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BONATOI SENODRUUIDIAXTONOS

FONDEMENTS DU DRUIDISME ANCIEN


Par Michel-Gérald Boutet, 2011 - 2016

« Fais le bien et pratique l’honneur, la vérité et le courage ! »

Druis, le druide

Le druide et sa compagne, la druidesse, sont des membres de la classe sacerdotale des


nemetes « sacrés ». Par ce terme, nous entendons tous les membres de la classe sacerdotale,
sans distinction de spécialisation ou de hiérarchie. Le terme druide est aussi un terme général,
en ce sens qu’il se réfère à ladite catégorie sacerdotale. Donc, le druide, en tant que prêtre, a le
pouvoir d’administrer les activités religieuses de la communauté, d’organiser la dévotion ou
de permettre ou interdire les rapports des hommes avec le sacré. Le druide est le protecteur
de la communauté contre les forces invisibles ou occultes alors que le guerrier ou seigneur est
le protecteur contre les forces visibles ou tangibles.

Selon le celtologue Christian-J. Guyonvarc'h, ce nom cache un sens bien plus précis que l'on
peut deviner par le jeu de mots primaire commis par Pline, c’est-à-dire deruos « chêne » étant
alors assimilé au terme grec δρνϛ (drus). D’autant plus qu’en Grèce, le chêne était l’arbre
sacré de Zeus.

1
- Le druide qui sait : dru-uis, de dru « intense, très » (même mot en français), et -uis / uidsu
« sachant, connaissance », druuidissa au féminin ;

- Le druide qui voit : ueleto-s, « poète », de la racine uel- « voir », donc au sens « voyant » ;
ueleda au féminin ;

- Le druide qui agit : uâti-s, au sens de « technicien, devin », se disait uatuia au féminin. Le
médecin est un uatolegis, uatolegissa au féminin. La sage-femme se nommait idennica.

Le gutuater était le prêtre, l’ecco ou l’ego était le «prêtre de campagne », le curé de campagne
gaulois. Son équivalente était *eccona, « la prêtresse ».

Le silodunios était le philosophe, au sens laïque du terme.


Le druide-astrologue se disait retlodruuis, littéralement : « druide des étoiles ».

Druuidiaxto < druuidiacto, n.c.f. le ministère des druides ; druuidiceto, n.c.f. le druidisme.

La langue irlandaise a justement conservé avec le terme druidh, cette idée péjorative du fakir
magicien ou conjurateur de sorts, mais oublions donc cette fausse idée !

1- OINOS – UN

Oinalio, la « Monade »;

Arimos, le « premier, le numéro un »;

Oinantio, « l’individualité, l’identité particulière »; Oinatios « l’entité »; Oineto « la chose


unique, la merveille »; Oinetos « singulier »; Oinos, « seul, unique », Oinotamos, «
grandement seul, unique ». Oinacos « rassemblement, réunion »; Oinion « le jeune »;
2
Oinogustios « le choix unique »; Ointu, Ointus « unité, cohésion »; Oitocci-os/-a « assermenté
»; Oitos « serment ».

Les druides étaient essentiellement monistes, jamais monothéistes.

Le monisme est le système selon lequel le monde matériel et l'essence spirituelle des êtres et
de la Divinité suprême sont constitués d'une seule substance, et pour lequel l'objet auquel
s'applique la pensée est un (par opposition à dualisme, à pluralisme). La Monade n’est ni une
Divinité personnelle ou individuelle, mais répond à l’essentielle substance de l’Être en tant
que Réalité cosmique. Il ne faut donc pas confondre MONISME et MONOTHÉISME! Qu’on
se le dise, la structure théologique fondamentale de la religion proto-indo-européenne est de
pensée moniste. L'hypostase est une divinité subordonnée de l'Être suprême, mais lui étant
substantiellement distincte. C'est-à-dire de même nature, puisque composée de la même
essence appelée monade, dont tous les êtres sont composés. Et comme ces hypostases
dépendent de l'absolu, étant relativement dépourvues d'absolu, demeurent hélas incomplètes
et approximatives. C'est pour cela que ce monisme est qualifié de relativiste.

Deuocaro, la dévotion

Les Celtes comparaient l’âme à un cygne. Et comme pour les autres traditions indo-
européennes, la tradition grecque avec Zeus et Léda et la tradition hindoue avec Brahmâ et le
cygne, l'âme et la dévotion étaient comparées à cet oiseau magnifique.
Ainsi, en celtique ancien l'âme individuelle d'une personne vivante était appelée anatmon
alors que celle d'une personne désincarnée était appelée anation.
En termes zoologiques, le cygne siffleur se disait Elouios ou Elaios alors que le cygne muet se
disait elarcos ou elercos. Chacun de ceux-ci est la représentation symbolique, l'allégorie, de
l'âme individuelle, incarnée ou désincarnée.

Le souffle, l’âme L’esprit, l’âme du défunt


Elouios = Anatmon Elarcos = Anation

L’esprit se disait anatios, l’âme anatia ou anatis (au sens figuré) et anatla, le souffle en tant
que respiration.

Les métamorphoses de la fée Caer, de femme en Cygne, passant la moitié de sa vie soit
femme ou cygne rappellent les états de veille et d'éveil des humains. Cette transformation
symbolise la relation d'amour entre la divinité et le mortel ainsi que la métamorphose de
l'âme par l'esprit divin.
La tradition védique a recours au terme rasa qui exprime le doux sentiment qui marque la
relation intime unissant chaque être individuel à l'Être suprême. On en compte généralement
cinq : le rasa de neutralité, de la servitude, d'amitié, d'affection parentale et amoureuse. Rasa
se disait deuocaria (dévotion - pieuse, divine).
Ce beau motif qui suit tiré de la mythologie celte, du récit de l’Aislinge Óenguso, est en tout
point semblable à celui de Radha, ses gopis (vachères) et le dieu Krishna :
3
« Aonghus s'empressa vers le lieu comme s'il avait des ailes à ses pieds. Là au bord de l'eau, il
épia cinquante fois trois filles parées de chaînes d'argent. C'était les vachères qui gardaient le
troupeau de la Boann.
Isolée d'elles était la demoiselle qui hantait ses rêves, celle qu'il avait tant cherchée depuis
trois longues années.
Elle avait son propre collier d'or finement œuvré ».

Amen ou Awen ?

Awen est la forme tardive du gallois médiéval aguen. Cette forme est attestée dans un écrit de
Gildas (né vers 500– mort en 570) et dans l’Historia Brittonum de Nennius, un texte latin du
VIIIe siècle des alentours de 796 où il est écrit en latin : Tunc talhaern tat aguen in poemate
claret. « Talhaern, père de la muse était renommé en poésie.» Ce mot servait donc à désigner
le principe de l’inspiration poétique et de son allégorie, la muse des bardes et des poètes.
Cependant, dans l’antiquité celtique, le terme avait un sens bien plus large : Aguen,
déformation d'Auentia « loyauté, droiture, inspiration (mentale)». Bref, la déesse Auentia en
tant que muse des poètes.

Puis, Edward Williams (Iolo Morganwg), par la suite dans son Barddas (p. 51) en détourna le
sens pour en faire un calque de l’Amen hébreu.

« And God imparted His protection to this secret, and gave Menw a very discreet understanding of
sciences under this His protection, which understanding is called Awen from God; and blessed for ever
is he who shall obtain it. Amen, so be it.»

«Et Dieu donna à ce secret sa protection, et sous sa protection fit don à Menw la discrète
compréhension des sciences; de ce qui est appelé la compréhension Awen de Dieu. Béni à
jamais celui qui l'obtiendra. Amen, ainsi soit-il. »

Évidemment, ce calque traduit mal le sens du mot hébreu Amen (<‫ אָ מֵן‬: ɑːˈmɛn) qui veut dire
« en vérité » ou « qu’il en soit ainsi ». Ainsi, Awen ne peut en aucun temps traduire Amen.

Avant l'arrivée du moine Patrick en Irlande, deux des druides du haut roi avaient prophétisé
à Tara :

« Un nouveau mode de vie arrive bientôt de l'autre côté de la mer qui sera sans pareil par oppressif
enseignement, qui précipitera la chute des royaumes, fera périr les rois résistants, bannira toutes les
activités du druidisme et régnera sans fin ».

«Quand Patrick se présenta devant le roi suprême (Laoghaire) et quand celui-ci remarqua les
étranges tonsures, les robes à capuchon et la crosse crochue, il fut immédiatement frappé de
peur (la crainte étant la pire faute du guerrier).

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Laoghaire se souvint que ses druides lui avaient prédit leur arrivée plusieurs années
auparavant :

Les têtes en herminette viendront par mer furieuse démontée,


Dans leurs manteaux à tête troués
Avec leurs bâtons crochus.
Ils prononceront des malédictions
Leurs autels à prononcer jugements
Dans le coin arrière (Ouest) de la maison,
Les gens de leur suite répétant amhàin, amhàin
C'est-à-dire un seul, un seul ».
(Mac Neill, Eoin, Life of Saint Patrick, d’après Whitely Stokes, Lives of the Saints from the Book of
Lismore, 1890.)

Bref, le terme Amen écrit amhàin en gaélique médiéval était pris tel quel et n’était pas
remplacé ou traduit par un équivalent celtique de type « ainsi soit-il » ou « droiture, ou
inspiration (poétique) ».

Les Semnothées (< semnotoi « vénérables «) et les druides

Diogène Laërce, dans son introduction des Vies et doctrines des philosophes illustres, verset 1 :

« II y a des auteurs qui prétendent que la philosophie a pris naissance chez les étrangers : Aristote,
dans son Traité du Magicien, et Sotion, livre XXIII de la Succession des Philosophes, rapportent que
les inventeurs de cette science ont été les mages chez les Perses, les Chaldéens chez les Babyloniens ou
les Assyriens, les gymnosophistes chez les Indiens, et les druides, ou ceux qu'on appelait semnothées,
chez les Celtes et les Gaulois. Ils ajoutent qu'Ochus était de Phénicie, Zamolxis de Thrace, et Atlas de
la Libye ».9

Les prêtres des Galates, dits semnothées par les Grecs, dénoncent ces Galates qui se
convertissent par le baptême au christianisme de Paul et, à son tour, Paul s'insurge contre ces
mêmes Galates baptisés qui, encouragés par les prêches des prédicateurs juifs de Pierre, se
soumettent à la loi juive et se font circoncire. Dans deux de ses lettres aux Galates, Paul s’en
prend aux païens superficiellement convertis et leur reproche de ne pas comprendre que
l’accomplissement de la loi (juive) n’est pas un plus pour leur foi première païenne, mais au
contraire, son anéantissement.

