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L'ACCOMPAGNEMENT DE L'AUTOFORMATION DANS DES DISPOSITIFS

DE FORMATION. PRATIQUES RELATIONNELLES ET EFFETS FORMATIFS


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Catherine Clénet

ADRESE/CIRNEF | « Les Sciences de l'éducation - Pour l'Ère nouvelle »

2013/2 Vol. 46 | pages 61 à 84


ISSN 0755-9593
ISBN 9782918337157
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-les-sciences-de-l-education-pour-l-ere-
nouvelle-2013-2-page-61.htm
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L’accompagnement de l’autoformation
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dans des dispositifs de formation.
Pratiques relationnelles et effets formatifs**

Catherine Clénet*

Résumé : Dans notre contribution, deux dispositifs novateurs en forma-


nous construisons une problématique tion pour adultes (formation indi-
de l’accompagnement de l’autoforma- vidualisée et formation à distance).
tion dans les dispositifs de formation Nos résultats permettent d’identifier
pour adultes. Notre démarche d’en- les facteurs de qualité d’une pratique
semble consiste à questionner l’ac- relationnelle ayant des effets forma-
compagnement de l’autoformation tifs chez l’apprenant : une relation
comme une situation formative consi- d’accompagnement, un espace-temps
dérée sous l’angle des relations d’in- construit et partagé par le groupe
fluence, au sein de collectif et dans un social faisant étayage pour une dyna-
agir communicationnel. À travers une mique d’engagement de l’apprenant
démarche inductive et compréhensive, dans ses apprentissages.
nous avons analysé des pratiques dans

Mots-clés : Accompagnement. Autoformation. Interaction. Réflexivité. Socialité.

* Docteur en sciences de l’éducation, Formatrice consultante-chargée d’enseignement – Univer-


sité de Rennes 2 et chercheuse associée au CREAD (EA 3875).
** Ce texte est la version enrichie d’une communication « L’accompagnement de l’autoformation,
médiation éducative pour une émancipation de l’apprenant » présentée par l’auteur lors du colloque
international « Formes d’éducation et processus d’émancipation » à l’université Rennes 2, en mai 2012.

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Accompagnement et autoformation, deux mots qui séduisent dans le champ de


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la formation pour adultes en France et en Europe… L’autoformation est plus
ancienne (dans les années 1960), l’accompagnement arrive plus récemment (dans
les années 1990). Nous nous sommes saisis du contexte de cette émergence pour
construire une problématique de l’accompagnement de l’autoformation dans le
champ de la formation des adultes. Celle-ci vient questionner les pratiques dans
les dispositifs de formation.
Dans cette contribution, le questionnement qui nous guide peut se formuler
ainsi : quel accompagnement des acteurs pour quel engagement du sujet et quels
effets formatifs ? Notre objectif est de rendre intelligible cette problématique en
identifiant les caractéristiques propres à ces situations formatives.
Ainsi, après avoir précisé nos approches de l’accompagnement et de l’autoforma-
tion, nous construirons notre problématique et notre méthodologie d’investigation.
Nous insisterons ensuite sur les analyses et les résultats obtenus dans nos travaux.
Dans une visée praxéologique, nous en proposons une modélisation dont nous pour-
rons nous saisir pour questionner nos environnements éducatifs universitaires.

1. Nos approches de l’accompagnement


et de l’autoformation
L’accompagnement est issu de pratiques anciennes où il reste empreint de cette
notion de parité1, d’une posture modeste, en retrait, faite pour valoriser autrui et
le protéger. Dans nos représentations contemporaines, il est investi d’une symbo-
lique positive du lien social car il participe du principe de reliance, celui de créer
des liens entre les acteurs (Paul, 2004). Selon M. Paul, cette idée de l’accom-
pagnement est liée à trois concepts clés : celui de socialisation qui identifie la
personne comme un individu social inscrit dans un parcours singulier, celui de
l’autonomisation qui place la relation comme condition d’une interaction, celui
de l’individualisation qui positionne la personne comme un passage de l’acteur
à l’auteur.

1. Étymologiquement, accompagner est défini comme suit : « Ac-cum-pagnis contient l’idée de


pain comme valeur symbolique de partage et de l’équitable, cum signifie avec et le préfixe ac-signifie
vers ». Paul M. L’accompagnement : d’un dispositif social à une pratique relationnelle spécifique.
In : Barbier J.-M., Bourgeois E., Chapelle G. & Ruano-Borbelan J.-C. Encyclopédie de la formation.
Paris : PUF, 2009, p. 620.

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Ce principe de reliance et ses concepts associés, sur lesquels repose l’émergence


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de l’accompagnement, semblent aller dans le sens du développement d’un sujet
travaillant à son émancipation. Il vient indirectement questionner la posture du
formateur et plus directement la relation pédagogique. Présent depuis plusieurs
années dans les pratiques de tutorat, du soutien, de l’aide, l’accompagnement
se développe particulièrement en formation professionnelle depuis l’entrée sur
le marché de dispositifs particuliers, nécessitant plus largement une démarche
d’individualisation de la formation2. Ces formes d’accompagnement sont celles
pratiquées par des professionnels de métier ou de l’éducation et de la formation,
que l’on appelle plus communément « des tuteurs », maîtres d’apprentissage, des
formateurs plutôt « conseillers », «médiateurs », «facilitateurs ».
L’intérêt formatif de l’accompagnement réside également dans la spécificité de
la relation qu’il met en place. En effet, même si nous convenons avec Paul (2009)
de la double dimension, relationnelle et opérationnelle de l’accompagnement,
nous insistons sur le caractère premier de la relation dans cette alchimie de la
rencontre « être avec / aller vers ». Posture protéiforme, elle a l’avantage de s’adap-
ter au singulier de la personne et de la situation ; posture relevant de l’éthique,
elle porte sur la personne un regard bienveillant et croit en son potentiel de
développement personnel ; ensemble de registres (conduire, guider et escorter),
d’attitudes d’implication et de retrait, elle crée les conditions pour laisser advenir
l’élaboration du sujet, laissant à l’accompagné un rôle central pour conduire la
situation. Plus qu’une démarche, c’est un processus et un cheminement conju-
guant un temps engagé dans la relation mais aussi un temps masqué favorable
au mûrissement et à la maturation des situations. C’est aussi, tel que l’accom-
pagnement est pensé (Paul, 2004), une relation interpersonnelle et dialogique
où l’objectif est de promouvoir la parole intersubjective à travers les situations
d’échanges, de réciprocité et de délibération, et de créer les conditions d’une
parole réflexive, référée et impliquante sur l’expérience vécue par la personne.

