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Attika-Yasmine Abbes-Kara
2010/1 n° 15 | pages 77 à 86
ISSN 1273-6449
ISBN 9782753513105
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-cahiers-de-sociolinguistique-2010-1-page-77.htm
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revanche, elle nous incite à aborder le problème autrement car, dans le contexte
algérien, les apprenants sont en majorité plurilingues et c’est l’institution scolaire
ainsi que les dispositifs mis en place par la planification linguistique qui tentent de
produire des locuteurs monolingues pour un besoin d’homogénéité linguistique,
politique et identitaire si bien que les L1 sont occultées et les méthodes
d’enseignement mises en œuvre inadaptés aux réalités du terrain.
En effet, lors de la première année primaire, l’arabe classique est enseigné
comme une langue nouvelle et toute référence à la langue dialectale est bannie
sous prétexte que c’est la langue de l’oral et que celle-ci nuirait à l’apprentissage
de la norme. C'est pour cette raison que la langue arabe imposée comme Sur-
norme et le français normé que l’on tente d’enseigner par la suite et qui ont été
longtemps véhiculés par des universitaires, escamotent les réalités linguistiques
qui prennent et reprennent quotidiennement corps dans les usages composant une
multi-expressionalité vivante. Ainsi, au lieu de tenter d'évaluer la saisie des écarts
par rapport à un système, posé comme idéal et idéel, il serait plus convenable, à
partir de la saisie des différentes productions effectives, de retrouver les
conditions concourant à l'appréhension d'une aire linguistique commune soutenue
et dynamisée par un imaginaire social commun. C’est donc le projet originel d'une
arabisation du système éducatif qui a d'emblée écarté de l'usage l'arabe dialectal,
les différentes variantes du tamazight ainsi que le français parlé algérien en
focalisant sur l'arabe conventionnel scolaire, en ouvrant la voie à l'écart et par la
suite à la distance entre intelligence linguistique sociale et intelligence
linguistique scolaire. De même, le projet de remplacer la langue française par la
langue arabe, qui se poursuit jusqu'à présent sous des fortunes diverses, est donc
essentiellement un processus d'apprentissage d'une langue extérieure à la
sensibilité linguistique algérienne et c'est précisément ce qui pose problème car il
s'agit de savoir dans quelles conditions s'effectue cet apprentissage, dans quels
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revaloriser les langues d’appartenance. Ce qui ne peut s’obtenir qu’en changeant les
regards sur l’objet d’acquisition, sur le bilinguisme, sur ce qu’est une langue, ce que sont
les erreurs des apprenants, les mélanges de langues, etc. Il s’agit donc de déployer des
activités réflexives pour créer et optimiser les conditions psychosociologiques favorables
au développement des compétences bi-plurilingues en relation avec les pratiques et les
représentations. » (2003 : 38).
G. Grandguillaume, qui connait la situation linguistique de l’Algérie, avait bien
perçu cette nécessité : la politique linguistique ne peut se réaliser sans la situation
effective du marché linguistique (1995 : 26). L’expérience menée sur
l’enseignement du berbère a montré qu’enseigner une langue jugée comme
minorée ne suffit pas à la légitimer auprès des locuteurs algériens notamment
arabophones.
Par conséquent, les dispositifs à mettre en place doivent être suivis, dans le
contexte de l’enseignement, d’opérations didactiques qui viseraient à changer les
attitudes et représentations des apprenants et des enseignants car leur impact n’est
plus à démontrer. Ce travail à la fois de types cognitif et affectif doit réconcilier le
locuteur avec son moi afin que ce dernier s’assume comme un être plurilingue et
que son attitude et ses représentations envers les langues soit positive. Il s’agit
d’apprendre à l’élève et à l’enseignant à adopter une stratégie qui consisterait à ne
pas désigner la langue et la culture d’un autre groupe comme inférieures ou
comme supérieures à lui. Comment y parvenir ?
En jouant d’abord sur la construction et les stratégies identitaires des enfants et
des adolescents en milieu scolaire, en valorisant les langues d’origine par la mise
en lumière de leurs répertoires verbaux multilingues, des phénomènes langagiers
inter-langues comme les emprunts par exemple, en développant leur
plurilinguisme et en encourageant les enseignants à avoir des représentations et
des attitudes positives face à l’identité plurilingue.
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langagièrement, née « d’un besoin de… », implique une action finalisée donc une
perspective actionnelle. La conception du langage comme action prise dans un
faire social semble s’imposer. C’est dans cette perspective qu’un élargissement du
concept de « genre de discours » serait pertinent dans l’enseignement/
apprentissage des langues en Algérie. En effet, pour peu que l’institution accepte
et reconnaisse pour genres à part entière le théâtre populaire ou le rap, la voie
serait alors ouverte à la didactique de la variation, à la communication langagière
plurilingue et pluriculturelle.
Proposition didactique
En première année de licence de français, des modules de PSL (pratique
systématique de la langue) et de TEEO (techniques d’expressions écrites et orales)
ont été introduits dans le cursus afin de remédier aux lacunes d’un public
hétérogène. En effet, certains étudiants de l’ENS, issus pour la plupart d’un milieu
rural ou de l’intérieur du pays ont des difficultés à maîtriser la langue française.
De plus, ils développent et intériorisent un sentiment d’insécurité linguistique, ce
qui ne facilite pas du tout le développement de leur compétence à l’oral et à
l’écrit. Pour palier ce problème, nous avons introduit des discours oraux ou écrits,
issus des pratiques langagières réelles, comme facilitateur vers une compétence
langagière normée. La démarche pédagogique que nous avons proposée tient
compte du quotidien langagier des étudiants : présenter par exemple la langue
enseignée dans ses multiples facettes et ses registres en faisant appel à des genres
nouveaux. C’est cette ouverture vers des langues autres que celles
institutionnalisées qui est un préalable à la détermination des stratégies à adopter
pour l’établissement d’une pédagogie qui tienne compte à la fois des jugements
qu’une communauté linguistique porte sur ses langues et sur la langue d’autrui.
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