"Il n'y a plus ni Juif ni Grec, il n'y a plus ni esclave ni libre, il n'y a plus ni homme ni femme ;
car tous vous êtes un en Jésus Christ.
Et si vous êtes à Christ, vous êtes donc la postérité d'Abraham, héritiers selon la promesse."
(Paul, épître aux Galates, 3.28, 29)

Paul à Céphas devant l'assemblée chrétienne d'Antioche : "Si toi qui es Juif, tu vis comme les
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païens, et non à la juive, comment peux-tu contraindre les païens à judaïser ?" Et il ajoute :
"Nous sommes, nous, des Juifs de naissance et non de ces pécheurs de païens…"

"O Galates sans intelligence, qui vous a ensorcelés ? À vos yeux pourtant ont été dépeints les
traits de Jésus Christ en croix. Je ne veux savoir de vous qu'une chose : est-ce pour avoir
pratiqué la loi dont vous avez reçu l'Esprit, ou pour avoir cru à la prédication ? Êtes-vous à ce
point dépourvu d'intelligence, que de commencer par l'esprit pour finir maintenant dans la
chair ? Est-ce en vain que vous avez éprouvé tant de faveurs ? Et ce serait bel et bien en vain.
Celui donc qui vous prodigue l'Esprit et opère parmi vous des miracles, le fait-il parce que
vous pratiquez la loi ou parce que vous croyez à la prédication ?

L’idée que se faisaient les Celtes de la religion commence à peine à se dégager des nombreux
et volumineux témoignages épigraphiques, jadis indéchiffrables, mais combien riches en détail.
Pour les Romains les dieux n’existent que dans l’esprit des hommes et par les cultes qui leur
sont rendus. Ou encore, que la société humaine est le miroir de l’ordre divin fondé sur la
dialectique de l’échange où le pivot central est l’État. Les Celtes désignaient ce point de bascule
par le terme anauo, l’harmonie de bonne entente.

Par les écrits des auteurs de l’Antiquité, nous avons plusieurs indices qui nous laissent croire
que les druides enseignaient une forme de monisme proche de l’athéisme. Citons un passage
de Strabon (Les Ibères, Livre III, chapitre III, verset 16) sur les croyances des Celtibères qui
l’affirme clairement :

« Cette coutume-là, à vrai dire, et celle de coucher sur la dure existent aussi bien chez les Celtes
que chez les Ibères. Suivant quelques auteurs, les Callaïques sont athées; mais les Celtibères et
les peuples qui les bornent au nord ont une divinité sans nom, à laquelle ils rendent hommage
en formant, tous les mois, à l'époque de la pleine lune, la nuit, devant la porte de leurs maisons,
et chaque famille bien au complet, des chœurs de danse qui se prolongent jusqu'au matin. Les
mêmes auteurs racontent, au sujet des Vettons, que les premiers d'entre eux qui mirent le pied
dans un camp romain crurent, en voyant les centurions aller et venir pour se promener, que
c'étaient des fous et voulurent les reconduire à leurs tentes, ne concevant pas que des hommes
pussent faire autre chose, quand ils ne combattaient pas, que de rester en place tranquillement
assis ou couchés. »

Ce commentaire d’Albert Grenier (in Les Gaulois, p. 230) en dit long sur l’idéologie d’abstraction
chez les Celtes :

« Cet art abstrait, pour ainsi dire, et séparé du réel est animé d'un mouvement désordonné; il
ne surprend pas sa fantaisie; il n'en réussit pas moins à composer des motifs divers dont il joue
avec virtuosité. »

Ou encore, suite au pillage de Delphes par l'armée de Brennus en -279 :

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« Ce que l'on sait de leurs idées religieuses porte en effet à penser qu'ils n'ont prêté que très
tard sous l'influence gréco-romaine la forme humaine à la divinité. L'anthropomorphisme grec
est une conception qui leur était primitivement étrangère. Lorsqu'à Delphes ils virent la statue
d'Apollon enfermée dans son temple, ils s'en étonnèrent et rirent beaucoup, relate Diodore de
Sicile. Il est inutile de supposer chez eux, comme chez les peuples sémitiques, une interdiction
religieuse proscrivant les images. Nous croyons plutôt qu’ils n’en avaient pas l'idée. Une pierre
dressée, un arbre remarquable, peut-être aussi, le chenet garnissant le foyer, pouvait être le
siège de la divinité invisible et sans forme. C'est ce que César a pu vouloir indiquer en parlant
d'innombrables simulacres. » (Albert Grenier, Les Gaulois, p. 231-2)

Brennus avance maintenant à travers la Grèce en pillant tout ce qu'il n’avait pu trouver, mais
dégoutté de ce petit butin, il veut s'en prendre à Delphes où les trésors de toute la Grèce passent
pour être rassemblés. Les historiens accusent évidemment Brennus d'impiété: mais celui-ci
répète à qui veut l'entendre que « les Dieux n'ont pas besoin de trésors puisqu'ils les prodiguent
aux hommes (Justin, XXIV, 6) ». Ce raisonnement de Brennus est conforme à son attitude le
jour où il pénètre dans un temple : il se met à rire en observant que les Grecs représentent leurs
dieux sous forme humaine (Diodore de Sicile, frg. XXII.).
(Jean Markale, Les Celtes et la civilisation celtique, p. 96)

Bref, les Celtes percevaient les dieux comme des êtres désincarnés et lumineux, des formes
pensées abstraites. Voilà une conception archaïque qui nous ramène à l’idée fondamentale
indo-européenne voulant que ces entités soient littéralement des « êtres de lumière ».

L’Être suprême

1) Le Principe psychique universel unifié qui s’oppose à la Nature, Andeganna, « l’essence


propre » (semblable à Prakriti, matière et nature), dans le système dualiste de la Racatiia /
Racatio, l’opposition (semblable à Samkhya, philosophie basée sur le dualisme opposant les
principes fondamentaux de l’âme et la potentialité matérielle).

2) Adgeneto, hérédité, nature ou Damniio, Matière, mais aussi Adgneto,


Esprit et Pensée, respectivement, et Genetlo, le genre, Genetlon, le sexe, les principes mâles et
femelles. Gnatu est la filiation, naissance alors que Gnada est l’aspect, la forme et Gnatha ou
Gnatho est le savoir, la connaissance.

Ambignauto est la pure Conscience non manifestée, par opposition à Andeganna, l'essence
d’Ambiluceto, la manifestation (d’entité) à travers laquelle les univers / dimensions se
déploient;

3) Eco / Ego, le Moi, l’Égo, le véritable Moi, l'âme qui réside dans le corps physique; alors que
Sue-Oinon est le Soi.

4) Conuidta / Conuidtu > Coueta, la Conscience, Uxsama Conuidta, la Conscience suprême,


substrat de toutes les opérations d’Uolaton, la substance (au sens neutre et général).

7
La Manifestation

Gutton Uxellimon, la Divinité suprême, Gutton « Divinité, Verbe, Voix » + Uxellimon «


Suprême (au superlatif) ». Il est alors synonyme d'Être suprême, Uxellimos, Le Suprême,
d'Âme suprême ou universelle (semblable à l’Adi Purusha).

Arimathes, « Le bien primordial, est la Personne-archétype (semblable au Parama Purusha) ;


Dits Ater, le Père de l’Anéantissement et Dagos Deuos est le Bon Dieu, le Dieu Pourvoyeur
(personnalisé).

Bref,

Monisme non dualiste dans les trois aspects de l’Absolu:

1. Uxellimon, le Très Haut (Brahman)

2. Dis Ater, le « Père de la Dissolution » c’est-à-dire Qendos/Pennos Andumni < Pen Annwn,
Chef du non-monde, le Monde des âmes (Paramàtmà).

3. Arimathes, le Bien Primordial (Bhagavàn);

Il s’agit bien d’un état absolu incluant un déisme qui se veut moniste et cosmique, mais non
monothéiste. Pour le Dis Ater gaulois, la tradition irlandaise donne un Tat Mac Tabharn issu
de Tabharn, l’océan primordial. On le traduit généralement comme «Père Fils-de-l’Océan»,
sous-entendant un Tatis Tobarnios, «Père du Jugement», car Tabh, « océan », est d’étymologie
germanique plutôt que celtique. Il s’agirait plutôt de Touernanos, le Suprême », ce qui le
rapproche de Taranos « Tonnerre » ou Toranis (> Tuireann) ou d’un Albiiorixs, «Roi de la
Voûte cosmique ». Ce qui, en fait, souligne son côté inquiétant Lero, «le Flot», est quant à lui
semblable à Nàràyana, dieu des eaux primordiales, un autre aspect du Brahmà.

Anauo « harmonie », dedma > dema « statut »;

L'Anauo « équilibre »
L’Art poétique des jeux des mots, Anauo, la bonne entente

Les sages de l’Antiquité occidentale ainsi que les védantistes de l’Inde avaient recours aux
jeux de mots afin d’extraire le sens caché des syllabes et des mots. Il va sans dire que les
druides grammairiens pratiquaient avec une certaine manie cet art sacré des jeux de mots et
des calembours. On pense que cet art poétique par assonances se disait anauouidtu dans la
vieille langue celtique. Le terme anauo « bonne entente, harmonie, poésie » se prêtait à un jeu
de mots par l’adjectif anau-os/-a/-on qui a plusieurs sens dont : « défectueux » et « fortuné,
aisé ou riche ». Puis, le contraire d’anauos était ananauos « discordant ».
Jeu de mots se dit imeartas en gaélique moderne. Ce mot a pour racine le celtique ancien
ambiratio ou ambirateia qui à l’origine voulait dire « réflexion » et « méditation ».
8
Pendentif en os gravé de Glozel avec la mention ΔΜΛ = DeMA.

Le Dema « le précepte, la norme, le statut »

Le terme gaulois dema, le vieil irlandais dedm, le cymrique deddf sont tous issus de la racine
celtique ancienne *dedma (n. c. n. gen. sg. dedmatos) puis du proto-indo-européen
*dheḫdhḫmā « statut, déposition ». Terme, comparable au grec ancien θεσμός (thedmos) «
statut ».

Dema, donc, avait à l’époque de l’Antiquité celtique le sens de « statut, convention, us codifié,
règle coutumière » et/ou de « tradition règlementée ». En gaélique moderne, deimhe, a pris
le sens de « défense » et de « protection » et sa variante deimhinn a le sens de « vérité, véracité
ou certitude ». Afin de retrouver les comparables du terme dans les autres langues, il faut
remonter à la racine proto-indo-européenne *dhe- / *dhēḫs- « porter, tenir, soutenir, placer »
qui nous a livré :

En gaulois, la formule verbale dede « il ou elle a placé »;

En tokharien A : tā-, tös-, tas- et tokharien B : tes- « déposer, placer »;

Dádhāti, v. « il place» en vieil indien et dha-m, dhā́man- « statut, loi, demeure, troupe,
multitude, foule, etc., dha-tum « allumé », dhánaḫm « sacrifice, offrande »;

Detas en vieux persan « calme, établi »;

Puis en latin, abdere « mettre de côté, retirer, ranger», con-dere « assembler, joindre, fonder,
établir, construire, etc.

