m a rc h e r av ec
l e s d r ag o n s
Traduit de l'anglais
par Pierre Madelin
z
s
2013
zones sensibles
Pactum serva
préface
7
préface préface
Qui est cette personne que je me découvre être peu à peu ? Il chaque jour un peu plus des vérités qu’il avait assimilées pendant
semble que ce soit un enfant. Élevé dans une famille heureuse, où son enfance, il ne cessait au contraire d’y revenir et, en outre, de les
sa mère l’autorisait à donner libre cours à sa passion pour les trains défendre avec toute sa force de conviction face aux assauts oppres-
miniatures tandis que son père menait des recherches scientifiques sants de la discipline des adultes. Les essais réunis ici, le premier
sur les mécanismes de la dispersion des spores chez les champi- ayant été publié en 1990 et le dernier en 2013, sont autant de combats
gnons aquatiques, cet enfant allait passer de longues heures plongé menés au cours de cette campagne, dans les territoires de l’évolution
dans les pages de l’imposant chef-d’œuvre de D’Arcy Wentworth biologique et culturelle, des environnements humains et animaux,
Thompson, Forme et croissance, dont son père possédait une copie de des royaumes de la pensée et de l’action, et des discours rivaux de
l’édition originale de 1917, ou à étudier la mathématique des bulles l’art et de la science.
de savon et les trajectoires des toupies. Il arrivait également à cet Pourquoi l’enfant que je suis, ou que je suis redevenu, écrit-il
enfant de partir marcher dans la campagne, sans prêter la moindre désormais pour s’opposer à une forme de pensée qui, en arrachant
attention à son père lorsque celui-ci identifiait et égrenait les noms la culture à la biologie, nous sépare, nous autres êtres humains, de
latins de toutes les plantes et de tous les champignons devant les- nous-mêmes ? Parce que cette pensée ne peut s’empêcher de considé-
quels ils passaient. Il les connaissait tous ! À l’âge de 12 ans, la mère rer l’enfant comme une créature dont la valeur est moindre que celle
de l’enfant lui offrit un violoncelle et s’arrangea pour qu’il puisse de l’adulte, plus cultivé, un peu à la manière dont le primitif était
prendre des leçons. À l’école, sous l’égide de professeurs inspirés, il tenu pour inférieur au civilisé à une époque antérieure de l’anthro-
se tenait assis sur le bord de sa chaise, émerveillé par les mystères pologie. À l’évidence, tout être né d’un homme et d’une femme est
de l’univers tels que la science était en train de les démêler. Il expé- un humain. Mais la pensée moderne allait soutenir que si tous sont
rimentait les chambres à brouillard et étudiait la croissance des humains, certains sont plus humains que d’autres : l’adulte plus que
cristaux plongés dans des solutions chimiques. Il était évident qu’il l’enfant, le scientifique plus que le sauvage. Les enfants, au cours de
deviendrait mathématicien et scientifique. leurs « premières années », comme les « premiers hommes » dans les
Que se passa-t-il ? Après avoir étudié les sciences naturelles à l’uni- manuels consacrés à l’évolution humaine, sont décrits comme des
versité de Cambridge pendant un an, le jeune homme perdit ses illu- êtres chez qui la part de biologie est plus importante ; des êtres plus
sions. Après l’enthousiasme qu’avait suscité en lui l’enseignement proches de leurs origines dans la nature que les hommes d’époques
scolaire de la science, les cours de Cambridge furent une immense « ultérieures », chez qui la part de culture est en revanche plus impor-
déception. Il eut le sentiment que l’essentiel de ce qui était ensei- tante. Cela n’est pas acceptable à mes yeux. Bien sûr, l’enfant que je
gné était intellectuellement étriqué, consacré à la recherche systéma- suis, comme l’enfant que je fus, est ni plus ni moins un organisme
tique et bornée d’objectifs qui semblaient éloignés de l’expérience. de part en part. Mais à aucun moment, du berceau à la tombe, l’en-
À la différence de nombre de ses camarades étudiants, révoltés par fant ne commence ni ne cesse de tisser sa vie avec d’autres vies, à
la façon dont la science avait renoncé à ses principes démocratiques partir desquelles ces modèles que nous appelons « culture » sont
et par le compromis abject qu’elle avait passé avec les mastodontes continuellement produits. Et si cela est vrai des vies individuelles,
du pouvoir industriel et militaire, il ne devint pourtant jamais radi- cela doit également l’être de l’histoire humaine. De même qu’il n’y
calement hostile au projet scientifique. Il n’y voyait tout simplement a pas de séparation radicale entre la biologie et la culture dans la vie
pas de futur pour lui-même. Il voulait étudier une discipline au sein d’un enfant, il ne peut y avoir de séparation radicale entre l’évolution
de laquelle il aurait plus de marge de manœuvre, qui lui permettrait et l’histoire dans la vie des espèces. Nous sommes tous – et avons
à la fois de découvrir le monde et de se découvrir lui-même. C’est toujours été – des organismes-personnes.
ce qui le conduisit à l’anthropologie. Ce qui l’attira (un peu comme Pourquoi alors ne pas écrire sur ces organismes-personnes en
la biologie de D’Arcy Thompson auparavant), c’est qu’il y avait en les décrivant non comme des entités délimitées, mais au contraire
elle quelque chose comme une mathématique pure de la vie réelle comme des nexus composés de fils noués dont les extrémités
où l’expérience et l’imagination pouvaient s’unir. C’est ainsi que détendues se répandent dans toutes les directions en se mêlant à
commença son odyssée, son voyage de retour vers sa terre natale. d’autres fils dans d’autres nœuds ? Étant enfant, j’ai probablement
Plus il avançait, plus il prenait conscience que loin de s’éloigner été davantage influencé que je ne l’avais réalisé par les recherches
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préface préface
en mycologie de mon père. Ma description de l’organisme-personne ferroviaire. Ce n’est d’ailleurs pas cela qui me procurait le plus de
pourrait en effet tout aussi bien s’appliquer au mycélium fongique. plaisir ; je préférais placer les yeux à hauteur de la maquette de sorte
D’ailleurs, les mycologues sont en grande partie aux sciences biolo- que mon regard pénètre à l’intérieur du petit monde que j’avais
giques ce que les anthropologues sont aux sciences sociales : ils en créé, vagabonde parmi les silhouettes miniatures disposées sur le
constituent le groupe le plus gênant, les bouffons, les idiots, ceux quai de la gare, se faufile aux abords et à l’intérieur des bâtiments et
qui se glissent furtivement dans les fondations du pouvoir et en des hangars de la gare, ainsi qu’à travers les forêts et les prairies qui
sapent progressivement les prétentions. Les champignons, voyez- s’étendaient au-delà des rails. Le sol était composé de papier mâché
vous, ne se comportent tout simplement pas comme des organismes posé sur un grillage, l’herbe était en fils de coton, et les arbres com-
devraient se comporter. Ils coulent, ils suintent, leurs limites sont posés de lichens que j’avais ramassés en forêt. Il n’y avait là aucun
indéfinissables ; ils emplissent l’air de leurs spores et infiltrent le objet ! Rien d’autre qu’un assemblage de matériaux dont les racines
sol avec leurs sinuosités, leurs fibres ne cessant de se ramifier et sont aussi diverses que celles que nous tissons dans nos vies quo-
de s’étendre. Ce que nous voyons à la surface du sol, ce sont sim- tidiennes lorsque nous lisons les journaux, cousons nos vêtements,
plement des organes de fructification. Mais il en va également nourrissons les poules ou errons en forêt.