2. Dès les années 80, les Ateliers Pédagogiques Personnalisés (APP) ont mis en œuvre une for-
mation individualisée (cf. note de bas de page n° 16) ; la Loi du 4 mai 2004 de la Formation
Professionnelle étend l’action de formation à des activités apprenantes plus individualisées telles
que le bilan de compétences, la valorisation des acquis de l’expérience (VAE), et le « face à face »
pédagogique prend de nouvelles formes telles que le travail tutoré, le travail autonome à distance via
les technologies de l’information et de la communication.

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L’éclaircissement de l’accompagnement informel, celui qui n’est pas contrac-


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tualisé, prévu, questionne la relation d’accompagnement sous l’angle plus
anthropologique des règles de l’échange, constitutives du lien social (Fustier,
2000). Tout en venant compléter et enrichir la notion d’accompagnement, cette
investigation interroge directement la contractualisation de l’accompagnement.
En effet, si celui-ci renvoie à une posture, un positionnement éthique, de la part
de l’accompagnateur, serait-il tout simplement à classer dans le monde de l’infor-
mel ? Et dans ce cas, quelle en serait la légitimité, quel enrichissement apporte-
rait-il dans les situations pédagogiques ? Pourtant, la relation d’accompagnement
s’installe dans l’échange social et de ce fait pourrait exister dans les situations de
formation.
Cette fonction formative de l’accompagnement, tant dans le principe de
reliance que dans ses spécificités relationnelles, invite au développement d’un
adulte comme sujet (Boutinet et al., 2007). Dans le contexte de la formation,
elle semble s’accorder avec ce que nous comprenons de l’autoformation. En effet,
bien loin d’une représentation caricaturale de soloformation, l’autoformation se
conçoit dans une dynamique développementale d’un adulte en formation.
C’est également dans le contexte de l’individualisation de la formation que
l’autoformation a pris de l’ampleur. En effet, la prise en compte de l’individua-
lisation de la formation et l’intégration des technologies de l’information et de
la communication viennent bousculer les pratiques pédagogiques pour organiser
au mieux les apprentissages autonomes dans des environnements appropriés.
Cependant, plus communément définie comme la « formation par soi-même »,
l’autoformation est une notion plus largement comprise et discutée, tant sur le
plan des pratiques professionnelles que sur celui de la recherche. Sans en refaire
l’histoire et l’analyse socio-historique dans le champ international de la forma-
tion des adultes (Albero, 2009 ; Bézille, 2003 ; Carré, Moisan & Poisson, 2010),
nous voudrions insister ici sur une compréhension de l’autoformation partagée
en France notamment par les membres de l’A-GRAF3. Elle définit l’autoforma-
tion comme un processus d’engagement de la personne qui se forme dans ses
interactions avec l’environnement social, qu’il soit formel ou informel4, dans une
perspective de production de connaissances et de construction de soi.

3. Association du Groupe de Recherche sur l’Autoformation en France (http://a-graf.org).


4. Ces termes sont employés ici dans leur sens commun, rappelant que des apprentissages
peuvent se construire dans des lieux institués ou plus généralement dans l’expérience de la vie et
qu’ils peuvent être de l’ordre du visible mais aussi de l’invisible ; pour une recherche plus approfondie

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À la suite des traces laissées par ses pionniers en France5 et enrichie des appren-
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tissages transformateurs (Mezirow, 2001), cette approche se fonde sur les concep-
tions d’un développement social et émancipateur du sujet. Elle ne se limite pas au
sens commun de se former soi-même. Elle s’inscrit dans une dynamique d’autono-
misation (Eneau, 2005), caractérisée par une appropriation par l’apprenant de son
pouvoir de formation (Carré, 2005) son intention ou son désir d’apprendre. Elle
participe à la construction de la personne dans un aspect existentiel et social et plus
largement dans un processus de transformation et d’émancipation d’un sujet social
apprenant (Bézille & Courtois, 2006 ; Carré, Moisan & Poisson, 2010).

2. Notre problématique de l’accompagnement


de l’autoformation : des relations d’influence
à la création d’un espace tiers
Notre problématique s’est construite dans une approche humaniste et construc-
tiviste en combinant ces deux notions, confirmées dans les compréhensions

cf. note de synthèse : Brougère G. & Bézille H. De l’usage de la notion d’informel dans le champ
de l’éducation. Revue française de pédagogie, 2007, n° 158, pp. 117-160.
5. Trois praticiens-chercheurs en formation pour adultes, ont été les pionniers pour expérimenter
ces approches nouvelles et novatrices et ont posé les jalons du champ de l’autoformation : B. Schwartz,
directeur de l’École des Mines de Nancy entre 1952 et 1972, introduit dans la formation des ingé-
nieurs un mode de travail de recherche personnel qu’il nomme « autoformation assistée ». Son livre
« L’éducation de demain » paru en 1973 sera le catalyseur du développement de l’autoformation éduca-
tive et de l’ingénierie pédagogique tournée vers l’autoformation ; J. Dumazier, militant de l’Éducation
Populaire et fondateur de Peuple et Culture, réfléchit et expérimente, depuis la seconde guerre mon-
diale, des méthodes qui visent à utiliser, au bénéfice de l’autoformation, le « temps à soi » ou le temps
des loisirs. Il met ainsi au point la méthode « d’Entraînement Mental ». Engagé dans une sociologie
de l’autoformation, ses écrits encouragent de manière plus large une dynamique d’émancipation du
sujet en formation, par le développement d’une posture critique et la prise de pouvoir graduelle des
adultes sur les institutions dans leur processus de formation ; G. Pineau, quant à lui, enrichit le champ
de l’autoformation dans une approche centrée sur la construction de soi et donne toute légitimité à
l’autoformation existentielle dans son ouvrage « Produire sa vie : Autoformation et autobiographie » en
1983. Ce courant à partir des années 1980, développe dans le champ de la formation des adultes une
conception de la formation qui désigne le fait pour une personne de « se donner sa propre forme ». Il
s’appuie sur un modèle ternaire de la formation qui identifie trois natures d’apprentissage : l’appren-
tissage de soi comme mouvement de subjectivation, l’apprentissage des autres comme mouvement de
socialisation et l’apprentissage des choses comme mouvement d’écologisation.