Malgré qu’il soit, à première vue, semblable au terme sanskrit dhārma, dema < dedma est
d’une tout autre racine. Le terme dhárma vient de la racine proto-indo-européenne *dher- /
9
dherǝ- qui a aussi le sens de « tenir » ou de « soutenir », bref, on y devine le concept de «
soutient », mais pas celui du « statut » au prime abord. En fait, dhārma- (dharmán- « porteur»
ou dhárman- « soutient ») est de même étymologie que le latin firmus « ferme, solide, résistant
» par la mutation de la lettre d au f (d- > f-). Dans les autres langues indo-européennes on
retrouve le lithuanien dirzmas « fort » et l’adjectif gaulois dir-os/-a/-on « dur, ferme, fort ».
Donc, le dhārma, pris au pied de la lettre, est une entreprise forte, solide, durable, valide ou
moralement forte. La tradition védique, cependant, lui accorde un sens plus philosophique ou
légal englobant tous les aspects de la vie morale ou du bon ordre de la société, voire de
l’univers. Ainsi, dhārma, par sa variante dialectale Pali dhamma (vieil indien dhaman- « loi,
habitation, troupe, multitude, foule, etc.» et avestique persan daman, « site, créature»),
cacherait un paronyme ancien remontant à la première racine proto-indo-
européenne *dheḫdhḫmā « statut, déposition ».

Et comme le remarque Peter Berresford Ellis (in A Brief History of the Celts, p. 174), les
Irlandais, qui ont conservé cette notion de la vérité liée au domaine des dieux, disent toujours
lors du décès d’une personne Tá sé/sí in áit na fhirinne anois « Il ou elle est maintenant dans le
lieu de vérité ». Le statut du dedm sous-entendait aussi buan fírinne (< *buuana uiriona), « la
vérité durable » dont l’antithèse était neam fírinne (< *namantia uiriona), « la vérité hostile ».

Terme gaélique Étymon celtique Sens


fíor uira vrai
fírinne uiriona sincérité, véridique
fír uiros homme

Ce qui en termes latins, s’exprimait par la triade latine virtus « vertu », veritas « vérité » et vir
« homme». Veritas facit legem « La vérité fait la loi ». Le vir (< uir « homme » ou « être humain
en général ») était au sens romain du terme, l’homme qui jouait un rôle dans la cité. Il était
donc au sens légal, une personne, une personnalité ou un personnage, un mari, un époux et
un être pieux. Le pieu, pius, reconnaît et remplit, à la maison comme au temple, tous ses
devoirs envers les dieux, ses parents, sa cité et sa patrie. La pietas romaine de l’époque
d’Auguste s’exprimait par le pius uir, c’est-à-dire la piété de celui qui savait démontrer son
attachement à la familia, de la gens et de la tota Roma. Le pius uir était donc celui dont toutes
les actions étaient placées sous le « regard des dieux ».

Le dedma divinisé

Le concept du dedma est une notion théologique de base trop importante pour ne pas avoir été
mise sous patronage divin.

Le maître et seigneur du dedma est sans contredit Lugus / Lugos, puisqu’il est de toutes les
fonctions, il en est à la fois le concepteur, le défenseur et l’artisan. Lugus, qui a le bras long et
la main ferme, en tant que juge-arbitre, limier et pourvoyeur, il est garant de la droiture et du
bon ordre des mondes, du royaume des dieux et des hommes. Par Lugios, le serment, tous
sont liés. Ainsi, Lugos-Desumies, « Lug le Droiturier » est le seigneur du Dedma.
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Bissiet Luge dessummiis Luge
Dessumíis Luge dessumiis luxe
« Soit à Lugus le droiturier, droiturier à Lugus, droiturié le jaune noirâtre ». (Inscription de
Chamalières découverte en 1971 à Chamalières, Puy-de-Dôme)

Lugus a aussi une série de doublets, d’alter ego et d’hypostases. Parmi ses nombreuses autres
désignations en lien avec le bon ordre du monde, nous avons Albiiorixs, le Roi du Cosmos,
Areuernos, (le Bon primordial), Nodens (le Ploutocrate), Rigisamos (le Grand Roi), Samonios (le
Semeur, du Rassemblement), Trianipos (au triple visage), Tourenos (Dieu de la Chance) et
Uisucios, (le perspicace).

En Irlande, Demna (écrit aussi Deime ou Deimne selon les récits) est le nom original du dieu
héros Fionn Mac Cumhail. Demna est celui qui retrouve le sac au trésor des Fianna et qui
obtient la sagesse infuse après avoir goûté à la chair du Saumon de la Connaissance préparé
par son maître, le druide Finegas. Demne devient donc Fionn « le splendide, le blanc » suite à
son initiation druidique. L’étymologie du nom Demna est du même ordre que celle du terme
dedm. Demna, en vieil irlandais, a évolué vers la forme gaélique moderne deimne > deimhne
signifiant « assurance, certitude » ou « vérité ». De(d)m-na, donc, est la forme nominative du
terme neutre dedm... Ce qui en celtique ancien donnerait *Dedmanos.

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2- DUO, UO – DEUX
Uostos « Subordonné, hypostase, inférieur »;

Duô « accroitre, grossir »; Duommios « démuni, pauvre »; Duorocustos « portier »; Duoron «


porte »; Duostis « frénésie »; Duostu « fureur »; Uo « sous »; Uocania « louange »; Uopiscos «
jumeau survivant »; Uosris Aurore, Levé du Soleil »; Uostios « Séjour »; Dueiassa, Dueista «
paire »; Dogustos / Dugustos « choix »; Emno « paire de jumeaux; Emno « jumeau »; Emni «
jumeaux ».

Deuon, Deuos, Deua, les « êtres lumineux », les « dieux »; Deuacto « (concept de) divinité »;
Diuiciaxto « théologie ».

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La Plénitude et la Vacuité

Selon Iolo Morganwg, "Ned de Glamorgan", alias Edward Williams, Cylch y Ceugant,
désignait le « Cercle de l’Infini » sans limites ou frontières. Il s’agit en fait d’un savant jeu de
mots comme seuls les druides savaient commettre :

Ceugant < Couocanton (de Couo + caneto = « absolu, complète / intégralité »), c'est-à-dire «
Plénitude » au sens d’achèvement et de perfection ; Couocanto « Intégralité » ; Couocanton «
Univers », « Cosmos ».

Ceugant < Couiocanton (de Couios + caneto = «creux / intégralité »)


= « Vacuité ».

Les Hypostases ou Avatars

Le terme Uostos > Uossos > Uassos (cf. sanskrit vaishya) désigne un subordonné, hypostase,
au sens littéral de celui qui est « sujet à » quelque chose ou quelqu’un.

1. Les hypostases sont les émanations ou formes sujets issues de la psyché cosmique du
Guton Uxellimon. La première manifestation étant Dits Ater, le Père de l’Anéantissement et
de la Dissolution. Selon les Druides (César in Guerres des Gaules, Livre VI, chapitre 18.)
toutes les âmes en descendent :

« (...) Les Gaulois se vantent d'être issus de Dis Pater, tradition qu'ils disent tenir des druides.
C'est pour cette raison qu'ils mesurent le temps, non par le nombre des jours ; mais par celui
des nuits. Ils calculent les jours de naissance, le commencement des mois et celui des années,
de manière que le jour suive la nuit dans leur calcul (...) ».

Lugus « la Lumière » est : la royauté, roi du monde (c.-à-d. des trois mondes) et des dieux, la
personnalité divine ; le Dieu du peuple. Ogmios « l’Encocheur » est : la guerre et la violence,
la magie, tout ce qui est sombre, déréglé, chaotique, sinistre.

Bref, chacune de ces divinités définies en tant qu’hypostases se rapporte à une divinité
supérieure essentielle qualifiée de Brahman chez les Indiens, et d’Uxellimon chez les Druides
Antiques. Il faut alors voir ces trois personnalités comme des extensions de la divinité
suprême. Ce concept, pas très différent de la trimurti a été qualifié de monisme relativiste par
les celtologues. « Au départ, le vieux terme IE *upéri « au-dessus ».
Celui-ci a engendré entre autres upéri en sanskrit, upairi en avestique, super en latin, hyper
en grec, uber en germanique (d’où über, over etc.) et *uper en protoceltique devenu uer après
chute du ‘p’.
Dans les dérivés celtiques on a eu to-ueres > *tod-uperes « ce qui (est) au-dessus ». À son
tour ce to-ueres a généré la préposition tares « au-dessus de, par-dessus », d’où encore thar
13
dans les deux langues gaéliques d’Irlande et d’Écosse et tra en gallois et en breton.
Ce tares < to-ueres nous éclaire sur l’étymologie de Taranos : To-Ueranos que valident deux
recoupements : Taranos est bien le « dèuos tares papom dèuom,» le dieu au-dessus de tout
dieu.
Le (to) Ueranos est ainsi parallèle à l’Ouranos grec d’où l’Uranus latin et au
Varuna védique, encore que ce dernier résulte d’un jeu de mots (coalescence) de deux racines
IE exprimant respectivement des notions de « au summum » et de « lien ».
Cette analogie paronymique avec Uranus présente un intérêt comparatiste en ce sens que le
dieu mythologique gréco-latin, ciel personnifié et le plus ancien des dieux de ce panthéon
était le père de Saturne/Kronos et le grand-père de Jupiter,
Pluton, Neptune, etc.
Pour les peuples celtophones dont l’immense majorité des éléments ignorait tout ou presque
des spéculations raisonnées des Druides de haut niveau, le polythéisme était comme une
évidence non mise en doute ; par conséquent les divinités devaient avoir des noms propres et
des épithètes utilisées par les Druides finissaient par être connus dans les milieux profanes le
devinrent automatiquement et se sont trouvés attestés en épigraphie, le plus souvent avec
latinisation de leur désinence déclinable dans les pays annexés de l’Empire romain.

Emnoi, les Dioscures, les Jumeaux

La première hypostase divine engendre le couple, les entités qui arrivent en paires, qui sont
en fait les manifestations doublées, puis triplées de l’Être originel (le Dis Ater gaulois, un
équivalent du Purusha indien). Les Dioscures gaulois sont tantôt confondus à Mars et
Mercure, tantôt Mercure et Apollon, par les tenants de l’interprétation romaine, dont César.
En gaule : Momoros (Apollon), le Cygne, et Atepomaros (Mars), le Cavalier, étaient les
assesseurs de Lugus (Mercure), le Corbeau. On les appelait aussi Deuonnos (à caractère
divin) et Dinomogetimaros (colosse protecteur).

L’Opposition

Lugus, à l’exemple d’Indra qui tue le dragon Vrtra, décapite Balor (Balaros « Luminescent » /
Beloros « Meurtrier »), le roi des Titans / Démons Fomoire.

