage personnel, familial ou encore dans une intention libérale (acte à titre
gratuit), il lui sera difficile de rapporter une telle preuve pour le fait juridique, surtout lorsque
celui-ci est survenu à l’occasion de l’exercice de son commerce.
En droit commercial français, une partie de la doctrine a tendance à distinguer les actes
de commerce par accessoire objectifs des actes de commerce accessoire subjectifs47.
Les actes de commerce par accessoire objectif sont des actes de commerce qui
empruntent le caractère commercial de l’acte qui lui sert de support (par exemple, le gage qui
devient commercial lorsqu’il est réalisé lors d’une opération de commerce.)
Les actes de commerce par accessoire subjectif sont des actes qui sont commerciaux
parce qu’accomplis par un commerçant pour les besoins ou à l’occasion de son commerce
(cette catégorie correspond exactement à l’appréhension que le droit OHADA a de l’acte de
commerce par accessoire).
46
Article 632 paragraphe 6 : « la loi répute acte de commerce, toutes les obligations entre négociants,
marchands et banquiers. »
47
BLARY-CLEMENT (Edith), Droit commercial : Théorie générale, Université Numérique Francophone, p.10
et suiv.
28
Quoi qu’il en soit, en droit OHADA cette théorie de l’acte de commerce par accessoire
ou en raison de son auteur, s’exprime bien tant dans le domaine contractuel qu’extra-
contractuel.
1) Le domaine contractuel
En vertu de la théorie de l’acte de commerce par accessoire, tous les contrats conclus
par un commerçant avec un non-commerçant (ou encore une personne ordinaire) pour les
besoins de son commerce sont ipso facto considérés comme des contrats commerciaux par
accessoire. En revanche, s’il les passe avec un commerçant, il s’agit de contrats commerciaux
par nature comme le précise l’article 3 alinéa 2 du nouvel AUDCG.
Ainsi, les achats, les ventes, de matériels, de fonds de commerce, des contrats
d’assurance ou de travail conclus par le commerçant avec des non-commerçants sont réputés
être commerciaux (par accessoire) pour le commerçant.
Le gage est un contrat par lequel un bien meuble est remis au créancier ou à un tiers
convenu entre les parties pour garantir le paiement d’une dette. Il demeure un contrat civil
même lorsqu’il est conclu par un commerçant. En effet, il ne devient commercial que
lorsqu’il est conclu par un civil ou un commerçant pour garantir une dette commerciale.
Par ailleurs, le cautionnement est un contrat par lequel, une personne se porte caution.
En raison du fait que ce contrat tire ses origines d’une intention libérale (un service rendu
gratuitement à un ami), il demeure civil et, ce même s’il garantit une dette commerciale.
29
NB : Savoir plus (éléments de droit comparé)
Cela dit, la commercialité par accessoire en droit OHADA a été étendue par la
jurisprudence aux quasi-contrats49 et même au domaine extra-contractuel.
2) Le domaine extra-contractuel
Lorsque le commerçant lui-même, son préposé (employé) ou une chose qu’il a sous sa
garde cause un préjudice à une personne à l’occasion de l’exercice de son activité
commerciale, il encourt une responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle commerciale50.
Enfin, précisons que la théorie de l’accessoire permet à certains actes qui sont
considérés comme commerciaux en principe, de devenir des actes de nature civile dès
l’instant où ils constituent l’accessoire d’une activité principale de nature civile. Il en est
ainsi de l’achat et de la revente de médicaments effectués par un médecin à l’égard de ses
patients ; dans la mesure où la médecine est une profession profondément civile, l’achat et la
revente de médicament constituant l’accessoire nécessaire à l’exercice de cette profession
civile, ils deviennent des actes civils par accessoire. Ce même principe s’applique à
48
Com 7 février 2006 n° 05-13613
49
Cass civ. 5 février 1907 DP 1907, 1, 429 ; Cass. com 17 avril 1967 D. 1967, 511 ; Cass . com 21 avril
1955,Bull III, n°125.
50
Req. 11 juillet 1900, aff. Gaillard C. / Bournigaud, DP 1900.1.508 ; Com 7 avril 1967, aff. Ginoves C/ Soc.
anon. « Samat » et autres, D.1968.61 note Calais-Auloy ; Req. 21 juillet 1936 Gaz. Pal. 1936 ,II, 609
30
l’hypothèse de l’artisan qui achèterait pour revendre à ses clients des accessoires nécessaires
aux produits commandés par ces derniers ; ou encore au directeur d’établissement qui achète
et revend à ses élèves, des fournitures scolaires afin de pouvoir mieux dispenser ses cours51.
Pour expliquer l’acte mixte, il n’y a pas meilleur illustration qu’un exemple banal tiré de
la vie courante : acheter un stylo à bille auprès du boutiquier du quartier (généralement
qualifiée de « Diallo ») ; ou encore l’achat d’une villa auprès d’un promoteur immobilier.
Ainsi, pour moi qui achète le stylo pour un usage personnel (prendre des notes de cours
notamment) ou encore la villa pour y habiter, j’accomplis un acte de nature civile. Pendant
ce temps, le même acte du côté du Boutiquier ou du promoteur immobilier, constitue un acte
de commerce vu qu’il tire un profit pécuniaire plus ou moins important sur cette opération.
Ainsi, un acte mixte est un acte juridique qui présente une double nature juridique : il est
commercial pour l’une des parties et civil pour l’autre. Ce sont d’ailleurs les actes les plus
courants.
L’intérêt de l’étude de l’acte mixte réside dans le régime juridique qui lui est applicable et
qui est influencé par la dualité de sa nature juridique.
Par contre, un commerçant qui doit prouver l’existence d’un acte mixte contre un
non-commerçant, il est tenu de se conformer aux règles formalistes du droit civil qui
imposent une preuve par écrit ou par un commencement de preuve par écrit.
51
Caen 12 juillet 167, D. 1968, 208
31
Même si une telle opinion semble plausible, il est indéniable que le commerçant est
assujetti en principe au respect de règles assez formalistes en matière de preuve de l’acte
mixte.
Ce n’est pas le cas pour le commerçant qui, pour mettre en demeure un non
commerçant, se doit de recourir aux règles assez formalistes de droit civil, lesquelles
prescrivent que la mise en demeure s’effectue par « sommation ou par tout acte
équivalent 53» réalisé (e) généralement par un exploit d’huissier.
Quand le commerçant veut ester en justice contre un non commerçant dans le cadre
d’un litige les opposant relativement à un acte mixte, il a l’obligation de saisir le tribunal de
commerce.
Par contre, lorsque c’est le non commerçant qui a des griefs contre le commerçant et
qu’il veut agir en justice, il bénéficie d’un droit option ou d’une alternative : il a la faculté
52
BEIRA (Ehi Marc), Droit commercial : Droit commercial général et Droit des sociétés commerciales Op. Cit.
p.66
53
Cf. article 1139 du Code Civil.
54
Cf. article 1202 alinéa 1 du Code civil
32
de saisir soit le tribunal de commerce ou te tribunal de première instance selon qu’il
estime que l’une ou l’autre est à même de mieux veiller sur ses intérêts .
Une telle logique repose sur la philosophie de protection de la partie la plus faible (le
non commerçant) contre les ruses et artifices du professionnel (le commerçant). Il convient
même de préciser que cette volonté protectionniste de la partie la plus faible contre la partie
la plus forte a donné naissance à un droit spécial : le droit de la consommation.
Trois critères sont souvent usités par la jurisprudence pour déterminer le caractère
commercial de certains actes :
55
BLARY-CLEMENT (Edith), Droit commercial : Théorie générale, Université Numérique Francophone ;
BERT (Daniel) et PLANCKEEL (Frédéric), Cours de Droit commercial et des Affaires, Collection AMPHI
LMD, Lextenso éditions Gualino, 1ère édition 2015-2016
33
- Le critère de la circulation des biens ou de la prestation de services (A) ;
- Le critère de la spéculation (B);
- Le critère de l’entreprise (C).
Lorsqu’un acte juridique est difficilement identifiable dans la liste non exhaustive des
actes de commerce fournie par l’AUDCG de 2010, il peut être considéré comme un acte de
commerce par nature lorsqu’il contribue à la circulation des biens depuis leur production
jusqu’à leur consommation.
Peut être également considéré comme un acte de commerce par nature l’acte par lequel
une personne fournit des prestations de service dans le but d’en tirer un profit pécuniaire.
D’ailleurs, l’AUDCG de 2010 consacre ce critère dans la définition qu’il prête à l’acte de
commerce par nature lorsqu’il l’appréhende comme un acte d’entremise dans la circulation
des biens ou un acte de fourniture des prestations de service56.
Quoi qu’il en soit, la fourniture de biens ou la prestation de service doit être effectuée
dans le but de tirer un profit pécuniaire. Dès lors, la spéculation est également un critère qui
permet de déceler la commercialité d’un acte.
B) Le critère de la spéculation
Selon eux, ce qui caractérise les actes de commerce « c’est qu’ils sont des actes de
spéculation, c’est-à-dire des actes ayant pour but la réalisation d’un bénéfice en argent 57».
Ainsi, un acte juridique qui est accompli dans le but de rechercher un profit pécuniaire
doit être perçu comme un acte de commerce par nature.
Cependant ce critère est également limité en ce sens que de nombreux professionnels non
commerçants poursuivent également la recherche du profit. Cette réalité est fort éloquemment
56
Article 3 alinéa 1 de l’AUDCG de 2010
57
BERT (Daniel) et PLANCKEEL (Frédéric), Cours de Droit commercial et des Affaires, Collection AMPHI
LMD,Op. Cit., p.55
34
traduit par un auteur qui estime que si « toutes les activités commerciales sont spéculatives
(…), il existe des activités spéculatives qui ne sont pas commerciales58 ».
C) Le critère de l’entreprise
Certains actes juridiques peuvent être considérés comme des actes de commerce parce
qu’ils sont accomplis dans le cadre d’une organisation que constitue l’entreprise.
Cependant, il faut bien admettre que ce critère comme les précédents, ne suffit pas à
lui seul à conférer un caractère commercial aux actes juridiques. C’est la raison pour
laquelle, la jurisprudence y a recours par le jeu d’une combinaison ou d’une articulation.
Pour considérer certains actes juridiques comme des actes de commerce, la jurisprudence
procède à une combinaison des critères généraux proposés par la doctrine (A).
Par ailleurs, que ce soit par le biais de de la classification des actes de commerce ou par
la manipulation des critères généraux, identifier les actes de commerce présente plusieurs
intérêts (B).
A- L’œuvre de la jurisprudence
Aucun critère pris isolement n’est satisfaisant pour définir l’acte de commerce. Chacun d’eux
contribue à en expliquer un aspect sans véritablement le caractériser.
D’ailleurs, le Doyen RIPERT fait par exemple remarquer que « dans la vie civile moderne,
la circulation des biens, est devenue active, et l’esprit de spéculation souffle partout. La
société toute entière prend l’esprit commercial »60 .
58
Idem
59
BERT (Daniel) et PLANCKEEL (Frédéric), Cours de Droit commercial et des Affaires, Collection AMPHI
LMD, Lextenso éditions Gualino, 1ère édition 2015-2016, p.55 et suiv.
35
La jurisprudence n’a que trop compris ce principe ; raison pour laquelle pour déterminer
le caractère commercial des actes « inclassables», elle procède à une articulation de ces
critères.
Il n’est pas inutile de déterminer les actes de commerce et de les distinguer des actes de
nature civile. En effet, les actes de commerce bénéficient d’un régime juridique particulier
inapplicable aux actes civils.
- Accomplir les actes de commerce par nature comme profession, confère la qualité de
commerçant ;
- Le délai de prescription extinctive de créances commerciales est en principe de cinq
(05) ans contrairement aux créances civiles qui se prescrivent après trente (30) ans ;
- La mise en demeure du débiteur en matière commerciale peut se faire par tous les
moyens ; alors qu’en matière civile, il faut une citation directe ou un acte extra-
judiciaire ;
- Les intérêts moratoires61 sont plus élevés en matière commerciale qu’en matière
civile ;
- Le délai de grâce est écarté pour certaines dettes commerciales comme celles résultant
de la lettre de change, du billet à ordre ou d’un chéquier ;
- La solidarité se présume en matière commerciale ; ce qui n’est pas le cas en matière
civile ;
- La preuve de l’acte de commerce peut se faire par tous les moyens même par voie
électronique à l’égard des commerçants ; alors qu’en matière civile il faut un écrit en
principe ;
Il faut noter qu’une huitième règle de ce régime particulier existait et tenait au fait que les
procédures collectives d’apurement du passif (règlement préventif, redressement judiciaire,
liquidation des biens) ne s’appliquaient qu’aux commerçants personnes physiques
commerçantes et aux personnes morales de droit privé commerçantes ou non. Mais avec la
réforme en 2015 de l’Acte uniforme portant procédures collectives d’apurement du passif,
ces procédures s’appliquent à toutes les personnes physiques exerçant une activité
professionnelle indépendante, civile, commerciale , artisanale ou agricole ainsi qu’à toute
personne morale de droit privé y compris les entreprises publiques ayant adopté cette forme62.
