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Résumé :
Cette communication a pour objet de préciser le concept de satisfaction des consommateurs, en particulier par
rapport à des concepts faisant l’objet d’un intérêt croissant tels que la valeur perçue par le client et la confiance.
Abstract :
This communication aims at specifying the consumer satisfaction concept, in relation to other concepts which
are experiencing an increase in interest such as customer perceived value and trust.
2
être la simple évaluation du produit, mais qu’elle dépend des attentes du consommateur1 et de
l’effort qu’il alloue pour obtenir ce produit2. Les définitions qui suivirent conceptualisèrent
également la satisfaction comme étant un construit cognitif, émanant d’un processus
d’évaluation. Ainsi, Howard et Steh (1969) la définissent comme étant : « l’ état d’être
récompensé de manière adéquate ou inadéquate dans une situation d’achat pour les
sacrifices encourus. », Hunt (1977) comme étant «l’évaluation rendue que l’expérience était
au moins aussi bonne qu’elle était supposée être. », Oliver (1981), dans son article fondateur,
comme étant ce qui « résulte d’une comparaison subjective du produit attendu et reçu. »
Ces définitions, qui postulent que la satisfaction émane d’un processus comparatif, ont
servi de point de départ au paradigme de la disconfirmation des attentes3.
Sous l’influence croissante du rôle joué par les affects et émotions4 dans les processus
consommatoires et post-consommatoires (Filser, 1996 ; Derbaix et Pham, 1989 ; Holbrook et
Hirschman, 1982), la satisfaction fut également définie comme une émotion pure (Fournier et
Glen Mick, 1999 ; Arnould et Price, 1993 ; Westbrook, 1983), exclusive de tout processus
cognitif, voire une émotion parmi d’autres (Bagozzi, Gopinath et Nyer, 1999). Westbrook
(1983) définit ainsi la satisfaction comme étant « une réponse émotionnelle.» Pour Arnould et
Price (1993), la satisfaction est également un construit purement émotionnel, qui ne peut être
rendu par les conceptualisations cognitives tel que le modèle de la disconfirmation des
attentes. Ils ajoutent qu’il est nécessaire de développer des méthodes spécifiques pour
appréhender la réalité affective de ce concept.
1
Pour Cardozo, les attentes servent de « guidelines » au consommateur lors du processus de formation de la
satisfaction.
2
Il écrit : « La satisfaction du consommateur peut dépendre non seulement du produit lui-même, mais aussi de
l’expérience comprenant l’acquisition du produit. La satisfaction du consommateur est probablement plus un
concept global qu’une simple évaluation virtuelle du produit. »
3
Selon ce modèle, qui se fonde sur la théorie psychosociologique du niveau d’adaptation d’Helson (1956), trois
cas sont envisageables. a) Il y a « disconfirmation positive » lorsque la performance perçue est supérieure aux
attentes. Il s’ensuit alors un état de satisfaction. b) Il y a « disconfirmation négative » lorsque la performance
perçue est inférieure aux attentes. Il s’ensuit alors une satisfaction négative. Il y a indifférence (« disconfirmation
neutre ») lorsque la performance perçue est égale aux attentes.
4
Il est à noter que les « affects » sont souvent confondus avec les émotions en marketing. Oliver (1997) note à ce
sujet que, dans la littérature sur le comportement du consommateur, le terme « affect » désigne principalement
les émotions. Nous pensons qu’il faut distinguer entre ces deux construits, les affects étant « un terme générique
désignant les émotions, les humeurs, les sentiments, les pulsions, les attitudes, les préférences et les
évaluations. » Pour plus de précisions, se reporter à la typologie des affects proposée par Derbaix et Pham
3
- La satisfaction définie comme émanant d’un processus dual : affectif et cognitif
Entre ces deux approches « radicales », une troisième voie défend l’idée que la
satisfaction résulte de deux processus, l’un affectif et l’autre cognitif, qui peuvent interagir.
Cette conception correspond, à notre sens, au point de vue dominant en recherche
aujourd’hui, même s’il n’y a pas consensus quant à la nature et au sens de la relation causale
entre la composante affective et cognitive5 et quant à la nature même de la satisfaction.