ainsi avec les hommes. Ils ne vivent pas à l’intérieur de leurs corps, Comment suis-je passer de la science à l’art ? Le premier cours que
comme les théoriciens de la société se plaisent à l’affirmer. Leurs je donnai, après avoir décroché un poste de maître de conférences à
traces s’impriment sur le sol, via leurs empreintes, leurs sentiers et l’université de Manchester, était intitulé « Environnement et techno-
leurs pistes ; leur souffle se mêle à l’atmosphère. Ils ne restent en vie logie ». C’était un cours fortement axé sur la science. Je voulais mon-
qu’aussi longtemps que subsiste un échange continu de matériaux à trer que toute anthropologie digne de ce nom devait au moins être
travers des couches de peau en extension et en mutation constante. compatible avec ce que les sciences biologiques nous avaient appris
C’est pourquoi j’en suis venu à interroger ce que nous entendons sur l’évolution et l’écologie de l’espèce humaine. Mes collègues du
par « environnement », pour finalement ne plus le concevoir comme département d’anthropologie étaient méfiants : c’était l’époque des
ce qui entoure – ce qui est « là-dehors » et non « ici dedans » – mais querelles autour de la sociobiologie, et le simple fait d’aborder le
comme une zone d’interpénétration à l’intérieur de laquelle nos vies sujet suffisait parfois à se voir accusé de déterminisme génétique,
et celles des autres s’entremêlent en un ensemble homogène. voire pire. Ce cours fut toujours considéré comme un enseignement
C’est également pour cela que j’écris contre la culture matérielle, à part, aux marges des territoires connus de l’anthropologie. Ce n’est
et contre l’idée selon laquelle c’est par ce qu’ils font avec les objets pas un hasard si « Environnement et technologie » fut abrégé en e.t.,
que les êtres humains créent du sens. Pour moi, il n’y a pas d’objets. inspirant ainsi des comparaisons moqueuses avec le film de Steven
L’enfant que je suis voit un monde en construction, non un monde Spielberg. Au fur et à mesure de l’évolution du cours et de ma propre
déjà construit. Fabriquer des choses ne consiste pas à imposer une évolution, je commençai cependant à prendre conscience de ce que
forme à la matière, comme si la finalité de nos actions était déjà mon père avait toujours su sans jamais avoir besoin de le dire, parce
établie avant même que ne commence leur exécution. Comment qu’il le vivait à travers la pratique scientifique dans laquelle j’étais
la forme peut-elle précéder le processus qui lui donne naissance ? plongé à la maison : il y a de la poésie dans la science. La poésie ne
Comment le futur peut-il précéder le présent et le passé ? Dans mes vient pas après la science, pour célébrer le triomphe de la raison sur
yeux d’enfant ne sachant pas ce que l’avenir nous réserve, fabriquer la nature. Elle vient avant la science, lorsqu’avec davantage d’humi-
des choses consiste continuellement à tisser le monde, à établir lité, nous reconnaissons que nous devons notre existence au monde
une correspondance entre le mouvement matériel et la vision envi- que nous cherchons à connaître. Le glissement de la science vers
ronnante. Le réseau de train miniature que je construisis lorsque l’art qui s’est opéré dans ma pensée et dans ma façon d’enseigner
j’étais petit ne fut jamais achevé. Le chantier resta en cours – un ne m’a donc pas éloigné de la science, il m’a au contraire permis
peu comme les chantiers des véritables voies ferrées – jusqu’au jour d’approfondir la connaissance que j’en avais, de m’interroger sur ses
où il fut abandonné lorsque d’autres choses, comme la musique, conditions de possibilité. Une fois encore, c’est en allant de l’avant
devinrent plus importantes à mes yeux. Ce n’est qu’occasionnelle- que j’ai retrouvé le chemin du retour. Pour moi, l’art, comme la poé-
ment, et non sans danger, que des trains circulèrent sur ma ligne sie et plus particulièrement la musique (en tant que violoncelliste)
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Il y a incontestablement quelque chose de contemporain dans les matérielles3. Une fois nos espoirs et nos rêves noyés dans l’éther de
mots de Bacon. La science d’aujourd’hui continue à fonder sa légiti- l’illusion, c’est la vie elle-même qui semble amoindrie. Réduite à sa
mité sur son recours aux données, qui sont à maintes reprises véri- fonction biochimique, elle n’est plus source ni d’émerveillement ni
fiées et revérifiées dans une interminable recherche de la vérité2. Et, d’étonnement. En fait, pour ceux d’entre nous qui ont été éduqués
pour l’essentiel, les sciences de l’esprit et de la culture, la psycho- dans les valeurs d’une société où l’autorité du savoir scientifique règne
logie et l’anthropologie, reposent elles aussi sur cette même entre- sans partage, la division de la réalité en deux domaines mutuellement
prise. Autrement dit, elles ont toutes deux accepté la division entre exclusifs, celui du fait et celui de la fable, est à ce point enracinée
ce que Bacon appelait le monde « lui-même », la réalité de la nature qu’elle en est devenue évidente. S’est alors posé le problème suivant :
qui ne peut être découverte que par une recherche scientifique sys- comment établir une passerelle entre ces deux domaines ? Comment
tématique, et les différents mondes imaginaires que les hommes, faire une place à l’art et à la littérature, à la religion ou aux croyances
en des lieux et à des époques différentes, ont inventé, et qu’ils ont et pratiques des peuples indigènes dans une économie de la connais-
pris pour la réalité elle-même parce qu’ils ignoraient la science et sance au sein de laquelle la véritable nature des choses est devenue la
ses méthodes. Alors que les anthropologues se consacrent à l’ana- prérogative exclusive de la science rationnelle ? Nous acceptons que
lyse comparative de ces mondes imaginaires, les psychologues pré- l’imagination subsiste parmi nous et nous tolérons son penchant à la
tendent étudier les mécanismes, supposés universels, qui président fantaisie, mais n’est-ce pas simplement pour satisfaire un besoin d’en-
à leur construction. Tous s’accordent à penser que les royaumes de la chantement dans un monde qui a par ailleurs cessé de nous émerveil-
réalité et de l’imagination ne devraient en aucun cas être confondus, ler ? Nous la conservons comme un symbole de créativité et de civi-
car l’autorité de la science repose sur sa prétention à révéler, derrière lisation, mais n’est-ce pas simplement par respect envers la diversité
les produits de notre imagination qui voilent notre regard, les faits culturelle, ou même uniquement pour notre divertissement4 ? Ces
du monde tel qu’il est réellement. On peut bien sûr étudier les pro- questions sont inévitables, mais en les posant, nous oublions à quel
duits de l’imagination et les faits afin d’apporter des explications point il est difficile de détacher la réalité de notre vie dans le monde,
que beaucoup d’anthropologues continuent à appeler « émiques » et du monde dans lequel nous vivons, des élans méditatifs de notre
(par opposition à « étiques »), mais mélanger ces deux types d’explica- imagination. Le problème n’a en fait rien à voir avec la manière dont
tions, c’est accepter que nos jugements soient obscurcis par l’erreur nous le posons : il ne s’agit pas de se demander comment réconcilier
et l’illusion. « Car Dieu sans doute ne permettroit pas », comme le dit les rêves de notre imagination avec les caractéristiques du monde,
Bacon, « que nous donnassions pour une copie fidelle du monde, un mais de s’interroger sur le moyen de les séparer.
pur rêve de notre imagination » (Bacon 1800-1803, p. 70). Historiquement, cette séparation émergea lentement et pénible-
Je veux montrer dans ce texte que l’injonction de Bacon, que l’on ment au cours des bouleversements religieux liés à la Réforme et des
retrouve au cœur de la science moderne, a eu des conséquences catas- débuts agités de la première science moderne, pour laquelle Bacon
trophiques sur la vie humaine et sur son rapport au monde, en déta- – ainsi que son contemporain Galilée – joua un rôle crucial. Mais ce
chant l’imagination de ses liens terrestres et en la laissant flotter processus se répète aujourd’hui dans l’éducation de chaque écolier
tel un mirage au-dessus de la voie que nous suivons dans nos vies à qui l’on apprend, sous peine de rater ses examens, à se méfier des
sens, à valoriser l’intellect au détriment de l’intuition, et à considérer
l’imagination comme une fuite et non comme un moteur de la vie
2. Alors que j’écrivais ce texte, une équipe de scientifiques menée par le pro-
fesseur Antonio Ereditato a rapporté que les neutrinos qu’ils avaient propul-
sés à travers un tunnel des Alpes avaient atteint des vitesses supérieures à 3. Ici, je développe un argument que j’avais initialement présenté dans un
celle de la lumière. Les découvertes de l’équipe, qui s’appuient sur environ article intitulé « Life beyond the edge of nature? Or, the miracle of society »
15 000 observations distinctes, ont alors semé la panique (avant que les résul- (in Greenwood 1997, p. 231-252).
tats ne soient démentis six mois plus tard). Commentant le tollé, l’éditoria- 4. Cette dernière position est illustrée par les déclarations des décideurs des
liste du Guardian (24 septembre 2011) fit remarquer que « la première tâche politiques scientifiques, qui soutiennent le financement public des bourses
de la science est de se confronter aux faits ; ce n’est que dans un deuxième dans les arts et les sciences humaines sous prétexte qu’elles contribuent
temps qu’elle doit en dégager le sens ». Plus ça change… directement ou indirectement aux « industries créatives ».