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suivantes : l’accompagnement, comme la mise à disposition d’un ensemble de


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conditions pour susciter l’élaboration du sujet ; et l’autoformation, comme un
processus d’engagement de la personne qui se forme dans une perspective de
développement de connaissances et de construction de soi.
Pour mieux investiguer la relation d’accompagnement sans toutefois s’en-
gager dans une analyse socio-économique ou politique des environnements et
des pratiques, nos travaux ont cherché à comprendre les situations d’un accom-
pagnement de l’autoformation sous l’angle des relations entre les personnes en
situation6. Nous avons privilégié un regard qui n’est pas tout à fait celui de l’ac-
compagnateur, ni de l’accompagné, mais de ce qui est « entre », ce qui caracté-
rise les influences des uns et des autres dans une situation singulière et dans un
environnement particulier. Notre démarche d’ensemble considérant nos choix
théoriques issus du champ de la psychosociologie avec une orientation anthro-
pologique, consiste à questionner l’accompagnement de l’autoformation comme
une situation formative considérée sous trois angles :
– celui des relations d’influence, des processus en œuvre dans l’interaction, dans
ce qui fait incitation ;
– celui d’une socialité7, considérant les relations interpersonnelles au sein de
collectifs, de ce qui « fait société » ;
– celui d’un agir communicationnel où l’action se porte sur la réflexion et l’auto-
réflexion dans une logique compréhensive et émancipatoire (Habermas, 1987).
Pour étayer notre recherche, notre problématique se configure autour des
formes, des effets et des procédés de l’accompagnement de l’autoformation dans
les dispositifs de formation8.

6. Cependant, même si nos travaux se concentrent sur le niveau micro, celui des sujets en
interactions, nos analyses ont révélé des incidences sur le niveau méso, celui des organisations et des
dispositifs ; cf. notre contribution dans TransFormations, 2012, n° 7.
7. Selon la définition de Fustier (2000) qui entend par ‘socialité’ : « ce qui génère une certaine
forme de lien entre les hommes » (p. 9). La socialité secondaire régit le monde moderne, celui
de l’entreprise du politique et de l’économique. Elle a comme moteur l’échange contractuel - on
échange un travail contre un salaire - et met en présence des salariés, des professionnels divers (ven-
deurs/clients, soignants/soignés, éducateurs/éduqués). La socialité primaire, par opposition, régit le
monde de la communauté, la famille, le voisinage, certains groupes religieux ou militants parfois.
Elle a comme moteur l’échange par le don, développe des échanges spontanés et quotidiens.
8. Certaines de nos hypothèses se sont déjà confrontées à l’examen de l’observation, notamment
les formes et les effets.

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2.1. Des formes individuelles et collectives, formelles et informelles


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Dans le cadre de travaux antérieurs (Clénet, 2003 et 2006)9, nous avons repéré
une autre forme d’accompagnement de l’autoformation. En effet, l’accompa-
gnement ne se limitait pas à une relation entre deux personnes, accompagnateur
– formateur et accompagné – apprenant. Il s’opérationnalisait dans une relation
principalement de soutien, d’aide et d’entraide, dans des dimensions collectives
de type « classe », « groupe social », « groupe d’appartenance » et les pairs pouvaient
devenir ces accompagnateurs de l’autoformation. Nous avions qualifié cette
forme d’accompagnement de l’autoformation d’informelle, car dans le dispositif
de formation étudié, celui-ci n’était pas prévu, organisé et s’était produit sans
intention particulière de la part de l’équipe pédagogique, ne relevant d’aucune
ingénierie particulière. Ce sont des moments informels de relations sociales, des
moments « d’accompagnement quotidien » ou d’« accompagnement de la vie »
(Fustier, 2000).
Poursuivant notre réflexion sur l’accompagnement informel, l’échange
par le don et relevant d’une socialité primaire10 serait une piste à creuser pour
comprendre ce qui conduit la personne à faire ou à ne pas faire. Rapproché
de notre problématique de l’accompagnement de l’autoformation, ceci pourrait
être une possibilité de compréhension de ces règles implicites qui définissent
les apprentissages informels et auxquelles les personnes se conforment11. Et sans

9. Dans le cadre de mémoires de DESS (2000) Pour une ingénierie de l’accompagnement de


l’autoformation dans la formation par alternance puis de DEA (2005) Altérité et accompagnement de
l’autoformation dans les dispositifs de formation. Dimensions singulières et collectives, pratiques formelles
et informelles, nous avions étudié ces questions avec une population de jeunes adultes se profession-
nalisant dans le cadre d’une formation par alternance.
10. Cf. note de bas de page n° 7.
11. En accord avec les organismes internationaux, et précisé par H. Bézille (2003, p. 190),
trois types d’apprentissages sont ainsi définis :
« . les apprentissages formels, formes d’apprentissages programmés, se développant au sein des
organisations habilitées à délivrer les diplômes ;
. les apprentissages non formels, qui se développent au sein de dispositifs divers, dans la sphère
associative et dans les organismes de formation professionnelle continue ;
. les apprentissages informels qui n’obéissent pas à une logique de structuration explicitée, et
qui ne sont en général validés par aucun titre. Cette forme d’apprentissage peut avoir un caractère
intentionnel ou non, et se développe dans les activités quotidiennes liées au travail, à la famille et
aux loisirs. Le terme peut porter à confusion dans la mesure où ce type d’apprentissage s’inscrit dans
des formes culturelles et sociales et obéit à des règles implicites auxquelles la personne se conforme ».

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chercher à trahir cette liberté ou cette créativité qui émanent de ce genre d’ap-
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prentissage, il s’agirait peut-être de reconnaître ces situations d’échanges et de
pouvoir ainsi les favoriser dans nos formations.