60
RIPERT (Georges) et ROBLOT (René), Traité de Droit commercial, T.1, LGDJ, 18 ème édition, n°337-345.
61
Dommages et intérêts destinés à réparer le dommage résultant du retard dans l’exécution d’une obligation.
62
Cf. article 1-1 de l’AUPCAP
36
Dès lors, cette règle est caduque puisqu’il n’existe plus à ce niveau une distinction entre les
règles applicables aux actes de commerce et aux actes de nature civile.
Les différents actes de commerce ainsi présentés, il convient d’aborder l’étude des acteurs
de l’univers commercial.
Sous l’égide de l’AUDCG de 1997, seuls était considérés comme acteur de l’activité
commerciale, le commerçant (sous-chapitre 2) et les intermédiaires de commerce (sous-
chapitre 3).
Sous-Chapitre 1 : L’entreprenant
Innovation découlant de l’AUDCG de 2010, l’entreprenant est visé par les articles 30
et suivant du dit texte.
Ce statut juridique est présenté comme une solution à l’informel, l’une des
caractéristiques de l’économie africaine. Comme le souligne monsieur FIENI, le statut
d’entreprenant devrait permettre aux acteurs du secteur informel de sortir de l’opacité et
d’évoluer dans un environnement juridiquement et socialement sécurisé grâce à des mesures
fiscales simples et efficaces. Il souligne par ailleurs, qu’il pourrait être également utilisé par
37
les créateurs d’entreprises nouvelles (des start-up) pour tester leur idée de création avant
d’adopter une des formes de société du droit OHADA63.
Ce statut une fois obtenu, soumet son bénéficiaire à des obligations mais aussi lui
confère des privilèges (section 2).
Deux (02) conditions essentielles sont exigés par l’AUDCG pour acquérir le statut
d’entreprenant.
La première condition tient au fait qu’il faut être un entrepreneur individuel personne
physique, peu importe que l’activité menée par ce dernier soit civile, commerciale, artisanale
ou agricole.
L’AUDCG n’en donne pas une définition et ne prévoit aucun régime juridique qui lui est
applicable alors même que le régime de l’entreprenant est défini par renvoi à celle-ci. Pour
monsieur FIENI, un tel renvoi apparaît alors comme une coquille vide puisque nulle part dans
63
FIENI (Pacôme), « Droit commercial général dans l'espace OHADA : étude comparative de l'ancien et du
nouvel Acte uniforme », extrait de Actualités juridique Edition économique n°3/2012, p.6,
http://www.ohada.com/doctrine/ohadata/D-13-34.html
38
le droit des OHADA, le statut de ce mystérieux entrepreneur individuel n’a été défini ; ce qui
sans doute poserait des questions nombreuses64.
Pour notre part, il nous paraît judicieux de se conformer à la législation interne des Etats
parties pour appréhender le contenu de cette notion d’entrepreneur individuel en tenant
compte de l’activité professionnelle (commerciale, industriel, artisanale, etc.) qu’il exerce.
Ainsi, s’il mène une activité artisanale, l’entrepreneur individuel sera défini par assimilation à
la définition réservée à l’artisan. Même ce procédé apparaît lacunaire en raison du caractère
hétéroclite des législations des Etats parties à l’OHADA.
Cela dit, la deuxième condition à respecter pour être entreprenant, contraint à faire une
déclaration préalable et gratuite de son activité professionnelle au registre du commerce
et du crédit mobilier (RCCM). Au cours de cette déclaration, cinq (05) catégories
d’informations65 doivent être fournies auxquelles il faut adjoindre des pièces justificatives66.
Toute modification de l’une des informations fournies doit faire l’objet d’une déclaration
au greffe de la juridiction compétente tenant le RCCM67.
Quoi qu’il en soit dès réception des informations fournies par le déclarant, le
greffier délivre à celui-ci un accusé d’enregistrement qui mentionne la date de la formalité
accomplie et le numéro de la déclaration d’activité68.
Pour conserver sa qualité, l’entreprenant ne doit pas avoir un chiffre d’affaires qui
pendant deux exercices successifs (années successives) excède un certain seuil fixé par
l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises
(AUOHCE) au titre des systèmes minimales de trésorerie.
64
FIENI (Pacôme), « Droit commercial général dans l'espace OHADA : étude comparative de l'ancien et du
nouvel Acte uniforme », Op. Cit., p.8
65
Cf. article 62 AUDCG
66
Cf. article 63 AUDCG
67
Cf. article 62 AUDCG
68
Idem
39
En effet, l’article 13 de l’AUOHCE a fixé les seuils suivants :
Quid lorsqu’un entrepreneur mène à la fois deux activités telles que le négoce et la
fourniture de service ?
Selon Me BEHIRA, il faudrait cumuler les seuils relatifs à ces activités en vertu de
l’article 30 alinéa 3 de l’AUDCG69.
Quoi qu’il en soit, quelles sont les obligations que l’entreprenant doit observer et les
privilèges dont il bénéficie ?
Mais, il faut reconnaître avec monsieur FIENI que l’articulation des obligations
comptables de l’entreprenant avec celles attachées à son statut de commerçant, n’est pas
aménagée. En effet, l’entreprenant-commerçant (c’est-à-dire qui accomplit de manière
69
BEIRA (Ehi Marc), Droit commercial : Droit commercial général et Droit des sociétés commerciales, Op.
Cit. p.76
70
Article 31 AUDCG de 2010
71
Idem
72
Article 32 AUDCG de 2010
40
professionnel des actes de commerce par nature mais qui n’a pas procédé à une
immatriculation mais plutôt à une déclaration d’activité, optant ainsi pour le statut
d’entreprenant) semble ainsi devoir se soumettre cumulativement aux obligations attachées à
son statut de commerçant en l’absence de dérogations prévues en ce sens. Or, un tel cumul
d’obligations risque d’être délicat et d’affaiblir le statut d’entreprenant73.
Cependant, lorsque l’entreprenant perd son statut, il doit se conformer aux obligations
résultant des textes qui régissent les activités qu’il mène en qualité d’entrepreneur
individuel74. Ainsi, s’il s’agit d’une activité artisanale, il doit se conformer aux obligations
qui incombent aux artisans, tel que le recensement à la chambre des métiers.
Toutefois, une analyse des articles 30 in fine et 65 de l’AUDCG permet d’être situé sur
la question.
Ainsi, selon l’article 30 in fine l’entreprenant doit bénéficier d’un régime fiscal et social
plus souple (plus allégé) puisque le législateur OHADA a imposé aux Etats parties de
prévoir dans leur corpus juridique interne, des mesures incitatives pour l’activité de
l’entreprenant notamment en matière fiscale et de charges sociales.
Malheureusement, force est de constater avec regret que ce privilège reste lettre morte
dans la majeure partie des Etats membres de l’OHADA qui n’ont pas encore légiféré sur la
question.
Toutefois, en ce qui concerne ce dernier point, il faut préciser qu’il ne bénéficie pas en
principe du droit au renouvellement du bail et du droit à la fixation judicaire du loyer
renouvelé; lesquels privilèges ne peuvent lui être octroyés que s’ils sont expressément
stipulés dans le contrat de bail75.
73
FIENI (Pacôme), « Droit commercial général dans l'espace OHADA : étude comparative de l'ancien et du
nouvel Acte uniforme », Op. Cit., p.8
74
Article 30 AUDCG de 2010
75
Cf. article 134 alinéa 2 AUDCG
41
Enfin, l’entreprenant ne peut être partie à un contrat de location-gérance76.
En droit commercial français, il existe trois (03) institutions qui sont proches du statut de
l’entreprenant de l’OHADA.
En effet, tandis que l’AUDCG de 1997 définissait les commerçants comme «…ceux
qui accomplissent des actes de commerce et en font leur profession habituelle », l’article 2 de
l’AUDCG de 2010 définit le commerçant comme «… celui qui fait de l’accomplissement
d’acte de commerce par nature sa profession ».
76
Cf. article 138 alinéa 2 AUDCG de 2010.
77
Cf. L.123-1-1 et suivants du Code de commerce français
78
Cf. article L. 526-1 et suivants du Code de commerce français
79
Cf. article L. 526-6 et suivants du Code de commerce français
80
Cf. article L.223- 1 et suivants du Code de commerce français.
42
commerçant. La seconde, c’est la suppression de l’expression « habituelle » dont l’ajout à la
notion de « profession » a été jugé redondant par la doctrine.
De la sorte, on peut remarquer que le droit OHADA innove sur ce point et semble
avoir obtenu une sorte de longueur d’avance par rapport au droit OHADA.
Quoi qu’il en soit, quelles sont les conditions que l’AUDCG a fixé pour acquérir la
qualité de commerçant (section 1) et quel est le régime juridique réservé à cet acteur
incontournable de l’univers commercial (section 2).
« Est commerçant celui qui fait de l’accomplissement d’acte de commerce par nature sa
profession ».
Cette formule laconique, mérite une attention particulière pour laisser apparaître que pour
être commerçant, il faut accomplir certes des actes de commerce par nature, mais il faut le
faire professionnellement et en toute indépendance : telles sont les caractères de
l’accomplissement des actes de commerce par nature qui confèrent la qualité de commerçant
(A).
43
A cela, une autre condition est exigée à la femme mariée qui veut se prévaloir de la
qualité de commerçante (B).
La tautologie valant son pesant d’or, rappelons que l’article 2 de l’AUDCG exige du
commerçant qu’il accomplisse des actes de commerce à titre de profession (1). Cependant, la
jurisprudence précise que cela doit se faire en toute indépendance (2).
Il importe peu que celui qui accomplit professionnellement les actes de commerce par
nature le fasse en personne ou par le biais un prête- nom81, il a la qualité de commerçant.
Par ailleurs, il n’est pas nécessaire que celui qui accomplit les actes de commerce par
nature en fasse son unique activité ; dès lors qu’il le fait professionnellement, cela lui confère
la qualité de commerçant. Ainsi, l’agriculteur qui par ailleurs achète et revend les produits
cosmétiques dans son village, est un commerçant.
Toutefois, l’accomplissement des actes de commerce par nature ne doit pas constituer une
activité accessoire à une activité civile ; le cas échéant, il s’agira d’actes civils par accessoire.
Il faut préciser qu’accomplir des actes de commerce par nature ne suffit pas, il faut les
accomplir en toute indépendance.
Bien que cette condition ne soit pas prévue expressis verbis par l’AUDCG, il est exigé
pour avoir la qualité de commerçant d’accomplir des actes de commerce par nature de
manière indépendante, c’est-à-dire, qu’il doit agir pour son propre compte, à ses risques et
périls, sans être tenus dans un lien de subordination82.
Ce qui implique que toute personne qui accomplit des actes de commerce par nature sous
un lien de subordination juridique ou de dépendance, n’est pas en principe un commerçant. Il
en est ainsi des salariés, des mandataires, des gérants des SARL et administrateurs des S.A.
81
Personne laissant croire qu’elle agit pour elle-même qu’elle n’est qu’un mandataire (un envoyé).
82
Soc. 19 nov. 1959, JCP 1959 1960 .II. 11397
44
Néanmoins, le prête-nom appelé encore homme de paille, est considéré commerçant au
même titre que celui pour qui, il agit puisqu’il dissimule son activité commerciale.
Pour pouvoir se prévaloir de la qualité de commerçante, la femme mariée doit avoir une
activité commerciale séparée de celle de son époux (1).
Une fois cette qualité obtenue, quels sont les pouvoirs dont elle dispose dans la
mobilisation des biens pour l’exercice de son activité commerciale ? (2).
Selon le Professeur AKUETE PEDRO SANTOS84, le mari n’est pas présumé être seul
commerçant mais l’un ou l’autre des époux pourra avoir indistinctement la qualité de
commerçant.
83
Civ. 20 décembre 1943, Aff. Dame veuve Ardin c. / Rivail, ès qual, JCP 1945.II.2796,
84
Code vert OHADA, Traité et Actes uniformes annotés juriscope 2012, commentaire sous l’article 7 de
l’AUDCG.
45
Cette thèse est réfutée par Me BEHIRA et ce en dépit, de la réforme de 2013 de la
loi ivoirienne relative au mariage qui a supprimé la disposition qui faisait de l’homme le chef
de la famille et l’a remplacé par la notion de cogestion du ménage par les deux époux85.
Selon lui, si l’un des époux qui revendique le statut de commerçant, c’est à lui de le
prouver. Lorsque cette preuve aura été établie, l’autre aura le statut de collaborateur ou de
salarié.
Lorsque c’est un tiers qui estime que l’un ou l’autre des époux a la qualité de
commerçant, il doit également en rapporter la preuve, l’époux non visé par cette action pourra
également rapporter la preuve qu’il a conclu un contrat de travail avec son conjoint ; ce qui
fait de lui un salarié.
Pour notre part, il nous semble qu’il faut plus insister sur l’office du juge qui est
déterminant lorsque les époux exercent en commun un commerce. En effet, au moyen de son
pouvoir souverain d’appréciation des circonstances de l’espèce, il pourra déterminer avec
raison lequel des deux époux a la qualité de commerçant.