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épilogue marcher avec les dragons
réelle. Il semble que l’imaginaire soit irréel presque par définition : aux mâchoires béantes. Convaincu que le dragon était sur le point de
c’est notre mot pour désigner ce qui n’existe pas. Prenons l’exemple le dévorer, tremblant de peur, il appela les frères à l’aide. Ceux-ci arri-
des dragons : comme le savent tous les parents d’aujourd’hui, les vèrent en courant, mais aucun d’entre eux ne vit le moindre dragon.
dragons n’existent pas. En tant qu’adultes, nous sommes convain- Ils laissèrent néanmoins le renégat – toujours sous le choc de son
cus que les dragons sont des créatures imaginaires. Toutefois, la expérience – réintégrer le monastère. À partir de ce jour, le moine
plupart d’entre nous n’auraient aucun mal à en décrire un. Ayant ne s’égara plus jamais, il n’en eut même plus la pensée. Selon l’épi-
vu des images de dragons dans les livres que nous lisions lorsque logue de l’histoire, « les prières du saint [Benoît] lui avaient fait voir
nous étions enfants, et dans ceux que nous lisons à notre tour à nos le dragon qui le menaçait : ce dragon qu’il avait suivi jusque-là sans
propres enfants, nous sommes familiarisés avec leur apparence glo- le voir 6 ».
bale : des corps verts couverts d’écailles, de longues queues four-
chues, des naseaux dilatés, des dents aux allures de sabre et des La forme de la peur
bouches enflammées. Ces monstres parcourent le terrain imaginaire Peut-être le moine de ce conte moral souffrait-il simplement de
de la littérature pour enfants aux côtés d’une foule d’autres créatures cauchemars. Mais les hommes du Moyen Âge n’auraient pas été
tout aussi fictives. Certains d’entre eux, bien sûr, ont de véritables aussi facilement rassurés que les hommes modernes s’ils avaient réa-
équivalents zoologiques. Le tyrannosaure rex – peut-être la créature lisé qu’en rencontrant des dragons et d’autres monstres, ils n’avaient
la plus proche d’un dragon qui ait jamais existé – s’est éteint, ce qui fait que rêver. Ils n’étaient évidemment pas assez crédules pour pen-
arrange tout le monde, mais d’autres animaux (des cobras aux cro- ser que les dragons existaient, au sens précis du terme exister qu’in-
codiles et des ours aux lions) vivent encore, et il leur arrive même de voquent les hommes modernes lorsqu’ils affirment, au contraire,
tuer des hommes5. Et c’est à raison que nous les craignons lorsque que les dragons n’existent pas. Ce n’est pas comme si le moine, dans
nous les rencontrons en chair et en os. notre histoire, s’était retrouvé face à une autre créature que nous,
Leurs cousins fictifs, en revanche, n’inquiètent personne, car les hommes modernes, rétrospectivement et grâce à nos connaissances
seuls hommes qu’ils mangent sont aussi imaginaires qu’eux. Tout scientifiques, pourrions identifier, par exemple, comme une espèce
comme la matière des cauchemars, ces créatures sont isolées dans de reptile. Souvenons-nous que les frères qui vinrent à son secours ne
une zone d’apparitions et d’illusions rigoureusement dissociée du virent aucun dragon. Ils ne virent rien du tout. En revanche, comme
domaine de la vie réelle. Nous calmons le dormeur qui se réveille ter- en témoigne à plusieurs reprises le récit de Grégoire, ils virent que
rifié, sur le point d’être dévoré par un monstre, en utilisant ces mots le moine tremblait. Il ne fait donc pas de doute qu’ils virent la ter-
rassurants : « Ne t’inquiète pas, ce n’était qu’un rêve. » Ainsi, la fron- reur gravée sur son visage. Et pourtant, quand le moine appela pour
tière entre le fait et le fantasme, qui avait semblé temporairement être sauvé des mâchoires du dragon, les frères comprirent immédia-
mise en doute au moment du réveil, est immédiatement restaurée. tement la situation difficile dans laquelle il se trouvait. Ils ne réa-
Que dire alors du récit qui provient de la Vie de saint Benoît de Nursie girent cependant pas à sa crise – alors qu’un psychiatre réagirait
écrite par Grégoire le Grand en 594 ? C’est l’histoire d’un moine qui aujourd’hui aux divagations d’un fou échappé d’un asile –, comme si
rencontra un dragon. Ce moine était agité : son esprit ne cessait de elle avait exprimé des hallucinations, peut-être causées par la drogue,
s’égarer et l’idée d’échapper à la réclusion et au confinement de la caractéristiques d’un esprit fiévreux et perturbé qu’il vaudrait mieux
vie monastique le démangeait. Finalement, le vénérable frère Benoît, enfermer et condamner à la réclusion solitaire pour prévenir toute
qui en avait assez des plaintes du moine, lui intima l’ordre de partir. contagion. Au contraire, ils reconnurent tout de suite dans la vision
Mais aussitôt qu’il eut franchi les limites du monastère, le moine fut du dragon l’expression du trouble du moine et se mirent eux-mêmes
horrifié en découvrant que son chemin était bloqué par un dragon en danger pour répondre, affectivement autant que physiquement,
à sa détresse7. Le moine était sur le point d’être consommé par la
5. À cette liste pourrait s’ajouter le dragon de Komodo, la plus grande espèce de
lézard encore en vie dans le monde, qui habite les îles du sud-est de l’Indoné- 6. Selon Vie et règle de saint Benoît, traduit par Daniel Demongeot,
sie. Bien qu’ils soient rares, ces animaux sont extrêmement dangereux, et les Médiaspaul Éditions, Paris, 2006.
attaques contre des humains ont augmenté au cours de ces dernières années. 7. Je suis reconnaissant à Godelieve Orye pour cette idée.
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peur et il sentait déjà les symptômes qui accompagnaient la désinté- réellement. Lorsqu’il sortit du monastère, il perdit complètement ses
gration de la personne. Le dragon n’était pas la cause objective de la moyens, faisant l’expérience d’une forme de désorientation corpo-
peur, il était la forme même de la peur. relle qui survient quand une personne est jetée dans un environne-
Pour les frères des communautés monastiques, cette peur était ment totalement inconnu. C’est comme si le sol s’était dérobé sous
tout à fait normale et bien connue de tous, elle était gravée en eux ses pieds. Au moment où le dragon se cabra sous ses yeux, obstruant
par une rigoureuse discipline spirituelle et corporelle. Pendant son chemin, il paniqua. Il découvrit qu’il ne pouvait pas aller plus
leur formation, des histoires et des images de dragons et d’autres loin. En réalité, conclut l’histoire, Benoît rendit un grand service au
monstres tout aussi terrifiants étaient utilisées, non pas comme moine en le jetant à l’extérieur, car il lui permit de voir – et ainsi de
nous le ferions aujourd’hui, pour créer une zone de confort et de connaître – le dragon qu’il avait auparavant suivi aveuglément. Pour
sécurité en reléguant tout ce qui pourrait être effrayant dans l’imagi- les écrivains de la tradition monastique, comme le souligne très clai-
naire, mais en insufflant la peur dans l’esprit des novices pour qu’ils rement le récit, il fallait voir pour savoir, et ces deux activités sui-
en fassent l’expérience, sachent en reconnaître les manifestations et vaient des trajectoires en mouvement. Pour comprendre le sens de
– par une discipline stricte d’exercices mentaux et corporels – la sur- leurs propos, nous devons penser la connaissance, comme l’explique
monter. En tant que forme manifeste d’un sentiment fondamental Carruthers, en « termes de chemins et de “voies” ». Le penseur médié-
chez l’homme, le dragon était l’incarnation tangible de ce que signi- val, en un mot, était un voyageur accomplissant un trajet dans son
fiait « connaître » la peur. Ainsi, dans l’ontologie médiévale, le dragon esprit de lieu en lieu, élaborant sa réflexion au fur et à mesure de
existait pour autant que la crainte existe, non comme une menace sa progression (Carruthers 1998, p. 70 ; voir aussi Ingold 2011a [2007],
extérieure mais comme une souffrance imprimée au cœur même de p. 25-27 et 126-127).
la personne qui la subissait. En tant que tel, il était aussi réel que
l’expression de son visage ou l’insistance de sa voix. Mais il ne pou- Rêves et réalité
vait être vu ou entendu que par celui qui en était lui-même effrayé. Je reviendrai en temps voulu sur cette notion de trajet. Pour le
Voilà pourquoi les sauveurs du moine ne virent eux-mêmes aucun moment, permettez-moi d’introduire un autre exemple. Parmi les
dragon. Ils étaient probablement motivés par un sentiment de com- Ojibwas, des chasseurs et trappeurs indigènes du Nord canadien, on
passion, qui pouvait leur faire penser – dans le langage de l’époque – dit qu’il existe un oiseau dont le bruit, lorsqu’il fend le ciel, ressemble
à l’image de la sainteté, d’une lumière irradiante. Dans l’imagination à celui d’un coup de tonnerre. Peu d’hommes l’ont vu, mais on attri-
monastique, les saints – comme les dragons – étaient fabriqués à par- bue à ceux qui l’ont vu des pouvoirs visionnaires exceptionnels.
