“Charlie Hebdo” et Hyper Cacher, Droite : les dessous
cinq ans et huit mois déjà… de l’opération Estrosi
Saint-Malo : Hollande
chute en débarquant
d’un multicoque
“J’ai toujours été…
105 ANNÉE – N 5208 – mercredi 2 septembre 2020 – 1,20 €
e o
Une amende de 200 euros pour la consommation de cannabis
Ça va mettre les fumeurs en pétard !
L’AMENDE FORFAITAIRE ARRIVE
Plaidoyer pro-Obono
U NE DÉPUTÉE gauchiste
et noire, l’Insoumise Da-
nièle Obono, qui atterrit en plein
XVIIIe siècle dans un village
tchadien et se retrouve « vêtue
d’un simple cache-sexe » sur
la place du marché, vendue à
l’encan comme esclave : poi-
lant, non ? Avec en prime un
dessin : la voilà nue, collier de
fer au cou, enchaînée.
En 2015, l’hebdomadaire
« Valeurs actuelles » avait été
condamné pour provocation à
la haine à la suite d’un dossier
sur les Roms. C’était une simple
mise en jambe. Là, il fait beau-
coup mieux. Plus inventif. Plus
tordu. C’est l’été, non ? Dans
une fiction d’été, on peut tout
se permettre.
Le tollé les a surpris, à « Va-
leurs actuelles ». Cet hebdoma-
daire d’extrême droite zemmou-
rienne se veut propre sur lui. Le
président Macron ne lui a-t-il
pas accordé une longue inter-
view en octobre ? Et voilà que,
après cet article sur la députée
Obono, ce même Macron fait
savoir qu’il lui a téléphoné pour
lui dire sa «  condamnation
claire de tout racisme ». Et que
la justice ouvre une enquête
Vaste
programme
«L E CANARD » adresse
ses plus chaleureuses
félicitations à Laurence Pinson,
ingénieure de recherche hors
classe, qui vient d’être nommée
« directrice de projet auprès
du chef du service de l’action
administrative et des moyens
à l’administration centrale du
ministère de l’Education na-
tionale » (« Journal officiel »,
30/8).
Sa mission ? On prend son
souffle : « Coordonner la mise
en œuvre de projets structu-
rants du service, notamment
en matière d’accompagnement
de la réforme de l’organisation
territoriale de l’Etat et de ren-
forcement de l’organisation du
service en mode projet. »
De quoi se projeter sereine-
ment.
INTERDIT
À LAVENTE
D.O.M. 1,80 € - Suisse 2,60 FS - Belgique / Luxembourg / Grèce 1,40 € - Espagne / Port. Cont 1,60 € - Italie 1,80 € - Tunisie 3,5 dT - Maroc 15 MAD - Côte dʼIvoire, Gabon, Sénégal 1000 CFA - Autriche, Allemagne 2,60 € - USA 3 $ - Canada 3,95 Dc - GB 1,50 £
pour injures à caractère raciste.
Et que le Premier ministre Cas-
tex, et trois autres ministres, et
la classe politique unanime se
disent « révulsés » par cette
«  publication révoltante  »,
« ignoble », etc. Jusqu’au tré-
sorier du parti lepéniste, qui dé-
nonce ce « mauvais goût ab-
solu » et cette « représentation
humiliante et blessante d’une
élue de la République ». Si
même le parti officiel de l’ex-
trême droite s’y met… Heureu-
sement qu’il reste Zemmour et
Elisabeth Lévy pour applaudir !
Les dirigeants de « Valeurs
actuelles » ont joué les contor-
sionnistes. Geoffroy Lejeune,
son directeur, et Tugdual Denis,
son directeur adjoint, ont dit
comprendre que Danièle Obono
«  ait pu se sentir person-
nellement blessée ». Ils lui ont
présenté leurs excuses. Service
minimum. Ils contestent « fer-
mement » le moindre début de
commencement de racisme. Il
s’agissait tout simplement de
« rappeler qu’il n’existât pas
d’unité africaine » (admirez le
subjonctif).
Eh oui, cette aimable mise en
scène avait pour but de distraire
leurs lecteurs en pointant ce fait
qu’ils adorent marteler  : les
Noirs, eux aussi, ont été escla-
vagistes. Il y a eu des négriers
africains et arabes. Les Euro-
péens n’ont fait que suivre le
mouvement. Un péché véniel,
non ? Après en avoir profité
deux-trois siècles, ils ont aboli
l’esclavage. Ne sont-ils pas ad-
mirables ? Ce feuilleton estival,
c’était de l’éducation populaire,
voyons…
J.-L. P.
UNE RENTRÉE APPRENANTE ET INNOVANTE
Journal satirique paraissant le mercredi
NÉCESSAIRE ET INSUFFISANT
C
ABU adorait suivre les
grands procès. Il avait
mille et une fois rai-
son, ne serait-ce que parce
que sa virtuosité à saisir un
visage, une attitude, une en-
volée en trois coups de
crayon faisait de lui un chro-
niqueur judiciaire qui se pas-
sait de commentaires. Diffi-
cile pourtant de dire s’il aurait
apprécié ce procès-là. Même
s’il avait pu y assister assis
sur les bancs de la presse
plutôt que d’y figurer couché
dans la liste des 17 victimes,
11 à « Charlie », 4 à l’Hyper
Cacher, massacrées par les
deux trépanés frères Kouachi
et le tout aussi décérébré
Amedy Coulibaly.
Le simple fait que ces der-
niers, abattus par la police le
jour de leur carnage, ne se-
ront pas dans le box des ac-
cusés pourrait facilement mi-
nimiser le procès qui s’ouvre
(lire p. 5) ce mercredi devant
la cour d’assises spéciale à
Paris. Le réduire à la compa-
rution de comparses plus ou
moins insignifiants. L’argu-
ment est évidemment rece-
vable, mais il ne suffit pas
pour autant à disqualifier
d’avance ces deux mois et
demi d’audience.
Ce serait oublier un peu
vite les 200 parties civiles qui
seront présentes et les
144 témoins qui vont défiler
durant toutes ces journées.
Nombreux parmi eux ne se
remettront peut-être jamais
complètement des effets dé-
létères du blast et du fracas
causés par ces attentats.
Beaucoup, à commencer par
« Charlie », qui y consacre
une grosse partie de son
budget, doivent vivre encore
sous protection. Et, pour eux
comme pour la mémoire des
victimes, ce procès est plus
que nécessaire, même s’ils
savent, et nous avec eux,
qu’il sera toujours insuffisant.
Insuffisant pour les raisons
déjà citées. Mais aussi parce
que les inspirateurs des dé-
Elle boit pas, elle cause et elle flingue
Iseurs !
L FALLAIT la trouver, cette
nouvelle icône des chas-
Elle est désormais incar-
née par Johanna Clermont (un
pseudo), 23 ans, qui arbore sa
crinière blonde par-dessus ses
tenues de camouflage. Depuis
trois ans, sur Internet, elle poste,
P. 5
lires vengeurs des meur-
triers au nom d’élucubrations
d’une religion dévoyée n’au-
ront pas à rendre de
comptes. Parce que seront
absents aussi du box, et ainsi
dispensés de s’expliquer,
ceux que Richard Malka,
l’avocat de « Charlie »,
nomme les « complices intel-
lectuels » et que Riss, le di-
recteur de l’hebdo, appelle
les « collabos ». Ces gens
d’une « gauche souvent radi-
cale » qui, en hurlant à l’isla-
mophobie, ont indirectement
pu fournir des arguments à
ceux qui cautionnent encore
la rhétorique pseudo-judi-
ciaire des Kouachi et de Cou-
libaly réunis.
Insuffisant encore car les
absences et les manques
précités risquent de réduire
la fonction cathartique et ré-
paratrice d’une telle confron-
tation judiciaire pour les
familles, pour les témoins,
pour tous ceux dont la mé-
moire traumatique reste tou-
jours à vif ou pas encore
cicatrisée…
Un procès insuffisant pour
toutes ces raisons et pour
UN PROCÈS SOUS HAUTE SURVEILLANCE
maquillée, ses photos de tro-
phées, canards sauvages et san-
gliers. Elle pose, à l’occasion,
décolleté plongeant et fusil en
bandoulière, façon pétroleuse.
Et met en scène ses safaris en
Afrique… Mais, depuis cet été
et la réouverture de la chasse,
elle se montre surtout dans les
gazettes pour contrer la poussée
écolo et se mettre l’opinion dans
la poche.
La Fédération nationale des
chasseurs, qui se paie les ser-
vices de l’ami chasseur de Ma-
cron Thierry Coste, un lob-
byiste, a flairé le bon coup.
Coste conseille donc aussi Jo-
hanna. Et, avec Johanna, la
chasse, c’est sympa. La Barbie
du maquis est, en prime, ori-
ginaire du fief de Jean Castex,
dans le Sud-Ouest. Elle a donc
tout pour plaire aussi à la
Macronie.
Dans les rédactions, la chas-
seuse distille ses citations  :
« Etant jeune et blonde, je
corresponds à un idéal fémi-
quelques autres sans doute,
mais vraiment nécessaire.
Pas seulement parce qu’il
restera filmé pour l’Histoire.
Mais d’abord, mais surtout au
nom d’une valeur à laquelle
Cabu comme « Charlie »,
comme nous, ont toujours
tenu par-dessus tout : celle
de la liberté d’expression. Y
compris celle de critiquer les
religions, toutes les religions,
et qui en cinq ans, depuis les
attentats, n’a pas vraiment
progressé, bien au contraire.
Cette possibilité, disions-
nous au lendemain des atten-
tats, de continuer à pouvoir
« rire de tout » sauf avec la li-
berté de pouvoir le faire.
Cabu et ses (et nos) amis
ont été massacrés pour
l’avoir fait. Et, ne pas conti-
nuer à défendre plume et
ongles cette liberté, c’est
admettre que, en tuant ceux
qui en usaient, le terrorisme
obscurantiste a gagné en ter-
rorisant. Ce procès vient à
point nommé pour le rappe-
ler. Et, à ce titre, Cabu,
forcément, aurait voulu y
assister !
Erik Emptaz
nin pour les chasseurs, ça leur
plaît », « Si je dérange, tant
mieux » («  Match  », 27/8),
« Faire chier le monde est ma
seconde passion  » (« Le Pari-
sien », 17/8).
Baptisée « Diane 2.0 », elle
revendique 300 000 abonnés sur
Instagram, a rencontré son com-
pagnon lors d’un ball-trap ; en-
semble, ils ont 5 clébards et
20 flingues.
Il y a trois ans, cette « influen-
ceuse  » sponsorisée par les
marques de chasse expliquait
déjà sa tactique de choc à
«  L’Express  » (28/10/18)  :
« J’aime jouer sur cette dua-
lité parce que ça me plaît. J’al-
terne entre les photos de
chasse pure, de guerrière et
des photos plus pomponnées. »
Il va falloir quand même bos-
ser un peu plus le côté « pom-
ponné ». Car, pendant que Jo-
hanna se décarcasse, Macron
interdit finalement à ses amis
la chasse à la glu…
C. N.
… tri marrant !”
C’EST LA RENTRÉE
Le crack
du krach
IAlors
L A CARRÉMENT laissé
Bernard Arnault sur place.
qu’il y a moins d’un an,
en novembre 2019, la fortune
de Jeff Bezos, le fondateur
d’Amazon, équivalait à celle du
patron de LVMH – autour de
100 milliards de dollars –, elle
est aujourd’hui deux fois plus
élevée, selon le magazine
« Forbes » US.
Avec plus de 200 milliards
de dollars, Bezos devient ainsi
l’homme le plus riche, non seu-
lement du monde, mais aussi de
tous les temps, d’après
« Forbes », spécialisé depuis
près de quarante ans dans le pal-
marès des grandes fortunes
mondiales. Merci, le Covid !
Le malheur des uns (écono-
mie à l’arrêt, commerces fer-
més, confinement…) faisant le
bonheur des autres, la valeur
d’Amazon, numéro un du com-
merce en ligne, a ainsi pratique-
Google en vrac
M ÊME les utilisateurs qui
le refusent explicitement
sont tracés par Google. C’est ce
que révélait, en 2018, une
enquête d’Associated  Press
(AP), qui donne aujourd’hui
lieu à un procès entre l’Etat de
l’Arizona, aux USA, et le géant
du Web. On y apprend que c’est
encore pire : « Même les em-
ployés de haut niveau de
Google ne comprennent pas
dans quelles conditions
Google collecte les données de
géolocalisation », tempête le
Le mur
du çon
D ÉPASSÉ à la vitesse
dʼun virus par Valérie
Pécresse. Interrogée le
31 août sur la situation sa-
nitaire en Ile-de-France, la
présidente de la région a ap-
pelé les Franciliens à « une
forte responsabilité indi-
viduelle. On doit tous se
serrer les coudes ».
Tout en respectant les
gestes barrières et les me-
sures de distanciation phy-
sique, cela va sans dire…
P. 2
ment doublé depuis un an. Le
pactole de Bezos – qui possède
12 % de la boîte – a logique-
ment suivi le mouvement.
Mais Jeff sait aussi partager,
notamment avec son ex-épouse,
MacKenzie Scott, à qui il a
laissé un joli viatique (en ac-
tions Amazon) quand ils ont di-
vorcé, en juillet 2019. Grâce à
la montée du cours de Bourse,
celle-ci est aujourd’hui à la tête
d’une fortune de 66,4 milliards
de dollars, faisant d’elle la
femme la plus riche du monde.
Un cheveu devant Françoise
Bettencourt Meyers, héritière
de L’Oréal, qui détient, elle,
66,3 milliards.
Les ex-mari et femme de
nouveau réunis pour former le
couple le plus riche du monde :
qui a dit que les histoires
d’amour finissaient mal, en
général ?
H. M.
procureur général de l’Etat,
Mark Brnovich. Rassurant !
Officiellement publiée en
ligne le 21 août, sa plainte ré-
vèle quelques messages édi-
fiants interceptés entre des em-
ployés de la firme de Mountain
View. « L’interface actuelle
donne l’impression d’avoir été
mise en place pour rendre
toutes les choses possibles,
mais en restant assez compli-
quée pour que les gens ne le
comprennent pas », déplore ce
cadre au sujet du grand bazar
des paramètres et autres condi-
tions d’utilisation accessibles
aux usagers. Si c’est Google qui
le dit…
« En fait, notre communi-
cation sur la géolocalisation
est déjà trop confuse pour un
ingénieur de Google spécialisé
dans les données personnelles.
Ce n’est pas bien », s’affole un
autre salarié. Il n’a qu’à deman-
der des précisions à son moteur
de recherche préféré !
Selon les mêmes documents,
le jour de la publication de l’en-
quête d’AP, Google tenait une
réunion de crise baptisée « Oh
Shit ». Les utilisateurs peuvent
renvoyer le compliment.
D. J.