Les Uomorioi, les « Subaquatiques », sont une race de Telkhines semblable aux Titans. Ayant
un manque physique ou moral, ce sont des êtres imparfaits qui sèment constamment
l’opposition et le désordre, la soumission et la maladie.

Les Uomorioi (sing. Uomorios > Fomoire) sont donc synonymes de :


uo-mâros « sous le doute et l’anxiété »;
uo-mâros ou uo-mâruo « sous la mort, le décès »;
uo-mori « sous cauchemar ».

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Le couple divin

Le dieu, Deuos, la déesse Deua (neutre Deuon), sont principalement des êtres de lumière :

*Dei- « lumière » et -wos « agent ».

Les dieux de l’état-major du panthéon celtique viennent donc par couple masculin et féminin;
la forme neutre, Deuon, désignant le respect et la distanciation face à la divinité
transcendante et immanente.

Gaule :

Taranis / Sucellos / Esus (Jupiter) + Nantosuelta

Epona / Rigantona (Minerve) + Belenos Atepomaros

Ogmios / Loucetios / Uisucios (Mars) + Nemetona / Uisuia

Lugus / Artaios (Mercure) + Rosmerta / Artio

Grannos / Belenos / Maponos (Apollon) + Sirona

Gobnios / Ucuetis (Vulcain) + Bergusia

Irlande :

Dagda / Eochaid / Ruadh Rofessa + Morrigù / Boand / Etain

Morrigan / Morrigù + Ruadh Rofessa

Ogma + Etain (mère)

Lugh / Mananann mac Lir + Dechtiré / Fand

Dian Cécht / Oenghus mac Óc + Etain (fille) / Caer Ibormaith

Goibniu + Brigit

Bretagne insulaire :

Bêli Mawr / Urien / Bran + Dôn / Modron

Morgane / Rhiannon / Arianrhod + Pwyll


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Owain + Luned

Llew / Mnawyddan + Blodeuwedd

Mabon / Pryderi + Cicva

Gofannon + ?

Le couple humain ancestral

Le couple ancestral de la plus ancienne mythologie celtique est difficilement cernable. La


mythologie indo-européenne devait retenir le géant *Bhelos Manus et sa compagne *Dhenwa
(*dh[e]n(w)-a > dânu-a « courant puissant, torrentiel ») comme couple ancestral humain. La
forme conjointe des deux noms se retrouve dans le kalash Balomain < *Bhelos-manus «
Brillant-Homme ». *Dhenwa, les eaux célestes, est aussi la *Dg'hem-Mater « Mère Terre » ou
*Démos Mater « Mère du peuple ou de la terre », c’est-à-dire Démétér, appelée « mère de
l’orage » par les Grecs ou simplement Mater « Mère », gaulois, Matra, phrygien, Ma. Hittite
Dagan-zipas « Esprit de la terre » vieux russe, Mat' syra zemlja « Mère de la terre », de :
*Maya «Stupéfiante, Ensorcelante ». Elle s’accouple avec *Deiwos, le Dieu Ciel, et donne
naissance aux phénomènes naturels et aux êtres vivants incluant les humains. Incidemment,
la racine i.e. *dg'hem- est à la base des termes latins humus, « terre » et homo, « homme ».
Donc, les premiers humains, issus de l’humus de la Terre, à l’exemple des premiers sages du
Septentrion, sont au nombre de sept. Il s’agit des géniteurs des premiers peuples, appelés
Manava en sanskrit et Maine en gaélique.

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3- TRIS – TROIS

Triagos « trident; Trianis « triade; Triaton « Mer »; Tribannos « trois rayons » (symbole
druidique); Tribantis « à trois pointes »; Trilunis « à trois formes; Trigaranos « à trois grues »;
Trigenacos « triangle »; Trina / Trena « effort, lutte »; Trinos « héros »; Trisauai Atertai, les
trois divinités de la trinité ou trimurti.

Les bases métaphysiques du druidisme ancien, de l'hellénisme, du védisme et du


bouddhisme sont donc fondamentalement les mêmes. Les enseignements reposent sur les
mêmes principes ou conventions pris comme conventions et non comme dogmes. La
tripartition, il va sans dire, joue dans ces traditions, dites aryennes, un rôle structurant. Ces
phénomènes sont toujours classés dans l'ordre trinitaire, c'est-à-dire, selon la classification par
trois : physique, mentale, spirituelle ou petite moyenne et grande, par exemple. Chacune de
ces composantes est dépendante de la première et puis de la seconde. Ces phénomènes sont
aussi conditionnés par d'autres attributs selon certaines conditions, causes et concepts
inhérents au paradigme indo-européen.

Le multivers, les trois Mondes

Le Cosmos, non pas l’univers, mais le multivers perçu comme deux bols jantés sur une roue
ou disque formant une sphère et tournant sur un axe (axis mundi), se divise en deux moitiés.
À son tour, le Cosmos est réparti en trois mondes : monde d’en haut, monde du milieu et
monde d’en bas. À chacun de ces mondes est associée une qualité lumineuse selon les trois
couleurs de l’ordre cosmique :

- *Dyew-, « blanc » : le jour, le monde d’en haut ;

- *Regwos-, « rouge » : l’aube et l’aurore, le monde du milieu ;


- *Temó-, « sombre » ou *Dhuw-, « noir » : la nuit, le monde d’en bas.

À leur tour, chacun de ces mondes est divisé en trois parties. Ainsi, neuf régions ou « étapes »
séparent le niveau médian du ciel et des Enfers dans lesquels l’Arbre cosmique prend racine.
Aussi appelé Axe ou Étai, il relie la terre et soutient la voûte céleste. Chez les Hittites, une
échelle à neuf marches, correspondant aux neuf étapes, relie la terre au ciel. Donc, du monde
des humains à celui des dieux. Selon cette dualité d’être, le monde est conditionné par les
deux états du plein et du vide en tant que principes physiques ou métaphysiques de vacuité
et de plénitude (lettre d’Épicure à Pythoclès). Seule la lumière prise au sens métaphysique
semble transcender ces deux conditions.

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Les Trois Mondes (Bretagne insulaire) :

Gwynfyd < Uindobitu « le Monde blanc ou splendide » ; la voûte céleste, le monde supérieur.

Byd < Bitu, Bitus « le Monde du vivant » ; la sphère ou plan terrestre ; le Monde du milieu.

Annwn < Andumnon « le non-Monde » ; la coque ou l’abîme ; le Monde inférieur.

Les Trois Mondes (Irlande) :

Tir na nÓg < Tira Ogias « Terre de la Jeunesse, de la Virginité (au sens figuré) ;

Bith < Bitu, « le Monde du vivant »; Domnu < Dumno, Dubnos « le monde des profondeurs ».

Le Sid > Sidh, Sidhe, de la racine celtique sidos « résidence » ou « paix », désigne la résidence
des dieux dans l’au-delà marqué par un point réel, physique et géographique. Il s’agit de la
même conception que celle du loka dans le védisme indien.

Les trois Fondements

Les trois Fondements ou appuis du druidisme sont :

Aendia < Andedeuos « Super Dieu » ; Andedios « Super Lumineux » ; Andios « super, grand,
fameux » ; Andatis « Supérieur ».

Trendia < Trenodeuos / Trinodeuos « Dieu de la Lutte, Dieu Héros » ;


Trenatis « Agent de force supérieure, de puissance victorieuse »; Trinos « héros ».

Caendia < Candodeuos « dieu de source lumineuse, Astre Dieu, Dieu Blanc,
Candide » ; nom du dieu Candiedos « Blanc immaculé ».

Ces théonymes gaéliques ont une sonorité proche de plusieurs divinités du panthéon
celtique : Ande, la « super déesse », Andecamulos « le super dynamique », Ander, le dieu «
bovin », Andescoxs le « super terminateur », Andesus le « super bon », Andinos, l’ « infernal
», Andlis, la « super », Andosis ou Andossos, l’ « invaincu », Andouna, l’ « immortelle » ;
Candiedos, le « blanc immaculé », Candua, la « brillante », Trinos « héros »;
Trenfer < Trenouiros « homme fort », un des surnoms d’Ogma et Trendorn < Trenodornios «
à la main forte ».
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À savoir que chacune de ces divinités incarne une qualité spécifique :

Andestatu « condition, rang social » ;

Trena « force supérieure, puissance victorieuse, effort dans la lutte ».

Candiedo « blancheur ».

Ou encore un aspect de la nature, du cosmos :

Andeganna « nature » ;

Cando « astre » ;

Trinuxtio « prédominance », le temps du passage du soleil dans une constellation ou un signe


du zodiaque.

À savoir que chacune de ces divinités veille sur un des trois modes du joug ou « yoga »
druidique. Fothad, c’est-à-dire uotados « support » en tant que uota « refus » ou « abstention
», uotaios « fondement » ou « base » et uotepon, « refuge, asile, cachette, recours ». Tout ceci
dans la pratique de la respiration : uotegô « retenir » et uotigu « au-delà de l’extrémité,
jusqu’au bout et au-delà ». Ainsi, le support, uotadis, est un pilier, un étai, uotadion.

Les trois supports définis :

1. Andeuotados, le super support ; Uotados Connonos > Fothad Canann, le support de


l’intelligence, le savoir, la sagesse.
2. Trenouotados, le support vigoureux et vif ; Uotados Argantacos > Fothad
Airgthech, le support argenté.
3. Candouotados, le support brillant et candide ; Uotados Carpantacos >
Fothad Cairpthech, le support charpenté et Uotados Doluas > Fothad
Dolus, le support de la règle de conduite et de l’image à maintenir.

I- Les trois énergies ou potentialités de l’Absolu :

1. Exsrados, bouillonnement, stimulation (= Cit);

2. Eula, science, capacité (= Jiva)

3. Delua, la forme, l’apparence (= Màyà).

Ces mêmes potentialités sont à leur tour divinisées:

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Exsradicos < Easargh (le Stimulant) ;

Eulatis < Ealadha (la Capacité) ;

Deluatis < Dealbhàeth (la Forme) et.

Ces potentialités sont manifestées par le « Dieu des druides » aux trois aspects ou visages :

La Destruction : Dis Ater, le Père de la Dissolution ;

Le Maintien : Aisus, le Terrible, le Très-Bien ;

La Création : Toueranos, le Suprême.

Les trois divinités majeures d’Irlande:

Aecuos||Iuocatus < Eochu||Eochaid (semblable à Mitra),

Ogambios < Ogmios < Ogma (semble à Varuna)

Nodonos < Nodons < Nuadha ou Lugus < Lugh (semblable à Indra).

Personnalisme relativiste dans les visages de la trimurti divine irlandaise :

1. Dagda < Dagodeuos = Toutatis (Brahmà);

2. Echu < Aecuos = Esus (Visnu);

3. Ruadh Rofessa < Roudios Rouessos = Taranis (Rudra / Siva).

Équivalents celtiques continentaux anciens :

TARANIS < Toueranos, le « Suprême », l'Ouranos, par coalescence sémantique avec Tanaros
« Tonnant » et Taranos < To-ueranos « Suprême ».