tir de fragments de textes et d’images montrées aux novices au cours Selon l’ethnographe Alfred Irving Hallowell, parmi ces quelques per-
de leur formation. En ce sens, pour utiliser la formule employée par sonnes se trouvait un garçon d’environ douze ans. Hallowell raconte
Mary Carruthers, les saints comme les dragons étaient des « produits qu’au cours d’un violent orage, le garçon sortit en courant de sa tente
de l’imagination » (Carruthers 1998, p. 187). Mais pour les penseurs et vit un oiseau étrange posé sur les rochers. Il revint en courant
médiévaux, ces produits, loin d’être isolés à l’écart de la « vie réelle », pour appeler ses parents, mais lorsqu’ils arrivèrent, l’oiseau avait
étaient des expressions de l’expérience humaine, qui était vécues disparu. Le garçon était certain qu’il s’agissait de Pinesi, l’Oiseau
dans un espace de rupture entre le Paradis et l’Enfer. Tonnerre, mais ses aînés n’étaient pas convaincus. C’est seule-
Le moine de l’histoire était évidemment déchiré entre les deux. ment quand un homme qui avait rêvé de l’Oiseau confirma la des-
Renvoyé du monastère par Benoît, un homme proche de la sainteté, cription du garçon que la question fut tranchée et le récit du jeune
le diable – sous la forme du dragon – l’attendait à l’extérieur. Secouru homme accepté (Hallowell 1960b, p. 32). À l’évidence, Pinesi n’est pas
juste à temps, il fut reconduit à l’intérieur du monastère. L’histoire un oiseau ordinaire, tout comme le dragon n’est pas un reptile ordi-
se déroule donc en suivant un mouvement : de l’intérieur vers l’ex- naire. Comme le son du tonnerre lui-même, la présence de l’Oiseau
térieur, puis de nouveau vers l’intérieur. Mais dès le début, nous Tonnerre se fait sentir non comme un objet du monde naturel, mais
dit-on, l’esprit du moine avait tendance à s’égarer. D’ailleurs, dans comme un phénomène de l’expérience (Ingold 2000a, p. 278-279).
un curieux rebondissement à la fin du récit, Grégoire raconte que, C’est la forme incarnée d’un bruit qui résonne à travers l’atmosphère
pendant tout ce temps, le moine avait suivi le dragon sans le voir et submerge la conscience de tous ceux qui l’entendent. De la même
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épilogue marcher avec les dragons
manière que les moines, au moment où ils accoururent pour secou- précisément dans cette veine que Kekulé poursuivit son discours, en
rir leur confrère, ne virent aucun dragon, les parents du garçon n’ob- donnant à son audience le conseil suivant : « Laissez-nous apprendre
servèrent aucun Pinesi. Mais s’ils l’avaient vu, l’image de l’oiseau, à rêver, messieurs, peut-être ainsi trouverons-nous la vérité […] Mais
comme celle d’une puissante sensation auditive, leur aurait été par- prenons garde à ne pas publier nos rêves tant qu’ils n’ont pas été
faitement familière. L’Oiseau Tonnerre est peut-être un produit de confirmés par une réflexion consciente » (Benfey 1958). De fait, des
l’imagination, mais c’est une imagination qui imprègne toute l’expé- expérimentations ultérieures réalisées en laboratoire prouvèrent
rience phénoménale. que l’hypothèse de Kekulé était en grande partie fondée, à tel point
Souvenons-nous que l’observation du garçon, avait été confir- qu’elle devint une pierre angulaire du champ émergent de la chimie
mée par un rêve. Bacon aurait été mortifié. Pour nous modernes, il organique, au contraire du rêve lui-même. À la lumière crue du jour,
est plus courant et bien entendu plus acceptable que les rêves soient le rêve tomba dans l’oubli. La science concède donc à l’imagination
confirmés par l’observation. En voici un exemple célèbre : l’histoire le pouvoir de faire des hypothèses – ou, comme nous le disons, de
racontant la façon dont le chimiste Friedrich August Kekulé décou- « sortir des sentiers battus » –, mais seulement en la bannissant de
vrit la structure de la molécule de benzène, composée d’un anneau la réalité même dont elle nous offre un aperçu. Pour les Ojibwas,
de six atomes de carbone. Selon le récit, certes rétrospectif et proba- en revanche, c’est le contraire. Pour eux, la vérité des choses n’est
blement embelli, de Kekulé lui-même – prononcé lors d’un discours pas seulement découverte mais également vérifiée par l’expérience
au Berlin City Hall célébrant le vingt-cinquième anniversaire de sa onirique personnelle, raison pour laquelle l’observation du Pinesi
découverte –, celle-ci eut lieu une nuit de 1865, alors qu’il se trouvait par le garçon pouvait être corroborée par le rêve de son aîné. Dans
dans la ville belge de Gand. Il avait veillé tard dans son bureau, étu- cette quête d’un savoir passant par l’expérience, les puissantes créa-
diant un manuel. Comme il n’avançait pas beaucoup, il avait tourné tures non humaines qui habitent le cosmos ojibwa, dont l’Oiseau
sa chaise en direction du feu et s’était assoupi. En rêvant, il vit alors Tonnerre, ne sont pas des ressources analogiques mais des interlo-
des atomes gambader devant ses yeux et s’entortiller en un mouve- cuteurs vivants. Ce cosmos est polyglotte, un mélange de voix par les-
ment évoquant l’ondulation d’un serpent. quelles différents êtres, dans leurs différentes langues, annoncent
leur présence, se font sentir et ont des effets. Pour mener votre vie
« Mais regardez ! Qu’est-ce que c’était ? L’un des serpents s’était emparé comme une personne ojibwa vous devez être attentif à ces voix, les
de sa propre queue, et la forme s’était mise à tourbillonner de façon écouter et répondre à ce qu’elles vous disent.
moqueuse sous mes yeux. Je me suis réveillé comme si j’avais été saisi Une autre histoire d’Oiseau Tonnerre relatée par Hallowell – qui,
par un éclair […]. J’ai passé le reste de la nuit à dégager les conséquences il est vrai, lui a été racontée par un informateur – illustre parfaite-
de l’hypothèse » (Benfey 1958, p. 22 ; voir aussi Roberts 1989, p. 75-81). ment ce point. L’informateur était assis dans une tente avec un vieil
homme et sa femme. Un coup de tonnerre retentit. Le vieil homme
Peu importe ce que Kekulé a pu sentir au moment de son réveil, se tourna immédiatement vers sa femme. « As-tu entendu ce qui a été
nous pouvons être sûrs qu’une fois évanoui l’éclair qui l’avait arra- dit ? », lui demanda-t-il. « Non, je n’ai pas bien saisi », lui répondit sa
ché à son sommeil, le serpent tournoyant de son rêve ne fut plus femme. Commentant cette discussion, Hallowell remarque que le
une apparition mais une figure abstraite de la pensée – un serpent vieil homme « a réagi à ce bruit de la même manière qu’il aurait réagi
avec lequel « il était bon de penser » – susceptible de l’aider à déchif- à un être humain dont il n’aurait pas compris les paroles » (Hallowell
frer la structure d’une réalité donnée. Le serpent et l’anneau de ben- 1960b, p. 34). Mais il ne s’agissait pas d’un simple échec de traduction.
zène peuvent donc être rangés d’un côté ou de l’autre d’une division Ce n’était pas comme si l’Oiseau Tonnerre avait eu un message pour
ontologique imperméable entre l’imagination et la réalité. C’est ce le vieil homme, et que celui-ci n’avait pas réussi à le saisir à cause
qui permet à l’un de représenter l’autre de façon métaphorique. La de sa maîtrise imparfaite du langage des Oiseaux. « Dans l’ensemble »,
convergence du serpent et de l’anneau renforce la division au lieu de observe Hallowell, « les Ojibwas ne s’attendent pas à recevoir un
la faire éclater. message chaque fois qu’un coup de tonnerre retentit. » Il s’est avéré
L’hypothèse suscitée par le rêve n’est donc qu’une chimère que cet homme, dans sa jeunesse, s’était familiarisé avec l’Oiseau
tant qu’elle n’est pas soumise à une vérification empirique. C’est Tonnerre grâce aux rêves qu’il avait fait lors de sa puberté,
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développant peu à peu une étroite relation de tutelle avec Pinesi je l’ai déjà observé – la pratique méditative de la lecture des textes
(Hallowell 1966, p. 459). Dans le contexte de cette relation, écouter et liturgiques s’apparentait à une sorte de trajet. Encore et toujours, ils
répondre au tonnerre ne relevait pas de la traduction mais de l’empa- comparaient leurs textes à un terrain à travers lequel il leur fallait
thie ; il s’agissait d’établir une communion de sentiment et d’affect, se frayer un chemin comme des chasseurs sur une piste, puisant ou
ou, en résumé, de s’ouvrir soi-même à l’être d’un autre (Ingold 2000a, s’arrêtant sur les choses sur les choses auxquelles ils se trouvaient
p. 106 ; voir aussi Gieser 2008) ; et c’est surtout dans le rêve, lorsque confrontés, ou sur les événements dont ils étaient témoins au cours
les frontières qui entourent le moi dans la vie consciente se dis- de leur voyage. Le mot latin employé pour décrire les étapes de ce
solvent, que cette ouverture survient. trajet était tractare, dont provient le mot anglais « treatise », au sens
Mais un scientifique aussi sérieux que Kekulé n’aurait même pas de texte écrit. À mesure que les moines avançaient, les différents per-
pu envisager une telle ouverture. Pour lui, la voie menant à la véri- sonnages qu’ils rencontraient sur leur chemin, dont les histoires
table connaissance ne reposait pas sur un dialogue avec les êtres étaient inscrites sur les pages qu’ils lisaient, leur parlaient avec des
du monde non humain, mais sur une interprétation précise et litté- paroles de sagesse qu’ils écoutaient et dont ils tiraient les enseigne-
rale des faits qui y étaient consignés. Le chercheur qui « suivrait les ments. Ces paroles étaient nommées voces paginarum, les « voix des
voies de l’Éclaireur », avertissait Kekulé, « doit prendre note de chaque pages » (Leclercq 2008, p. 21 ; Olson 1998 [1994], p. 211 et Ingold 2011a
empreinte, de la courbure de chaque brindille, de chaque feuille sur [2007], p. 23-25). D’ailleurs, lire était en soi une pratique vocale et
le sol. Alors, se tenant à l’extrémité atteinte par ses prédécesseurs, les bibliothèques monastiques bourdonnaient des bruits de la lec-
il n’aura aucun mal à percevoir où le pied d’un pionnier ultérieur ture. Les moines murmuraient les voix des pages, ils engageaient
pourra s’appuyer sur un sol solide » (Benfey 1958, p. 23). Le but, tel la conversation avec elles comme si elles avaient été audibles. Lire,
que Bacon l’avait exposé, était d’offrir « la véritable vision des vestiges en son sens médiéval originel, c’était être conseillé par ses voix, ou
et des caractères que l’auteur des choses a imprimés dans ses créa- prendre conseil auprès d’elles, tout comme le vieil Ojibwa aurait été
tures » (Bacon 1800-1803 [1620], p. 71). Il s’agissait de révéler les secrets conseillé par la voix de son mentor l’Oiseau Tonnerre si seulement il
de la nature. Pour cela, il vous faut une clé, ou plutôt plusieurs clés, avait entendu ce qu’il disait8 !
