Vous êtes sur la page 1sur 16

le délit

le seul journal francophone de l’Université McGill


delitfrancais.com
Publié par la société des publications du Daily,
une association étudiante de l’Université McGill

Dis-moi qui est


la plus belle

Newburgh s’attaque à l’AG >3


MUNACA dans l’impasse >3
Spécial théâtre >12-13
Gabor Szilasi et son oeuvre >15

Le mardi 25 janvier 2011 | Volume 100 Numéro 15 Fait ben frette depuis 1977
Éditorial
Volume 100 Numéro 15

le délit
Le seul journal francophone
de l’Université McGill
rec@delitfrancais.com
rédaction

Le débat se poursuit
3480 rue McTavish, bureau B•24
Montréal (Québec) H3A 1X9
Téléphone : +1 514 398-6784
Télécopieur : +1 514 398-8318
Rédactrice en chef
Mai Anh Tran-Ho Quant au quart des frais à payer à partir ces directement. Où va notre argent? À rec@delitfrancais.com
Le Délit de septembre prochain (du montant de trial l’heure actuelle, aucun des services ne sem- Mai Anh Tran-Ho
member, je n’avais pas été claire sur ce point), blent nécessiter un apport monétaire de la Actualités
Vous qui pensiez que le bilinguisme changeront-ils notre statut présent et notre part des journaux francophones. Le fil de actualites@delitfrancais.com
était un sujet dépassé, détrompez-vous. pouvoir? La constitution de la CUP stipule presse peut être supporté gratuitement par Chef de section
Que de réponse à mon dernier éditorial que “trial membre do not have voting right”. des programmes tel Publish2. En ce qui Emma Ailinn Hautecœur
avons-nous reçues! On m’avait déjà affirmé qu’il était inutile de concerne les services judiciaires, l’avocat Secrétaire de rédaction
Cette semaine, j’aimerais exposer plus m’inquiéter, que les journaux francophones actuel de la CUP ne connaît ni la loi québé- Francis Laperrière-Racine
longuement mes attentes par rapport à la étaient considérés comme des full-mem- coise ni le droit civil et, de surcroît, ne parle Arts&Culture
Presse Universitaire Canadienne (PUC). bres, mais permettez-moi de douter de cette pas français. De plus, Le Délit, et peut-être artsculture@delitfrancais.com
La proposition que rappelle Anaïs bonne volonté, du moins dans la pratique. d’autres journaux, ont leur propre avocat. Chef de section
Elboujdaïni (publiée en commentaire Cartons de vote manquant à la semi-pléniè- Les récompenses journalistiques offertes Émilie Bombardier
sur notre site) «de scinder les deux orga- re, absence de onze journaux francophones par la CUP-PUC ne devraient pas sortir de Secrétaire de rédaction
nisations CUP-PUC à la manière des (sur quatorze) du système électronique per- nos poches puisque la CUP trouve habi- Annick Lavogiez
deux chaînes d’informations nationales, mettant la soumission de propositions à la tuellement des organisations qui veulent Société
Radio-Canada et CBC» mérite réflexion, plénière, les exemples ne manquent pas. On bien la commanditer. De plus, la création societe@delitfrancais.com
mais ce n’est pas parce que le nom offi- me répond que c’est parce que notre statut d’un poste à temps plein pour la PUC est Anabel Cossette Civitella
ciel inclut désormais «Presse Universitaire «n’est pas clair». Il serait essentiel de décider conditionnée par une bourse pour laquelle Xavier Plamondon
Canadienne» que cela distribue équitable- alors de notre statut réel et de nos pouvoirs la PUC applique en septembre. Coordonnatrice de la production
ment les pouvoirs. La PUC serait-elle tou- et que ce soit écrit noir sur blanc avant que Bien que la volonté ne manque pas, production@delitfrancais.com
jours considérée comme une région sous la toute discussion soit entamée. il reste encore du chemin à faire. Le débat Mai Anh Tran-Ho
jurisprudence de la CUP? Enfin, attaquons le plan des finan- reste ouvert. x Coordonnateur visuel
visuel@delitfrancais.com
Raphaël Thézé
Infographie
RÉPONSES À L’ÉDITORIAL DU 18 JANVIER 2010 infographie@delitfrancais.com

Erin Cauchi: «Unissons nos forces» Alexandre Breton


Irena Nedeva
Coordonnateurs de la correction
correction@delitfrancais.com
J’aimerais commencer en remerciant Boileau à la conférence. J’étais dévastée d’être certaines se déroulant en français. Pour la
Anselme Le Texier
Le Délit de leur éditorial du 18 janvier. Il témoin des événements qui ont suivi sa pré- première fois également, des anglophones
Élise Maciol
s’agissait de la première fois où un journal sentation sur Twitter. Je veux être claire à ce avec une bonne connaissance du français
Coordonnateur Web
étudiant francophone écrivait sur la Presse sujet: notre organisation perçoit d’un très ont participé à des conférences en français.
web@delitfrancais.com
Universitaire Canadienne. En tant que jour- mauvais œil toute activité diffamatoire. Nous Beaucoup de chemin reste à faire, mais pour
Mathieu Ménard
naliste, j’apprécie le regard critique que vous sommes très reconnaissants de la présence la toute première fois, nous constatons une
Collaboration
avez porté sur notre conférence nationale de chacun des conférenciers à nos événe- réelle ouverture.
Marion Andreoli, Andreea Iliescu,
[...]. Je trouve encourageant de constater que ments, et sommes conscient de l’effort et du [...] Nous prévoyons déjà une rencontre
Christophe Jasmin, Anthony Lecossois,
la communauté journalistique francophone travail qu’ils mettent dans leurs interven- pour le 5 mars prochain à Montréal, ren- Camille Lefrançois, Annie Li, Margaux
s’implique activement au sein de notre orga- tions. Comme vous l’avez mentionné, une contre durant laquelle nous poursuivrons la Meurisse, Andrea Saavedra, Jean-
nisation. motion a immédiatement été présentée (et discussion et établirons les lignes directrices François Trudelle, Audrey Yank
Plusieurs points de cet éditorial, toute- acceptée) afin que les événements ne passent du développement de la PUC. [...] Nous es- Couverture
fois, mériteraient qu’on s’y attarde davantage pas inaperçus. Cette motion nous a permis pérons que les journaux francophones mem- Raphaël Thézé
[...]. d’insister sur l’usage responsable et respec- bres et non-membres y seront aussi, afin que
Le principal obstacle auquel nous nous tueux des médias sociaux par nos membres. tout soit mis en œuvre pour aller de l’avant.
bureau publicitaire
sommes heurtés depuis qu’il a été résolu, en Les interventions faites sur Twitter ne repré- [...]
3480 rue McTavish, bureau B•26
2004, que l’organisation devienne bilingue a sentent donc nullement le point de vue de Je ne saurais insister suffisamment sur
Montréal (Québec) H3A 1X9
été que la CUP était depuis ses débuts gérée notre organisation, et sont celles de quelques l’importance d’unir nos forces, de partager
Téléphone : +1 514 398-6790
par des anglophones. Conséquemment, ils délégués qui, semble-t-il, manquent de juge- nos idées et d’ouvrir de nouvelles portes pour Télécopieur : +1 514 398-8318
avaient tendance à transposer leurs propres ment et de respect. la presse étudiante. C’est là la mission de la ads@dailypublications.org
besoins et leurs propres attentes aux mem- Ce qui ressort plus que tout de cette CUP depuis ses débuts, et c’est dans cette Publicité et direction générale
bres francophones. [...] Je ne chercherai pas conférence, à mon avis, ce sont toutes les optique que nous souhaitons développer la Boris Shedov
à excuser les échecs qu’a essuyés notre orga- petites victoires que nous avons pu célébrer. PUC, son pendant francophone. [...] Gérance
nisation dans le passé quant au bilinguisme La première a eu lieu lors de la première Pierre Bouillon
[...]. C’est avec le mandat d’enfin développer [...] conférence, [donnée par] Marie-Maude Erin Cauchi Photocomposition
le bilinguisme que j’ai été élue la 73e prési- Denis, journaliste pour Enquête [...]. Après Présidente, Canadian University Press/Presse Mathieu Ménard et Geneviève Robert
dente de la CUP. À partir de ce moment, j’ai sa présentation, une période de question Universitaire Canadienne The McGill Daily
résolu de ne pas laisser les erreurs du passé s’est tenue dans les deux langues et, pour Veuillez noter que cette lettre n’a été ni éditée ni cor- coordinating@mcgilldaily.com
limiter les progrès à venir. Au contraire, il faut la première fois, les journalistes francopho- rigée par nos soins, mais a été révisée par Catherine Emilio Comay del Junco
apprendre de ces erreurs pour mieux avancer. nes et anglophones se sont mêlés. Ce soir- Côté-Ostiguy, directrice nationale francophone de la
J’étais contente que vous souleviez la là, j’ai surpris plusieurs conversations entre CUP-PUC. Retrouvez l’intégralité de la lettre en Conseil d’administration de la
controverse liée à la participation de Josée des membres francophones et anglophones, ligne au delitfrancais.com. Société des publications du Daily (SPD)
Emilio Comay del Junco, Humera Jabir, Anthony

Will Burton: «Claquez la porte»


Lecossois, Whitney Malett, Sana Saeed, Mai Anh
Tran-Ho, Will Vanderbilt, Aaron Vansintjan, Sami
Yasin

J
’étais entièrement d’accord avec les pro- Il me semble que ce sentiment vaut ni en argent, ni en efforts. Or, la CUP en L’usage du masculin dans les pages du Délit vise à alléger le
pos avancés par Mai Anh Tran-Ho dans quand même quelque chose. Je me de- demande trop des deux. texte et ne se veut nullement discriminatoire.
son éditorial au sujet de la Canadian mande quelle importance les journaux Je vous encourage à claquer la porte Les opinions exprimées dans ces pages
University Press (CUP) («Bilinguisme à sens francophones en-dehors du Québec –Le de la CUP. Le jeu n’en vaut plus la chan- ne reflètent pas nécessairement celles de
l’Université McGill.
unique», 18 janvier). Front à Moncton, Le Réveil à St-Boniface, delle.
La CUP, même pour les journaux de etc.– accordent à une telle institution. Le Délit (ISSN 1192-4609) est publié la plupart des mardis par la
Société des publications du Daily (SPD). Il encourage la repro-
langue anglaise, est anachronique. L’époque Au risque d’avoir l’air d’un privilege Will M. Burton duction de ses articles originaux à condition d’en mentionner
où l’on avait besoin de ses services –un fil de denying dude –l’anglophone qui conseille L’auteur est l’ancien chef de pupitre la source (sauf dans le cas d’articles et d’illustrations dont les
droits avant été auparavent réservés, incluant les articles de
presse, un lobby...– est révolue, et sa seule les francophones–, je pense qu’une sorte «Commentary & Compendium» du McGill la CUP). L’équipe du Délit n’endosse pas nécessairement les
utilité aujourd’hui est de véhiculer un sen- d’institution communautaire, quelque Daily, et était membre du conseil d’administra- produits dont la publicité paraît dans ce journal.Imprimé sur du
papier recyclé format tabloïde par Imprimeries Transcontinental
timent d’appartenance à une communauté. chose qui unisse les journaux étudiants tion de la Société des publications du Daily d’oc- Transmag, Anjou (Québec).
Le Délit est membre fondateur de la Canadian University Press
Sentiment plutôt coûteux, étant donné le de langue française, serait un beau projet. tobre à décembre 2010. Les opinions exprimées (CUP) et du Carrefour international de la presse universitaire
montant des frais d’adhésion à l’organisme. Mais il ne faut pas que cela coûte cher – ici sont uniquement celles de leur auteur. francophone (CIPUF).

