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Et Sociales – Fès
M. MARGHICH
Année universitaire 2019_2020
1
Rodière (R) & Du Pontavice (E), ‘’Précis de droit maritime’’, Dalloz, Dixième éd, p :336.
2
Suivant une étude de l’Association Française du Droit Maritime du 20 novembre 1986, parue au DMF
1986.117, 80 % du trafic s’effectuait sur des navires affrétés.
3
Avant l’entrée en service de Tanger-Med.
pourrait se contenter d’une flotte uniquement composée de navires en
exploitation régulière, forcément moins souple qu’une flotte pour partie
affrétée.
Les différents types des affrètements sont matérialisés par des Chartes-parties
(Charter party). Elles définissent les obligations ainsi que le régime de
responsabilité pesant sur chacune des parties.
4
MARGHICH (A), ‘’Le droit maritime Marocain et le régime des affrètementsn ’’ , DMF, n° 643, décembre 2003,
p :1102.
5
LAVERGNE (L), ‘’ Les transports par mer ‘’, mise à jour par LAFAGE (G.H.), 3è édition, 1968, p. 72.
a. Rôle de la charte-partie :
La BIMCO, ou The Baltic and International Maritime Council, est une association
maritime internationale et indépendante, créée en 1905. Elle compte, parmi
ses 2720 membres, des armateurs, des agents maritimes, des courtiers
d’affrètement maritime, et généralement d’autres intervenants dans l’industrie
du transport maritime. L’organisme tient à promouvoir et unifier des standards
internationaux en matière maritime réglementaire. Pour ce, il est accrédité
comme organisation non-gouvernementale (ONG), et détient le statut
d’observateur à un certain nombre d’organes des Nations-Unies, et est en
étroite concertation avec les administrations maritimes et les institutions de
réglementation.7
b. Mentions de la Charte-partie :
Les chartes-parties sont, en pratique, des imprimés pré établis. Cela n’empêche
pas les parties de compléter le document par des clauses ajoutées dans une
annexe, dite rider. Cependant, il arrive parfois qu’une contradiction se profile
entre telle mention de la charte type et telle disposition incluse dans le rider.
Dans ce cas, et conformément à la théorie générale des contrats, les juges ou
arbitres font prévaloir la clause ajoutée sur le texte de la charte type. Selon, les
juges du tribunal de commerce de Rouen, ‘’la clause manuscrite répond à un
état d’attention plus poussée des contractants et est adaptée à leur
convention‘’.9 Une sentence arbitrale rendue par la Chambre arbitrale maritime
de Paris va dans le même sens.10
Une grande variété de chartes types ont ainsi été élaborées, allant des chartes
générales telles la « Lutetia 1972 » pour toutes les cargaisons, la « Baltime
8
Rodière (R), Ouv. Cit., p : 339.
9
Trib. Com. Rouen, 18 décembre 1957, DMF, 1958.285.
10
Sentence n° 174, Chambre arbitrale maritime de Paris, le 29 mars 1976, DMF 1976.638.
1939 » pour l’affrètement à temps ou encore la « Gencon 28 » pour les
affrètements au voyage de marchandises diverses.
I. Affrètement au voyage :
11
La première charte-partie d’affrètement à temps a été publiée par la « chamber of shipping » en 1902. Elle
avait pour nom de code le nom de TIMON.
12
Bonassies (P) & Scapel (C), ‘’ Traité de droit maritime ‘’, LGDJ, Paris 2007, p :485.
13
Bonassies (P), op. cit.
plusieurs connaissements représentant la marchandise, connaissements qu’il
expédiera, directement ou par un circuit bancaire, à ses acheteurs.
Dans une telle situation, le fréteur accepte certes que l’acheteur entré en
possession des connaissements puisse invoquer contre lui le régime juridique
du transport de marchandises, mais ses relations avec l’affréteur continuent à
être régies par les seules règles de l’affrètement.