afin d’ouvrir les portes les unes après les autres. Le serpent de Kekulé Entouré par les voix des pages à la manière dont le chasseur est
offrait l’une de ces clés, sous la forme d’un anneau. Dans L’Essayeur entouré par les voix de la terre, le lecteur médiéval suivait une tra-
(1623), Galilée trouva ses propres clés dans les caractères mathéma- dition. Dans son étude encyclopédique sur la présence des ani-
tiques, dans les « triangles, cercles et autres figures géométriques » maux dans les mythes, les légendes et la littérature, Boria Sax sou-
qui composent le langage propre aux mathématiques. « La philoso- ligne que le mot « tradition » provient du mot trade, qui signifiait à
phie », écrivait Galilée, « est écrite dans ce vaste livre constamment l’origine « trace ». « Étudier une tradition », écrit Sax, « c’est suivre les
ouvert devant nos yeux ( je veux dire l’univers), et on ne peut le com- traces d’une créature, comme si l’on était un chasseur, dans un loin-
prendre si d’abord on n’apprend à connaître la langue et les carac- tain passé » (Sax 2001, p. x ; je remercie Maan Barua d’avoir attiré mon
tères dans lesquels il est écrit » (Chauviré 1980, p. 141). attention sur cette étude). Chaque créature est son histoire, sa tra-
dition, et la suivre, c’est à la fois accomplir un acte de mémoire et
Des mots et des œuvres s’ouvrir au futur, tout en s’inscrivant dans la continuité des valeurs
L’idée du livre de l’univers, ou de la nature, est extrêmement du passé. Souvent, le nom de la créature est lui-même une histoire
ancienne – elle était aussi courante parmi les penseurs médiévaux condensée ; il suffit alors de le prononcer pour que l’histoire se révèle.
qu’elle le fut par la suite pendant l’essor de la science moderne. Elle Mais elle se révèle également dans les appels ou les vocalisations des
reposait à l’origine sur une homologie entre le verbe de Dieu (ver- créatures elles-mêmes – si elles ont une voix – tout comme dans leur
bum dei), s’exprimant dans la rédaction des écritures, et les œuvres présence et leur activité manifeste et visible (Ingold 2011b, p. 165-175).
de Dieu, se manifestant dans la création du monde et de ses créa- En tant que nœud dans un écheveau de représentations, d’histoires,
tures. La question était : « Comment les humains pourraient-ils lire d’appels et d’observations, dont aucune n’est ontologiquement
ces livres jumeaux ? » (Bono 1995, p. 11). Cette question nous permet
de revenir aux moines de l’époque médiévale, pour qui – comme 8. Sur le sens de la lecture au début du Moyen Âge, voir Howe 1992.
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première ou plus « réelle » qu’une autre, toute créature – pourrions- Lire le nouveau livre de la nature
nous dire – n’est pas tant un être vivant que l’illustration d’une cer- Au début du xvie siècle, Martin Luther exhorta ses lecteurs à
taine manière d’être vivant, chacune de ces manières d’être ouvrant abandonner les rêves et les fantaisies qui étaient nés chez leurs pré-
pour le penseur médiéval une voie vers l’expérience de Dieu. Il en décesseurs lorsque ceux-ci essayaient de s’accorder aux voix qui, pen-
allait également de même des lettres et des symboles du manuscrit saient-ils, leur parlaient à travers les pages des manuscrits. Il les
écrit au VIIe siècle qui, selon Isidore de Séville, permettait au lecteur incita également à distinguer clairement le sens littéral des mots et
de réécouter et de garder en mémoire les voix de ceux qui n’étaient leurs interprétations ultérieures (Olson 1998 [1994], p. 177-180). Il n’y
pas physiquement présents (Carruthers 2002 [1990], p. 137). Le livre avait dès lors plus qu’un pas à franchir pour étendre ce raisonne-
de la nature se reflétait donc dans la nature du livre : une seconde ment des mots aux œuvres, c’est-à-dire au livre de la nature. C’est
nature composée non d’œuvres mais de mots (Clingerman 2009). ce que fit Bacon, un siècle plus tard, en insistant sur une distinction
Pour Isidore, la lecture devait se faire en silence. Elle ne pouvait absolue entre les rêves de l’imagination et les caractéristiques du
toutefois être entièrement silencieuse puisqu’elle dépendait des monde. Je voudrais attirer l’attention sur trois corollaires découlant
mouvements de la bouche et de la gorge : il n’y avait à l’époque pas de cette transition. Le premier est lié à l’anticipation du futur. Les
d’espaces entre les mots d’un manuscrit (Saenger 1982, p. 384). La hommes du Moyen Âge étaient conseillés par les voix de la nature
seule manière de lire était donc de lire à voix haute, de suivre les et du monde non humain ; ils suivaient ces conseils et s’appuyaient
lignes des lettres à la manière dont on suit les lignes d’une partition, sur leur propre expérience pour se frayer un chemin dans le futur.
laissant les mots émerger à travers la lecture elle-même. Au xiie et Grâce à une sensibilité fondée sur des liens de perception intimes
au début du xiiie siècle, un changement eut lieu : le lecteur se mit avec leurs environnements, ils pouvaient non seulement parler du
peu à peu à lire uniquement avec les yeux, sans accompagner sa lec- passé, mais également prédire le futur. Mais un tel présage, comme
ture ni par la voix ni par les gestes. Cette transition fut rendue pos- le montre Olson, doit être clairement distingué du type de prédiction
sible par la division de la ligne du texte en mots segmentés, chacun à laquelle aspire une lecture scientifique du livre de la nature (Olson
d’entre eux pouvant être saisi au premier regard grâce aux espaces 1998 [1994], p. 195-196). Car prédire, ce n’est pas ouvrir une voie à tra-
entre chaque mot. Le médiéviste et paléographe Paul Saenger a mon- vers le monde mais fixer à l’avance un point final. Alors que le pré-
tré comment, suite à l’adoption de cette lecture silencieuse, les voix sage est guidé par un dialogue avec la nature, la prédiction se livre à
des pages sont effectivement devenues muettes (Saenger 1982, p. 378 des extrapolations à partir de faits observables. Faire appel à ces faits,
et 397). Tant que toutes les personnes présentes dans une biblio- c’est spéculer sur le futur mais pas voir en lui.
thèque monastique lisaient à voix haute, le son de sa propre voix suf- Le deuxième corollaire concerne l’acte. J’ai montré comment,
fisait à occulter le son des autres voix. En revanche, comme le sait pour les lecteurs du Moyen Âge, l’activité vocale et gestuelle de la lec-
tout étudiant actuel, lorsqu’une personne essaie de lire en silence, le ture à voix haute produisait le sens. L’action et la connaissance, dans
moindre bruit peut être source de distraction. Le silence en vint à ce cas précis, étaient tout aussi indissociables que la mastication
régner à l’intérieur des monastères. À l’extérieur, par contre, dans la et la digestion – une analogie que l’on retrouve explicitement dans
société laïque, la lecture orale continua à prédominer jusqu’aux xive l’ancienne caractérisation de la pensée comme processus de rumi-
et xve siècles. Comme l’a souligné l’historien des sciences cognitives nation. Ruminer, c’est cogiter sur les choses – à la manière dont le
David Olson, c’est la Réforme qui annonça la transition décisive des bétail rumine l’herbe – et digérer leurs significations (Carruthers
formes de lecture, de la lecture entre les lignes à la lecture de ce qui 2002 [1990], p. 216 ; Ingold 2011a [2007], p. 28). Comme nous l’avons
est sur les lignes, de la recherche de révélations ou d’« épiphanies » à vu, c’est en abordant la lecture sous forme de trajet que les hommes
la découverte du sens littéral unique déposé dans le texte et acces- du Moyen Âge lisaient le livre de la nature. La connaissance de la
sible à toute personne disposant de la clé nécessaire pour le dégager nature se forgeait donc en mouvement, dans le processus même de
(Olson 1998 [1994], p. 168). la recherche. Ce savoir était performatif au sens strict ; il se formait
à travers les allées et venues de ceux qui l’habitaient. La lecture en
tant qu’acte donnait donc forme à la fois à des mots et à un monde.