2.2. Des effets, une pratique réflexive pour conscientiser et trans-


former
L’accompagnement tel qu’il est pensé peut contribuer à l’élaboration d’un sujet
autoréflexif, réfléchissant et délibérant, parlant et agissant (Paul, 2004). Un sujet
qui, à travers une pratique réflexive sur son expérience, entre dans une dyna-
mique d’autoformation.
Nous appuyant sur les apprentissages expérientiels et les théories de l’action
(Schön, 1994 ; Barbier, 2004)12, nos travaux antérieurs avaient permis de mettre
en évidence le développement de l’autoformation par la propre réflexion du sujet
sur son expérience professionnelle (Clénet, 2006). En allant plus en avant dans le
processus d’émancipation et en nous appuyant sur les théories des apprentissages
critiques (Mezirow, 2001 ; Habermas, 1987), nous voudrions approfondir cette
démarche réflexive sous l’angle d’un accompagnement qui viserait cet apprentis-
sage réflexif et transformateur. En effet, la production de savoirs ne se contente
pas d’un « agir pensé »13 qui limiterait la production à une restitution de connais-
sances. Elle s’intègre dans un « agir réflexif » qui suppose digestion d’information,
recomposition et restitution. Cette création nécessite une démarche de réflexion
critique incluant la réflexion sur le quoi (contenu), le comment (processus) et
le pourquoi (sens). Dans cette perspective, nous formulons ­l’hypothèse que
­l’accompagnement de l’autoformation a pour effet d’entraîner chez l’apprenant
une pratique réflexive qui lui permet de prendre conscience et de transformer ses
apprentissages.

12. Ces théories montrent que la réflexion dans et sur l’expérience professionnelle est un réser-
voir de savoirs et source d’apprentissages.
13. J. Habermas distingue deux façons d’agir, « l’agir non-réflexif » et « l’agir réflexif ». “L’agir
non réflexif ” regroupe “l’agir mécanique”, résultat de nos apprentissages initiaux tels que nous
­l’effectuons à travers les relations sociales, même s’ils sont sujets à effort et entraînement, par exem-
ple faire du vélo, faire la cuisine, et « l’agir pensé » qui permet souvenirs, analyses, jugements, inter-
prétations mais en puisant simplement dans nos acquis antérieurs pour nous souvenir. Par contre,
“l’agir réflexif ” implique nécessairement la recherche de la vérification de nos acquis antérieurs.

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2.3. Des procédés, espaces de réciprocité et/ou de médiation


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Si les effets de l’accompagnement de l’autoformation sont ceux pour l’apprenant
d’une pratique réflexive pour mieux conscientiser et transformer, quels en sont
les procédés ? En d’autres termes et dans le prolongement de notre questionne-
ment sur les relations d’accompagnement, quelles façons d’agir l’un et/ou l’autre,
les uns et/ou les autres ont-ils pour générer de tels effets chez l’apprenant ?
Nos hypothèses proposent de considérer les procédés d’accompagnement
comme des interactions qui installent un espace tiers de réciprocité et /ou de
médiation.
Les approches communicationnelles et interactionnelles (Watzlawick et al.,
1972 ; Winkin, 2000) positionnent l’accompagnement comme une relation
d’échanges, d’allers retours où la réciprocité génère affectation (Labelle, 1996) et
sous conditions, a des effets sur l’autonomisation des personnes (Eneau, 2005).
Processus d’influence, qui nous conduit à faire, mais qui peut s’entendre comme
une relation d’incitation. Et si « inciter quelqu’un à faire quelque chose, c’est
donc créer les conditions pour qu’il le fasse, on ne peut prédire à coup sûr qu’il
va le faire, mais on augmente les chances qu’il le fasse » (Wittezaele, 2007), ceci
pourrait se concevoir dans notre approche. Et cette affectation dûe à la place de
l’autre, des autres, pourrait-elle s’entendre, se comprendre comme instauration
ou création de quelque chose, d’un tiers, d’un symbole intériorisé du rôle de
l’autre (De Queiroz, 1994) ?
De même, la médiation, utilisée en pédagogie en tant que nouvelle rela-
tion, laisse place à un passage dynamique qui facilite la relation entre savoir et
apprenant. Cet intermédiaire matérialise et représente le « tiers », nouvel espace
créé qui n’est pas tout à fait le formateur ou le formé mais une création issue
de la rencontre de l’un et de l’autre, quelque chose qui est là « pour susciter la
responsabilité de l’apprenant dans l’acte d’apprendre » (Cardinet, 1995, p. 50).
En d’autres termes, la médiation définie comme un espace tiers pourrait rendre
favorable un processus d’autoformation. Peut-on alors concevoir dans cette
perspective, l’accompagnement de l’autoformation comme étant cet espace de
médiation ?
Ce tiers peut être rapproché de celui du « tiers inclus » défini par F. Lerbet-­
Sereni (1997). En effet, elle définit la relation duale comme une relation para-
doxale et réciproque qui instaure et contient un espace tiers entre deux sujets. Cet
espace tiers est le lieu où la relation peut prendre des formes d’actions différentes :
être en « inter-action » entre deux sujets dans un échange réciproque ; dépasser
ce stade tout en s’appuyant dessus pour en développer des « ­trans-­actions » sur

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lesquels les partenaires se sont explicitement entendus ; enfin, devenir « co-ac-


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tion » en élaborant conjointement des actions qui offrent des possibilités créa-
trices qui dépassent celles des personnes.

3. Nos investigations sur des pratiques


d’accompagnement de l’autoformation dans
deux dispositifs novateurs en formation pour adultes
Pour conduire nos travaux, nous avons analysé des pratiques d’accompagnement
de l’autoformation. Notre intention était de poursuivre notre compréhension de
cette dynamique en cherchant à qualifier au mieux ce qui nous semble relever
de l’accompagnement de l’autoformation dans des dispositifs de formation pour
adultes.

3.1. Les dispositifs et leurs contextes


Notre choix s’est porté sur deux terrains particulièrement novateurs en forma-
tion d’adultes prônant un accompagnement de l’autoformation ; pour l’un, il
s’agit du contexte de la formation individualisée, en particulier des Ateliers de
Pédagogie Personnalisée (APP) 14; pour l’autre, il s’agit d’une formation en ligne,
du contexte de la Formation Ouverte et à distance (FOAD)15.
En ce qui concerne l’APP, on parle “d’autoformation accompagnée”. Cette
manière de faire la formation est garantie dans un label, défini dans un cahier
des charges16. Les apprenants stagiaires travaillent en autonomie, dans un centre
de ressources, le plus souvent équipé multimédia, selon un contrat de formation

14. Cf. Carré P. & Tétart M. Les ateliers de pédagogie personnalisée ou l’autoformation accompagnée
en actes. Paris : L’Harmattan, 2003.
15. Cf. l’ouvrage du Collectif de Chasseneuil : Accompagner des formations ouvertes. Conférence
de consensus. Paris : L’Harmattan, 2001 (collection « Savoir et formation »).
16. Depuis leur création dans les années 80, un APP était conventionné avec l’état et un orga-
nisme de formation privé ou public, fixant un partenariat financier. Depuis la fin 2008, l’État
s’est désengagé des APP et a cédé le label à l’APapp, Association pour la Promotion du label APP
qui, depuis, en assure la gestion et anime ce nouveau réseau ; pour plus de précisions, cf. le site de
l’Apapp : [http://app-reseau.eu/].