Ainsi Oliver (1997) donne la satisfaction comme étant une évaluation relative,
subséquente aux affects et cognitions post-consommatoires. De la même manière, Aurier et
Evrard (1998) définissent la satisfaction comme étant : « un phénomène non directement
observable (un état psychologique qui doit être distingué de ses conséquences
comportementales…) … un jugement évaluatif … qui résulte de processus cognitifs et intègre
des éléments affectifs … un jugement global portant sur une expérience de consommation … à
caractère relatif, résultant de ce que l’évaluation est un processus comparatif entre
l’expérience subjective vécue par le consommateur et une base de référence initiale…».
Plusieurs recherches (Fournier et Glen Mick, 1999 ; Plichon, 1998 ; Oliver, 1993 ;
1994 ; Evrard, 1989) montrent que la satisfaction résulte de deux processus parallèles, l’un
émotionnel et l’autre affectif, qui peuvent interagir. Evrard (1989) montre ainsi la
prédominance du chemin affectif sur le chemin cognitif dans le contexte de l’usage de
médias ; Oliver (1993) montre que la satisfaction pour des voitures est déterminée d’une part
par des affects positifs (la joie et l’intérêt) et négatifs (qui agissent par un phénomène
d’attribution), et d’autre part par la disconfirmation des attentes. D’autres recherches d’Oliver
aboutissent à des résultats similaires et lui permirent de proposer le modèle généralisé de
satisfaction (1997). En France, Plichon (1998), s’intéressant à la satisfaction de clients FNAC
aboutit à des résultats analogues et donne la satisfaction comme étant « un état affectif
provenant d’un processus d’évaluation affectif et cognitif qui survient lors d’une transaction
spécifique. » Fournier et Glen Mick (1999) étendent les travaux d’Oliver sur les processus de
formation de la satisfaction et identifient plusieurs modèles « mélangeant motivations,
cognitions, émotions et significations. »
(1989). Les émotions se distinguent ainsi principalement des autres affects en ce qu’elles font l’objet d’une
expression somatique de forte intensité et ont une durabilité brève.
5
Evrard et Aurier (1994) identifient trois catégories principales de liens entre affects et satisfaction : l’influence
des dimensions affectives générales (par exemple l’humeur) ; l’influence des émotions spécifiques générées par
4
Il semble donc que la satisfaction puisse être définie comme étant le fruit d’un
processus dual, affectif et cognitif, même si le lien et l’ordre de la séquence entre ces deux
types de variables ne semblent faire l’objet d’un consensus.
5
b) Satisfaction et attitude, qualité et performance perçues
Bien qu’ayant fait l’objet d’un effort de définition, la satisfaction a néanmoins été
confondue avec le concept d’attitude (Latour et Peat, 1979 ) puis de qualité (Nguyen, 1992) et
de performance perçues (Cardozo, 1965, Olshavsky et Miller, 1972 ; Anderson, 1973). Les
paragraphes qui suivent rappellent ce en quoi la satisfaction diffère de l’attitude, la
performance perçue et la qualité perçue.
- Satisfaction et attitude
Au début des années 70, la satisfaction a été considérée n’être qu’une forme d’attitude
particulière et n’a pas fait l’objet de définitions spécifiques (Latour et Peat, 1979). Concept
clef du marketing, en ce qu’il a été identifié être un déterminant de comportement, l’attitude
peut être définie comme étant « les évaluations des objets, problèmes ou personnes,
relativement durables (i.e. stockés dans la mémoire à long terme). Ces évaluations peuvent se
fonder sur des informations ou expériences comportementales, cognitives et affectives et sont
à même de guider les réponses comportementales, cognitives ou affectives. » (Petty, Unnava
et Strathman, 1991), ou encore comme étant « les connaissances, croyances, opinions et
sentiments d’un individu ou d’un groupe d’individus à l’égard d’un objet » (Lindon,
Lendrevie, 2000).
La lecture de ces définitions révèle que les concepts d’attitude et de satisfaction
présentent de fortes similitudes. Dans les deux cas, il s’agit d’évaluations relatives à un objet,
de construits hypothétiques non directement observables, constitutifs de processus cognitifs et
affectifs, identifiés comme étant des déterminants de comportements futurs. Trois points
permettent cependant de distinguer ces deux concepts.
