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Journal des savants

A.-I. Odobescu. Cursu de archeologia. Istoria archeologiei. Studiu


introductiv la aceasta Suinta. I. Antichitatea. Renasterea.
Louis Hautecoeur

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Hautecoeur Louis. A.-I. Odobescu. Cursu de archeologia. Istoria archeologiei. Studiu introductiv la aceasta Suinta. I.
Antichitatea. Renasterea. . In: Journal des savants, 1961, n° pp. 174-176 ;

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LIVRES NOUVEAUX

A.-I. Odobescu. Cursu de archeologia. Patin, Emile Egger, se lia avec Lenormant
Istoria archeologiei. Studiu intro- et Heuzey et, toute sa vie, conserva des
ductiv la aceasta Suinta. I. Antichi- relations avec les savants français, Mas-
tatea. Renasterea. 1961, Editura stiin- pero, Haussoullier, Pottier, Perrot.
tifica (Bucarest). Un vol. in-8°, 470 p. Revenu en Roumanie il s'initia à l'archéologie
nationale, voyagea à travers le pays, si
Ce livre est un hommage que les bien qu'en 1867 il fut chargé d'organiser
archéologues roumains ont voulu rendre le pavillon roumain à l'Exposition de
à l'un de leurs plus éminents Paris et de rédiger un guide intitulé :
prédécesseurs du XIXe siècle, Alexandre Les Antiquités de Roumanie.
Odobescu. Dans une introduction, suivie Désormais il mena la vie d'un
d'une bibliographie de cet auteur, M. D. travail eur affranchi de toute sujétion, suivit les
Tudor nous raconte la vie d'Odobescu, congrès, fréquenta les savants étrangers
né en 1834 à Bucarest d'un officier et et s'efforça d'établir les relations qui
d'une mère qui appartenait à une famille avaient pu exister entre les arts des
de médecins. Depuis le XVIe siècle peuples de Roumanie et ceux du
des savants roumains s'étaient intéressés continent européen. C'est ainsi qu'il étudia
au passé de leur pays et, en particulier, avec soin un vase en terre sigillée, trouvé
à ses origines romaines : Miron Costin à Blain, en Loire-Atlantique, qui portait
avait déchiffré les inscriptions latines le nom de Decebal. Beaucoup de ses
qu'il avait trouvées ; Dimitri Cantemir confrères roumains étaient jusqu'alors des
avait réuni des objets. Les découvertes amateurs ou n'étaient archéologues que
faites par les Russes en Crimée, au début par occasion ; il voulut créer une
du XIXe siècle, puis celle du trésor de véritable école roumaine d'archéologie
Pétrossa encouragèrent les chercheurs scientifique ; il fit partie en 1870 de la Société
roumains, Michel Ghika, Nicolas Mavros, académique roumaine ; il fonda une
Bolliac, Dmitri Papazoglu, etc. revue qu'il intitula Columna lui Trajan,
Élevé au collège français de Bucarest, la colonne de Trajan, afin de donner à
Odobescu vint à Paris en 1850 terminer l'archéologie de son pays le patronage
ses études et passer son baccalauréat, puis de l'empereur qui lui avait apporté la
il suivit à la Sorbonne les cours de Henri civilisation latine.
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En 1872 il prononça une série de son texte, où sont indiqués les quelques
conférences sous le titre : Coup d'œil sur ouvrages parus sur ce sujet avant 1875,
les productions artistiques du passé dans nous signifie qu'on ne saurait tenir
notre patrie et sur l'instinct artistique du rigueur à ce volume de ne pas posséder
peuple roumain. Il en profita pour tracer l'appareil critique aujourd'hui en
un tableau des connaissances alors honneur. Les quinze leçons de ce premier
acquises par ses compatriotes. tome sont consacrées à l'Antiquité et à la
Il décida d'étendre son enquête à Renaissance que Odobescu prolonge
l'Europe et à tous les temps et de montrer jusqu'au XVIIIe siècle. Elles nous montrent
les progrès de la science qu'il cultivait comment un savant de cette époque
et, durant l'année 1874-1875, fit, à la concevait la mission de l'archéologie. Il
Faculté des Lettres de Bucarest, un cours lui donne pour tâche d'éclairer les
libre sur l'Histoire de l'Archéologie, qu'il curieux sur les mœurs et les monuments
publia à Bucarest en 1877 et qui fut du passé, énumère tous les objets qu'on
réimprimé en 1919 dans ses œuvres peut assigner à cette science, aussi bien
complètes, où furent réunis les articles les cités, les états, les sociétés, les
consacrés par lui aux antiquités famil es, les individus que les arts divers,
roumaines et à l'archéologie en général ; il les architecture, peinture, sculpture, toreu-
avait donnés à sa propre revue, Romînul, tique, peinture, émaillerie, mosaïque,
à la Revista stiintifica, aux Comptes monnaies et médailles, inscriptions,
rendus des congrès internationaux manuscrits, etc.. Une telle ambition forçait
d'anthropologie et d'archéologie préhistorique, à la l'auteur à ne fournir que les cadres
Gazette archéologique, à bien d'autres généraux et les renseignements essentiels.
publications roumaines et étrangères. Il Odobescu montre comment s'est
imprima des livres comme celui sur le progressivement formée l'archéologie et il
Trésor de Petrossa, qui parut en trois trace l'évolution de cette science depuis
volumes à Paris de 1889 à 1900 avec l'Antiquité. Il distingue parmi les auteurs
illustrations. Il fit de nouveau des leçons anciens les périègètes, les techniciens, les
à la Faculté des Lettres de Bucarest, par érudits, les sophistes qui nous ont fourni
exemple en 1877 sur l'Empereur Trajan des renseignements sur le passé de leur
d'après les monuments archéologiques, pays ; il résume les apports de
sur l'Iconographie de Trajan. Sa mort, Hérodote, Polemon, Pausanias, puis de Varron,
survenue le 10 novembre 1895, auteur d'un traité Antiquitates rerum
inter ompit cette féconde activité. divinarum humanarumque, Vitruve, qui
En souvenir de ce créateur de l'école paraphrase les théoriciens grecs de
archéologique roumaine, M. Tudor a eu l'architecture, Pline l'Ancien, qui nous a
l'heureuse idée de rééditer son Histoire laissé tant de notes précieuses. A propos
de l'archéologie parue il y a plus de des sophistes il traite de l'éducation chez
quatre-vingts ans. Cet ouvrage est, sans les Grecs. Il donne en quelques pages un
doute, dépassé en certaines parties ; la aperçu de l'art hellénique et indique
petite bibliographie donnée page 56 de pourquoi furent détruites tant d'œuvres
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anciennes, fanatisme religieux, invasions ressusciter la grandeur romaine ; ceux de