2 Éditorial x le délit · le mardi 25 janvier 2011 · delitfrancais.com


CAMPUS
Actualités actualites@delitfrancais.com

Première ronde: MUNACA contre McGill


MUNACA se retrouve au pied du mur et la première rencontre est annulée.
Emma Ailinn Hautecoeur de l’information sur les salaires La prochaine rencontre qui
Le Délit leur a été envoyée en format PDF, devait avoir lieu le 26 janvier a
mais qu’elle était incomplète et donc été annulée par McGill, face

L
es négociations entre que le document était verrouillé, à l’impossibilité de MUNACA de
McGill University Non- ce qui fait que les chiffres ne pou- produire un document de propo-
Academic Certified vaient pas être manipulés. sitions complet, et reportée au 7
Association (MUNACA), le syndi- Ce différend a toutefois en- février.
cat des employés non-universitai- rayé tout le processus de négo- En ce moment, MUNACA
res de McGill, et l’administration ciation, car McGill, pour sa part, encourage aussi ses employés
ne sont toujours pas entamées. refuse d’entamer les négociations à porter plainte contre McGill
Sur le site des ressources humai- sans que toutes les propositions pour des questions d’équité sala-
nes, on peut lire un court commu- de MUNACA leur soient transmi- riale. «Je pense que les demandes
niqué décrétant un «faux départ ses. Monsieur Roseman note qu’il dans la loi aux employeurs sont
aux négociations». est pourtant de coutume de com- assez claires. McGill est obligé
Ces négociations ne peuvent mencer par négocier les clauses d’afficher et ils ne l’ont pas fait
se faire sans que MUNACA fasse non-monétaires avant de passer selon nous. Si les membres sont
part de ses propositions concer- aux propositions d’ordre moné- d’accord avec cette évaluation,
nant les salaires et les autres requê- taire. Une partie des propositions ils peuvent déposer des plain-
tes d’ordre monétaire. MUNACA de MUNACA est déjà disponible tes,» remarque M. Roseman. MUNACA informe ses membres sur l’équité salariale
est cependant dans l’impossibilité sur leur site internet. Elles résu- McGill n’a effectivement pas affi- Raphael Thézé
de le faire, n’ayant pas accès aux ment les inquiétudes du syndicat ché la procédure de plainte pour
informations nécessaires. Comme face aux pratiques de recrutement l’équité salariale sur son site des res dans les bénéfices, de retard règne entre les opposants risque
le relate David Roseman, de de McGill qui ne priorise pas l’an- ressources humaines, mais c’est des augmentations promises par d’être prolongé.
MUNACA, «c’est l’employeur qui cienneté des employés, ni leur ap- aux travailleuses de porter plainte McGill et de décalage salarial par Lynne Gervais, vice-prin-
a toutes les informations nécessai- partenance au syndicat. C’est une pour recevoir une compensation rapport aux employés non-uni- cipale adjointe des ressources
res, comme l’horaire des employés, pratique courante que d’engager rétroactive. versitaires des autres universités. humaines en charge des relations
etc...» Ils désirent ces informations des employés occasionnels, non Cela fait à peu près deux Une série de grèves et de manifes- avec les médias dans cette affaire
pour «pouvoir calculer ce qui est affiliés à MUNACA, ce qui permet ans que MUNACA est en conflit tations ont finalement mené à la (selon Richard Comeau, chef né-
raisonnable selon les données.» à l’administration d’économiser avec l’employeur des salariés qu’il situation actuelle. Il n’est pas dif- gociateur pour McGill) a refusé
Roseman confirme qu’une partie des fonds. représente, à propos de coupu- ficile d’imaginer que le froid qui de communiquer avec Le Délit. x

CAMPUS

Newburgh veut supprimer l’AG


À quatre mois de la fin de son mandat, le président de l’AÉUM lance ce chantier qu’il entend mener à bien
«pour rétablir la démocratie»
Anthony Lecossois repenser l’AG, dont chacun s’ac- vent.» Myriam Zaidi, VP externe, dre autrement», il ne regrette en en ligne est une voie de consulta-
Le Délit corde à dire qu’elle a grand besoin dont le bureau fait face à celui du rien l’objet de son projet. «Depuis tion beaucoup plus efficace.
de réformes. président est «étonnée». quatre ans, la réforme n’avançait Myriam Zaidi, se désolidarise

L
e débat latent sur l’intérêt Très vite, il devient évident que La motion sera donc débat- pas et je ne pouvais pas prendre le officiellement du reste du comité
de tenir des assemblées gé- Zach Newburgh est à l’origine de tue lors du prochain conseil, le risque de laisser l’AÉUM opérer de exécutif, via un billet publié en
nérales (AG) bisannuelles cette motion qu’il entend soumet- 3 février. En attendant, chacun façon aussi antidémocratique un ligne. Selon elle, «les étudiants
a été relancé la semaine dernière, tre au référendum d’hiver. Celui- tente de prendre ses propres ini- an de plus. Quelqu’un devait agir.» avaient au moins un forum où ils
atteignant alors une intensité iné- ci envoie un courriel à la presse tiatives de consultation en ur- Le président estime que «l’AG avaient le pouvoir de changer les
dite lorsque Zach Newburgh, pré- étudiante pour s’expliquer et de- gence, via Facebook. Erin Hale est une instance inefficace, fon- choses et de présenter des mo-
sident de l’AÉUM, a soumis une mande à ce qu’une entrevue soit de Mobilization McGill était la damentalement antidémocratique tions. Maintenant, ne vous atten-
motion proposant leur abolition organisée. Du côté des conseillers première, dès lundi soir, à créer et redondante.» Il y a au moins dez pas à ce qu’il y ait plus d’ef-
pure et simple. Depuis, les diffé- et des VP de l’AÉUM, qui avaient l’événement «Sauvons notre AG». consensus sur un point: la fré- forts de faits pour la promotion de
rentes forces politiques du cam- été tenus à l’écart de cette initiative, De son côté, Maggie Knight orga- quentation minimale est la premiè- cette AG, étant donné que trois des
pus s’agitent autour de deux pro- c’est l’indignation. nisait avec Eli Freedman, repré- re de ses faiblesses. Il est vrai que six membres du comité exécutif
blématiques distinctes: la forme et Maggie Knight, représentante sentant de la faculté de gestion et le quorum, bien qu’extrêmement [Zach Newburgh, président, Tom
le fond. des clubs et des services regrette Amara Possian, représentante de la limité (cent personnes), est tou- Fabian, VP interne et Nick Drew,
Au milieu d’un courriel que «ni les personnes élues pour faculté des arts, une discussion en jours difficile à atteindre. Pauline VP finance et opérations, NDLR]
envoyé le lundi 17 janvier par le représenter les étudiants, ni les ligne sur le sujet. Zach Newburgh, Gervais, gestionnaire générale de ont pris l’initiative d’abolir cette
co-président du Conseil législa- étudiants eux-mêmes n’[aient] été quant à lui, propose un forum de l’AÉUM depuis 2004, se rappelle: instance.» x
tif de l’AÉUM, Raymond Xing, consultés pour la rédaction de cet- consultation pour récolter l’avis «Je n’ai connu que deux AG bien
une phrase attire l’attention des te motion. C’est fâcheux quand on des étudiants. fréquentées.» L’une était liée à une DATE À RETENIR
conseillers: «Le motion concer- sait que dans cette affaire, la pro- Eli Freedman conclut: «Il est grève générale, l’autre, au conflit Forum consultatif organisé par
nant l’abolition de l’AG sera distri- blématique centrale est la consul- clair que nombre d’entre nous israélo-palestinien. Zach Newburgh, mercredi 26
bué [...] pendant le conseil.» tation des étudiants.» sommes en désaccord avec la Zach Newburgh propose janvier de 15h à 16h30, salle Lev
À ce stade, personne ou pres- Quand on l’interroge sur la substance de cette question de ré- donc de remplacer l’AG par une Bukhman.
que ne sait vraiment d’où cela raison pour laquelle il a gardé ce férendum. Maintenant nous avons réunion annuelle qui serait limitée Conseil législatif de l’AÉUM, jeudi
vient, ni même de quoi il s’agit. projet secret, Zach Newburgh se pour défi de trouver une solution à un rapport présenté par le pré- 3 février à 18h, salle Lev Bukhman.
Les plus surpris sont les membres défend de toute tentative de dis- en sept jours.» sident et les VP de l’association. Prochaine (et dernière?) AG, jeudi
du comité de direction (le steering simulation. «Tous les VP sont très Si Zach Newburgh estime Aucune motion ne pourra y être 10 février de 18h à 21h, audito-
committee) qui étaient chargés de occupés et on ne se voit pas sou- qu’il aurait peut-être pu s’y «pren- votée. Il estime que le référendum rium Adams.

x le délit · le mardi 25 janvier 2011 · delitfrancais.com Actualités 3


CAMPUS

Les services alimentaires passent à la casserole


M
organ Boenke, étudiant affecteraient notre approvi- tinent. Ce contrat de confidenti- of our duties, except to the other mem- peut-être être révisées par des
à la maîtrise en bio- sionnement alimentaire, mais alité fait partie de la loi 65.1, une bers of this Selection Committee, the mathématiciens.
logie, a siégé comme savais-tu ce qu’il allait advenir loi provinciale concernant l’em- Secretary of the Committee and the LD: Finalement, pourquoi
représentant des étudiants de des cafés des Facultés de droit bauche d’individus par des ins- ministerial authority.” avez-vous choisi Aramark?
deuxième cycle au comité chargé et de biologie? Lorsque tu étais titutions publiques. Cependant, LD: Qui était ultimement MB: Au cours de notre dernière
d’évaluer les offres de compa- représentant au comité, est-ce puisque notre contrat avec responsable du modèle d’éva- réunion, nous avons voté unani-
gnies alimentaires pour remplir quelque chose qui t’a empê- Aramark ne scellait pas une ven- luation des candidatures? mement pour Aramark. Je sup-
les besoins du campus de l’uni- ché d’informer les étudiants te, mais un projet générant un re- Est-ce que, lors de sa création, pose que chacun d’entre nous
versité McGill. Déchargé de ses des problèmes d’évaluation, venu, nous n’étions pas tenus de il y a eu des désaccords entre avait de bonnes raisons de choi-
fonctions depuis peu, il a écrit de vote et de transmission des respecter ce contrat lors de notre les représentants étudiants et sir cette compagnie. Je le répète,
une lettre ouverte publiée sur le comptes-rendus? sélection. Je ne sais pas en quoi le personnel sur les critères nous n’étions pas tenus de res-
site du McGill Daily pour dénon- MB: On m’a informé assez cela affecte la validité du contrat d’évaluation ou sur d’autres pecter les évaluations numéri-
cer plusieurs failles dans le pro- tôt des changements qui allaient de confidentialité. Peut-être que aspects du modèle? ques pour choisir le candidat
cessus de sélection de la compa- se produire dans les Facultés de ça l’annule. MB: Le concept du modèle idéal. Globalement, je pense que
gnie qui remplirait ces fonctions. droit et de biologie: en septembre LD: Si l’administration a d’évaluation était la responsabili- tout le monde voulait qu’il y ait
Notamment, il a trouvé le man- ou octobre 2009. À l’époque où bien modifié ce contrat, com- té de tous les membres du comi- des changements. Ça n’a pas été
dat du comité trop limité, la plu- le comité commençait à se for- me tu le dis, quelle est l’éten- té. Il a été créé via un processus un choix facile pour moi; c’est
part des décisions ayant été pri- mer, on avait déjà inclus ces em- due de cette modification? démocratique et, bien sûr, cer- d’ailleurs pour ça que je suis
ses avant sa création, et le temps placements dans le contrat. MB: Il y a une sous-partie tains détails ont été plus conten- revenu sur ma décision. La pro-
alloué pour prendre les décisions, Je pense que le plus gros du contrat de confidentialité (ci- tieux que d’autres. Mais finale- chaine fois, il faudrait s’y prendre
trop court. Il a aussi remarqué problème, c’était que nos rôles dessous) qui est assez ambiguë. ment, nous nous sommes rendus plus tôt pour déterminer des cri-
les lacunes du système d’évalua- n’étaient pas bien définis, étant De manière très littérale, je ne comptes que nous n’étions pas tères d’évaluation plus adéquats,
tion, de votes, et de rapports à donné que c’était la première fois serais pas autorisé à vous dire où contraints par le modèle d’éva- car les candidats sont souvent
la communauté universitaire. Il que des étudiants prenaient part à se trouvaient les toilettes du bâti- luation à cause de la nature du très similaires.
s’est donc senti obligé de faire lui ce processus. Je pensais que mon ment des services alimentaires. contrat. Les problèmes les plus LD: Dans le nouveau
même un compte-rendu des faits. rôle était de trouver une manière D’un autre côté, je pourrais sou- importants sont apparus au ni- contrat de 2013, y a-t-il une
Depuis la fermeture du Arch d’évaluer les offres et de contri- tenir que quelque chose d’aussi veau de l’application du modèle clause d’exclusivité, comme
Café, les services alimentaires de buer à la mettre en pratique. Je insignifiant me pousse à diffuser d’évaluation parce qu’appliquer dans le contrat avec Aramark?
McGill sont dans le radar des me rends compte aujourd’hui ces informations, ou qu’acquérir nos critères à l’information reçue MB: Je ne possède pas cette
étudiants. Le manque de consul- que mes responsabilités étaient et assimiler de l’information sont par les candidats était presqu’im- information.
tation et le mécontentement des en fait bien plus grandes que ce deux choses différentes. Mon in- possible. LD: Rendre le processus
étudiants sont de plus en plus que je pensais. Les contrats de terprétation du document est que Chaque membre de l’équipe transparent est une chose,
évidents. Le Délit a voulu en sa- confidentialité avec les services toute information concernant devait créer une grille d’évalua- mais trouver des moyens pour
voir plus sur celui qui a vendu alimentaires étaient ambigus, ce les compagnies ayant répondu à tion numérique, puis nous nous que les étudiants puissent vé-
la mèche afin de renverser cette qui fait que je ne savais pas trop l’appel d’offre, est couverte par le mettions d’accord sur chaque ritablement influencer les pro-
tendance. ce que je pouvais dire ou non. contrat de confidentialité, mais critère d’évaluation. Nous avons cessus d’évaluations, de parti-
Le Délit: Pourquoi rendre LD: Veux-tu partager avec pas ce qui concerne la perfor- du arrondir certains chiffres ou cipation et de communication
ces informations publiques? nous d’autres informations mance du comité. Par contre, je en faire une moyenne, et cela se du comité en est une autre.
Morgan Boenke: Seulement que tu n’avais pas le droit de ne suis pas avocat. voit dans les documents officiels. Qu’espères-tu pour 2013?
deux étudiants étaient impliqués divulguer lorsque tu étais tenu “Moreover, we will not reveal Ce qui m’embêtait, c’était l’écart MB: J’espère que cette obli-
dans le processus d’appel d’of- à la confidentialité? and will not make known, unless we possible entre les valeurs moyen- gation de partager les informa-
fres et d’évaluation des services MB: Oui, mais aujourd’hui, are bound to do so, anything that we nes et les moyennes elles-mêmes. tions soit explicitement incluse
alimentaires. Toutefois, tout le je trouve que ce n’est plus per- will have learned in the performance Les méthodes de calcul devraient dans les responsabilités des étu-
corps étudiant est affecté par les diants siégeant au comité. Cela
décisions prises par le comité assurera un certain équilibre et
duquel j’étais membre. C’est à permettra de rendre transparent
cause de cet écart que j’ai trouvé le processus de comptes-rendus.
important de sensibiliser autant Nous avons besoin d’une
de monde que possible à ce sujet. plus grande interaction entre les
Je n’étais pas d’accord avec étudiants, les services alimen-
les déclarations du seul autre taires et le Conseil d’Administra-
membre du comité à avoir ren- tion (CA). Il faudrait également
due publique son opinion sur la qu’il y ait plus de participation
question –à savoir, M. Laperle étudiante bien avant que les déci-
pour l’édition du 23 avril 2010 sions ne passent par le comité.
du McGill Reporter. M. Mendelson Le premier de nos soucis
adoptait le même point de vue sera de voir quels emplacements
que M. Laperle –voir l’édition du ne correspondent pas aux be-
2 septembre 2010 du même jour- soins des étudiants et de résou-
nal. Il était évident que les parti- dre ce problème. Évidemment,
cipants auraient un avis différent cela ne peut être réalisé que si
de ce qui a été rendu publique. plus d’étudiants participent aux
Je n’ai aucun problème avec ça. décisions. Pour ce qui est du café
Cependant, j’ai des raisons de de Stewart Bio, par exemple, j’ai
croire qu’il y a un certain écart appris que c’était des associations
entre les décisions prises pendant étudiantes qui s’occupaient des
les réunions du comité et les in- contrats avec les entreprises. Par
formations transmises à l’admi- conséquent, la participation étu-
nistration. diante est essentielle. Les modèles
Bref, j’ai décidé de rendre ces administratifs actuels des services
informations publiques, car pour alimentaires peuvent désormais
résoudre un problème, il faut se permettre de prendre des déci-
posséder un certain sens de la sions avec ou sans consultation
communication, et je n’en voyais des étudiants, selon leurs politi-
aucun jusqu’ici. ques de gérance. Celle-ci dépend
LD: Tes anciens em- seulement du CA. Si nous som-
ployeurs aux services d’ali- mes, comme nous le proclamons,
mentation de McGill ont-ils une institution qui se préoccupe
réagi à ta lettre? principalement des étudiants, de
MB: J’étais bénévole pour ce telles demandes envers le CA de-
comité, donc mon travail n’était vraient par conséquent être pri-
pas rémunéré. À ce jour, ils ne ses en compte. x
m’ont pas encore répondu.
LD: Tu dis regretter ne Propos recueillis par Emma
pas avoir pu informer les étu- La communication se fait par lettre ouverte et de bouches à oreilles. Ailinn Hautecoeur, traduits par
diants des changements qui Matthieu Santerre Elise Maciol.