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individualisé co-construit avec l’équipe pédagogique. Les formateurs sont des


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hommes ressources, experts parfois, facilitateurs, médiateurs de leurs appren-
tissages. Ils sont présents dans le centre de ressources, aident, soutiennent et
conseillent.
Le deuxième dispositif étudié relève de la FOAD. Dans le cadre de notre
étude, il s’agissait du contexte de la licence en ligne et à distance en sciences de
l’éducation de l’Université de Paris VIII. L’enseignement à distance composé
de cours en ligne est porté par une plate-forme via Internet. Il s’adresse à un
public d’adultes, salariés pour la plupart dans le secteur social et habitant sur
tout le territoire français, y compris celui de l’outre-mer. L’étudiant apprenant
compose sa licence par choix des enseignements et les valide par une production
individuelle (ou collective parfois). Trois regroupements pédagogiques dans l’an-
née universitaire sont organisés en présentiel à l’université. En ce qui concerne
proprement l’accompagnement de l’étudiant dans sa formation, la plate forme
prévoit un système de messagerie et des espaces interactifs appelés forums, où
des échanges asynchrones sont possibles. Plusieurs personnes sont responsables
de cet accompagnement en fonction des besoins spécifiques de l’étudiant : les
enseignants animent leurs cours à travers des forums de cours ; les tuteurs ont
une fonction d’appui et de soutien, aident les étudiants dans leur parcours de
formation global, également grâce à un forum tutorat ; les référents sont des
personnes ressources sur le plan administratif et technique.

3.2. Une démarche inductive et compréhensive


Dans ce travail d’analyse des pratiques, nous avons privilégié la parole des
apprenants. À partir d’une démarche inductive et compréhensive, nous avons
confronté notre cadre théorique à ces deux terrains.
La première étape d’investigation consistait à analyser des récits de pratiques
d’accompagnement d’autoformation effectués à partir d’entretiens avec des
apprenants, adultes qui évoluaient dans des organismes de formation prônant
« une autoformation accompagnée »17.

17. Nous avons interrogé six apprenants adultes évoluant dans deux organismes de formation,
notre intention n’étant pas de faire une analyse quantitative des données à partir d’un échantillon-
nage plus poussé.

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Nous avons mené des entretiens semi-directifs cherchant à obtenir une descrip-
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tion des pratiques par la verbalisation de l’expérience vécue d’appentissage, en
y intégrant également leurs opinions afférentes, leurs sentiments, leurs doutes
et leurs impressions (Vermersch, 1994). S’inspirant de l’entretien compréhen-
sif (Kaufman, 1996) la conduite des entretiens visait à installer une relation de
confiance en vue d’un réel échange entre interviewer et interviewé. L’expression
des stagiaires ainsi facilitée, ces derniers se placent dans une situation d’analyse
de leur expérience d’autoformation et des pratiques d’accompagnement qui s’y
réfèrent. L’analyse des informations recueillies à travers ces récits d’apprenants
s’est inspirée elle aussi de la démarche d’enquête compréhensive proposée par
Kaufman18. L’investigation n’avait pas pour but de prouver la viabilité des résul-
tats mais de juger de la fiabilité de notre modèle tiré de nos observations précé-
dentes et configuré par un ensemble d’hypothèses pré-établies.
Pour le deuxième terrain d’investigation issu du champ de la Formation
Ouverte et A Distance (FOAD), nous avons réalisé une observation réflexive
propre à une approche ethnométhodologique (Coulon, 1996), à partir d’une
pratique de tutorat dans le contexte de la licence en ligne de Sciences de l’Éduca-
tion, étant nous-même partie prenante en tant que tutrice19. Nous avons recueilli
des données extraites principalement des traces laissées dans les échanges que
nous avons entretenus en ligne sur les forums et avec la messagerie électronique.
Nous avons procédé à une analyse quantitative des forums et des interactions
et à une analyse plus qualitative des conversations, une analyse de sens à travers
l’étude du langage, cherchant à mettre à jour comment les interactions se struc-
turent, de quels procédés celles-ci relèvent pour construire cet espace social.
En complément de nos observations, nous avons utilisé des documents statis-
tiques qui fournissaient des données quant à l’accompagnement pédagogique
des étudiants20. Dans un souci de compréhension et d’explicitation, nous avons
confronté ces données à des grilles de lecture provenant de travaux de recherche
en matière d’accompagnement : “les dimensions du tutorat” de V. Glikman

18. Nous avons procédé à la réécoute à plusieurs reprises des entretiens enregistrés ; au final,
nous avons élaboré une fiche type de recueil de données par entretien présentant à partir du récit
les caractéristiques de la formation (situation de formation, d’accompagnement, représentations du
formateur, difficultés) et son analyse au regard des formes d’engagement de l’apprenant et de ses
impressions, ses questions suscitées par l’entretien.
19. Le groupe tutorat représentait 18 membres, 17 étudiants et la tutrice.
20. Une évaluation-questionnaire effectuée en fin de formation (2nd semestre).

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(Colloque CEMAFORAD, 2008)21 et “les registres d’accompagnement” de M.


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Paul (Paul, 2004)22.

3.3. Nos analyses


En ce qui concerne le premier terrain, les récits des adultes nous apprennent que
ceux-ci évoluent dans des lieux de formation attribuant à ces environnements
une connotation agréable, conviviale et de proximité sociale où il fait bon venir
apprendre. La prédominance est au travail autonome, qualifié comme tel car il
s’agit d’un travail personnel et individualisé, ancré dans un projet de réussite, un
contrat de formation où les apprenants font preuve de capacités d’autodirection
pour mener à bien leurs apprentissages.
Nous avons cependant repéré des risques de dérives possibles. En effet, la
pratique du travail autonome fait parfois l’effet d’une injonction où le risque
est grand pour l’apprenant de dériver vers un travail solitaire générant plutôt
abandon et démission. De même cette forme de travail personnel individualisé
porte parfois des signes d’individualisme et au-delà d’une autonomisation, nous
nous interrogeons sur les aspects de socialisation propre à une démarche d’auto-
formation.
Certes, les formateurs “hommes ressources” et “encadrants indispensables”,
selon les dires des apprenants, fournissent une aide méthodologique. Mais
cette aide principalement cognitive et métacognitive paraît insuffisante pour
apprendre à s’autoformer. Une forme d’accompagnement se retrouve « en
manque » quant à la demande d’un travail autonome par l’équipe pédagogique ;
celle-ci est perçue par les apprenants comme un abandon pédagogique et génère
démission ou travail solitaire. Elle semble insuffisante aussi quand l’organisation
libère pourtant des espaces d’expression « pour dire les choses ». Elle n’est pas