Par contre, si la femme sert de prête-nom à son époux, ou que ce dernier s’immisce
habituellement dans la gestion de l’activité commerciale de son épouse, les deux conjoints
seront conjointement considérés commerçants et devront assumer solidairement le paiement
des dettes issues de cette activité commerciale. D’ailleurs l’article 85 de la loi relative au
mariage confirme une telle analyse puisqu’il dispose que « les dettes contractées par les
époux, agissant ensemble et de concert, qu’elles aient été dans l’intérêt commun ou dans
l’intérêt de l’un d’eux seulement peuvent être poursuivies sur les biens communs, y compris
les biens réservés de la femme mariée et les biens propres de chacun des époux. »
D’emblée, soulignons que la réforme de 2013 de la loi sur le mariage a donné à l’épouse
le pouvoir, jadis reconnu exclusivement à l’époux, de s’opposer judiciairement à l’exercice
85
BEIRA (Ehi Marc), Droit commercial : Droit commercial général et Droit des sociétés commerciales Op. Cit.
p.85
46
de l’activité commerciale lorsqu’elle estime que cette activité est contraire à l’intérêt de la
famille86.
Lorsque l’épouse exerce une activité commerciale séparée de celle de son époux, elle
dispose de biens réservés qui sont laissés à sa libre administration, jouissance et disposition.
Mais la question la plus cruciale demeure celle de savoir les biens qu’elle a la possibilité
d’engager pour répondre des dettes générées par son activité commerciale.
Sur ce point, il faut distinguer selon qu’elle est sous le régime de séparation ou de la
communauté de biens réduite aux acquêts.
Si l’épouse est assujettie à un régime de séparation de biens, elle n’engage que ses biens
propres dans l’exercice de sa profession.
Si elle est soumise à la communauté de biens, il faut encore distinguer selon que l’époux
a fait une opposition que le juge a estimé fondée ou non.
Lorsque l’époux a fait une opposition fondée, l’épouse n’engage que ses biens réservés et
ses biens propres.
Lorsque par contre, le juge estime cette opposition non fondée ou même en l’absence
d’opposition formulée par l’époux, tous les biens du ménage (commun- propres et réservés)
peuvent être appelés à contribution. Sur ce point, il faut préciser qu’il n’y a plus, comme par
le passé, d’ordre à respecter dans l’appel à contribution des biens en raison de la disparition
de la prépondérance de l’époux et de l’établissement d’une cogestion des intérêts du
ménage87.
Précisons enfin que cette analyse relative aux biens à engager dans l’exercice de l’activité
commerciale peut être également menée lorsque c’est l’époux qui exerce l’activité
commerciale.
86
Cf. article 67 nouveau de la loi n° 2013-33 du 25 janvier 2013 portant abrogation de l’article 53 et modifiant
les articles 58, 59, 60 et 67 de la loi n° 64-375 du 7 octobre 1964 relative au mariage telle que modifiée par la
loi n° 83-800 du 2 août 1983
Cf. article 58 - nouveau de la loi n° 2013-33 du 25 janvier 2013 portant abrogation de l’article 53 et
87
modifiant les articles 58, 59, 60 et 67 de la loi n° 64-375 du 7 octobre 1964 relative au mariage telle que
modifiée par la loi n° 83-800 du 2 août 1983
47
NB : Savoir Plus (éléments de droit comparé) :
En doit français, lorsque la femme mariée exerce conjointement une activité commerciale
avec son époux, il lui est attribué soit un statut identique à celui de son conjoint (en la
considérant comme une co-exploitante88 ou un co-associé89) soit un statut de collaboratrice
(salarié ou conjoint collaborateur).
L’article 6 de l’AUDCG de 2010 dispose que « Nul ne peut accomplir des actes de
commerce à titre de profession, s'il n'est juridiquement capable d'exercer le commerce ».
Il est par ailleurs important de procéder à une distinction entre le statut de commerçant et
celui d’artisan (C).
Le mineur non émancipé ne peut en aucun cas accomplir des actes de commerce ; il ne
peut donc avoir la qualité de commerçant. De même ses représentants légaux ne peuvent le
faire en son nom ; le cas échéant les actes accomplis par lui-même ou par ses représentants
légaux sont entachés d’une nullité relative.
C’est ce que rappelle à souhait l’article 7 alinéa 1 du nouvel AUDCG quand il dispose
que « Le mineur, sauf s'il est émancipé, ne peut avoir la qualité de commerçant ni effectuer
des actes de commerce ».
Dès lors, du fait qu’il ne peut avoir la qualité de commerçant, le mineur non émancipé ne
peut être associé d’une société où les associés doivent avoir la qualité de commerçant telle
qu’une SNC.
Par ailleurs, il ne peut exploiter lui –même un fonds de commerce qu’il a reçu en
succession ; il ne pourra que le céder ou le mettre en location –gérance.
48
commerce et donc devenir commerçant. Mais, il faut nuancer cette analyse dans la mesure
où la seule émancipation ne confère pas la capacité commerciale.
Ainsi, en droit ivoirien dès le moment où « les lois concernant l’état et la capacité
régissent les ivoiriens, même résidant en pays étranger90 », il faut se référer aux articles 113
et 114 de la loi n°70-483 du 3 Août 1970 sur la minorité pour déterminer les conditions que
le mineur doit respecter pour avoir la capacité commerciale.
L’article 113 dispose que « l’émancipation est l’acte par lequel un mineur est affranchi
de la puissance paternelle ou de la tutelle et devient capable comme un majeur, d’accomplir
tous les actes de la vie civile, et de faire le commerce sous réserves ci-après ».
Ces réserves sont précisées par l’article 114 qui indique que pour être capable de faire le
commerce, le mineur doit avoir dix-huit (18) ans révolus et être autorisés spécialement par
celui entre ses père et mère qui exerce la puissance paternelle ou par le conseil de famille ;
laquelle autorisation doit être inscrite au RCCM.
- 18 ans révolus ;
- Et une autorisation spéciale pour faire le commerce inscrite au RCCM.
Par ailleurs, en droit commercial français, le mineur a la possibilité sous réserve d’une
autorisation de ses père et mère ou du conseil de famille de créer et de gérer une EURL
(entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée) ou de devenir un EIRL (entrepreneur
individuel à responsabilité limitée)91.
49
B) Le cas des majeurs incapables
Les mineurs sont des personnes qui sont dans un état habituel d’imbécilité, de démence
ou de fureur pour lesquels l’interdiction est prononcée par le tribunal.
En droit commercial, ils sont assimilés à des mineurs non émancipés. Ils ne peuvent donc
accomplir des actes de commerce ni en personne ni par le truchement de leurs représentants
légaux ; le cas échéant, ces actes sont entachés d’une nullité relative.
En doit français, la survenance d’une incapacité juridique dans la personne d’un dirigeant
de société n’empêche pas que celui-ci puisse faire l’objet d’une action en comblement du
passif92.
En effet, l’artisan mène une activité qui est essentiellement manuelle (qui s’effectue à la
main). Il peut arriver que l’artisan ait des employés mais il ne peut embaucher au-delà d’une
certaine limite (10 salariés au maximum)93 ; le cas échéant, il pourrait être considéré comme
un commerçant qui spécule (recherche le profit pécuniaire) sur le travail d’un grand nombre
d’employés.
Par ailleurs, l’artisan peut utiliser des machines dans l’exercice de sa profession mais ceux-ci
ne doivent pas avoir une certaine importance (grand nombre de machines par exemple). Il ne
peut spéculer sur des stocks trop importants ni sur la vente de produits qu’il ne fabrique pas
lui-même.
92
BLARY-CLEMENT (Edith), Droit commercial : Théorie générale, Université Numérique Francophone
93
Cf. article 6 du Décret n° 2001-426 du 18 juillet 2001 portant attribution, organisation, fonctionnement et
régime électoral de ka chambre des métiers inspirée la jurisprudence française, Com. 12 mai 1969,
Aff.U.R.S.S.A.F de Lyon c/ Astruc, Bull. Civ 1969, IV, n°159, p.154
50
Le commerçant doit également afficher une bonne moralité.
La bonne moralité exigée du commerçant renvoie au fait qu’il ne doit pas soit se trouver
dans une situation d’incompatibilité (A) avec la profession commerciale soit être déchu ou
interdit de l’exercice de l’activité commerciale (B).
A) Les incompatibilités
94
Cf. article 8 AUDCG de 2010.
95
Etablissement Public Administratif
96
Etablissement Public Industriel et Commercial
97
Société d’Etat
98
Société à Participation Financière Publique
51
Elle acquiert la qualité de commerçant et assume toutes les obligations liées à cette
profession99 ; mais il ne peut en aucun cas invoquer son incompatibilité pour échapper à ces
obligations.
Dès lors, les actes qu’il accomplit dans un tel contexte restent valables à l’égard des tiers
de bonne foi (qui ignoraient sa situation d’incompatibilité) qui peuvent s’en prévaloir.
Cependant, l’individu fautif (en situation d’incompatibilité) ne pourra se prévaloir de son
incompatibilité pour échapper à ses obligations.
Par ailleurs, une personne en situation d’incompatibilité qui accomplit des actes de
commerce, s’expose à des sanctions disciplinaires telles que le blâme, la révocation, la
destitution ou la radiation.
L’interdiction (d’exercer le commerce) est une sanction prononcée par un tribunal ou une
juridiction professionnelle de façon temporaire ou définitive à titre de peine principale ou
complémentaire.
Précisons que l’interdiction peut être levée par voie judicaire mais la requête n’est
recevable qu’après l’expiration d’un délai de cinq (5) ans à compter du jour où la décision
prononçant l’interdiction est devenue définitive102.
99
idem
100
Cass. Com 30 janvier 1996, JCP éd. Entreprise, p.392
101
Cf. article 10 et 11 AUDCG 2010
52
Quid lorsque l’interdit, avant la levée de l’interdiction, ou le déchu accomplit des actes
de commerce ?
Dans ce cas, il est considéré comme un commerçant et devra assumer toutes les
obligations liées à cette qualité et ses actes sont inopposables aux tiers de bonne foi alors
qu’ils lui sont opposables103.
102
Cf. article 11 AUDCG de 2010
103
Cf. article 12 AUDCG de 2010
104
Cf. article 35, 1) AUDCG de 2010
105
Cf. article 34 AUDCG de 2010
53
Concrètement les commerçants personnes physiques ou morales, procèdent à leur
immatriculation en fournissant auprès de l’autorité compétente (le greffe en charge de la
tenue du RCCM) une série d’informations106 nécessaires à l’exercice de leur activité dans le
premier mois d’exploitation de leur commerce (pour les personnes physiques) ou de leur
constitution (pour les personnes morales).
Cette obligation est valable également pour les commerçants personnes morales à qui
l’immatriculation permet d’accéder à la scène juridique en leur conférant la personnalité
morale112.
Que se passe –t-il lorsque des faits ou actes qui auraient dû être mentionnés au RCCM ne
l’ont pas été ?
106
Cf. articles 44 à 45 (pour les personnes physiques) et 46 à 48 AUDCG de 2010
107
Cf. article 53 et suiv AUDCG de 2010
108
Idem
109
Cf. article 49 AUDCG de 2010
110
Cf. article 59 AUDCG de 2010
111
Idem
112
Cf. article 98 AUSCOM de 2014
54
Suivant une interprétation a contrario de l’article 61 de l’AUDCG, qui fait de cette
immatriculation une condition d’opposabilité de ces actes ou faits aux tiers, il convient de
retenir que ces faits et actes non immatriculés ne seront pas opposables aux tiers à condition
que ceux-ci soient de bonne foi ; c’est-à-dire qu’ils ignoraient que ces faits ou actes devait
être immatriculés au moment où ils traitaient avec l’individu qui devait procéder à cette
immatriculation,
Par contre ces tiers ou les administrations (fiscale notamment) ont la possibilité de se
prévaloir de ces actes ou faits non immatriculés, dans leurs rapports avec les commerçants.
Ainsi, il ne pourra pas faire usage de ses livres de commerce comme moyen de preuve au
cours d’un procès ; il ne pourra donner son fonds de commerce en location-gérance, etc.
Cependant, il devra assumer toutes les obligations liées à la qualité de commerçant telle
que la tenue de livres de commerce et d’états financiers de synthèse.
Par ailleurs, pour n’avoir pas procédé à l’immatriculation, le commerçant s’expose à des
sanctions pénales définies par la loi de chaque Etat partie.
En l’absence d’une loi spéciale adoptée par la Côte d’ivoire pour réprimer le fait de ne
pas se faire immatriculer, les sanctions pénales prévues par le décret du 15 septembre 1928
portant règlement d’administration publique pour la détermination des conditions
d’application de la loi du 18 mars 1919 instituant le registre du commerce.
Ainsi, le commerçant non immatriculé devra payer une amende qui oscille entre 6.000 et
72.000 francs CFA. Cette sanction est prononcée par le tribunal sur réquisition du magistrat
chargé de la surveillance du registre. Le cas échéant, le tribunal peut ordonner que
l’immatriculation soit effectuée dans un délai de quinze (15) jours. A l’expiration de ce délai,
si l’immatriculation n’est pas faite, une nouvelle amende sera prononcée. Dans l’hypothèse
où cette mesure vise une succursale ou une agence d’une société étrangère, celle-ci sera
fermée jusqu’à l’accomplissement de cette formalité omise.