ESUS < Aisus < Aisuuos « Terrible », avec la connotation de « bien (préfixe
esu- « bien ») ».
TEUTATES < Toutatis // Teutatis « l'agent tribal », en jeu de mots avec
Toutanos // Teutanos, le « chef tribal ».
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Ce sont les trois surnoms de Jupiter (Dagda) et de la triade exprimant non pas un triplement
d'intensité, mais, plus simplement l'expression de la multiplicité dans l'unité (Guyonvarc'h et
Le Roux, 1990)

Bref,

- Personnalisme relativiste qui exclut le monisme pur dans le sens que l’âme individuelle est
de la même nature que l’Uxellimon, mais qu’elle en diffère puisqu’elle est dotée d’une
personnalité propre, donc semblable, mais différente. Bref, une divinité cosmique et
immanente qui s’extériorise en hypostases, uasssones en celtique. Le théonyme Uasso signifie
«se tenant en dessous», dans le sens de «subordonné». Même idée qu’avec les Avatara du
système védique.

Mûrti, qui dans le védisme intègre les notions de «manifestation divine» et «


d’aspect/facette», apparaît séparément dans le druidisme.

1. Ambiluceto traduit manifestation alors que Uostos > Uostatos > *Upostatos signifie
«manifestation subordonnée». On le retrouve donc dans le théonyme gaulois sous sa forme
évoluée (J. Monard).

2. Lunos exprime le sens d’aspect. Ainsi l’adjectif TRILUNos/-a/-on, signifie « au triple


aspect», donc trimûrti (J. Monard).

Taranis, Toutatis et Esus désignent tous le Jupiter gaulois dont le vrai nom reste inconnu. En
ayant recours à l'explication romaine, Taranis est à la fois Jupiter et fils de Jupiter, c'est-à-dire
Taranis l'hypostase de Taranis :

"Jupiter Taranucnus, Jupiter fils de Taranis".

Taranis, le Suprême, est Toueronos, le Père (du Ciel);

Taranis, le Tonnant, est le fils, l'hypostase.

Toutatis est essentiellement martial tout en étant mercuriel; Esus est essentiellement
mercuriel tout en étant martial.

Les équivalents irlandais sont plus canoniques, mais plus hasardeux à interpréter, car les
hypostases et avatars sont plus nombreux.

Taranis = Dagda ; Toutatis = Eochaidh Ollater ; Esus = Ruadh Rofessa

Il s'agit donc bel et bien d'une trinité où chacun des aspects du Jupiter celtique patronne une
voie dévotionnelle à l'intérieur du dedma.

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- La voie de la contemplation est ascétique : fonction des prêtres;

- La voie de l'action est stoïque : fonction des guerriers;


- La voie de l'application est disciplinaire : fonction des producteurs.

Théotripartition de l’ordre social celtique

1. Monisme relativiste de première fonction (classe des Nemetes, donc des prêtres) :

Système selon lequel le monde matériel et l'essence spirituelle des êtres et de la


divinité suprême sont constitués d'une seule substance, et pour lequel l'objet auquel
s'applique la pensée est un (par opposition à dualisme, à pluralisme).
L'hypostase est une divinité subordonnée de l'Être suprême, mais lui étant substantiellement
distincte. C'est-à-dire de même nature, puisque composée de la même essence appelée
monade, dont tous les êtres sont composés. Et comme ces hypostases dépendent de l'absolu,
étant relativement dépourvues d'absolu, demeurent hélas incomplètes et approximatives.
C'est pour cela que ce monisme est qualifié de relativiste.

Principe neutre de Pureté. Divinités trinitaires hypostatiques émanant de l'Être


suprême qualifié Guton Uxellimon en celtique.

2e option : position philosophique athée.

2. Dualisme transcendantal de deuxième fonction (classe des Ulates, donc des guerriers)

Par exemple, il est dit que Lugus transcende le panthéon en se situant, par sa polyvalence
polytechnique, hors d'atteinte de l'expérience et de la connaissance humaine (C. Guyonvarc'h
et Le Roux).

Principe masculin de Vérité. Divinités Dioscures.

3. Polythéisme à accent dévotionnel populaire de troisième fonction (classe des Broges, donc
des producteurs, ouvriers, artisans, paysans, commerçants).

Relatif aux formules et aux actes de dévotion.

Principe féminin de Souveraineté.

Divinités titulaires multiples tribales et locales.

Les trois voies de la Connaissance ou la Science

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1. Uidia

Uidia / Uidiia < Uidtu « la science, le savoir, la vision, la conception »;


Uesos « le connaissant »; Uidios « le savant »;

2. Su-Uidia

Su-Uidia / Su-Uidiia < Su-Uidtu « la bonne science, savoir, vision, conception, la perspicacité
»; Suuis « Savant, le bon savant,»; Suuidios « le perspicace »;

3. Dru-Uidia

Dru-Uidia / Dru-Uidiia < Dru-Uidtu, la drue ou ferme connaissance, savoir, vision,


conception »; Druuis < Druuids « très savant » ; Druuidia « la Certitude ».

23
Les trois Druides primordiaux

Irlande :

Eolas, Fius et Fochmarc ; c’est-à-dire :

Eolas < Eulaxs < Eulaxsos, «Expert» ;

Fius > Uesos, «Connaissant» ;

Fochmarc > Uocomarcos, «Recherche».

Bretagne (insulaire) :

Plennydd, Alawn et Gwron ; c'est-à-dire :

Plennydd < Plentuisos "Reluisant" ; ce nom qui apparaît sous différentes formes : Plenyd /
Plennyd laisse entrevoir une ambigüité qui suggère des jeux de mots du type plentyd, «
enfant » et plentynnaidd « enfance » tous deux de la racine celtique *plant- « clan », « famille
», « enfant » ; les traducteurs gallois s’accordent généralement pour le rendre par l’anglais «
light » (lumière) ; mais en fait, il s’agit de la lumière qui reluit.

Alawn < Alounos « le miroitant" »; ce terme, malgré une certaine confusion chez les Anglo-
saxons qui le traduisent par « harmony » ou « stone », ne cause pas trop de problèmes
d’interprétation au niveau celtique, car il se retrouve dans le nom gaulois Alaunus, le dieu
gaulois solaire de la santé et du psychisme (breton Allan, ou Alain dans sa forme francisée) ;
Alawn est donc, comme dans bien d’autres cas en matière de théonymie celtique, le doublet
de Plennyd ; donc, il s’agirait de la lumière lunaire réfléchie alors que l’autre, Plennydd, serait
l’incarnation de la lumière solaire étincelante.

Gwron < Uronos "le Feu" ; gwron, qui signifie « héros » en gallois, semble en contradiction
avec les deux autres dénominations reliées au phénomène de la lumière ; Gwron < Uaronos «
le Défenseur », nom approprié à un personnage de deuxième fonction (guerrière) ; donc, va
pour Uron « feu » en jeu de mots avec uros « frais », « vert », « pur », « d’origine » et « bison »,
« aurochs » ; ce qui, en quelque sorte, le rattache au druide primordial irlandais Urias < Urios
« du Feu (sacré, le feu de l’offertoire).

La triple Déesse

La grande Déesse est l’allégorie, la personnification en tant que « reine, mère,


Patronne », pour ne pas dire « matrone » de la Souveraineté, c’est-à-dire du pouvoir sous
toutes ses formes. Elle est en fait la Mara Riga, « la grande reine »,
Maiia Matra, la « grande mère », donc la mater materiae, « la mère de la matière ».
Ou en termes latins : Mater, Mater Magna, la grande déesse. Bien avant la
24
Miriam des Évangiles, elle était la très celtique Maria, la « très grande », et
Maria la Romaine, « celle issue de la mer ». Bref, Marie, la Sainte de l’Église, et
Marie, la Belle de nos contes, n’est nulle autre que Maia Maria, la reine des six
Pléiades.

La troisième difficulté vient du fait même de son statut divin, en ce sens qu’elle n’est pas
assujettie aux contingences de la matérialité qu’elle représente. Ce qui explique qu’elle peut
être à la fois mère, épouse, et fille.

Autre complexité pas trop difficile à résoudre pour quelqu’un de culture catholique : les
théonymes (noms de dieux) sont souvent des qualificatifs servant à désigner une même
entité. Rappelons-nous la pléiade de noms servant à désigner la Sainte-Vierge; Notre-Dame
des Vaux et des Monts, des Bois et des Prés, des Lacs et des Rivières, etc. Il s’agit là en fait
d’une évhémérisation (processus d’assimilation) de théonymes plus anciens, voire les matres
(Mont Martre) gauloises. Matrona, la Matrone, le Fleuve, la Marne, la Déesse mère dont
l’autre nom est Danua. Solimara sera transformée en Notre-Dame du Bonsecours, une
épithète de la Vierge Marie. Ou encore la déesse Epona qui donna son nom à Éponine (<
Eponina « la pouliche »), l’héroïne gauloise morte à Rome en 79 de l’è.c. Elle fut exécutée par
son mari Sabinus pour avoir tenté, avec l’assistance de Civilis, d’affranchir de Rome les
esclaves gaulois tenus captifs.
Par la suite, à cause de sa grande popularité, on en a fait une sainte.

La puissance du Dieu suprême, Toueranos provient de sa compagne la Déesse


Brigindo.

L'énergie prânique, la force vitale, est appelée neibo ou nebo. La force physique se disait
drostes. Brigo, « la force », « la puissance, la position de force, valeur, vertu, principe actif,
essence, hauteur, vitalité, mérite, prestige » est sous l'égide de la Déesse Brigindo, « sublimité
» ou Brigantia, « noblesse, hauteur », Brixtia, « l'ensorcelante ». Passons ses autres noms, trop
nombreux pour les nommer, mais pour résumer en voici quelques-uns : Cana,
« l'accomplissement », Dexsiua, « la droite loyale », Marriga, la « grande reine »,
la « reine des cailloux (glandes / chacras) », et Matrona, la « matrone, et pris au sens de
rivière divinisée », et Medua, «l'ivresse ».

La Déesse incarne tout ce qui est d'ordre matériel (Terre) et psychologique (eau), de la forme,
Delua, et de la pensée, Mana ou Ménmania. La déesse initiatrice Scataca ( > Scáthach «
l’ombrageuse »), détient le pouvoir de la force vitale. En fait, Scataca joue le même rôle que la
Çakti indienne dont l'équivalent celtique est Cacto, "Puissance" ; elle est l'équivalente de la
Maya indienne étant chez les Celtes Maia / Maiia « grandeur ». Les trois principes (Canes) de
la pensée régis par la Déesse sont :

Ménmania « le mental »;

Buda (semblable au Buddhi), libre décision, libre consentement, bonne entente, harmonie ;

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Oinantio (semblable à l’Ahamkara), l'individualité, identité particulière ;

Mana (semblable à la Manas), la pensée.