4 Actualités x le délit · le mardi 25 janvier 2011· delitfrancais.com


CAMPUS CHRONIQUE

Un mouvement de Énergie à quel prix?


société pour la planète Audrey Yank | Bulle Climatique
La huitième conférence de Désautels encourage à penser aux prochaines émet moins de gaz à effet de serre que la
générations. combustion du pétrole. L’éolien lui, en
émet combien? Nada, niet, rien. «Énergie
Andreea Iliescu liser ses émissions de CO2, tant elles sont fossile» ne rimera jamais avec «propre».
Le Délit minimes. Si l’on considère le transport en ca-
Il rappelle aussi que les pays dévelop- mion nécessaire et le processus de fabri-

B
ill McKibben était à Montréal pés ne sont pas complètement à l’abri des cation des turbines, l’éolien produit un
pour l’événement d’ouverture de crises alimentaires, mais redonne espoir peu de gaz à effet de serre, c’est certain.
la Conférence Désautels sur la en mentionnant le fait que l’année der- Par contre, lorsqu’on mentionne que le
gestion durable (Desautels Conference nière, le nombre de fermes aux État-Unis gaz naturel est propre, est-ce qu’on men-
on Business and Sustainability). La hui- a augmenté pour la première fois en plus tionne les émissions causées par les géné-
tième édition de cette conférence intitu- de quinze ans. Cependant, il reste qu’il ratrices qui pompent le gaz, et l’eau de
lée «Redéfinir, Recréer, Re-gérer» encou- y a plus de détenus dans les prisons de fracturation dans le puits? Parle-t-on des
rageait les participants à revoir les liens l’Amérique du Nord que d’agriculteurs, milliers de transport en camions-citernes
entre les entreprises et l’environnement ce qui rend compte de l’ampleur du pro- qu’un seul puits requiert pour déplacer
à travers l’éco-design et la responsabilité blème. les millions de litres d’eau nécessaires au
sociale. Selon McKibben, l’une des causes processus, les centaines de litres de pro-
Bill McKibben, fondateur de 350.org, des dérèglements climatiques se trouve L’ÉNERGIE, TOUT LE MONDE en duits chimiques utilisés, l’équipement
est un environnementaliste américain qui dans le fait que nous idéalisons une so- a besoin, et ce besoin semble augmenter indispensable et les millions de litre d’eau
s’est donné pour mission de mobiliser la ciété de consommation insatisfaisante. Le sans cesse. Avec le soleil qui plombe et le contaminée? Je n’appelle pas «propre»
planète entière au sujet des changements niveau de bonheur des Américains est en vent qui souffle, je me dis que l’humain une industrie gazière qui a le potentiel
climatiques. Le nombre 350 en parties constant déclin depuis les années soixan- se complique les choses en trouvant son de contaminer la vallée du Saint-Laurent.
par million fait référence au seuil limite te alors que le niveau de vie a presque tri- énergie aussi loin dans le sol. C’est connu, Selon le gouvernement, il serait possible
de CO2 dans l’atmosphère toléré par la plé dans ce même laps de temps. au dernier siècle avant notre ère, les pre- de creuser 300 nouveaux puits par année
Terre, selon l´avis des scientifiques. Enfin, McKibben déplore le pouvoir miers moulins à vent étaient déjà en mar- dans les provinces à partir de 2015, créant
Steven Guilbeault, des États-Unis, a de l’industrie pétrolière, même s’il admire che. Aujourd’hui, cette énergie renouve- ainsi 7 500 nouveaux emplois. Si vous le
publié il y a plus de vingt ans l’un des pre- certaines initiatives prises par des régions lable est considérée dispendieuse, ce qui voulez bien, nous créerons plutôt des
miers livres sur les changements climati- pétrolières comme Abu Dhabi, où l’on ne semblait pas être le cas à l’époque. emplois grâce au développement d’une
ques, intitulé La fin de la Nature. Depuis, a créé un champ de panneaux solaires Cette technologie est applicable, nouvelle industrie de production d’éner-
il rallie de nombreux adeptes pour créer pour encourager l’utilisation d’énergies existe et fonctionne déjà. 7% de l’énergie gie éolienne.
des événements uniques rendant compte renouvelables. Malgré la rapidité des pro- allemande est d’origine éolienne: c’est un Finalement, je crois que le vrai pro-
de la mobilisation sociale en faveur d’en- grès technologiques, la volonté politique petit pourcentage et pourtant, l’Allema- blème réside dans le fait que nous pos-
gagements pour contrer les changements peine à suivre, et l’exemple du Canada est gne est leader mondial, avec une produc- sédons des habitudes de consommation
climatiques. parlant à ce sujet. Le Canada est tombé tion éolienne de près de 26 000 MW. Au d’énergie grandissantes et démesurées.
Bien que les discours sur les change- en disgrâce, selon certains acteurs dans Québec, l’éolien représente 600 MW, soit Notre climat ne fait que s’en désoler. Le
ments climatiques semblent toujours re- la lutte contre changements climatiques, 1.4% de l’énergie produite, autant que le sénateur Grant Mitchell ne semble pas
venir aux mêmes idées de réchauffement, depuis que le gouvernement Harper a dé- gaz naturel… Cependant, petit à petit, on partager mon avis. En 2004, les émissions
d’inondations, de crises alimentaires et cidé de montrer son appui aux industries fait quand même des progrès. D’ici 2015, de gaz à effet de serre au Canada avaient
de réfugiés climatiques, le discours de Bill de sables bitumineux l’éolien produira 4 000 MW. déjà atteint 758 millions de tonnes par
McKibben se distingue par le fait qu’il À ce niveau, la mobilisation sociale Et le gaz naturel, lui? Les paris sont année. Ceci nous situe à presque 30% au
insiste sur l’injustice sociale ajoutée à ce est cruciale, les habitudes de consom- ouverts, surtout avec la filière des gaz de dessus des résultats de 1990. Le Canada
type de catastrophes. Il mentionnera par mation pouvant influencer certaines schiste. Seul l’avenir nous dira si le pro- a pourtant ratifié le protocole de Kyoto,
exemple que la Thaïlande s’est trouvée pratiques, et les mouvements de société grès est réel. s’engageant d’ici 2012 à réduire ses émis-
face à une récente épidémie de dengue, devraient s’amplifier afin d’aligner la Le gaz de schiste est un type de gaz sions de gaz à effet de serre de 6% par
une maladie causée par les moustiques politique avec la volonté des citoyens. naturel non conventionnel, c’est-à-dire rapport aux 599 millions de tonnes que
qui se reproduisent plus facilement avec La bataille est loin d’être gagnée, et Bill qu’au lieu de former une poche dans le pays produisait en 1990. C’est bien,
le réchauffement climatique. Pourtant, ce McKibben est le premier à le reconnaître… le sol où le gaz est concentré et facile à on est sur la bonne voix: cette année, les
pays asiatique est incapable de comptabi- mais il ne baisse pas les bras. x extraire, il est plutôt emprisonné sous émissions canadiennes ont atteints 828
forme de petits bulles sur des kilomètres. millions de tonnes... M. Mitchell indi-
La roche de schiste, très peu perméable, que fièrement que c’est le résultat d’une
doit être fracturée afin que les bulles de économie canadienne florissante, de plus
gaz soient libérées. Ce processus de frac- en plus prospère, et que les choses de-
turation est très controversé, puisqu’il vraient rester telles quelles. Nous nous
nécessite des millions de litres d’eau et approchons du précipice: il est impossi-
un mélange de plus de 596 produits toxi- ble de conserver une économie prospère
ques. De plus, le tout entraîne un risque en détruisant de telle façon le climat et
de contamination des nappes d’eau sou- les ressources naturelles. Au final, les
terraine. En effet, si certaines fissures se sommes à payer seront astronomiques.
créent au mauvais endroit, elles libèrent Je suis curieuse de savoir à combien on
leur gaz directement dans l’eau. estimerait la décontamination du fleuve
Le Bureau d’audiences publiques Saint-Laurent, et un système de santé
sur l’environnement (BAPE) produit prenant en charge une population entière
actuellement un rapport contenant des qui subirait les conséquences de cette
recommandations pour l’exploitation contamination au gaz de schiste. Soyons
sécuritaire et respectueuse de l’environ- donc conscient de l’égoïsme de nos choix.
nement. Selon moi, la question ne de- Préférons-nous consommer davantage
vrait pas être «Comment le faire?» mais que de nous assurer un avenir heureux?
d’abord «Avons-nous besoin de le faire?». Nous n’avons qu’à réajuster le tir; les éo-
Certains vantent le sous-sol québécois liennes suffiront à nous fournir l’énergie
entre Montréal et Québec, étant soi-di- nécessaire sans avoir besoin de vandaliser
sant un océan de gaz naturel, la pro- notre sous-sol québécois, et nous pour-
chaine Arabie Saoudite, mais plus propre. rons espérez rencontrer un jour les objec-
Propre? La combustion du gaz naturel tifs de Kyoto. x

Dépensez votre énergie au Délit!