Comme le démontre clairement le cas des Ojibwas et de l’Oiseau
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Tonnerre, dans une forme de connaissance performative – qui suit connus que par leurs traditions, et dont il n’existait aucune preuve
un processus –, les frontières entre le soi et l’autre, ou entre l’esprit et dans la nature, furent tout simplement délaissées. Il n’y a ni dragons
le monde, ne sont pas figées, elles sont provisoires et foncièrement ni Oiseau Tonnerre dans les taxinomies scientifiques. Non seule-
instables. Dans une science construite dans l’esprit de Bacon, en ment ils n’existent pas dans le nouveau livre de la nature, mais ils ne
revanche, connaître n’est plus se joindre au monde par un acte, mais peuvent pas y exister, car leur constitution imaginaire est fondamen-
être informé par ce qui est déjà présent face à nous. Plutôt que de talement incompatible avec un projet de classification. Les dragons,
chercher à suivre les pistes d’un terrain familier qui se dévoile conti- parmi d’autres êtres qui se cabrent et font sentir leur présence sur
nuellement, le scientifique cherche à cartographier une terra inco- les routes du monde, peuvent être racontés mais ils ne peuvent pas
gnita, c’est-à-dire à découvrir, à travers des processus de décodage être catégorisés. Ils ne peuvent évidemment pas non plus être loca-
et de déchiffrement, ce qui existe déjà dans la réalité. Le livre de la lisés de façon précise, comme sur une carte. De la même manière
nature ayant été ins-crit par le Créateur dans le langage des choses, qu’ils furent délaissés par la taxinomie, les dragons furent, comme
la tâche du scientifique – pour Bacon comme pour Galilée – était de le dit Michel de Certeau, « rejetés comme dans les coulisses » d’une
dés-ins-crire, ou pour le dire en un mot, de « décrire » ce qui y était cartographie scientifique où il n’y avait pas de place pour les mouve-
écrit (Bono 1995, p. 244). C’est une manière d’acquérir la connais- ments et les itinéraires de la vie (de Certeau 1990 {1980}, p. 179). Cela
sance non par une lecture à voix haute mais par un processus d’in- s’applique évidemment aussi aux aux bruits du tonnerre et aux phé-
tériorisation. Et au moment où la lecture à voix haute laissa place nomènes impliquant la peur qui ne peuvent pas non plus être clas-
à l’intériorisation, le monde cessa d’être un conseiller et devint un sés ou cartographiés, même si cela ne les rend pas moins réels pour
entrepôt de données qui, en elles-mêmes, n’aidaient en rien à savoir une personne effrayée ou piégée au cœur d’une tempête.
ce qu’il faudrait en faire. Les faits sont une chose, les valeurs en
sont une autre, et la source de ces dernières n’est pas dans la nature Science et silence
mais dans la société humaine. La sagesse fut dès lors subordonnée à Manifestement, à mesure que les pages perdaient leur voix avec
l’information. l’avènement de l’époque moderne, le livre de la nature était lui aussi
Le troisième corollaire nous ramène à l’idée que les animaux et plongé dans le silence. Et de fait, il ne nous parle plus et ne nous dit
les autres êtres du monde non humain étaient connus à l’époque plus rien. Et pourtant, cette nature prétendument silencieuse peut
médiévale par leurs traditions, que l’on conçevait comme des éche- être, et est souvent, un lieu assourdissant. Comme l’observe le philo-
veaux d’histoires, de représentations et d’observations. Suivre la sophe Stephen Vogel (2006), le monde de la nature est extrêmement
trace d’un animal dans le livre de la nature, c’était comme suivre la mouvant, et une grande partie de ce mouvement se manifeste en tant
ligne d’un texte. Mais de la même manière que l’introduction de l’es- que sons : pensez au grondement du tonnerre et au hurlement du
pace entre les mots fragmenta la ligne en différents segments, les vent, au craquement de la glace et au grondement d’une cascade, au
créatures – dans le livre de la nature – apparurent de plus en plus bruissement des arbres et aux chants des oiseaux. Nous pouvons éga-
comme des entités séparées et limitées et non comme des lignes de lement admettre que d’un certain point de vue, la parole humaine
devenir en extension permanente. Il n’était dès lors plus question de peut être comprise comme une gestuelle vocale, et que la voix mani-
suivre la nature comme l’on suit une trace. La nature fut au contraire feste la présence humaine dans le monde de la même manière que
peu à peu soumise à un processus de classification. Les lignes furent le chant manifeste la présence de l’oiseau et le grondement celle du
brisées, mais les objets qui prirent leur place pouvaient être classés tonnerre. À ce niveau, la voix, le chant et le tonnerre sont ontologi-
et ordonnés dans les compartiments de la taxinomie selon la percep- quement équivalents : tout comme la voix est l’être humain dans son
tion que l’on avait de leur ressemblance ou de leur différence. Il était expression sonore, le chant est l’oiseau et le grondement est le ton-
pour la première fois possible de parler des composantes de base nerre. Mais Vogel soutient que tous ces éléments ne permettent pas
de la nature, et non plus de son tissage ou de son architecture. Pour de conclure que les entités naturelles conversent réellement avec les
résumer, la nature n’était plus tissée par des lignes, elle était consti- êtres humains, et encore moins les unes avec les autres, ceci princi-
tuée par des éléments. Et les créatures de ce monde naturel n’étaient palement pour deux raisons. Premièrement, pour qu’il y ait conversa-
plus des traditions mais des espèces. Ces créatures qui n’étaient tion, les participants doivent être attentifs et se répondre les uns aux
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autres. Les humains sont d’ailleurs attentifs et sensibles aux bruits gestes et à la présence humaine dans des formes significatives pour
de la nature ; ils guettent les chants d’oiseaux et sont émus, parfois eux comme pour nous (Klenk 2008).
même terrifiés, par le tonnerre. Mais, s’interroge Vogel, la nature Il est vrai que les non-humains ne peuvent pas comparer leurs per-
répond-elle aux êtres humains ? « Arrive-t-il que les entités expres- ceptions de l’environnement avec les humains dans le but commun
sives de la nature auxquelles nous sommes attentifs et sensibles d’établir la vérité de ce qui est « là-dehors ». Mais insister sur le fait
nous accordent pleinement leur attention […], discutent avec nous que les conversations ne peuvent prendre que cette forme, soutient
et répondent à nos attentes ? » (Vogel 2006, p. 148). Il est convaincu Klenk, c’est adopter une conception de la conversation si étroite
que la réponse est « non ». Les bruits de la nature, suggère-t-il, res- qu’elle exclurait presque tout ce que nous avons l’habitude d’appe-
semblent davantage aux ordres d’un monarque indifférent à ses ler conversation dans le monde humain. Pour la majorité d’entre
sujets mais les obligeant à obéir. Deuxièmement, une conversation nous, la plupart du temps, converser, c’est essayer de comprendre
porte nécessairement sur quelque chose (Vogel 2006, p. 151-152). Elle ce que les autres nous disent, de « saisir l’histoire correctement », et
permet à ceux qui y participent de comparer leurs différentes per- non de vérifier si cette histoire est vraie (Klenk 2008, p. 333). Les êtres
ceptions du monde dans le but commun de comprendre comment il humains qui s’efforcent de rendre par des mots ce que dit la nature
est réellement. Les interlocuteurs humains le font, mais ce n’est pas sont donc des traducteurs et non des ventriloques. Pour Klenk,
le cas des oiseaux, des arbres, des rivières, du tonnerre et des vents. c’est précisément ce qui se passe dans la recherche scientifique. Si
Ce n’est pas qu’ils soient des interlocuteurs indifférents, mais plutôt ce n’était pas le cas, conclut-elle, les interprétations scientifiques
qu’ils ne sont pas des interlocuteurs du tout (Vogel 2006, p. 157). seraient de simples fictions créées par le dialogue des hommes
Pour Vogel, quels que soient les bruits que l’on peut y entendre, entre eux, et non les résultats d’une interaction et d’une observation
la nature est silencieuse car elle ne prend pas part aux conversa- minutieuse des éléments du monde naturel. Sur ce point, je pense
tions que nous tenons à son propos. Nous pourrions avoir l’impres- néanmoins que Klenk se trompe. Ou, pour être plus précis, elle se
sion que la nature parle, mais c’est une illusion. « J’ai écouté atten- trompe tant que nous restons attachés aux protocoles méthodolo-
tivement », écrit Vogel, « et je n’ai rien entendu » (Vogel 2006, p. 167). giques de la science traditionnelle. En tant que pratique spécialisée
Souvenez-vous du vieil homme Ojibwa et de l’Oiseau Tonnerre. de la connaissance, l’ambition de la science est de chercher à véri-
Il pensait que le tonnerre lui parlait, mais n’arrivait pas à com- fier si l’histoire est vraie, et non seulement de la saisir correctement.