6
Il est à noter que les standards de comparaison utilisés dans le processus de formation de la satisfaction ne sont
pas toujours ceux-ci. Ce sont cependant les plus fréquemment cités dans la littérature. Pour une revue exhaustive
des standards de comparaison utilisés, voir Ngobo (1996).
6
2) Le second est lié à la situation de ces deux construits relativement au processus de
consommation. Afin de pouvoir prononcer un jugement de satisfaction en effet, le
consommateur doit avoir consommé l’objet. Il s’agit d’une expérience post-
expérientielle. Le consommateur peut avoir une attitude pour cet objet sans l’avoir
nécessairement consommé. Il a d’ailleurs été montré qu’il existe une relation causale
entre satisfaction et attitude (Oliver, 1980 ; Swan et Trawick, 1981).
Lors des premières recherches qui lui ont été consacrées (Cardozo, 1965 ; Olshavski et
Miller, 1972 ; Anderson, 1973 ; Olson et Dover, 1976, 1979), la satisfaction a été confondue
au concept de performance perçue par le consommateur. Ces recherches pré-scientifiques, qui
se sont intéressées à comprendre les mécanismes de formation de la satisfaction à partir des
attentes et à identifier le type de théorie psychologique s’appliquant (théorie de la dissonance
cognitive, théorie de la négativité généralisée, théorie de l’assimilation, théorie de
l’assimilation-contraste), confondent satisfaction et performance perçue.
Définie comme étant « le niveau perçu de résultat du produit ou service,
habituellement mentionné sur une échelle objective bornée par des niveaux de bonnes et
mauvaises performances. » (Oliver, 1997), la performance perçue a été formalisée dans le
paradigme de la disconfirmation des attentes comme étant un antécédent de la satisfaction. La
satisfaction se différencie cependant de la performance perçue sur deux points principaux.
7
Cf. note 3.
7
2) Le second tient à ce que la satisfaction est constitutive d’éléments affectifs et cognitifs,
alors que la performance perçue est de nature purement cognitive.
8
Satisfaction et qualité perçue sont donc deux construits différents 8. De nombreuses
recherches ont montré l’existence d’une relation causale entre ces deux construits. Ainsi, pour
Carman (1990), Fornell (1992), qui représentent le point de vue dominant, la qualité perçue
précède la satisfaction du consommateur. D’autres chercheurs (Bitner, 1990 ; Bolton et Drew,
1991) considèrent cependant que le sens de la relation est inverse.
8
Une analyse de la différence entre ces deux construits peut également être faite selon que l’on se situe dans une
perspective transactionnelle ou relationnelle. Dans une perspective transactionnelle, la satisfaction concerne un
événement ponctuel. Elle se différencie alors de la qualité perçue en ce qu’elle est un sentiment et non pas une
perception relative à la supériorité infériorité d’un produit / service. Dans une perspective relationnelle, la
satisfaction se différencie de la qualité perçue en ce qu’elle est un agrégat de satisfactions transactionnelles, une
évaluation sur le long terme et non pas une impression (pour plus de précisions, cf. Prim, 1998 ; Ngobo, 1997).
9
Qualité perçue et performance perçue, construits qui présentent des analogies fortes en ce qu’ils sont tous les
deux d’orientation cognitive dominante et précèdent la satisfaction, constituent des construits distincts en ce que
la qualité perçue nécessite qu’un processus de comparaison ait lieu. La qualité perçue est ainsi un construit plus
complexe que le construit de performance perçue.
9
- La valeur perçue : définitions
Selon la première approche, transactionnelle, la valeur perçue par le client est définie
comme étant un ratio, un trade-off opéré par le consommateur, entre les bénéfices relatifs à un
objet et les sacrifices que le consommateur perçoit. Ainsi, Day (1990) la donne comme étant
« la différence (ou le surplus) entre les bénéfices perçus et les coûts perçus » ; Rao et
Krishnan (1985) comme étant « le ratio des bénéfices perçus par rapport aux sacrifices
encourus » ; Zeithaml (1988) comme étant « l’évaluation globale de l’utilité d’un produit
fondée sur ses perceptions concernant ce qui est reçu et ce qui est donné ». Dans la même
veine, Oliver (1997), la définit comme étant un jugement « comparant ce qui a été reçu (par
exemple la performance) aux coûts d’acquisitions (par exemple les efforts financiers,
psychologiques). » Il s’agit donc « d’une évaluation coûts bénéfices, dans une perspective de
transaction et de choix. » (Aurier et al.,1998). Pour cette première approche, qui se fonde sur
la théorie économique de la valeur – utilité, la valeur perçue par le consommateur pour un
objet, est fonction de son utilité, qu’il cherche à maximiser sous contrainte.