Le contrat d’affrètement peut être également recherché par le groupe OCP, par
ex, quand il acquiert une cargaison en vrac et se l’expédie à lui-même.
14
Equipement et armement du navire, paiement de l’équipage, entretien du navire, et paiement des
réparations, assurance du navire,…
15
Approvisionnement de la machine, dépenses d’escales et de ports, …
16
Cass. Fr., 24 novembre 1969, Navire Maneah, DMF 1970.336.
Parfois, la charte indique que le navire est ‘’à désigner‘’ avant telle date. Dans
ce cas, le fréteur doit impérativement désigner le navire qui réalisera
l’affrètement, et dans les délais prévus à la charte. La jurisprudence arbitrale
s’est montrée très sévère à l’égard du fréteur qui, imprudemment ou dans un
but spéculatif, se serait engagé dans un affrètement, sans avoir la certitude de
disposer d’un navire à la date prévue.17
Par ailleurs, le navire concerné doit être en bon état de navigabilité. C’est une
règle fondamentale dans toutes les chartes-parties, et constitue l’obligation
essentielle du fréteur.
La bonne navigabilité du navire est entendue, ici, sous tous ses aspects :
nautique, commercial et administratif. En effet, le bon état de navigabilité
nautique comprend une coque et structures en bon état, cales propres,
machine et équipement opérationnels, équipage compétent, soutes suffisantes
pour effectuer le voyage. Le bon état de navigabilité commerciale implique,
quant à lui, à ce que le navire soit bien équipé ‘’pour accomplir les opérations
prévues dans la charte-partie’’.18 Enfin, la navigabilité administrative renvoie à
ce que le bâtiment soit en conformité avec les prescriptions des Codes ISM et
ISPS (certificat de gestion de la sécurité et certificat international de sûreté).
Sur l’ensemble de ces points, le fréteur est tenu d’une obligation, non de
moyens, mais plutôt une obligation de résultat. Le défaut de ces obligations
peut être sanctionné, conformément aux principes du droit commun, par la
résolution unilatérale du contrat par l’affréteur.19 Ce dernier peut même
demander des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par lui, et en
particulier du coût supplémentaire du fret qu’il a dû payer pour affréter un
nouveau navire.20 L’affréteur peut même se prévaloir de l’exception
d’inexécution, refusant, par exemple, de mettre la marchandise à bord tant que
le navire n’est pas en parfait état.21
17
CAMP, sentence n° 585 du 17 octobre 1985, DMF 1986.317 ; sentence n° 819 du 25 septembre 1991, DMF
1992.580.
18
Art. 6 du décret Français du 31 décembre 1966.
19
CAMP, sentence n° 769 du 18 avril 1990, DMF 1991.119.
20
CAMP, sentence n° 530 du 5 mai 1984, DMF 1985.114.
21
CAMP, sentence n° 810, DMF 1992.440.
présentation du navire à la date fixée.22 Parfois, l’obligation du fréteur est
moins stricte lorsque la charte prévoit seulement une date estimée, en fixant
un estimated time of arrival. Dans ce cas, le navire peut prendre un certain
retard, à condition qu’il soit raisonnable. La Chambre arbitrale maritime de
Paris avait jugé déraisonnable un allongement de près de 30 jours du délai
prévisible.23 Mieux encore, la jurisprudence Anglaise s’est montrée très
innovatrice lorsqu’elle a engagé la responsabilité du fréteur, non pour l’arrivée
tardive du navire, mais pour une arrivée anticipée. Le prix de la cargaison
d’hydrocarbures mise à bord ayant été fortement augmenté du fait de cette
arrivée anticipée.24
Pour alléger cette obligation stricte qui pèse sur le fréteur, la plupart des
chartes-parties indiquent une seconde date, fixée en général 8 à 10 jours après
la date initiale, et qualifiée de ‘’cancelling date’’. Cette stipulation donne droit à
l’affréteur de résilier la charte-partie si le navire n’a pas rejoint le port de
chargement à cette date. Elle lui permet également de fixer une seconde
‘’cancelling date’’ pour maintenir la charte.