Lorsque les mentions inexactes sont communiquées de mauvaise foi (en toute
connaissance de cause) par le commerçant, il s’expose à une amende de 36.000 à 72.000
francs CFA et / ou à une peine d’emprisonnement d’un (1) à six (6) mois.
Enfin, lorsqu’il n’est pas immatriculé le commerçant peut être privé de son droit de vote
ou d’éligibilité pour les chambres de commerce.
55
Quid des obligations commerciales ?
Au titre des obligations comptables, il faut préciser que le commerçant doit tenir des
livres de commerce (a) et des états financiers de synthèse (b).
sont facultatifs (le livre caisse116, le livre des effets117, le livre brouillard118, etc.).
Aussi, ils doivent être tenus chronologiquement sans blancs ni altération d’aucune
sorte . Ils ne doivent pas être raturés, surchargés. En cas d’erreur, une technique comptable
120
permet de rectifier le tir en inscrivant en négatif les éléments erronés : c’est la technique de
113
Document comptable qui enregistre jour par jour les opérations de l’entreprise
114
Document comptable qui récapitule par année les éléments de l’actif et du passif
115
Document comptable qui enregistre l’ensemble des comptes de l’entreprise
116
Document comptable qui enregistre tous les paiements effectués ou reçus
117
Document comptable qui enregistre les effets de commerce à payer ou à recevoir avec leur échéance
118
Document comptable qui enregistre toutes les opérations qui seront soigneusement reportées dans le grand
livre
119
Cf. article 14 AUDCG de 2010.
120
Cf. article 20 AUOHCE
56
la comptabilisation en négatif121 qu’il faut distinguer de la technique de la contre-
passation122 d’écriture.
Les livres de commerce doivent être classés et conservés pendant au moins dix (10)
123
ans .
Il faut préciser que le nouvel AUDCG a supprimé la règle qui voulait que les livres de
commerce soient cotés et paraphés par le Président de la juridiction compétente ou le juge
délégués à cet effet.
Plusieurs intérêts s’attachent à la tenue régulière des livres de commerce. En effet, les
livres de commerce permettent au commerçant de connaitre l’état de sa caisse et de se
souvenir des opérations réalisées.
Les mentions figurant dans les livres de commerce peuvent servir de preuve au profit
ou contre le commerçant qui doit les tenir, d’où l’intérêt de tenir ces livres régulièrement.
Enfin, précisons qu’en raison du secret des affaires, les livres de commerce ne sont
représentés en justice que suivant le principe de la spécialité ; c’est-à-dire que le commerçant
ne présente au juge que la partie des livres qui intéresse le litige.
Cf. commentaire sous l’article 20 AUOHCE in Code vert OHADA, Traité et Actes uniformes commentés et
121
57
Les états financiers de synthèse sont des documents comptables récapitulatifs d’un
exercice (d’une année d’exploitation). Le commerçant doit les tenir tous les ans 125; ces états
comprennent le bilan, le compte de résultat, le tableau financier des ressources et des emplois
et l’état annexé.
Ces états financiers constituent un tout indissociable (le commerçant doit tous les établir
chaque année) et décrivent de façon régulière et sincère les évènements, opérations et
situations de l’exercice pour donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière
et du résultat de l’entreprise.
- Créer une confusion avec l’entreprise d’autrui ou avec ses activités (notamment en
usurpant le nom commercial ou la dénomination sociale) ;
- Porter atteinte à l’image ou à la réputation d’autrui ;
- dénigrer l’entreprise d’autrui ou ses activités ;
- user de tromperie à l’égard du public ;
- désorganiser le fonctionnement interne de l’entreprise concurrente et du marché ;
- divulguer des informations confidentielles.
De même, est sanctionné au même titre que la concurrence déloyale, le parasitisme qui est
une pratique malfaisante par laquelle un commerçant, tel un parasite, profite de la réputation
ou du savoir -faire d’un autre commerçant sans son autorisation, pour écouler sa production.
125
Article 15 AUDCG de 2010
58
Les protections conventionnelles contre les pratiques de concurrence déloyale ou de
parasitisme consiste à insérer des clauses dans les contrats qui les lient. Il s’agit entre autre de
la clause de non concurrence, la clause de non rétablissement, ou les conventions
d’exclusivité.
La clause de non concurrence est une clause que l’on retrouve dans le contrat de travail.
Lorsqu’elle y est insérée, elle impose à un salarié dont le contrat est en cours d’exécution ou
est arrivé à terme, de ne pas offrir ses services à une entreprise concurrente ou de ne pas
ouvrir une entreprise menant la même activité que celle dans laquelle, il était embauché.
Pour être valable, elle doit être limitée dans le temps et/ ou dans l’espace ou encore dans
la nature précise de l’activité. Faut-il préciser qu’en Côte d’Ivoire, en vertu de l’article 15.5
de la loi n°95-15 du 12 janvier 1995 portant code du travail, la clause de non concurrence ne
peut produire d’effet à l’expiration du contrat de travail.
De ce qui précède, il s’infère que la convention d’exclusivité est une convention qui
permet à des parties de s’entendre pour réserver l’exclusivité de la fourniture d’un produit à
l’une d’entre elles. Dans l’industrie de la brasserie, elles sont connues sous la désignation de
« contrat de bière » (le débitant de boisson s’engageant à s’approvisionner exclusivement
chez un brasseur spécifique).
En général, ces conventions ne sont ne sont valables que si elles sont limitées dans le
temps ou dans l’espace. Toutefois, pour que la convention d’exclusivité permette à un
fabricant de réserver à un client l’exclusivité de sa production et de refuser de vendre aux
autres commerçants, en plus de la limitation dans le temps et dans l’espace, deux autres
conditions cumulatives doivent être observées :
59
- le concessionnaire doit s’engager à ne pas commercialiser des produits concurrents à
ceux pour lesquels la concession a été accordée.
1) l’organisation du RCCM
Le premier niveau est constitué par les registres locaux tenus auprès des greffes des
juridictions d’instance de chaque Etat parties.
Le deuxième niveau est composé par le Fichier national127 de chaque Etat partie qui
centralise les informations contenus dans les différents registres locaux de son territoire.
Comment fonctionne-t-il ?
2) le fonctionnement du RCCM
Le RCCM a pour finalité d’une part de recueillir les demandes d’immatriculation des
commerçants et les déclarations d’activités des entreprenants, ainsi que toutes les pièces et
inscriptions modificatives ou radiations y afférentes129.
126
Cf. article 36 AUDCG de 2010.
127
Cf. article 73 et suiv AUDCG de 2010
128
Cf. article 76 et suiv AUDCG de 2010
129
Cf. article 34 AUDCG de 2010.
60
D’autre part, le RCCM reçoit les inscriptions des sûretés mobilières ainsi que les
modifications ou radiation qui s’y rapportent130.
Il est tenu par le greffier sous le contrôle du Président du tribunal ou d’un juge de
section ou d’un juge délégué à cet effet131.
Il faut souligner que la tenue du RCCM a connu une innovation majeure avec la
réforme de l’AUDCG en 2010, puisque désormais le RCCM peut être tenu grâce aux
technologies de l’information et de la communication (TIC) : c’est le principe de
l’informatisation du RCCM.
Il n’accueille pas les inscriptions des sûretés. Par ailleurs, il est composé que de deux
compartiments à savoir le registre local et le fichier national.
Pour l’essentiel, il faut retenir qu’un commerçant peut se prévaloir de cette qualité
lorsqu’il est immatriculé au RCCM et par ricochet bénéficie de tous les avantages liés à cette
qualité.
130
Cf. article 35 AUDCG de 2010
131
Cf. article 36 AUDCG de 2010
61
Le commerçant profite également des dispositions relatives au bail à usage
professionnel et plus particulièrement du droit du renouvellement de son bail.
132
Cf. article L.122-1 du Code de commerce français.
133
Cf. article L.123-24 du Code de commerce français.
134
Cf. article .441-3 du Code de commerce français
62
faire la part belle aux intermédiaires de commerce qui s’entremettent dans la circulation des
richesses.
En effet, l’on assiste à une floraison des intermédiaires de commerce qui permettent
ainsi moyennant rémunération, dans le cadre d’une vente en ligne par exemple, d’acheminer
le produit commandé des entrepôts du fournisseur au domicile du client.
Dès lors il convient de mieux cerner le régime juridique consacré par l’AUDCG à ces
intermédiaires de commerce.
Selon l’article 216 de l’AUDCG de 2010 ,l’agent commercial est un mandataire qui a
titre de profession indépendante et sans être lié par un contrat de travail dispose du pouvoir
permanent de négocier et éventuellement de conclure des contrats ( de vente, d’achat, de
location ou de prestation de service) au nom et pour le compte du producteur industriel, du
commerçant ou d’autre agents commerciaux.
Il n’a pas besoin par exemple de requérir une autorisation préalable de son mandant
pour se faire remplacer par un autre agent qu’il rémunère.
135
Cf. articles 169 à 191 AUDCG
136
Le Voyageur Représentant et Placier (VRP) du droit français, en l’occurrence.
63
L’agent commercial est tenu des obligations suivantes :
- d’un autre côté, le mandant doit mettre l’agent commercial en mesure d’exécuter son
mandat.
- l’agent commercial a droit à une commission dont le montant es déterminé soit par
stipulation contractuelle soit en fonction des usages pratiqués dans le secteur
d’activité concerné140. L’agent commercial a droit à sa commission dès que
l’opération est exécutée ou est censée avoir été exécutée par le mandant ou le tiers. A
contrario, si le contrat ne peut être exécuté du fait du mandant, l’agent commercial
perd son droit à la commission ;
137
Cf. article 217 alinéa 2 AUDCG de 2010
138
Cf. article 219 AUDCG de 2010
139
Cf. article 218 AUDCG de 2010
140
Cf. article 220 et suiv. AUDCG de 2010
64
- En principe, l’agent commercial ne perçoit pas un remboursement des dépenses qu’il
effectue. Exceptionnellement, il en perçoit lorsqu’il effectue ces dépenses en
exécutant des instructions spéciales du mandant141.
Quid du courtier ?
Section II : Le courtier
Il n’agit ni en son nom propre ni pour son propre compte. Autrement dit, il
n’intervient pas personnellement à la conclusion du contrat. Son rôle se limite à rapprocher
les parties souhaitant contracter tout en restant indépendant144.
- faire tout ce qui est en possible pour la conclusion d’un contrat en se conformant aux
instructions reçues et en rendant compte de sa mission145 ;
- donner aux parties tous les renseignements utiles leur permettant de traiter en toute
connaissance de cause146 ;
- doit répondre de toute faute préjudiciable à son client résultant de fausses
informations qu’il lui a fourni147 ;
141
Cf. article 227 AUDCG de 2010
142
Cf. article 229 et suiv AUDCG de 2010
143
Cf. article 208 AUDCG de 2010
144
Cf. article 209 AUDCG de 2010
145
Cf. article 210 AUDCG de 2010
146
Idem
147
Idem
65
- être indépendant vis-à-vis des parties à la transaction et ne doit y intervenir
personnellement sauf accord entre les parties148.
- En principe, cette rémunération est due dès la conclusion du contrat. Toutefois, elle
peut être reportée à la réalisation du contrat s’il a été passé sous condition
suspensive150.
- Il est possible que le courtier puisse percevoir un remboursement des dépenses qu’il
engage dans l’exercice de sa mission151. Dans ce cas, seule la personne qui l’a instruit
lui doit ce remboursement, et ce, même si le contrat définitif n’est pas conclu par ce
dernier. Toutefois, le courtier peut perdre son droit à la rémunération et à un éventuel
remboursement, soit en cas de déloyauté en agissant dans l’intérêt de l’autre partie
contractante au détriment des intérêts de celui qui l’a instruit ; soit en cas
d’inexécution de ces obligations152.
148
Cf. article 211 AUDCG de 2010
149
Cf. article 212 alinéa 1 AUDCG de 2010
150
Cf. article 213 AUDCG de 2010
151
Idem
152
Cf. article 215 AUDCG de 2010
153
Cf. article 192 AUDCG de 2010
66
Quelles sont les obligations (paragraphe 1) et les privilèges (paragraphe 2) auxquels le
commissionnaire est assujetti ?
Le domaine du droit commercial étant connu, il convient de voir les instruments dont
disposent les acteurs de l’univers commercial et surtout les opérations auquel ils se livrent et
qui constituent le rythme cardiaque de ce droit spécial qui revendique sa singularité par
rapport au droit commun.
154
Cf. article 194 AUDCG de 2010
155
Cf. article 195 AUDCG de 2010
156
Cf. article 193 AUDCG de 2010
157
Cf. article 196 AUDCG de 2010
158
Cf. article 197 AUDCG de 2010
159
Cf. article 198 AUDCG de 2010
67
NB : Savoir Plus (éléments de droit comparé) :
160
Com 26 février 2008, contrats, con. Consom. 2008 n°4, 95, note N Mathey., in BLARY-CLEMENT (Edith),
Droit commercial : Théorie générale, Université Numérique Francophone.
161
BLARY-CLEMENT (Edith), Droit commercial : Théorie générale, Université Numérique Francophone
68
DEUXIEME PARTIE : LES MOYENS ET LES OPERATIONS DU
Selon l’AUDCG de 2010, les moyens qu’offre le droit commercial aux professionnels de ce
domaine pour mener leurs activités reposent essentiellement sur deux institutions.