LR devient étouffant
L E PARTI Les Républicains nʼavait sans
doute pas besoin de ça : quatre jours
avant la tenue de son université dʼété, au
Port-Marly, une figure de la droite, le maire
de Nice, Christian Estrosi, a lancé un lourd
pavé dans la mare en affirmant, dans « Le
Figaro », que, faute dʼun « talent » qui sʼim-
pose à LR, il convient de
passer, en vue de lʼélection
de 2022, « un accord avec
Macron ».
Sous le choc, mardi
matin, les dirigeants du
parti ont tardé à réagir.
Cette prise de position pré-
figure-t-elle une alliance,
en mars, aux régionales
et  aux départementales,
entre les macronistes et
dʼautres personnalités de
droite et du centre ? En Paca, cʼest très
probable, avec Renaud Muselier en tête
de file. Mais aussi, peut-être, dans dʼautres
régions (Grand Est, avec Jean Rottner),
ou départements (Haute-Garonne ou
Haute-Loire), fiefs de barons réputés Ma-
cron-compatibles.
Lʼoffensive dʼEstrosi tombe pile-poil
Baroin : Sarko
nʼy croit pas vraiment
S’il y en a un qui ne croit pas
que François Baroin se lancera
dans la bataille, c’est Nicolas Sar-
kozy. L’ex considère que le pré-
sident de l’Association des maires
de France préférera sa tranquillité
et sa nouvelle carrière d’avocat à
une candidature très aléatoire à
l’élection présidentielle.
Et Sarko d’expliquer à ses
proches :
« Autrefois, un responsable po-
litique était observé ; aujourd’hui,
il est disséqué, voire déchiré, et
Baroin ne voudra pas de ça. C’est
aussi pour cela que l’on manque
de talents de premier plan. »
Ah ! si seulement on pouvait se
tourner vers d’anciens talents qui
ont toujours la vocation…
Le Maire et Darmanin
au piquet
Invité le 28 août par l’Associa-
tion de la presse présidentielle,
Macron a égratigné au moins deux
de ses ministres, lors d’un
«  échange  » qui a duré deux
bonnes heures.
«  Si j’estime qu’ils (les mi-
nistres) ne sont pas à la hauteur,
je ne les garde pas. »
Cela vaut-il aussi pour les an-
ciens Premiers ministres  ? La
question ne lui a pas été posée.
Toujours est-il que le chef de
l’Etat a gentiment taclé Bruno Le
Maire, lequel venait de redouter
publiquement que le port obliga-
toire du masque en entreprise ne
soit un frein au retour de la crois-
sance. Pas du tout, a répliqué le
chef de l’Etat :
« Le port du masque n’enlève
pas de la croissance à lui seul. Au
contraire ! Avec le respect des
gestes barrières, il permet de
mieux utiliser les espaces de tra-
vail. »
Autre éminence dont les oreilles
ont dû siffler ce jour-là : Gérald
Darmanin. Même s’il s’inquiète
face à « un processus de banali-
sation de la violence dans la so-
ciété », Macron refuse de parler
d’« ensauvagement », comme l’a
fait son ministre de l’Intérieur.
« Je ne parle pas d’ensauvage-
ment, a-t-il précisé, mais de ba-
nalisation de la violence, qui est
souvent verbale avant de devenir
physique. »
Encore des ministres qui ont
parlé trop vite…
Pas de convergence
des luttes
Alors que les gilets jaunes an-
noncent leur retour le 12  sep-
tembre, avec Jean-Marie Bigard
en tête de gondole, Macron ne
croit pas à une nouvelle crise so-
ciale, même s’il reste prudent. Et
cela pour une bonne raison.
Une question de titre
L E MINISTÈRE de la Cul-
ture n’a pas chômé, dans la
torpeur du mois d’août. Pour
preuve, ce mail envoyé le 5 août
à l’ensemble des présidents et
directeurs d’établissements pu-
blics relevant du ministère :
« La sous-direction du pilo-
tage et de la stratégie vous fait
part de la modification de l’in-
titulé du stage “Accueil des nou-
veaux arrivants”. Désormais, ce
stage portera l’intitulé suivant :
“Agent.e.s nouvellement re-
cruté.e.s au ministère de la Cul-
ture”. »
Voilà qui méritait bien un
courriel.
Le 6 août, nouvelle commu-
2 – « Le Canard enchaîné » – mercredi 2 septembre 2020
– faut-il le préciser ? –, au moment où les
dirigeants de LR, sans programme et sans
véritable chef, ont le moral dans les chaus-
settes. Ils assistent, impuissants, à une
épidémie de candidatures à droite (Xavier
Bertrand, Valérie Pécresse, Bruno Re-
tailleau, sans oublier le professeur Phi-
lippe Juvin et, pourquoi
pas, Rachida Dati) sus-
ceptibles de fracturer un
peu plus encore le parti.
Et  ce au moment où les
électeurs Républicains in-
diquent dans les son-
dages quʼils préféreraient
Edouard Philippe aux au-
tres candidats déclarés. Et,
surtout, au moment où les
caciques LR doutent plus
que jamais que leur favori,
François Baroin, soit prêt à relever le gant
(lire plus loin ce quʼen pense Sarkozy).
Même le président du conseil dépar-
temental des Alpes-Maritimes, Eric Ciotti,
le meilleur ennemi dʼEstrosi et le plus
furieux des antimacronistes, est en plein
doute sur lʼavenir de son parti, cʼest
dire…
«  Quand le contexte écono-
mique est difficile, il n’y a pas de
mouvements sociaux, a-t-il fait va-
loir devant la presse présidentielle.
Mais prudence ! Il y a peu de
monde qui avait vu venir les gilets
jaunes. » Et surtout pas lui.
En privé, Macron considère
qu’« il n’y a pas de convergence
des luttes, pas de terreau commun
ni de revendications communes Euh… il pense donc qu’il y a
entre les gilets jaunes, Jean-Marie des Gaulois réfractaires à la com-
Bigard et les anarchistes. prenette ?
D’ailleurs, les plus précaires et
les plus fragiles ne sont pas ou- Castex joue les durs  trice du groupe Korian vous dira
bliés, avec l’augmentation de l’al- Jean Castex a fait une mise au
location de rentrée et la distribu- point, lui aussi, lors du Conseil
tion de 55 millions de masques du 26 août.
aux plus précaires. » « Le sujet de l’exécution est es-
Les gilets jaunes pourront donc
sentiel dans le plan de relance, a-
manifester masqués, et gratuite- t-il dit. Il n’est pas question que
ment en plus !
des ministères viennent proposer
des projets qui sortiront de terre
Une polémique en 2023 ou en 2024. »
incompréhensible Allusion aux projets d’infra-
Le chef de l’Etat n’a pas ap- structures et de rénovations, qui
précié le début de controverse au-
tour du décalage du plan de re-
lance, qui sera finalement présenté
ce jeudi 3 septembre.
Un accessit pour Dupond-Moretti
« Je n’ai pas bien compris cette
polémique, a-t-il confié le 28 août M OMENT d’émotion au
Conseil des ministres du
26  août, lorsque Macron
aux journalistes de la presse pré-
sidentielle qui le recevaient. Ne s’avance vers Eric Dupond-Mo-
pas décaler le plan de relance au- retti pour le féliciter :
rait été un manque de bon sens. « Bravo pour votre interven-
Les gens n’auraient pas écouté. tion à l’université d’été d’Eu-
Mieux valait d’abord parler aux rope Ecologie. C’était bien d’y
Français de la rentrée et ensuite aller, et c’était un grand moment
de politique. »
leur présenter des mesures qui en- L’ex-ténor du barreau était
treront en vigueur le 1er janvier. »
allé défendre, la semaine précé-
Deux jours plus tôt, en Conseil, dente, devant les écolos, ses po-
il reprochait aux ministres une er-
sitions sur la chasse et ses décla-
reur de communication. rations lors de l’éclosion du
« Il ne faut pas laisser penser mouvement #MeToo. Le mi-
qu’on a reporté le plan de relance.
nistre n’a pas manqué de rap-
C’est simplement un ajustement,
peler à son tour son acte de bra-
leur a-t-il dit. La priorité, c’était voure à ses collègues, avant de
la rentrée, avant la réponse éco-
nomique à la crise, qui ne change
pas. » représentent la part la plus impor-
tante des 100 milliards.
Il était déjà question au prin-
temps de présenter ce plan avant Et le Premier ministre d’ajou-
les vacances d’été. Un plan qui, ter :
rappelons-le, ne sera appliqué qu’à « Il ne s’agit pas d’utiliser les
partir de 2021. Alors huit jours de 100 milliards pour augmenter le
plus ou de moins… budget des différents ministères
mais de créer un budget spéci-
Le coach fique, une ligne spécifique de
de lʼElysée 100 milliards. Si certains minis-
tères n’arrivent pas à présenter
C’est bien le label «  France
Relance » qui sera accolé au plan des projets qui émergent suffisam-
ment tôt, l’argent qui aura été flé-
présenté jeudi, ainsi que «  Le
Canard » l’avait annoncé la se- ché pour eux au départ sera re-
distribué à d’autres ministères. »
maine dernière. Macron l’a
confirmé le même jour en Conseil C’est beau, un capitaine qui crée
une telle émulation au sein de son
des ministres, avec cet argument :
« Il faut que l’on puisse identi- équipe !
fier sur le terrain les dépenses qui
seront faites par le gouverne- Lʼautre match
ment. » Paris-Marseille
Dans le même ordre d’idées, il Au moment où, à Paris, Jean
leur a lancé ce conseil, sous forme Castex présentait avec deux de ses
d’avertissement, sur la manière de ministres, Jean-Michel Blanquer
« vendre » le plan de relance : et Olivier Véran, les nouvelles me-
« L’orchestration doit être bien sures de lutte contre la propagation
faite. Pas question que les mi- du coronavirus, à Marseille se dé-
nistres se précipitent dans les mé- roulait, comme on le sait, une autre
dias ou multiplient les déplace- conférence de presse : celle de Di-
ments pour claironner les dier Raoult, entouré de la nouvelle
mesures prises dans leur secteur, maire de Marseille, Michèle Ru-
sinon personne n’y comprendra birola, et de son ancienne adver-
rien. » saire aux municipales, Martine
Et le Président d’ajouter : Vassal, réconciliées pour l’occa-
« Soyez moins techno. Parlez
des projets qui sont liés à la vie
sion. L’infectiologue et les deux
élues marseillaises n’ont pas man-
quotidienne des Français et qu’ils qué de déplorer en chœur le
peuvent facilement comprendre. » manque de concertation avec
l’Etat dans les mesures qui ve-
naient d’être prises pour les
Bouches-du-Rhône.
L’après-midi même, Véran se
nication du même expéditeur.
« Bonjour, suite au précédent
message du 5 août, la sous-di-
rendait dans la cité phocéenne, où
il rencontrait Raoult.
«  Nous avons eu plusieurs
rection du pilotage et de la stra- échanges sur la situation épidé-
tégie vous informe de la modi- mique, et il n’y a pas eu la
fication de l’intitulé du stage (...). moindre anicroche, a-t-il raconté
Désormais, ce stage portera l’in- le lendemain à des journalistes.
titulé suivant : “J’intègre le mi- Raoult a même accepté de se faire
nistère de la Culture”. » filmer pour recommander le port
Pourquoi ce brutal change-
du masque et le respect des gestes
ment de nom en vingt-quatre
heures  ? «  Au ministère, ils barrières. Quant aux élus, je les
avaient voulu se faire plaisir en ai longuement rencontrés à la pré-
changeant le nom d’un stage, fecture. J’ai rappelé à ceux qui
s’amuse un haut fonctionnaire, râlaient que je les [avais] tous eus
mais en oubliant un peu vite que au téléphone, certains plusieurs
l’usage de l’écriture inclusive fois, pour discuter de ces me-
reste banni dans les administra- sures. »
tions. » Bien tenté.e ! Pour le ministre de la Santé,
« opposer l’Etat et les collectivités
LE PETIT DICTIONNAIRE DES SYNONYMES LR
locales n’a pas de sens. Personne
n’a rien à gagner à dénigrer
l’autre. Mieux vaudrait pour les
élus reconnaître que la concerta-
tion a eu lieu, même s’il n’y a pas
eu d’accord sur tout ».
Conclusion de Véran :
« Marquer un désaccord, ce
n’est pas déshonorant. »
Moins déshonorant pour les
Marseillais, en tout cas, que de ne
pas marquer de but lors d’un
match contre le PSG.
Grosse tête
et blouse blanche
Le même Olivier Véran s’est
ouvertement payé la tête du cé-
lèbre professeur Philippe Juvin,
lors d’une table ronde organisée
par le Medef à son université
d’été, le 27 août.
« Je ne vous parlerai pas en dé-
tail de la gestion de l’épidémie, a-
t-il ironisé, les experts présents le
feront certainement. Martin
Hirsch vous dira comment l’hô-
pital a géré l’épidémie, la direc-
comment les Ehpad ont géré l’épi-
démie, et Philippe Juvin, comme
à son habitude, vous dira comment
nous aurions dû gérer l’épidé-
mie. »
Rires dans la salle, notamment
de Geoffroy Roux de Bézieux, qui
a failli s’étouffer. Il faut dire que
l’omniprésence médiatique du
chef des urgences de l’hôpital
Pompidou en agace plus d’un, sur-
leur raconter que les Verts
s’étaient beaucoup plaints de-
vant lui de la répression contre
les gilets jaunes.
« Il faut garder la mesure des
choses », leur avait-il répondu.
Dupond-Moretti mesuré  :
ce gouvernement fait des mi-
racles…
tout depuis que celui qui est aussi
maire (LR) de La Garenne-Co-
lombes s’est mis en tête de
concourir à la primaire de la droite
(si celle-ci a lieu).
Et alors ? Le parti Les Républi-
cains est aussi un peu-beaucoup
malade, non ?
Lʼunité avant tout
Olivier Faure, le premier secré-
taire du Parti socialiste, a fait
quelques confidences devant des
journalistes, samedi matin, lors
des journées parlementaires.
«  Je conseillerais à chacun
d’être prudent sur la présiden-
tielle : des candidats qui se sont
déclarés il y a deux ans, je n’en
connais aucun qui ait fini la
course. Je leur conseille de se pré-
server. »
Compris, Jadot, Piolle, Mélen-
chon et les autres ?
Puis le premier secrétaire du PS
a abordé la question des pro-
chaines échéances électorales (lé-
gislatives partielles, sénatoriales
et régionales) :
« Ma main est tendue, mais je
ne vais pas mendier auprès de qui
que ce soit (...). Quand on rate une
marche, c’est plus difficile de
prendre la suivante, donc il vaut
mieux prendre chaque marche au
fur et à mesure. Je ne vois pas
comment on trouve un candidat
commun à la présidentielle quand
on n’a pas réussi à trouver des
candidats communs aux régio-
nales. »
Rendez-vous, donc, après les
régionales. Si elles sont unitaires
à gauche.
A lʼassaut
de la jeune gauche !
Finie, la « vieille gauche » qu’il
fustigeait hier. Yannick Jadot, lors
des journées parlementaires so-
cialistes du week-end dernier, a
été d’une amabilité rare avec les
camarades.
Extraits choisis de son interven-
tion :
« Historiquement, l’écologie
est irriguée par des valeurs et
des principes de gauche, il ne
faut pas se raconter d’histoires
(...). Notre responsabilité, c’est
de travailler ensemble (...). Nous
avons cette responsabilité histo-
rique. Si nous n’y allons pas en-
semble, c’est Emmanuel Macron
qui gagne. »
C’est même tout le pari actuel
de celui-ci.
Bonne médecine
Au passage et peut-être pour
complaire aux socialistes, Yannick
Jadot a implicitement condamné
les responsables écolos anti-vac-
cins :
« Je ne dis pas qu’il n’y a pas
chez nous quelques personnalités
qui, parfois, à force d’exiger la
transparence sur les processus
d’autorisation des vaccins, peu-
vent apparaître, disons, ambigus
sur la position de savoir s’il faut
ou non vacciner. Mais mon mou-
vement est pro-vaccins, il faut vac-
ciner. »
Transmis à la nouvelle maire
de Marseille, Michèle Rubirola,
et à la députée européenne EELV
Michèle Rivasi, qui n’ont cessé
de condamner la vaccination obli-
gatoire.
Lʼunion
est un combat
A peine Eric Piolle et Yannick
Jadot étaient-ils rentrés de Blois,
où ils étaient allés faire des ma-
mours aux dirigeants du PS, qu’un
communiqué tombait.
Dans ce texte, Europe Ecolo-
gie-Les Verts et Génération.s (le
groupuscule de Benoît Hamon)
annonçaient une candidature com-
mune pour la législative partielle
du 20 septembre dans la 5e cir-
conscription de Seine-Maritime.
Une circonscription que le PS dé-
tient depuis… 1981.
La même alliance s’est nouée
dans la 9e circonscription du Val-
de-Marne, où les Verts prétendent,
avec l’aide de Benoît Hamon, ré-
cupérer le siège du député socia-
liste sortant.
« Les écolos n’ont aucune cré-
dibilité lorsqu’ils affirment vouloir
l’union, s’énerve un dirigeant du
PS. A force de multiplier les dé-
clarations de guerre, ils vont finir
par l’avoir. »
Avant ou après les législatives
partielles ?
Centriste
à géométrie variable
Le centriste Jean-Christophe
Lagarde avait invité, l’an dernier,
à l’université d’été de l’UDI, uni-
quement des responsables du
MoDem et de La République en
marche. Mais, cette année, chan-
gement total : sont conviés à Ven-
dôme (Loir-et-Cher), les 11 et
12 septembre, deux dirigeants
LR, Gérard Larcher et Christian
Jacob, ainsi que Valérie Pécresse.
Un réflexe assez classique chez
Lagarde quand les élections ap-
prochent. Le président de l’UDI,
mécontent que Macron n’ait pas
répondu à ses appels du pied,
change de stratégie et essaie de
nouer de nouvelles alliances.
Il a une autre raison d’être co-
lère envers le frère ennemi cen-
triste : le MoDem a lancé une
grande offensive de charme en di-
rection de tous les députés du
centre, aujourd’hui éparpillés
façon puzzle. Et l’entreprise a
remporté un certain succès,
puisque le président du groupe,
Patrick Mignola, prévoit d’annon-
cer, lors de ses propres journées
parlementaires, les 7 et 8 sep-
tembre, le ralliement de quelques
députés UDI ainsi que celui du
président du groupe Libertés et
Territoires, Philippe Vigier.
Un séisme qui devrait boule-
verser durablement la vie politique
française.
A la niche !
Le nouveau flirt amorcé entre
le parti de Christian Jacob et l’UDI
de Lagarde fait la joie de François
Bayrou.
« C’est maintenant clair : le
centre, c’est nous, s’est-il réjoui
devant ses troupes. Le Parti radi-
cal est mort et l’UDI, après avoir
tenté de se vendre sans succès à
Macron, va retourner à la niche
sous l’autorité de LR. »
Ils s’aiment, ces centristes…
. Ce titre du « Figaro » (26/8) :
« Face au Covid, les entreprises
appellent à lʼoptimisme. » Lʼautre
nom de la méthode Coué ?
. « Les Echos » (28/8) sʼinterro-
gent : « Manger, fumer, rouler à
moto… Quelles sont les règles
sur le port du masque obligatoire
à Paris ? » Ça dépend des heures.
. Alexandre Bompard, le pédégé
de Carrefour, se félicite (AFP,
28/8) : avec la crise du corona-
virus, « le regard sur le secteur
de la grande distribution [a]
changé : on a prouvé notre utilité
sociale ». Tout en améliorant la
rentabilité du groupe.
. A la question du «  JDD  »
(30/08) : « La crise du coronavi-
rus a-t-elle affaibli ou renforcé [la
banque] Lazard ? », Jean-Louis
Girodolle, son pédégé, répond :
« Nous disposons dʼune activité
contracyclique, spécialisée dans
la restructuration des dettes sou-
veraines et dʼentreprise. Evidem-
ment, quand lʼactivité écono-
mique sʼarrête, ces nécessités
prennent le pas sur des mesures
plus offensives. » Autrement dit,
il y a de la fraîche à se faire…
. Souligné par « Le Monde »
(27/8) : « Contre lʼavis de la
Fédération des chasseurs,
Emmanuel Macron interdit la
chasse à la glu cette année. »
Craignait-il quʼune décision
contraire lui colle à la peau ?
. Confidences dʼun ministre (« Le
Point », 27/8) : « Jean Castex
nous a dit : “Il faut communiquer,
incarner, vous projeter dans la
France des sous-préfectures.” Il
nous a demandé de faire de la
comʼ, pas de bronzer au soleil. »
Comme Macron sur son scooter
des mers ?
. Le policier Fabien Vanhemel-
ryck, secrétaire général dʼAl-
liance, prévient (« Le Figaro »,
24/8) : « Attention à ne pas abu-
ser des tweets indignés. Le mi-
nistre est surtout attendu sur les
grands sujets de la rentrée, les
arbitrages budgétaires, sa vision
de la sécurité. » Si Darmanin nʼa
même plus le droit de jouer au
petit Sarko, où va-t-on ?
. Annonce de Bruno Le Maire
(« Les Echos », 27/8) : « Je
pense que, grâce à nos me-
sures [de soutien à lʼécono-
mie], nous pourrons avoir une
récession inférieure à 11 %. »
Champagne !
. Analyse de Jean Pisani-Ferry,
coordinateur du programme éco-
nomique du candidat Macron en
2017 (« Les Echos », 24/8) : « Le
risque dʼaffaissement de lʼéco-
nomie française est très sub -
stantiel. » Quʼest-ce qui lui fait
dire ça ?
. Du même Pisani-Ferry (« Les
Echos », 24/8) : « Lʼarrivée sur
le marché du travail des jeunes
diplômés va venir gonfler le chô-
mage ; les plans sociaux, les dé-
faillances dʼentreprises vont se
multiplier. Sans compter que la
situation internationale est incer-
taine. » Bref, tous les signaux
sont au vert.
. Au sujet dʼune candidature com-
mune à gauche en 2022, Olivier
Véran tonitrue (« Le Parisien »,
30/8) : « Croyez-vous que cinq
ou six candidats issus de la
gauche en 2022 peuvent mener
PRÉSIDENTIELLE : MÉLENCHON SE SENT POUSSER DES AILES
Bussereau désabusé
«L ES ÉLECTIONS dé-
partementales et régio-
nales le même jour, cÊest com-
pliqué, même si on lÊa déjà
vécu Ÿ, a confié l’ex-ministre
Dominique Bussereau, prési-
dent de l’Assemblée des dépar-
tements de France (ADF), lors
d’un séminaire des présidents
de département ÿ de droite, du
centre et indépendants Ÿ orga-
nisé le 25 août à Chaumont
(Haute-Marne).
ÿ Cette conjonction donne un
certain avantage au Rassem-
blement national, a poursuivi
l’ex-lieutenant de Raffarin.
Même si le profil du candidat
compte encore beaucoup aux dé-
partementales, il risque dÊy
avoir un vote semblable aux
deux élections. Et puis il y a
lÊapparition des Verts, qui sont
parfois plus extrémistes quÊéco-
logistes. Ce sera une élection
très compliquée⁄ Ÿ
à autre chose quʼà la défaite dès
le premier tour ? Le risque de lʼef-
facement, il est là ! » Et cʼest un
ancien socialiste qui le dit.
. Diagnostic dʼOlivier Faure, pre-
mier secrétaire du PS («  Le
Monde », 28/8) : « Cette rentrée
se fait (…) sous le signe dʼune
inquiétude sociale forte. Com-
ment comprendre que le gouver-
nement ait pris trois mois pour
présenter son plan de rebond ? »
Au fait, il en est où, le plan de re-
bond alternatif des socialistes ?
. De Ségolène Royal, ce coup
de griffe adressé à lʼécolo Yan-
nick Jadot (« Le Point », 29/8) :
« Il ne condescend même pas
à me prendre au téléphone. »
Peut-être la peur des ondes
électromagnétiques.
. Lu dans le  «  JDD  » (30/8)  :
« Brice Hortefeux a travaillé cet
été sur un mécanisme de choix
(dʼun candidat LR) qui ne serait
ni une primaire fermée, qui est
dʼun autre temps, ni une primaire
ouverte, quʼil accuse dʼavoir été
totalement faussée en 2016 par
la participation dʼélecteurs de
gauche. Cette solution permettrait
dʼéviter à la fois le cadenassage
et le hold-up. » Vite, un brevet !
. Lors de la réunion à Mennecy
(Essonne) de son mouvement,
Libres !, Valérie Pécresse a an-
noncé sa candidature pour la pré-
sidentielle de 2022 (le « JDD »,
30/8) : « Pour mon pays, je res-
sens le devoir de parler plus fort
encore. Je ressens comme ja-
mais lʼimpérieuse nécessité de
construire avec vous un avenir
qui nʼest pas écrit dʼavance. »
Reste à vérifier que « nous » est
dʼaccord.
. La députée communiste Elsa
Faucillon lʼaffirme (« Le Monde »,
28/8) : « Cela fait quelques mois
quʼil y a un élan positif envers les
communistes de la part de
La France insoumise (…). Cʼest
un bon point de départ, mais cela
ne suffit pas. Lʼunion de forma-
tions affaiblies ne crée pas de
dynamique.  » «  Affaiblies  »  ?
Mélenchon va adorer !
. Lu sur le site du « JDD » (28/8) :
« Benoît Hamon renonce à vou-
loir redevenir député. » Cʼest pré-
sident de la République ou rien ?
. Clément Beaune, le secrétaire
dʼEtat aux Affaires européennes,
fait feu de tout bois (Europe 1,
28/8) : « Jʼappelle un par un tous
mes homologues européens des
pays frontaliers. » Pourvu quʼil
ait souscrit un forfait illimité à lʼin-
ternational.
. Confidence du député euro-
péen Raphaël Glucksmann
(«  Libé  », 27/8)  : «  Jʼavais
aussi sous-estimé à quel point
la politique pouvait rendre
bête, moi le premier. Chacun,
en politique, détermine ses
prises de parole en fonction de
son public cible et de son ad-
versaire désigné. » Enfin un
discours de vérité !
. Nouvel exploit de la députée
LRM du Jura, Danielle Brulebois,
au concours « Ma binette par-
tout  »  : elle a réussi à placer
66 fois sa trombine dans le 8-
pages de sa dernière « Lettre de
votre député ». On espère quʼen
ce début dʼannée scolaire ses
petits camarades se montreront
à la hauteur !
Pour le parti macroniste
aussi.
Pour l’heure, Bussereau con-
centre ses efforts sur l’organi-
sation du 90e congrès de l’As-
semblée des départements de
France, qui doit avoir lieu à
partir du 4 novembre à La Ro-
chelle. Mince affaire, avec la
menace du Covid qui plane.
ÿ Nous avons invité le prési-
dent de la République, a-t-il an-
noncé fièrement. Et, sÊil ne vient
pas, nous inviterons le Premier
ministre, qui est toujours con-
seiller départemental. Ÿ
C’est la fête !
ÿ Il faut que lÊon soit 2 000
au lieu de 500 ou 600 habituel-
lement. Nous voulons faire un
congrès qui ait de la gueule, là
où le PS a fait pendant vingt
ans ses universités dÊété. Si on
peut faire mieux que le PS⁄ Ÿ
Mieux que le PS actuel, c’est
sans doute envisageable.
 La carrière supersonique d’une conseillère PRÉSIDENTIELLE 2022 : ÉDOUARD PHILIPPE FAVORI
DES ÉLECTEURS LR

du ministre Dupond-Moretti
La juge Charlotte Bilger avait mis François Bayrou en examen le 6 décembre.
Elle n’est restée que deux jours au cabinet du nouveau garde des Sceaux.