barbares, crise iconoclaste. la Renaissance, subissant l'influence des
Il n'est pas étonnant qu'à l'époque où platoniciens florentins, voulurent
il écrivit, Odobescu ait été fort bref sur découvrir dans les œuvres grecques et
la science médiévale et soit en hâte arrivé romaines l'idée de la Beauté et donnèrent à
à la Renaissance. Il passe vite sur les l'archéologie un caractère esthétique
XIVe et XVe siècles, se contente de citer qu'elle conserva jusqu'à Winckelmann ;
des hommes comme Cyriaque d'Ancône, ils voulurent aussi remonter jusqu'aux
Flavio Biondo, Pomponio Leto et les sources, qu'ils fussent humanistes ou
autres grands érudits du Quattrocento, théologiens ; ils eurent cette boulimie du
qui, pourtant, fondèrent l'archéologie savoir qu'éprouvait Gargantua et ne
classique. Il aurait pu cependant utiliser furent pas moins curieux des choses
l'excellent livre de Georges Voigt sur la antiques que de la botanique, de l'anato-
Renaissance de l'antiquité classique ou le mie. Les progrès de l'archéologie sont le
premier siècle de l'humanisme, paru en résultat de tous ces faits. Odobescu parle
allemand en 1859, traduit plus tard en des débuts de la sinologie aux XVIIe et
italien, en français et qui reste fort XVIIIe siècles : or les Jésuites, qui firent
précieux. Odobescu affirme que la connaître la Chine, obéissaient avant tout
Renaissance fut l'imitation de l'Antiquité, ce qui au devoir d'évangéliser ; l'affaire des
est vrai, mais ce qui ne suffit pas à rites chinois montre comment ils avaient
définir cette époque. Il expose rapidement les étudié la religion des Célestes pour leur
recherches archéologiques du XVIe siècle, permettre d'assimiler le christianisme.
indique quelques collections, signale les Jusqu'à la fin du XVIIIe siècle les fouilles
contrefaçons, fait allusion aux études furent entreprises dans l'espoir de fournir
historiques, géographiques, juridiques, des objets aux collectionneurs et les
littéraires auxquelles se livrèrent ces statues étaient moins des témoignages du
hommes curieux du passé. Il suit leurs travaux passé que des ornements pour les palais
jusqu'aux XVIIe et XVIIIe siècles, ceux des et les jardins.
« antiquaires », Bellori, Bartoli, du père Ces quelques observations indiquent
Athanase Kircher, de Spon, de Paciaudi, les transformations accomplies par
de Scipion Maffei, des numismates, des l'archéologie depuis l'époque où l'auteur
spécialistes des antiquités chrétiennes, qui rédigea ce volume. Ce livre n'en est pas
descendirent dans les catacombes, Bosio, moins un manuel fort commode ; il
Boldetti, Furietti ; il analyse les œuvres fournit au curieux une grande quantité de
des Bénédictins, Mabillon, Montfaucon et renseignements ; il méritait d'être
parle des débuts de l'archéologie réimprimé et d'être accompagné d'une
médiévale. introduction où M. Tudor a fait revivre le
Parfois on regrette que l'auteur n'ait grand érudit roumain que fut Alexandre
pas cherché à expliquer les raisons de Odobescu.
cette activité : les érudits italiens depuis
Pétrarque furent animés par le désir de Louis HAUTECŒUR.

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