Il va sans dire que la langue celtique est aussi très riche en termes relatifs à la méditation qui
se dit Ambirateia. Brito c'est la réflexion, la pensée, et Totuiceto, le bon sens, la sagesse. La
magie était comprise non pas dans le sens de prestidigitation, mais dans le sens d'un pouvoir
obtenu par une ascèse, un savoir cosmique comme celui des mages persans, dans ce sens
alors, elle se disait Brictia / Brixtia ou Bricta / Bricto. La magie est donc elle aussi le produit
de l'énergie vitale et de la puissance appelées aussi Neibo et Brigo. Un autre de ses effets est
la chaleur qualifiée Tepsco ou Tepstu en celtique et Tapas en Sanscrit. Tous ces termes
dérivent d'une même racine indo-européenne tap-, "chaleur". La chaleur, Aedos, produite par
le Dieu du feu Aedis, dieu du sacrifice par excellence, est à son tour déifiée en Boruo, le Dieu
du bouillonnement. Ce dieu portait aussi le qualificatif de Boeruoboendos, le "Durable en
bouillonnements".
Bref, le concept de chaleur rendu par une pléiade de mots tels qu’Aedos, Gortu,
Goro, Tepstu, Urissu, etc., est fondamental dans la pensée druidique du iugon dont l'idée
principale est de canaliser ce rayonnement énergétique. Le moteur de cette libération étant
Aedon, le zèle, la ferveur. Le feu intérieur, Aedis, le feu que « le dieu met dans la tête » (voir :
Chant d'Amarogenos), rime avec Aedu, Bélier, chevreau (avril), et Aedus, le soleil du matin.

Brigantia, l’allégorie du Pouvoir, de la force et de la grandeur morale

Brigindo ou Brigindu en Gaule et Brigantia en Grande-Bretagne Elle est la représentation


idéale et unifiée de la déesse triple de la Souveraineté. En tant qu’allégorie de la Souveraineté,
elle se détriple pour représenter les trois âges de la femme ou de la fée : la jeune, la mûre et la
vieille. Sous ses trois aspects, son nom se conjugue alors au pluriel i.e. : Matrona et ses trois
Martres, les trois mères, les trois naïades, les trois grues, etc.

En termes de comparaison, elle est l’équivalente gauloise de la Minerve romaine et de


l’Athéna grecque.

Jules César dans La guerre des Gaules, livre VI, chapitre 17, la range au haut du panthéon
gaulois :

« Le dieu qu'ils honorent le plus est Mercure. Il a un grand nombre de statues ; ils le
regardent comme l'inventeur de tous les arts, comme le guide des voyageurs, et comme
présidant à toutes sortes de gains et de commerce. Après lui ils adorent Apollon, Mars,
Jupiter et Minerve. Ils ont de ces divinités à peu près la même idée que les autres nations.
Apollon guérit les maladies, Minerve enseigne les éléments de l'industrie et des arts ; Jupiter
tient l'empire du ciel, Mars celui de la guerre ; c'est à lui, quand ils ont résolu de combattre,
qu'ils font vœu d'ordinaire de consacrer les dépouilles de l'ennemi. Ils lui sacrifient ce qui leur
reste du bétail qu'ils ont pris, le surplus du butin est placé dans un dépôt public ; et on peut
voir, en beaucoup de villes de ces monceaux de dépouilles, entassées en des lieux consacrés. »

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Brigindo, Brigindu, qui signifie « sublimité, noblesse », est un des noms de la
Brigantia dont le nom signifie « Noblesse, Élévation (morale) ». Son nom cache aussi d’autres
sens comme : briga « hauteur, haut lieu, valeur, puissance, insolence », briganis « tertre,
monceau », brigantina « princesse », brigantinia « de condition noble » et brigetio «
fortification », entre autres.

À la fois mère, compagne et fille, elle se présente en groupes de trois :

Allégorie de la Terre d’Irlande

1. Banba < Banua « Truie », allusion non péjorative à Bena « femme » ;


2. Fotla < Uotala « la sous-tale », le socle, la pierre de fondation ;
3. Eriu < Erio ; « l’ouest ».

Les trois fées du destin

1. Aobh < Aibo / Aiba « physionomie, mine, air, air avenant ».


2. Aoife < Aisuia > Esuia « celle du souffle (divin) », Esuuia « la terrible », la
soeur de Scathach.
3. Arbha< Arbhar < Arbara « graminée, céréale », en jeu de mots avec
Arua « sillon », l'autre soeur d'Aoife.

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Les trois grues, Trigaranai

Cailleach / Coillach < Cailiaca / Coiliaca « la sorcière, la pythonisse, la femme devin, la


prophétesse, l’augure,».

1. Cailleach Beara > Beriia « la sorcière du plateau ras »;

2. Cailleach Bolus < Bolussas « la sorcière prunelle »;

3. Cailleach Corca Duibne < Crocnos Dubnis « la sorcière de l’abîme rouge ».

Les trois déesses

1. Badb < Bodua « corneille », la triple déesse du combat, épouse de Net et


soeur de Morigann et Macha.
2. Eithne / Ethne < Etana « poésie », la fille d'Eochaidh Féidhleach et femme de Conchobar.
3. Nemain < Nemetona « du sanctuaire » ou Nimneto « l’intoxication », « l’empoisonnement
», une des trois Badb, la sœur de Morrigan et de Badb.

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4- QETEOR / PETUAR – QUATRE

Qarios / Parios « chaudron » ;

Qartis / Partis, « partie »; qartos / partos « divisé » ; qerta, certa « pomme » ;


qrotos / protos « preux » ; cradion, craedion, credion / cridion « coeur » ; credma
> credima > cretima « croyance, religion, acte de foi » ; credra « relique » ;
credris « rituel » ; preteros « attention, soin » ; pretu / portu < pertu « poésie ».

Les quatre sages - les quatre cités célestes, les quatre îles fantastiques et les quatre points
cardinaux

Cath Maige Tuired (La seconde bataille de Mag Tured)

1. « Les Tuatha Dé Dánann étaient dans les îles au nord du Monde, apprenant la science et la
magie, le druidisme, la sagesse et l’art. Et ils surpassèrent tous les sages des arts du
paganisme.
2. Il y avait quatre villes dans lesquelles ils apprenaient la science, la connaissance et les arts
secrets, à savoir Falias et Gorias, Murias et
Findias.
3. C’est de Falias que fut apportée la Pierre de Fal qui était à Tara. Elle criait sous chaque roi
qui prenait l’Irlande.
4. C’est de Gorias que fut apportée la lance qu’avait Lug. Aucune bataille n’était gagnée
contre elle ou contre celui qui l’avait en main.
5. C’est de Findias que fut apportée l’épée de Nuada. Personne ne lui échappait quand elle
était tirée du fourreau de la Bodb et on ne lui résistait pas.
6. C’est de Murias que fut apporté le chaudron de du Dagda. Aucune troupe ne le quittait
insatisfaite.
7. Il y avait quatre druides dans ces quatre villes

Morfesae était à Falias.

Esras était à Gorias.

Uiscias était à Findias.

Semias était à Murias.

Ce sont les quatre poètes de qui les Tatha Dé Dánann apprirent la science et la connaissance. »

29
Les quatre sages et les villes du nord du Monde

« Morfis était le poète de Faillias elle-même, Esrus était celui de Goirias au désir
violent, Semias, toujours hautain, était celui de Murias, forteresse des navires,
Uiscias était le beau poète de Findias. Par eux quatre dons furent faits de là-bas aux nobles
Tuatha Dé Dánann. »

« Ils reçurent quatre villes pour y enseigner aux jeunes gens du pays. Les noms de ces villes
sont : Failias, Gorias, Finias et Murias. Les Tuatha Dé Dánann placèrent quatre sages dans ces
villes pour y enseigner les sciences et les nombreux arts qu’ils possédaient aux jeunes gens du
pays : Semias à Murias,
Arias à Finias, Urus à Gorias et Morias à Failias. Après être restés un certain temps dans ces
villes, ils partirent pour le nord de l’Écosse où ils furent sept ans à Dobhor et Iardobhor. »
(Geoffrey Keating)

Les quatre sages sont semblables aux quatre Kumâra de la tradition védique. En tant que
siddhesvaras, voyants poètes, ils sont extrêmement savants, les quatre Kumâra, à l’exemple
des quatre sages, sont nés sages. Issus de l’esprit de Brahmà, ils incarnent la potentialité de
l’être et chacune des quatre voies majeures de la sagesse védique. Éternellement jeunes, ils ne
connaissent ni fatigue, ni paresse, ni lâcheté. Sans véhicule, ils voyagent rapidement à pied le
long des sentiers célestes des sages s’adonnant à toutes les formes de yogisme.
Ils instruisent les sages légendaires Prithu et Narada. Ce sont : Kumâra Sanaka,
« Jeune l’Ancien », Kumâra Sanandana, «Comblé de joie», Kumâra Sanatana,
« Jeune l’Éternel », « le Sénéchal », et Sanatkumâra, «Éternellement jeune». Et comme les
quatre sages, les kumâra ont résidence dans les étoiles.

Chacune des villes qui sont situées sur une île du même nom se situe dans les étoiles du carré
de Pégase qui culmine à la veille de Samhain.

Nord, nord-est : Les Tuatha Dé Dánann étaient dans les îles au nord du Monde ;
Selon le livre de Lecan : « Les enfants de Beothach, leur gloire est vivante, la troupe des
vaillants héros arriva après le souci et après une grande fatigue avec tous ses navires en
Scandinavie (c’est-à-dire au Nord-Est). »

Sud, sud-est : C’est de Falias (Sud-Est : l’île des Puissants était le nom poétique la Bretagne
insulaire ; les puissants étant les Bretons) que fut apportée la Pierre de Fal qui était à Tara
(Est). Dexsouon « Sud » et Dexsauon « à droite ». C’est dans la région sud que se trouve Tech
Duinn, la maison du sombre, la maison de l’assemblée des morts présidée par le dieu des
morts.

Ouest, sud-ouest : C’est de Murias, forteresse des navires à la grande valeur, que fut apporté
un trésor gigantesque et puissant, le chaudron de valeur du Dagda. Aucune troupe ne le
quittait insatisfaite. Les Morinoi, « les Maritimes », étaient une tribu du littoral belge. Lors de
la première bataille de Magh Tured, Lug arrive à Tara par l’Ouest.
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Nord, nord-ouest : C’est de Findias que fut apportée l’épée de Nuada. Selon le livre de Lecan,
« l’épée de la main de Lug provenait de Goirias (Ouest), choix très cruel. De Findias par-delà
la mer, au loin fut apportée la lance empoisonnée de Nuada. », on l’appellera Airgetlam
(Main d’Argent) suite à la perte de sa main droite au cours de la première bataille de Mag
Tured et qui sera remplacée par une prothèse. Tousto signifie à la fois : « gauche » et « Nord
».