L’une de ces institutions, lui permet d’attirer et de conserver une clientèle le plus
durablement possible : c’est le fonds de commerce ; dans l’hypothèse où le commerçant ne
possède pas de local, l’autre institution favorise l’exploitation de son fonds de commerce
dans un endroit fixe qui lui sert de repère et qui permet à sa clientèle de le retrouver avec plus
d’aisance : il s’agit du bail à usage professionnel (Chapitre 1).
Ces deux instituions peuvent faire l’objet de plusieurs opérations juridiques sur lesquelles
nous nous pencherons.
Par ailleurs, une autre opération juridique semble être présentée par l’AUDCG comme
l’archétype des contrats commerciaux, en raison de sa fréquence dans l’espace OHADA :
c’est la vente commerciale (Chapitre 2)
69
CHAPITRE I : LE FONDS DE COMMERCE ET LE BAIL A USAGE
PROFESSIONNEL
Pour éviter un tel amalgame, il convient d’étudier distinctement ces deux institutions
en s’inclinant en premier lieu sur le fonds de commerce (Section 1) puis sur le bail à usage
professionnel (section 2) en second lieu.
Dans le langage courant, le fonds de commerce comme une somme d’argent qui sert à
mener une activité commerciale. On entend souvent parler de « fonds de roulement » ou
encore quand un commerçant connait des difficultés financières, il n’hésite pas à dire « mon
fonds de commerce est tombé ».
70
Paragraphe 1 : La nature juridique du fonds de commerce
Le fonds de commerce comporte d’une part des éléments principaux (A) et des
éléments secondaires (B).
Les principaux éléments du fonds de commerce sont évoqués dans l’article 136 de
l’AUDCG de 2010. Ils renvoient à la clientèle (1), à laquelle la doctrine adjoint
l’achalandage, au nom commercial et à l’enseigne (2).
1) La clientèle et l’achalandage
Quant à l’achalandage, elle est composée des chalands c’est-à-dire personnes qui
s’approvisionnent de manière occasionnelle auprès d’un commerçant parce que son fonds de
commerce bénéficie d’une situation géographique favorable au moment où le besoin du
chaland survient. Pour ainsi dire, les chalands peuvent être considérés comme des « clients
occasionnels ».
71
Le nom commercial est l’appellation sous laquelle le commerçant exerce son activité
commerciale. Il peut être constitué par un nom patronymique, un prénom, un surnom ou une
dénomination fantaisiste.
Précisons que lorsque le nom patronymique est utilisé comme nom commercial, il
acquiert une valeur patrimoniale et peut donc être cédé.
Ils sont composés par tant par des éléments corporels (1) qu’incorporels (2) tel que le
prévoit l’article 137 de l’AUDCG de 2010.
Ces éléments sont constitués par les meubles servant à l’exploitation (a) et par les
marchandises en stock (b).
72
Ils se distinguent du matériel qui lui constitue un élément plus stable du fonds de
commerce.
Mais leur distinction n’est pas souvent chose aisée, lorsque le commerçant utilise pour
l’exploitation de son fonds de commerce, des objets semblables à ceux qu’il met en vente. Le
critère de distinction est constitué dans ce cas par la destination des objets et non par leur
nature. Par exemple, un micro-ordinateur peut être une marchandise ou un matériel selon
qu’il est destiné à la vente ou à l’usage professionnel du commerçant.
Il renvoie au droit au bail (a), aux licences d’exploitation (b) et aux droits de propriété
intellectuelle (c).
Sans doute un tel choix opéré par le législateur OHADA s’explique par le fait que le
commerçant peut être propriétaire des locaux dans lesquels, est exploité le fonds de
commerce.
Quoi qu’il en soit, il n’en demeure pas moins un élément assez important pour le
commerçant puisqu’il constitue un moyen essentiel de ralliement de la clientèle.
Ce sont des titres qui confère l’habilitation à leur détenteur pour l’exercice de
nombreuses activités notamment commerciales tels que les débits de boissons, le transport, la
pharmacie, etc.
Faut-il préciser que ces licences d’exploitation ne doivent pas avoir un caractère
personnel (elles doivent avoir été acquise à titre onéreux ou gratuit) ; le cas échéant, elles ne
font pas partie du fonds de commerce parce qu’elles ne peuvent être cédées.
Ce sont des droits incorporels portant sur des créations de l’intelligence, qui confèrent
à leur titulaire un monopole d’exploitation ou d’utilisation protégé légalement.
73
- brevets d’invention,
- marques de fabrique et de commerce ;
- dessins et modèles ;
- tout autre droit de propriété intellectuelle nécessaire à l’exploitation du fonds de
commerce.
Selon la distinction effectuée par l’AUDCG, il semble que ce sont les éléments principaux
qui sont les plus importants.
Mais selon la jurisprudence, c’est la clientèle qui représente l’élément le plus important du
fonds de commerce162.
Cette position jurisprudentielle mérite approbation car en dépit des controverses doctrinales,
il est irréfutable comme le souligne un auteur qu’ « on peut concevoir un fonds de commerce
sans droit au bail, sans enseigne, sans licence, mais on ne peut imaginer un fonds de
commerce sans clientèle ou achalandage 163».
Quelles sont les opérations qui peuvent être menées sur le fonds de commerce ?
Les opérations juridiques pouvant s’exercer le fonds de commerce sont décrites par
les articles 138 et suivants du nouvel AUDCG.
Elles peuvent être regroupées en deux catégories. La première catégorie renferme les
opérations qui n’emportent pas transfert de propriété (Paragraphe 1) ; la seconde, comporte
celle qui emporte transfert de propriété (Paragraphe 2).
Deux opérations juridiques peuvent être effectuées sur le fonds de commerce sans en
entrainer transfert de propriété : la location-gérance (I) et le nantissement du fonds de
commerce (II).
162
Com. 29 mai 1959, JCP 195. II. 7720 ; Req. 15 février 1937, S. 1937.1. 169 ; Cass. Com 31 mai 1988, Bull
IV, n° 180
163
BEIRA (Ehi Marc), Droit commercial : Droit commercial général et Droit des sociétés commerciales, Op.
Cit. p.154
74
Selon l’article 138 alinéa 2 du nouvel AUDCG « La location-gérance est une convention
par laquelle le propriétaire du fonds de commerce, personne physique ou morale, en concède
la location, en qualité de bailleur, à une personne physique ou morale, locataire-gérant, qui
l’exploite à ses risques et périls ».
De l’analyse de cette disposition, il apparaît que la location –gérance est un contrat par
lequel le propriétaire d’un fonds de commerce moyennant rémunération le met en location
entre les mains d’une personne qui l’exploite en toute indépendance, à ses risque et périls.
Elle est à distinguer de la gérance salariée qui permet au propriétaire d’un fonds de
commerce de confier l’exploitation de celui-ci à un salarié qui est tenu envers lui par un lien
de subordination juridique prenant assise dans un contrat de travail.
Cela dit, quelles sont les conditions de validité (A) et les effets (B) que produit un
contrat de location- gérance ?
Des conditions de fond de validité du contrat doivent être observées par le bailleur (a)
et par le locataire- gérant (b).
- Le bailleur ne doit pas avoir été interdit ou déchu de l’exercice d’une profession
commerciale164 ;
- Il doit avoir exploité pendant deux (02) ans au moins en qualité de commerçant le
fonds mis en location-gérance165. Exceptionnellement, ce délai peut être ramené à un
(01) an par le tribunal lorsque le requérant justifie qu’il était dans l’impossibilité
d’exploiter son fonds personnellement ou par l’intermédiaire de ses préposés166.
164
Cf. article 141 in fine AUDCG de 2010
165
Cf. article 141 alinéa 1 AUDCG de 2010
166
Cf. article 142 AUDCG de 2010
75
Par ailleurs, certaines personnes sont affranchies du respect de ces conditions,
lorsqu’elles veulent mettre leur fonds en location-gérance. Il en est ainsi de :
- L’Etat ;
- Les collectivités locales ;
- Les incapables, pour les fonds de commerce qu’ils possédaient avant la survenance de
leur incapacité ;
- Les héritiers ou légataires d’un commerçant décédé qui précédemment exploitait un
fonds de commerce ;
- Les mandataires de justice chargés de l’administration d’un fonds de commerce
dûment autorisés par la juridiction compétente et ayant satisfait aux mesures de
publicité prescrites167.
Le contrat de location-gérance doit être publié par la partie la plus diligente aux frais du
locataire-gérant, dans les quinze jours de sa signature sous forme d’extrait dans un journal
d’annonces légales (JAL) paraissant dans le lieu où le fonds de commerce est inscrit au
RCCM171.
167
Cf. article 143 AUDCG de 2010
168
Cf. article 139 AUDCG de 2010
169
Idem
170
Idem
171
Idem
172
Idem
76
B) Les effets de la location-gérance du fonds
Une fois conclu, le contrat de location-gérance produit des effets tant à l’égard des parties
contractantes (1) que des tiers (2).
173
Idem
Cette obligation découle de l’indépendance dont bénéficie le locataire –gérant qui doit exploiter le fonds de
174
commerce mis en location-gérance sans être gêné, cf. article 138 alinéa 3 AUDCG.
175
Cf. article 145 AUDCG de 2010
176
Cf. article 139 AUDCG de 2010
177
Cf. article 140 AUDCG de 2010
77
de commerce. Ces deux éléments de loyer doivent obligatoirement être déterminés de
façon séparée dans le contrat de location-gérance même si leurs échéances sont fixées
aux mêmes dates178 ;
- Il doit exploiter le fonds de commerce avec diligence et il ne doit pas en modifier la
destination ou en étendre l’objet ;
- Le locataire-gérant ne peut céder ses droits ni sous-louer le fonds sans l’autorisation
du bailleur179 ;
- Il doit restituer le fonds en fin de location.
Trois (03) mois après la publication de la location-gérance au JAL, tout intéressé peut
saisir la juridiction compétente pour qu’elle déclare les dettes du bailleur nées de
l’exploitation du fonds de commerce avant la location-gérance, immédiatement exigibles s’il
estime que cette location-gérance met en péril leur recouvrement180. A l’expiration de ce
délai, toute action menée dans ce sens est irrecevable pour cause de forclusion181.
A l’égard du bailleur des locaux dans lesquels le fonds est exploité, la mise en location-
gérance du fonds constitue-t-elle une sous-location ?
Au regard du vide juridique qui existe sur la question dans l’AUDCG, la doctrine suggère
de mentionner le sort qui est réservé à la location –gérance en cas de cession du fonds.
178
Cf. article 138 AUDCG de 2010
179
Com.8 février 1949, Aff. Semondi c/ Rolland, JCP.1949.II.4947, note COHEN.
180
Cf. article 144 AUDCG de 2010
181
Idem
182
Article 146 AUDCG 2010
78
Ainsi, les parties peuvent convenir de la subsistance du contrat de location –gérance en
mentionnant son existence dans l’acte de cession du fonds et en le faisant agréer par le gérant.
Que recouvre la deuxième opération juridique qui n’entraîne pas le transfert de propriété
du fonds de commerce ?
L’article 2071 du Code civil français définit le nantissement comme « un contrat par
lequel un débiteur remet une chose à son créancier ».
Cependant, cette définition ne correspond pas à la conception que cette sûreté a en droit
OHADA. En effet, dans ce droit, le nantissement désigne en principe un contrat par lequel le
titulaire du fonds de commerce l'affecte à ses créanciers en garantie de leurs créances183 tout
en restant en possession du fonds afin de l’exploiter et de désintéresser ces derniers.
Ainsi, contrairement au schéma du Code civil, qui prévoit la remise de la chose par le
débiteur au créancier, le nantissement du fonds de commerce en droit OHADA n’entraine pas
la dépossession du débiteur. On pourrait le considérer comme un « gage sans
dépossession 184».
Par ailleurs, pendant que le Code civil français considère uniquement le nantissement
comme une convention, le droit OHADA prévoit également la constitution d’un nantissement
judiciaire, c’est-à-dire imposé par le juge au regard de certaines circonstances.
Cela dit, il faut analyser les articles 163 et suivants de l’AUS de 2010 pour s’imprégner
du régime juridique de nantissement conventionnel (A) ou judiciaire (B) du fonds de
commerce.
Contrat par lequel le titulaire du fonds de commerce l'affecte à ses créanciers en garantie
de leurs créances, le nantissement doit obéir à des conditions pour pouvoir être valablement
formé (1). Une fois formé, il produit des effets juridiques (2).
183
BITSAMANA (H.), Dictionnaire de droit OHADA, Brazzaville, éditions IPC, p.141.
184
Il faut relativiser cette expression car depuis la réforme de l’AUS en 2010, le gage porte désormais que sur
des biens meubles corporels alors que le nantissement lui jette son dévolu sur les biens meubles incorporels.
Cf. article 92 et suiv AUS 2010.
79
Par ailleurs, il n’est pas superfétatoire de souligner qu’en tant qu’opération juridique, le
nantissement conventionnel peut apparaître comme un moyen de financement que peut
utiliser le propriétaire d’un fonds de commerce pour agrandir son exploitation ou pour juguler
certaines difficultés de trésorerie.
