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RÉSUMÉ
Les tumeurs plasmocytaires forment un groupe hété-
rogène de pathologies regroupant les myélomes, les
myélomes indolents, les gammapathies monoclonales
de signification indéterminée (MGUS) non IgM, les
plasmocytomes, les maladies à dépôts de chaînes
d’immunoglobulines dont l’amylose, et certains syn-
dromes paranéoplasiques avec tumeurs plasmocy-
taires. Elles partagent une origine commune : la proli-
fération clonale d’une cellule plasmocytaire anormale.
Elles se caractérisent habituellement par la sécrétion
d’une immunoglobuline monoclonale complète ou
partielle. Les critères diagnostiques recommandés
par l’International Myeloma Working Group (IMWG)
repris dans la classification OMS 2017 sont précis
et nécessitent un bilan clinique, biologique et radio-
logique exhaustif. Le pourcentage de plasmocytes
ABSTRACT
Revision (2017) of WHO classification
MOTS CLÉS of plasma cell neoplasms
Plasma cell neoplasms represent an heterogeneous group of pathologies including
◗ classification OMS
◗ gammapathie mono-
plasma cell myeloma, smoldering plasma cell myeloma, non-IgM of undetermined
clonale de signification significance (MGUS), plasmocytoma, disorders defined by tissue immunoglobulin
indéterminée deposition like primary amyloidosis, and clonal plasma cell proliferations with an
◗ myélome associated paraneoplastic syndrome. Plasma cell neoplasms share a common ori-
gin resulting from expansion of heavy chain class-switched terminally differentiated
KEY WORDS B-cells (plasma cells) that typically secrete a single monoclonal immunoglobulin called
◗ myeloma M protein. Diagnostic criteria recommended by International Myeloma Working
◗ non-IgM of undetermined Group (IMWG) and adopted by this fourth revision of WHO classification (2017)
significance plasma cell are precise and relie on extensive clinical, biological and imaging data. Bone marrow
neoplasms plasma cell percentage, serum and urinary M protein concentration, plasma cells
◗ WHO classification related end-organ damage (CRAB signs : hypercalcemia, renal insufficiency, anemia,
and bone lesions) and imaging features of bone lesions are all key factors leading to
© 2019 – Elsevier Masson SAS the distinction of different plasma cell neoplasms.
Tous droits réservés.
Un diagnostic cytologique
nation du pourcentage et de la valeur absolue de la
ou histologique difficile plasmocytose circulante est importante pour identi-
fier les cas de leucémie à plasmocytes [2].
Le diagnostic de tumeur plasmocytaire consiste en
La clonalité de la prolifération plasmocytaire est éta-
la mise en évidence d’un clone plasmocytaire anor-
blie par la mise en évidence d’une restriction isoty-
mal dans la moelle osseuse ou d’autres tissus extra- pique d’expression des chaînes légères des immuno-
osseux associé ou non à la détection dans le sérum globulines dans le cytoplasme des plasmocytes. En
ou les urines d’une immunoglobuline monoclonale. fonction du tissu étudié (biopsie ostéomédullaire,
La détection du composant monoclonal est réalisée aspiration médullaire, biopsie de tissus extra-osseux),
par électrophorèse des protéides sériques ou uri- cette restriction isotypique peut être objectivée par
naires associée à une immunofixation, permettant de immunohistochimie, immunofluorescence ou cytomé-
caractériser le type de chaînes lourdes (IgG, IgA, IgD, trie en flux. En plus de démontrer une restriction iso-
IgE ou IgM) et/ou légères (kappa ou lambda) d’immu- typique kappa ou lambda des plasmocytes tumoraux,
noglobuline monoclonale sécrétée. l’immunophénotypage par cytométrie en flux met
La prolifération plasmocytaire est objectivée après en évidence des cellules plasmocytaires anormales,
examen histologique d’une biopsie ostéomédullaire de taille et structure variables, avec une expression
ou réalisation d’un myélogramme. Les tumeurs plas- faible ou absente du marqueur CD45, une co-expres-
mocytaires sont des pathologies multifocales. Le dia- sion des marqueurs CD38 et CD138, avec respec-
gnostic cytologique ou histologique est parfois dif- tivement une intensité plus faible et plus forte par
ficile et nécessite l’examen de plusieurs territoires rapport à des cellules plasmocytaires normales [3].