Bill McKibben
actualités@delitfrancais.com
Gracieuseté de mcgilldbcs.com

xle délit · le mardi 25 janvier 2011 · delitfrancais.com Actualités 5


CHRONIQUE CAMPUS

Ils ont tué Socrate La consultation à McGill


Jean-François Trudelle | Une initiative positive
Attention, chronique de droite
me protéger contre les abus. De Anthony Lecossois ne pas être entendu par l’admi- de sa réelle volonté de changer
toute façon, l’État ne peut avoir Le Délit nistration. Vendredi dernier le les choses pour ce qui a trait de
la prétention de se substituer à la comité présidé par le professeur la consultation à McGill. Les par-

I
nature (ou à Dieu). Ce serait se nstauré par l’administration en Paul Wiseman organisait un «fo- ticipants espèrent que le rapport
prendre pour un objet de nature novembre 2010, à la demande rum ouvert sur la consultation et du groupe de travail ne restera pas
divine, ce qu’il est loin d’être. de Zach Newburgh, le groupe la communication à McGill». Si la lettre morte. x
Ensuite, il y a la liberté. Si de travail sur la consultation et la salle était loin d’être comble, les
l’humain n’a jamais inventé la communication avec les étudiants discussions ne manquaient pas de Retrouvez un compte rendu des dé-
mort, il a imaginé et théorisé la était une réponse au sentiment mérite. Par sa qualité d’écoute, le bats sur le blog des sénateurs étudiants:
liberté. De Platon à Voltaire, en partagé par le corps étudiant de comité a su convaincre l’auditoire http://ssmu.mcgill.ca/senators
passant par Hobbes, les théories
de la liberté se sont succédées
et se sont vues mises en appli-
cation par le biais des structu-

STEPHEN HARPER A
res politiques et sociales créées
par l’Homme. Ce concept n’est Et vous, auriez-vous supprimé l’AG?
déclaré cette semaine qu’il était,
à titre personnel, pour le réta-
donc qu’une pure vue de l’esprit
acceptée par la communauté. Réagissez sur delitfrancais.com
blissement de la peine capitale Cela est d’ailleurs merveilleu-
dans certains cas. Je m’étais sement exprimé dans le célè-
opposé à ce châtiment dans un bre et terrifiant 1984. Si le mot
texte que j’avais publié le 22 mai liberté n’existait pas, comment
2010. pourrait-elle elle-même exis-
Pourtant abolie le 16 juillet ter? C’est justement dans cette CAMPUS

Francofête!
1976 au Canada, la peine de mort optique de liberté théorisée par
semble encore charmer bien des l’Homme que nous pouvons
gens, selon ce que révèle un nous permettre de punir des in-
sondage paru le 23 janvier 2010 dividus nuisibles à la société en
dans le quotidien Le Devoir. En les emprisonnant. Cette action Pour placer une annonce :
effet, 62% des Canadiens se di- est légitime, puisque tout ce qui La CAF vous y invite! (514) 398-6790 • ads@dailypublications.org
sent en faveur de la peine capita- est perdu est un concept et non

C
le pour certains cas de meurtre, pas un besoin fondamental pour ’est une fois de plus avec Notez également à votre
et cette proportion augmente à l’existence, pour la vie. un enthousiasme palpa- agenda le panel culturel sur les
Logement
69% lorsqu’on ne tient compte Une société accepte, par son ble que les membres de la aspects esthétique et politique de 留学生のための部屋・私たちは日本語を
que des Québécois. contrat social, la liberté qu’elle Commission des affaires franco- la langue française dans l’indus- 勉強しているカップルです。上手に話せる
Que l’État se réserve le mo- voudrait voir mise en applica- phones (CAF) vous ont concocté trie artistique d’aujourd’hui, le 1er ために練習したいです。 アパートはお洒落
nopole de la violence est un prin- tion. Accepter toutefois d’aller deux semaines d’activités. La février, salle Wilson à 14h30). Un なプラトー地区のローリエ駅(メトロオ
レンジライン) から1分で便利。下宿料は
cipe globalement accepté au sein plus loin en laissant la collec- francofête commencera avec une deuxième panel dressera un bilan $120/週(2食付・暖房・電気・インタ
de notre société, dans la mesure tivité, soit la majorité, tuer un cabane à sucre mobile, que vous des politiques linguistiques et le ーネット・電話代込み)詳細はご連絡くだ
où tout le monde assume que individu, est une forme de col- verrez se déplacer jusqu’à vous, le succès de leurs objectifs identi- さい。kodamastore@gmail.com
ce dernier ne peut se permettre lectivisme parfaitement inaccep- 25 janvier, devant Redpath. Vous taires, le 4 février à 16h30 dans
arbitrairement d’user de ce pou- table, une immense négation de ne voudrez aussi pas manquer de la salle de bal du Shatner. Après
voir. De cela ne résulterait que la l’individualisme. Pouvons-nous passer au kiosque d’information notre très couru vin et froma- Offres d’emploi
dictature. Toutefois, si ce dernier tolérer ce rejet de cette pierre tenu par l’Association générale des ges, venez-nous au bar Gerts, du
a un tel droit, pourquoi ne peut- d’assise de la société occiden- étudiants de langue et littérature Dumas plein les oreilles. ÉCOLE DES MAÎTRES
Cours de service au bar et de service
il pas mettre quelqu’un à mort tale? Absolument pas, puisque françaises: des traductologues sau- Ouf... J’espère qu’il vous res-
aux tables. Rabais étudiant, service
si celui-ci a été déclaré coupable l’Histoire regorge d’exemples où ront vous aider à vous exprimer la tera du temps pour souffler. Si de référence à l’emploi.
par un tribunal légitime après un la fin de l’individualisme comme langue de Molière, le 26 janvier de c’est le cas, consultez l’horaire 514-849-2828
procès juste et équitable? priorité sociale a tranquillement 10-3h, dans l’entrée du Leacock. complet sur ssmu.ca/caf. www.EcoleDesMaitres.com
D’abord, il y a la mort. La mené à la dictature. Ce fut le cas (inscription en ligne possible)
mort est la seule justice sur Terre de l’Italie fasciste, de la triste- Séances sur la recherche d’un
et cette justice se perpétuera, peu ment célèbre Allemagne nazie et
importe le niveau d’évolution de l’immense boucherie soviéti- logement à Montréal Avez-vous
“un OEIL PARESSEUX”
économique, sociale et intellec- que. De plus, Lévi-Strauss men-
tuelle d’un peuple. Nous mour- tionnait que le désir de prolon- Les séances couvriront les points suivants : depuis l’enfance? La recherche
de vision de McGill recherche des
rions avant d’avoir découvert le ger la vie était un élément fon- • Le meilleur moment pour commencer votre participants d’étude. Veuillez appeler
feu, nous mourons alors que la damental de l’Occident. Nous Dr. Simon Clavagnier au (514) 934-
recherche 1934, poste 35307 ou contacter
médecine ne cesse de progres- considérons l’espérance de vie
mcgillvisionresearch@gmail.com
ser à un rythme époustouflant comme une mesure de déve- • Quand, comment et où commencer votre recherche pour de plus amples informations.
et nous mourrons lorsque nous loppement d’une nation, notre
aurons dépassé les frontières de médecine est axée sur le prolon- • Le formulaire d’application et le bail
notre planète bleue. Tout cela gement de cette dernière et une
• La loi sur la Régie du logement au Québec Cours
pour dire que l’humain n’a ja- des philosophies les plus mar-
mais inventé la mort. Il n’a fait et quantes du XXe siècle occiden- • Quoi faire lors d’un conlit avec le propriétaire ou CANADA COLLEGE
ne fera que la subir, la trouvant tal, l’existentialisme, érigeait le www.collegecanada.com
le(s) colocataire(s)
absurde après tant d’efforts pour repoussement de la mort comme Tous les cours de langues : 7.00$/heure
vivre, mais ne pourra rien y fai- l’un de ses principes fondamen- • Comment refuser une augmentation abusive de loyer Certification TESOL reconnue par
re. Elle est un cadeau de Dame taux. Comment pourrions-nous TESL Canada.
Nature (ou de Dieu, selon ce légitimer l’arrêt de la vie par un • Renouvellement et annulation d’un bail Préparation pour TOEFL iBT, GMAT, MCAT,
TEFaQ, TEF.
que vous croyez) et est faite pour pouvoir reposant sur la confian- Les séances se dérouleront en anglais Visas étudiants, renouvellement de visas.
rester. Qui sommes-nous pour ce? Comment pouvons-nous
(514) 868-6262
pouvoir l’imposer à un autre? nous nier nous-mêmes? Sessions quotidiennes : Sessions hebdomadaires : info@collegecanada.com
En vertu de quoi pouvons-nous Il suffit aussi de lire Semaine du 24 janvier @ 11 h Les vendredis de février @ 14 h 1118 rue Sainte-Catherine Ouest, #404,
décider pour quelqu’un d’autre L’Apologie de Socrate pour réa- Montréal, QC
si son heure est venue? Cela liser l’absurdité de cette peine.
Lieu : Lieu :
Carrefour Sherbrooke R.V.C.
serait d’autant plus inquiétant On a mis fin à la vie d’un homme
(Salle de bal) (Roscoe Lounge)
que ce serait l’État qui déciderait juste à cause de l’incurie de la
de cela. Cela me fait frémir de majorité, et Athènes l’a regretté.
475 Sherbrooke O. 3425 rue University ANNONCEZ DANS LE DÉLIT!
Montréal H3A 2L9 Montréal H3A 2A8 ads@dailypublications.org • 514-398-6790
savoir qu’une entité imaginaire Nous avons mis un terme à ce
puisse décider de mon droit potentiel d’abus au Canada il y Visitez-nous en ligne :
(ou non-droit) de vivre, alors a trente-quatre ans. Évitons que Une présentation du service de logement hors campus de
l’Université McGill : www.mcgill.ca/offcampus www.delitfrancais.com
que cette dernière est supposée Socrate ne meure à nouveau. x

6 Actualités xle délit · le mardi 25 janvier 2011 · delitfrancais.com


CAMPUS
Accorder «génie» au féminin
Les facultés de génie et les écoles spécialisées en ingénierie ont résisté à l’assaut universitaire de la gente
féminine. Pour combien de temps?
Laura Andrea Saavedra étudiants sur les 2 813 inscrits au parcours universitaire, toutes les trouve son origine avant la rentrée Opportunities for Women in
Le Délit premier cycle sont des femmes. femmes en génie se voient obli- à l’université. «La société nous en- Engineering). Chaque année, ce
Sandrine Reny, étudiante au pre- gées de développer des qualités voie des images préconçues de ce comité organise plusieurs événe-

D
epuis que les femmes mier cycle en génie mécanique à communes, comme être capable que les filles devraient être et des ments à l’intention des femmes
ont accès à l’éducation, la Polytechnique, affirme qu’au d’«endurer des blagues contre la domaines dans lesquels elles de- en génie: conférences, réunions
le profil étudiant a lar- sein de la faculté de génie, la pro- seule fille présente» ou «s’habi- vraient étudier. Donc, quand vient «vin et fromage» entre étudiantes
gement changé dans les univer- portion des femmes est très infé- tuer à participer à des conversa- le temps d’appliquer à l’univer- et conférencières, campagnes de
sités. Actuellement, la population rieure à celle des hommes. Elle tions de gars qu’ils ne lanceraient sité, les filles ont déjà été incons- financements [et] création de ré-
étudiante est majoritairement mentionne que certains domaines pas s’ils étaient entourés de filles». ciemment poussées vers tel ou tel seaux sociaux. Cependant, la plus
composée de femmes, et presque de génie, comme le génie logiciel, Reny pense que «les hommes de domaine plutôt que d’avoir vrai- grande activité organisée dans ce
toutes les facultés présentent une paraissent être complètement [sa] génération acceptent quand ment songé à toutes les options contexte est la «conférence pour
proportion plus élevée de femmes mis de côté par les femmes, alors même bien le fait qu’une femme possibles, le génie étant l’une de les futures femmes en génie»
que d’hommes. Cependant, la fa- que les domaines «biomédical et étudie en génie. Les femmes ont ces options.» (CFWE). Cette conférence an-
culté de génie semble être l’excep- chimique doivent être composés de plus en plus leur place en ingé- À McGill, plusieurs initia- nuelle vise à briser les stéréotypes
tion à cette règle. entre 50 à 75% d’étudiantes». nierie.» tives ont été prises pour inté- qui se répandent dans le milieu de
Les statistiques publiées sur Personnellement, Reny n’a Selon Thierry Aboussouan, grer au mieux les femmes dans l’ingénierie et, ainsi, à encourager
la page des admissions du site de jamais eu de difficultés à intera- étudiant au premier cycle en génie ce domaine traditionnellement les filles, dès l’école secondaire,
McGill montrent que, pour l’an- gir avec la majorité masculine, mécanique à McGill, le taux peu masculin, notamment par le biais à poursuivre des études dans ce
née scolaire 2009-2010, seuls 636 mais elle affirme que pendant leur élevé de femmes en ingénierie du comité P.O.W.E. (Promoting domaine. x

Vous êtes des génies en herbe?