Tant du point de vue du fond (1) que de la forme (2), le nantissement conventionnel
doit obéir à des conditions de validité.
Pour être valable, il est logique que le nantissement observe les conditions de validité
de tout contrat185.
Seulement, il doit porter sur les éléments principaux du fonds de commerce à savoir la
clientèle, l’enseigne ou le nom commercial186.
Le nantissement peut aussi porter sur les autres éléments incorporels du fonds de
commerce à condition que cette extension fasse l’objet d'une clause spéciale désignant les
éléments engagés et d'une mention particulière (d’une publicité) au Registre du Commerce et
du Crédit Mobilier187.
En revanche, le nantissement ne peut porter sur les droits réels immobiliers, constatés
ou conférés par les baux ou conventions soumis à publicité foncière188.
Le nantissement doit être passé par écrit (authentique ou sous seing privé) et doit
comporter un certain nombre de mentions sous peine de nullité189.
185
Cf. article 1108 et suiv. du Code civil
186
Cf. article 162 AUS de 2010
187
Idem
188
Idem
189
Cf. article 163 AUS de 2010
190
Cf. article 165 AUS de 2010
80
En cas de déplacement du fonds de commerce affecté en garantie, le créancier nanti
est tenu d’accomplir les formalités complémentaires suivantes :
Ces formalités doivent être accomplies dans les quinze (15) jours de la notification que le
créancier a dû recevoir en ce cas de son débiteur ou dans les quinze (15) jours où il aura eu
connaissance du déplacement.
Le créancier nanti qui n’aura pas procédé à la modification de son inscription au nouveau
lieu d’exploitation du fonds, perd le bénéfice de cette garantie sauf s’il prouve qu’il n’avait
pas eu connaissance du transfert du fonds nanti.
- Le droit suite qui permet au créancier de saisir et de faire vendre le bien en quelques
mains où il se trouve194 ;
191
Cf. article 175 AUS de 2010
192
Idem
193
Idem
194
Cf. article 178 AUS de 2010
81
- Le droit de réalisation qui permet créancier muni d’un titre exécutoire peut faire
ordonner la cession du fonds de commerce, huit (8) jours après avoir vainement mise
en demeure le débiteur à exécuter son obligation principale à savoir le paiement de la
dette qu’il a contracté en fournissant comme garantie, un nantissement sur son fonds
de commerce195.
- Le droit de préférence sur le prix de la vente qui permet au créancier d’être payé par
préférence aux créanciers chirographaires196 ;
Ce nantissement, prévu par l’article 164 de l’AUS, a le même objet que le nantissement
conventionnel ; seulement il est autorisé par décision judiciaire et permet ainsi à un créancier
à prendre une inscription de nantissement sur le fonds de commerce de son débiteur.
L’AUS ne précise pas les hypothèses dans lesquelles le créancier peut procéder de la
sorte ; mais on peut raisonnablement croire que le créancier peut saisir le juge pour obtenir
un tel privilège lorsque le débiteur de bonne ou de mauvaise foi, ne paie pas sa dette.
Le créancier bénéficiaire d’un nantissement judiciaire, dispose des mêmes droits que le
créancier bénéficiant d’un nantissement conventionnel200.
195
Idem
196
Cf. article 178 AUS de 2010
197
La surenchère est l’acte par lequel suite à une première vente, une personne requiert une nouvelle vente d’un
bien par mise aux enchères en proposant un prix supérieur (d’un certain pourcentage) à celui obtenu lors de la
précédente vente.
198
Cf. article 177 AUS et 163 AUDG de 2010
199
Cf article 164 in fine AUS de 2010.
82
De manière plus radicale, le propriétaire d’un fonds de commerce peut céder son droit de
propriété à une tierce personne puisque le nouvel AUDCG l’autorise sous réserve de
certaines conditions.
Régie par l’article 147 et suivant de l’AUDCG de 2010, la cession de fonds de commerce
n’est rien d’autre que la vente du fonds de commerce. Elle prend le qualificatif de cession en
raison de la nature incorporelle du fonds ; d’ailleurs l’AUDCG utilise indistinctement les
notions de vente ou de cession pour désigner ce mécanisme.
Cela dit, quelles sont les conditions (A) qui doivent être observées pour la validité de la
cession de fonds de commerce ? Une fois conclu, quels sont les effets que produit la cession
de fonds de commerce (B) ?
Pour que leur cession soit valable, les parties contractantes doivent respecter les
conditions de validité de tout contrat.
Seulement, la capacité qui est exigée pour acquérir un fonds de commerce est celle
pour faire le commerce201.
200
Cf. article 177 et 178 AUS de 2010.
201
Cf. article 147 AUDCG de 2010
83
La cession est valable à condition qu’elle porte sur les éléments principaux du fonds
de commerce (nom commercial, enseigne, clientèle)202. Pour que la cession puisse porter sur
les éléments secondaires, ceux-ci doivent être expressément stipulés dans l’acte de cession203.
Quant au prix du fonds, il est librement fixé par les parties sous réserve de la
surenchère qui peut être faite par les créanciers s’ils estiment que le fonds a été vendu à un
prix trop bas204.
L’acte de cession doit exister sous forme écrite et contenir un certain nombre
mentions destinées à renseigner l’acquéreur sur la valeur réelle du fonds vendu sous peine de
nullité de la cession205.
En cas d’omission ou de mentions inexactes , l’acquéreur peut dans un délai d’un (01)
an à compter de la date de l’acte de cession, demander que soit annulée la vente s’il prouve
que l’omission ou l’inexactitude a substantiellement affecté la consistance et qu’il en a résulté
un préjudice pour lui206.
Par ailleurs, une copie de l’acte de cession certifiée conforme par l’acquéreur ou le
vendeur doit être déposée au RCCM, suivie d’une inscription modificative des parties
contractante dans ce registre207.
Aussi, l’acte de cession doit être publié dans un Journal d’Annonces Légales (JAL)
paraissant dans le lieu où le vendeur est inscrit au RCCM, à la diligence de l’acquéreur
dans un délai de quinze (15) jours francs à compter de la date de l’acte sous forme d’un
avis208.
Cette publication permet aux créanciers d’exercer leur droit de faire opposition à l’acte de
cession ou de solliciter une surenchère du sixième (1/6ème ) du prix global du fonds209.
202
Cf. article 148 AUDCG de 2010
203
Idem
204
Cf. article 163 AUDCG de 2010
205
Cf. article 149 et 150 AUDCG de 2010
206
Cf. article 151 AUDCG de 2010
207
Cf. article 152 AUDCG de 2010
208
Cf. article 153 AUDCG de 2010
209
Cf. article 163 AUDCG de 2010.
84
Quid des effets de la cession du fonds de commerce ?
Le cédant à l’obligation de :
a) L’obligation de délivrance
b) L’obligation de garantie
La garantie contre les vices cachés : le cédant garantie que le fonds de commerce ne
comporte pas de vices le rendant impropre à l’usage auquel il est destiné ; le cas échéant, le
cessionnaire pourra demander la résolution de la cession du fonds de commerce si la
diminution de jouissance qu’il subit est d’une importance telle qu’il n’aurait pas acheté le
fonds s’il en avait eu connaissance212.
210
Cf. l’article 154 AUDCG de 2010
211
Idem
212
Cf. l’article 156 AUDCG de 2010
85
La garantie contre l’éviction : le cédant garantie que le cessionnaire ne subira pas
de troubles dans l’exploitation du fonds de la part des tiers213.
La garantie contre le fait personnel : elle consiste pour le cédant à ne rien faire qui
puisse troubler le cessionnaire dans l’exercice des droits qui lui sont transmis214.
Le cédant bénéficie d’un privilège (a) et de la possibilité d’intenter une action résolutoire
(b) lorsque l’acheteur n’honore pas ses engagements.
a) Le privilège du cédant
Le cédant qui n’a pas reçu paiement intégral du prix de la cession, peut demander la
résolution de la cession de l’acte de cession217.
Cette résolution peut être amiable, judiciaire ou avoir lieu de plein droit si elle a fait
l’objet d’une clause préalablement insérée dans l’acte de cession218.
Quoi qu’il en soit, elle ne peut prospérer que si la vente est publiée au RCCM et portée à
la connaissance des créanciers de ce dernier par acte extrajudiciaire ou par tout moyen
prouvant par écrit cette notification219.
213
Cf. l’article 155 in fine et 156 AUDCG de 2010
214
Cf. l’article 155 AUDCG de 2010
215
Cf. l’article 166 AUDCG de 2010
216
Idem
217
Cf. article 167 et suiv. AUDCG de 2010
218
Cf. l’article 168 AUDCG de 2010
86
Quid des obligations de l’acheteur ?
Le cessionnaire doit payer le prix de la cession au jour et au lieu fixé dans l’acte de
220
vente .
Ce paiement a lieu entre les mains d’un notaire ou d’un établissement bancaire
désigné d’accord parties. L’un ou l’autre, l’organe ayant réceptionné le prix de la cession doit
le conserver pendant un délai de trente (30) jours qui commencent à courir au jour de la
publicité de l’acte de cession dans un JAL221.
La doctrine française exige que la clientèle présente certains caractères pour qu’elle
puisse être considérée comme un élément du fonds de commerce. Ainsi, la clientèle doit être
certaine, commerciale et personnelle224.
219
Idem
220
Cf. l’article 157 AUDCG 2010
221
Idem
222
Cf. l’article 166 AUDCG de 2010
223
Cf. l’article 154 alinéa 2 AUDCG de 2010
87
Il faut préciser qu’en droit commercial français, le fonds de commerce peut faire
l’objet d’une autre opération : le crédit-bail225.
Critiqué par la doctrine parce que son ancienne dénomination ne reflétait pas le
domaine d’application qui lui était attribué par l’AUDCG, le bail commercial a fait peau
neuve dans l’AUDCG de 2010 en prenant la dénomination de bail à usage professionnel.
224
BLARY-CLEMENT (Edith), Droit commercial : Théorie générale, Université Numérique Francophone
225
Le crédit-bail est un contrat en vertu duquel, la société de crédit-bail achète un bien et le met à la disposition
du preneur qui lui paie des redevances. En fin de bail, le preneur pourra acquérir le bien moyennant le paiement
d’une somme résiduelle.
88
exploiter une activité commerciale, industrielle, artisanale ou tout autre activité
professionnelle.
De cette définition du bail à usage professionnel marquée par son caractère extensif, il
est tout à fait plausible d’admettre que le bail tel que régi par le droit civil reste celui à usage
d’habitation.
Cela dit, quelles sont les conditions de formation et les effets du bail à usage
professionnel ?
Pour être valable, le bail à usage professionnel doit respecter les conditions de validité de
tout contrat prévu par le droit commun (A). Toutefois, certaines précisions sont à faire quant
à la durée de ce contrat et des évènements qui peuvent survenir lors de son exécution (B).
Par ailleurs, le contrat de bail à usage professionnel peut être conclu verbalement ou
au moyen d’un écrit226 ; néanmoins la forme écrite du bail mérite d’être privilégiée pour des
raisons de preuve de l’existence du contrat.
Aussi, le nouvel AUDCG a pris le soin de préciser les locaux ou immeubles qui
peuvent faire l’objet de ce contrat de bail227. En clair, il s’agit des :
226
Cf. article 103 AUDCG de 2010
227
Cf. article 101 de l’AUDCG 2010
89
- Locaux accessoires dépendant des locaux ou immeubles susvisés. Toutefois, lorsque
ces locaux accessoires appartiennent à des propriétaires différents, ceux-ci ne peuvent
être assujetties au contrat de bail applicable aux locaux principaux, qu’à la double
condition que leur prise à bail (ou encore location) ait été effectué en vue d’une
utilisation jointe que leur destinait le preneur et que le bailleur (du local principal
soumis au bail à usage professionnel) ait été informé de cette destination au
moment de la conclusion du contrat de bail ;
- Terrains nus sur lesquels ont été édifiés avant ou après la conclusion du bail, des
constructions à usages industriel, commercial, artisanal ou à tout autre usage
professionnel à la double condition que le propriétaire du terrain ait été informé et
qu’il ait expressément agréé l’élévation de ces constructions ou l’exploitation de son
terrain à cette fin.
Il faut préciser que ces dispositions légales doivent être respectées même par les
personnes morales de droit public à caractère industriel ou commercial et les sociétés à
capitaux publics (à savoir les sociétés d’Etat228 et les sociétés à participation financière
publique)229 peu importent qu’elles agissent en qualité de bailleur ou de preneur.
La durée du bail à usage professionnel sera analysée (1) avant d’aborder la sous-location
(2) et la cession du bail (3) qui constituent des évènements qui peuvent l’affecter.