21. L’auteure propose une analyse de la fonction tutorale au travers de dix dimensions : aide à
l’orientation et au choix du contenu, soutien didactique, soutien méthodologique, soutien métaco-
gnitif, soutien psychologique et motivationnel, aide sociale et personnelle, aide “structurelle” (rela-
tive aux structures institutionnelles), aide technique, aide spécialisée liée à des besoins spécifiques
(remédiations, dyslexie, illetrisme), aide à l’organisation d’un travail collectif.
22. L’auteure, analysant le champ sémantique du verbe accompagner, en relève trois principaux
registres : conduire (gouverner, commander, diriger), guider (conseiller, éclairer, orienter) et escorter
(protéger, encourager, prendre soin).

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non plus efficace pour construire des dynamiques collectives qui suscitent des
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démarches réflexives et autoréflexives plus critiques.
Ces analyses viennent souligner la valeur ajoutée de l’accompagnement, aussi
bien dans la primauté de la dimension relationnelle que dans la qualité de la
dynamique relationnelle. Mais, en tant que pratique sociale, l’accompagnement
a des facettes issues du domaine de l’informel, c’est-à-dire du non maîtrisable, du
caché, du singulier des personnes et des situations. Ainsi, suivant la dynamique
relationnelle en situation, tant au niveau des équipes pédagogiques qu’au niveau
de la relation pédagogique, nous avons pu observer des effets provoquant une
démarche réflexive plus ou moins autoréflexive pour l’apprenant, permettant le
passage d’une aide au travail personnel individualisé à un accompagnement de
l’autoformation.
Dans l’investigation de notre second terrain, nous avons particulièrement mesuré
l’impact d’un accompagnement spécifique sur les effets formatifs des apprenants.
Les investigations à travers les correspondances de l’espace public du forum et
de l’espace privé de la messagerie électronique mettent en lumière des formes, des
procédés, des manières de faire qui caractérisent cet accompagnement tutoral :
– une relation de communication construite avec les interactions menées et
entretenues par les membres du groupe, le tuteur et quelques-uns des étudiants,
ceux-ci agissant comme relais ou complément du tuteur, constituant ainsi un
accompagnement partagé ;
– une prédominance, en matière de dimensions de la fonction tutorale, au
soutien psychologique et motivationnel, mais qui prend sens dans des combinai-
sons de dimensions, favorables à un soutien métacognitif, une aide structurelle
et technique et une aide à l’orientation. Le travail d’analyse autour des registres
de l’accompagnement confirme sa dimension relationnelle dans son enrichisse-
ment à la manière de faire, donnant priorité à l’escorte mais toujours combiné là
encore et en fonction des situations avec des registres plus opérationnels (guider
et conduire) ;
– sous l’angle de l’accompagnateur, nous avons envisagé la posture de « veille »
comme figure emblématique de cet accompagnement. En effet, veiller peut se
décliner en plusieurs mots : surveiller, éveiller et veiller sur (Paul, 2004). Allant
de la surveillance à la bienveillance, il traduit de manière visible ou non, une
expression de la sollicitude envers autrui. Être en veille, c’est être là, présent au
monde, à l’environnement et prêt à agir sur, avec. Ainsi l’accompagnateur oscille
entre des actions pro actives ou réactives, d’incitation ou de retrait en fonction
du besoin, des moments. Veiller pour un accompagnateur tel que nous l’avons

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identifié n’est pas « ne rien faire » mais bien être attentif, à l’écoute des besoins, à
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l’affût des possibles ;
– l’accompagnement tutoral a installé un lieu de socialité, construit au fil des
échanges réciproques où le ton des conversations a créé une ambiance fami-
lière, un climat de confiance propice aux apprentissages. La prise en compte des
étudiants dans leur autonomie et leur singularité, l’aide et le soutien apporté ont
favorisé leur capacité à faire des choix ; la relation individuelle et collective entre-
tenue dans la compréhension, le dialogue, la confiance et une certaine forme de
coopération à travers l’aide et l’entraide ont incité à une autonomisation des uns
et des autres et également une forme de pratique réflexive. Dans cet espace social,
chacun a repris à son compte cette identité collective. La réciprocité réalisée dans
une logique d’échanges don/contre don a créé du lien exprimé pour certains dans
une relation interpersonnelle plus intime.
Cet accompagnement tutoral s’inscrit dans le contexte de la licence en ligne
à Paris VIII. Celle-ci s’effectue dans le cadre d’une pédagogie active portée par
l’équipe pédagogique et qui défend un apprentissage de la pensée critique (Kim &
Verrier, 2009)23. Dans cette pédagogie, la responsabilité des enseignants se mesure
et s’apprécie dans leur implication, dans le projet, la préparation des cours en ligne,
l’animation des forums, l’évaluation et la validation des productions des appre-
nants. Nous avons mesuré les limites de cette implication quand celle-ci produit
pour les étudiants plutôt les effets d’une injonction. De plus, en nous appuyant
sur notre propre expérience, nous avons mis en avant une sorte de dépendance,
d’emprise même que peut produire cette implication dans la relation.
Si donc, globalement, nous pouvons considérer l’accompagnement tutoral
comme participant à cette démarche pédagogique d’ensemble, nous question-
nons cette forme de participation autour de ce que nous nommons du dépan-
nage ou de l’étayage : dépannage quand cette fonction ne servirait qu’à des fins
de régulations tant pédagogiques qu’organisationnelles pour compenser manque,
imperfection et défaillance des dispositifs de formation ; étayage quand celle-ci
tisse un contexte relationnel et opérationnel faisant appui, force et nécessité aux
apprentissages.
Par ailleurs, nous avons constaté que la relation d’accompagnement, parta-
gée avec les enseignants, trouve des effets favorables pour une autoformation

23. Il s’agit du projet de la licence en ligne à Paris VIII qui a fait l’objet de l’ouvrage en référence.
Ce projet collectif a été porté par une équipe pédagogique impliquée tant en matière d’innovations
pédagogiques que de valeurs philosophiques qui confèrent son style à Paris VIII.