Votre expertise journalistique, on la veut!
Joignez les forces «Actualités» du Délit.
actualités@delitfrancais.com

xle délit · le mardi 25 janvier 2011 · delitfrancais.com Actualités 7


Société

Argentique
societe@delitfrancais.com

ge
ac ksta
ans B Kea
ton
td oin
righ
od
rie J
ainw
Valé

Ru fus W

u i
D i s - mo i q
Margaux Meurisse les catégories se déclinent à l’infini et en liées au fait
Le Délit 2011, on finit par se demander comment que le pho-
distinguer le photographe professionnel de tographe se

E
n février 2007, on annonçait que l’amateur! Il existe bien sûr des formations base beau-
Kodak ne développera plus de pho- de photographie. Par contre, celui ou celle coup plus sur
tos en France. Quelle est la place de qui possède un Canon 5D Mark II et qui l’essai et l’erreur
la photographie argentique (aussi appelée manie correctement Photoshop est parfai- pour obtenir une
analogique) face au numérique qui ne cesse tement en mesure de rivaliser avec la sphè- bonne image, plutôt
d’épater la galerie depuis les années 1990? re des photographes reconnus. que sur sa connais-
Au niveau mondial, on observe depuis sance technique de la
quelque temps une disparition progressive lumière. À l’époque du
des usines de production d’argentique et «Aujourd’hui, l’erreur ne film, les photographes
une constante amélioration des techno- coûte rien, on a la chance devaient faire beaucoup
logies numériques, toujours plus précises, de pouvoir supprimer des de calculs et prévoir les résul- même au temps ou seul l’argentique exis-
toujours mieux adaptées aux besoins des photos à notre guise sans se tats d’une exposition choisie.» tait: le photographe amateur avait plus de
chasseurs d’images. Dans une société qui L’apparition du numérique a non seu- mérite si la photo était réussie et le cliché
ne connaît et ne consomme à peu près que
soucier du prix de notre dé- lement bouleversé le traitement des infor- gardait davantage sa magie.
des photos digitales, comment le numéri-
faillance technique.» mations publiques, mais il a aussi modifié Le pouvoir qu’acquiert le sujet pho-
que transforme-t-il l’interaction entre le de manière considérable la sphère privée, tographié vis-à-vis du photographe pro-
photographe et son sujet, et de quelle façon et en particulier la relation qu’entretient fessionnel est aussi notable. Valérie Jodoin
revisite-t-il la notion de beauté en photo- Valérie Jodoin Keaton, portraitiste chaque famille avec ce huitième art qu’est Keaton souligne ce changement dans les
graphie? Est-ce celle qui se rapproche le documentaire québécoise et ex-membre la photographie. rapports sujet-photographe: «Avec une
plus de la réalité ou celle qui la sublime par de The Dears, est l’auteure d’un recueil de Par comparaison avec l’argentique, les caméra digitale, le photographe est porté à
une série de modifications numériques? photos intitulé Backstage dans lequel elle appareils numériques sont plus compacts, montrer sur le champ ses photos au sujet,
dévoile les moments intimes des grands et ils disposent de cartes mémoires pou- un processus qui ralentit la session pho-
noms du rock qu’elle a eu la chance de vant contenir des milliers de photos, alors tographique et peut interrompre la prise
Le numérique, ce n’est photographier lors de ses tournées: entre
autres The Killers, The Dandy Warhols,
que les films sont le plus souvent limités à
une trentaine d’impressions. Aujourd’hui,
de vue. Le sujet a le pouvoir d’arrêter la
séance de photos quand il le désire pour
pas si mal que ça. Yann Perreau, Les Rita Mitsouko ou en- l’erreur ne coûte rien: on a la chance de voir le rendu et même donner son input. Il
core Paul McCartney. pouvoir supprimer des photos à notre guise a donc un certain contrôle sur le résultat
Que ce soit par le biais des journaux Son opinion sur le numérique est par- sans se soucier du prix de notre défaillance photographique.»
télévisés, de la presse quotidienne, d’affi- tagée: «Si on parle de l’apprentissage de la technique. La technologie numérique a
ches publicitaires ou de magazines en tout photographie, je ne pense qu’à des résultats donc eu un impact sur la valeur accordée
genre, les médias nous bombardent d’ima- positifs, car le numérique est plus abordable à une photographie, notamment à cause Photoshop et les
ges. Le numérique participe activement à
cette explosion du visuel et finit par bana-
pour tout le monde, on peut se permettre
de faire beaucoup plus d’essais et d’erreurs
du nombre infini de photos que l’on peut
prendre pour immortaliser un moment ou
nostalgiques du
liser des événements de grande envergure et apprendre ainsi plus vite. On peut d’ail- une action. Si on s’aperçoit que notre cli- négatif
méritant pourtant toute notre attention. leurs donner un appareil numérique à un ché est légèrement flou ou en contre-jour,
Photographies de reportage, de mode, de enfant dès son plus jeune âge. Je pense «pas de panique!», on appuie de nouveau Avez-vous déjà entendu par-
documentaire, de publicité, de design: que les seules répercussions négatives sont sur le bouton! La réalité était loin d’être la ler de Pixelmator, de Poladroid ou de

8 xle délit · le mardi 25 janvier 2011 · delitfrancais.com


Numérique

es Exp
losi
on d

tl
’un c
ond
uit d
e pé
trole
au N
iger
Akin
tund .
e Ak
inley
e

plus belle
a

production et aux retouches sur Valérie Jodoin Keaton. Elle ajoute qu’un une artiste. «L’impression première était
une photo, je ne vois que du posi- artiste qui veut réaliser une série photo- très importante pour les sujets qui sont
tif dans l’utilisation de logiciels de graphique au contenu intéressant, mais tentés de repousser les porteurs de camé-
retouche. Cela donne une part un ne possède pas de talents techniques, peut ras, surtout lors de l’avant et l’après-spec-
peu plus artistique au photographe prendre le temps d’essayer la tactique es- tacle.» Les artistes photographiés, souvent
qui se permet de recréer à nouveau sai erreur et qu’il finira par y arriver. Par intrigués par l’appareil, voulaient en savoir
une image (en plus de l’originale) et contre, elle tient à préciser «qu’un photo- davantage et participaient d’autant plus au
de la modifier selon sa vision. Je ne graphe a besoin d’autre chose, il a besoin projet de Valérie Jodoin Keaton. De plus, ce
vois aucune conséquence fâcheuse d’être très vif et d’avoir un reflexe très dé- type d’appareil vintage l’a contraint à exé-
à cette pratique. Au contraire, le veloppé. Un réflexe pour attraper un mo- cuter la tâche rapidement car il ne conte-
photographe gaspille moins de temps ment surtout quand c’est un sujet qui est nait que douze poses. En moyenne, elle fait
en chambre noire. C’est mieux égale- vivant, il a besoin de beaucoup de rapidité son travail en trois ou quatre photos par
ment pour l’environnement [pas de pro- entre l’œil, le cerveau et le doigt qui pèse sujet, ne voulant pas abuser de leur temps
duit chimique et de gaspillage de papier].» sur le déclencheur.» et ne voulant pas perdre la spontanéité et la
MyPhotoEdit? Ces logiciels de retouches à Il est possible de modifier une image à magie de l’échange.
sonorité effrayante sont tous des disciples l’infini et de la détourner de sa fonction de Finalement, Valérie Jodoin Keaton
du maître Adobe Photoshop. Par défini- reproduction du réel et donc de sa beauté Faire machine arrière relève le défi, en 2011, de faire un travail
tion, la retouche numérique est le proces- intacte. Par contre, les critères de beauté et Face à cette multiplication d’images photographique uniquement analogique.
sus d’altération d’images numériques. Le de réussite d’une photographie se fondent- numériques et à la course au meilleur re- Elle propose une vision positive du pro-
mot altération devrait vous sauter aux yeux ils davantage sur la prouesse technique du toucheur, certains photographes décident cessus de retouche qui valorise la liberté
car il connote une dégradation, soit une photographe ou sur le contenu de l’image? de se démarquer par un retour à l’argen- et l’expression artistique du photographe,
transformation de la réalité photographiée. Selon la photographe professionnelle, les tique. C’est devenu le cas de Valérie Jodoin tout en précisant que le véritable artiste
La beauté originelle d’une photographie deux demeurent absolument essentiels: Keaton lorsqu’elle a décidé de monter son doit savoir prendre son temps et ne pas
est donc remplacée par une beauté artifi- «Tout dépend du contexte: si le sujet ou recueil de photos Backstage et qu’elle a compter uniquement sur la chance. Par ail-
cielle et factice. le moment est très éphémère, la prouesse choisi une caméra Hasselblad afin d’appro- leurs, un grand nombre de photographes
technique est très importante. Par contre cher les musiciens dans les coulisses avant vont jusqu’à retoucher leur image numé-
le contenu de la photo est je crois ce qui ou après leur spectacle. «Je voulais d’abord rique pour donner un effet «argentique»,
«Un photographe [...] a be- pèse le plus de poids dans la balance pour
un projet d’exposition ou de livre, par
m’inspirer d’une de mes photographes
fétiches: Mary Hellen Mark, portraitiste et
alors que d’autres scannent leur photos
issues de la chambre noire pour faire des
soin d’être très vif et d’avoir
un réflexe très développé [...]. exemple.» documentariste américaine qui a utilisé un retouches numériques. Ces pratiques hy-
L’instigatrice de Backstage croit qu’il appareil Hasselblad.» brides en constante innovation participent
[I]l a besoin de beaucoup de peut y avoir une très belle photographie L’artiste admet son faible pour le for- certes à ouvrir les possibilités artistiques en
rapidité entre l’oeil, le cer- sans message, comme un beau paysage mat carré de l’appareil. «C’est une ques- photographie, tout en prenant en compte
veau et le doigt qui pèse sur avec une lumière aux tons subtils, par tion d’équilibre. Je voulais centrer le sujet la pratique des anciens de la photographie
le déclencheur. » exemple. Par contre, pour un travail dans dans un environnement, je voulais limiter et l’origine de cet art passionnant. x
son ensemble, il doit y avoir une pensée l’espace autour du sujet.» La photographe
continue, un message, une réflexion sur soutient que l’appareil lui-même a su Et vous, que préférez-vous, l’argen-
Valérie Jodoin Keaton, quant à elle, ce qui est exprimé. «Il peut y avoir d’excel- l’aider lors de ses premiers contacts avec tique ou le numérique? Exprimez-vous
voit la révolution numérique d’une toute lentes photos qui sont prises avec beau- ses sujets: cela la dissocie des journalistes- sur delitfrancais.com et envoyez-nous
autre manière: «Par rapport à l’étape post- coup de chance», assure la photographe photographes et on la perçoit donc comme vos photos à societe@delitfrancais.com.

Société 9
CHRONIQUE

Un incontournable et un classique
Christophe Jasmin | Les pieds dans les plats
est très accessible, au contraire
de la France, justement. Un peu
comme en Italie, en fait. Sauf qu’en
vivant à Montréal, on est déjà en
contact avec la cuisine italienne.
Ce qui est loin d’être le cas pour
la cuisine espagnole (oubliez les
pâles imitations de paellas et de ta-
pas qu’on peut trouver). De plus, la
Catalogne est le berceau de la fine
cuisine gastronomique contempo-
raine, dont Ferrán Adrià et sa cui-
sine moléculaire sont les figures de
proue.
Le meilleur endroit pour goû-
ter, et voir, la richesse culinaire de
Barcelone, l’incontournable la région, c’est le marché de la vil-
On vous l’a sûrement déjà le: le Mercat de la Boqueria. Sans
dit, mais je me permets de le répé- doute un des plus beaux marchés
ter: si vous n’avez qu’un endroit à d’Europe (du monde?) où les
visiter en Europe en ce moment, stands de fruits sont plus magni-
c’est Barcelone. Pour toutes les fiques que les arcs-en-ciel, les
merveilles de Gaudí telles que la poissons et fruits de mer tellement
Sagrada Família, la Casa Batlló ou frais qu’ils vous sautent presque
bien le Parc Güell, où vous pourrez dessus et des bars à tapas où l’on Fruits séchés et noix au Mercat de la Boqueria
rejouer la scène du baiser torride vous cuisine littéralement ce qui Mutari
de ce film français cucu... Pour les est derrière vous. Sans oublier leur franchement détesté les trois an- bien, si tant est que l’on connaisse j’avais un peu l’impression qu’une
Ramblas, l’artère principale de la jambon fumé, le jamón ibérico, roi nées que j’y ai passées. À cause des plus ou moins. Ce qui est bien, deuxième langue allait me pousser
ville où on dirait que tous les an- de tous les lieux ayant un lien avec Parisiens? Peut-être. Cependant, je aussi, c’est que même si on se au fond de la gorge.
ciens du Cirque du Soleil viennent la bouffe dans ce pays. Et qui, soit pense que c’est plutôt la ville en soi, trouve dans une grande métropole
finir leur carrière en faisant les sta- dit en passant, est meilleur que le sa taille, sa promiscuité, sa grisaille cosmopolitaine, on peut encore Réflexion de voyage
tues humaines. Pour l’ambiance prosciutto. quasi-permanente et son manque trouver presque dans tous les res- Un peu comme les vaches qui
frénétique de la ville aussi, qui rap- criant de verdure (même les arbres tos des plats qui ne sonnent pas ont quatre estomacs, je pense que
pelle un peu Montréal au plus fort Paris, le classique sont gris ici) qui en font un endroit très cosmopolitains. Par exemple, les Européens ont développé, à la
de l’été. Mais fois 100. Et à l’année J’ai une relation bizarre avec souvent si peu accueillant. D’où la lundi, dans deux restaurants assez longue, un deuxième estomac ser-
longue. Paris. Autant je ne me lasserai ja- mauvaise humeur et l’air bête lé- courus de la ville, j’ai trouvé de vant uniquement à digérer l’alcool
Toutefois, selon moi, LA rai- mais de visiter et revisiter la ville gendaire des Parisiens (qui ne sont la langue de veau et de la tête de sans que le reste du corps en soit
son qui rend Barcelone (et toute la et de profiter des possibilités de certainement pas nés comme ça). veau (langue, cervelle…) au menu. trop affecté. Sinon, je ne vois vrai-
Catalogne) si incontournable, c’est divertissement inifinies qu’elle of- Bref, le Parisien naît bon, et c’est la Évidemment, j’en ai commandé les ment pas comment ils font pour
sa cuisine. Non pas qu’elle soit fre (toujours une expo que l’on n’a ville qui le pervertit, pour repren- deux fois. La première fois, c’était boire autant pendant le repas du
nécessairement meilleure que ce pas vue, un bon resto où l’on n’a dre une formule connue. excellent, quoiqu’un peu étrange midi et recommencer à travailler
qu’on trouve en France, par exem- pas mangé, un quartier que l’on n’a Reste que c’est un endroit où comme petit déjeuner. Après la après. Quoiqu’en Espagne, ils ont
ple, mais ce qu’elle a de meilleur pas fini d’explorer…), autant, j’ai l’on peut manger incroyablement deuxième fois, qui était aussi bien, toujours la siesta... x

