Position du problème. Imaginons que l'on mélange n1 moles d'un constituant A1 et n2 moles d'un constituant
A2 de façon à obtenir un système homogène. On s'intéresse ici aux grandeurs extensives caractérisant ce système.
Commençons par le cas simple de la masse. Celle-ci se conserve au cours du mélange. On peut donc considérer
la masse du système comme la somme des masses des deux constituants purs, tels qu'ils étaient avant le mélange.
Si M1 et M2 désignent les deux masses molaires des constituants, la masse M du système peut écrire :
M = n1 .M1 + n2 .M2
La situation se complique pour la plupart des autres grandeurs extensives caractérisant le système : en fait elle
se complique à chaque fois que le mélange provoque une variation de cette grandeur extensive.
Prenons l'exemple du volume. Imaginons une ole contenant 152,95g d'éthanol soit n1 = 3, 325mol d'alcool de
volume molaire : V1m = 58, 3016mL/mol. Le volume d'alcool dans la ole est : V1 = n1 .V1m = 193, 85mL. Imaginons
une seconde ole contenant 120,15g d'eau soit : n2 = 6, 675mol d'eau de volume molaire : V2m = 18, 0524mL/mol.
Le volume d'eau dans la ole est : V2 = n2 .V2m = 120, 50mL. La somme des deux volume est : V1 + V2 = 314, 35mL.
Mélangeons dans une grande ole graduée les deux liquides : le volume du mélange vaut : V = 305,98mL. le
mélange a entraîné une diminution de volume d'environ 2,7%.
Autre exemple : le mélange de deux liquides est souvent exothermique ou endothermique. Dans ces conditions,
l'énergie interne et l'enthalpie ne sont pas les même avant et après mélange. On peut donc écrire :
Généralisation.
Considérons une grandeur extensive quelconque, notée X, fonction d'état extensive d'un système constitué d'un
mélange homogène de deux constituants A1 et A2 en quantités n1 et n2 . Soient P et T la pression et la température
absolue. Nous avons a priori :
X = f (P, T, n1 , n2 )
X est une grandeur extensive : cela signie que, si on multiplie chacune des quantités par un même nombre réel
positif λ, X est aussi multiplié par λ. On dit en mathématique que f est une fonction homogène de degré un :
∂f (P, T, λn1 , λn2 ) d(λn1) ∂f (P, T, λn1 , λn2 ) d(λn2) ∂f (P, T, λn1 , λn2 ) ∂f (P, T, λn1 , λn2 )
X= . + . = n1 . + n2 .
∂(λn1 ) dλ ∂(λn2 ) dλ ∂(λn1) ∂(λn2 )
Ce résultat est valide pour tout réel λ. Intéressons-nous au cas particulier λ = 1. Nous obtenons ainsi un résultat
connu sous le nom d'identité d'Euler :
1
∂X ∂X
X= · n1 + · n2
∂n1 ∂n2
Chaque dérivée partielle, le calcul étant eectué en considérant tous les autres paramètres comme
constants, est appelée : grandeur molaire partielle.
Ainsi les volumes molaires partiels, de l'éthanol et de l'eau ont respectivement pour expressions :
∂V ∂V
V1 = V2 =
∂n1 P,T,n2 ∂n2 P,T,n1
V = n1 · V1 + n2 · V2
Soient x1 et x2 les fractions molaires en éthanol et en eau :
n1 n2
x1 = x2 = = 1 − x1
n1 + n1 n1 + n2
Dénissons le volume molaire moyen du mélange :
V
Vm =
n1 + n2
En divisant tous les termes des deux expressions encadrées ci-dessus, on obtient aisément :
Vm = x1 · V1 + x2 · V2 = x1 · V1 + (1 − x1 ) · V2 = x1 · V1 − V2 + V2
Il faut bien comprendre la diérence entre une grandeur molaire et une grandeur molaire partielle. La grandeur
molaire d'un constituant ne dépend que de la nature de ce constituant, de P et de T. La grandeur molaire partielle
dépend de la nature du constituant, de P et de T mais elle dépend aussi de la nature de l'autre constituant avec
lequel il est mélangé et des proportions du mélange. Ainsi, les volumes molaires partiels dépendent de P, de
T et de x1 .
