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19/04/2020 - 17:13
La pensée économique fait face à une rude épreuve. Sur fond de fragilités du
libéralisme mondialisé, la crise sanitaire du nouveau coronavirus interpelle
aussi les penseurs économiques quant à leurs capacités à apporter des
solutions concrètes dans ce contexte de «pensée unique».
Le 11 mars 2020, l’épidémie de coronavirus est devenue une pandémie, selon
l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Décrété par la majorité des pays,
l’état d’urgence sanitaire a imposé le confinement des populations. Cette
situation a empêché les économies de tourner à plein régime. Comparé à
d’autres crises sanitaires, la pandémie de Covid-19 a pratiquement perturbé
toutes les branches d’activités. Une situation inédite si on la compare avec la
pandémie de 1918, appelée communément la «grippe espagnole». C’est la
raison pour laquelle cette crise a ouvert l’appétit des économistes quant au sort
qui sera réservé à l’économie mondiale. Néanmoins, il serait un peu naïf de
réduire la réflexion liée à l’actuelle crise à un simple exercice proposant des
scénarios plus ou moins probables pour assouvir l’appétit des médias et du grand
public. Autant dire que des économistes conjoncturistes (au service des
groupements professionnels et des hommes d’État) continuent à produire une
avalanche d’analyses économiques. Ils font appel à des modélisations
statistiques pour aboutir à des recommandations concrètes et facilement
assimilables. Toujours est-il, ces modélisations souffrent majoritairement d’une
approche globale.
OPINIONS
Crise du Covid-19. Le retour de la destruction créatrice ?
La troisième voie :
l’égalitarisme libéral ou l’économie du bien-être collectif !
Les économistes ont depuis toujours montré un certain désintérêt au principe
d’égalité dans leur approche Marché, qu’ils considèrent comme relevant de la
sphère morale et philosophique. Pour L. Walras la répartition ne relève pas de
cette économie pure, de nature scientifique, mais d’une «économie sociale», de
nature morale. Son successeur, V. Pareto, conforte cette position: la situation
économique optimale est atteinte lorsqu’aucun échange ne peut plus permettre
d’augmenter l’utilité d’une personne sans que celle des autres ne diminue. La
répartition des revenus est une donnée, pas une question économique. J.M.
Keynes constate que «dans le monde économique où nous vivons […], la
répartition de la fortune et des revenus est arbitraire et manque d’équité». F.
Hayek conteste le terme même de justice sociale: vouloir corriger la répartition
des revenus issue du marché, c’est décharger l’État de sa fonction de guide. Cet
écart par rapport à la pensée économique égalitaire va rapidement être réduit
depuis qu’Amartya Sen a été «nobélisé» en 1998 pour ses travaux sur
l’indicateur de développement humain, mis en œuvre par les Nations Unies. J.
Rawls, l’un des précurseurs de la pensée égalitaire ayant emprunté plusieurs
concepts aux économistes, considère comme société juste celle où le sort des
plus pauvres sert de boussole et où l’on fait en sorte qu’il soit le meilleur
possible. Ce n’est que par cette voie qui place l’«Économie au service de
l’Homme» -et non le contraire- que nous pouvons tirer le meilleur parti des
progrès réalisés jusque-là et préserver l’avenir des générations futures.