prendre ce qu’il lui disait. Était-ce du à un problème de traduction, Depuis Bacon, la science a toujours insisté sur la nécessité de décou-
comme semble le suggérer Hallowell ? J’ai soutenu que cela était plu- vrir la réalité en elle-même, et donc également sur une stricte sépara-
tôt du à un manque d’empathie. Mais pour Vogel, même si le vieil tion entre fait et interprétation. En lisant sur les lignes du livre de la
homme avait compris la parole du tonnerre, il n’aurait réussi ni à la nature, et non entre les lignes, les scientifiques insistent particuliè-
traduire ni à s’y identifier. Il aurait plutôt accompli un acte de ventri- rement sur le fait qu’ils n’écoutent pas « les voix de ces êtres avec les-
loquie. Tandis que le traducteur exprime la parole d’un autre mais quels ils interagissent », contrairement à Klenk qui pense qu’il s’agit
dans sa propre langue, le ventriloque projette ses propres mots sur de leur priorité numéro un (Klenk 2008, p. 334)9. Il est au contraire
un objet muet tout en créant l’illusion que c’est l’objet lui-même qui probable que les scientifiques font tout ce qu’ils peuvent pour évi-
parle (Vogel 2006, p. 162). Cette accusation de ventriloquie est évi- ter d’écouter, de peur que cela n’interfère avec leurs résultats et n’en
demment au fondement de l’horreur qu’inspire à la science l’an- compromette l’objectivité.
thropomorphisme, qui amène certaines personnes à affirmer leur
empathie pour des créatures non humaines, ou à prétendre qu’elles
savent ce qu’elles ressentent. Ces personnes sont accusées de pro-
jeter leurs pensées et leurs sentiments sur leurs sujets inconscients. 9. À l’exception des défenseurs de la science goethéenne, pour qui s’enga-
Mais le bien-fondé de cette accusation a été contesté. À l’occasion ger dans une recherche scientifique, c’est « entrer en conversation avec la
d’un important débat mené dans les pages de la revue Environmental nature et écouter ce qu’elle a à dire » (Holdrege 2005). Le mépris dans lequel
Values, Nicole Klenk a adopté une position contraire. Elle affirme est tenue l’approche goethéenne par le courant dominant de la science tend
que les animaux peuvent répondre et répondent de fait à la voix, aux néanmoins à en faire l’exception qui confirme la règle.
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les coulisses » par les conceptualisations scientifiques. N’oublions une mission pour transmettre la foi anglicane aux hommes de la
pas le conseil d’August Kekulé : « suivre les voies de l’Éclaireur, c’est région de la rivière McKenzie. Tout au long des décennies suivantes,
prendre note de chaque trace, de la courbure de chaque brindille, de McDonald travailla sans relâche à introduire les enseignements
chaque feuille sur le sol. » Dans leur pratique, les scientifiques sont chrétiens dans les communautés autochtones Gwich’in. Beaucoup
des éclaireurs autant que les hommes de foi, ils marchent inévita- d’hommes et de femmes qu’il rencontra au cours de ses voyages l’ai-
blement là où d’autres ont marché avant eux, toujours attentifs aux dèrent à transcrire les textes liturgiques dans leur propre langage,
bruissements et aux chuchotements de leur environnement. Les connu à l’époque sous le nom de Tadukh. McDonald consacra sa vie
scientifiques ne s’intéressent pas seulement aux formes finales des à la traduction de la Bible et n’acheva pas ce travail avant 1898.
choses, ils cherchent à pénétrer au cœur des processus de leur for- La Bible Tadukh fut chaleureusement accueillie par les Gwich’in,
mation. Ce faisant, ils ne se contentent pas de recueillir ce que le mais sa réception ne fut pas exactement celle que McDonald avait
monde leur offre, ils l’acceptent. Ils peuvent, par égard pour les pro- souhaité. À la différence de ses rivaux de la mission catholique, qui
tocoles officiels, feindre de ne pas écouter les voix des êtres qui les adoptaient une attitude plutôt détendue, McDonald était imprégné
entourent, mais ils doivent cependant les écouter s’ils veulent aller des traditions de l’église réformée et pensait que la Bible devait être
au-delà de la simple collecte d’informations et comprendre réelle- lue au sens littéral, comme l’expression d’une vérité unique non sus-
ment le monde. Que cela nous plaise ou non, ils sont eux aussi rede- ceptible d’être discutée. À son grand désarroi, cependant, beaucoup
vables au monde. C’est dans cette pratique plus humble, et non d’hommes Gwich’in – parmi lesquels bon nombre de ses propres
en s’arrogeant la capacité exclusive à représenter une réalité don- élèves – commencèrent à avoir des visions au cours desquelles, leur
née, que la recherche scientifique se rapproche de la sensibilité reli- semblait-il, les pages de la Bible leur parlaient, délivrant des ins-
gieuse comme une forme de connaissance dans l’être. C’est la voie tructions et révélant des prophéties. Ces pages parlaient avec les
de l’imagination. voix de leurs aînés, celles des personnes avec lesquelles McDonald
avait travaillé pour traduire le texte (leurs idiosyncrasies dialec-
La Bible et la terre tales s’étaient même incorporées au texte), et même avec la propre
Permettez-moi de conclure par un nouvel exemple issu de l’eth- voix de McDonald. Pour les Gwich’in, lire la Bible, c’était engager la
nographie du nord circumpolaire et provenant d’une récente étude conversation avec ces aînés, écouter leurs voix, leur enseignement, et
menée par Peter Loovers parmi les Teetl’it Gwich’in, peuple vivant à apprendre. McDonald était pour sa part extrêmement mécontent, et
et autour de Fort McPherson, dans les territoires du Nord-Ouest du il se sentit obligé de dénoncer les « fausses prophéties » qui étaient
Canada (Loovers 2010)11. Cette étude est exceptionnelle car elle asso- débitées par certains (Loovers 2010, p. 117). Mais la discordance entre
cie une description sensible de la manière dont les gens entrent en ces différentes manières de lire ne se réduisait pas à la Bible. Elle a
relation avec leur environnement lorsqu’ils chassent, piègent et se continué à se manifester dans d’autres contextes, tout particulière-
déplacent sur la terre et sur l’eau, à une histoire détaillée des rela- ment dans l’interprétation des traités et des accords sur les reven-
tions des Gwich’in avec l’écrit – surtout à travers la traduction et la dications territoriales rédigés avec des représentants du gouverne-
réception de la Bible chrétienne. L’immense travail de traduction de ment canadien. Dans ces cas-là, la consternation était du côté des
la Bible fut entrepris par Archdeacon Robert McDonald. Né en 1829 Gwich’in, qui étaient surpris de découvrir que des documents grâce
d’un père écossais – employé de la Compagnie de la baie d’Hud- auxquels ils pensaient établir un dialogue avec ceux dont les voix y
son – et d’une mère ojibwa, McDonald fut éduqué à l’école de la étaient exprimées, étaient considérés par la bureaucratie comme des
mission anglicane du village de Red River. Il officia pendant près textes figés, silencieux et inflexibles (Loovers 2010, p. 138).
d’une décennie parmi les Ojibwas avant de s’engager, en 1862, dans Loovers montre avec élégance qu’une discordance identique
se retrouve dans les différentes manières de lire la terre. Pour les
11. J’ai eu la chance de superviser le travail de Peter – avec mon collègue colons, les explorateurs, les scientifiques et tous ceux qui sont venus
David Anderson – et c’est en l’aidant à rassembler les chapitres de sa thèse sur cette terre depuis l’extérieur, que ce soit pour la civiliser, la déve-
sur les liens entre la lecture, l’écriture, la vie et la terre que j’ai eu pour la pre- lopper, y mener des recherches ou en apprécier la beauté naturelle, il
mière fois l’idée de cet article. ne faisait aucun doute qu’elle soit une présence immuable et figée,
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épilogue marcher avec les dragons
attendant d’être découverte, expliquée et peut-être transformée par et transportée dans la rue sur le dos du dragon. Le père de Billy, de
les mains et les esprits des hommes. La position des Gwich’in est en retour du travail, est surpris de découvrir que sa maison a disparu.
revanche assez différente. Lire la terre, pour eux, c’est être attentif Mais un voisin lui vient en aide et lui indique la direction qu’elle a
aux multiples indices qui révèlent les activités et les intentions de suivie. Au moment où la famille finit par se réunir, la mère de Billy
ses divers habitants humains et non humains. Ces indices, nous dit a reconnu à contrecœur que le dragon, après tout, existait peut-être.