BILLET
À déguster lentement
Pour faire changement, prenons notre temps.
Camille Lefrançois et moi, avant tout. C’est bien vrai, Principes de base? Le mou-
Le Délit le monde semble évoluer dans de vement est axé sur le bon, le
drôles de direction et les interac- propre et le juste. Bon, c’est le

C
e billet se veut en quelque tions sociales sont en pleine méta- côté gastronomique qui prône
sorte une bouffée d’air frais. morphose (on aura assez entendu le choix d’aliments saisonniers
Peut-être est-ce le fait d’étu- ces discussions sur les nouveaux bien goûteux et de qualité. Le
dier en environnement, ou bien médias sociaux pour le savoir). développement durable y a sa
simplement de lire les nouvelles de Notre société occidentale est place dans le second principe,
façon régulière, mais j’ai souvent parfois caractérisée par le rythme qui cherche à promouvoir la
l’impression que le pessimisme de vie effréné qu’on y mène. De consommation d’aliments «pro-
et le cynisme sont des tons récur- la formule métro–boulot–dodo pres», soit généralement bio-
rents. Cette semaine encore, je lisais aux fast-foods et autres services logiques et davantage locaux.
un article de Christian Rioux, dans express, la rapidité semble pren- Finalement, le mouvement se
Le Devoir, qui rapportait une étude dre le pas sur la qualité de vie, ou veut aussi promoteur de pra-
internationale selon laquelle les tout simplement sur le temps de tiques consommatrices justes
Canadiens âgés de 16 à 29 ans sont vivre. Personnellement, ma coloc et pour garantir une part positive
avant tout individualistes et maté- moi sommes amateures de bonne aux producteurs des produits
rialistes, et très peu prompts à l’en- bouffe, et nous prenons plaisir à consommés. Leurs activités re-
gagement social. Une étude comme cuisiner chaque soir. C’est à la fois groupent ainsi des amateurs de
celle-là est toujours à prendre avec une bonne façon de prendre une gastronomie qui souhaitent dé-
des pincettes, je suppose, mais il pause dans nos études tout en couvrir et partager ce plaisir.
reste que ce portrait peu flatteur me nous permettant de contrôler et L’idée me semble alléchante.
donne une impression de déjà vu. d’apprécier ce qui se rendra dans Dans nos vies étudiantes un peu
Même si ce n’est peut-être pas notre assiette. C’est dans cet esprit folles, s’arrêter pour se mijoter
aux nouvelles qu’on en entend par- qu’est né le mouvement du Slow un petit quelque chose, sans être
ler, le monde regorge d’initiatives et Food, qui existe depuis les années très compliqué ni excessivement Le rythme de vie effréné de l’étudiant moderne
d’idées concrètes, intéressantes et 1980 en Italie et duquel fut créée sa long, m’apparaît comme une Raphaël Thézé
inspirantes. Ainsi, au risque de faire version Montréalaise, l’organisme belle façon de prendre du temps
appel à un cliché, le changement Slow Food Montréal, une vingtaine pour soi. Surtout lorsqu’arrive Envie d’en savoir davantage sur le mouvement? Lisez l’article «Slow Food ou renais-
commence peut-être bien par vous d’années plus tard. l’heure de manger! x sance de la gastronomie artisanale» en pages centrales de l’édition du 10 novembre 2009.

10 Société x le délit · le mardi 25 janvier 2011 · delitfrancais.com


« Mon expérience dans les Forces a été remarquable. Après avoir payé mes études, elles m’ont permis
de travailler dans plusieurs pays. Et je ne sais jamais où mon prochain défi m’emmènera. »
Capitaine BRYAN WILLOX
Arts&Culture
artsculture@delitfrancais.com

THÉÂTRE

Erotisme et violence cathartiques


Tom à la ferme, la dernière pièce de Michel Marc Bouchard, est un exemple incontournable
du théâtre à son summum.

Valérie Remise

Mai Anh Tran Ho Le deuil et l’homosexualité, les thè- le personnage du bourreau non dépourvu la cuisine, alors que côté cour, la chambre
Le Délit mes majeurs de cette pièce, permettent une de tendresse. Il parvient à exprimer avec jus- est composée d’un lit et d’une lampe. Le
réflexion sur la recherche de soi. Agathe tesse le malaise de ce fils qui rêve d’autres fond de la scène est constitué de planches de

M
is à part son titre, la pièce Tom retrouve en Tom son fils qui s’est enfui et horizons, mais dont le devoir de rester sur bois et d’une porte coulissante; juste assez
à la ferme n’a rien de bucolique. Francis, son frère, à cause duquel il s’est la terre paternelle et de prendre soin de sa pour faire allusion à une ferme isolée. Aucun
Tom (Alexandre Landry), un autrefois ensanglanté les mains. Tom, celui mère l’accable. Lise Roy, quant à elle, incar- changement de décor n’est effectué –ni né-
beau jeune homme à la crinière de lion, se qui vient de la métropole, s’effacera alors ne une Agathe pleine de candeur qui ne par- cessaire–, la scénographie bien pensée par
rend à la campagne pour les funérailles de pour se réincarner en son amant défunt. vient pas à être en paix avec un fils qu’elle Romain Fabre permet aisément d’évoquer
son amant. Agathe, la mère (Lise Roy), et C’est à travers ces relations re-tissées que ne connaissait finalement pas. Le texte et les divers lieux où se passe l’action et rappel-
Francis, le frère (Éric Bruneau) du défunt, chaque personnage entreprendra un voyage les jeux de mots de Michel Marc Bouchard le le côté très rustre de la pièce. L’éclairage
refoulent derrière leurs mots et leurs gestes cathartique au fond de son être, avant que la sont merveilleusement portés par Alexandre (Erwann Bernard) est également un élément
bienséants leur inconfort face à l’homo- vérité n’explose au grand jour et que chacun Landry qui réussit à rendre crédible et ja- essentiel qui contribue à la réussite de Tom
sexualité. La présence de cette «veuve-gar- puisse faire son deuil. mais irritant un personnage toujours à la re- à la ferme.
çon», alors qu’ils s’attendaient à accueillir Il est rare d’assister à une pièce dont le cherche de synonymes. La courte présence Une pièce à voir absolument. x
une femme, leur permet toutefois de s’ins- jeu des acteurs est si égal. Quelle heureuse d’Évelyne Brochu est bien amenée et permet
taller dans le mensonge et de se rattacher à surprise! Les montées émotives et les ins- à la pièce d’atteindre son point culminant. Tom à la ferme
cet être perdu, jusqu’à en tordre la vérité. tants de silence sont bien répartis entre les La mise en scène minimaliste de Claude Où: Théâtre d’Aujourd’hui
Tom, lui-même, se résoudra à participer au personnages. Nul manichéisme ici, mais Poissant laisse assez de place à l’excellent jeu 3888 rue Saint-Denis
jeu, exprimant ses doléances par des pro- plutôt la découverte de l’intimité complexe des acteurs. La scène est épurée: côté jar- Quand: jusqu’au 5 février
pos supposément rapportés d’une copine de cette famille en proie aux plus violents din, un ensemble d’armoires murales, ainsi Combien: 25$
inventée. non-dits. C’est Éric Bruneau qui interprète qu’une table et quelques chaises, évoquent

THÉÂTRE

Quand le théâtre dépasse la fiction


Beauté, chaleur et mort, la dernière création du Projet Mû présentée à La Chapelle promet une expérience
théâtrale innovatrice et riche en émotions. Âmes sensibles s’abstenir. Patrice Blain

Marion Andreoli nation finale. Des sons et des lumières qui à assister, impuissants, à la véritable douleur ma société, comment faire pour les briser,
Le Délit témoignent de l’appel de la mort, car on ne d’autrui.» Pour eux, la douleur est trop sou- ou du moins, les nommer». La vie doit alors
peut inculquer «la vie de force» malgré tous vent délaissée dans la société, alors que c’est reprendre son cours. Pascal retourne au bu-

A
près Endormi(e), le Projet Mû entame les efforts effectués. un état connu de tous. Cependant, malgré reau, Nini prépare des sandwichs aux œufs.
un nouveau cycle avec Beauté, chaleur Avant de pénétrer dans la salle, nous la noirceur du sujet traité, Beauté, chaleur et La douleur est cachée dans le tiroir de la
et mort: celui de la perte. C’est l’his- sommes prévenus: le spectacle sera intime. mort ne sombre pas dans le mélodrame. Il y desserte. On y range la couverture du bébé,
toire de deux êtres plongés dans l’abîme Un couple (Nini et Pascal) et leurs deux en- a aussi de beaux moments, ponctués de rire le polaroïd (témoin de la perte) et la minute-
du deuil. Deux individus qui ont connu la fants, une fillette et un adolescent, sont sur et de joie. rie (éternel signal de l’appel de la mort).
beauté de la naissance, la chaleur de l’amour scène. Ils sont assis dans leur «salon»; c’est Dans Beauté, chaleur et mort, il ne s’agit
et la mort d’un enfant. L’histoire de Nini un portrait familial. Les enfants vont se cou- Jouer sa vie? pas d’impudeur, ni de voyeurisme, mais bien
Bélanger, metteure en scène et créatrice du cher. En guise de didascalie, Nini et Pascal se Pendant quatre-vingt minutes, nous de- de théâtre. Un témoignage de courage, une
Projet Mû, et de son compagnon Pascal présentent: je suis metteure en scène, je suis vons surmonter notre embarras et plonger expérience de l’intime, une réflexion pro-
Brullemans, dramaturge. dramaturge, ceci est notre véritable histoire. corps et âme dans l’histoire émouvante de fonde, des émotions bouleversantes. Une
Les temporalités –conception, naissan- La frontière entre le jeu et le réel est floue. Il nos deux «protagonistes». étrange expérience théâtrale, mais profondé-
ce, mort, après-mort– et les différents lieux est d’ailleurs difficile de savoir quand la piè- Le sujet de la pièce nous pose cette ment intéressante et enrichissante. Une dé-
–maison, hôpital, bureau– prennent vie grâ- ce commence véritablement. Probablement question: mettre en scène sa propre vie, avec marche artistique réfléchie, où, privilégiant
ce à des jeux de lumière et des accessoires lorsque Nini interpelle Pascal: «Tu es prêt?» des «non-acteurs» (dont son compagnon), l’hyperréalisme, Nini Bélanger poursuit tou-
qui changent de fonction au gré du lieu et et que les lumières s’éteignent. Pascal lance ne serait-ce pas comme une thérapie? La jours plus loin l’expérience de l’intime. Avec
du temps: une desserte devient berceau, une une phrase-choc: «J’ai trois enfants: un de fin de la pièce nous laisse perplexe sur ce Beauté, chaleur et mort, elle explore et repousse
distributrice à sandwichs nous transporte quinze, une de huit et une qui est morte». point. Nini et Pascal sont là pour parler du ainsi la limite entre scène et réalité. x
tour à tour de l’hôpital au bureau de Pascal, Silence. Un sujet tabou. Un mot qui déran- deuil. La pièce s’achève sur ces paroles: «Je
la couverture du nourrisson à l’hôpital sert ge. Le deuil est abordé de manière directe, suis contente d’être ici». Étaler sa vie privée Beauté, chaleur et mort
ensuite de nappe à la maison. L’ambiance sans compromis. Évoquer la mort provoque n’a aucun intérêt pour la metteure en scène. Où: Théâtre La Chapelle
se construit également grâce à divers sons, un malaise. Un malaise dont se sont nourris C’est la démarche que cela sous-tend qui 3700 rue Saint-Dominique
comme le sifflement rappelant la respiration Nini et Pascal pour concevoir Beauté, chaleur est intéressante. Nini Bélanger explique: Quand: jusqu’au 29 janvier
difficile du nourrisson et la minuterie qui et mort. Ils expliquent: «Ce fut notre point de «C’est plutôt de vouloir dire quels sont les Combien: 22 $
entame le compte à rebours vers la desti- départ, ce malaise. Celui d’inviter des gens tabous qui sont encore bien présents dans

12 Arts & Culture xle délit · le mardi 25 janvier 2011 · delitfrancais.com


THÉÂTRE

La Belle, la Bête et l’ère numérique


Lemieux Pilon 4D art et Pierre-Yves Lemieux présentent leur version revisitée et
édulcorée de La Belle et la Bête.