10
qui doit être distinguée pour ces consommateurs du concept des « valeurs du consommateur », autre champ de
recherche marketing. Dans ce cas, le terme valeur désigne les « valeurs culturelles, personnelles… » etc.
11
Cité par Aurier et al. (1998), page 200.
10
Selon la première définition, la valeur perçue12 par le client se caractérise donc en ce
qu’elle est a) subjective (elle fait l’objet de variations inter-individuelles), b) la résultante
d’un processus de comparaison entre les bénéfices et les sacrifices perçus par le
consommateur (elle est donc de nature cognitive), c) relative (elle suppose que le
consommateur ait procédé à des comparaisons avec d’autres objets).
Si ces définitions révèlent des points communs entre satisfaction et valeur perçue
transactionnelle (ces deux construits sont issus d’un processus de comparaison et ont tous les
deux une dimension cognitive), un certain nombre de caractéristiques permettent de les
différencier.
2) La seconde tient à ce que la satisfaction est un jugement qui peut-être à la fois cognitif
et émotionnel. La valeur perçue par le client est, par contre, un construit cognitif. Il
s’agit d’un calcul opéré par le consommateur.
3) La troisième repose sur le fait que la satisfaction est une évaluation post-expérientielle,
ce que n’est pas nécessairement la valeur perçue.
Les concepts de satisfaction et de valeur perçue sont donc deux concepts proches mais
distincts. Tous deux ont en effet été identifiés comme étant des antécédents de la fidélité du
consommateur et comme ayant un caractère stratégique pour les entreprises. La nature, leur
12
Il est à noter également qu’il n’existe pas un type de valeur, mais plusieurs types de valeurs (Lai, 1995 ;
Holbrook, 1996)12.
13
Comme nous l’avons déjà mentionné, il s’agit des standards de comparaison les plus fréquemment utilisés.
D’autres standards peuvent en effet être rencontrés ; telles que les normes issues de l’expérience, les désirs…etc.
il est intéressant de noter également que la satisfaction peut se fonder sur plusieurs standards de comparaison
simultanés (Ngobo, 1997). De fait, cette dernière remarque constitue un autre point de différenciation entre
satisfaction et qualité perçue par le consommateur pour l’objet. En effet, alors que la satisfaction peut se fonder
sur plusieurs standards simultanément, il semble que la valeur perçue ne se fonde que sur un seul type de
standards de comparaison.
11
position par rapport à l’expérience de consommation, ainsi que les termes de comparaison
utilisés en font deux concepts distincts, complémentaires à notre sens, pour l’identification
des véritables leviers de la fidélité.
La confiance fait aujourd’hui l’objet d’un engouement fort de la part des chercheurs
et des managers soucieux de mieux comprendre les leviers qui mènent le consommateur à être
fidèle à une marque, un service, une entreprise14. Ce concept, importé en marketing à partir
d’autres disciplines, telles que la psychologie, la sociologie, le management en ressources
humaines ou en organisation, et principalement étudié dans le cadre du marketing business to
business (Siriex et Dubois, 1999) fait l’objet de définitions variées15.
14
Ceci repose sur le fait qu’il a été démontré qu’il est moins onéreux pour une entreprise de fidéliser des clients
que d’en recruter de nouveaux (Reichheld et Sasser, 1990). Nombreuses sont les études qui ont en effet souligné
et démontré les effets vertueux de la fidélité des consommateurs pour la rentabilité et les profits de l’entreprise
(Fornell, 1992 ; Rust et al., 1995…etc.). Par ailleurs, bien qu’il ait été démontré que la fidélité est une fonction
croissante de la satisfaction, les liens entre ces deux construits semblent non linéaires et complexes (Jones et
Sasser, 1995 ; Ngobo, 2000).