ou étalements. Dans tous les cas, le cytologiste ou Le marqueur CD19 est négatif dans 95 % des cas et
le pathologiste doit rendre le pourcentage de plas- les marqueurs CD27 et CD81 sont souvent sous-
mocytes médullaires le plus élevé parmi toutes ses exprimés. Dans près de 90 % des cas, l’immunophé-
observations. La morphologie des cellules plasmo- notype des plasmocytes tumoraux est aberrant par
cytaires clonales est variable et on peut observer rapport à celui d’un plasmocyte normal avec une
tous les stades de maturation du plasmocyte. Aucune positivité du CD56 (80 % des cas), du CD200 (75 %
corrélation entre la morphologie des plasmocytes des cas), du CD28 (40 % des cas), du CD117 (30 %),
et l’agressivité éventuelle de la tumeur plasmocy- du CD20 (15 % des cas), du CD52 (10 % des cas), du
taire n’a pu être clairement établie. La présence de CD10 et de marqueurs myéloïdes et monocytaires
plasmocytes circulants identifiables après examen du (CD33 par exemple) occasionnellement [3]. La valeur
frottis sanguin coloré au May-Grünwald-Giemsa est pronostique de l’immunophénotype des plasmocytes
possible dans environ 15 % des cas, et la détermi- tumoraux est encore débattue dans la littérature.
à 10 % ; CRAB.
◗ l’absence de dysfonction d’organe donc de signes
Parmi les plasmocytomes, il faut individualiser un variant
CRAB (absence d’hypercalcémie, d’insuffisance rénale,
au pronostic plus péjoratif : le plasmocytome soli-
d’anémie et de lésions osseuses ostéolytiques).
taire avec infiltration médullaire plasmocytaire
minime, dont les critères diagnostiques
Du fait d’une étiopathogénie diffé-
sont les suivants :
rente (profil génétique différent), les
MGUS IgM sont désormais trai- ◗ lésion unique osseuse (plasmocy-
Les caractéristiques immunophénotypiques des plasmo- Une gammapathie monoclonale est presque toujours
cytomes osseux sont similaires à celles observées dans détectée dans le sérum et/ou les urines. Le type de
le myélome. Enfin, le risque de progression à trois ans chaîne légère de la gammapathie monoclonale est prin-
est d’environ 10 % pour les plasmocytomes solitaires et cipalement lambda (70 % des cas). L’immunophénoty-
d’environ 60 % pour les plasmocytomes solitaires avec page par cytométrie en flux des plasmocytes médul-
infiltration médullaire minime [17]. laires révèlent des plasmocytes clonaux (restriction
Les plasmocytomes extra-osseux partagent les mêmes isotypique) et un immunophénotype similaire à celui
critères diagnostiques que les plasmocytomes osseux décrit dans le myélome.
et représentent seulement 1 % des tumeurs plasmo- La maladie des dépôts de chaînes légères et/ou lourdes
cytaires [1]. Ils surviennent principalement au niveau des immunoglobulines est également le résultat de la
des muqueuses des voies aériennes supérieures mais sécrétion par des plasmocytes clonaux (plus rarement
peuvent également être localisés au niveau du trac- par lymphoplasmocytes clonaux) de chaînes légères ou
tus digestif, des ganglions lymphatiques, de la peau et lourdes anormales d’immunoglobulines qui se déposent
d’autres tissus de l’organisme. Les signes cliniques sont dans les tissus de l’organisme, sans s’organiser en feuil-
principalement liés à la localisation de la tumeur et lets . Contrairement à l’amylose AL dans laquelle la
par définition il n’y a pas de signes CRAB en faveur coloration au rouge Congo est positive révélant les
d’une dysfonction d’organe liée à la tumeur plasmo- dépôts amyloïdes, les dépôts ne sont pas organiser en
cytaire. Les caractéristiques immunophénotypiques de feuillets , ne contiennent pas de substance amyloïde P
la tumeur sont proches de celles observées dans les et sont négatifs à la coloration au rouge Congo. Dans la
autres tumeurs plasmocytaires. plupart des cas, on observe une infiltration médullaire
par des plasmocytes clonaux et l’organe dans lequel
Diagnostic des maladies à on observe le plus fréquemment les dépôts est le rein.
dépôts d’immunoglobulines Dans la maladie des dépôts de chaînes légères des
monoclonales immunoglobulines, la chaîne légère la plus fréquemment
retrouvée (80 % des cas) est la chaîne kappa, avec une
La présentation clinique des maladies à dépôts d’immuno- surreprésentation du segment variable V kappa IV [19].
globulines monoclonales est étroitement liée aux
dépôts tissulaires de l’immunoglobuline monoclonale Diagnostic des tumeurs
pouvant impacter la fonction de multiples organes.