L
A PERFORMANCE mériterait
de figurer dans le « Livre Guin-
ness des records ». Arrivée le
lundi 24 août comme « conseillère
spéciale » d’Eric Dupond-Moretti, la
juge Charlotte Bilger est repartie…
le mercredi 26. C’est pourtant le mi-
nistre de la Justice en personne qui
avait demandé son recrutement. Et
qui a dû observer, effaré, cet aller-
retour supersonique…
Le garde des Sceaux ignorait-il que
sa future « conseillère spéciale », an-
cienne magistrate au pôle financier
parisien, avait dirigé l’enquête ayant
mené à la démission, le 21 juin 2017,
du premier garde des Sceaux choisi
par Macron ? Le 6 décembre dernier,
à l’issue de deux ans d’instruction,
Charlotte Bilger a mis en examen
François Bayrou et trois autres élus
du MoDem pour « complicité de dé-
tournement de fonds publics » dans
le dossier des emplois présumés fic-
tifs au Parlement européen. Ce jour-
là, avant sa mise en examen, le maire
de Pau a passé dix heures avec Bilger
et deux autres juges.
Autant dire que l’embauche de sa
persécutrice avait de quoi remplir
d’aise Bayrou, allié politique de Ma-
cron, qui lui doit sa majorité à l’As-
semblée ! Le 27 août, Macron a
d’ailleurs annoncé (confirmant les
infos du « Canard ») la nomination
de ce bon camarade au poste de haut-
commissaire au Plan, directement
rattaché à l’Elysée.
Cette situation explique-t-elle
l’hostilité de Véronique Malbec ? La
dircab de Dupond-Moretti a exigé
que la nouvelle venue ne rende
compte qu’à elle, et non au ministre,
ÿ ce qui est contre tous les usages Ÿ,
avancent des magistrats. A moins
que cette expulsion-éclair ne soit due
au prurit du directeur adjoint de ca-
binet, Rémi Decout-Paolini, lui-
même élu MoDem ? voire à un res-
ponsable très haut placé du parti ?
Bayrou de secours ?
Depuis juillet, la plupart des ma-
gistrats de la cour d’appel de Paris
savaient que Charlotte Bilger allait
rejoindre Dupond-Moretti. ÿ Elle
avait commencé à travailler sur cer-
tains sujets et cherchait des idées Ÿ,
racontent des collègues. ÿ Elle a été
virée avant dÊavoir commencé, sans
avoir même eu le temps de commettre
la moindre faute⁄ Ÿ s’indigne un
juge.
La Chancellerie, pourtant, a servi
au Volatile une explication dis-
trayante et très crédible : ÿ Son re-
crutement envisagé nÊa pas été à son
terme, mais cela nÊenlève rien à ses
qualités. Ÿ Admirable ! Ce ÿ recrute-
ment Ÿ Place Vendôme était, en fait,
tellement certain que Bilger, nom-
mée présidente de la cour d’assises,
avait déjà été remplacée à ce futur
poste dont rêvent quasiment tous les
magistrats, et qu’elle a désormais
perdu…
Au « Canard », où certains ont de
la mémoire, cette histoire a rappelé
celle du haut magistrat André
Braunschweig, qui, dans la sombre
Veolia-Suez :
affaire de l’Observatoire, avait mis
en examen François Mitterrand soi-
même. Le 27 mai 1981, Maurice
vive les grosses
Faure, garde des Sceaux, nomme
Braunschweig directeur de son ca-
binet. Se rendant compte de sa
bévue, il propose piteusement au
coupures (d’eau)…
Président de s’en séparer. ÿ Ah non ! Le leader mondial du traitement des déchets
rétorque Mitterrand. Une deuxième
bêtise nÊefface pas une première bê- et de l’eau veut avaler le numéro deux.
tise ! Ÿ Braunschweig est resté, pas
Bilger. Dupond-Moretti n’a pas pré- epuis dix ans, Antoine publics. Si, dans le monde, les
cisé au Palmipède s’il avait appelé
Macron…
D Frérot en rêvait tous les
matins en se rasant : le patron
activités des deux groupes
(268 000 salariés cumulés)
Jérome Canard
de Veolia s’était mis en tête de ne se chevauchent qu’au
bâtir un superchampion de Royaume-Uni et en Australie,
l’environnement de 40 mil- « en France, ce rapprochement

Covid, une deuxième vague de cafouillages liards d’euros en siphonnant

H UIT MOIS après le début
de l’épidémie, le ministère
de la Santé et son agence
Santé publique France (SPF)
n’arrivent toujours pas à comp-
tabiliser correctement les ma-
lades hospitalisés ou en réani-
mation. Parfois, les chiffres
annoncés apparaissent en
hausse, alors qu’en réalité ils
diminuent. D’autres jours, ils
semblent indiquer une baisse
significative, alors qu’il s’agit
d’un simple effet de rattrapage.
Dernier exemple : le 26 août,
faute de données actualisées,
SPF s’est résolu à mettre en
ligne exactement les mêmes
informations que la veille.
Drôle d’incubation…
En principe, ces erreurs
n’ont pas lieu d’être : les ad-
missions et les sorties des pa-
tients doivent être obligatoire-
ment enregistrées par l’hôpital
Les flics refusent de participer au bal masqué
concerné dans le système d’in-
formation Si-Vic, connecté aux
ordinateurs de Santé publique
France. Côté entrées, les er-
reurs restent plutôt rares. Côté
sorties, en revanche, c’est un
peu le foutoir, certains établis-
sements de santé ne mettant
à jour les départs que bien
tardivement.
ÿ CÊest pour cette raison quÊil
faut se méfier des statistiques
quotidiennes et privilégier les
chiffres hebdomadaires, qui in-
diquent plus sûrement les ten-
dances de fond Ÿ, alerte un
ponte du ministère. Heureu-
sement, l’autre système infor-
matique – le Sidep –, consacré
au seul recensement des cas
positifs, paraît beaucoup plus
fiable.
Ce boxon dans les statis-
tiques accentue encore l’im-
pression de maladresse et de
tâtonnement dans la gestion
quotidienne du Covid. Comme
pour l’évaluation des risques
de contamination par simple
contact, qui oscille au gré des
humeurs ministérielles et des
doutes scientifiques.
Virus en goguette
En mars, une étude assurait
que le virus pouvait survivre
trois jours sur certaines sur-
faces. Le professeur Delfraissy,
président du conseil scienti-
fique sur le Covid-19, conseil-
lait alors aux Français, par
précaution, de laisser leurs
courses plusieurs heures sur
leur balcon.
Depuis, l’étude en question
a été fortement critiquée, car
les chercheurs avaient utilisé
du virus très pur et concentré
à l’extrême pour réaliser une
expérience in vitro sans grand
rapport avec la vie réelle (« Le
Canard », 27/5). Pourtant,
comme le confirme le président
de la Fédération française d’hy-
giène hospitalière, le docteur
Bruno Grandbastien, aucune
nouvelle recherche n’a encore
permis d’en apprendre plus sur
la durée de vie du Covid sur les
surfaces. A croire que cette
question qui hante la planète
n’intéresse guère les experts…
ÿ Le virus ne survit sans
doute pas plus de quelques mi-
nutes à lÊair libre, ajoute le doc-
teur Grandbastien, mais at-
tention : même sÊil ne restait
virulent quÊune minute, ce se-
rait loin de constituer un risque
négligeable dans la cohue des
transports en commun. Ÿ
Les vendeurs de gel hydro-
alcoolique ont encore de beaux
jours devant eux…
Hervé Liffran
Préfet imprudent
u chapitre des masques,
A il ne se passe pas un jour
sans que la ministre du Tra-
vail, son collègue de l’Educa-
tion, les préfets et les mairies
n’enchaînent ordres et con-
trordres, mesures autoritaires
et assouplissements, règles gé-
nérales et exceptions…
Le 25 août par exemple, Didier
Lallement, le préfet de police
de Paris, décide d’imposer
cette disposition à tous les cy-
clistes… avant de rétropédaler
sur ordre de Matignon. Nico-
las Revel, le dircab du Premier
ministre, a pris lui-même le té-
léphone après avoir été alerté
par les réactions de l’équipe
d’Hidalgo et l’emballement
des réseaux sociaux.
Anne Souyris, adjointe Verte
à la Santé, a annoncé de son
côté à la presse que l’arrêté in-
terdisait de boire, manger ou
fumer dans les rues ! Nouvel
affolement sur la Toile et nou-
velle intervention du premier
Suez, son vieux rival dans le
traitement de la flotte et des
déchets. Jean-Pierre Clama-
dieu, le président de l’énergé-
ticien Engie, ayant laissé en-
tendre, le 31 juillet, qu’il était
prêt à céder ses 32 % dans
Suez, Veolia s’est jeté à l’eau
le 30 août.
Les barboteurs
en chef
Mais le conseil d’adminis-
tration de Suez n’a pas at-
tendu vingt-quatre heures
pour répondre : ce sera non.
Fraîchement arrivé aux com-
mandes du groupe, Bertrand
Camus a d’autres plans.
« D’abord grossir puis boulot-
ter Veolia dans deux ans,
quand Frérot approchera de
la retraite », raconte un expert
en déchets. Suez va donc
devoir proposer une solution
pour reprendre la participa-
tion d’Engie. Ce qui n’empê-
chera pas Veolia de suren-
chérir…
S’il n’a pas obtenu officiel-
lement le feu vert de l’Elysée,
Frérot n’a pas été découragé.
Economiquement, l’Etat a tout
intérêt à voir le cours d’Engie,
provoquera un bain de sang,
prévient un banquier. On voit
mal comment les syndicats
pourraient rester inactifs ».
Mais l’assoiffé Veolia est ex-
pert en eaux troubles. A condi-
tion que sa proposition valori-
sant Suez à 10 milliards
d’euros soit retenue, la société
s’engage à céder son activité
hexagonale dans l’eau à Meri-
diam, un fonds spécialisé dans
la gestion des infrastructures
publiques.
Classé parmi les 500 pre-
mières fortunes françaises, le
fondateur de ce dernier, le fi-
nancier Thierry Déau, passé
par la Caisse des dépôts, a cer-
tains atouts. Il a « donné
quelques coups de main au
candidat Macron », se souvient
un proche du Président.
En 2017, Meridiam a en
outre recruté Sandra Lagu-
mina, écartée de son poste de
directrice générale adjointe
d’Engie par Isabelle Kocher,
alors numéro deux de la boîte
d’énergie. Retour aux
sources…
Prélèvements
à la source
Histoire de mettre toutes les

G ARE à ceux qui omet-

traient de porter un
masque dans la rue : la police
veille ! Le 27 août, à l’occasion
d’une conférence de presse, le
Premier ministre a annoncé
triomphalement le chiffre de
« 700 verbalisations par jour ».
Soit pas grand-chose comparé
aux 1,1 millions de contre-
danses infligées durant le
confinement. Alors que les po-
lices municipales font du zèle
dans les rues, les 150 000 flics
du ministère de l’Intérieur,
eux, rechignent à coller
Cluster de vérité
135 euros d’amende aux indis-
ciplinés. Pourquoi ? Parce que,
pendant des mois, au pic de
l’épidémie, leur hiérarchie les
a privés de masques dehors,
au motif que cela ne servait à
rien.
Drôle de jugement
de Salomon
Il faut dire que la chefferie
avait bien matraqué la
consigne. Le 17 mars, par
exemple, quarante-huit heures
après le début du confinement,
le patron de la police en tenue
des Yvelines diffusait ce mes-
sage : ÿ Je confirme les décla-
rations du chef dÊétat-major :
il est absolument proscrit de
porter le masque sur la voie
publique ou à lÊaccueil du
public. Ÿ
Quatre jours plus tard, alors
que les flics s’inquiètent, la
Place Beauvau réquisitionne,
en visioconférence, le directeur
général de la Santé afin qu’il
rassure les patrons des syndi-
cats policiers. ÿ Ce nÊest pas
quelquÊun que vous croisez ou
que vous contrôlez sur un trot-
toir qui vous contamine, cer-
tifie Jérôme Salomon. Il faut
être à moins de 1 mètre en face
adjoint, Emmanuel Grégoire,
pour rassurer fumeurs et man-
dont il détient 23,6 %, re-
prendre des couleurs. Sociale-
ment, cependant, l’opération
chances de son côté, Antoine
Frérot s’est offert les services
de banquiers d’affaires à fort
geurs des rues…
à face, pendant environ un a de quoi affoler les pouvoirs pedigree. Débauché par la
quart dÊheure Ÿ, dixit le verba- banque Perella Weinberg,
tim de la réunion que « Le Ca- Philippe Capron a été direc-
nard » s’est procuré. Et le pro- teur financier de Veolia (2014-
fesseur d’insister : ÿ On voit UN PARI RISQUÉ 2018) avant de briguer, en
par exemple des masques cir- vain, la direction d’Air France.
culer avec des personnes qui L’autre huile de Perella
font du vélo, cela nÊa pas de impliquée dans le deal, David
sens. Ÿ Par la suite, des syndi- Azéma, ex-directeur de
cats comme l’Unsa-Police l’Agence des participations de
continueront de réclamer le l’Etat, a failli piquer la place
droit de porter un masque lors d’Antoine Frérot en 2014,
des patrouilles : en vain. lorsque le cours de l’action
Le 19 août, le directeur gé- maison plafonnait. Le cham-
néral de la police annonce à
toutes les directions que le
pion de l’assainissement n’est
pas rancunier…

M ÊME pas peur ! Malgré

le Covid, les infectio-
logues de toute la France se ré-
uniront par centaines en
congrès, du 9 au 11 septembre,
et pour de vrai ! Contrairement
à la Société française de neu-
rologie, qui a choisi d’organiser
un congrès virtuel, en sep-
tembre, ou à la Société savante
de lutte contre le sida, qui a,
elle aussi, opté pour un congrès
via Internet, la crème des in-
fectiologues a décidé de ras-
sembler près de 1 000 per-
sonnes pendant deux jours à
Poitiers, dans un amphi et plu-
sieurs salles de réunion.
Savant cocktail
L’idée a tout de même donné
lieu à de joyeux débats au sein
de la Spilf, la société savante
des infectiologues qui organise
ce raout annuel. ÿ Certains
APRÈS LES ATTENTATS DE 2015, HOLLANDE CRAIGNAIT
QUE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE NE SE DISLOQUE
étaient contre, principalement
par crainte que ce ne soit pas
compris médiatiquement Ÿ,
raconte l’un de ses membres.
Pas possible ! Il faut dire qu’en
cas de cluster le Covid fera
un strike, comme on dit au
bowling…
Outre des réanimateurs et
des microbiologistes, le con-
grès réunira les trois quarts
des infectiologues du pays,
soit environ 500 toubibs…
ÿ CÊest une réelle prise de
risque Ÿ, transpire un toubib
hospitalier. ÿ On fera très at-
tention, assure le professeur
Pierre Tattevin, infectiologue
au CHU de Rennes et prési-
dent de la Spilf. La jauge des
salles a été divisée par deux et
lÊhabituel dîner de gala nÊaura
pas lieu. Ÿ Même pas le droit
de boire un coup au bistrot ?
ÿ Nos confrères suisses font la
même chose que nous, argue
encore le professeur Tattevin.
On a besoin dÊéchanger et de
port du masque n’est plus seu-
lement obligatoire dans les es-
paces clos, mais aussi ÿ dans
Enfin, Jean-Marie Messier
a lui aussi été invité au festin
de cette fusion-acquisition, po-
mettre nos connaissances à lÊexercice des missions suscep- tentiellement très fructueuse.
jour. On veut aussi montrer tibles de mettre les personnels Or le banquier a été le grand
que, lorsque lÊon respecte la au contact physique du pu- patron de Vivendi, qui coiffait
distanciation sociale, le lavage blic Ÿ et ÿ dans les véhicules de Veolia Environnement. A
des mains et le port du mas- service lorsquÊils sont occupés l’époque, J2M rêvait surtout
que, on peut reprendre une vie par plus dÊun agent Ÿ. au cinéma et à la musique
collective. Ÿ Remplacer ÿ absolument de Vivendi, mais l’eau et les
C’est un essai clinique ou proscrit Ÿ par ÿ obligatoire Ÿ, ce déchets recèlent bien des
une expérience in vivo ? n’est pourtant pas compliqué ! pépites…
Isabelle Barré C. L. Odile Benyahia-Kouider
Les alliés mollassons de Macron face à Erdogan
Membres de l’Union européenne ou de l’Otan, ils ménagent le Grand Turc. Comme les Américains.
A DIZAINE de navires de guerre devant eux la position de la France Chypre méritent d’être protégées. Seu- est préoccupée par les incidents qui se
L turcs qui continue, en Méditerra-
née, de protéger un bateau spécialisé
dans ce jargon personnel qu’il affec-
tionne parfois. Extraits : ÿ Quand je
lement 8 des 27 membres de cette ho-
norable institution ont osé apporter
produisent en Méditerranée orientale.
La France et la Turquie sont des alliés
dans la recherche des sites de gaz na- parle de souveraineté de la Méditerra- leur soutien à la France. Même ab- extrêmement importants de lÊOtan, et
turel a pu assister, depuis le 26 août, née, je suis obligé dÊêtre cohérent, en sence de riposte « européenne » au com- nous voudrions quÊ[elles] trouvent des
à des vols de Rafale français, d’avions actes, avec les mots. Et je peux vous portement du Grand Turc en Libye. solutions nÊimpliquant pas la nécessité
F-16 grecs et à divers exercices des dire que les Turcs (…) ne respectent Malheur supplémentaire, enfin : l’Otan dÊavoir des navires de guerre ou des
marines italienne, chypriote, grecque que cela. LÊAllemagne et dÊautres par- est aussi en retrait. ÿ A lÊinstar des avions déployés dans un environne-
et française. ÿ Ces manfluvres sont une tenaires sont en train de nous rejoindre Américains, qui ne soutiennent pas la ment peu coopératif⁄ Ÿ
démonstration de force face aux menées (ce qui est faux) pour voir si le com- France dans cette période de tension Merkel ménage Erdogan, car 3 mil-
agressives et impérialistes dÊErdogan Ÿ, portement turc pose problème (sic). De avec la Turquie, plusieurs membres de lions de Turcs vivent en Allemagne et
dit-on au Quai d’Orsay, avec l’accord temps en temps, il est utile dÊavoir la lÊAlliance atlantique évitent de critiquer elle craint leurs réactions. Trump agit
du ministre Le Drian. Et elles se dé- France (re-sic) qui dit les choses que Ankara Ÿ, déplore un diplomate plutôt de même, avec l’espoir que les avions
roulent dans une zone que l’état-major les autres nÊosent pas dire. Ÿ résigné. américains pourront toujours utiliser
français a baptisée – avec humour ? – Mais peu importe à Erdogan. Il vient A preuve, en juillet, tandis que l’ar- les bases prêtées à l’Otan par la Tur-
« Médor » (pour MEDiterranée ORien- d’annoncer une série de manœuvres mée turque continuait de s’installer quie. Et il croit qu’Erdogan cessera
tale) dans les eaux territoriales de la navales, du 28 août au 11 septembre, confortablement en Libye et d’y livrer bientôt d’entretenir de bonnes relations
Grèce et de Chypre reconnues, comme au nord-ouest de Chypre… des armes en violation de l’embargo avec Poutine. Justifications ou illu-
il se doit, par la Convention interna- décrété par l’ONU, la frégate améri- sions ?
tionale sur les droits de la mer. Orchestre caine « Winston-Churchill » participait Claude Angeli
Deux jours après le début de ces opé- de faux amis à d’importantes manœuvres turques
rations spectaculaires menées par En réalité, et Macron n’a pas l’in- en Méditerranée. Une initiative que, . Une période de tension est toujours inté-
quatre membres de l’Otan en réaction tention de l’admettre, l’Union euro- le 13 août, le porte-parole du Penta- ressante pour un certain commerce. Avec
aux rodomontades de la Turquie, elle péenne vient une nouvelle fois de mon- gone, Jonathan Hoffman, se gardait l’accord de l’Elysée, plusieurs industriels
aussi membre de l’Alliance atlantique, trer qu’elle est bien incapable d’adopter bien de valoriser, tout en se montrant français ont proposé à la Grèce et à Chypre
Macron a convoqué les journalistes de des positions politiques et militaires plutôt paternel à l’égard de Macron et deux frégates, des drones, et 18 Rafale
la presse présidentielle. Et a justifié consensuelles, alors que la Grèce et d’Erdogan : ÿ LÊarmée des Etats-Unis dont 8 d’occasion.