Yves Renaud

Émilie Bombardier d’une compagnie qui compte maintenant à elle, est un homme renfrogné au bord du trent toutefois très bien l’inconscient des
Le Délit une trentaine de créations à son actif. Car, si désespoir. Prisonnier d’un corps affreux et protagonistes, leurs désirs comme leurs in-
les productions de Lemieux et Pilon flirtent d’une demeure où le temps semble être sus- quiétudes. Il est à parier, toutefois, que ceux

V
oilà bientôt quatre ans que le duo constamment avec le merveilleux, projections pendu, il est farouchement protégé par une qui ne sont pas familiers avec les œuvres de
formé par Michel Lemieux et Victor 3D obligent, il faut croire que la transition dame cruelle que l’on croit être son ancien- Lemieux Pilon 4D art retiendront surtout de
Pilon, Lemieux Pilon 4D art, pré- dans l’univers du conte s’est faite de façon ne maîtresse et qui se fait aussi la narratrice la pièce cette composante très réussie.
sentait Norman, une création hybride d’une moins évidente. du conte, rôle campé avec brio par Andrée Pour être apprécié, un conte est certes
grande intelligence qui guidait le spectateur Réalisée Pierre Yves Lemieux, l’adap- Lachapelle. Rares sont ceux qui ignorent la une histoire qu’il faut prendre le temps de
à travers l’œuvre du cinéaste d’animation tation de cette histoire vieille de plusieurs suite de l’histoire. raconter. Et dans leur volonté d’émerveiller le
réputé Norman McLaren en compagnie du siècles est un conte contemporain pour Le problème de cette adaptation, cepen- spectateur, de lui en mettre plein la vue, c’est
danseur et chorégraphe Peter Trosztmer. Les adultes qui ne s’assume pas tout à fait. Belle dant, est que tout y semble précipité. La Belle ce que dramaturge et metteurs en scènes
metteurs en scène faisaient alors montre d’un (Bénédicte Décary) est une jeune artiste et la Bête tombent amoureux sans que cela semblent avoir omis. Autrement, à quoi bon
génie indéniable, prouvant au passage que la naïve, la fille d’un illustre marchand d’art. ne suive ce qui serait d’abord une attirance vouloir remettre au goût du jour un récit tant
technologie peut s’éloigner de la gadgetterie, Rongée par le deuil depuis la mort de sa mère, mêlée de crainte. Le texte semble être truffé apprécié et trop bien connu? x
qu’elle peut émerveiller en évitant le tape-à- elle s’habille de vieilles chemises et de panta- d’ellipses, à tel point que la pièce n’est plus
l’œil. lons couverts de peinture et réalise de bien qu’une succession de scènes anecdotiques. La Belle et la Bête
Ensuite vint Starmania, revu par l’Opéra sombres croquis dans son atelier, tout en Ainsi, les personnages paraissent unidimen- Où: Théâtre du Nouveau Monde
de Montréal en 2009, puis La Belle et la Bête essuyant les nombreux reproches que lui fait sionnels et irraisonnés. 84 rue Sainte-Catherine Ouest
présenté depuis mardi dernier au Théâtre du sa sœur (Violette Chauveau), un personnage Bien qu’elles soient brillamment orches- Quand: jusqu’au 12 février
Nouveau Monde (TNM), une création qui virtuel qui s’immisce constamment dans son trées, les projections 3D parviennent mal à Combien: 20,18 $ et 33,31$
risque de se faire oublier dans le parcours univers. La Bête (François Papineau), quant faire oublier la faiblesse du texte. Elles illus-

THÉÂTRE

La grande et belle folie au théâtre


Hugo Bélanger donne vie au célèbre baron de Münchausen au Théâtre Denise Pelletier dans l’excellent
Münchausen-Les machineries de l’imaginaire.
Frédéric Bouchard

Annick Lavogiez Fils, une troupe foraine qui, pendant 200 ans, Les costumes, originaux et hauts en couleurs, comédiens (Eloi Cousineau, Carl Poliquin,
Le Délit a joué sans relâche les aventures du baron contribuent indéniablement à la beauté de la Philippe Robert, Audrey Talbot, Marie-Ève
dans une entreprise aussi loufoque que les pièce (la redingote en velours rouge du baron Trudel) ont opéré un véritable travail sur

K
arl Friedrich Hieronymus, baron de récits de ce dernier. Pourquoi choisir cet an- marque l’imaginaire en rappelant subtile- le corps cher au metteur en scène qui per-
Münchhausen, est un personnage gle d’approche pour présenter ce visionnaire ment le tissu identique des rideaux entourant met à chacun d’entre eux d’interpréter avec
fascinant de la littérature parce qu’il imaginatif? Parce que la dernière représen- la scène du théâtre, emblème du genre, s’il justesse plusieurs personnages. Un bémol
brouille les frontières entre imaginaire, men- tation de la troupe ambulante a été marquée en est un). Les magnifiques marionnettes (le malgré tout, qui tient davantage au Théâtre
songe et réalité, et ce depuis plusieurs siècles. par la venue d’un fantasque personnage cla- douanier et le juge, sur la lune) maniées avec Denise-Pelletier qu’aux comédiens: la mau-
Né en 1720 en Allemagne et décédé en 1797, mant être le célèbre baron. Point de départ de excellence par les comédiens, auraient quant vaise acoustique de la salle nuit parfois à la
le baron est un personnage réel, un être de la pièce, cette rencontre entre un personnage à elle gagné à être plus grandes, étant donnée compréhension du texte.
chair et de sang transformé en mythe littérai- fascinant et une troupe ruinée qui véhicule le la taille imposante de la salle qui rend difficile, L’univers fantasque et absurde de
re par divers écrivains allemands et français doux plaisir de raconter des histoires permet depuis les derniers rangs, d’en saisir toutes les Münchhausen–Les machineries de l’imaginaire
–dont le premier fut Rudolf-Erich Raspe– qui à Bélanger une mise en abyme plutôt réussie. subtilités. fait donc de la pièce un bijou théâtral que
ont écrit et transmis les récits rocamboles- À travers la présence de ce théâtre dans Les quelques baisses de tension dans le l’on prend plaisir à recommander chaleu-
ques de ce menteur réputé et extraordinaire. le théâtre, mis en valeur par toute une machi- spectacle (conséquence d’un humour un peu reusement. Et, comme l’affirme le baron lui-
Hugo Bélanger (texte et mise en scène) s’ins- nerie vieillie, style fin XVIIIe, Hugo Bélanger répétitif et de quelques scènes qui auraient même: «Les sceptiques seront con-fon-dus!». x
crit dans la lignée de ces heureux passeurs joue avec les conventions du genre pour le pu être raccourcies) passent inaperçues, le jeu
d’histoires avec sa pièce Münchhausen–Les plus grand délice du spectateur. Poulies, cor- étant porté par une équipe hors pair. Il faut en Münchhausen–Les machineries de l’imaginaire
machineries de l’imaginaire. dages et autres «trucs» permettent en effet effet souligner que Hugo Bélanger avait pour Où: Théâtre Denise-Pelletier
L’originalité première de Hugo Bélanger au metteur en scène d’emmener son public collaborateurs dans cette entreprise théâtrale 4353 rue Sainte-Catherine
se situe dans son choix de centrer sa pièce dans un univers imaginaire incroyable… tout des acteurs dynamiques dont le jeu physique Quand: jusqu’au 29 janvier
non sur le seul personnage du baron, mais en lui en montrant les rouages, et ce sans contribue indéniablement à la qualité de la Combien: 23,50$
aussi et surtout sur le Théâtre Gallimard et jamais perdre le caractère ludique du lieu. pièce. Machinistes et marionnettistes, les

Visitez le delitfrancais.com pour des exclusifs web!


xle délit · le mardi 25 janvier 2011 · delitfrancais.com Arts & Culture 13
DANSE

Quand la danse n’est plus qu’un corps


Jocelyne Montpetit aborde dans La danseuse malade l’œuvre écrite de Tatsumi Hijika,
considérée pendant longtemps intraduisible.
Annick Lavogiez longue robe, et continue de se même lenteur extrême a son char-
Le Délit mouvoir sur la scène. me et peut bercer le public, le visage
Le spectacle continue, pendant de la danseuse -qui garde les yeux

Q
uand les lumières s’étei- une heure, sur ce rythme: la dan- clos ou mi-clos pendant la majeure
gnent au Théâtre de seuse arpente les planches pendant partie de ses apparitions sur scène-
Quat’Sous, le silence se quelques minutes sur des musiques empêche toute connexion avec les
fait et le public se prépare à un variées et, quand le noir se fait, la spectateurs, les mettant à distance
spectacle de danse d’une artiste qui voix de Capitano retentit. À chaque d’une expérience qui apparaît dès
a fait ses débuts sur la même scène, fondu au noir, la danseuse se retire lors plus comme un exercice phy-
quelque trente ans plus tôt. Les et se change pour revenir parcourir sique qu’un moment de partage
lumières s’allument sur le corps nu le lieu incessamment, de manière artistique.
de Jocelyne Montpetit, étendu sur langoureuse. Elle hante la scène, De plus, les costumes de la dan-
une grande table au centre de la se transforme successivement en seuse (des robes de Rocco Barocco,
scène. Le chant d’un chœur se fait différentes figures féminines tout Issey Miyake, Betsey Johnson),
entendre. Petit à petit, le corps se en revisitant symboliquement les qui auraient pu mettre en valeur
meut, très doucement, en harmo- morts et les malades chers à l’œu- le corps de Jocelyne Montpetit et
nie avec la musique et la lumière. vre chorégraphique d’Hijikata. enrichir son rapport à la danse, ne
Une dizaine de minutes passent Car il n’est pas réellement sont pas d’une grande originalité, et
avant que la danseuse ne se lève, question de danse dans La danseuse le spectateur, distrait par la lenteur Shin Koseki
doucement, pour arpenter lente- malade, du moins pas comme on du spectacle, finit même par se de-
ment la salle. Quelques instants pourrait l’entendre dans une inter- mander si leur coupe, mal ajustée,
plus tard, les lumières s’éteignent, prétation classique, pas pour les est un choix délibéré ou une simple
on entend une voix: le texte de non-initiés dont je fais hélas partie. erreur de parcours.

PASSIONNE
Tatsumi Hijika (voix de Francesco La danseuse se meut certes avec La danseuse malade est donc une
Capitano, également conseiller souplesse et légèreté, mais avec expérience plutôt décevante dans
dramaturgique) résonne dans la une telle lenteur que l’on se perd à l’ensemble. x
salle. Il évoque la danse, le corps
malade de sa sœur. L’ambiance
du spectacle est mise en place: il
attendre -sans résultat- un peu de
rythme dans cette réflexion sur le
corps qui semble n’être pas desti-
La danseuse malade
Où: Théâtre de Quat’Sous
DE CINEMA ?
évoque davantage une pensée sur née à être communiquée au public. 100 avenue des Pins Est
le corps que sur la danse. Quand En effet, si les mouvements Quand: jusqu’au 29 janvier DEVENEZ MEMBRE DE LA CINÉMATHÈQUE QUÉBÉCOISE !
les lumières se rallument, Jocelyne languissants de la danseuse auraient Combien: 22 $
Montpetit réapparaît, vêtue d’une pu séduire, puisque, après tout, • CINÉMA À VOLONTÉ
• RENCONTRES INÉDITES
• CLASSES DE MAÎTRES
CHRONIQUE • INVITATIONS EXCLUSIVES

Soleil de novembre ET BIEN PLUS ENCORE

IL Y A DE TOUT,
Luba Markovskaia | Réflexions parasites POUR TOUS LES GOÛTS,
POUR SEULEMENT
-autant celles remaniées à des fins Les nouvelles sont également
de publication, comme la série ponctuées de silences. Comme
100 $ PAR ANNÉE.
des Chroniques matinales, que les échange avorté ou comme non-dit,
billets d’humeur qu’on peut enten- le silence recèle la difficulté de com-
dre chaque dimanche à l’émission muniquer avec les plus proches.
de Joël Le Bigot-, je recherche tou- Les mots, lorsqu’ils sont trop nom-
jours ce ton ironique et narquois breux, sont blessants ou maladroits.
qui me plaît tant chez le chroni- Le silence, pendant inévitable de la
queur et qui paraît absent chez le solitude, entoure chaque person-
romancier ou encore le nouvelliste. nage, malgré la présence parfois
C’est pourtant justement ce étouffante d’autrui.
qui fait la force de ses récits de fic- Mais si les personnages d’Ar-
tion. Paradoxalement, cette force, chambault sont foncièrement seuls,
typique d’Archambault, c’est la si les liens familiaux sont presque
faiblesse de ses personnages, une nécessairement rompus ou usés,
faiblesse bien humaine et qui nous chacun cherche tout de même, à tâ-
Je ne sais pas si c’est rappelle la nôtre. Nus devant la vie, tons, l’écoute et la compréhension
par esprit de contradiction que je le temps et ses fatalités, ils n’ont d’un autre. Cet autre arrive un peu
cherche toujours à repérer chez un même pas le voile de l’ironie pour comme une discrète Providence,
écrivain le contraire de ce qu’on en se protéger contre les éléments. comme deux promeneurs qui se
dit communément, mais sans dou- Les échanges désabusés des rencontrent, un jour de pluie, en
te que oui. Ainsi, lorsque je lis un personnages de son dernier recueil novembre.
auteur comme Gilles Archambault, de nouvelles, Un promeneur en Se crée alors un espace éphé-
je cherche toujours une petite lueur novembre, sont dénués de pathos mère d’écoute et de complicité, un
d’espoir, une petite trace d’amour et d’illusions. Le recueil rassemble, moment de douceur. Ces instants,
LOLA · COLLECTION CINÉMATHÈQUE QUÉBÉCOISE

pour la vie de la part de cet auteur dans de courts tableaux intimis- chez Archambault, surviennent
dont on qualifie si souvent les écrits tes, une série de départs. Départ de comme le pâle soleil de novembre,
de sombres et de désespérés. Et je l’être aimé, de l’enfant, du frère, et qui perce parfois à travers la gri-
trouve ce que je veux, bien sûr, ce très souvent, le dernier des départs. saille, et la recherche de ces lueurs
qui me fait revenir sans cesse à cet La méditation sur la mort est en constitue la quête d’une vie.
univers qui lui est si unique, à cette effet présente à chaque page. Ces «La pluie ne cessera pas. Peut-
voix murmurée à laquelle on est claquements de portes, ces vies être même se transformera-t-elle en
vite accoutumé. quittées en catimini, sont d’autant neige. J’ai trop marché. Il est temps
Je dois dire qu’il me rend par- plus percutants dans la forme brève de rentrer. Je vais hâter le pas. Avec
fois la tâche plutôt difficile. Grande de la nouvelle, et accablants dans un peu de chance, il y aura de la 335, BOULEVARD DE MAISONNEUVE · MÉTRO BERRI-UQ AM · TÉLÉPHONE : 514.842.9763
admiratrice de ses chroniques leur succession. lumière chez Mme Durand.» x

14 Arts & Culture x le délit · le mardi 25 janvier 2011 · delitfrancais.com


ARTS VISUELS

Saisir l’instant
Un voyage dans le passé à travers 124 clichés du photographe Gabor Szilasi.