Cette immunoglobuline monoclonale est le plus sou-
plasmocytaires associées à un
vent la conséquence d’un clone plasmocytaire anormal.
syndrome paranéoplasique
On décrit deux types de maladies à dépôts d’immuno- Le syndrome POEMS est un syndrome paranéoplasique
globulines monoclonales : l’amylose AL et la maladie associant tumeur plasmocytaire, lésions fibrosantes
des dépôts de chaînes légères et lourdes des et ostéosclérotiques des travées osseuses
immunoglobulines. Ces deux catégories et souvent modification de l’architecture
sont différentes de par la composition Dans ganglionnaire mimant la variante plas-
chimique des dépôts mais partagent l’amylose AL, mocytaire de la maladie de Castle-
la même origine plasmocytaire man. POEMS est l’acronyme de
clonale. il est fréquent Polyneuropathie, Organomégalie,
L’amylose AL est le résultat d’observer une Endocrinopathie, gammapathie
de la sécrétion par des plas- Monoclonale et lésions cuta-
mocytes clonaux (plus rare-
discrète augmentation nées (Skin lesions), mais toutes
ment par lymphoplasmocytes du pourcentage les composantes de l’acronyme
clonaux) de chaînes légères de plasmocytes ne sont pas obligatoires pour faire
d’immunoglobulines intactes le diagnostic : seules la polyneuro-
ou fragmentées qui se déposent médullaires pathie et la gammapathie monoclo-
dans les tissus de l’organisme en (<10%) nale sont des critères obligatoires.
formant une structure en feuillets . La lésion étant généralement focale,
La plupart des régions variables des l’infiltration médullaire plasmocytaire est
chaînes légères kappa et lambda sont suscep- variable, habituellement représentant moins de
tibles d’être à l’origine de dépôts d’amylose, mais le 5 % des cellules nucléées totales à distance de la lésion
segmentV lambdaVI est toujours associé à des dépôts [18]. ostéosclérotique et pouvant représenter plus de 50 %
Les dépôts constitués s’accumulent alors et altèrent des cellules nucléées dans les formes disséminées.
la fonction de l’organe touché. Les critères dia- L’immunophénotypage par cytométrie en flux révèle
gnostiques du myélome ne sont pas remplis mais le caractère clonal des plasmocytes tumoraux, et met
il est fréquent d’observer une discrète augmenta- en évidence dans la majorité des cas une chaîne légère
tion du pourcentage de plasmocytes médullaires. restreinte de type lambda.
Le syndrome TEMPI est un syndrome paranéoplasique reste une donnée biologique difficilement standardisable
également associé aux tumeurs plasmocytaires. TEMPI entre les centres diagnostiques du fait de la nature même
est l’acronyme de Télangiectasie, EPO élevée et éry- de la prolifération plasmocytaire tumorale volontiers
throcytose, gammapathie Monoclonale, collection liqui- multifocale et non diffuse, incitant l’IMWG à recommander
dienne Périnéphrique et shunt Intrapulmonaire. de renouveler l’examen médullaire en cas de
Ce syndrome est uniquement proche du valeurs se situant autour du seuil de 10 %.
syndrome POEMS de par l’origine plas-
L’apport de la cytométrie en flux est
mocytaire de la gammapathie mono-
clonale mais s’en distingue clai- indéniable en particulier pour affirmer
Les tumeurs le caractère clonal des différentes
rement sur les plans clinique et
biologique. C’est un syndrome plasmocytaires proliférations plasmocytaires
rare, récemment décrit [20], inclus notamment quand l’infiltration
ont toutes pour origine médullaire plasmocytaire est
dans les tumeurs plasmocytaires
de la classification OMS 2017 au une prolifération faible. Son rôle dans le suivi de la
titre d’entité provisoire. Les symp- maligne clonale de maladie a également été démontré
tômes cliniques sont d’apparition ces dernières années permettant
lentement progressive. L’érythro- plasmocytes d’augmenter la sensibilité de la
cytose et une richesse médullaire recherche de la maladie résiduelle.
augmentée à la biopsie ostéomédullaire Enfin, le rôle de la cytogénétique et de
sont fréquemment retrouvées. La plupart la biologie moléculaire dans le diagnostic et
des patients ont un pourcentage de plasmocytes
surtout le pronostic de la maladie est également
médullaires inférieur à 10 % et les atypies morpholo-
giques des plasmocytes sont discrètes. primordial et fait l’objet d’un article par J. Corre et
H. Avet-Loiseau [21]. QQ