Loovers, « comprennent les mouvements des animaux, les pistes, les Le dragon commence alors immédiatement à rétrécir jusqu’à ce qu’il
anciens et les nouveaux campements ou cabanes, les traces sur le sol, ait retrouvé une taille raisonnable. « Les dragons de cette taille ne me
le bois, les conditions de la neige et de la glace en hiver, les rives des dérangent pas », reconnaît Mrs Bixbee alors qu’elle est confortable-
rivières en été, et des lieux où des événements ont eu lieu » (Loovers ment assise dans un fauteuil en train de le caresser.
2010, p. 300). Ou qu’ils aillent, les Gwich’in écoutent, assimilent, La morale de cette histoire, bien entendu, est que des pro-
apprennent, consultent la terre. C’est une enseignante, et pas seule- blèmes qui sont initialement sans importance – si nous avons peur
ment un dépôt dans lequel peuvent être extraits des matériaux des- de les reconnaître ou de les désigner par leur nom, par peur d’en-
tinés à la construction d’un savoir propositionnel. La terre s’adresse freindre les normes de la conduite rationnelle – peuvent s’aggraver
donc aux hommes à travers de nombreuses voix, exactement comme au point de bouleverser notre vie sociale ordinaire. Je pense qu’il y
la Bible. Devons-nous alors suivre Archdeacon McDonald et conclure a aujourd’hui un dragon parmi nous, et qu’il grandit dans de telles
comme lui que cette manière de lire la terre est fausse, ou soutenir proportions qu’il devient de plus en plus difficile d’adopter un mode
qu’elle repose sur des illusions auxquelles les peuples autochtones, de vie durable. Ce dragon habite la rupture que nous avons créée
prétendument primitifs, ont toujours été soumis aux yeux des occi- entre le monde et notre imagination. Nous savons d’expérience que
dentaux ? Même McDonald, avec son éducation ojibwa, savait que les cette rupture n’est pas viable, mais nous refusons de reconnaître
interprétations indigènes ne se réduisaient pas à cela. C’est aussi, à son existence car cela nous obligerait à remettre en cause la rationa-
la lumière de ce que nous avons soutenu dans ce texte, notre cas. lité scientifique conventionnelle. J’estime que cette reconnaissance
aurait dû avoir lieu depuis longtemps. J’ai suggéré dans cet article
Épilogue que l’étude du monachisme médiéval et de ce que l’on appelle les
Les dragons ça n’existe pas. C’est le titre d’un des grands clas- ontologies indigènes pourrait nous aider à lire et à écrire autrement,
siques de la littérature pour enfants, écrit par Jack Kent (2011 [1976]). et ainsi à prendre à nouveau conseil auprès des voix des pages et de
Il raconte l’histoire d’un petit garçon, Billy Bixbee, qui se réveille celles du monde qui nous entoure, à écouter et à s’instruire de ce
un matin et découvre un dragon dans sa chambre. Il est assez petit, qu’elles nous disent, et à réparer la rupture entre l’être et la connais-
et remue sa queue de façon plutôt amicale. Billy va prendre le petit sance. Cette réparation doit être une première étape vers l’adoption
déjeuner avec le dragon, qu’il présente à sa mère. « Les dragons ça d’un mode de vie plus durable. Alors, peut-être, le dragon se calmera.
n’existe pas », déclare-t-elle d’un ton ferme tout en continuant à pré-
parer des pancakes pour le petit déjeuner. Billy s’assied à la table du
petit déjeuner tandis que le dragon s’assied sur la table. Il n’est nor-
malement pas permis de s’asseoir sur la table dans la maison des
Bixbee, mais il n’y a rien à faire, car si les dragons n’existent pas, vous
ne pouvez pas leur dire de descendre de la table. Le dragon a faim et
mange la plupart des pancakes, mais cela ne dérange pas Billy. Alors
que sa mère continue à ignorer le nouvel arrivant, le dragon com-
mence à grandir. Il n’arrête plus de grandir. Il occupe bientôt toute
l’entrée, et la mère de Billy a du mal à nettoyer la maison car elle ne
peut plus aller d’une chambre à l’autre qu’en passant par les fenêtres.
Toutes les portes sont bloquées. Le dragon continue de grandir – il
est désormais aussi grand que la maison. Puis la maison est soulevée
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272-273, 300 Lefebvre, Henri, 193 Rickert, Heinrich, 309 Vygotski, Lev, 120
Gluckman, Max, 325 Lehrman, David, 91 Rybczynski, Witold, 245 Vogel, Stephen, 349-350
Godelier, Maurice, 161, 175 Lévi-Strauss, Claude, 19, 22-26, Saenger, Paul, 346 von Bertalanffy, Ludwig, 136,
Goodwin, Brian, 63, 107-108, 259, 315-317 Sahlins, Marshall, 102, 132, 142- 275
111, 113, 213 Lewontin, Richard C., 28, 61-62, 143, 179 von Glasersfeld, Ernst, 136
Grégoire le Grand, 338-340 91, 111, 133, 135, 182 Sanjek, Roger, 268 von Uexküll, Jakob, 134-135, 152,
Guattari, Félix, 191-192, 195, 199, Linné, Carl Von, 71-72 Saunders, Peter T., 107-108, 111, 156-159, 175, 181, 184-185, 187, 190
221-223, 226, 229, 231-233, 253- Loovers, Peter, 354-356 151 Wallace, Alfred Russell, 77, 81-
255, 257, 259 Lowie, Robert, 264-266, 268, 276 Saussure, Ferdinand de, 31, 118 82, 84
Hägerstrand, Torsten, 193 Luther, Martin, 347 Sax, Boria, 345 Weismann, August, 104-106, 112
Hallowell, Alfred Irving, 147- Lutz, Catherine, 281 Schama, Simon, 243 Weiss, Paul, 113, 320
148, 319, 324, 341, 343-344, 350 Malinowski, Bronislaw, 314 Semper, Gottfried, 246-249, 253, Whitehead, Alfred N., 28, 127,
Harris, Roy, 294 Marett, Robert Ranulph, 313-314 255 137, 176, 181, 317-318, 331
Heidegger, Martin, 151, 172-173, Marx, Karl, 75, 136, 142-143, 204- Shannon, Claude, 57, 86 Wiener, Norbert, 57, 86
186-190, 218-219, 229, 234, 251- 205 Shweder, Richard A., 160, 276 Willis, Roy G., 135-136
253, 259 Mauss, Marcel, 53, 88, 119, 154, 293 Siza, Alvaro, 225 Wilson, Edward O., 114-117, 122,
Héraclite, 316 Mayr, Ernst, 93, 97, 103 Spencer, Herbert, 77-78, 81 127
Hewes, Gordon, 292 McDonald, Archdeacon Robert, Stanner, William E. H., 316 Wilson, Peter J., 31, 115, 161-162,
Hinde, Robert A., 64, 122-123 354-356 Steward, Julian H., 131-132, 146 165
Ho, Mae-Wan, 62, 65, 98, 107-108, McLean, Stuart, 353 Strathern, Marilyn, 123, 270 Windelband, Wilhelm, 308-309
111, 151, 352 Mead, George Herbert, 143, 278 Thompson, D’Arcy W., 8, 110, Wittgenstein, Ludwig, 285
Hull, David, 116 Mendel, Gregor, 106 209-210, 214 Woodburn, James, 279
Huxley, Julian, 72, 106, 308 Merleau-Ponty, Maurice, 36,
Huxley, Thomas Henry, 72, 106, 151, 173, 290, 296
308 Miller, Daniel, 230
Isidore de Séville, 346 Mills, Charles Wright, 325-326
Jacques i er, 335 Monod, Jacques, 106, 109, 112
Janáček, Leoš, 34-37, 39 Montalenti, Giuseppe, 108
Jung, Carl Gustav, 22 Morgan, Lewis Henry, 71, 154
Kekulé, August F., 342-344, 354 Myers, Ronald, 291-292
Kent, Jack, 356 Nadel, Siegfried, 311, 314
Klee, Paul, 221-222, 229, 231, 252 Neumann, John von, 57, 86
Klenk, Nicole, 350-351, 353 Olson, David, 345-347
Kluckhohn, Clyde, 118, 263 Olwig, Kenneth, 243, 251
Kroeber, Alfred L., 166, 263, 310- Oyama, Susan, 28, 62, 91, 151
314 Paine, Robert, 280
Lamarck, Jean-Baptiste, 79, 103 Radcliffe-Brown, Alfred R.,
Langer, Suzanne, 33-34, 286 119, 308-310, 313-318, 320-322
Latour, Bruno, 193-195, 227 Rappaport, Roy, 141-142
378 379
table des matières
Préface 7
prologue
1. Culture, nature, environnement.
Vers une écologie de la vie 13
tissage et fabrication
8. Tisser un panier 203
9. La textilité de la fabrication 221
10. La hutte conique au centre du monde terre-ciel 239
l’art de l’anthropologie
11. L’art de la traduction dans un monde continu 263
12. Poétique de l’usage des outils. De la technologie, du langage
et de l’intelligence à l’artisanat, au chant et à l’imagination 283
13. L’anthropologie n’est pas l’ethnographie 307
épilogue
14. Marcher avec les dragons.
Une excursion anthropologique du côté sauvage 335
Bibliographie 359
Index nominum 377