Remarque : dans le cas des liquides, les variations de pression restent d'inuence négligeable, sauf en cas de
pressions très élevées. J'ai cependant tenu à écrire les relations précédentes en la faisant intervenir de façon que les
résultats obtenus puissent s'appliquer aussi aux mélanges de gaz.
des tangentes.
Nous disposons de mesures de la masse volumique d'un mélange éthanol - eau pour divers pourcentages massiques
(notés p) en éthanol.
p(%) 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
ρ(g/mL) 0,9971 0,9804 0,9664 0,9507 0,9315 0,9098 0,8870 0,8634 0,8391 0,8135 0,7890
Raisonnons sur une masse de mélange de 100g ; la masse molaire de l'éthanol vaut 46g/mol, celle de l'eau vaut
18g/mol. Dans 100g de mélange, nous avons p grammes d'éthanol et (100-p) grammes d'eau. Les quantités d'éthanol
et d'eau, mesurées en moles, sont donc :
p 100 − p
n1 = n2 =
46 18
Le volume occupé par 100g de mélange est :
100
V =
ρ
Nous en déduisons le volume molaire moyen et la fraction moyenne en éthanol :
V n1
Vm = x1 =
n1 + n2 n1 + n2
Ces calculs, faits pour tous les points expérimentaux précédents, conduisent au tableau de valeurs ci-dessous :
2
x1 0,000 0,042 0,089 0,144 0,207 0,281 0,370 0,477 0,610 0,779 1,000
Vm(mL/mol) 18,0524 19,5498 21,2076 23,1632 25,5428 28,4403 31,9686 36,3257 41,8124 48,9339 58,3016
La valeur de Vm en x1=0 donne le volume molaire de l'eau pure ; la valeur de Vm en x1 = 1 donne la valeur du
volume molaire de l'éthanol.
Il s'agit maintenant de déduire de cette courbe les volumes molaires partiels de l'éthanol et de l'eau pour une
composition particulière : celle de la vodka qui correspond à pv = 56% (pourcentage massique) soit à x1v = 0,3325.
Cette composition correspond à un volume molaire moyen : Vmv = 30, 5298mL/mol (valeur obtenue en rempla-
çant x1 par x1v dans l'équation de la courbe de corrélation).
En utilisant les résultat du paragraphe précédent, on peut poser :
∂ n1
∂V ∂Vm dVm ∂x1 dVm n1 +n2
V1 = = Vm +(n1 + n2 )· = Vm +(n1 + n2 )· · = Vm +(n1 + n2 )· ·
∂n1 ∂n1 dx1 ∂n1 dx1 ∂n1
dVm dVm
V1 = Vm + x2 · = Vm + (1 − x1 ) ·
dx1 dx1
3
En appliquant cette formule générale au cas particulier de la dérivée calculée au point de coordonnées (x1v ,Vmv ),
on obtient :
dVm
V1 = Vm + (1 − x1v ) ·
dx1 x1 =x1v
En permutant les indices des deux constituants du mélange, on obtient :
dVm dVm
V2 = Vm + x1 · = Vm − x1 ·
dx2 dx1
En appliquant cette formule générale au cas particulier de la dérivée calculée au point de coordonnées (x1v ,Vmv ),
on obtient :
dVm
V2 = Vm − x1v ·
dx1 x1 =x1v
L'équation de la tangente à la courbe au point de coordonnées (x1v ,Vmv ) peut s'écrire :
dVm
Vm = Vmv + (x1 − x1v ) ·
dx1 x1 =x1v
L'intersection de cette tangente avec la verticale d'équation x1 =0 a pour ordonnée :
dVm
Vm (0) = Vmv − x1v · = V2v
dx1 x1 =x1v
L'intersection de cette tangente avec la verticale d'équation x1 =1 a pour ordonnée :
dVm
Vm (1) = Vmv + (1 − x1v ) · = V1v
dx1 x1 =x1v
Conclusion : le volume molaire partiel de l'éthanol est l'ordonnée de l'intersection de la tangente
à la courbe avec la verticale d'équation x1 =1. Le volume molaire partiel de l'eau est l'ordonnée
de l'intersection de la tangente à la courbe avec la verticale d'équation x1 =0. Les valeurs des volumes
molaires partiels peuvent s'obtenir graphiquement où, pour plus de précision, après détermination de l'équation de
la tangente à la courbe obtenue a partir de l'équation de la courbe de tendance.
