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Maurisson Patrick. Prix d'offre et égalisation des taux de profit : essai sur la formation des prix chez Marx. In: Cahiers
d'économie politique, n°6, 1981. La formation des prix: A. Smith, D. Ricardo, K. Marx. pp. 99-125;
doi : https://doi.org/10.3406/cep.1981.945
https://www.persee.fr/doc/cep_0154-8344_1981_num_6_1_945
* Une version primitive de cet article a fait l'objet d'un exposé aux Journées d'Etude
sur la formation des prix à l'Université de Nanterre (17 et 18 novembre 1979); que ceux
des participants qui par leurs critiques m'ont obligé à préciser mon approche de cette
question épineuse chez Marx, soient ici remerciés.
(*■) Chapitre VII de la deuxième section du livre III du Capital dans l'édition de
la Pléiade (t. II) établie par Maximilien Rubel (p. 980). Rappelons que ce chapitre
intitulé : « Egalisation du taux général du profit par la concurrence. Prix de marché et
valeur de marché. Surprofit » dans les Editions Sociales est le dixième de la 2e section.
Cahiers d'Economie Politique, n° 6
100 Patrick Maurisson
LE PRINCIPE DE GRAVITATION
(2) C'est la reconnaissance de cette dépendance du marché qui, selon Marx, donne
son caractère scientifique à l'économie ricardienne et la différencie radicalement de
l'économie « vulgaire ».
(3) Dans l'optique classique, ce sont les phénomènes de répartition liés aux conditions
de production de certaines marchandises fondamentales (les biens-salaires pour Ricardo)
qui contraignent la formation des prix.
(4) Ce qui pratiquement reviendrait à assimiler cette opposition à la distinction
classique entre prix de marché et prix naturel.
Egalisation des taux de profit 101
« En tant que valeur, les marchandises sont une unité, de simples représentations
d'une même unité : le travail social. La mesure de la valeur (argent) les présuppose
comme valeurs et renvoie uniquement à la représentation et à la grandeur de cette
valeur. La mesure de la valeur des marchandises renvoie toujours à la transformation
des valeurs en prix, implique déjà la valeur » (7).
II - DE LA VALEUR DE MARCHÉ
AU PRIX DE PRODUCTION :
LA NOTION DE PRIX NORMAL DE MARCHÉ
(u) Sur la hiérarchisation des taux de profit internes à la branche : cf. infra 7.1.
(12) Chap. VII, p. 972, t. II, Ed. Pléiade. La citation s'applique également au concept
de prix normal qui est le terme générique de la valeur de marché et du prix de production.
(13) Cf. supra, p. 99, la citation de Marx.
104 Patrick Maurisson
LA DEMANDÉ
l'offre
(22) « II semble donc que, du côté de la demande, il existe un besoin social d'une
ampleur déterminée, dont la satisfaction réclame la présence sur le marché d'une quantité
déterminée de tel article. Mais la détermination quantitative de ce besoin est très élastique
et flottante, car la fixité n'en est qu'apparente », ibid., p. 979.
(23) P. 986. Citons également cet extrait très significatif : « Notons ici au passage que
le « besoin social », autrement dit le facteur qui règle la demande en son principe, dépend
essentiellement des rapports entre les différentes classes et de leur position respective dans
l'économie; donc surtout 1° du rapport de la plus-value totale au salaire; et 2° du rapport
entre les diverses fractions qui composent la plus-value (profit, intérêt, rente foncière,
impôt, etc.). Une fois de plus, on voit donc qu'on ne peut absolument rien expliquer par
le rapport entre l'offre et la demande avant d'avoir mis en lumière la base sur laquelle
ce rapport fonctionne », ibid., p. 974.
(24) Tout changement de paramètre impliquant un nouveau processus, tout ajustement
qui n'aboutirait à la coïncidence de l'offre et de la demande que par modification exogène
de la demande solvable n'auraient aucune signification positive pour l'étude du processus
initialement examiné.
(25) L'égalité des produits d'une même branche face à la demande solvable de son
marché étant postulée, on s'interdit du même coup d'examiner la possibilité d'une
discrimination dans leur écoulement.
Egalisation des taux de profit 107
(26) Pas plus que la demande solvable ne préjuge de la demande réelle. Cette
conception de l'offre est bien évidemment différente de celle de la tradition classique qui structure
l'appareil productif de chaque branche suivant un critère technologique. Chaque ligne
de production correspond à un procédé de fabrication distinct et la diversité des façons
de produire une même marchandise permet de repérer ses composantes.