15
Le type de définitions données de la confiance varie selon le contexte d’étude : marketing industriel, grande
consommation, marketing des ventes… etc. Pour une revue des définitions données, cf. l’état de l’art de Guibert
(1999).
12
volonté de se reposer sur un partenaire d’échange », Schurr et Ozane (1985) « la croyance
que la parole ou la promesse qu’une partie remplira ses obligations dans une relation
d’échange. » Pour Anderson et Weitz (1989), il y a confiance quand « une partie considère
que ses besoins seront remplis à l’avenir par les actions entreprises par l’autre partie. »
Concept clef du marketing relationnel16, la confiance a également été définie comme
étant composée de trois facettes (Sako, 1992) : a) la « confiance contractuelle » (« contractual
trust ») i.e. la croyance que l’organisation respectera le contrat qui la lie au consommateur ; b)
la « confiance de compétence » (« competence trust ») i.e. la croyance que l’organisation a les
compétences nécessaires pour mener à bien la tâche commanditée par le consommateur ; c) la
« confiance ayant valeur de goodwill » (« goodwill trust ») i.e. la confiance que l’organisation
fera plus que la tâche prévue.
Dans un effort de clarification conceptuelle et tentative d’intégration aux théories du
marketing grande consommation, Siriex et Dubois (1999) identifient trois grands types de
définitions de la confiance en marketing : a) les définitions donnant la confiance comme étant
un trait de personnalité (conception issue de la psychologie et illustrée par l’essentiel des
définitions que nous avons données précédemment) ; b) la confiance comme croyance
(conception également illustrée dans les définitions précédentes) et c) la confiance comme
étant conjointement croyance et intention de comportement17. Cette dernière conception, à
laquelle nous adhérons volontiers, confère à la confiance une nature duale, à la fois cognitive
et conative, et indique l’importance de ce concept aujourd’hui en marketing. Déterminant
d’intentions, la confiance apparaît être, à l’égal d’autres concepts clefs, un antécédent de la
fidélité, point clef des problématiques marketing contemporaines.
Un des points essentiels, à notre sens, des débats qui animent la confrontation des
concepts de satisfaction et de confiance tient à l’existence ou non d’une relation causale entre
ces derniers et la fidélité. La confiance permet-elle de mieux expliquer que la satisfaction la
16
Siriex et Dubois (1999) écrivent à cet égard : « la confiance est considérée par la majorité des auteurs comme
étant un élément clef de la transformation d’une conception transactionnelle des échanges à une conception
relationnelle. ». De manière analogue, Garbarino et Johnson (1999) écrivent que « la confiance est un élément
essentiel au succès des relations ». Le marketing relationnel peut-être défini comme étant ce qui viser à « établir,
maintenir et développer les relations avec les clients et les autres partenaires, à un certain niveau de profit. »
(Grönroos, 1990).
17
Précisément ces auteurs indiquent, se référant à Moorman et al. (1992, 1993) que : « dans une acception large
du concept de confiance, certaines recherches distinguent deux dimensions : la confiance correspond à un
ensemble d’attentes, de croyances d’une part et, d’autre part, à une intention de comportement. »
13
fidélité du consommateur pour une marque, un produit, un magasin donné18 ? Précède-t-elle,
est-elle subséquente, ou remplace-t-elle, purement et simplement, la satisfaction en tant que
déterminant de fidélité ?
Les recherches tentant de répondre à ces interrogations connaissent aujourd’hui un
regain d’intérêt fort mais n’aboutissent cependant pas à un consensus quant aux rôles
respectifs de ces deux construits comme levier de fidélisation, comme l’illustrent les
paragraphes qui suivent.
18
Autrement dit, s’il apparaît que la fidélité et la confiance agissent de manière parallèle sur la fidélité, le lien
confiance fidélité est-il plus fort que le lien satisfaction fidélité ?
19
Pour une revue détaillée, cf. Ngobo (2000).