Parfois, l’arrivée du navire au port de chargement peut être empêchée par des
événements divers, grève, blocus ou guerre. La plupart des chartes se sont
attardées sur la question.
2. La responsabilité du fréteur :
Les limitations de responsabilité que peut contenir les chartes sont très mal
accueillies par les juges et les arbitres. Ces derniers peuvent aller même à
ignorer ‘’superbement’’, selon l’expression de Bonassies et Tassel, les
stipulations de la charte pour fonder la responsabilité du fréteur. 27
Une fois le navire à quai, l’affréteur est tenu de mettre à bord la quantité de
marchandises prévue par la charte. Ainsi, comme nous l’avons vu, il doit
procéder aux opérations de chargement et de déchargement du navire. Cela a
donné naissance à une pratique particulière. En effet, à ce niveau, la charte
partie fixe généralement deux éléments fondamentaux. Le premier est le
27
Cour d’Appel de Rouen, 13 juillet 1994, Navire Heidi, DMF 1995 .540.
nombre de jours alloués à l’affréteur pour procéder au chargement et au
déchargement, jours que l’on qualifie de jours de planche (en anglais, lay days).
Le second élément est le montant des sommes à verser par l’affréteur en cas
de dépassement des jours de planche, les surestaries (demurrage), le terme qui
s’applique aussi aux jours de retard (on dira ainsi que les opérations de
déchargement ont entrainé 10 jours de surestaries).
Le Professeur Bonassies28 explique, dans son traité, que l’objet du système est
de procurer à l’armateur une rémunération normale de l’exploitation du navire.
L’armateur fixe le taux du fret en tenant compte d’une telle rémunération,
prenant en considération la durée du voyage, le coût du combustible, la durée
d’une période normale de chargement et de déchargement. Par exemple, pour
un voyage devant durer 15 jours, y inclus 3 jours au chargement et 4 jours au
déchargement, il demandera un fret de 40$ la tonne, ce qui, eu égard aux
20 000 tonnes transportées, lui procurera un fret total de 800 000$. Sachant
que le coût minimum de l’exploitation du navire (amortissements, frais
d’équipage, frais d’entretien à quai) est de 30 000$/jour, il fixera le montant
des surestaries à la même somme de 30 000$/jour.29
28
Bonassies (P) & Scapel (C), Ouv. Cit., p :513.
29
Les surestaries peuvent atteindre 100 000$/jour pour un pétrolier
30
La règle s’exprime par un adage très ferme : once in demurrage, always in demurrage (un navire en
surestaries reste en surestaries).
2. Le paiement du fret :
L’affréteur doit payer le fret prévu au contrat. Le fret est normalement calculé
à la tonne de marchandises mise à bord. Parfois, quand il est reporté sur le
destinataire, le calcul se fait ‘’poids délivré’’. Il peut être aussi calculé au
volume. A noter l’importance en la matière des usages commerciaux qui
varient selon le port et selon le trafic concerné.
Certaines charges pèsent également sur l’affréteur telles que les droits de port,
les droits calculés sur la marchandise et les surestaries, tandis que le fréteur
conserve la charge des droits calculés sur le navire.
En pratique, le contrat d’affrètement est conclu pour une longue durée, 2 ans,
3 ans, voire 5 ou 10 ans.
La particularité de l’affrètement à temps, c’est qu’il entraîne un éclatement
dans la gestion du navire. Le fréteur conserve la gestion nautique tandis que la
gestion commerciale est dévolue à l’affréteur.
a. Le fréteur et le navire :
Le navire doit être aussi en bon état de navigabilité. Celle-ci revêt la même
notion qui prévaut dans l’affrètement au voyage.
