2019 13:11
24 images
Cin-écrits
Les années 80
Numéro 47, janvier–février 1990
URI : https://id.erudit.org/iderudit/24740ac
Éditeur(s)
24/30 I/S
ISSN
0707-9389 (imprimé)
1923-5097 (numérique)
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90 I M A G E S
LA REALISATION JEAN BEAUDRY i 1 FRANÇOIS BOUVIER
I M A G E S 4 7 91
MICHEL PICCOLI LE PROVOCATEUR modulé, dans les films plus
par Robert Chazal, Éd. France-Empire, 1989, 274 p., 24 photos noir et
personnels d'Eastwood
blanc. Dist. au Québec: Québec-Livres. (Honky-Tonk Man, Bronco
Billy) traversés par la mélan-
Sans doute écrit à la va-vite, cet ouvrage que Robert Chazal consa- colie et le désenchantement.
cre à Piccoli est un très rapide survol de la carrière de l'acteur (quel- Lauteur insiste avec raison
ques lignes sur chaque film, ainsi que sur les principales émissions de sur les liens qui unissent au
télévision et pièces de théâtre) qui ne nous apprend rien sur l'homme, cinéma classique (Ford et
ni sur sa façon de travailler. Un livre pour aficionados. - M.J. Walsh surtout) celui qui
reste un des derniers pion-
niers du cinéma américain,
non seulement par sa théma-
LE CINEMA tique mais encore par ses
HONGROIS méthodes — tournages rapi-
(1963-1988) des, économie de la mise en
par Jean-Pierre Jeancolas. scène dont les caractéristi-
Ed du CNRS en co-éd. avec Cor- ques sont assez bien cernées :
vina Kiado Budapest 1989. 248 (Quatorze vies en danger,
pages. 30 pages notamment la manière,
de photos en noir et blanc. 1954; Un petit c a r r o u s e l de singulière dans le cinéma
fête, 1955; Professeur Hanni- américain d'aujourd'hui,
Déjà coauteur, avec Philippe bal, 1956), Félix Mariassy (Un CLINT dont Eastwood inscrit ses
Haudiquet et Istvan Nemeskurty, bock de blonde, 1955), Karoly EASTWOOD personnages dans l'espace et
du Cinéma hongrois (Centre Pom- Makk (Lillomfi, 1955); le soulève-
par Michèle Weinberger. la durée du plan.
pidou, 1979), qui est cependant, ment et l'invasion russe de 1956. Rivages/Cinéma no 22,
comme tous les ouvrages de la col- Fabri et Makk font partie, avec 1989, 205 p., 30 photos.
Ces remarques très
lection «cinéma pluriel», davan- Janos Hersko, Andras Kovacs et Dist. au Québec: Dimédia. justes, Weinberger les répète
tage un catalogue commenté, Jean- Peter Bacso, de ceux que Jeancolas plus qu'elle ne les approfon-
Pierre Jeancolas signe l'une des appelle «les Fondateurs», et aux- Dans cette honnête dit mais, à force de fréquen-
rares études en français sur le quels il consacre une vingtaine de monographie, l'auteur s'at- ter les monographies de chez
cinéma hongrois depuis le petit — pages. Il en alloue autant au seul tache essentiellement à décor- Rivages, on en vient à se
et fort stalinien — Panorama du Miklos Jancso, ou plutôt àjancso et tiquer les rapports que le dire que la faute en incombe
cinéma hongrois de George son équipe; il étudie la méthode, cinéaste entretient avec ses moins à l'auteur qu'au prin-
Sadoul en ...1952! les caractères et les périodes, personnages, son image de cipe même de la collection,
Le livre vient à son heure, défend, d'une manière plus con- star et les mythes améri- dont le cadre un peu contrai-
puisqu'une époque de l'histoire de vaincue, peut-être, qu'entièrement cains. Rapports complexes et gnant entraîne quasi auto-
la Hongrie, et donc de celle de son convaincante, lesfilmsrécents. ambivalents, faits d'un matiquement les redites.
cinéma, est sans doute en train de Des chapitres successifs sont mélange inextricable de (Faut-il ajouter une fois de
se terminer — un cinéma qui don- ensuite consacrés à — «la généra- consentement et d'auto-déri- plus qu'on apprécierait un
nait des signes d'essoufflement, tion moyenne» qui regroupe, aux sion (celle-ci de plus en plus effort particulier de l'éditeur
guetté d'un côté par l'académisme côtés d'Istvan Gaal, Marta Mesza- poussée, jusqu'à la rage, dans la qualité de reproduc-
de la forme (Mémoires d'un ros, Ferenc Kosa, Sandor Sara, Pal depuis The Gauntlet et Sudden tion des photos ?) - T.H.
