INTRODUCTION GENERALE
Face à un monde de plus en plus métissé pour ce qui est des modes de vie, des us et
coutumes des peuples, face à la propension égoïste et naturelle des hommes à afficher leurs
identités spécifiques au détriment des idéaux de paix qui devraient animer l'humanité, tout un
chacun devrait s'interroger. Au moment où la communauté internationale met tout en oeuvre
pour combattre tous les fléaux qui minent les processus de paix et la stabilité du monde, il est
important que l'enseignant qui est un éducateur de profession soit aux avant-postes de toutes
les initiatives opportunes dans ce sens. Il s'agit pour lui d'avoir toutes les capacités
indispensables au développement de la culture de la tolérance à travers la compréhension
internationale ; il s'agit aussi pour lui de communiquer ces capacités à ses apprenants. Ces
objectifs, il ne peut les atteindre que s'il est compétent sur le plan interculturel.
Avoir des aptitudes sur le plan interculturel, c'est connaître, mieux, c'est maîtriser non
seulement les faits de civilisation de plusieurs peuples, mais aussi et surtout leurs faits
culturels, car ce sont les seconds qui, pense Abdallah-Pretceille (1996 :28), « favorisent la
communication, c'est-à-dire la rencontre avec l'Autre.[La] démarche descriptive [...]
rest[ant] extérieure aux individus ». Par conséquent, la capacité à repérer le culturel dans les
échanges langagiers va au-delà de simples connaissances ethnographiques descriptives telles
que la manière de parler, la gestuelle, l'intonation et autres signes physiques ou matériels,
pour cerner la communication dans sa profondeur. Et pour cause, reprécise Abdallah-
Pretceille (1996 : 30),
C'est à une véritable anthropologie du métissage que nous appelons car le temps n'est plus
aux catalogues, aux nomenclatures mais au passage, à la transgression des frontières
linguistiques et culturelles (cf. « parler bilingue » par rapport au bilinguisme), à la pluralité
des cheminements et à la multiréférentialité. Chaque individu a la possibilité d'appuyer son
expression non seulement sur le code d'appartenance mais aussi sur un ou des codes
de référence et ce de manière d'autant plus variée que son expérience du monde sera plus
vaste.
Au demeurant, telle est la question fondamentale qui pose les bases d'une étude qui se veut
une approche évaluative globale de certains supports didactiques et de la didactique du
français en francophonie. Et la démarche adoptée pour y répondre est trilogique. Dans la
première partie de l'étude, il s'agit de poser la problématique et de procéder à la
circonscription du cadre théorique de l'étude. La deuxième partie de l'étude intitulée cadre
méthodologique est le lieu de définition de la démarche et des procédures suivies dans la
conduite des investigations. Enfin, la troisième partie, le cadre opératoire, correspond au lieu
approprié de présentation des résultats, de vérification des hypothèses et de proposition de
suggestions et recommandations en vue de l'amélioration de la situation étudiée.
PREMIERE PARTIE :
PROBLEMATIQUE ET CADRE
THEORIQUE
Si définir les concepts de culture et de compétence culturelle n'est pas aisé, définir celui de
compétence interculturelle l'est encore plus. Pourtant, en tant qu'ensemble d'aspects
intellectuels et de formes de comportements qui caractérisent une civilisation tout en
permettant de développer le sens critique, le goût et le jugement, la culture devrait avoir un
impact sérieux sur les autres activités de la vie quotidienne et plus précisément sur
l'enseignement. Bien plus, cet impact devrait être accentué pour ce qui est particulièrement
de l'enseignement de la langue qui en est précisément un aspect, celui de la culture.
S'agissant des contenus, l'accent est mis sur l'enseignement de la langue française au second
cycle, indissociable de l'enseignement de la littérature...Ainsi, l'enseignement de la langue
vise la maîtrise par l'élève de l'outil linguistique, tant en termes de compréhension (étude de
textes) qu'en termes d'autonomie ( production de textes). Il s'agit d'enraciner l'apprentissage
de la langue française dans le besoin d'échanges et de communication. Des activités
dynamiques et ouvertes, ayant pour point de départ les textes, permettront aux élèves de
s'approprier la langue, de s'initier à la culture qu'elle véhicule, de réagir, de proposer une
réponse personnelle, de réfléchir seul ou en groupe.