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des apprenants. Comme déjà identifié dans le forum tutorat, les étudiants font
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preuve d’une autodirection dans leurs apprentissages. Ils manifestent également
une démarche réflexive plutôt métacognitive quand il s’agit de questionner leur
manière d’apprendre, et parfois plus existentielle, questionnant leurs apprentis-
sages en lien avec leur expérience (de vie, professionnelle) et leur identité.
Enfin, si l’accompagnement de l’autoformation de ces étudiants peut s’appa-
renter à une pédagogie active impliquée, dans la philosophie et la mise en œuvre
d’un apprentissage de l’esprit critique, dans ces situations, nous avons noté qu’il
relève d’une dynamique en œuvre, d’une participation à un projet, à un groupe
social, et de l’implication des acteurs, accompagnateurs (tuteurs, enseignants) et
accompagnés (apprenants).

4. Des résultats significatifs pour des pratiques


relationnelles spécifiques
Ces investigations dans chacun des terrains révèlent des données que nous avons
croisées pour enrichir et rendre intelligible notre problématique de l’accompa-
gnement de l’autoformation. Dans les dispositifs de formation, nous pouvons
ainsi identifier des caractéristiques propres à ces situations, tant sur les pratiques
relationnelles en jeu que sur les effets formatifs qu’elles génèrent.

4.1. Une relation d’accompagnement : une qualité relationnelle


interpersonnelle au sein d’un groupe social au service d’un agir
communicationnel et auto-réflexif
Nos travaux confirment l’accompagnement dans sa fonction formative. En effet,
sa spécificité relationnelle vient renforcer les situations formatives et rappelle
ainsi que celles-ci ne se passent pas de relations, relations pédagogiques, relations
sociales24. Or l’accompagnement, grâce à sa dynamique symbolique positive du
lien social, vient réveiller et bousculer la dimension relationnelle d’une situation
pédagogique.

24. On aurait pu le croire, tant sur le marché de la formation, la tendance est grande à rendre
opérationnels, à instrumentaliser et l’accompagnement et l’autoformation, prenant le risque de les
déshumaniser…

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L’accompagnement de l’autoformation tel qu’il s’est présenté dans nos travaux


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donne la priorité à un agir communicationnel et auto-réflexif (Habermas, 1987).
La dimension relationnelle première a des conséquences sur la dynamique d’au-
toformation des apprenants. Elle se manifeste dans la communication, à travers
les échanges, les moments plus individuels de face à face pédagogique ou à travers
des dynamiques collectives, de « classe » ou de groupes de travail, des rassem-
blements plus informels et spontanés. D’autre part, la qualité de la relation a
des effets sur la dynamique de changement, qui dans nos situations formatives
est constitutive d’autoformation. Cette qualité s’apprécie selon deux caractéris-
tiques : une relation incitative et une relation impliquée et affectée.
La relation se situe dans un processus d’incitation, et non d’imposition, qui va
susciter une envie de faire et réveiller la conscience réflexive (Wittazaele, 2007).
L’action porte davantage sur la réflexion et cherche à mobiliser les valeurs et
critères personnels, cherchant à dynamiser un potentiel de ressources chez la
personne. L’intention est moins de transmettre un contenu, de proposer une
solution que de favoriser l’auto-réflexion, les choix pour que les décisions se
prennent par rapport à un horizon de valeurs. Dans ces situations, la logique est
compréhensive et émancipatoire, moins instrumentale, centrée sur un but ou
une performance à atteindre par rapport à un problème défini et posé. Cepen-
dant, la dimension opérationnelle existe, quand il s’agit d’effectuer une aide
dans un but précis (technique, structurel, pédagogique). Mais, y compris dans
ces situations, nous avons mis en évidence l’importance de la manière de faire,
montrant que celle-ci dépend moins de méthodologies, de techniques ou d’ou-
tils spécifiques que d’incitations à faire et à combiner en situation. Nous avons
ainsi mesuré l’importance de l’adaptation à la situation, donnée importante dans
une relation d’accompagnement.
La relation est également impliquée, cherchant à mobiliser les personnes en
situation. Elle s’exprime à travers la posture des interlocuteurs traduisant une
démarche impliquée dans une situation interactive et un comportement affecté
et/ou concernée dans une dynamique communicationnelle. Elle se manifeste
dans le ton des échanges configurant des ambiances propices aux apprentissages
(confiance, respect). La relation d’accompagnement prend forme aussi dans
des dimensions plus collectives ou mieux, à travers des procédés d’échanges qui
relèvent du champ de la socialité. Ces procédés interactionnels et de récipro-
cité favorisent de nouvelles formes de relations, plus conviviales, d’allure fami-
liale et confidentielle. Ces échanges inventent un contexte, un construit social,
qui déplace et (re) positionne chacun comme partenaire. Ainsi se manifestent

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Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, vol. 46, n° 2, 2013

d’autres formes de relation, où l’aide et l’entraide, le soutien et les apports


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mutuels construisent une co-formation au service d’une autoformation. Ce
construit social profite aux uns et aux autres, fait étayage, selon que de besoin
dans des relations entretenues. C’est ainsi qu’il devient ‘accompagnant’ et pour
le groupe et pour les personnes dans une relation conjuguée du Je-Tu-Nous
(Labelle, 1996). Nous avons qualifié ce construit relationnel d’espace d’intimité
sociale que nous pouvons représenter dans la figure 1 suivante. 14