« Le Canard enchaîné » – mercredi 2 septembre 2020 – 3

 Trump veut saboter le gazoduc russo-européen
Pour écouler leurs hydrocarbures, les Américains menacent de sanctions sévères ce projet industriel parfaitement légal.

D
’ORDINAIRE, un pays peut posant les tubes jusqu’au personnel assu-
poursuivre l’auteur d’un crime rant son fonctionnement et, pourquoi pas,
ou d’un délit commis à l’étran- au fleuriste qui décore le bureau du pa-
ger s’il existe un lien humain avec ce tron – sont passibles de sanctions particu-
pays. Exemple, la France enquête sur lièrement salées, détaillées dans une lettre
les meurtres de Français à l’étranger. envoyée le 5 août par le Sénat américain
Pour les Etats-Unis, c’est encore (lire ci-contre). Et ce de manière rétroactive,
plus simple : le seul emploi du dollar – c’est-à-dire quelle que soit la date à laquelle
devise universelle – suffit à établir ce ils ont commencé leurs activités.
lien. C’est ainsi qu’en 2015 la BNP a Le 9 août, le ministre des Affaires étran-
été condamnée à une amende record gères allemand, Heiko Maas, téléphone à
de 8,9 milliards de dollars : si elle avait son homologue américain, Mike Pompeo,
violé un embargo sur l’Iran et le Sou- pour lui ÿ faire part de [s]a stupeur et de
dan, celui-ci, purement américain, ne [s]on mécontentement Ÿ. Le 16 août, c’est
lui était a priori pas opposable. Sauf au tour de l’Espagnol Josep Borrell, vice-
qu’elle avait payé en dollars… président de la Commission européenne,
En mars 2018, Trump est allé encore de publier un communiqué dénonçant
plus loin en promulguant le Cloud l’ÿ application de sanctions extraterritoriales
Act, qui oblige les sociétés améri- comme contraires au droit international Ÿ,
caines à transmettre à la justice US – sans toutefois évoquer la moindre mesure
si elle le demande – la totalité des don- de rétorsion, contrairement à ce que de-

nées recueillies hors des Etats-Unis,
même quand la loi locale l’interdit.
Enfin, n’importe quelle loi peut de-
venir d’application extraterritoriale
si le Congrès – le Parlement améri-
cain – le décide.
Cette croisade pour la « morale » se
marie souvent avec la quête d’intérêts
très matériels. Ainsi, selon un rapport
d’information de l’Assemblée natio-
nale (2016), entre 2009 et 2015 quinze
banques ont versé, au total, 16 mil-
liards de pénalités pour avoir violé un
embargo américain. N’y figuraient que
deux établissements US pour un mon-
tant de 320 millions. Egalement épin-
glées, des entreprises pétrolières
(Total, Halliburton), automobiles
(Daimler) ou énergétiques (Siemens).
Alstom, elle, a été poursuivie au mo-
ment où General Electric négociait le
rachat d’une partie du groupe hexa-
gonal. Sûr que l’emprisonnement d’un
responsable d’Alstom aux USA et la
menace de poursuites contre son pré-
sident, Patrick Kron, ont rendu les né-
gociateurs plus attentifs aux argu-
ments américains…
C
ONFRONTÉS à une baisse mon-
diale du prix du gaz – divisé par 3
en dix-huit mois –, les Etats-Unis
(premier exportateur mondial depuis
2018) ont trouvé la recette pour sauvegar-
der leurs intérêts : punir leurs concur-
rents… même s’ils agissent en dehors des
frontières US. C’est ce qu’on appelle des
sanctions extraterritoriales.
Géopolitique des tubes
Dans leur ligne de mire : le gazoduc
Nord Stream 2, construit par le russe Gaz-
prom en collaboration avec cinq groupes
européens, dont Engie (ex-Gaz de France).
Un projet à 12 milliards d’euros qui de-
vrait, à terme, fournir à l’Europe 10 % du
gaz dont elle a besoin. Récit de ce chantage
d’Etat qui, curieusement, fait peu de bruit
dans la presse française... En 2017, Donald
Trump obtient du Congrès américain le
vote d’une loi ÿ contre les adversaires de
lÊAmérique Ÿ, prévoyant notamment des
sanctions contre la Russie. Nord Stream 2,
alors encore à l’étude, en est explicitement
exclu. Mais, aux Etats-Unis, la production
explose : grâce aux gaz et pétrole de
schiste, les Américains deviennent, en
2018, les premiers exportateurs mondiaux
de gaz liquide – le GNL. Problème : cette
abondance s’accompagne d’un effondre-
ment des prix, et plus encore du GNL.
C’est ce moment que choisit Ted Cruz,
sénateur républicain du Texas (la zone
principale d’extraction du gaz et d’implan-
tation des usines de liquéfaction), appuyé
par la commission des Affaires étrangères,
pour mitonner un projet de loi visant
Nord Stream 2, prestement intégré à une
loi relative aux crédits de la Défense, le
15 décembre 2019.
Sous un intitulé surréaliste – ÿ Loi de
protection de la sécurité énergétique en Eu-
rope Ÿ –, l’article 75 prévoit des pénalités
effroyables à l’encontre des sociétés parti-
cipant à la construction du gazoduc. Est
aussi visé, entre les lignes, le
Turkish Stream, qui achemine du gaz russe
en Turquie et doit être prolongé vers l’Eu-
rope. Message reçu : du jour au lendemain,
la société suisse Allseas, première spécia-
liste mondiale de la pose de tubes sous-
marins, déserte et, à deux semaines de son
achèvement, laisse le chantier en plan !
Mais voilà que les Russes se mettent en
tête de terminer les travaux eux-mêmes.
Faute de matériel suffisamment perfec-
tionné, ils mobilisent un vieux navire dans
le port allemand de Sassnitz, sur la Bal-
tique, nécessitant des installations sup-
plémentaires.
Pitié pour le fleuriste !
Nouvelle charge législative à Washing-
ton. Le 15 juillet, le Département d’Etat
(ministère des Affaires étrangères US) an-
nonce une ÿ mise à jour Ÿ de la loi précé-
dente : désormais, toutes les entreprises
participant à Nord Stream 2 – des navires
Des sanctions “dévastatrices”
D ANS une lettre datée du 5 août et adres-
sée aux autorités du port allemand
de Sassnitz, où devraient être assemblés
les derniers tronçons du gazoduc
Nord Stream 2, le Sénat américain n’y va
pas par quatre chemins. Si la société ges-
tionnaire du port, Fährhafen Sassnitz
GmbH, « ne cess[e] pas ses activités », elle
fera l’objet de sanctions « dévastatrices »
qui sonnent comme un arrêt de mort.
Pour être plus précis : « Les administra-
teurs, responsables et actionnaires de Fähr-
mandait le Sénat français dans une pro-
position de résolution européenne votée un
mois plus tôt. Ces molles protestations n’ont
pas terrifié les Américains. En octobre, le
Congrès – républicains et démocrates
confondus – devrait voter l’extension des
sanctions annoncées le 15 juillet.
En attendant que Trump s’en prenne
aux importations d’acier ou aux exporta-
tions de boudin français si elles ÿ menacent
la sécurité américaine Ÿ ?
Hervé Martin
hafen Sassnitz seront interdits d’entrée aux
Etats-Unis et tous leurs propriétés ou intérêts
sous notre juridiction seront gelés. » Plus
grave encore pour une société commerciale,
elle se verra interdire « toute transaction »
en dollars. De même, « il sera interdit à tout
citoyen ou compagnie américains d’engager
toute transaction » avec elle ou ses membres.
On n’ose imaginer le châtiment si les res-
ponsables de cette boîte n’avaient pas agi
– car c’est bien le cas – dans la plus parfaite
légalité…

Sarko est de retour Place Beauvau ! Fondation “Libé” :

«J
Avec Darmanin, la “politique du chiffre” revient en fanfare.
E VEUX que ça
marche ! Je veux que ce
soit dans les stats ! Ÿ Le
28 août, devant les préfets
– masqués – réunis Place
Beauvau, Gérald Darmanin a
annoncé le grand retour de la
« politique du chiffre », dont
Sarko avait fait, à l’Intérieur,
sa marque de fabrique. Son
successeur a ordonné à ses
troupes de relancer la machine
à décimales. Désormais, il veut
connaître chaque jour le
nombre de patrouilles effec-
tuées sur la voie publique, celui
des reconduites à la frontière,
le bilan chiffré des infractions
et des délits, etc. Les forces de
l’ordre sont sommées de ne pas
lésiner sur la nouvelle amende
visant les consommateurs de
stups : du « résultat » obtenu
sans trop d’efforts…
ÿ JÊavais lÊimpression dÊen-
tendre Sarkozy, s’agace un
vieux préfet. La prochaine
étape sera celle des objectifs
chiffrés. Ÿ Avec, côté flics, les
bonnes vieilles méthodes de
bricolage des stats. Objectif :
donner du grain à moudre à
Macron pour sa campagne pré-
sidentielle, qui s’annonce très
sécuritaire. Le top départ ? Son
discours lors des commémora-
tions du 150e anniversaire de
Les bétonneurs en campagne
la IIIe République, le 4 sep-
tembre, sur le thème : « Je vais
restaurer l’autorité de l’Etat ».
Rien que ça ?
Pour l’occasion, Darmanin
a dégainé un élément de lan-
gage : l’ÿ ensauvagement de la
société Ÿ. Encore un calque de
Sarko, qui, lui, entendait en
finir avec les ÿ racailles Ÿ. La
mise en scène de son action au
ministère est à l’avenant.
Un mariage
en bleu marine
Le 25 août, par exemple, le
nouveau premier flic de
France avait prévu de se pro-
duire en soirée, devant les ca-
méras, dans un commissariat
de Gennevilliers. Manque de
bol, les poulets ont cafté, et
l’info a fuité. Le ministre,
furax, a illico annulé son dé-
placement et demandé à la
maison d’en face, les gen-
darmes, de lui trouver pour le
soir même, ÿ à moins de
100 km de Paris Ÿ, un nouveau
point de chute. Ravis de ce
pied de nez aux frères enne-
mis, les pandores ont emmené
ministre et caméras dans une
cité de Seine-et-Marne pour
une opération sur les lieux de
deal. De bien belles images…
Hélas, même scénarisés par
les gendarmes, ces déplace-
ments réclament un grand dé-
ploiement… de flics. ÿ Chaque
fois, cÊest le même circus,
s’agace un lieutenant de sécu-
rité publique. Ça nous bouffe
une bonne journée de prépa-
ratifs. Sans compter les forces
déployées pour le protéger. Ÿ
A Gennevilliers, par exemple :
deux compagnies de sécurisa-
tion et d’intervention, une
de CRS, une brigade anticri-
minalité, une brigade territo-
riale de contact. Sans oublier
les poulets des stups et leurs
chiens, venus ce jour-là par-
ticiper au show. Soit au
Darmanin boude Gérald
U N COURRIER daté du
7 avril et signé Chris-
tophe Castaner, alors ministre
de l’Intérieur, attend toujours
sa réponse : il était adressé au
ministre de la Santé, Olivier
Véran, et à celui de l’Action et
des Comptes publics, un cer-
tain Gérald Darmanin. Dans
sa bafouille, Casta sollicitait
ses deux collègues pour l’ÿ ins-
cription du Covid-19 dans les
tableaux des maladies recon-
nues comme étant dÊorigine
professionnelle afin dÊassurer
moins… 150 fonctionnaires.
Si Darmanin est toujours
très entouré et tient à garder
secret l’agenda de ses déplace-
ments, c’est aussi pour tenir à
l’écart les activistes féministes,
attentives à ses moindres faits
et gestes. A Boulogne-sur-Mer,
le 29 août, pour la soirée de
mariage du ministre, une com-
pagnie de CRS (et quelques
gendarmes, reconnaît l’Inté-
rieur) a été conviée. ÿ Parce
quÊil existait des menaces Ÿ, jus-
tifie l’entourage de Darmanin.
Ils avaient apporté un ca-
deau, au moins ?
D. H. et C. L.
la meilleure prise en charge
possible des agents dont le dé-
vouement aura pu les exposer
au virus Ÿ.
Quatre mois plus tard, cette
demande de prise en charge
des flics par la Sécu, fortement
appuyée par l’un des princi-
paux syndicats de flics, l’Unsa-
Police, s’avère plus que jamais
d’actualité : 39 % des clusters
recensés depuis le 9 mai par
Santé publique France au sein
de l’administration sont loca-
lisés dans les commissariats !
Les syndicats évaluent à 8 000
(sur 150 000) le nombre de
poulets ayant chopé le Covid.
Un chiffre que refuse de confir-
les craintes étaient fondées…
L ES CONFRÈRES de « Libé »
redoutaient une entourloupe
de leur propriétaire, le groupe Al-
tice, du milliardaire Patrick Drahi.
Depuis quelques jours, ils ont la
désagréable sensation d’avoir eu
le nez creux.
Trois mois et demi après l’an-
nonce du beau projet de cession
de leur journal à ÿ un fonds de
dotation pour une presse in-
dépendante Ÿ, l’affaire bat déjà
de l’aile. « Libé » était censé de-
venir une gazette ÿ incessible Ÿ,
ÿ à but non lucratif Ÿ, lovée dans
une structure garantissant sa ÿ to-
tale indépendance éditoriale,
économique et financière Ÿ. Et
c’est à peu près tout le contraire
qui est en train de se passer !
Lundi 31 août, les salariés se
sont étranglés en apprenant que
l’oseille ne serait pas au rendez-
vous. Une fois épongées les dettes
du journal (49 millions), Altice
MACRON ENTREVOIT LʼÉCLAIRCIE
doit abonder en argent frais son
fameux fonds de dotation, afin de
permettre à « Libé » de revenir à
l’équilibre d’ici à 2023 et de faire
face à la montagne de dépenses
qui l’attend : transition numérique,
plan de départs, déménagement,
pertes futures, etc.
Gide et les faux
monnayeurs
Le nouveau dirlo du journal,
Denis Olivennes, que l’on ne peut
guère soupçonner de vouloir dé-
pouiller l’actionnaire, a lui-même
estimé l’enveloppe nécessaire à
17,4 millions d’euros. Et, cet été,
le cabinet Technologia, mandaté
par les élus du personnel, a évalué
ÿ le besoin en cash lié aux trois
premières années (…) de 30 à
près de 40 millions Ÿ.
Or c’est à peine 13 millions
d’euros qu’Altice vient d’accepter
d’allonger. Le groupe a donné sa
ÿ parole Ÿ qu’il remettrait au pot
au fur et à mesure, si besoin. La ré-
daction a exigé des garanties
écrites. Réponse ? C’est niet !
Mieux, comme le rapporte « Le
Monde » (2/9) : le cabinet d’avo-
cats Gide Loyrette Nouel s’est pen-
ché sur le montage juridique pro-
posé par Altice pour « Libé ».
Verdict : ÿ Sa validité Ÿ pourrait
être ÿ remise en cause Ÿ.
Primo, ce fonds, qui reste ÿ en-
tièrement à la main du fonda-
teur Ÿ, exclut toute représentation
de salariés ou de tiers indépendants
au conseil d’administration. Deuzio,
il serait impossible, y compris à un
mécène, d’y réinjecter en cours de
route de l’argent défiscalisé afin
qu’il parvienne à « Libé » sans s’ex-
poser à un vilain redressement. Le
journal reste en effet une filiale
commerciale : or, toute rentrée
d’oseille ne doit servir qu’à financer
des activités d’intérêt général.
Bienvenue
aux mécènes
Tertio, si la dotation du fonds
initiale n’est pas suffisante et que
« Libé » perd trop d’argent dans
les prochaines années, la seule ma-
nière de le sauver serait… une
ÿ augmentation de capital Ÿ,
avec, si nécessaire, l’arrivée d’in-
vestisseurs extérieurs. Rien n’est
prévu pour l’empêcher, Altice
garde la main et décide !
Une hypothèse du cabinet Gide
sur le projet Drahi, qui doit voir le

en Seine-et-Marne mer ou d’infirmer l’Intérieur.

Ironie du remaniement ? Le
ministre de l’Action et des
jour ce jeudi (3/9), laisse rêveur :
il pourrait avoir, ÿ en réalité,
pour objet une sortie de „Libé-

« Z ÉRO artificialisation
des sols. Ÿ Traduit du
jargon, et extrait d’un docu-
ment d’orientation publié il y
a un mois par le ministère de
l’Ecologie, signifie l’intention
de stopper le bétonnage des
terres cultivées. Ce doc s’ins-
crivait dans la continuité du
discours d’Emmanuel Macron
devant la Convention ci-
toyenne pour le climat, le
29 juin, qui avait plaidé en fa-
veur de la ÿ sanctuarisation
des terres agricoles Ÿ.
Ça tombe mal pour la Seine-
et-Marne, où pelleteuses et
bulldozers sont prêts à engager
la deuxième phase d’un vaste
projet bétonnifère conçu en
1994 : le Val Briard. L’objectif
alors fixé par les maires des
neuf communes du secteur
(situé à une quinzaine de kilo-
QUI SERA LʼHOMME PROVIDENTIEL DE LA GAUCHE ?
mètres de Disneyland) était
d’édifier sur des centaines
d’hectares de terres agricoles
une immense « plateforme lo-
gistique ». Concrètement, des
géants de la distribution ou des
fabricants devaient aligner, le
long de la nationale 4, des en-
trepôts destinés à alimenter
l’Ile-de-France. Ikea s’installe
le premier, fin 2005, suivi de
Conforama et Castorama.
Safer
à pas grand-chose
Bientôt, le « parc » s’étend
sur 140 ha (dont une petite
partie reste conservée à l’état
« naturel »), soit l’équivalent
de la surface des douze plus
grands centres commerciaux
de l’Hexagone. Le succès oblige
vite à préparer le passage à la
deuxième tranche des travaux,
prévue par les « pionniers » dès
1994. Jean-Jacques Barbaux,
un conseiller général UMP, est
à la manœuvre.
Ça tombe bien : une ferme
de 150 ha jouxte la première
tranche. A la suite du décès de
sa propriétaire, la Société
d’aménagement foncier et
d’établissement agricole
(Safer) l’a achetée puis reven-
due six mois plus tard à la
Compagnie fermière Benjamin
et Edmond de Rothschild.
Barbaux, entre-temps élu
président du conseil général
de Seine-et-Marne, puis Isa-
belle Périgault, qui lui succède
à la tête de la communauté de
communes, lorgnent ce terri-
toire qui colle à la première
tranche.
Marché conclu en juin 2018
pour 17,25 millions d’euros
(soit 7 fois son prix d’achat par
les Rothschild, et 15 fois le prix
moyen de l’hectare) : un jack-
pot qui rend fous de rage
France Nature Environne-
ment et les paysans du coin.
ÿ En faisant grimper ainsi le
prix de la terre, aucun agricul-
teur ne pourra sÊinstaller à
lÊavenir Ÿ, peste l’un d’eux.
La construction de cette
deuxième tranche de 150 ha
débutera en 2022. Certains
élus de la communauté de
communes du Val Briard en-
visagent déjà une troisième
tranche, qui porterait le tout
à 800 ha.
Si Barbara Pompili veut ou-
vrir le dossier de la bétonni-
sation des campagnes, le Val
Briard lui offre une belle
tranche de vie.
Alain Guédé
Comptes publics, qui n’avait
pas jugé utile de donner suite
à la requête de son homologue
de Beauvau, est désormais le
premier flic de France.
Gérald Darmanin va-t-il
enfin daigner répondre à Dar-
manin Gérald ?
Dé-prime exceptionnelle
R
OGER, caneton sexagénaire
habitant la Haute-Vienne, cherche
un emploi. En mars, l’hôpital d’Au-
busson, dans la Creuse, lui propose trois
mois de CDD à l’accueil. Malgré les 80 km
à parcourir matin et soir, il accepte et
transpire au milieu du personnel soignant
durant tout le confinement.
En juin,  un mois après la fin de son
contrat, une lettre de l’hosto le récompense
de ses efforts. Au même titre que tous les
employés de cette période, Roger reçoit
la prime Covid de 500 euros promise par
le gouvernement. Champagne pour Roger,
et bien mérité !
Comme c’est l’usage, il déclare aussi
sec sa prime à Pôle emploi. Une semaine
plus tard, douche froide : l’agence de Li-
moges Ventadour lui réclame par courrier
le paiement de 395 euros de trop-perçu
d’allocations, « au titre des salaires du mois
de juin ». Concrètement, il lui est donc de-
mandé de rendre à l’Etat la majeure partie
de ce qu’il lui a versé en récompense de
son dévouement…
Contacté par le Palmipède fin juillet, Pôle
emploi assume sa politique en considérant
cette prime exceptionnelle comme « un re-
venu dʼactivité professionnelle ». Moyen-
nant quoi, dès le lendemain, l’organisme
prévient Roger par mail que, après « ré-
examen », son trop-perçu « nʼest pas jus-
tifié et annulé ».
On ressort le champagne !
E N VACANCES en août à Digne-les-
Bains (Alpes-de-Haute-Provence),
Sylvie voit son fils de 11 ans chuter sur la
tête. Ouf, pas de gros bobo, mais le garçon
a mal aux quenottes, desquelles s’est
détaché un élément d’appareil dentaire.
La maman se met donc en quête d’un
dentiste. Sans mesurer l’ampleur
herculéenne de la tâche.
Sylvie appelle 18 praticiens à Digne – la
totalité du cheptel. Quand le répondeur se
déclenche, c’est pour indiquer que le den-
ration‰ du groupe Altice tout
en permettant la défiscalisa-
tion des sommes affectées au
remboursement des prêts dÊas-
sociés Ÿ.
On est assez loin de l’extase
journalistique…
Christophe Nobili
tiste est en vacances, ou pour inviter à rap-
peler. Deux secrétaires décrochent pour
préciser que les nouveaux patients ne sont
pas admis. Une dernière suggère de joindre
le conseil de l’ordre du département… où
on n’indique aucun cabinet ouvert à Sylvie.
Elle appelle alors le 15, mais le Samu ne
traite pas les urgences dentaires. L’hôpital
de Gap ne répond pas. Aux urgences de
Digne, où la famille se pointe, aucun den-
tiste n’est présent. Miracle, le lendemain :
un rendez-vous est obtenu chez un pro-
fessionnel à Forcalquier. Las ! face à son
patient, ce dernier déclare ne pas soigner
les enfants… non sans facturer son « en-
tretien » 25 euros à la Sécu.
Après une nouvelle visite pour rien aux
urgences pédiatriques d’Aix-en-Provence,
le salut vient du cabinet dentaire de Mari-
gnane, à deux heures de route, où le fiston
est enfin soigné – après quatre jours de
recherche et plus de 30 professionnels
contactés ! Malgré plusieurs tentatives,
«  Le Canard  » attend toujours que le
conseil de l’ordre des chirurgiens-dentistes
des Alpes-de-Haute-Provence décroche
son téléphone pour lui expliquer ce défaut
de prise en charge. Quand les poules au-
ront des dents ?
Dominique Jaillet