Est, Nord-Est : C’est de Gorias, la pure, que fut apportée la lance pour le meurtre de grands
héros qu’avait Lug (haut roi). Selon la version du livre de Lecan, « la lance était dans la main
de Nuada (roi). » Le roi fait face au soleil avec le sud à sa droite et le nord à sa gauche. Eria /
Eriu « Ouest ». Areteros « Est », signifie aussi : « le plus en avant, le dernier, l’ultime et le plus
éloigné ».

Cette perception mythique du monde, qui n’est propre au domaine celtique, se retrouve aussi
dans les autres traditions indo-européennes. Dans la mythologie grecque, au nord se trouvait
l’Hyperborée ou l’Arcadie, l’Éthiopie au sud, à l’ouest, les Hespérides ou les champs Élysée et
la Colchide à l’est. Les Hespérides situées à l’extrémité occidentale de la Terre sont parfois
énumérées à quatre ou sept. Il s’agit d’une île voisine de l’Atlas, à l’endroit où se couche le
soleil et où s’épanouissaient les pommes d’or gardées par le dragon Ladon à cent têtes, le fils
d’Echidna et de Typhon. Les Grecs considéraient le soleil couchant comme une pomme d’or
du jardin des Hespérides. Thème tout à fait identique à celui entourant Mananann Mac Lir et
l’île d’Emain Abhlach. L’île aux pommes est un paradis au large d’Alba, à l’ouest de l’Écosse,
parcourut par le dieu Mananann. Dans un des fabuleux voyages de Bran, une fée lui tendit
une branche argentée des pommiers d’Emain Ablach. Chez les Germains, c’étaient les
pommes d’or d’Idun qui étaient capables de rendre la jeunesse. L’arbre Yggdrasil se tient lui-
même au nord du monde alors que les racines se dirigent vers l’Est, le Sud et l’ouest.
L’architecture obéit aussi aux lois de l’espace sacré. Ainsi, on évitera de placer des entrées
dans la direction nord.

En Inde, les quatre Maha-dvipas ou divisions du monde sont énumérés ainsi dans le
Mahabharata : Bhadrasva, Ketu-màla, Jambu-dvipa et Uttarah Kuravah. Dvipa, en sanskrit
signifie « île », « division d’un monde terrestre », généralement situées autour du mont Méru
et séparées entre elles par des mers concentriques et contiguës.

Bhadrasva ou Viràt-deha, terre des bienheureux, fortunés, chanceux, prospères, joyeux,


gracieux, gentils, beaux, chers et plaisants, le continent de l’Est. C’est aussi le nom d’un lac
mythique et du Gange céleste qui le traverse à partir du sommet Nord du mont Méru et qui
coule dans la plaine d’Uttarakuru jusqu’à la mer du nord. Cette île a la forme d’un croissant
et à la couleur de la brillance. Ses habitants clairs et dorés sont dits généreux, beaux et
vertueux. Son contour est estimé à 9000 lieues. Elle est comparable à la Colchide ou Murias.

Ketu-màla ou Godhana, terre de clarté, de brillante apparence, riche en bétail, située à l’ouest.
31
C’est la contrée des gens éminents dotés de jugement, de discernement et d’intellect. Ketu en
astronomie est une étoile filante, une comète et en astrologie le noeud lunaire Sud
descendant, la queue du Dragon. L’île de l’Ouest a la forme d’un disque de couleur rouge. Au
milieu se trouve un lac où viennent brouter les troupeaux de chevaux et son diamètre est
estimé à 8000 lieues. Ses prospères habitants ont la peau cuivrée au teint rouge et sont des
mangeurs de boeuf. Elle est comparable à Gorias et aux Hespérides.

Jambu-dvipa, la terre du pommier-rose, le continent du Sud, dite aussi Dakshinahâkuravah, «


contrée du Sud ». Elle est la plus centrale des îles entourant le mont Méru. Elle est subdivisée
en dix régions. Jambu est aussi le nom du fleuve mythique, Jambûnadî, issu du jus des fruits
du fabuleux Jambu (Pommier-rose) géant couronnant le mont Méru et un des noms poétiques
du sous-continent indien. Elle a une forme triangulaire ou en poire et a la couleur du bleu du
ciel. Cette terre, à la fois riche et pauvre, bonne ou mauvaise a de magnifiques palais. La plus
petite des îles, sa superficie est estimée à 7000 lieues. Elle est comparable à la mythique
Éthiopie des Grecs ou à Falias.

Uttarah Kuravah, Le continent de la race ou peuple du nord, la plus nordique des quatre
grandes îles. Elle se situe au-delà des montagnes himalayennes et est décrite comme la terre
du bonheur sans fin et la patrie d’origine des Aryens et des sages. Kuru est aussi la figure
ancestrale des Pandavas, de Pandu et de Dhritarashtra. Elle a la forme carrée et a la couleur
verte. Ses habitants sont des cavaliers et élèvent des troupeaux. Les arbres sont riches en
fruits et à leur mort, suite à une longue vie, les esprits des gens du Nord vont hanter les
arbres. C’est la plus grande des îles et elle est estimée à 10.000 lieues. Elle est comparable à
l’Hyperborée ou à l’Arcadie et à Findias.

32
Les quatre maîtres

Les quatre sages font leur pèlerinage le long de Senton nemeson, du chemin des cieux, ou de
Senton Uidionos, « chemin du Savant », c’est-à-dire la Voie lactée en route vers le carré de
Pégase (Baeðos, « le Sanglier »).

Morfis de Faillias

Morfessa, Morfis < Marouesos « le grand sachant » ; dit aussi : Morias <
Morios / Moriatos « de mer, maritime » et Fessus < Uesos « sachant, connaissant, qui sait ».

Falias, Failias < Ualia « de force, d’autorité », « de compétence ».

Ualia est un jeu de mots avec Aballia « verger, pommeraie sauvage », nom des mythiques îles
de l’Ouest : Ynys Afallach (Inicia Aballaci « l’île de la pommeraie ») l’Avalon des Gallois et
Emain Ablach (Emania Aballaci « la jumelle du verger »), l’Hespéride des Irlandais. Falias <
Ualiassos, Markab, l’étoile delta du Pégase.

Esrus de Goirias

Esrus, Esras < Esdrios / Esdratis « Qui a la manière, les moyens » ; Urus < Uros « pur,
d’origine, frais » ; jeu de mots : Ur / Uron « feu ».

Goirias, Gorias < Goria « la chaude »; jeu de mots : Gortia « l’enceinte »,


Garria « chêne vert ». Gorias < Goriassos, Algenib, l’étoile epsilon du Pégase.

Semias de Murias

Semias > Semios / Semiatis « le capricieux », « le frivole, le mince ».

Murias, Morias < Moria « la mer ». Murias < Moriassos, Scheat, l’étoile bêta du
Pégase.

Uiscias de Findias

Uscias / Uiscias < Udescios « l’aqueux », vraisemblablement Uescios « le vêtu », si ce n’est


Uisucios « respectable, perspicace », en jeu de mots : « corbeau mâle », cependant, le contexte
suggère aussi : Uiscimos « pétulant »; Arias <
Arios / Ariats « homme libre, propriétaire terrien ».

Findias, Finias < Uindia « l’éclat, la Beauté, la splendide, la blanche ». Findias


< Uindiassos, Sirrah, l’étoile alpha Andromedae.

33
Les quatre joyaux des Tuatha Dé Dánann

La pierre de Fal :

« Elle criait sous chaque roi qui prenait l’Irlande. »

La Pierre de Fal (c’est-à-dire Lia Fal < Licca Ualeios « Roche plate de Force ») est le symbole
de la Souveraineté et de la royauté sacrée. C’est qu’en tant que Fotla (< Uo-tala, la « Sous-tale
»), la pierre représente l’assise, la base, le soutènement, du pouvoir sacré. Elle est la pierre de
feu, le silex, le briquet. En tant que pierre du foyer, de l’âtre et du bûcher, elle contient et
conserve la chaleur du feu, du soleil du midi. Elle symbolise aussi le feu de l’être, du feu
interne, du soleil intérieur. Son élément est donc feu.

La lance de Lugh:

« On ne livrait jamais de bataille contre celui qui l’avait en main. »

Elle avait la particularité de se rendre invisible. La lance est un symbole solaire.


Il s’agit en fait d’un des trois rayons du soleil qui sont projetés sur monde. Le rayon solaire
voyage d’est en ouest pour disparaître le soir au-delà de l’horizon pour réapparaître de
nouveau au matin. Faite du bois de l’If sacré, et d’une pointe, elle atteint immanquablement
sa cible pour revenir dans la main du lanceur, en l’occurrence, Lugh à la longue main. Ainsi
elle représente les rayons ou traits de lumière parcourant la Terre. Son élément est terre.

Le chaudron du Dagda:

« Du chaudron, aucune troupe ne le quittait insatisfaite. »

Objet de rituel et instrument de transformation de prédilection de la classe des nemetes, donc


des druides ou prêtres. Il est l’instrument de la transformation matérielle par le
bouillonnement des éléments du feu, de l’eau et de l’air. Comme les autres récipients, coupe,
vase, crater, il peut être considéré comme le contenant de l’énergie divine, de la gestation au
sein de la déesse-mère. Dagda armé de sa massue, symbole de la régulation temporelle, en est
l’agent fécondateur. Évidemment, son élément est eau.

L’épée :

« Personne ne lui échappait quand elle était tirée du fourreau de la Bodb. »

Autre produit, comme le chaudron, des arts du feu de la forge, l’épée, trempée dans son eau,
est symbole de volonté et d’action. Une fois trempée, elle devient froide tranchante comme le
vent du Nord. Elle est l’instrument de vérité qui sépare le vrai du faux. L’épée représente le
phallus alors que le fourreau représente le vagin. Elle est donc symbolique de l’énergie vitale
et de la fertilité.
Son élément est air.
34
Les quatre fêtes celtiques

Le temps annuel était divisé en deux semestres, l’un sombre et l’autre clair.

Tableau 01.