(27) Pour reprendre une expression que Marx utilise à propos du prix de production,
le prix d'offre est « la condition de l'offre, de la reproduction de la marchandise dans
chaque secteur particulier de la production », chap. VII, 2e section, liv. III, p. 986, Ed.
Pléiade.
108 Patrick Maurisson
LE PRIX D OFFRE
4.1. Soit une branche dont le capital initial K (36) présente trois
segments K1} K2, K3 différenciés à partir des coûts unitaires de
production :
que k3 (37) .
*1/S
Ko61/oO «2/2 Q.2
3/3
sup ki
Le rapport — k=— peut alors servir
d'indicateur de dispersion.
Egalisation des taux de profit 111
4.2. Quels que soient leur niveau et leur sens, les désajustements
de marché seront enregistrés « également » par tous les segments
de capital de la branche (38). Ce qui signifie que les variations de
stock ainsi que leur recette au cours de chaque période successive
d'ajustement seront pour chacun d'entre eux au prorata de l'offre
qui leur est associée. Si R est la recette de la branche (39) au cours
de la période initiale, chaque segment i obtenant une recette égale
à ^-^ . R, réalise un taux de profit ri défini par :
L (II)
(1 + r) = |.
(38) Ceci n'est que la contrepartie du postulat d'égalité des produits face à la demande
(cf. supra 3 . 4) qui interdit de prendre en considération dans notre analyse les phénomènes
de discrimination entre « offreurs » d'une même marchandise.
j^
(39) Q/u désignant la quantité vendue R = O,,,./»! s? A' o Q,v^ Q4 = — et R = A'
si o* = aj- Pi
(40) Dès la seconde période d'ajustement, l'offre ne se confond plus nécessairement
]i.
avec la quantité produite. Les coefficients k\ = —^ prennent alors la place des coeffi-
Q.oï
cients k^ . Mais, en raison du postulat précédent, les rapports k\u et kyj sont identiques ;
ce qui donne une portée générale à la description de la branche en termes de coûts relatifs
unitaires.
112 Patrick Maurisson
ou encore :
(1 + rm) sup k%= {\ +f)k (41).
sup^
Le rapport —dé~fini — étant toujours supérieur ou égal à 1, par
nition, cette condition est d'autant plus facilement remplie que le
taux de profit minimum est peu élevé et d'autant moins que la
dispersion entre les segments de capital de la branche est forte (43).
EXCES D OFFRE
(41) Cette égalité signifie que les taux de profit attendus sur la base du taux de profit
minimum sont réalisés pour tous les segments de capital de la branche.
(42) Puisque r ^ r peut engendrer un afflux de capital et déclencher de la sorte une
nouvelle procédure d'ajustement.
(43) Dans le cas particulier où la branche ne comprendrait qu'un seul segment de
capital, sup k^ = k, cette condition se réduit à :
(1 + rm) « (1 + r).
(44) Du moins dans la période initiale, en général la relation s'écrit :
0.0 > Q.p > Qv = O*
Egalisation des taux de profit 113
c'est-à-dire :
A'
R
^ " '
A Px
ce qui peut s'écrire, le coefficient des ventes étant : a = ^p < 1 (45) :
(46) Le taux de profit le moins élevé (1 4- rç) étant alors égal à (1 + rm) tous les autres
taux sont proportionnellement réduits, et puisque pour chacun d'eux on a :
1 + r," sup k^ , 1 + rj^ sup kj,
r on a aussi
114 Patrick Maurisson
EXCÈS DE DEMANDE
production consécutive à la sortie des capitaux. Cette réduction ÀQ,2/i est fonction de
la dispersion des fy et des quantités produites précédemment par les segments de capital
non maintenus dans la branche. La condition de recouvrement éventuel de la période
peut s'écrire :
(52) Pour les mêmes raisons on doit exclure d'emblée (cf. supra 3.3, n. (24) la possibilité
d'une diminution de la demande solvable initiale A', qui se reproduit à l'identique de
période en période. Notons que l'enchaînement des périodes peut alors s'effectuer sur
la base d'un report des excès de demande solvable d'une période à l'autre.
(53) En cas d'excès de demande :
_ - A' R
(1 + rm) sup ki = (1 + r) k < — - - , puisque (1 + r) = — .