4 – « Le Canard enchaîné » – mercredi 2 septembre 2020

 Un long procès longtemps après
Ce mercredi, après plus de quatre ans d’instruction et deux mois et Les principaux accusés sont morts, et les “complices intellectuels”
demi d’audiences, s’ouvre à Paris, devant la cour d’assises spéciale, ne sont pas de la partie ; seuls 14 prévenus seront dans le box, mais
le procès des attentats islamistes des 7 et 9 janvier 2015 contre les attentes des 200 parties civiles sont à la mesure du choc provoqué
“Charlie Hebdo” et l’Hyper Cacher. il y a déjà cinq années par ces attentats meurtriers.
ERTAINS parlent Et, parmi les présents, tous

C d’un procès historique,

d’autres d’un procès
de seconds couteaux, faute
d’avoir les véritables respon-
sables dans le box des accu-
sés. Car les frères Kouachi,
assassins de « Charlie », et
Amedy Coulibaly, tueur de
l’Hyper Cacher et d’une poli-
cière, ont tous trois été abat-
tus. Laissant derrière eux,
entre le 7 et le 9 janvier 2015,
17 morts, des blessés, des vies
ruinées.
Le procès de ces massacres
débute le 2 septembre, dans
quatre salles d’audience, avec
200 parties civiles, des di-
zaines d’avocats et des me-
sures de sécurité jamais vues
encore en France. Et tout sera
filmé ÿ pour lÊHistoire Ÿ.
De simples
voyous ?
Chez les avocats des vic-
times est redoutée l’épreuve,
pour leurs clients, de ces deux
mois et demi d’audiences à re-
vivre les assassinats. ÿ Aucune
plaie ne sera fermée. Ce pro-
cès, cÊest la déchirure⁄ Ÿ pré-
dit Antoine Comte, avocat de
plusieurs victimes de ÿ Char-
lie ». ÿ LÊimportant ne sera pas
de juger ceux du box mais de
faire entrer dans la salle des
faits et un projet qui avaient
pour but de tous nous terrori-
ser Ÿ, ajoute Patrick Klugman,
qui plaidera pour des victimes
de l’Hyper Cacher.
Les avocats des accusés,
eux, auront la rude tâche de
dédouaner le plus possible
leurs clients de l’« association
de malfaiteurs en relation
avec une entreprise terro-
riste » qui leur est reprochée.
Et d’en faire de simples
voyous, ayant certes aidé les
POUR EUX AUSSI, LE COMBAT CONTINUE
tueurs à s’armer, à acquérir
un attirail militaire, des télé-
phones ou des véhicules, mais
sans connaître leur but ul-
time. Croyant à un braquage,
pas à une hécatombe. C’est
dire s’il faudra avoir la pré-
somption d’innocence et l’exi-
gence de preuves chevillées
au corps. ÿ Tant quÊon répond
par le droit à la terreur, on
reste nous-mêmes ! Ÿ déclare
encore Patrick Klugman.
ÿ Ces mecs dans le box ne
nous intéressent pas, assure
de son côté Richard Malka,
avocat du journal mutilé.
Nous voulons insister sur ceux
qui ont laissé monter cette
haine contre „Charlie‰, contre
les Juifs, ceux que jÊappelle les
„complices intellectuels‰, qui
ne nous ont jamais soutenus et
même pire. Ÿ Les survivants
de « Charlie » auront aussi à
cœur de montrer le peu de cas
fait par les autorités de la
bombe incendiaire qui, le
2 novembre 2011, a détruit
leur journal, déjà pour ÿ ven-
ger le Prophète Ÿ. Et sans que
l’équipe du journal soit, par
la suite, vraiment protégée…
A l’époque, Charb déclarait :
ÿ Ce n’est pas la première fois
que nous dessinons Mahomet,
nous le faisons presque toutes
les semaines. Nous voulions réa-
gir à l’annonce de l’instauration
de la charia en Libye et à la vic-
toire du parti islamiste Ennahda,
en Tunisie. » Et Charb est mort.
Un accusé
plus accusé
Des 17 accusés, seuls 14 se-
ront dans le box. L’épouse
d’Amedy Coulibaly, Hayat
Boumeddiene, a fui avant les
crimes et a rejoint Daech, en
Syrie, en compagnie des frères
Belhoucine, autres accusés
manquants. Eux ont été tués.
Nul ne sait si elle est encore
en vie…
sont plus concernés par le
massacre de l’Hyper Cacher
par Amedy Coulibaly que par
celui de « Charlie » par les
Kouachi. Mais il existe plus
d’une connexion. A commen-
cer par les liens entre les
Kouachi et Coulibaly, vieux
copains candidats au djihad,
qui se parlaient, communi-
quaient par des moyens dé-
tournés, se rencontraient en
cachette et ont déclenché, par
SMS, leur horrible « top dé-
part » sur trois jours. ÿ Des ac-
tions soigneusement coordon-
nées Ÿ, notent les juges
d’instruction. Parmi les accu-
sés, tous ou presque se
connaissent et ont connu les
assassins dans leur cité ou en
prison, à Villepinte, où ils bos-
saient ensemble à la buande-
rie. Pouvaient-ils ignorer les
délires et les projets terro-
ristes des tueurs, qui ne re-
chignaient jamais à brandir
leurs idées et leurs vidéos
sanglantes ? Ce sera la
grande question.
L’un d’eux, cependant, Ali
Riza Polat, se démarque : il
est le seul accusé de « compli-
cité d’assassinats terroristes »
et apparaît, selon les juges
d’instruction, ÿ à tous les
stades de la préparation des
actions terroristes Ÿ d’Amedy
Coulibaly. Il lui a aussi fourni
une artillerie impression-
nante, ainsi qu’aux frères
Kouachi. Expertisée, son écri-
ture figure sur une liste re-
trouvée chez un trafiquant. Il
y demande les prix de déto-
nateurs, d’explosifs ou de
chargeurs. Un client vraiment
sérieux, défendu par Isabelle
Coutant-Peyre, par ailleurs
avocate et épouse de Carlos,
le vieux terroriste détenu à
vie. Son client risque la même
peine.
Dominique Simonnot

DÉBUT DU PROCÈS Le chaînon manquant ?

DE “CHARLIE HEBDO”
L UI, c’est Peter Cherif, 38 ans, arrêté à
Djibouti en décembre 2018, extradé et
emprisonné en France. Il est fortement soup-
çonné d’être le cerveau, le mentor des frères
Kouachi et d’avoir commandité l’attentat de
« Charlie », le 7 janvier 2015. C’est à ce titre
qu’il devrait témoigner au procès le 2 sep-
tembre. Sans certitude et en tout cas trop tar-
divement pour y être jugé. Lorsqu’il est ré-
expédié à Paris, après sept années de cavale
au Yémen, les juges d’instruction ont déjà
bouclé leurs investigations et leur ordonnance
de mise en accusation.
Trois fois mis en examen pour ses actions
terroristes au Yémen, dont l’enlèvement, en
2011, de trois membres d’une ONG humani-
taire de Lyon, il l’est aussi depuis juillet 2019
pour « association de malfaiteurs terroriste
criminelle » dans le dossier « Charlie ».
Peter Cherif et les Kouachi, c’est une vieille
histoire, une amitié de jeunesse, consolidée
par la filière dite « des Buttes-Chaumont »,
chargée de recruter des « combattants » pour
le djihad. En 2004, Peter Cherif est en Irak.
Condamné à 15 ans en 2006, il s’évade, en
2007, d’une prison proche de Mossoul, avec
150 prisonniers, grâce à une attaque de re-
belles. Il finit par être coincé en Syrie et ren-
voyé en France. Après dix-sept mois de dé-
tention provisoire, il comparaît, libre et seul,
en 2008, au procès de la filière et détale au
Yémen après avoir entendu le procureur ré-
clamer contre lui 8 ans de prison. Condamné
avant lui, son ami Chérif Kouachi a pris 3 ans.
En 2011, Peter Cherif l’aurait fait venir au
sultanat d’Oman et recruter par Aqpa (Al- Fac-similé de la une du « Canard » du mercredi 14 janvier 2015, le numéro paru la semaine
Qaida dans la péninsule arabique). Sur son de l’immense émoi suscité par le double attentat islamiste contre « Charlie Hebdo »
cas, l’enquête se poursuit. « On est Al-Qaida et le magasin Hyper Cacher à Paris. Un numéro dédié par toute l’équipe du journal
au Yémen ! » avaient lancé les Kouachi, le à notre ami Cabu, qui, cinq ans après, n’a pas fini de nous manquer.
jour de l’attentat de « Charlie »… Le dessin de Lefred-Thouron qui figure en tête de l’article sur le procès est extrait de cette même une.

“Vous irez tous au gnouf !” Les salades du “zéro pesticide”

Tribunal de Paris
DEPUIS trente minutes, on at-
tend les prévenus, et le prési-
dent s’impatiente : ÿ Ça va
durer indéfiniment ? Ÿ Enfin
les voilà ! D’un geste familier,
le président balance sa canne
sur la table, prêt à juger
11 exaltés du PSG mêlés aux
échauffourées de la défaite. Les
deux premiers, jamais condam-
nés, ont ramassé des vêtements
venant d’un magasin pillé.
ÿ Parlez plus fort ! Enlevez vos
masques ! Mais ne vous retour-
nez pas vers les policiers ! Ÿ
L’un est un lycéen, l’autre un
coiffeur aux cheveux joliment
crantés. Le proc réclame un tra-
vail d’intérêt général ÿ sÊils lÊac-
ceptent Ÿ. ÿ Oui ! – Vous nÊavez
pas la parole ! Ÿ les tance le pré-
sident. Les juges chuchotent
une minute. ÿ Quatre mois avec
sursis ! CÊest une épée de Da-
moclès, vous vous tiendrez tran-
quilles pendant cinq ans !
Alors, messieurs, expliquez-moi
ce quÊest un sursis ! – Euh⁄ je
sais pas⁄ – Oh là là ! Je viens
de lÊexpliquer ! Et vous, mon-
sieur ? – CÊest quand on a fait
quelque chose de pas grave ?
– Hein ? Un sursis, ce nÊest pas
grave ? Alors, nous les juges, on
ne va plus en prononcer, et vous
irez tous au gnouf ! Le sursis,
cÊest grave, messieurs ! – Oui,
oui ! – Très bien ! Ÿ
Parfois le président ronchon
houspille aussi son assesseur :
ÿ Vous oubliez de lui dire quÊil
peut garder le silence ! Ÿ ou
ÿ Non, ne dites pas ça ! Ÿ.
Et voilà Killian, 22 ans, ca-
sier : néant. ÿ Alors vous êtes⁄
– Killian⁄ – Taisez-vous ! Ÿ
Contrôlé près des Champs-Ely-
sées avec une chemise encore
emballée. ÿ Ça pousse par terre,
les chemises, monsieur ? – Euh,
non⁄ – Alors pourquoi la pren-
dre ? – CÊétait un énorme ca-
fouillage, 300 personnes cou-
raient dans tous les sens,
certains étaient cagoulés⁄
– Quel rapport ? Vous saviez que
la chemise était volée ? – Oui !
– Donc cÊest un recel de vol⁄ Ÿ
Deux mois avec sursis. Et ainsi
de suite. De très jeunes gens
au casier vierge. Des sursis et
une relaxe.
Mais pas pour Marvin,
22 ans. Il aurait, ÿ en récidive,
lancé des projectiles Ÿ sur les
policiers, et il avait dans son
sac ÿ des pétards⁄ euh⁄ Gros
Bisou Ÿ, lit le président, incré-
dule. ÿ Gros Bison ! rectifie
Marvin. – CÊest quoi, ça, mon-
sieur ? – Des explosifs, semble-
t-il, mais je croyais que cÊétaient
des fumigènes et je me trouvais
près des ultras⁄ – CÊest quoi,
ça, monsieur ? – Les extrémistes
du PSG. – Ah, des pacifistes !
– Les CRS ont chargé, je me
suis réveillé dans le camion de
police ! – Les policiers ont dû
vous faire un balayage pour
vous arrêter ! – Impossible, jÊai
une rupture du ligament, je
peux pas courir⁄ – Les poli-
ciers mentiraient, monsieur ?
– Regardez les caméras ! – Non
et non ! La parole des policiers
fait foi, et on nÊa pas à avoir des
caméras partout ! Ÿ Quatre
mois ferme et révocation d’un
sursis de 4 mois.
Et le président s’attaque au
dernier dossier : ÿ Renvoyé car
arrivé après 17 heures ! Ÿ
D. S.
ON LE SAIT, en France, environ
44 % de nos légumes et fruits
contiennent des résidus de pesti-
cides. Normal : nous sommes les
premiers utilisateurs de pesticides
en Europe. Pas terrible pour l’eau,
la faune aquatique, les riverains
des champs aspergés et les pay-
sans, qui sont les premiers à en
prendre plein les poumons. Pour
toutes ces raisons écolos, et surtout
parce qu’il est convaincu que c’est
meilleur pour sa santé, le consom-
mateur est prêt à payer plus cher
pour des fruits et légumes non chi-
miqués – comptez, en moyenne,
34 euros pour un panier de lé-
gumes bio, contre moins de
20 euros en conventionnel.
Même si, à ce jour, aucune
étude scientifique n’a démontré
que manger bio était l’antidote
contre le cancer, l’engouement ne
tarit pas. Le marché bio pèse dé-
sormais 9,7 milliards d’euros de
chiffre d’affaires en France et ne
cesse de grossir, avec une crois-
sance à deux chiffres. Au point
que les agriculteurs n’arrivent pas
à satisfaire la demande. Avec
8,5 % à peine de surfaces agri-
coles utiles cultivées en bio, on
importe 30 % de ce qu’on met
dans notre panier bio. Du coup,
le gouvernement a lancé le pro-
gramme « Ambition bio 2022 »,
pour atteindre 15 % de surfaces
agricoles utiles. L’occasion de rap-
peler que les brocolis et autres
mandarines estampillées « AB »
peuvent en toute légalité contenir
des résidus de pesticides. D’après
les derniers contrôles de la
DGCCRF, 6,5 % des fruits et lé-
gumes bio recèlent des traces chi-
miques. Rien d’étonnant puisqu’un
paysan adepte de l’agriculture
biologique a une obligation de
moyens mais pas de résultat. En
clair, il a l’interdiction de pesticider
ses champs, mais il n’est pas res-
ponsable d’une contamination
causée par les épandages de son
voisin, pendant le transport ou
lors du stockage.
Pour se mettre dans la poche
ceux qui n’ont pas l’oseille pour
acheter du bio, plusieurs grosses
coopératives maraîchères ont eu
la juteuse idée de créer des labels
« sans pesticides ». Une promesse
ambiguë à souhait : l’agriculteur
a le droit de pesticider, à condi-
tion que ses pulvérisations ne lais-
sent pas de traces quantifiables
dans l’assiette. Sans compter un
petit pépin, révélé par « Que choi-
sir » (septembre) : les contrôles
ciblés réalisés en 2018 par la Ré-
pression des fraudes montrent
qu’un tiers des produits étiquetés
« sans pesticides » ou « zéro ré-
sidu » analysés contiennent des
traces de substances chimiques.
Les consommateurs dupés vont-
ils en faire une salade ?
Les écolos ? Des rigolos !
LS SONT NULS. Des
I zozos, des rigolos. Des ir-
responsables. Des fous
furieux. Des extrémistes. Les
écolos en ont pris pour leur
grade, cet été. Il ne sera pas
dit qu’ils emportent impuné-
ment plusieurs grandes villes
et s’imaginent bousculer la
vie politique. Qu’ils soient
élus, militants associatifs, ac-
tivistes, encartés chez Les
Verts, intellos, ministre, cher-
cheurs, pas de détail : tous
dans le collimateur ! Pas seu-
lement macronien…
Pourquoi a-t-on alors
pensé à Albert O. Hirsch-
man (1) ? Dans les années 80,
ce sociologue américain voit
triompher Reagan et ses
idées réactionnaires. Il se met
alors à étudier en profondeur
comment le héraut du
(néo)conservatisme et ses
prédécesseurs ne cessent, de-
puis deux siècles, de combat-
tre toute idée d’avancées so-
ciale et politique. Il découvre
qu’ils invoquent invariable-
ment trois arguments-types.
Le plus utilisé, celui de l’ef-
fet pervers : vous tentez de
modifier l’ordre existant ?
Mon pauvre ami, vous allez
obtenir des effets à l’exact op-
posé du but recherché !
Deuxième argument, l’ina-
nité : les mesures que vous
proposez sont dérisoires et
ne changeront rien à rien. Le
troisième évoque une grave
« mise en péril » : avec votre
réforme, vous allez porter at-
teinte à de précieux acquis,
obtenus à grand-peine.
C’est ainsi qu’ont été tour
à tour combattus la démocra-
tie (qui fait le lit de la tyran-
nie), le suffrage universel (qui
mène à la démagogie), la pro-
tection sociale (qui mène à la
boisson et à l’oisiveté), etc.
Cet été, on a vu réapparaître
ces mêmes arguments pour
contrer les écolos. Envisa-
gent-ils d’interdire les ban-
deroles publicitaires que pro-
mènent des avions au-dessus
des plages ? Erreur ! A la
place, les commerçants vont
imprimer des milliers de
flyers, ÿ ce qui aura un coût
écologique bien plus élevé Ÿ
(effet pervers). Veulent-ils in-
tensifier la lutte contre le ré-
chauffement ? Ridicule ! La
France n’émet que 1 % du
gaz carbonique mondial ; que
la Chine et les Etats-Unis s’y
mettent d’abord, et, là, ça
aura de l’effet (inanité) !
Faut-il interdire la chasse à
la glu ? Il ne reste qu’ÿ une
poignée de gens qui font ça,
en Provence-Alpes-Côte
dÊAzur. En quoi ça dérange
lÊEurope et notre ministre ? Ÿ
(inanité). Faut-il revoir et cor-
riger le tourisme de masse et
ses multiples nuisances ?
Non, car il est issu des congés
payés, qui résultent d’une
conquête démocratique : les
remettre en question serait
donc ÿ liberticide Ÿ (mise en
péril). Et mille exemples du
même tonneau.
En résumé : continuons
comme avant. Mais mieux
qu’avant ! Grâce à ce nouvel
argument-type : on ne com-
battra le réchauffement et
les nuisances diverses que
par l’innovation. L’in-no-va-
tion ! The innovation ! Autre-
ment dit, le progrès tech-
nique. Lui seul est capable
de corriger les effets qu’il a
engendrés. Pour résoudre un
problème, en effet, personne
n’est mieux placé que celui
qui l’a créé. Pure logique,
non ? Seuls les obscurantistes
écolos oseront avancer le
contraire !
Jean-Luc Porquet
(1) « Deux siècles de rhétorique
réactionnaire », Fayard, 1991,
300 p., 26 €.