Pour concrétiser cette option dans leurs salles de classe, les enseignants opèrent des choix
multiples, tant dans les oeuvres inscrites au programme que dans les journaux pour, comme
le disent encore les instructions officielles du MINEDUC (1995 :12), « donner aux élèves
une capacité de lecture flexible et plurielle » . L'attestent fort heureusement les exercices
proposés dans le Cahier de Département - Français langue seconde (Spécial
langue) (MINEDUC, 2000) de la Sous-section de Français et Lettres Classiques de
l'Inspection Générale de Pédagogie. L'atteste aussi et mieux d'ailleurs le document 30 textes
pour le cours de langue (2001) qui est un corpus et davantage un répertoire de textes au sens
large, littéraires ou non, et bien sûr en français moderne.
Avant que les méthodes d'approche textuelles ne se diversifient et surtout avec la critique
historique, les textes littéraires étudiés en classe étaient pour la plupart des classiques. Par
conséquent, ils permettaient à l'enseignant et à l'apprenant, au regard du caractère homogène
du niveau et de la qualité de la langue, de les comprendre d'une part et d'être sûrs d'autre part
de la transmission et de l'acquisition de la norme linguistique, de la norme standard, de la
norme hexagonale de la langue française. Les classiques africains permettaient aussi
d'atteindre cet objectif. Et si les exigences de la compétence interculturelle n'étaient pas
totalement oubliées, il faut reconnaître qu'elles étaient autant exprimées et ressenties qu'elles
le sont de nos jours.
Aujourd'hui, il n'est plus évident que les textes littéraires francophones contemporains
autrement appelés nouvelles écritures africaines, essentiellement caractérisés par la
« déconstruction » de la langue française, par ce que Nganang dans un entretien accordé à
Mvounda Etoa (2003 :8) appelle le « décentrement » par rapport à la métropole et qui
implique une nouvelle énonciation, soient d'une compréhension facile au point de rendre aisé
l'enseignement et l'acquisition/appropriation de cette langue. A partir d'une telle situation, un
débat diversement exprimé s'est installé au sein de la communauté scientifique avec pour
objet la qualité de langue française enseignée et acquise dans les milieux scolaires de
l'Afrique francophone subsaharienne et même d'ailleurs.
D'aucuns parmi lesquels Zabu cité par Kesteloot (1992 :26) faisaient du problème ci-dessus
soulevé celui de l'« indigénisation » de la langue française. D'autres en font le sujet de
numéros de revues et de colloques. C'est ainsi que cette question est l'un des points inscrits
au programme des Etats généraux de l'enseignement du français en Afrique subsaharienne
francophone tenus à Libreville au Gabon du 17 au 20 mars 2003. La même préoccupation a
constitué le dossier du N°003-Volume II d'octobre 2003 de la revue Langues et
communication sous-titré « Quel français parlons-nous ? ». Elle a également été au centre
du Colloque international des 27, 28 et 29 octobre tenu à Yaoundé au cours de la même
année 2003 sur le thème Le français écrit et parlé en Afrique : bilan et perspectives. Elle a
été enfin le sujet du N°159 de la revue Notre Librairie, numéro sous-titré Langues, langages,
inventions(juillet -septembre 2005), avec comme grandes articulations « les métamorphoses
du français », « inventivité de la langue » et « dire et détours ».
De même, une telle inquiétude, déjà posée par Binon et Claes (1995), est reprise par celle-ci
(2003 : 5) dans les termes suivants :
Telles sont les pistes qui ont orienté vers le choix du thème Compétence interculturelle et
efficacité de l'action didactique en classe de langue. Elles guident ainsi vers la recherche de
l'importance de la maîtrise de l'interculturel pour un enseignant de langue et sous-tendent le
problème qui est formulé au coeur de l'étude.
I.2. LA FORMULATION DU PROBLEME
C'est donc cette question diversement posée qui est abordée ici, question à laquelle l'étude
tente de trouver des réponses. Mais, au lieu de procéder par une démarche qui prenne pour
base le culturel dans son ensemble à travers les langues, les stratégies discursives, les us et
coutumes, les mets, l'habillement, l'art, ..., ou par une démarche qui prenne pour base un
corpus disparate collecté au gré des circonstances de communication et interactions
langagières, nous voulons partir d'extraits de textes qu'on pourrait à raison nommer corpus de
référence pour une telle interrogation. Il s'agit des extraits ou de passages des romans
africains contemporains tels que Temps de chien de Nganang (2001) qui peut être considéré
comme un texte de référence des nouvelles écritures africaines pour avoir été lauréat de
deux prix littéraires, à savoir le Prix francophone Marguerite Yourcenar (2001) et le Grand
prix littéraire de l'Afrique noire (2002). Il s'agit aussi des extraits des textes comme Moi
Taximan de Kuitche Fonkou (2001), Branle-bas en noir et blanc de Mongo Beti (2000), ...,
oeuvres écrites dans le même style et le même ton.