1) La durée
228
Cour d’Appel d’Abidjan, arrêt N°615 du 20 Mai 2003, Port Autonome d’Abidjan (PAA) C/ Entreprise
Graviers et Sables (EGS), www.ohada.com,Ohadata J-03-276. Pour plus de précisions, cf. N’GUETTA
(Guillaume), Les sociétés d’Etat, les sociétés à participation financière publique et le droit OHADA, Mémoire
de DEA 2012-2013, Université FELIX HOUPHOUET BOIGNY DE COCODY, sous la Codirection du
Professeur Jacqueline LOHOUES-OBLE et du Docteur Mamadou KONE
229
Paris 17 mai 1951, Gaz. Pal. 1951, I, p.389 ; Cass. Com 29 janvier 1952, J.C.P. 1952, II, 6804 ; Cass. civ. 20
mars 1969 J.C.P. 1969, II, 16106, note B. Boccara. . Pour plus de précisions, cf. N’GUETTA (Guillaume), Les
sociétés d’Etat, les sociétés à participation financière publique et le droit OHADA, Mémoire de DEA 2012-
2013, Université FELIX HOUPHOUET BOIGNY DE COCODY, sous la Codirection du Professeur Jacqueline
LOHOUES-OBLE et du Docteur Mamadou KONE
90
Le bail à usage professionnel peut être conclu pour une durée déterminée ou non230.
Lorsqu’il est conclu pour une durée déterminée, celle-ci est librement fixée par les
parties.
Le bail à usage professionnel peut être convenu pour une durée indéterminée
notamment lorsqu’il est convenu verbalement231.
Lorsque le bailleur cède ses droits sur les locaux donnés à bail, le contrat (de bail) ne
prend pas ipso facto fin. Le nouveau bailleur est substitué de plein droit dans les obligations
de l’ancien bailleur et doit poursuivre l’exécution du contrat de bail233.
A l’expiration du délai de trois (03) mois à compter du décès du preneur, s’il n’y a pas
de demande de reprise du bail, il est résilié de plein droit237.
230
Cf. article 104 AUDCG de 2010
231
Idem
232
Idem
233
Cf. article 110 AUDCG de 2010
234
Cf. article 111 AUDCG de 2010
235
C’est le juge des procédures d’urgence (procédure rapide) par le truchement de qui, l’on obtient une
décision provisoire exécutoire de plein droit sans qu’il n’ait de procédure contradictoire. Cette tâche est
généralement assumée par le Président de la juridiction.
236
Cf. article 111 AUDCG de 2010
237
Idem
91
En pareille hypothèse, un liquidateur238 est désigné et est tenu d’exécuter les
obligations du preneur dans les conditions fixées par les parties. Lorsque ce dernier n’exécute
pas les obligations du précédent preneur, et qu’une mise en demeure lui est adressée sans
qu’elle ne le pousse à s’exécuter plus de soixante (60) jours après sa signification, le bail est
résilié de plein droit239.
Au cas où, le preneur procède à une sous-location convenue dans le contrat de bail
originelle, il faut en aviser par écrit le bailleur. En cas d’inobservation de cette formalité, la
sous-location est inopposable au bailleur241.
Lorsque le prix du loyer en cas de sous-location est supérieur au prix du loyer du bail
principal, le bailleur originel a la faculté de procéder à une augmentation du loyer du bail
principal. A défaut, d’accord entre les parties sur le nouveau prix du loyer suite à
l’augmentation, il sera fixé par le juge des référés242.
Une telle mesure est autorisée par l’AUDCG car comme le souligne un auteur, elle
« permet d’empêcher que le preneur, abusant de la surprotection légale dont il bénéficie,
transforme son droit au bail en un objet de grande spéculation, au détriment du propriétaire
de l’immeuble ou du local »243.
3) La cession du bail
238
C’est une personne chargée de l’apurement des comptes de la personne morale (en l’occurrence une société)
et de la fixation des droits de chacune des parties.
239
Cf. article 111 AUDCG de 2010
240
Cf. article 121 AUDCG de 2010
241
Idem
242
Cf. article 122 AUDCG de 2010
243
BEBEY (MODI KOKO Henri-Désiré), Droit Communautaire des Affaires, Tome 1 : Droit Commercial
Général et Droit de la Concurrence, éd. Dianaïa, 2008, p.79
92
La cession totale du bail peut être librement consentie par le preneur au profit d’un
244
tiers .
Toutefois, lorsque la cession est partielle, elle est soumise à l’accord du bailleur.
Quelle soit totale ou partielle, elle doit être signifiée au bailleur par exploit d’huissier
de justice ou notification par tout moyen permettant d’établir sa réception effective de
l’information245.
Cette formalité (la signification ou la notification) n’est pas une condition de validité
de la cession ; elle est le point de départ du délai d’un mois dont dispose le bailleur pour faire
opposition à la cession lorsqu’il justifie de moyens sérieux et légitimes pour le faire (par
exemple : le non-paiement des loyers par le preneur).
Quoi qu’il en soit le preneur qui veut bénéficier d’un renouvellement de son droit au
bail, est tenu de satisfaire à des conditions particulières.
Toutefois, pour pouvoir en bénéficier, il lui faut satisfaire à des conditions (1). Cette
prérogative est expressément règlementée par l’AUDCG de 2010 si bien que le bailleur qui
refuse de le reconnaitre à son preneur s’expose à des conséquences (2).
Deux séries de conditions doivent être observées pour que le preneur d’immeuble ou
de locaux à usage commercial, industriel, artisanal ou professionnel, bénéficie de la propriété
commerciale ou encore du droit au renouvellement du bail.
Si les conditions de fonds sont identiques (a), que le bail soit à durée déterminée ou non,
il faut procéder à une distinction sur le plan des conditions de forme (b).
244
Cf. article 118 AUDCG de 2010.
245
Idem
246
Cf. article 120 AUDCG de 2010
93
a) Les conditions de fonds du renouvellement du bail
Hormis ces conditions de fonds, le preneur doit observer certaines formalités pour
pouvoir effectivement se prévaloir de son droit au renouvellement du bail.
Lorsque le bail est à durée déterminée, le preneur qui remplit les conditions
précédemment énoncées et qui veut obtenir le renouvellement de son contrat de bail, doit en
faire la demande auprès du bailleur par acte extrajudiciaire ou notification par tout
moyen permettant d’établir la réception effective par le destinataire, au plus tard trois
(03) mois avant la date d’expiration du bail248.
Lorsque le bail est à durée indéterminée, le droit au renouvellement est ipso facto octroyé
au preneur. A priori, il n’a pas à observer une certaine formalité.
Mais cette interprétation mérite d’être relativisée car, « toute partie (le bailleur
notamment) qui entend le résilier doit donner congé par signification d'huissier de justice
247
Cf. article 123 AUDCG 2010
248
Cf. article 124 AUDCG 2010 ; CCJA arrêt n° 030/2007, recueil de jurisprudence de la CCJA juillet-
décembre 2007, p.44
249
CCJA arrêt n° 005/2006 du 30 mars 2006, recueil de jurisprudence de la CCJA janvier-juin 2006, p. 24 ;
CCJA n° 032 du 3 juillet 2008, recueil de jurisprudence de la CCJA, juillet décembre 2008, p. 45 ;
94
ou notification par tout moyen permettant d'établir la réception effective par le destinataire
au moins six mois à l'avance.
Faute de contestation dans ce délai, le bail à durée indéterminée cesse à la date fixée
par le congé250 ».
Quoi qu’il en soit, c’est le droit positif que doit observer le preneur, fût-il
analphabète, pour bénéficier de la propriété commerciale.
En cas de renouvellement exprès ou tacite, la durée du nouveau bail est fixée à une
durée minimale de trois (03) ans251.
En cas du renouvellement pour une durée indéterminée, les parties doivent prévoir la
durée du préavis que doit observer par l’une d’entre elle (si elle souhaite mettre fin au contrat
de bail) ; le délai de ce préavis ne peut être inférieur à six (06) mois252.
250
Cf. article 125 AUDCG de 2010
251
Cf. article 123 AUDCG de 2010
252
Idem
95
Quid lorsque le bailleur refuse d’accorder au preneur son droit au renouvellement du
bail ?
A défaut d’accord entre les parties sur le montant de cette indemnité, le juge des
référés procède à cette détermination en tenant compte :
253
Cf. article 125 AUDCG de 2010
254
Cf. article 126 AUDCG de 2010
255
Idem
256
Idem
96
Cette indemnité d’éviction est également due par le propriétaire qui, après avoir vendu
son fonds exploité dans son immeuble, entend exercer son droit de reprise après avoir perçu
intégralement le prix de la cession du fonds de commerce.
A la fin de la réhabilitation, si les locaux ont une destination différente de celle d’origine
et qu’il n’est pas offert de nouveaux locaux au preneur dépouillé de son droit d’occupation
des locaux, le bailleur devra dans ce cas lui verser une indemnité d’éviction.
- Lorsque le bailleur entend habiter lui-même les locaux accessoires des locaux
principaux ou les faire habiter par son conjoint, ses ascendants ou descendant ou
ceux de son conjoint.
Mais si le preneur arrive à prouver que cette reprise lui cause un trouble grave dans la
jouissance des locaux principaux ou encore que les locaux accessoires et les locaux
principaux constituent un tout indivisible, il peut être maintenu dans les locaux. Si le
bailleur s’entête à reprendre ses locaux, il devra lui verser la fameuse indemnité
d’éviction.
Le contrat de bail à usage professionnel met à la charge tant du bailleur (A) que du
preneur (B) des obligations.
257
Cf. article 127 AUDCG de 2010
97
A) Les obligations du bailleur
Les obligations (1) du bailleur constituant des privilèges pour le preneur, leur
inobservation est sanctionnée (2).
Le bailleur doit délivrer un local fonctionnel et en bon état258. Pour ce faire, un état
des lieux contradictoire est établi à ce sujet lorsque le bail est conclu au moyen d’un écrit.
Lorsqu’il est passé verbalement ou que le preneur n’a pas formulé de réserve quant à
l’état des lieux, le local est présumé être donné en bon état259.
Ni le bailleur ni ses ayants droits ne doivent troubler le preneur dans la jouissance des
260
lieux .
Si le bailleur refuse de faire ces grosses réparations, le preneur peut se faire autoriser
par le juge des référés à le faire à charge d’obtenir remboursement par le bailleur, des frais
exposés dont le montant et les modalités sont fixés judiciairement265.
258
Cf. article 105 AUDCG de 2010
259
Idem
260
Article 109 AUDCG de 2010
261
Article 106 AUDCG de 2010
262
Idem
263
Idem
264
Idem
265
Cf. article 107 AUDCG de 2010
98
2) Les sanctions en cas d’inexécution de ces obligations
Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que le bail est un contrat synallagmatique ; de
ce fait, lorsque le bailleur n’exécute pas ces obligations, le preneur peut solliciter une
résiliation du contrat267.
Toutefois, cette résiliation ne peut être prononcée par le juge qu’à la condition que le
bailleur ait fait l’objet d’une mise en demeure, par exploit d’huissier ou par tout moyen
permettant d’en établir la réception effective par le destinataire, d’avoir à respecter les clauses
et conditions du bail, restée infructueuse268.
Cette mise en demeure doit, à peine de nullité, indiquer clairement les clauses et
conditions non respectées et indiquer qu’à défaut d’exécution dans un délai d’un mois, le juge
des référés sera saisi aux fins de résiliation et d’expulsion du preneur et de tous occupants de
son chef269.
Le contrat de bail peut contenir une clause de résiliation de plein droit. Dans ce cas,
suite à la mise en demeure restée infructueuse, le juge des référés est toute de même saisi ;
mais il ne fait que constater la résiliation du bail en application de la clause de résiliation270.
Qu’elle soit judiciaire ou de plein droit, la demande de résiliation du bail doit être portée à
la connaissance des créanciers inscrits du bailleur271.
A l’instar du bailleur, le bail à usage professionnel, met des obligations (1) à la charge du
preneur et dont le non-respect est sanctionné (2).
266
Cf. article 1147 du Code civil
267
Cf. article 133 AUDCG de 2010
268
Idem
269
Idem
270
Idem
271
Idem
99
Le preneur doit payer les loyers aux époques et selon modalités convenues par les
272
parties .
Le montant de ces loyers est fixé librement par les parties sous réserve les dispositions
légales de chaque Etat partie273. Il est révisable dans les conditions prévues au contrat ou à
défaut lors de chaque renouvellement274.
En cas de désaccord sur le montant de ce loyer, le juge des référés fixe les nouveaux
montants en tenant compte de :
Le preneur doit exploiter le local en bon père de famille suivant les termes du contrat de
bail276 .
Lorsqu’il veut changer d’activité, il doit obtenir l’accord préalable et exprès du bailleur
qui peut également s’y opposer pour des motifs sérieux280.
272
Cf. article 112 AUDCG de 2010
273
Cf. article 116 AUDCG de 2010
274
Idem
275
Cf. article 117 AUDCG de 2010
276
Cf. article 113 AUDCG de 2010
277
Cf. article 114 AUDCG de 2010
278
Cf. article 113 alinéa 2 AUDCG de 2010
279
Idem
280
Cf. article 113 alinéa 3 AUDCG de 2010
100
A l’expiration du bail, le preneur qui se maintient dans les locaux, devra payer une
indemnité d’occupation égale au montant du loyer fixé pendant la durée du bail, sans
préjudice d'éventuels dommages et intérêts281 .