« Le Canard enchaîné » – mercredi 2 septembre 2020 – 5

 Antigone Bel oiseau tombé du Nil
(Hémon et merveille) “La Société des belles personnes”, de Tobie Nathan :
entre Le Caire et Paris, une belle leçon de survie.
O
N NE S’EN PREND PAS à la famille
d’Antigone. Et pas touche à ses frères.
OHAR ZOHAR a tout Refugié à Paris, Zohar

Z
La petite sœur est prête à tout pour
ces mauvais garçons de pacotille, ces dealeurs pour plaire. D’abord son constitue avec Aaron, Lucien
de n’importe quoi. Et rien ne pourra l’arrêter. nom, qui signifie en hé- et l’incandescente Paulette,
Ni les adultes, ni la police, ni la justice, ni la breu « splendeur des splen- dont ils partagent les charmes,
prison. Elle, si pure, si juste, tellement étran- deurs ». Séduisant, en effet, en- un groupe uni par le nécessaire
gère au mal, pourrait sacrifier sa vie par treprenant, « quintessence des châtiment. La presse évoque
amour pour eux. Juifs du Caire Ÿ, il doit fuir. En la traque d’Alois Brunner, de
Antigone est ici une Kabyle arrivée au Qué- cette année 1952, l’heure est à Martin Bormann, de Josef
bec à 3 ans, avec sa grand-mère, sa sœur et la haine des Juifs. La « rue Mengele. Pourquoi pas Dieter
ses frères. Ses parents ont été assassinés arabe », comme on dit au- Boehm ? Pour les anciens bour-
pendant la guerre civile en Algérie. Les voilà jourd’hui, crie sa détestation, reaux, deux balles dans la tête :
exilés chez « ces Blancs » au drôle d’accent. certains intellectuels égyptiens une pour la vengeance, une
Cité, couscous, tradition et intégration. trouvent du charme à la lec- pour la signature. Le temps
Un jour, Etéocle, l’aîné de la famille, est ture de « Mein Kampf » et les file, Zohar meurt sans avoir
tué par un policier. Tué pour rien. Tiré comme Frères musulmans mettent de perdu ÿ un seul fragment de
à la foire, alors qu’il jouait sur le trottoir l’huile sur le feu. Mais, pour son âme Ÿ, son fils François
avec d’autres lascars. Polynice, le cadet, se Dieter Boehm, la vie est belle. veut connaître le secret de
rue sur le flic. Rébellion ? Il est emprisonné. Comme des centaines de nazis cette puissance, « splendeur des
Eurydice pleure cette injustice. Sa sœur, An- en cavale, il « conseille », sous ne comprennent plus : ÿ Nous paraître sous ses yeux ». Adieu, splendeurs »… Au Caire, il re-
tigone, la combat. Elle n’a pas d’autre choix. le nom de Sami Ibrahim, les avons jadis échappé au pha- l’univers chaleureux, sensuel, trouve les gens de Bab el-Zou-
Sophocle avait forgé ces caractères au feu fièvre sauvage d’Antigone. Thèbes s’appelle services de renseignement raon et voilà que nous allons vibrant de cette vie juive de weila, une confrérie dont le
et Jean Anouilh les avait rajeunis, avant que Montréal. Le Chœur d’hier est devenu ré- égyptiens. Lui et les musul- tous périr [en Egypte] au- Haret el-Yahoud, que Tobie vrai nom est « la Société des
Sophie Deraspe les empoigne à son tour. Et seaux sociaux. Et c’est la piastre qui a cours mans humiliés par leur défaite jourdÊhui (…). Les Frères mu- Nathan a déjà évoquée avec belles personnes ». Laquelle
revoilà l’histoire de « la petite maigre qui dans la cité. de 1948 face à Israël ont un sulmans nous accusent dÊêtre brio et tendresse dans un produit de beaux chants et de
est assise là-bas », qui se bat contre tous, Une ode à la résistance d’une terrible programme commun : rayer les des païens et les militaires dÊêtre roman précédent (« Ce pays belles maximes. Par exemple :
se hurle coupable et se moque bien de mourir. beauté. Juifs de la surface de la terre. des attardés. Ÿ Farouk, ce ÿ roi qui te ressemble »). Dans ces « Toutes les paroles des vivants
L’actrice Nahéma Ricci – prodigieuse – a la Sorj Chalandon Et, avec le grand mufti de Jé- de timbre-poste Ÿ qui partage ruelles, on retrouve avec plai- ont déjà été prononcées par
rusalem, Ibrahim se sent en son temps entre ses voitures sir Kudiya, la ÿ maîtresse des quelquÊun qui aujourdÊhui est
communion : le chef religieux de sport et ses maîtresses, est esprits Ÿ, entourée de sa confré- mort. Ÿ Et cette autre, qui ex-
poissons ont cessé de se repro- tourneur réalise une comédie avait été accueilli à bras ou- dans la main des Anglais, qui rie de Bab el-Zouweila, vraie prime le cœur de ce roman en
duire. Et Daniel le biologiste au démarrage loufoque, sous verts à Berlin, en 1941, corna- gèrent les affaires importantes force populaire, alliée ÿ des effet splendide : ÿ Fais en sorte
– impeccable Gustave Ker- l’impulsion du pétulant et in- qué par Himmler. En route de l’Etat. En quelques heures, diables et des démons Ÿ, qui sa- que, au moment de ta mort,
Les films qu’on peut voir vern – échoue même à faire tarissable Jonathan Cohen pour la Solution finale au un lieutenant de 24 ans nommé vent inverser le destin au son tout le monde soit dans les
cette semaine s’accoupler les deux derniers face à une placide Marina Proche-Orient ? Gamal Abdel Nasser cueille le des bendirs (tambours), de pleurs et toi dans la joie. Ÿ A
spécimens dans son labora- Foïs. L’étrangeté des person- Dans leur quartier de Haret pouvoir, à la tête des « officiers l’antique flûte à six trous et de vos youyous !
Police toire marin. Ce garçon rêve nages grossit dangereuse- el-Yahoud, les Juifs, qui habi- libres » et de leurs régiments. la tanbura (petite lyre). Mais Frédéric Pagès
Adapté d’un roman d’Hugo d’être père, mais les femmes ment, puis, coupant court à taient ce pays ÿ bien avant lÊar- Expulsé, Zohar Zohar voit de l’eau va couler dans la clep-
Boris, ce film d’Anne Fontaine sont rares dans la région. ces bizarreries désopilantes, rivée du premier musulman Ÿ, « le monde, le vrai monde dis- sydre… . Stock, 432 p., 32 €.
est le portrait amoureux de Alors il se désole. Un jour, le film tourne au quasi-docu-
trois grands blessés. Trois émerveillé, il recueille sur la mentaire sur l’accouchement,
RENTRÉE SOUS TENSION À LA CANTINE
simples flics. Virginie (Efira),
qui cache un secret dans son
ventre. Aristide (Omar Sy), fu-
plage un axolotl, une salaman-
dre mexicaine, aussi perdu
que lui. Et il lève enfin les
encadré par de vrais person-
nels soignants. Emouvant,
certes, mais le scénario semble
Maya et l’Himalaya
nambule rongé par l’angoisse. yeux sur Lucie, la livreuse abî- fini au forceps ! – D. J. Rassemblez-vous composés de petits boulots
Erik (Grégory Gadebois), mée de la station-service, qui
Petit Pays
en mon nom comme serveuse ou cuisi-
raide et gris comme sa lui servait son café du matin. de Maya Angelou nière, succèdent vite les dé-
chienne de vie. Les trois sont Cette fable marine d’Olivier Mère rwandaise, père fran- sillusions du quotidien et des
tourmentés par leurs démons. Babinet est drôle, absurde çais, Gabriel grandit, heureux, N MATIÈRE de prédis- discriminations. Qu’importe,
Et aussi par le sort de Tohirov,
un Tadjik qui a fui la persé-
et délicate. Elle se joue de
l’idée de fécondation pour don-
au Burundi, au milieu de ses
copains, notamment quatre
E position à la mouise so-
ciale, Maya Angelou, née à la
son obsession ne la quitte
pas : montrer ÿ au monde en-
cution et qu’ils sont chargés ner naissance à une histoire inséparables qui accompa- fin des années 20 dans le Mis- tier (...) quÊ[elle était] égale à
de mettre dans l’avion. d’amour. – S. Ch. gnent ses petits larcins (vols souri, cochait toutes les cases : [s]on orgueil et supérieure à
L’homme est promis à la mort de mangues) et ses jeux d’en- femme, noire, issue d’une fa- [s]es ambitions Ÿ. C’est ainsi
dans son pays. ÿ On le laisse Enorme fant. mille disloquée, fille mère à qu’elle s’accroche à la pra-
partir ? Ÿ interroge soudain Claire fait du piano et Fré- On est en 1993, et l’orage 17 ans… La trajectoire qui la tique de la danse et à ces
Virginie. Dans le fourgon de déric, tout le reste. Imprésario, s’annonce. Ses parents envi- vit s’imposer comme une per- livres qui, dira-t-elle, l’ont
police, le huis clos est dévas- traducteur, intendant, homme sagent de se séparer. Surtout, sonnalité majeure de la lutte ÿ sortie de la fange Ÿ. L’amour
tateur. Et absolument magni- au foyer, ce mari se soumet les exactions – réitérées à pour les droits civiques des la fuit ? Tant pis, il y a
fique. – S. Ch. jusqu’au sacrifice mais décide grande échelle depuis cin- Afro-Américains, puis de la Dostoïevski.
en fait d’à peu près tout dans quante ans – des Hutus, ma- scène littéraire américaine, L’écriture de Maya Ange-
Poissonsexe le couple. Jusqu’à faire un joritaires, sur les Tutsis re- n’en est que plus remar- lou est limpide et volcanique,
La dernière baleine au enfant dans le dos de sa prennent dans les deux pays. quable. Deuxième tome des emplie d’une passion parfois
monde s’appelle Miranda. femme… Le président burundais Mémoires de celle qui s’est naïve mais toujours tou-
Dans une mer devenue Dans un format carré – un est tué lors d’un coup d’Etat. éteinte en 2014, « Rassem- chante. Elle a beau se heur-
bouillon d’œstrogènes, les peu frustrant –, Sophie Le- Le génocide commence au blez-vous en mon nom », ré- ter au racisme et à cette
Rwanda. Gabriel est mêlé cit de l’exil urbain de sa jeu- prostitution qu’elle expéri-
malgré lui aux violences, nesse, permet de saisir mente par amour pour un
DEPARDIEU CONTRÔLÉ EN ÉTAT DʼIVRESSE À PARIS jusqu’à l’irréparable. l’ampleur de ces montagnes mec se révélant mac, elle re-
Cette bonne adaptation du abattues. fuse de prendre l’amer et de
roman de Gaël Faye se garde ÿ JÊavais dix-sept ans, baisser les bras. ÿ JÊétais
d’innover et laisse parler les
faits. Victime directe ou non,
chacun sort de cet enfer mu-
jÊétais terriblement vieille, af-
freusement jeune, nantie dÊun
bébé de deux mois Ÿ, écrit-elle
jeune et aussi folle quÊun lé-
zard vagabond Ÿ, s’amuse-t-
elle en tirant cette leçon in-
Darwin envers
tilé à jamais. – J.-F. J. dans ce texte publié en 1974
(ici réédité dans la belle tra-
duction de Christine Besse),
temporelle : ÿ CÊest ainsi que
les humbles deviennent puis-
sants. Ÿ
et contre tous
posant les bases d’une dualité Emilien Bernard L’Evolution côtoyé au Muséum des cher-
omniprésente – un monde au Muséum, cheurs qui ont connu le grand
Les films qu’on peut voir hostile que bat en brèche sa . Noir sur Blanc, 272 p., 18 €. Albert Gaudry Cuvier, l’homme qui a fondé
ou revoir flamme existentielle. Aux Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Pascal Tassy la paléontologie et dont l’em-
premiers horizons apaisés, par Christine Besse. preinte reste omniprésente.
La Jeune Fille OUR NOUS, Albert Gau- Tous s’alignent sur les convic-
à l’écho
Dans la lumière d’un der-
P dry n’est qu’un buste :
celui qui fait face au diplodo-
tions fixistes et catastro-
phistes de ce dernier. Les es-
nier jour d’été, la toute jeune “DAMAGE CONTROL” LABORIEUX À “VALEURS ACTUELLES” cus dans la fameuse Galerie pèces ne changent pas. Elles
Vika danse dans les vagues, de paléontologie du Muséum restent immuables dans le
se baigne nue, fraternise avec d’histoire naturelle de Paris. temps. Si l’on découvre des
les rochers et initie un garçon Pour le paléontologue Pascal fossiles qui semblent indiquer
de son âge à l’art de créer et Tassy, cet homme est un l’existence de variantes, c’est
d’écouter l’écho… héros : le premier en France qu’elles sont apparues après
Ce film de 1964 est un char- à avoir défendu Darwin, le- de grandes catastrophes. On
mant conte d’été en noir et quel faisait alors l’unanimité regarde d’un sale œil les
blanc. Afin d’éviter la censure contre lui. « transformistes », ainsi que
soviétique (qui commença tout Lorsqu’en 1863 Gaudry lit l’on désigne alors les adeptes
de même par interdire le film), « L’Origine des espèces », paru d’une évolution des espèces
le cinéaste lituanien Arunas en 1859 en Angleterre, il est qui suppose des mutations
Zebriunas avait pris le parti âgé de 36 ans. A la fois zoolo- successives (tels Lamarck et
1463 de tourner avec des enfants, giste et géologue, il a rédigé Geoffroy Saint-Hilaire).
en l’occurrence sous le soleil une thèse sur les étoiles de Après sa lecture de Darwin,
de la Crimée. Il dessine ici un mer et une autre sur les silex, le ÿ révolutionnaire acadé-
1 2 3 4 5 6 7 8 9 d’émission. Mesure bar- personnage de fillette libre et bourlingué au Proche-Orient, mique Ÿ qu’est Gaudry, bien
rière. – VIII. Fera la fête à mutine, une sorte d’esprit de longuement exploré le gise- que resté bon chrétien, n’aura
I bacilles. – IX. Chaud froid la mer ou de nymphe Echo. ment paléontologique de Pi- de cesse d’ÿ essayer de
II lait hardi. Sa question : Un personnage de petite dan- kermi, près d’Athènes. Et a convaincre de la réalité de
D’où Jésus ? – X. Seraient seuse qu’il reprendra dans lÊévolution par lÊenseignement,
III moites, moches et mes- « La Belle » (1969), que l’ex- la vulgarisation et la muséo-
séants. – XI. Moi, ce que cellent distributeur ED pro- logie Ÿ.
IV j’en dis ! pose en DVD après l’avoir Cours, articles, livres, confé-
V VERTICALEMENT
sorti en salles. – D. F. rences et, pour couronner le
1. La preste à sensation***.
Little Louis 11 ans, une connerie l’envoie ni intrigue. Seule chose cer- tout, cette Galerie de paléon-
VI de Claire Julliard dans une prison pour enfants, taine : nous sommes à Londres tologie de 75 mètres de lon-
– 2. On y vient, sent vents et, pour une fois, les barreaux en 1664-1665. Et, la peste, qui gueur qui nous fait encore
VII gogues. Au service mit AU DÉPART, ça semble une se révèlent bénéfiques ; il y de- fit 100 000 morts, Defoe ne l’a rêver aujourd’hui. Il l’a conçue
VIII Luther. – 3. Ballot centre. Les films qu’on peut voir drôle d’idée, ce récit de l’enfant vient le clairon de la fanfare. pas inventée. de manière à ce que, inscri-
Cassent cultes. – 4. Et à la rigueur Louis Armstrong écrit à la pre- Sa fierté, sa passion ne le quit- Il s’y comporte à la fois en vant dans l’espace l’évolution
IX vogue la galère. Le soleil mière personne. Mais l’auteure teront jamais, pas plus que sa journaliste-historien, qui cite du vivant au cours des temps
lui. – 5. Qu’on sert tôt. Là, Ema explique s’être plongée dans stupéfiante joie de vivre. archives et documents, et en géologiques, elle ne satisfasse
X Elle danse le jour et brûle les entretiens, les souvenirs de Impossible, tout au long du notable à la fois compatissant pas seulement les natura-
Anne a base. – 6. Ils nous
XI font couette couette. Où les rues au lance-flammes la l’immense musicien, et dans livre, de ne pas s’enflammer et cynique. Il peut ainsi écrire listes, ÿ mais aussi les artistes
l’Etrusque s’muche. nuit… Elle a adopté un enfant ceux de ses amis les plus ni d’entendre que résonne son que ÿ les bourgeois de la ville et les philosophes Ÿ.
HORIZONTALEMENT – 7. Car y a titres. Vous êtes bien colombien mais se ronge de proches. C’est ainsi qu’elle a « Wonderful World ». nÊavaient constitué aucune ré- Fidèle à sa manière (écri-
I. Tu l’as dit bouffie*. – II. Je m’oc- aimables. – 8. Passa en glandes l’avoir ensuite abandonné, reconstruit la voix claire et D. S. serve, aucun magasin de blé ture vive, passion à fleur de
cupe de toux. Passa au lit coude**. pompes. Souhaitant bon vent. – 9.
avec son mari chorégraphe qui joyeuse de « Little Louis », ou de farine pour les pauvres Ÿ peau, extrême rigueur, minu-
le lui reproche sans cesse et chantonnant son histoire. . Le Mot et le Reste, 237 p., 20 €. et, quelques pages plus loin, tie maniaque), Pascal Tassy
– III. J’ai toujours show dans le do. C’est quand même pas sourcier (en
dont elle conteste l’autorité Une enfance dure, misé- qu’en trois mois ÿ [la peste] nous emmène sur des che-
Masque à gaze. – IV. Des sous-pape deux mots). sur la troupe. Tandis qu’ils vi- reuse, émaillée de morts et Journal de l’année emporta 30 ou 40 000 de ces mins parfois ardus (on jongle
qui veulent qu’la paix. – V. Mettre ADN vent des amours parallèles… d’abandons, mais un gamin malheureux, qui, sÊils avaient entre ÿ hiérarchie taxino-
en boule. Mi-taon. – VI. Privé de
de la peste
Définitions transmises par * Paul Sur un scénario qui part merveilleux, à qui sa grand- de Daniel Defoe vécu, auraient certainement mique Ÿ et ÿ révolution cladis-
sortie avec des cons. Le 15 de Brévier, ** Daniel Vernet et *** Ro- franchement en tous sens, le mère adorée apprend à ÿ bien constitué un fardeau insuppor- tique Ÿ), mais il fallait bien
France. – VII. Suivit un ordre bert Costantino. cinéaste chilien Pablo Larrain se tenir Ÿ, qui se met au boulot IL A DÉJÀ ÉCRIT « Robin- table par leur pauvreté Ÿ. Un cela pour nous persuader,
entreprend de faire le portrait à 5 ans et chante déjà avec les son Crusoé » quand il rédige, fléau bienvenu au moins pour avec Gaudry, que ÿ tous les
SOLUTION DU PROBLÈME No 1462 d’une femme de la nouvelle copains. Un gamin qui, dans en 1722, ce journal, que son ce charlatan londonien, qui êtres, si puissants quÊils
HORIZONTALEMENT VERTICALEMENT
génération, qui se révolte son quartier puant et dévasté traducteur, Joseph Aynard, proclamait : ÿ Je donne mes soient, ont été éphémères : la
contre le patriarcat et n’a cure de La Nouvelle-Orléans, au qualifait de ÿ roman Ÿ lors de avis pour rien. Ÿ En précisant loi du changement est la
I. TEMPERANT. – II. ALAIRE. AU. 1. TACHYCARDIE. – 2. ELU. des tabous sexuels. Ce film sti- début du siècle dernier, ignore sa parution française, en 1943. au client appâté : ÿ Mais pas grande loi qui domine le
– III. CUSTOMISE. – IV. QAT. NAT. ERREURS. – 3. MASQUE. FRIC. mulant mais échevelé ne tient tout de la ségrégation jusqu’à Dans cet objet littéraire hors mes médecines. Ÿ monde Ÿ.
– V. YEU. ISOLE. – VI. CRESSON. – 4. PITA. STRESA. – 5. EROTISEE. que par le charisme de la dan- ce qu’il monte dans un tram normes, véritable ÿ pudding F. P. Jean-Luc Porquet
– VII. AR. TENDRE. – VIII. REFRE- EG. – 6. REM. SONNERA. seuse Mariana Di Girolamo, et comprenne, furieux, que la littéraire Ÿ, selon les termes de . Le Chat rouge, 320 p., 22 €.
NAI. – IX. DURE. ETAI. – X. IRISE- – 7. INONDATES. – 8. NASAL. en héroïne obsédante et im- loi fixe sa place à l’arrière, avec Gérald Duchemin dans sa pré- Traduit de l’anglais (Grande- . Editions Matériologiques,
RENT. – XI. ESCAGASSE. RIANS. – 9. TUE-TETE. ITE. prévisible. – D. F. les « gens de couleur ». A face, on ne trouve ni chapitres Bretagne) par Joseph Aynard. 254 p., 23 €.