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Par rapport à la première courbe présentée, j'ai ajouté la tangente (en rouge) à la courbe de tendance au point
de coordonnées (x1v ,Vmv ) (centre du petit cercle rouge). On peut remarquer que la courbe et sa tangente sont
très proches. Les écarts d'ordonnées en x1 =0 et en x1 =1 sont les écarts entre les volumes molaires et les volumes
molaires partiels de l'eau et de l'éthanol. Dans ces conditions, la méthode graphique est très peu précise. Il faut
calculer l'équation de la tangente à la courbe de tendance.
L'équation de la courbe de tendance a déjà été écrite :
y1 = 3, 87745 · x21 + 36, 6051 · x1 + 17, 9317
dx1
m
= y1 (x1v ) =
x1 =x1v
39, 1836 .
D'où l'équation de la tangente : Vm = 17, 5030 + 39, 1836 · x1
0
Les volumes molaires partiels, pour un mélange correspondant à la vodka sont les valeurs obtenues en x1 =0 et
en x1 =1.
Conclusion : pour les proportions éthanol - eau correspondant à la vodka, les volumes molaires
partiels de l'éthanol et de l'eau valent :
V1v = 56, 687mL/mol V2v = 17, 503mL/mol
Nous venons de voir que la méthode précédente se prête mal à une détermination graphique lorsque les volumes
molaires partiels sont proches des volumes molaires. Il existe une méthode alternative qui se révèle plus précise dans
ces cas. Il s'agit de représenter en fonction de x1 les variations de ∆Vm : la variation de volume molaire moyen
lorsqu'on mélange les deux liquides :
ΔVm(mL/mol) 0,0000 -0,1796 -0,4313 -0,6696 -0,8370 -0,9321 -0,9705 -0,9365 -0,7989 -0,4665 0,0000
Les variations de ΔVm en fonction de x1 est représentée ci-dessous : les croix noires correspondent aux points
expérimentaux, la courbe bleue est la courbe de tendance d'équation :
5
Comme pour la méthode précédente, il faut tracer la tangente à la courbe au point donc la composition nous
intéresse, ici le point correspondant à la composition de la vodka : x1v = 0,3325.
6
On déduit l'ordonnée 4Vmv du point d'abscisse x1v = 0,3325 de l'équation de la courbe de tendance :
4Vmv = 2, 8928 · x51v − 5, 4872 · x41v − 1, 0428 · x31v + 9, 4391 · x21v − 5, 8009 · x1v ≈ −0, 9789
Le coecient directeur de la tangente à la courbe précédente au point de coordonnées (x1v , 4Vmv ) se déduit
de la dérivée à la courbe de tendance :
d4Vm
= 5 · 2, 8928 · x41v − 4 · 5, 4873 · x31v − 3 · 1, 0428 · x21v + 2 · 9, 4391 · x1v − 5, 8009 ≈ −0, 4998
dx1 x1 =x1v
V1v = 58, 3016 − 1, 3125 = 56, 9891mL/mol V2v = 18, 0524 − 0, 4998 = 17.5526mL/mol
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V1v = 56, 9891mL/mol V2v = 17, 5526mL/mol
Nous pouvons calculer les écarts relatifs entre les résultats obtenues par les deux méthodes. Pour le volume
molaire partiel de l'éthanol, nous obtenons environ 0,5%, pour le volume molaire partiel de l'eau, nous obtenons
environ 0,3% . Les deux méthodes, lorsqu'on utilise des programmes de régression permettant d'obtenir les équations
des courbes de tendance, conduisent à des résultats extrêmement proches. S'il fallait se contenter d'une méthode
graphique, la seconde méthode serait plus précise.
Conclusion : nous retenons les valeurs moyennes des volumes molaires partiels correspondant aux proportions
éthanol eau de la vodka :