Raphaël Thézé Québec avec son père en 1957. Il traditions tout en développant des décoratifs dans l’architecture même qui se dévoile dans le portrait. Les
Le Délit ne revient qu’en 1980. Un voyage spécificités inattendues. Il dépeint des édifices commerciaux. Il prend couleurs, lorsqu’utilisées, ont géné-
chargé d’émotion où il retrouvera remarquablement le mélange entre aussi des panoramas d’espaces ur- ralement un intérêt pour photogra-

N
é en 1928 à Budapest, de vieux amis, d’anciens bâtiments le moderne et l’ancien, le religieux bains plus larges, comme le chan- phier une pièce, car elle traduit les
Gabor Szilasi se destine à où il a vécu mais surtout une ville et le profane en photographiant les tier de construction de l’UQÀM, goûts personnels et les différences
des études de médecine transformée. Il s’approprie avec son agencements uniques qui peuplent et des intersections de rues où l’on sociales et culturelles.
qui sont interrompues lorsqu’il appareil photo l’architecture éclec- le quotidien des gens qu’il ren- admire la justesse de son regard Gabor Szilasi oscille entre une
tente de fuir la Hongrie. Après cinq tique de Pest, sur la rive gauche du contre: crucifix disposé avec une dans le choix de la composition de démarche documentariste et artis-
mois de prison, n’ayant plus le droit Danube, un vestige du XIXe siècle antenne de télévision ou photogra- l’espace. Gabor Szilasi se dit être tique. Quand on lui pose la ques-
de poursuivre ses études, il trouve intégré aux constructions moder- phies érotiques juxtaposées à des peu intéressé par l’esthétique, c’est tion, il répond qu’il est préoccupé
un travail dans la construction. nes qui n’est pas sans rappeler images religieuses dans une cham- ce que communique l’image qui par le changement. Lors de la cap-
C’est à cette époque qu’il achè- Montréal. bre, par exemple. importe et pour lui cela passe par ture d’une photo, il s’agit d’un 125e
te son premier appareil, modèle C’est le hasard encore une fois Montréal le fascine donc pour l’organisation de l’espace. de seconde unique qui déjà fait par-
Zorkij, et développe son goût pour qui l’amène à travailler à Montréal sa diversité. Aujourd’hui encore il On remarque que son tra- tie du passé. La photo Motocycliste
la photographie. pour l’Office du film du Québec, s’émerveille de trouver au détour vail se constitue essentiellement au lac Balaton, si elle avait été prise
Ses premiers sujets sont em- d’abord comme technicien de d’un coin de rue un style, une de photographies argentiques en une seconde après, n’aurait certai-
preints d’innocence, il photogra- chambre noire, puis comme pho- architecture, une communauté noir et blanc. «La couleur n’a pas nement pas eu le même effet de
phie ce qu’il voit et ce qui attire son tographe pour des reportages dans entièrement différente de celle qui d’importance, confie-t-il, le noir et mouvement et les sujets auraient
regard: des amis et des scènes ur- le Québec rural. Lui qui avait tou- l’entourait cent mètre auparavant. blanc fait ressortir les traits essen- probablement été hors-cadre. Cette
baines pittoresques. La révolution jours vécu dans une grande ville, Il réalise une série de 150 pho- tiels et possède une persistance que spontanéité définit Gabor Szilasi
de 1956 lui fera changer de lentille. c’est la campagne qui le fascine. tos, format 4×5 pouces, sur la rue la couleur n’a pas». Ce qu’il pré- avant tout comme un promeneur,
Ses photos se chargent d’une tona- C’est dans les années Sainte-Catherine où il cherche à fère ce sont les portraits. Le noir et prenant les choses au hasard de ce
lité dramatique et prennent pour 1970 lorsqu’il se trouve dans le formaliser une représentation de la blanc transpose un côté psycholo- qu’il voit et guidé uniquement par
objet les foules évoluant dans un Charlevoix qu’il effectue son pre- ville et illustrer de manière vivante gique du visage alors que la couleur sa sensibilité. x
Budapest révolté entre les autoda- mier projet personnel avec un essai l’évolution des foules, des voitures met en évidence les défauts de la
fés d’ouvrages communistes et les photographique sur la région. Il dans une rue en perpétuelle muta- peau qui ne sont pas inhérents à la Gabor Szilasi -L’éloquence du quotidien
carcasses de tramways. explore les petites communautés et tion. personne. Il photographie sponta- Où: Musée McCord
Avec la tombée du rideau de découvre le paradoxe culturel de la Il essaie de saisir les goûts hé- nément le sujet sur un fond neutre, 690 Sherbrooke Ouest
fer et la possibilité de fuir, Gabor société québécoise qui offre à la fois téroclites des constructeurs qui ont l’objectif à quelques centimètres Quand: jusqu’au 6 février
Szilasi se retrouve par hasard au une continuité avec le passé et les essayé d’introduire des éléments de la personne, créant un malaise Combien: 7 $

Motocycliste au lac Balaton


Raphaël Thézé | Le Délit Gabor Szilasi

CHRONIQUE

Trauma à la tête
Catherine Renaud | Billet incendiaire
ne leur appose un jugement défi- House, ou encore l’inexactitude épisodes, je dois dire que mon vase drement d’un stationnement sou-
nitif. Je pourrais difficilement nier du portrait du monde hospitalier déborde. Autrement dit, et pour terrain dans lequel sont faits pri-
ces idées à mon sujet. Mais, j’ai en- (tranche de vie: je travaille dans un rester dans le bon goût, je préfé- sonniers Laurence Lebœuf, dont
vie de vous montrer qu’il demeure hôpital depuis deux ans, donc je rerais être exposée pour le restant les répercussions du viol n’ont pas
tout de même une once de bonne remarque ce genre de choses), ou de ma vie aux selles en conserve été traitées dans l’émission, et son
foi et un soupçon d’humanité au même encore les noms ridicules de l’artiste contemporain Piero petit ami, un autre résident joué
fond de mon vieux cœur de glace. dont les personnages sont affublés Manzoni qu’à un épisode supplé- par Yan England.
L’an dernier, j’ai décidé de (Dr Rush, urgentiste, Dr Légaré, mentaire de Trauma. En seulement Est-ce que Fabienne Larouche
donner une chance à Fabienne psychiatre, et j’en passe). Malgré trois épisodes de quarante-cinq peut défier davantage les règles de
Larouche, auteure célèbre de séries tout, j’ai fait de mon mieux pour minutes, Fabienne Larouche a es- base de la vraisemblance dans une
de longue haleine comme Virginie, garder l’esprit ouvert face à cette sayé de nous faire avaler ou plutôt, production soi-disant réaliste sans
dont la nouvelle série, Trauma, est nouvelle production télévisuelle, nous a enfoncé jusqu’au fond de la que personne ne pipe mot? Au
diffusée à Radio-Cadenas. Je me me disant que, pour qu’un budget gorge, le viol par un mafieux, dont diable la vraisemblance, ce qu’elle
suis convaincue que l’habit ne aussi généreux soit alloué à cette le frère également mafieux est hos- recherche ici, c’est le subversif, le
fait pas le moine, qu’il faut lais- série, c’est qu’elle doit bien avoir pitalisé au service de traumatologie, choquant, sacrifiant au passage
ser sa chance au coureur, etc. J’ai une certaine qualité. d’une docteure résidente (jouée cohérence et continuité. En fait,
Parfois, je me dis qu’à donc commencé à visionner cette À la fin de la première sai- par Laurence Lebœuf) déjà aux au visionnement du dernier épi-
me lire vous devez sans doute me série emplie de bonne volonté, son, je n’avais pas encore trouvé prises avec des problèmes psycho- sode, j’ai eu l’impression d’avoir
croire pleine de préjugés, intransi- réceptive à son génie potentiel. cette «certaine qualité», mais je logiques, Karine Vanasse en jeune reçu un trauma à la tête tellement
geante et cruellement moqueuse. Évidemment, dès le départ, plu- n’étais pas non plus prête à démo- délinquante se faisant infliger, à le début de cette série me semblait
Je pense aussi que vous vous dites sieurs éléments m’ont agacé, lir Trauma dans une chronique de sa propre demande, des mutila- incompréhensible, absurde, voire
que je ne donne de chance à rien comme le début de chaque épi- journal. Mes amis, ce jour est ar- tions génitales par sa belle-mère, le surréaliste.
ni à personne de me prouver leur sode avec un nouveau cas médical, rivé. La seconde saison de la série suicide par immolation par le feu Pousse, mais pousse égal ma
intérêt ou leur valeur, avant que je grossièrement calqué sur la série a débuté récemment et, après trois d’une autre résidente, et l’effon- Farouche. x

x le délit · le mardi 25 janvier 2011 · delitfrancais.com Arts & Culture 15


LE DÉLIT AIME...

La multipixelité de la SAT Dominic Paquin

Annie Li persienne est composée d’une L’œuvre s’inscrit dans le à l’échelle locale qu’internatio- mersif permanent, dédié à la créa-
Le Délit surface miroir et d’un côté cou- «Parcours lumière», la signature nale. La SAT a pour mission de tion artistique, où le public sera
vert de lumières (dites pixels, 960 visuelle du Quartier des specta- repousser les limites de la créa- invité à interagir: la Satosphère,

L
undi dernier marquait le au total) en forme de dôme. Les cles, qui lui permet de se distin- tion artistique en s’appuyant sur dôme intriguant trônant sur le
coup d’envoi des festivités lamelles tournent sur elles-mê- guer parmi les autres quadrilatères des idées et projets multidimen- toit de la SAT et que l’on peut
entourant le 15e anniver- mes à l’horizontale, offrant la SAT culturels du monde. Les concep- sionnels s’aventurant en terri- apercevoir depuis la rue.
saire de la Société des arts tech- à la rue et vice-versa, et créent des teurs du projet tiennent à rassu- toire inconnu, à la croisée de La SAT, qui n’a pas encore
nologiques (SAT). Le lancement jeux et vagues qui reflètent les rer les écolos, clamant respecter l’art et de la science. La Société terminé les travaux de son chan-
de la série d’activités qui se dé- humains dans leur environne- les principes de protection du ciel se veut un laboratoire vivant, un tier, nous réserve encore bien des
rouleront tout au long de l’année ment urbain grâce à ses miroirs. étoilé en utilisant la technologie lieu d’échange et de rencontre, surprises en lien avec la culture
était marqué par l’inauguration L’ensemble forme aussi une hor- DEL, qui consomme quatre- autant pour les initiés que pour numérique.
de l’œuvre d’art PIXINESS, qui loge inusitée, car les lumières vingt-trois fois moins d’énergie les néophytes. Cette institution Espérons que son succès
ornera désormais la façade de la prendront des formes spécifiques qu’une ampoule conventionnelle. culturelle devenue incontourna- certain saura émuler d’autres
SAT, nouvellement rénovée du lors des heures piles et à chaque Ce n’est que le début du re- ble pour la métropole offre dans diffuseurs et protagonistes cita-
boulevard St-Laurent. L’ouvrage quinze minutes, marquant le nouveau pour la SAT, fondée en les prochains mois des créations dins afin de vitaliser la Main et le
digital a été conçu par l’artiste rythme de l’urbanité montréalai- 1996 et installée sur le boulevard présentées en ses nouveaux lieux. Quartier des spectacles! x
visuel Axel Morgenthaler. Il s’agit se. Le tout se veut interactif, puis- St-Laurent depuis 2003. Le cen- Beaucoup sont curieux de décou-
d’une persienne robotisée cou- que les passants pourront animer tre transdisciplinaire s’acharne à vrir le nouvel étage de la SAT, le Soyez présents à la soirée
vrant la longueur de la vitrine les lumières –mais seulement s’ils promouvoir la recherche, la créa- Sensorium, qui mariera arts tech- d’ouverture officielle et restez informés
séparant la rue de l’intérieur du sont les heureux propriétaires tion, la formation et la diffusion nologiques et culinaires. L’étage des événements à venir en vous inscri-
bâtiment. Chaque lamelle de la d’un iPhone. des arts numériques, et ce tant comprendra aussi un théâtre im- vant à www.sat.qc.ca/inauguration.
La bd de la semaine
par Martine Chapuis

16 Arts & Culture x le délit · le mardi 25 janvier 2011 · delitfrancais.com

Vous aimerez peut-être aussi