116 Patrick Maurisson
(54) Ni au sens classique; sauf à se donner une quatrième condition a priori (cf. supra 1 .6)
portant sur la technique de production des marchandises, indiquant pour chaque période
d'ajustement et pour chaque segment de capital la méthode de fabrication suivie en termes
de production de marchandises par des marchandises. Dans ce cas particulier, la notion
de prix d'offre serait semblable à la notion sraffaïenne de prix de production, mais resterait
irréductible à la notion marxiste; car, même si l'on suppose l'uniformité des taux de profit
minimum et l'existence d'une seule méthode de production dans chaque branche, il
faudrait encore pouvoir réconcilier la théorie classique du profit qui fait dépendre le taux
de profit de l'économie de la plus ou moins grande difficulté de production de certaines
marchandises — dites fondamentales — et la conception marxiste du profit comme forme
monétaire de la plus-value.
(55) Le prix d'offre d'équilibre dépend en effet de la demande solvable et de la quantité
produite, lorsque le capital de la branche est adapté à ses conditions de valorisation;
or, cette quantité d'équilibre est a priori indéterminée.
Egalisation des taux de profit 117
(56) Difficultés qui tiennent, comme nous l'avons souligné, soit à des caractéristiques
de la segmentation du capital de la branche qui bloque l'ajustement de l'offre à la demande,
soit à des mouvements de capitaux contraires à ceux assurant l'ajustement, qui le
contrarient donc, en le retardant ou même en inversant la situation de marché.
118 Patrick Maurisson
(57) Dans l'analyse de la formation des prix fondée sur la notion de prix d'offre, ces
taux de profit de référence sont les taux de profit minimum.
(58) C'est d'ailleurs pourquoi l'abandon du premier ne pouvait conduire, dans l'analyse
de la formation des prix, qu'à révéler le caractère contingent de l'égalisation des taux
de profit entre les capitaux de branche, et inciter à rejeter ce dernier principe inutile
pour la compréhension des processus d'ajustement, et qui plus est, indémontrable.
(59) Sauf à considérer, ce qui est démenti maintes fois dans le texte, que dans le
chapitre VII ne serait retenue que l'unique hypothèse de travail n'invalidant pas le postulat
d'égalisation des taux de profit entre les branches (cf. infra 6.5).
Egalisation des taux de profit 119
VII - ANNEXE :
DESCRIPTION ANALYTIQUE
DU RECOUVREMENT DE L'OFFRE
ET DE LA DEMANDE
EN SITUATION NORMALE
0.1 0.2
L'équilibre de marché en situation normale assure simultanément
l'écoulement complet de la production offerte et l'obtention du profit
normal 7c pour le capital de la branche. Soit pn le prix normal
d'équilibre : pn = pr .
A chaque segment de capital de la branche correspond un taux
de profit brut :
122 Patrick Maurisson
VALEUR DE MARCHÉ
(65) Dans le cadre des prix de production (cf. infra 7.4) seule la totalité des
marchandises ou la marchandise produite par une branche représentative pourront être « vendues
à leur valeur ».
(66) La valeur individuelle d'un échantillon d'une marchandise est le prix unitaire
qui permettrait de le vendre « à sa valeur ». Dans la situation normale où le prix d'équilibre
est la valeur de marché, quoique la marchandise dans sa totalité soit vendue « à sa valeur »,
cela n'est pas le cas de ses éléments constituants.
Egalisation des taux de profit 123
+ 1 ,67).
(S).
X
pour les autres, au contraire, ri ^ ~7n\ > l'égalité étant vérifiée
PRIX DE PRODUCTION
tvL
(70) =Pour
(v) le
■ segment e produisant le segment représentatif : re — — — x , par
conséquent,
équent, si de plus : 1^1 =lrjl, re = r.
124 Patrick Maurisson
chaque branche est égal au taux de profit général qui dépend, chez
Marx, du taux d'exploitation et de la composition organique du
capital de l'économie :
c'est-à-dire :
*Ve = r(Ce + VJ. '
La composition organique de la branche représentative est donc
nécessairement égale à la composition organique de l'économie (72).
SURPROFIT
Décembre
Université de Picardie.
(75) Cf. chap. VII, 2e section, liv. III, p. 990, éd. Pléiade.
(76) Si les prix courants de marché de ces produits sont respectivement égaux à leurs
valeurs individuelles, la plus-value réputée créée dans l'agriculture est intégralement
partagée entre les propriétaires fonciers et les fermiers capitalistes.
(77) Que Marx suppose égal au taux de profit général, en situation normale de prix
de production.