20
A cet égard, Garbarino et Johnson (1999) écrivent «Pendant des décennies, un des concepts clefs pour prédire
le comportement des consommateurs a été la satisfaction globale. Ce changement d’intérêt vers le marketing
relationnel a élargi la liste des facteurs prédicteurs des intentions futures et intègre des nouveaux construits tels
que la confiance, et l’engagement. »
14
Ainsi, par exemple, Morgan et Hunt (1994), qui s’intéressent aux relations entre des
détaillants et grossistes, ont prouvé l’existence d’une relation positive entre confiance et
engagement relationnel ainsi que d’une relation négative entre engagement relationnel et la
désertion du consommateur. Geyskens et al. (1996) soulignent l’importance jouée par cette
variable au sein du processus de fidélité. En France, Frisou (1998) étudiant la fidélité en
business to business dans le secteur des télécoms, montre que la confiance est un déterminant
de l’engagement, positivement lié à la fidélité. Plus récemment, Constabile (1998) propose un
modèle selon lequel la confiance est le principal déterminant de la fidélité du consommateur ;
Graff et ali. (1999 ) trouvent que la confiance joue un rôle clef dans une perspective
relationnelle pour expliquer et prédire la fidélité d’entreprises clientes de banques21. Singh et
Sirdeshmukh (2000) proposent également la confiance, tout comme la satisfaction, comme
antécédent de fidélité dans une perspective relationnelle.
S’il est vrai que satisfaction et confiance ont été identifiées comme étant des
antécédents de fidélité, il n’y a pas en effet aujourd’hui consensus quant aux rôles respectifs
de ces deux variables dans les problématiques de fidélisation. Selon le contexte d’étude en
effet (perspective relationnelle ou transactionnelle, champ du marketing investigué : business
to business, grande consommation…) les rôles joués par la satisfaction et la confiance vis-à-
vis de la fidélité varient. De même, l’existence et le sens des relations causales entre ces trois
concepts ne fait pas non plus l’objet d’un point d’accord.
21
Ces auteurs vont jusqu’à suggérer l’utilisation de la confiance comme « mesure d’efficacité externe de
stratégies de marketing relationnelles. »
15
engagement. De la même manière, Constabile (1998) identifie que la relation satisfaction
fidélité est médiatisée par la confiance, qui détermine positivement l’image de l’entreprise et
la fidélité. D’autres recherches théoriques et empiriques, menées en business to business
essentiellement, aboutissent aux mêmes conclusions. Récemment par exemple, Garbarino et
Johnson (1999) montrent, que les spectateurs abonnés à des représentations théâtrales, i.e. les
spectateurs ayant une orientation relationnelle forte, « la confiance et l’engagement, plutôt
que la satisfaction, sont les médiateurs entre les composantes de l’attitude et les intentions
futures. »
Pour d’autres au contraire, l’action de la confiance sur la fidélité est médiatisée par la
satisfaction. De sorte que la satisfaction serait une variable subséquente à la confiance et non
pas l’inverse. Dans leur méta analyse, Geyskemps et al.22 dénombrent ainsi trois cas lors
desquels la satisfaction a été identifiée être une variable subséquente à la confiance. Ces
auteurs eux-mêmes, soulignant l’absence de consensus quant aux antécédents et conséquences
à la satisfaction, considèrent que cette dernière est une conséquence de la confiance, et non
pas l’inverse. Garbarino et Johnson (1999), montrent que pour la même expérience de
consommation que précédemment, « les consommateurs ayant une orientation relationnelle
faible la satisfaction globale est la variable médiatrice principale entre les composantes de
l’attitude et les intentions futures. »
La relation confiance, satisfaction, fidélité se révèle donc être complexe et nécessiter
des recherches supplémentaires afin d’éclaircir le interrelations entre ces construits. Ceci nous
semble d’autant plus important que le marketing relationnel fait aujourd’hui l’objet de
recherches et d’applications croissantes au sein des entreprises, ce qui a pour conséquence une
valorisation du concept de confiance et un repositionnement du concept de satisfaction.
c) Voies de recherche
22
Dans le cadre de cette méta-analyse, les auteurs ont passé en revue des articles couvrant la période 1970-1995,
issus des proceedings de l’AMA, de l’EMAC, de l’International Journal of Research in Marketing, de Journal of
16
sorte qu’il est souvent difficile, voire impossible de comparer et généraliser les résultats
obtenus. Ceci plaide donc en la faveur de précisions conceptuelles et méthodologiques visant
à accroître la validité de ces recherches et à permettre de situer contextuellement, le rôle
relatif de chacun de ces concepts.