Procédés
Espace social
- Interactivité
- Réciprocité

Caractéristiques de la relation

- Incitative : communicationnelle
dialogique
auto-réflexive

- Impliquée : engagée
compréhensive
Qualité de la relation
affectée

- Une tonalité / un climat : familiarité


convivialité
confidentialité

- Des valeurs : confiance - respect


parité - altérité

Espace d'intimité sociale

- construit relationnel
- espace-tiers

Figure 1 : Composantes d’un espace d’intimité sociale

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Catherine Clénet

4.2. Des effets formatifs : du travail autonome, de la participation


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et de l’implication conjugués avec une démarche réflexive
L’investigation des terrains, grâce à la diversité de leurs contextes, tant dans les
finalités et les ingénieries de formation, a révélé d’autres pratiques d’autofor-
mation que celles relevant du seul travail autonome. Certes, nous avons relevé
l’intérêt des apprentissages autodirigés, notamment dans le premier terrain dans
des environnements propices tels que les APP et centres de ressources. Mais nous
avons aussi mesuré leurs limites quant aux effets autoformatifs quand ceux-ci se
vivent par les apprenants comme relevant du seul travail personnel et individua-
lisé, conférant à l’accompagnement des pratiques sociales limitées. En particulier
dans le second terrain, nous avons identifié un engagement de la personne dans
des actions, qui correspond à une autre manière de faire et une autre manière
de se former qui sont de l’ordre de la participation et de l’implication dans une
pratique sociale.
La participation est personnelle et sociale, elle est de l’ordre du faire, du parler,
du penser, du ressentir, de l’appartenir (Wenger, 2005). Elle s’apprécie dans les
discussions sur les forums, participation aux activités, aux conversations, parti-
cipation aux échanges, aux dialogues. Elle développe ainsi des apprentissages
socio-cognitifs, acquisition de savoirs, de mécanismes sociaux qui se construisent
à travers la participation à une pratique sociale, et également existentiels, favori-
sant la reconnaissance et le développement d’une identité d’apprenant, d’adulte,
ou de professionnel. L’implication, l’autre ‘manière de faire’ pour entrer en
dynamique d’autoformation, prolonge la participation par un engagement plus
personnel mettant en jeu une dimension affective et imaginaire.
Ces types d’engagement de la personne se conjuguent avec une démarche
réflexive dont la relation est le vecteur. En effet, ils s’effectuent à travers les
échanges contribuant à l’élaboration du contexte de ces situations formatives.
La démarche se décline alors selon plusieurs degrés de réflexion, allant de la
conscientisation, l’explicitation, y compris dans une dimension métacognitive
d’apprendre à apprendre, puis la réflexion critique, par le partage ou la confron-
tation avec le groupe et l’auto-réflexion, boucle réflexive supplémentaire de soi
à soi, fruit d’un apprentissage transformateur (Mezirow, 2001). La conjugaison,
de l’engagement d’une part, et de la démarche réflexive d’autre part, engendre un
processus de développement du sujet inhérent à la dynamique d’autoformation,
comme l’autonomisation, la socialisation et la subjectivation.
Nous pouvons représenter cette dynamique formative par la figure 2 suivante.

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Processus de
développement
du sujet
Autoréflexion
Subjectivation
Démarche réflexive

Réflexion critique

Socialisation
Conscientisation

Autonomisation

Travail autonome Participation Implication

Engagement

Figure Figure
2 : Pratique
2 : Pratiquede l’autoformation
de l'autoformation

Conclusion
Dans cette contribution, à partir de nos travaux sur l’accompagnement de
l’autoformation dans les dispositifs de formation, nous identifions les facteurs de
qualité d’une pratique relationnelle ayant des effets autoformatifs pour l’appre-
nant : une relation d’accompagnement avec des caractéristiques spécifiques rele-
vant de l’incitation et de l’implication, une relation qui favorise la communica-
tion, les échanges réciproques, le dialogue, un espace-temps construit et partagé
par le groupe social où se crée un climat convivial et confidentiel et où s’exercent
des relations interpersonnelles ; par là-même, la construction d’un étayage entraî-
nant une dynamique d’engagement de l’apprenant dans ses apprentissages qui se
manifeste par du travail autonome, de la participation, de l’implication conju-
gués avec une démarche réflexive.
Dans une visée praxéologique, ces résultats peuvent questionner l’ingénierie
des dispositifs de formation du point de vue :
– de la pratique pédagogique, tant sur la posture du formateur que sur la rela-
tion pédagogique, situant l’action éducative dans un agir communicationnel et
auto-réflexif ;

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Catherine Clénet

– de la prise en compte dans les dispositifs de trois dimensions : celle des dyna-
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miques individuelles et collectives où se conjuguent relations intersubjectives
et dialogiques, participation et implication dans une situation de groupe ; celle
des logiques formelles et informelles convoquant des procédés relevant d’une
socialité primaire (convivialité, réciprocité, échange et don) ; celle du processus
de développement de la personne inhérente à l’autoformation : autonomisation
– socialisation – subjectivation.

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Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, vol. 46, n° 2, 2013

Clénet C. De l’usage de dispositifs d’accompagnement de l’autoformation à


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Catherine Clénet

Schön D. Le praticien réflexif : à la recherche du savoir caché dans l’agir profession-


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Self-study support in training programmes.


Relational practices and formative effects

Abstract: In this contribution, we address questions concerning self-study


support within adult training programmes. Our overall approach consists in
questioning self-study support as a formative situation considered from the
point of view of influential relationships within groups and communicative
action. Using an inductive and comprehensive methodology, we analyze prac-
tices carried out within two innovating adult training programmes (individual
training and distance learning). Our results offer help in identifying the factors
contributing to the quality of relationships which have formative effects on
students – a support relationship, sharing space and time with a social group in
order to reinforce the involvement of students in their studies.

Keywords: Support. Self-study. Interaction. Reflexivity. Sociality.

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Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, vol. 46, n° 2, 2013

El acompañamiento de la autoformación
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en los dispositivos de formación.
Practicas relacionales y efectos formativos

Resumen : En nuestra contribución construimos una problemática del acom-


pañamiento de la autoformación en los dispositivos de formación de adultos.
Nuestro enfoque consiste en plantear dicho acompañamiento como una situa-
ción formativa considerada desde el ángulo de las relaciones de influencia, dentro
de un colectivo y en una actuación comunicacional. Desde un enfoque induc-
tivo y comprensivo hemos analizado las practicas dentro de dos dispositivos
novedosos en formación de adultos (formación individualizada y formación a
distancia). Nuestros resultados permiten identificar los factores de calidad de
una practica relacional cuyos efectos formativos en el aprendiente son : una
relación de acompañamiento, un espacio-tiempo construido y compartido con
el grupo social que apoya con una dinámica comprometida al aprendiente en sus
aprendizajes.

Palabras claves : Acompañamiento. Autoformación. Interacción. Reflexividad.


Socialidad.

Catherine Clénet. L’accompagnement de l’autoformation dans des dispositifs de formation.


Pratiques relationnelles et effets formatifs. Les Sciences de l’éducation - Pour l’Ère nouvelle, vol. 46,
n° 2, 2013, pp. 61-84. ISSN 0755-9593. ISBN 978-2-918337-15-7.

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