D'emblée, les textes ci-dessus cités peuvent être considérés comme les marques irréfutables
d'une créativité débordante. Pourtant, il faut se rendre à l'évidence du fait qu'ils présentent
des situations où, comme le dit si bien Thomas (2002 :13), « nous constatons que nos mots
sont intraduisibles », des situations où « nous souhaitons expliciter nos stéréotypes pour
dépasser les préjugés », des situations qui impliquent et exigent trois attitudes
indispensables à leur compréhension, à savoir « l'empathie », « le travail sur les divergences
et les conflits » et la volonté de coopération ». Pour cela, leurs extraits en particulier et ceux
des nouvelles écritures africaines francophones en général constituent non seulement des
corpus ou des supports didactiques de référence pour l'enseignement de la langue française
en contexte scolaire, mais aussi et surtout le témoignage des mutations observables et
appréciables d'une langue et de pratiques langagières caractéristiques d'une époque : l'époque
contemporaine, la nôtre. Voilà le contexte qui, intégrant des oeuvres configurant des savoirs
pluriels résultant, comme le dit Gourmelin-Berchoud (1996 :52), « des interactions
entre culture(s) d'origine(s) et culture mondialisée issue de l'Occident », suscite, suggère
cette étude et en justifie les objectifs.
L'objectif général de cette étude est de mesurer le poids que peut avoir la compétence
interculturelle de l'enseignant sur le processus d'acquisition / appropriation de la langue par
les apprenants. Une telle entreprise permet conséquemment de mesurer la valeur didactique
des nouvelles écritures africaines francophones, prises comme extraits ou oeuvres complètes,
en tant que supports authentiques pour les activités d'enseignement / apprentissage de la
langue française. Il s'agit donc de partir de l'état de langue française contenue dans les
extraits de texte choisis et analysés, et des exigences de la compétence interculturelle
nécessaires à son appréhension pour envisager et proposer, le cas échéant, quelques
perspectives didactiques.
- d'apprécier l'impact que peut avoir la compétence interculturelle des enseignants sur leur
efficacité dans l'action didactique en langue française,
Pour ce qui est des enseignants et autres chercheurs, ce travail de recherche est comme un
coup d'oeil lancé sur cette discipline qu'est la didactique de la langue française, un autre
regard qui devrait aboutir à des innovations profitables pour ce qui est des contenus
d'enseignement et des pratiques didactiques en salle de classe. De là, les enseignants
capitaliseraient mieux leurs connaissances linguistiques, culturelles et interculturelles pour
les mettre au service des apprenants en en tirant le plus grand plaisir pour eux-mêmes et le
plus grand profit pour l'enseignement.
Ensuite, il s'agit d'une étude qui pourrait aider les élèves à mieux envisager l'apprentissage de
la langue française en ceci qu'elle leur permettrait d'intégrer sans complexe les phénomènes
linguistiques ou littéraires issues de leurs propres milieux culturels ou d'autres cultures dans
le processus normal d'apprentissage et d'appropriation de la langue. A partir de là, ils
approcheraient plusieurs cultures, maîtriseraient mieux la langue française et pourront dès
lors utiliser celle-ci pour mieux parler de celles-là.
Enfin, cette étude s'inscrit en droite ligne des préoccupations des organisations
internationales telles que l'UNESCO, l'AFIDES, l'ADEA , l'UNICEF, l'I.I.E.P., le S.E.A,
dans leur souci permanent d'éducation tout court, d'éducation interculturelle, d'éducation à la
tolérance, de culture de la compréhension internationale et de la coopération en vue de
l'instauration d'une paix durable à travers le monde entier. Seule la poursuite de cet idéal de
paix et la mise en oeuvre de stratégies multiformes pour l'atteindre peut permettre à la
communauté internationale d'évoluer vers un développement durable.
Pour qu'une étude se réalise à travers une opérationnalisation aisée des paramètres étudiés,
elle doit être délimitée sur plusieurs plans. Ici, elle le sera sur les plans thématique, spatial et
temporel.
Sur le plan thématique, des précisions doivent être faites au sujet des trois concepts que sont
la compétence interculturelle, l'efficacité de l'action didactique et l'état de langue étudié.
L'étude ne saurait prendre en compte toutes les composantes de l'interculturel telles que
circonscrites par Marmoz (2003 :47) dans son article intitulé « La recherche interculturelle
exploitation, pédagogie ou co-opération ? ». Ici, le concept interculturel portera sur le
linguistique, le littéraire, l'ethnolinguistique, le sociologique, l'ethnoculturelle, ... tels qu'ils se
fondent dans le texte romanesque. Cette option se justifie par le fait que le texte littéraire est
un véhicule privilégié des éléments de culture. Ainsi, les investigations, tout en traitant des
interactions culturelles, de la circulation des cultures et de leurs frontières, se limiteront
aux « pratiques langagières » écrites (Leray ; 2001 : 148).