Par ailleurs, la durée du bail est fixée par le législateur à neuf (09) ans au minimum
avec une possibilité de résiliation à chaque trimestre284
281
Cf. article 115 AUDCG de 2010
282
Cf. article 133 AUDCG de 2010
283
Cf. article L. 145 -1 et suivants du Code de commerce français
284
Cf. article L. 145 -4 et suivants du Code de commerce français
101
CHAPITRE II :
LA VENTE COMMERCIALE
Le nouvel AUDCG n’en fournit pas une définition expresse. Mais l’analyse combinée
du champ d’application qu’il consacre à ce contrat par le biais de son article 234 d’une part et
de l’article 1582 alinéa 1 du Code civil d’autre part, nous apporte quelques éclairages sur la
définition de ce contrat.
L’article 1583 alinéa du Code civil dispose que « la vente est une convention par
laquelle l’un s’oblige à livrer une chose et l’autre à la payer ».
102
Quant à l’article 234 de l’AUDG de 2010, il prévoit que « Les dispositions du présent
Livre (consacré à la vente commerciale) s'appliquent aux contrats de vente de marchandises
entre commerçants, personnes physiques ou personnes morales, y compris les contrats de
fourniture de marchandises destinées à des activités de fabrication ou de production.
Sauf stipulations conventionnelles contraires, le contrat de vente commerciale est soumis aux
dispositions du présent Livre dès lors que les contractants ont le siège de leur activité dans
un des États Parties ou lorsque les règles du droit international privé mènent à l’application
de la loi d’un Etat Partie ».
Ainsi, l’analyse de ces dispositions légales laisse entrevoir que la vente commerciale
est un contrat entre commerçants en vertu duquel l’un s’oblige à fournir une
marchandise (y compris celles destinées à des activités de fabrication ou de production)
à l’autre qui s’engage à la payer.
Cependant, des particularités sont à relever sur le plan de la rencontre des volontés
précisément sur l’offre (paragraphe 1) et sur l’acceptation (Paragraphe 2)
285
Cf. article 237 AUDCG de 2010
103
L’offre est la proposition ferme, pure et simple de conclure un contrat déterminé à des
conditions déterminées.
Elle est expresse lorsqu’elle est traduite par une action spécialement accomplie en vue de
porter la proposition de contracter à la connaissance d’autrui et cela, par l’écrit ou la parole.
Elle peut être adressée à une personne ou plusieurs personnes pourvu qu’elles soient
déterminée(s)287.
Lorsqu’une proposition est adressée à des personnes indéterminées, elle constitue une
invitation à une offre et non une offre suffisamment précise pour former un contrat de vente
commerciale288.
Lorsque l’offre est stipulée avec un délai d’acceptation, l’offre est irrévocable avant
l’expiration de ce délai289. Il en est de même lorsque l’offre est irrévocable ou si le
destinataire était raisonnablement fondé à croire que l’offre était irrévocable et a agi en
conséquence290.
286
Cf. article 241 alinéa 2 AUDCG de 2010
287
Cf. article 241 alinéa 3 AUDCG de 2010
288
Cf. article 241 alinéa 4 AUDCG de 2010
289
Cf. article 242 AUDCG de 2010
290
idem
104
Cette dernière hypothèse correspond bien à l’existence de relations d’affaires antérieures
entre les parties contractes qui se noue en général sur la base d’offre irrévocable.
Lorsque l’offre est stipulée sans délai, l’offre peut être en principe révoquée à condition
d’observer un délai raisonnable que le juge déterminera en tenant compte des circonstances,
notamment de la rapidité des moyens de communication utilisés par l’auteur de l’offre 291.il
est clair ici que contrairement au droit civil, le juge aura considéré comme délai raisonnable,
un délai assez bref, en raison du principe de la célérité qui émaille la pratique des affaires.
Paragraphe 2 : L’acceptation
A l’instar du droit commun, l’acceptation doit être conforme à l’offre en étant pure et
simple c’est –à-dire non assortie de réserves293.
291
Cf. article 243 AUDCG de 2010
292
Cf. article 243 in fine AUDCG de 2010.
293
Cf. interprétation a contrario de l’article 245 AUDCG de 2010
105
S’il ne le fait pas, les termes du contrat sont ceux de l’offre avec les modifications énoncées
dans l’acceptation294.
L’acceptation est expresse lorsqu’elle résulte de tout acte ou de tout geste qui, d’après
les usages, ne peut avoir été accompli qu’en vue de faire connaitre la volonté de son auteur295.
Elle est tacite, lorsqu’elle résulte d’un acte où l’on peut raisonnablement induire la
volonté de contracter296.
Tout comme en droit civil, le silence ou l’inaction ne peut, à lui, seul valoir
acceptation297.
Mais cette règle connait des exceptions qui donne au silence valeur d’acceptation
lorsque :
294
Cf. article 245 AUDCG de 2010
295
Cf. article 244 AUDCG de 2010
296
Cf. 243 in fine AUDCG de 2010
297
idem
298
Cf. 244 AUDCG de 2010
299
idem
106
En ce qui concerne le contrat de vente par correspondance, sa conclusion est assujettie à
la théorie de la réception contrairement au droit commun, puisqu’il est conclu lorsque le
pollicitant reçoit la lettre d’acceptation ou l’indication d’acquiescement émanant de
l’acceptant de tout acte exprimant son acceptation300.
Dans un tel contexte, l’acceptation peut également être révoquée à la condition que la
révocation parvienne au pollicitant au plus tard au moment où l’acceptation aurait pris
effet301.
Lorsque le contrat de vente commerciale est conclu, quelles sont les effets qu’il génère ?
300
idem
301
Cf. article 247 AUDCG de 2010.
302
Cf. article 275 AUDCG de 2010.
303
Cf. article 276 AUDCG de 2010.
107
A défaut de complet paiement à l’échéance, le créancier peut demander la restitution de la
marchandise afin de recouvrer le droit d’en disposer.
Lorsque le bien est vendu ou détruit, le droit de propriété se reporte soit sur la créance du
débiteur à l’égard du sous-acquéreur soit sur l’indemnité d’assurance subrogée au bien.
En principe, les risques sont à la charge de l’acheteur dès qu’il y a transfert de propriété à
la prise de livraison de la marchandise par l’acheteur304.
Pour les marchandises vendues en cours de transport, le transfert des risques s’opère à
partir de la conclusion du contrat (de vente)306.
Quelles sont les obligations que les parties contractantes supportent dans le cadre d’un contrat
de vente commerciale ?
Les obligations du vendeur (A) constituent des droits pour l’acheteur et vice versa (B).
304
Cf. article 277 AUDCG de 2010.
305
Cf. article 278 AUDCG de 2010
306
Cf. article 279 AUDCG de 2010.
307
Cf. article 277 in fine AUDCG de 2010.
108
A) Les obligations à la charge du vendeur
Le vendeur est tenu de livrer (1) une marchandise conforme aux stipulations
contractuelles (2). De plus, il doit garantir à l’acheteur un usage normal et paisible de la
marchandise (3).
1) L’obligation de livraison
a) Le lieu de livraison
b) La date de livraison
Elle est fixée par les parties310. A défaut, la livraison doit intervenir dans un délai
raisonnable à partir de la conclusion du contrat311.
308
Cf. article 251 AUDCG de 2010.
309
Idem
310
Cf. article 253 AUDCG de 2010.
311
Idem
312
Cf. article 252 AUDCG de 2010.
313
Cf. article 253 AUDCG de 2010.
109
Au jour de la livraison ou dans un délai d’un mois à compter de la livraison, s’il
estime que la marchandise n’est pas conforme aux stipulations contractuelles, l’acheteur
doit le dénoncer314.
3) L’obligation de garantie
Le vendeur est tenu d’une obligation de garantie contre l’éviction et contre les vices
316
cachés .
Les clauses limitatives de garantie peuvent être insérées dans la vente commerciale ;
toutefois elles ne sont opposables à l’acheteur que si le vendeur apporte la preuve qu’au
moment de la conclusion du contrat l’acheteur les connaissait et les a accepté 317.
Le paiement du prix des marchandises doit intervenir au lieu, au moment et selon les
modalités convenues par les parties318.
Le paiement doit intervenir au lieu convenu entre les parties ; à défaut, il doit intervenir :
314
Cf. article 258 AUDCG de 2010.
315
Cf. article 259 AUDCG de 2010.
316
Cf. article 260 AUDCG de 2010.
317
Cf. article 261 AUDCG de 2010.
318
Cf. article 263 et suiv. AUDCG de 2010.
319
Cf. article 266 AUDCG de 2010.
110
Le paiement doit intervenir à la date convenue par les parties320. A défaut, il intervient au
moment de la livraison de la marchandise321.
Quelles sont les sanctions auxquelles les parties s’exposent lorsqu’elles n’exécutent pas
leurs obligations respectives ?
L’une des parties qui est en droit de réclamer l’exécution des obligations de son
cocontractant, peut invoquer l’exception d’inexécution et solliciter le paiement à son profit de
dommages et intérêts (paragraphe 2).
Elle est règlementée par les articles 296 et suivants de l’AUDCG de 2010. Elle peut être
judiciaire (A) ou unilatérale (B).
Elle libère les parties de leurs obligations mais ne les exonère pas des dommages-intérêts
éventuels325.
320
Cf. article 268 AUDCG de 2010.
321
Cf. article 266 AUDCG de 2010.
322
Cf. article 269 AUDCG de 2010.
323
Idem
324
Cf. article 270 AUDCG de 2010.
325
Cf. article 296 AUDCG de 2010.
111
Elle peut être sollicitée pour inexécution totale ou partielle des obligations d’une partie326.
Cependant, l’acheteur ne pourra solliciter la rupture du contrat s'il lui est impossible de
restituer les marchandises dans l'état où il les a reçu, et si cette impossibilité est due à un acte
ou une omission de sa part327.
En cas de rupture, le vendeur est tenu de restituer le prix, il doit payer des intérêts sur son
montant à compter du jour où il a reçu le paiement328.
Quant à l’acheteur, il doit restituer tout ou partie des marchandises et payer au vendeur
tout ou partie du montant du profit qu'il en a retiré329.
Ainsi, elle peut être mise en œuvre par une partie à la vente, lorsque l’autre partie affiche
un comportement grave ; la gravité du comportement est laissée à l’appréciation du juge330.
Au demeurant, l’on peut retenir qu’elle a les mêmes implications que la rupture judiciaire
de la vente commerciale.
A) L’exception d’inexécution
326
Cf. article 297 et 281 AUDCG de 2010.
327
Cf. article 298 AUDCG de 2010.
328
Cf. article 300 AUDCG de 2010.
329
Idem
330
Cf. article 281 alinéa 2 AUDCG de 2010.
112
C’est une sanction qui doit impérativement être prononcée par un juge et qui permet à une
partie à une vente commerciale de différer l’exécution de ses obligations lorsqu’il lui paraît
que son cocontractant ne sera pas à mesure d’exécuter ses obligations.
Elle est consacrée au profit de l’acheteur par l’article 282 de l’AUDCG de 2010 qui
dispose que « si le vendeur ne paraît pas en mesure d’exécuter dans les délais convenus
l’intégralité de son obligation de livraison des marchandises, en raison d’une insuffisance de
ses capacités de fabrication ou d’une inadaptation de ses moyens de production, l’acheteur
peut obtenir de la juridiction compétente, statuant à bref délai, l’autorisation de différer
l’exécution de son obligation de payer. Cette autorisation peut être assortie de l’obligation
de consigner tout ou partie du prix ».
Une telle logique de l’AUDCG trouve sa raison d’être dans le fait que la vente
commerciale est un contrat synallagmatique.
Les dommages et intérêts dus, correspondent non seulement à la perte subie mais
également au gain manqué.
Ils peuvent être réclamés en cas de retard dans l’exécution des obligations ou en cas
d’inexécution331.
Cependant, la partie qui invoque une inexécution des obligations du contrat doit prendre
toutes mesures raisonnables, eu égard aux circonstances, pour limiter sa perte, ou préserver
son gain332.
331
Cf. article 291 et suiv AUDCG de 2010.
332
Cf. article 293 et suiv AUDCG de 2010.
113
Si elle néglige de le faire, la partie en défaut peut demander une réduction des dommages-
intérêts égale au montant de la perte qui aurait pu être évitée et du gain qui aurait pu être
réalisé333.
BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE
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2002
BEIRA (Ehi. Marc), Droit commercial : Droit commercial général et Droit des sociétés
commerciales, Abidjan,13ème édition, éditions ABC, 2015
CODE CIVIL : Droit des biens, Droit des obligations, éd. ABC
CODE PRATIQUE OHADA, Traité, Actes uniformes et Règlements annotés, éd. Francis
LEFEBVRE, 2014
CODE VERT OHADA, Traité et Actes uniformes commentés et annotés, 4ème édtiion, éd.
juriscope 2012
FIENI (Pacôme), « Droit commercial général dans l'espace OHADA : étude comparative de
l'ancien et du nouvel Acte uniforme », extrait de Actualités juridique Edition économique
n°3/2012, p.22, http://www.ohada.com/doctrine/ohadata/D-13-34.html
333
Idem
114
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affaires, collection droit uniforme africain, Editons Bruylant, 2002.
RIPERT (Georges) et ROBLOT (René) par MICHEL (Germain) et VOGEL (Louis), Traité
de droit commercial ; 18ème édition, LGDJ, 1998
115
116