- La seconde remarque est qu’il semble important d’étudier les rôles et l’impact
respectifs des construits de confiance et de satisfaction en tant que déterminant de fidélité, et
ceci, à notre sens, selon que l’on se situe dans une perspective relationnelle ou
transactionnelle (conformément aux suggestions de Garbarino et Johnson, 1999 ; Siriex et
Dubois, 1999).
Telles sont quelques-unes des pistes de recherche qu’il nous semble intéressant
d’investiguer afin de mieux comprendre l’articulation satisfaction, confiance, fidélité, et de
fournir aux managers des outils pour agir dans le cadre de stratégies défensives.
En conclusion, cette revue a montré que la satisfaction, concept complexe, est distincte
du construit d’attitude, de qualité et de performance perçues. Par ailleurs, la précision des
construits de valeur perçue et de confiance a également permis de souligner les
caractéristiques qui permettent de distinguer la satisfaction de ces derniers. Il n’en reste pas
moins que les relations causales entre satisfaction, confiance, valeur perçue et fidélité restent à
préciser, ceci afin de mieux comprendre et prédire les comportements futurs des
consommateurs, entreprises ou autres partenaires d’échanges.
Consumer Research, Journal of Business Research, Marketing Letters, Marketing Science, Journal of Marketing,
Journal of Marketing Research.
17
TABLEAU SYNOPTIQUE DES POINTS DE DIFFERENCE ENTRE LE CONCEPT DE SATISFACTION ET LES
CONCEPTS D’ATTITUDE, DE QUALITE PERCUE, DE PERFORMANCE PERCUE, DE VALEUR PERCUE, DE
CONFIANCE ET DE FIDELITE
Concept Satisfaction Attitude Qualité perçue Performance Valeur Confiance Fidélité
perçue perçue
« Il s’agit d’un «Connaissances, «Confrontation entre «Niveau perçu de «Différence (ou le «Croyance que «La fidélité est une
Définition état croyances, opinions et la perception qu’a le résultat du produit ou surplus) entre les la parole ou la réponse comportementale,
psychologique, sentiments d’un individu consommateur de la service, habituellement bénéfices perçus et promesse qu’une biaisée, exprimée par une
postérieur à ou d’un groupe qualité de service mentionné sur une les coûts perçus.» partie remplira unité de décision, en
l’achat et d’individus à l’égard rendu et ses attentes échelle objective bornée (Day, 1990) ses obligations regard d’une ou plusieurs
relatif.» d’un objet.» (Lindon, préalables vis-à-vis de par des niveaux de dans une relation alternative de marques
(Evrard, 1993) Lendrevie, 2000). cette prestation.» bonnes et mauvaises d’échange.» sur un ensemble de
(Parasuraman et al., performances.» (Schurr et Ozane, marques, et est fonction
1988) (Oliver, 1997), 1995) d’un processus
psychologique (prise de
décision et évaluation). »
(Jacoby, 1971, cité par
Odin, 1998).
Nature Cognitif et / ou Cognitif et / ou, affectif Cognitif Cognitif Cognitif Cognitif et / ou Cognitif et / ou conatif et /
affectif et / ou conatif affectif et / ou ou affectif,
conatif
Termes
comparés Performance Standards Bénéfices perçus et
perçue et - d’excellence et - coûts perçus - -
attentes performance perçue
Position / Après Avant ou après Avant ou après Avant ou après Avant ou après Avant ou après Après l’expérience de
expérience de l’expérience de l’expérience de l’expérience de l’expérience de l’expérience de l’expérience de consommation
consommation consommation consommation consommation consommation consommation
consommation
Caractéristique - Ponctuelle - Ponctuelle
temporelle (satisfaction (perspective
instantanée) Durable Durable Ponctuelle transactionnelle) Durable Durable
- Durable - Durable
(satisfaction (perspective
Cumulée) relationnelle)
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