6 – « Le Canard enchaîné » – mercredi 2 septembre 2020


. À « L’EXPRESS », la rédaction,
décimée par un plan de départs
et une palanquée de clauses de
cession, s’apprête à découvrir
ses nouveaux locaux, eux aussi
réduits comme une peau de cha-
grin. Terminé, les bureaux indi-
viduels, les journalistes de
l’hebdo sont désormais priés de
se contenter d’un « flex office »
(sic) dans un centre d’affaires
du VIIIe arrondissement de Paris.
Un lieu à occuper idéalement
deux jours par semaine, histoire
de libérer régulièrement les bu-
reaux pour les autres. Les
confrères ont reçu un livret sous
forme de mode d’emploi qui
précise : « Avant que le salarié
se positionne sur un poste de
travail, il sera invité à nettoyer
la surface dégagée à l’aide de
lingettes désinfectantes. »
C’est simple comme les WC.
. CYRIL HANOUNA, qui va aug-
menter son temps d’antenne sur
C8 (groupe Bolloré) et s’entourer
de nouveaux chroniqueurs de
choix pour « Balance ton post ! »,
comme l’extrême-droitier direc-
teur de « Valeurs actuelles »,
Geoffroy Lejeune, nous rassure
au sujet de la qualité des pro-
grammes qu’il proposera encore
cette année (« Le Parisien »,
31/8) : « Mon rôle principal est
de divertir, et c’est ce que je vais
faire à 90 %, mais je vais aussi
essayer de faire avancer les
choses. Je ne comprends pas
qu’il n’y ait pas eu un secrétariat
d’Etat à la Cause animale. »
Avec Hanouna, on va non seu-
lement avancer, mais aussi se
taper des après-midi de chien !
. L’EXISTENCE de la chaîne
L’Equipe vient de nous être rap-
pelée par son exploit du
28 août. Au bas de l’écran, un
bandeau défilant a annoncé le
décès de Nanard Tapie, lequel
a répondu dans son journal « La
Provence » : « Je ne suis pas au
mieux, mais ils semblent pres-
sés. Il faudra encore attendre.»
La télé du groupe Amaury a vite
présenté ses excuses sur Twit-
ter, avant d’ajouter : « La chaîne
L’Equipe soutient plus que ja-
mais Bernard Tapie dans sa
lutte contre la maladie. »
On a connu des soutiens plus
ardents !
. RECONDUITE à la tête de
France Télés, Delphine Ernotte
a un nouveau projet, le « jour-
nalisme de solutions » (le
« JDD », 30/8) : « Il ne s’agit
pas d’un journalisme de
“bonnes nouvelles” mais d’un
journalisme qui donne des clés
de compréhension, qui dénonce
ce qui ne va pas, explique pour-
quoi et propose des solutions. »
Exemple : Ernotte n’a pas fait
d’étincelles lors de son premier
mandat ; la solution aurait peut-
être été qu’elle n’en fasse pas
un second.
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o
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LES NOUVEAUX PROTOCOLES DES PODIUMS
Maladie d’amour
L
ORSQUE le très timide
ami de Jordan lui a de-
mandé de lui dégoter
une fille pour l’accompagner
au bal du lycée, en Alabama,
Jordan ne l’a pas fait. Il n’a
pas cherché de cavalière pour
son copain. Parce qu’il était ja-
loux, et secrètement amoureux
du garçon.
Peu de temps après, il a
avoué à ses parents, des bap-
tistes profondément religieux,
qu’il se pensait gay. Alors son
père a répondu : ÿ On te
connaît mieux que tu ne te
connais. Tu nÊes pas gay. On
va réparer ça. Ÿ Jordan avait
13 ans.
Mauvais pasteurs
ÿ Réparer ça Ÿ, c’est aussi ce
que les parents de Mathew,
des Juifs new-yorkais non pra-
tiquants, ont essayé de bricoler
avec leur fils de 16 ans.
Comme Jordan, Mathew a été
traîné devant un spécialiste
des ÿ enfants à problèmes Ÿ
pour recevoir une « thérapie
de conversion ». Et devenir hé-
térosexuel, de gré ou de force.
Le psy a expliqué à Jordan
qu’on devenait homo après
avoir été abusé par un homme
dans son enfance. Qu’un trau-
matisme était toujours le socle
de la ÿ pensée homosexuelle Ÿ.
En présence de ses parents, le
praticien a demandé à Jor-
dan : ÿ Votre père vous a
violé ? Ÿ Le jeune homme était
stupéfait. Le père, sidéré.
ÿ Non, absolument pas. Ÿ Et
l’autre, dubitatif, de reposer
la même question.
Mathew, lui, a été déclaré
trop proche de sa mère par un
thérapeute. Qui lui a annoncé
qu’il était gay parce que seul
garçon de la famille. Traite-
ment ? Ne plus adresser la pa-
role à sa mère et à ses sœurs
pendant trois ans, prendre du
Viagra et coucher avec des
filles. Et Mathew a sombré
dans la dépression.
Aux Etats-Unis, raconte
cette enquête de Caroline Be-
narrosh, près de 700 000 per-
Le corona est haïssable
Sur le site de « La Dépêche
du Midi » (27/8) :
ÿ Les Tarn-et-Garonnais
sont de plus en plus nombreux
à se faire détester au Covid-
19. Ÿ
Se faire tester tout en res-
tant quator-zen, telle est la
solution !
Trouver l’immo
pour le dire
Ce titre de l’édito du
« Guide Immo 2020 » édité
par « Le Particulier » :
ÿ Anus horribilis Ÿ.
CONFINÉS TOUT PRÊTS
Tour 2020 : moins de sots dopés, de
miteux, de topettes erratiques, de
fioles, de thunes, de poussettes qui
font mal aux reins* et plus de cols
qu’aiment au fond les coureurs trimant
avec peu de foules. Quiconque fait des
piges à chaque étape trouve des kinés
confus et plein de salive dans les do-
pants, là où se nichent les pelotons.
.
LECTEURS : ÿ Castex a sonné des
Berrichons. Ÿ – ÿ Covid autour des
Pouilles. Ÿ – ÿ Le camp des chasseurs
privé de glu et de rentes de glu. Ÿ –
ÿ Cette brune aime le porto. Ÿ – ÿ Pani-
quer peut être fort beau. Ÿ – ÿ Un ami
de Céline compte sur Dieu. Ÿ – ÿ Trou-
peaux lâchés et kits bloqués. On déplore
des fêtards ! Ÿ
. manes !
LU : ÿ Quand certains flics enquê-
tent, cÊest en bullant. Ÿ – ÿ Coups à Bé-
ziers. Ÿ – ÿ Les pantins de lÊAcadémie. Ÿ
– ÿ Cet anar élimé lance des blattes aux
riches. Ÿ – ÿ Nos soldats ont été pris à
Anvers, quelle reculade ! Ÿ – Un chas-
seur à courre bien taillé cherchant des
bêtes abritées tique : ÿ Votre verrière
sent le daim. Ÿ
* Permutation circulaire de consonnes.
sonnes LGBTQ – dont
350 000 mineurs – ont subi, à
la demande de leur famille, un
« traitement de réorientation
sexuelle ». Jetés en pâture
à des psychologues, à des thé-
rapeutes ou à des religieux
professant que, comme l’alcoo-
lisme ou la drogue, l’homo-
sexualité était une maladie
mentale. Et qu’il fallait la
soigner.
Ces « homothérapies », pré-
sentées par des congrégations
religieuses et certains méde-
cins complices comme ÿ un
combat spirituel contre les
forces obscures de Satan Ÿ, se
font même parfois violentes.
Si des personnages comme
Janet Boynes, ÿ lesbienne
repentie Ÿ passée de la cocaïne
à la ÿ grâce de Dieu Ÿ, avant
de devenir la grande prêtresse
de la « conversion » des homo-
sexuels, se contentent de
prôner la prière et la lecture
de la Bible, d’autres maltrai-
tent les jeunes pour qu’ils se
« repentent ».
A 13 ans, Lucas Greenfield
a été placé dans un « camp de
conversion » en Alabama. Une
pension pour mineurs gays
où les enfants étaient frappés,
isolés, affamés, abusés par
des pasteurs car ÿ être violé
par un homme ôte lÊenvie
dÊêtre gay Ÿ. Avant que ces
criminels soient arrêtés et
emprisonnés.
Mais d’autres camps de « re-
dressement moral » existent
toujours dans de nombreux
Etats, protégés par les intérêts
conservateurs et la morale re-
ligieuse. Bien évidemment, ces
« thérapies réparatrices » n’ont
jamais eu aucun effet, mais
elles ont poussé de nombreux
jeunes à vivre dans la honte
et le mensonge. A l’inverse,
Jordan et Lucas sont restés
tranquillement ceux qu’ils
étaient. Et Mathew parcourt
le pays pour défendre son
choix et sa fierté.
Sorj Chalandon
. « Tu deviendras hétéro, mon
fils », dans « Le Monde en face », le
8/9 à 20 h 50 sur France 5.
Cet annus (« année », en
latin) dénote une obsession du
fondement, pardon, des fonda-
tions, qui est un symptôme de
la fièvre immobilière !
La p’tite bête
qui démonte
Dans « Ouest France »
(11/8) :
ÿ (…) Les tics, qui nous in-
festent de la salle (sic) maladie
de Lyme. Ÿ
Ces tiques rendent nerveux !
Conseil
buissonnier
Dans « Le Courrier du pays
de Retz » (28/8) :
ÿ Il a écrit au maire pour lui
dire quÊil démissionnait et quÊil
laissait sa plage à un autre
colistier. Ÿ
En cédant ainsi sa place, cet
élu s’est fait porter municipâle
pour la mer de toutes les
batailles ?
Détecté dans « La Pro-
vence » (11/8), après un in-
cendie de forêt virulent :
ÿ Les bénévoles de la réserve
communale de sécurité civile
font feu de tout bois pour pro-
téger la zone. Ÿ
Halte aux réservistes pyro-
Repéré dans « Vaucluse-
Matin » (28/8) :
ÿ Ce modèle dÊavion (…) était
équipé du même moteur que
celui de lÊavion de Berlioz. Ÿ
Mermoz trouvait sa sym-
phonie fantastique et pla-
nante !
Le maire écolo de Grenoble, 47 ans, est un rien autoritaire et affiche
des ambitions de la taille d’un sérieux melon.
OUX DEHORS – sou-
D rire et fossette, grands
yeux d’enfant –, dur de-
dans. Le maire de Grenoble,
réélu en juin, est un homme de
certitudes qui n’aime guère
qu’on lui résiste. Dans la polé-
mique l’opposant à Gérald Dar-
manin sur les dealeurs du
quartier grenoblois du Mistral,
qui se mettent désormais en
scène avec cagoules, sachets de
drogue et artillerie, il est
prompt à stigmatiser le ÿ coup
de comÊ Ÿ du gouvernement. Un
peu d’autocritique, un tout petit
peu quand même, de la part
d’un maire favorable à une po-
lice désarmée et souhaitant
désactiver les caméras de sur-
veillance ? Pas le moins du
monde. Les dealeurs ne pren-
nent pas leurs aises, ils font
simplement ÿ une opération
marketing Ÿ, déplore-t-il,
comme on regrette la crise
d’ado d’un gosse ramenard
qu’il ne faut pas prendre au
sérieux.
Piolle est devenu la star des
écolos, la base en pince pour
lui. Il est le nouveau rassem-
bleur de la gauche, il court par-
tout, un petit tour chez Mélen-
chon, une photo avec Hamon,
une rencontre avec Monte-
bourg, une prise de parole de-
vant Faure, un cliché avec Hi-
dalgo. Il veut convaincre, dit-il,
apaiser les tensions, en finir
avec les malentendus. Mais, à
la métropole de Grenoble, où il
n’a pas réussi à imposer son
LA GAUCHE SʼINSPIRE DU MODÈLE MARSEILLAIS
L’homme qui dormait sous mon lit
VEC Pierre Notte, le
A cynisme des pays euro-
péens à l’égard des mi-
grants en prend plein les
dents, à coups de sarcasme, de
drôlerie, de tragique et d’ab-
surde ! L’auteur et metteur en
scène nous a concocté une fable
noire située dans un avenir im-
probable où quiconque héberge
un migrant touche une alloc
et, si ce dernier se suicide, une
prime supplémentaire. Fini,
les problèmes de migration !
Jardin de l’Institut suédois,
dans le Marais. Le plateau est
situé entre deux arbres, sur
une portion de la rampe d’accès
en bois qui longe le mur me-
nant à la grande bâtisse. Au
milieu, juste une chaise pour
signifier un appartement
minuscule.
Voici la locataire et le réfu-
gié. La première, brune, à la
Pomme (Pur jus)
« JE SUIS CELLE quÊon ne
voit pas / Je suis celle quÊon
nÊentend pas. Ÿ Sur ces paroles,
chantées a cappella, Pomme
effectue une entrée en scène
d’autant plus paradoxale
qu’elle est filmée – Covid
oblige – dans un théâtre an-
tique de Fourvière vide de pu-
blic et tout en clair-obscur. Si
le charme opère tout de suite,
sans doute est-ce dû à cette in-
définissable alliance de fragi-
lité et d’aplomb, de douceur et
d’énergie, tant dans la voix
que dans les textes, dont fait
Eric Piolle
Vert sévère
candidat – un sacré revers –, il
mène une guerre incessante au
socialiste Christophe Ferrari
pour le pousser à la démission.
ÿ Dans le système Piolle, tous
les pouvoirs doivent revenir
aux écolos, cÊest fou. Ferrari
a fait faire un pas de géant
à lÊécologie dans la métro-
pole, mais il a un défaut ma-
jeur pour Piolle : il nÊa pas
sa carte à EELV ! Ÿ s’insurge
un socialiste grenoblois.
Melon Vert
Il se rêve investi par les éco-
los pour 2022 et ne s’en cache
guère. Un compte Twitter
« Avec Piolle », puis un autre,
« Et pourquoi pas Piolle ? », ont
été créés. Il distribue désormais
ses lumières sur le Liban, le
Mali, la Biélorussie, Hongkong,
et le plan de relance du gouver-
nement. Il fait connaître sa so-
lidarité envers tous les peuples
opprimés – ÿ Grenoble, dÊoù par-
tit lÊétincelle de la Révolution
française, soutient ces citoyens
épris de liberté Ÿ –, se regarde
un tantinet écrire sur son
compte Twitter : ÿ Homo econo-
micus a vécu. Sur les ruines des
dogmes, notre chemin sera de
cultiver notre courage. Et nous
puiserons dans nos poèmes la
force de rendre envisageable ce
qui nÊa pas encore de nom. Ÿ
Il ne faut surtout pas qu’on
croie qu’il la joue perso : ÿ Je
mÊinscris dans une ambition
(Migration assistée)
voix rauque, vêtue d’une robe
rouge et noire. Le second, noir,
en survêt. Elle, tout en colère
retenue, fait la tronche, attend
le suicide de son invité pour
empocher le fric et passer au
suivant et lui répète donc à lon-
gueur de journée où sont ran-
gées les lames de rasoir (sous
l’évier, à droite). Lui s’amuse
à jouer avec les nerfs de son
hôte et, parlant un français im-
peccable, à corriger sa syntaxe.
Chacun se déplace les bras ten-
dus dans les airs comme un fu-
nambule sur un fil. Les excel-
lents Muriel Gaudin et Clyde
Yeguete interprètent ces deux
êtres condamnés à vivre
ensemble.
Evidemment, soixante-dix
minutes durant, rien ne se
passe comme prévu. La loca-
taire a beau multiplier les stra-
tagèmes, installer le migrant
sous son lit, lui servir de la chi-
corée infâme, etc., rien n’y fait.
Il n’a aucune envie de mettre
fin à ses jours.
La solution ? Recourir à une
médiatrice, bien sûr ! Pas n’im-
porte laquelle : une actrice em-
bauchée pour l’occasion, pré-
nommée Silvie Laguna et
incarnée par la comédienne
Laguna Silvie. Elle donne un
spectacle formidable. Elle ose
montre cette jeune et subtile
mélodiste. Officiant d’abord
sur un minuscule clavier, puis
s’accompagnant à l’autoharpe
(sorte de cithare électrique),
Pomme rejoint ensuite ses
deux musiciennes multi-ins-
trumentistes.
On se dit qu’en allant à
Fourvière ce trio ne s’est pas
fourvoyé.
A. A.
. Pomme aux Nuits de Four-
vière, sur Arte (rubrique « Arte
Concert »).
collective pour faire gagner
notre espace et notre projet po-
litique Ÿ, affirme-t-il. C’est, bien
sûr, au nom du « collectif » qu’il
vote Mélenchon en 2017 et le
fait savoir, alors qu’EELV sou-
tient… Hamon. Il se voit à la
tête d’un ÿ arc humaniste Ÿ qui
le porterait à l’Elysée. Mais
Piolle l’humaniste a fermé
deux bibliothèques dans les
quartiers populaires de Gre-
noble – il parle de ÿ regroupe-
ment Ÿ – avant de se faire le
chantre d’un ambitieux ÿ plan
lecture Ÿ dans sa ville, lancé
grâce au combat acharné de ses
opposants de gauche…
Qu’on le sache, il n’est pas
un adepte du compromis avec
le grand capital. ÿ Je ne chan-
gerai pas le monde avec les
grands patrons, leur intérêt de
classe pour le faire est extrême-
ment faible Ÿ, assure, martial,
cet ancien cadre dirigeant de
tout, soulève des tonnes d’ef-
fets comiques, traverse la
scène comme un crieur public,
s’improvise psy proposant des
jeux débiles, se targue de son
prestigieux CV au théâtre
mais, faussement neutre, exige
un pourcentage si elle parvient
à aider la locataire à se débar-
rasser de son migrant… Fable
délicieusement cruelle et
Les Carnets
d’Albert Camus
E COMÉDIEN Stéphane
L Olivié-Bisson s’est plongé
dans les « Carnets » d’Albert
Camus (Gallimard), écrits
entre 1935 et 1959. De ces
1 000 pages qui sont moins un
journal intime qu’un ensemble
de notes, d’anecdotes, d’obser-
vations, il a tiré un spectacle
très sensible.
Sur scène, deux chaises, un
écran et, au milieu, un rec-
tangle de galets blancs qui fi-
gurera aussi bien Tipaza que
la pierre tombale du père. De
façon très judicieuse, le comé-
dien a adapté le texte non pas
de manière chronologique
mais en suivant les voyages
de l’auteur. Il nous emmène
LʼÉCOLE, ÇA VA ÊTRE COMPLIQUÉ
« Le Canard enchaîné » – mercredi 2 septembre 2020 – 7
Hewlett-Packard. Cette dé-
fiance envers le monde de l’ar-
gent ne l’a pas empêché, a ré-
vélé le journal d’investigation
grenoblois « Le Postillon » – qui
n’a jamais fait l’objet de pour-
suites judiciaires –, de prendre
des parts dans une start-up
ayant embauché sa femme et
développé une filiale à Sin-
gapour. Les paradis fiscaux,
Eric Piolle y est pourtant fa-
rouchement opposé. Il pré-
cise cependant au « Canard »
qu’il n’a qu’ÿ une part sym-
bolique Ÿ dans cette société.
Son bilan de premier
maire écolo d’une grande
ville ? Piétonnisation, pistes
cyclables, recul de la voi-
ture… Du classique. En réa-
lité, Piolle s’intéresse bien da-
vantage au « sociétal ».
Faiseur de roi
La prochaine cible du maire
de Grenoble, c’est France ur-
baine, ex-association des
maires des grandes villes de
France. Un groupement de
104 membres, au sein duquel
il ne peut prendre le pouvoir
– il n’y a que 11 élus écolos
maires de grandes villes – mais
où il a bien l’intention de jouer
les faiseurs de roi, le 24 sep-
tembre. ÿ Au départ très discret,
Piolle se montre beaucoup,
maintenant, et il sÊactive énor-
mément pour faire élire la
maire de Nantes, la socialiste
Johanna Rolland, contre Jean-
Luc Moudenc, le maire de Tou-
louse . Son but, cÊest de politiser
cette structure, qui sÊest toujours
maintenue soigneusement à
lÊécart des combats partisans Ÿ,
déplore un grand maire de
droite.
Il a même réussi à politiser
la cour de récréation. Il veut la
ÿ dégenrer Ÿ, remédier à cette
insupportable manie qu’ont
bien des gamins de courir après
la balle. On va réduire l’espace
pour le foot. On aurait pu aussi
inclure les filles dans le jeu, vu
qu’elles n’y sont pas manchotes,
mais non. ÿ Si nous voulons
transformer le pays, nous le fe-
rons Ÿ assure-t-il. En 2022, il
suffira juste d’être élu.
Anne-Sophie Mercier
pleine de mauvais esprit. Mais,
comme toujours, Pierre Notte
sait retourner les situations en