35
Le semestre sombre

Le semestre hivernal sombre, commence le cycle annuel. Les six mois sombres de l’année
étaient appelés ainsi parce que giamos ou giiemos, littéralement « jeunes pousses », était le
nom celtique ancien pour « hiver » parce que c’était en hiver que les pousses demeuraient
dans le sol mouillé. Il s’agit donc du semestre des jeunes pousses. Cette saison humide durait
ainsi d’un équinoxe à l’autre. Au printemps, les pousses dormantes s’éveillaient et la saison
végétative trouvait son paroxysme en mai, mois qui portait le nom de Giamonios, c’est-à-dire
le « temps des pousses ». L’année celtique débutait à la lune de Samonios, de novembre, et le
point initiant la succession des signes du zodiaque était placé à l’équinoxe d’automne. La fin
de la saison claire était marquée par le temps de Samoidon, littéralement « la fin d’été »
précédant la lune de Samonios.
Le jour le l’an celtique correspondait à notre Toussaint. La veille de Samonios, dite Uegilia
Samoni, était le début des réjouissances qui duraient trios semaines.
Samonios, est un savant jeu de mots comme seuls les druides savaient les faire.
De fait, samon ou semon « semence », rappelle samos « été ». Ainsi Samonios a plusieurs
sens : « rassemblement », « du semeur » et « (relatif à ce qui est) estival ». À ce moment, une
brèche s’ouvrait entre les deux mondes, celui des esprits et celui des vivants. Lors de cet
événement étaient commémorés les esprits des ancêtres, les morts et les dieux. Notre
Toussaint, fête catholique de « tous les saints », est un emprunt direct au calendrier païen.

Le semestre clair

L’été, est le semestre estival clair, est littéralement, le temps de l’été, le temps des semences.
Ce semestre était marqué par le passage du soleil au point vernal en Bélier lorsque la nature
reprenait son dû sur le monde souterrain. Les humains, comme le soleil et la végétation,
renaissent d’une mort apparente et s’éveillent à un nouveau cycle de vie.

Tableau 02.

36
Les deux semestres étaient redivisés en deux quarts chacun donnant ainsi les quatre saisons.
À leur tour, chacune des quatre saisons était composée de trois périodes zodiacales de trente
jours (30 degrés). Ces périodes zodiacales correspondaient plus ou moins aux mois lunaires
qui étaient aussi au nombre de douze.

1. Cengiamos, l’automne, c’est-à-dire cen- « avant » et giamos « hiver ».

2. Giamos ou giiemos, l’hiver, terme qui vient du vieux celtique *giiemorotlio.


Le terme gaulois giamos et de la même racine que le latin hiems et le grec
kheimon.

3. Uesara, le printemps, terme apparent au latin ver-, comme dans vernal, et vaguement
proche du gaélique errach qui vient du vieux celtique uesracos.

4. Samos ou semos, l’été, de là les termes Samhradh en gaélique, Haf en gallois et Hanv en
breton.

Ainsi, les saisons de l’Antiquité ne correspondaient pas exactement à nos saisons réglées sur
les positions astronomiques du soleil, les équinoxes et les solstices. Dans le calendrier celtique
(disque de Nebra et calendrier de Coligny) comme dans celui d’Hésiode, les débuts de
l’année et des saisons se situent entre les équinoxes et les solstices initiés par les levers et les
couchers des Pléiades.

À titre de comparaison, voici le descriptif de ces deux calendriers antiques :

Calendrier d’Hésiode Calendrier celtique


Automne, arrive vers la mi-août En Automne, l’année débute à la
marquant ainsi la fin de l’été. Samonios à la pleine lune de
novembre. C’est aussi la fin ultime de
l’été. L’arrivée de l’hiver est marquée
par le coucher des Pléiades.
Hiver, marqué par le coucher des L’Hiver, arrive à la fin du mois suivant,
Pléiades vers la fin octobre, début Dumannios, lorsque le jour le soleil
novembre. longe l’horizon.
Printemps, marqué par le point Printemps, à la fin de l’hiver, lors de
vernal, arrive fin février, début de la fête des Lustrations, Ambiuolcaia,
mars. début février, est célébrée la fête du
préprintemps.
Été, marqué par le lever des Pléiades L’Été, arrive tôt à la fête de mai,
vers la mi-mai. Belotennia. Cette fête est marquée,
comme à la Saint-Jean, par des feux de
joie. Le lever héliaque des Pléiades est
annonciateur du mois de mai. Une fête
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de fin d’été, appelée Lugunaissatis est
célébrée en août.

5- PEMPE, PIMPE- QENQ - CINQ

Pennos / qendos « tête »; conqenna « duo solidaire »; eniqennia « mentalité »;


parios / qarios « chaudron ».

Les cinq provinces d'Irlande

Est : LEINSTER < Lagenatia « des Lanciers » ; la prospérité.


Sud : MUNSTER < Momonia « des Gracieux » ; la musique.
Milieu : MEATH < Midia « du Milieu » ; la royauté.
Ouest : CONNACHT < Connaxtia « des prudents » ; la connaissance.
Nord : ULSTER < Ulatia « des Souverains » ; la bataille.

Haut :
Leth Cuinn, « la Moitié de Conn »

Est :
Leinster : Bruigh na Boinne - Tara
Blath < Blatis « doux, agréable » ;

Sud :
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Munster : Tlachtga, Tech Duinn
Seis < Segisu « force » / Seluos « gain, profit » ; Senmo « musique ».

Frontière médiane :
Eiscir Riada

Milieu :
Meath
Mide < Meda « balance, mesure » ; Riada < Rigantos « royal » ;
Le roi fait face à la porte à l’est. Les plans des anciens forts ont la porte à l’est.

Bas :
Leth Moga
« la moitié de Mug »

Ouest :
Connacht
Uisnech, Rath Cruachan (Ouest)
Sur le sommet du tertre de Uisnech : le pilier de pierre de Fintan.
Fis < Uidtos « connaissance acquise » ; Uesus « gai, allègre » ;

Nord :
Ulster
Tailtiu, Emain Macha
Cath < Catus, Catu « combat, bataille » ; Catus « avisé » :

Les suites de cinq dans l'ogham (5 x 5)

1- B : beth < betua (bouleau) bitu (monde)


2- L : luis < lusis (sorbier) louxs (lumière)
3- N : nuin < onna (frêne), si ce n'était ninnos (faîte, cime)
nertos (myrte)
4- U (W) < V / F : fearn < uernos (aulne) uernos (bon)
5- S : saile < salixs (saule) sauelios (soleil)
6- SC (SQ/SP) < H : huath < scatos (ombre)
squiats/spetes (aubépine)
7- D : daur < daruos/deruos (chêne) duora (porte)
8- T : tinne < tennos (houx) tenes (feu)
9- C : coll < coslos (coudrier) celos (abri), coliia (troupe)
10- Q : quert < qertocos (pommier qrennacon / prennacon (domaine boisé)
sauvage)

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11- M : muin < monia (ronce) / moniio (montagne)
muinia/uiniia (vigne)
12- G : gort < gortia (lierre), si ce n’était gortia (enclos)
pas gabrostos (chèvrefeuille)
13- 'N (NC/NG) : ngetal 'ngaitalis 'ncu, ancou (fatalité)
ingaitalis (roseau)
14- Ð (SD) < Z : straif < ðira/ sdira (étoile)
sdragenos/dragenos (épine-vinette)
15- R : ruis < rusca (sureau), si ce n'était roudios (rouge), rixs (roi)
reusmen (aulne glutineux)
16- À : ailm alamios (pin) alamos (troupeau)
17- O : ohn, ocstino (ajonc), si ce n'était ona / ono (eau)
onna (frêne)
18- U : ur < uroica (bruyère) ur (feu, sacré)
19- E : eoda < idato / esados (tremble) eidsca (lune)
20- I : ioho < iuos (if) Iuos (clair), itauis (brandon)
21- X (CH) : choad < coiton/caiton xodonios (chtonien), caclauos (cailloux)
(taillis) élément terre
si ce n'était xassanos < cassanos (chêne)
22- TH : tharan < taranos/tannos (chêne taranos (tonnerre), tepnon (feu) élément
vert, yeuse) feu
23- P : peith < petios (obier) padis (pin) pottos (pot), (p)Idsca (eau) élément eau
24- PH (BH) : féa < phogos < bhagos / Phrudis (cascade), auella (vent) élément
bhogos / bogos (hêtre) air
25- XS : (KS) 'xslemos < uxslemos/ Uanocoslos (orme blanc, orme
montagnard), 'xon < uxon (haut) élément
éther

Le pentagramme de Vénus

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Statère gaulois d’Armorique avec le pentagramme de Vénus surmonté du cheval (Ecuos juillet
/ Cancer ?). Les oghams irlandais associent le mot ech « cheval » au signe de la Vierge. Dessin
de l'auteur.

Le pentagramme de Vénus.

Dans l’Antiquité, l’étoile à cinq branches ou pentagramme était le symbole privilégié de la


planète Vénus. Le chiffre 5 est celui des conjonctions de Vénus avec celles de la terre et du
soleil. Jadis, il fut un temps où il y eut concordance entre 5 révolutions synodiques de Vénus
et les 8 années tropiques solaires. Le cycle de Vénus, de huit années terrestres, plus treize
orbites vénusiennes donne le chiffre 21. Ainsi, la suite des nombres sacrés 1, 3, 5, 8, 13, 21, est
astrologiquement liée à Vénus.

Vénus, Rii > Riia / Reia / Reiia : nom usuel ancien de la planète, en connotation : « libre » ;
comparez avec le germanique Freya.

_________
Sources
BERRESFORD ELLIS, Peter. A Dictionary of Celtic Mythology, Constable, London, 1992.

BERRESFORD ELLIS, Peter. A dictionary of Irish mythology. Oxford University Press, Oxford,
G.-B., 1987.

BOUTET, Michel-Gérald, Les druides et l'astrologie, Edilivres, Paris, 2014.

GUYONVARC’H, Christian-J. et Le Roux, Françoise. Les Druides. Editions Ouest-France


Université, Rennes, 1986.

GUYONVARC’H, C.-J., Le Roux, Françoise. La civilisation celtique. Payot, Paris, 1990.

LE GOFF, Alain, PINEAU, Serj et VAILLANT, Roger. Glossaire de la Comardiia,


document non publié augmenté du Vocabulaire Vieux-Breton de Joseph Loth.
41
MONARD, Joseph. Dictionnaire de Celtique Ancien. Keltia Publications, Edimbourg, Écosse,
2000.
MONARD, Joseph. Notice sur les Oghams, monographie, 1995.
MONARD, Joseph. Glossaire trilingue celtique-français-anglais. 1994.
MONARD, Joseph. About the Coligny Calendar, monographie 1996.
MONARD, Joseph. Éléments divers d'astronomie pour l'élaboration d'un almanach. 1996.
MONARD, Joseph. Découpage saisonnier de l'année celtique, monographie, 1996.
MONARD, Joseph. Lettres de 1994 à 1999.

MORLET, Antonin. Découverte en France d’un alphabet préhistorique, La Nature, n° 2729, 24


juillet 1926, pages 49-52.

Musée de Glozel, musée d’archéologie et d’histoire, Glozel, Ferrières-sur-Sichon,


http://www.museedeglozel.com/
Royston Pike, E. Dictionnaire des religions, adaptation française de Serge Hutin, Presse
universitaire de France Paris, 1954.

SERGENT, Bernard. Le livre des dieux celtes et grecs, II, Éditions Payot et Rivages, Paris,
2004.

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