31
Le coût des soutes pouvant atteindre jusqu’à 40% du coût d’exploitation du navire, coût qui incombe à
l’affréteur.
b. Le fréteur et l’exploitation du navire :
Le fréteur supporte également les coûts techniques liés au navire : coûts des
réparations pour maintenir le navire en bon état de navigabilité, les couts des
visites annuelles ou exceptionnelles de classification, coûts de renouvellement
des certificats de navigabilité nécessaires à l’exploitation du navire, …
Il doit, de plus, assumer les primes afférentes à l’assurance corps, ainsi que
celles couvrant sa responsabilité civile. En revanche, vu l’aggravation des
risques de guerre et l’augmentation des taux des primes d’assurances y
relatives, les chartes commencent à comporter des clauses interdisant aux
affréteurs de naviguer dans des zones de guerre ou d’émeutes. Par ailleurs, le
fréteur a la possibilité de souscrire clause additionnelle d’assurance pour
couvrir les risques de guerre, mais aux frais de l’affréteur.
2. La responsabilité du fréteur :
La définition habituellement reçue du port sûr est celle qui a été donnée en
1958 par le juge anglais Sellers, dans un arrêt Eastern City.32 Pour ce magistrat,
un port sûr est ‘’le port que le navire en cause peut atteindre, utiliser et quitter,
sans être exposé, sauf évènement extraordinaire, à un danger qui ne pourrait
être surmonté par une bonne pratique maritime.’’ Cette définition réserve
justement le cas de l’équipage incompétent. Un navire peut subir des
dommages dans un port, mais si ces dommages sont dus à l’incompétence de
son capitaine, l’affréteur n’aura pas violé son obligation de n’envoyer le port
que dans un port sûr. Est réservé également le cas de l’évènement
extraordinaire (évènement politique grave) qui rend non sûr (unsafe) un port
habituellement sûr.
32
Queen’s Bench, 30 juillet 1958, LLR 1958.2.17.
Cependant, sur ce dernier point, certaines décision anglaises se sont écartées
de l’arrêt Eastern City en voyant dans la clause de port sûr un engagement
‘’continu’’ de l’affréteur de ne pas envoyer le navire dans un port non sûr, alors
même que la sûreté initiale du port avait été atteinte par un évènement
imprévu. C’est ainsi que fin mai 1980, l’affréteur du navire Evia, chargé de
ciment, l’avait envoyé dans un port en Irak. Sa présence dans l’enceinte
portuaire coïncida avec le déclenchement de la guerre Irak/Iran. Il ne pouvait
quitter le port. Les premiers juges saisis (Court of appeal) décidaient alors que
l’affréteur avait violé son obligation de ‘’port sûr’’. La Chambre des Lords, le 29
juillet 1982, infirma leur décision.
b. Le paiement du fret
L’affréteur doit bien sûr payer le fret, celui ci étant généralement calculé à la
journée (3000, 8000, ou 20000$/jour). Toutefois, certains jours sont soustraits,
ne donnant pas droit à paiement. C’est la règle stipulée par la plupart des
chartes, notamment l’article 11 de la Baltime. Il énonce qu’aucun fret ne sera
dû, ou le fret payé remboursé, au cas où le navire est immobilisé pour plus de
24h par son passage en cale sèche ou autre réparation nécessaire, par une
panne de la machine, un dommage à sa coque, ou tout autre accident affectant
ou empêchant son utilisation. La clause de New York Produce est beaucoup
plus large, évoquant la grève de l’équipage, l’échouement du navire, sa saisie
(sauf au cas où elle est la conséquence d’une faute de l’affréteur), et toute
autre cause empêchant le plein fonctionnement du navire. Les illustrations
jurisprudentielles ne manquent pas.
Le fret est normalement payé mensuellement. L’obligation de l’affréteur, ici,
est stricte. Les tribunaux anglais en particulier ne tolèrent aucun retard de
paiement, ne serait ce qu’un retard minime, et ordonnent facilement la
résiliation de la charte par le fréteur. Autre garantie de paiement, le fréteur
dispose d’un privilège sur les marchandises se trouvant à bord de son navire.
2. La responsabilité de l’affréteur :