un clin d’œil, passer du sar-
casme au joyeux en une ré-
plique. Et, cette histoire qui
respire l’humour noir, la voilà
qui finit bien. Même très bien !
Mathieu Perez
l Vu à l’Institut suédois. Du 2
au 6 septembre à l’auditorium du
square Saint-Lambert, à Paris.
Entrée libre.
ainsi en Algérie pour nous par-
ler de l’enfance, à Paris pour
évoquer la guerre, en Italie,
en Grèce… Il brasse les grands
thèmes par petites touches :
l’attachement à la mère, l’in-
satisfaction en amour, le
manque d’humanité des poli-
tiques, la solitude, la soif de
liberté… Tout cela, Olivié-Bis-
son nous le fait vivre d’une
voix très douce, durant 1 h 10.
Seul bémol : il ne tient pas
en place. Sans doute pour ex-
primer le côté infatigable de
Camus. Mais c’est fatigant
pour le spectateur.
M. P.
l Au Lucernaire, à Paris.
 Estrosi veut
un accord avec
Macron pour 2022
A peine rendus
obligatoires…
Directeur : Nicolas BRIMO.
C OUP SUR COUP, la se-
maine dernière, « Le Pa-
risien » (26/8 et 28/8) a fait
état de deux dérapages dans
le maintien de l’ordre. Ce fut
d’abord, sur la plage des
Saintes-Maries-de-la-Mer, près
d’Arles, ces deux gendarmes
qui ont exigé de deux femmes
qu’elles se couvrent la poi-
trine. Et cela à la demande
d’une famille bien-pensante
qui se disait « gênée ». Les
pandores ont reconnu « une
maladresse » de leur part.
Est venu ensuite le cas de
cette avocate de Toulouse
obligée par le personnel péni-
tentiaire de retirer son sou-
tien-gorge pour aller visiter
son client à la prison de
Seysses : son sous-vêtement
comportait une armature mé-
tallique qui déclenchait une
alarme au portique d’accès.
L’avocate, humiliée, a saisi le
Conseil de l’ordre.
Les bavures ne sont pas tou-
jours dramatiques.
. Bölek, 28  ans, chanteuse de
A UN AN de la fin de son
mandat, Angela Merkel,
nous dit « Le Figaro » (25/8),
« a affirmé [au cours d’une
conférence de presse] qu’elle
referait la même chose qu’il y
a cinq ans, en ouvrant la porte
aux migrants bloqués aux
portes de l’Europe ». Ce n’est
pas le cas de tous les dirigeants
européens.
Exemple : l’équipage du ba-
teau humanitaire « Louise-Mi-
chel », affrété par le street ar-
tist Banksy, a dû lancer un
appel de détresse pour sauver
les 219 migrants qu’il avait
recueillis en Méditerranée,
malgré une capacité théorique
de 31 passagers.
Seule la nouvelle municipa-
lité de Marseille a accepté de
les accueillir, tout en sachant
que les autorités françaises s’y
opposeraient. Finalement, les
migrants en perdition ont été
(provisoirement) transférés
vers un autre navire humani-
taire.
Rien de nouveau sous le so-
leil méditerranéen.
MÉLUCHE LE MIEUX PLACÉ
POUR RASSEMBLER
LA GAUCHE
T OUT À LA JOIE d’annon-
cer son plan d’aide de
2 milliards pour le secteur
privé de la culture, Jean Cas-
tex a omis de préciser ce qu’il
comptait faire pour les entre-
prises culturelles du secteur
public, comme l’Opéra de
Paris, le Louvre, le musée
d’Orsay ou le château de Ver-
sailles.
Pourtant, selon « Les
Echos » (28/8), « ces grandes
institutions [sont] à genoux »
et « appellent à l’aide l’Etat
actionnaire pour préparer
l’avenir ». Ou, plus simple-
ment, sauver les meubles.
Par exemple, à Orsay, « la
fréquentation a chuté de
70 % » en juillet et en août ;
à l’Opéra, on parle carrément
d’« un effondrement » ; à Ver-
sailles, la conservatrice a de-
mandé un secours de 25 mil-
lions pour 2021 et de
30 millions pour 2022. Même
dégringolade de la fréquenta-
tion, et donc des recettes, au
Louvre. Mais, heureusement,
il y a le « fonds de soutien »
du Louvre Abu Dhabi.
C’est glorieux.
8 – « Le Canard enchaîné » – mercredi 2 septembre 2020
MACRON FACE AU DÉFI DE LA SÉCURITÉ
Péril jeûne en Turquie
L E 27  AOÛT, l’avocate ayant « violé la Constitution »,
kurde Ebru Timtik, 42 ans, Mustafa Koçak s’éteignait en
condamnée à 13 ans de prison prison après 297 jours de jeûne.
pour « appartenance à une or-
ganisation terroriste », est morte
dans une prison-hôpital turque
après 238 jours de grève de la
faim. Elle exigeait une révision
équitable de son procès.
Le 3  avril, c’était Helin
Grup Yorum, qui disparaissait
après 288 jours de « jeûne à
mort ». Elle protestait contre la
violence policière dont elle était
victime. Le 24 avril, dénoncé
par un informateur comme
Un drôle
de théâtre
parisien
ON AMBITION ar-
«S tistique et l’innova-
tion de ses propositions feront
entrer le Châtelet dans une
nouvelle ère. » Qu’elle était
enthousiaste, Anne Hidalgo, et
avec elle son premier adjoint à
la culture d’alors, Christophe
Girard, lors de l’arrivée, en
2017, de Ruth Mackenzie à la
direction du théâtre du Châte-
let ! Trois ans plus tard, Ruth
Mackenzie fait ses valises. Et
son protecteur Christophe Gi-
rard a quitté ses fonctions.
Et, soudain, les journaux, vi-
siblement inspirés par l’Hôtel
de Ville, évoquent les résultats
d’un audit accablant : des sa-
lariés qui ont porté plainte pour
« conditions de travail dégra-
dées » et pour les humiliations
subies. L’ex-directrice du Scot-
tish Opera, à Glasgow, et du
Holland Festival, aux Pays-
Bas, qui rêvait d’un « théâtre
activiste », a imposé une pre-
mière saison très onéreuse
(3 millions d’euros de déficit)
et des choix artistiques discu-
tables.
La sanction vient donc de
tomber, et la principale intéres-
sée dit ne pas comprendre
pourquoi elle va devoir prendre
la porte : « Je suis la première
femme et la première étran-
gère à avoir été nommée di-
rectrice. C’est peut-être ce
qu’on me reproche. » La Mai-
rie de Paris évoque, de son
côté, « des faits recoupés et
analysés  » («  Le Monde  »,
31/8). L’équipe d’Anne Hi-
dalgo a en effet eu le temps
d’« analyser » la situation :
l’alerte avait été donnée depuis
des mois par les syndicats.
MACRON ET SARKO
ABSENTS DU MARIAGE
DE DARMANIN
La liberté de la presse ne s’use que quand on ne s’en sert pas.
Et, le 7 mai, Ibrahim Gökçek,
41  ans et bassiste de Grup
Yorum, succombait à son tour.
Il avait refusé de s’alimenter
pendant 323 jours.
Chaque fois, les protestataires
crient leur innocence et récla-
ment la fin du harcèlement ou
un nouveau procès équitable,
ne se nourrissant plus que de
thé, de sucre, de sel, parfois de
vitamine B1. Et, chaque fois,
les autorités laissent mourir ou
gavent le détenu de force en
dernière extrémité, provoquant
sa fin.
En 1987, la Turquie se portait
candidate à l’adhésion à l’Union
européenne, un statut reconnu
officiellement par les Européens
en 1999. Depuis, l’Europe es-
time que les négociations avec
Ankara sont « au point mort ».
Le régime islamo-nationa-
liste d’Erdogan a-t-il cessé de
la nourrir d’illusions ?
S. Ch.
BAYROU VA PRÉPARER LA FRANCE DE 2030
Trump
à qui peur gagne
F AISANT FEU de tout bois,
Donald Trump a réclamé,
le 26 août, un test antidopage
contre son adversaire Joe Biden,
alias « Sleepy Joe » (« Joe l’En-
dormi »), qu’il trouve soudain
trop réveillé… Or le Président,
de son côté, dope sans vergogne
sa campagne à la peur et à la
violence pour occulter son
piètre bilan contre la pandémie
de Covid-19 et tenter de récu-
pérer une partie de l’électorat
blanc, inquiet des affrontements
de rue…
Afin de mieux souffler sur
les braises, Trump a maintenu
son déplacement à Kenosha, le
1er  septembre (à l’heure où
« Le Canard » était mis sous
presse). Dans la ville même où
l’Afro-Américain Jacob Blake
a été descendu de sept balles
dans le dos par un policier, le
23 août, et où, lors de l’une des
nuits d’affrontements qui ont
suivi, un fervent militant pro-
armes de 17 ans, proche d’une
milice venue « sécuriser » un
parking, a tué deux manifestants
qui tentaient de le désarmer et
en a blessé grièvement un troi-
sième. « Ils l’ont très violem-
ment attaqué, il était grave-
ment en danger », l’a défendu
Halte au candidathon,
vive Macron !
L ’ÉLECTEUR de droite
peut être rassuré. Trois ans
après l’élimination de François
Fillon au premier tour de la
présidentielle, les leçons de
l’échec ont été tirées. Pour ne
pas perdre contre Emmanuel
Macron à la prochaine
échéance, il suffit de le choisir
comme candidat. Christian Es-
trosi a livré la martingale aux
lecteurs du « Figaro », le jour
de la rentrée. « Pour ne pas
gâcher tous les talents de la
droite », comme dit le maire
de Nice, il faut que ses élec-
teurs se donnent à celui qui la
prive d’espace et de ses
meilleures pousses, tel ce
Darmanin clone de Sarkozy.
CQFD.
La droite ne manque pour-
tant pas de candidats. Entre
ceux qui ne cessent de se dé-
clarer partants (Xavier Ber-
trand, Bruno Retailleau), celles
qui y songent sans se raser (Va-
lérie Pécresse, Rachida Dati),
ceux qui ne veulent pas y aller
mais sont invités à se dévouer
(François Baroin), ceux qui ai-
meraient se dévouer mais ne
sont pas invités à le faire (Ni-
colas Sarkozy), ceux qui ont
les faveurs des sondages mais
goûtent un havre de repos
(Edouard Philippe), sans ou-
blier les héros du Covid qui
ont vocation à empêcher « un
suicide » (Philippe Juvin, ur-
gentiste LR), la droite a l’em-
Privé de panier
L E SANG de Michel-
Edouard Leclerc n’a dû
faire qu’un tour de charriot.
Comment ? Leclerc, l’enseigne
de supermarchés qui a acquis
ses roulettes de noblesse dans
Trump, le 31 août, refusant de
condamner le jeune homme,
pourtant poursuivi pour homi-
cide volontaire, qui est aussi
l’un de ses farouches partisans
et qui a assisté à l’un de ses
meetings…
Malgré les demandes pres-
santes du gouverneur du Wis-
consin et du maire de Kenosha,
le Président s’obstine donc à
parader sur le terrain, dans la
même logique de provocation
des affrontements suivie par ces
milices armées qui jouent en-
suite l’autodéfense. Le grou-
puscule Patriot Prayer est ainsi
allé défiler en 4x4 et défier les
manifestants au cœur de Port-
land (Oregon), où l’un de ses
membres a été tué, le 29 août,
par un tir non identifié… « Le
grand retour de bâton en
cours à Portland n’est pas in-
attendu  », a tweeté Trump,
poursuivant ses calculs.
La stratégie du Président est
de faire « de la sécurité une
question test  », explique le
« New York Times » (31/8), car
c’est la seule qui fasse remonter
sa cote dans les sondages…
On en a connu d’autres,
même dans nos contrées, qui
sont du même avis. D. F.
barras du choix, c’est bien son
souci.
Christian Jacob, le patron en
titre, « ne désespère pas » d’en
avoir un « qui s’impose natu-
rellement ». Si le naturel n’est
pas au rendez-vous, il faudra
trouver « un système de dé-
partage », admet-il. Sachant
que plus personne ne veut de
primaire – une machine à di-
viser –, la solution Macron est
peut-être plus raisonnable que
la courte paille, merci Estrosi.
Problème : Macron n’est-il pas
trop à droite pour la droite ?
Irréductibles
de l’ego
L’électeur de gauche aussi
peut être rassuré. Bientôt vingt
ans après l’élimination de Lio-
nel Jospin au premier tour de
la présidentielle, la nécessité
d’une candidature commune
en 2022 s’impose au plus
grand nombre. Même Jean-
Luc Mélenchon, cet irréduc-
tible de l’ego, est en train de
se faire à l’idée pour 2022. « Je
me sens, a-t-il dit, une voca-
tion de candidat commun. »
Il veut bien être le « candidat
commun » de tout le monde,
il pousse l’amabilité jusqu’à
ne refuser personne, si tous
viennent autour de sa per-
sonne. Pour l’heure, le com-
les prix les plus bas, se voit in-
terdire le rachat d’un concurrent
au motif que l’opération pour-
rait engendrer des hausses de
prix pour les consommateurs ?
Mais dans quel monde consom-
mons-nous !
Le coup a été porté par l’Au-
torité de la concurrence. La so-
ciété Soditroy et l’Association
des centres distributeurs E. Le-
clerc projetaient de prendre
conjointement le contrôle d’un
hypermarché Géant Casino de
8 210 m2 situé dans la commune
de Barberey-Saint-Sulpice
(Aube). Las, il se trouve que
l’agglomération troyenne dis-
pose de deux autres très grandes
surfaces (10 833 m2), l’une ap-
partenant à Carrefour et l’autre
à… E. Leclerc. Pas besoin de
faire un dessin. En économie,
“Anti-masque” :
l’argumentaire atterre
« S TOP carnaval mas-
qué, halte à la dicta-
ture » ; « Bas les masques ! » ;
«  Anti-masque, la révolte
commence ici »… A défaut de
mobiliser dans la rue en
France, les « anti-masque » se
réfugient sur Facebook. Où de
nombreux groupes d’opposi-
tion rassemblent des courageux
bien décidés à mettre fin à la
« masque-arade » en usant
d’arguments… imparables.
Petit florilège.
«  Depuis quand, si vous
avez la gastro, vous n’avez
pas de symptômes ? Depuis
quand un virus n’a aucun
symptôme mais vous pouvez
l’avoir quand même ? Depuis
quand vous avez arrêté de ré-
fléchir  ?  » demande John
Quinlan aux membres du Col-
lectif anti-masques. Sa ré-
ponse  : «  Depuis que vous
écoutez les médias vous pol-
luer l’esprit ! »
Un rien plus complotiste, un
certain Aspie Lymie a créé une
vidéo intitulée « Le plan ma-
chiavélique de Bill Gates (...)
démasqué ». On l’y entend dé-
clarer gravement : « Il y a des
choses qu’on nous cache (...).
J’aimerais que vous partagiez
cette vidéo au maximum (...),
elle va être rapidement reti-
rée sur Facebook par Bill
Gates. » A qui on ne connaît
pas d’autres occupations…
Aspie palpe son masque :
« Il y a quelque chose de dur
dedans, de bien dissi-
… les masques
tombent déjà !
Rédacteurs en chef : Erik EMPTAZ, Jean-François JULLIARD.
muniste Fabien Roussel joue
les irréductibles, il en a marre
de se soumettre au patron de
La France insoumise : « Si cer-
tains pensent que le PCF,
comme en 2012 et en 2017,
ne présentera pas de candi-
dature, eh bien, je dis à tout L E GOUVERNEMENT a
récemment annoncé un
« moratoire » sur la création
le monde : vous vous trom- de grandes surfaces commer-
pez. » ciales. Officiellement, il ne
Mais les écolos Jadot et s’agit pas de sauver ce qu’il
Piolle, eux aussi, sont pour une reste de petits commerces
candidature unique : la leur. mais de lutter (mode écolo
C’est leur point commun. Jadot oblige) contre l’« artificialisa-
s’est découvert une enfance so- tion des sols ». Bravo, mais il
cialiste, et, avec Piolle, il a y a déjà des ratés.
multiplié les danses du ventre Ainsi, les associations éco-
logistes lilloises hurlent, selon
à l’endroit du partenaire PS, « Le Monde » (28/8), contre
qui a dit oui avant d’être de- l’ouverture, qui a eu lieu la
mandé en mariage, et sans pré-
ciser quel était son Vert préféré.
Olivier Faure veut se donner à
semaine dernière, du Lille-
nium, un centre commercial
de 56 000 m2 aux portes de
un écolo, le reste est acces-
soire. Le patron du PS est un
la métropole nordiste. « Hors-
sol, à contretemps, destructeur
(…) dans un secteur saturé et
moderne. Hollande, un peu an-
cienne école, n’est pas d’ac- pollué », ont dit les écolos.
« Une chance pour Lille », a
cord, qui a gardé des idées de tweeté Martine Aubry.
grandeur en dépit de son auto-
La campagne électorale re-
élimination en 2017 et des 6 % commence.
de l’ex-frondeur Benoît
Hamon. Mélenchon le défend. MACRON :
Il est traité « comme un pes- ON SE LʼARRACHE !
tiféré » au PS, « c’est pas cor-
rect ! » tonne celui qui l’a as-
sassiné quand il était président,
avec toute la gauche du PS.
Cette soudaine magnani-
mité, serait-ce le prix à payer
pour tenter d’être le « candidat
commun » ?
J.-M. Th.
on appelle cela un duopole.
« La disparition de l’en-
seigne Géant Casino aurait
entraîné une importante perte
de diversité pour le consom-
mateur » et aurait immanqua-
blement eu « pour effet d’har- L E TRÈS AGITÉ SULTAN
Erdogan (lire par ailleurs)
ne se contente pas de trans-
moniser les produits
former des musées en mos-
commercialisés et les poli-
quées, comme il vient de le
tiques commerciales des deux
faire, après Sainte-Sophie,
points de vente », estime le avec l’église byzantine de la
gendarme de la concurrence Chora. Il multiplie aussi les ac-
dans sa décision, datée du tions répressives et militaires.
28 août. Pour emporter le mor- On a ainsi appris, dans
ceau, Leclerc a bien proposé de « L’Humanité » (27/8), que
réduire la surface de l’ex-Géant l’armée turque avait « mis la
Casino à 6 000 m2, mais l’Au- main sur une station de pom-
page en territoire syrien qui
torité de la concurrence ne s’est
alimentait près de 1 million de
pas laissé amadouer par ce pro-
personnes » en eau potable,
jet de Leclerc de poche. dans la ville de Hassaké et ses
Faut pas charriotter, quand environs.
même ! Il est toujors un peu sec.
O. B-K. Jérôme Canard
mulé ! » Oui, une puce RFID.
La société française UBI Solu-
tions l’emploie en effet sur cer-
« une manipulation monu-
mentale, à l’échelle de la pla-
nète, avec un agenda caché,
tains modèles afin que l’utili-
sateur puisse « contrôler le
un agenda qui consiste à vou-
loir installer une dictature
nombre de lavages avec une
application smartphone »
(« Le Parisien », 15/8).
mondiale ». Plus fiable que
Crèvecœur, tu meurs !
La palme du bon goût revient
Mais, aux yeux d’Aspie, pas
de doute : on nous trace, « on
nous prend pour des jam-
à une affiche diffusée sur les
réseaux sociaux au sein des col-
lectifs anti-masque. Elle com-
bons ». Il invite donc les Fran- pare, sans rire, le port de l’étoile
çais à ne pas suivre comme jaune en 1940 – qui ne visait
« des moutons les discours of-
ficiels ». Et à se tourner plutôt
« qu’une partie de la popula-
tion » dans « un régime tota-
vers « des sources sûres (…), litaire » – avec celui du masque
comme Jean-Jacques Crève- en 2020, qui, lui, « concerne
cœur ». De qui parle-t-on ? toute la population  » dans
D’un youtubeur belge, star des « une démocratie ».
réseaux conspi, qui considère Ben voyons.
l’épidémie de Covid-19 comme C. B.
LA GAUCHE, LA DROITE ET LE CENTRE ENFIN RÉUNIS