fleuve, J.Elek), de l'autre par une Sandor, les membres du studio Bêla Impact, qui consacrent la
complaisance aux fantasmes indivi- Balasz (fondé en 1958, il devient
défection radicale du héros).
duels (Almanach d'automne, opérationnel en I960), la «promo-
B.Tarr; Avant que la chauve- tion Mariassy» ; Istvan Szabo, Zol- Il s'agit toujours, pour East-
souris n'achève son vol, P. tân Huszarik, Ferenc Kardos, Janos wood acteur et metteur en
Timar). Rozsa, Imre Gyongyossy, Pal Ga- scène, d'«explorer les creux
À un résumé des données éco- bor, Zolt Kezdi-Kovacs, Judit Elek... de son personnage» et, «avec
momiques et sociales contempo- — l'école de Budapest, issue du stu- un acharnement pervers»,
raines et des événements mar- dio Balasz, qui comprend, derrière de «déglinguer son image,
quants de l'Histoire, indispensable Istvan Darday, Bêla Tarr, Pal Erdoss, de se débarrasser de sa propre
parce que le peuple hongrois est Gyula et Janos Gulyas et Pal Schif- légende, de la montrer en
«doué de mémoire et marqué de fer — «une troisième génération?», décomposition» (cf. Harry et
cicatrices» et que «l'Histoire est dont les leaders seraient Gyula ses avatars). Ce «sabotage
une des sources et des clés du meil- Gazdag, Laszlo Lugossy, Gabor interne» est aussi à l'œuvre,
leur cinéma national», doublé Body, Fenerec Grunwaklsky, Gyor quoique différemment
d'impressions alertes sur la vie à gy Szomjas, Peter Gothar...
Budapest aujourd'hui, succède un Le grand mérite de ce livre
survol de l'histoire du cinéma hon- clair et vivant, outre la quantité
grois des origines à I960, dont les d'informations et l'intérêt des ana- PORTRAIT D'UN HOMME DU SIECLE
par Franco Zeffirelli, Éd. Belfond, 1989, 483 p., 35 photos noir et blanc.
temps forts sont la République des lyses, est, d'une part, de nous four- Dist. au Québec: Edipresse.
Conseils et la première nationalisa- nir un cadre dans lequel situer les
tion (31 films en cent trente-trois films que nous avons vus et les De prime abord, ce qui frappe à la lecture de cette autobiographie,
jours, tous perdus sauf un!). La cinéastes que nous connaissons un c'est l'absence totale de modestie de son auteur. Zeffirelli est absolument
répression qui suivit, sous la dicta- peu les uns par rapport aux autres convaincu d'être un grand artiste que la critique a injustement méprisé.
ture de Horthy, provoque l'émigra- et à ceux que nous ne connaissons Le ton tranche singulièrement avec la modestie de grands cinéastes
tion des cinéastes les plus en vue, pas, et par rapport aux regroupe- comme Kurosawa, Fellini et Preminger qui, lorsqu'ils se sont racontés,
Kertesz (qui deviendra Michael ments et tendances ; et d'autre part, ont su laisser à d'autres le soin de faire leur éloge. Ensuite, en poursuivant
Curtiz), les frères Korda, Fejos, Sze- de nous faire mieux mesurer les la lecture, on se rend vite compte que Zeffirelli n'a retenu de son exis-
kely, Varda, Toth. Puis en 1948, lacunes de la distribution et de nos tence que le potinage, incapable qu'il est d'amorcer une réflexion sur
la deuxième nationalisation, la connaissances, de nous apprendre son travail ou sur celui d'artistes qu'il a côtoyés et qui l'ont influencé.
guerre froide et la «glaciation stali- des titres et des noms, desfilmsque Enfin, on termine l'ouvrage en se disant qu'au fond, toute sa conception
nienne», le dégel de 1954, à la nous avons envie de voir, des de l'art est là: dans les apparences, les rencontres avec le beau monde,
faveur duquel sortent les premiers cinéastes que nous aimerions les mondanités. Qui trouvait VOtello de Zeffirelli creux ne sera pas déçu
films marquants, de Zoltân Fabri connaître. -M.E. par son autobiographie. — M.J.
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