Par ailleurs, l'état de langue étudié (pratiques langagières), concerne les nouvelles écritures
africaines de langue française et partant la norme linguistique telle qu'elle y est conçue et
perçue dans ses grandes lignes. Il s'agit ainsi des points sensibles de l'usage linguistique qu'il
faut mettre en exergue et au besoin théoriser afin que la didactique puisse les exploiter, les
extraits de texte ici exploités provenant du genre romanesque qui contient généralement
toutes les spécificités et variétés de la langue écrite et orale.
Si cette étude traite de l'état de la langue française tel qu'il est perçu dans les nouvelles
écritures africaines par l'enseignant de français, elle concerne les enseignants de français du
Cameroun en général et particulièrement ceux de la province de l'Ouest qui compte huit
départements à savoir les Bamboutos, le Haut-Nkam, les Hauts-Plateaux, le Koung-Khi, la
Menoua, la Mifi, le Ndé et le Noun. C'est dans la province de l'Ouest que les investigations
vont être menées pour que des généralisations soient envisagées.
Cette étude est menée au cours de l'année civile 2005 et les informations qu'elle contient en
terme d'effectifs d'enseignants et de résultats scolaires relèvent des données statistiques de
l'année scolaire 2004/2005 dans la province de l'Ouest.
Tels sont les paramètres qui permettent d'une part de poser la problématique de cette étude,
et d'autre part de la circonscrire dans l'espace et dans le temps afin de rendre non seulement
la compréhension des concepts étudiés plus facile mais aussi et surtout les investigations plus
opérationnelles.
Les concepts clés de l'étude sont d'emblée les deux paramètres que le libellé du sujet
voudrait relier. Il s'agit de compétence culturelle et efficacité de l'action didactique, concepts
qui doivent être définis par rapport à celui de langue française.
Pour définir ce concept, il faut au préalable expliquer les termes qui le composent à savoir
culture et compétence. Au besoin, on devra même définir la compétence culturelle pour
mieux cerner la compétence interculturelle.
Ces approches de définition rejoignent celle de Rocher (1969 : 88) pour qui la culture est
un ensemble lié de manières de penser, de sentir et d'agir plus ou moins formalisées qui,
étant apprises et partagées par une pluralité de personnes, servent, d'une manière à la fois
objective et symbolique à constituer ces personnes en une collectivité particulière et
distincte .
la culture [...] est cet ensemble complexe qui inclut la connaissance,la croyance, l'art, la
morale, le droit, la coutume et toutes autres capacités et habitudes acquises par l'homme en
tant que membre de la société.
Parce que anthropologique, la conception de Taylor est plus englobante que le sens restreint
ou restrictif qu'Oliviéri (1996 :9) et Morin (1969 :5) donnent à la culture. Si le premier parle
de « culture cultivée ou majuscule », les seconds parlent de culture « normative-
aristocratisante ». Pour eux, il s'agit précisément d'un savoir élitiste réduit aux beaux arts et
à la littérature. La définition de Taylor déborde par ailleurs la conception élargie qui confond
la culture à la civilisation en tant que ensemble de caractéristiques sociologiques, politiques,
historiques et autres communes aux vastes sociétés les plus évoluées. En définitive, parce
qu'elle prend en compte les éléments des conceptions restreinte et élargie, c'est-à-dire tout ce
qui permet à l'individu de s'intégrer et de vivre en communauté, l'approche de Taylor
(Oliviéri, 1996 : 9) est
une conception globalisante, voire holistique, qui intègre aux données précédentes les
modes de vie et de pensée, les comportements langagiers, les rites sociaux (les manières de
table au même titre que le rapport aux médias) .[...] Dans cette optique, le champ culturel
embrasse pratiquement tout ce qui fait de l'individu un être social.
s'adresse (...) à toute activité humaine, qu'elle soit cognitive, affective ou conative ( c'est-à-
dire qui concerne l'agir au sens strict ) ou même sensori-motrice. Cette expression souligne
que la culture est action, qu'elle est d'abord et avant tout vécue par des personnes (Rocher,
1969 :89).
En définitive, l'adjectif culturel concerne toutes les activités qui particularisent les peuples.
Tel que précisé dans le Dictionnaire Larousse (2000), il concerne l'ensemble des usages, des
coutumes, des manifestations artistiques religieuses et intellectuelles qui distinguent un
groupe, une société.
Au regard de tous les sens ici donnés, le culturel tel que appréhendé dans ce travail est
largement anthropologique parce qu'il va qualifier prioritairement le linguistique, le
sémiolinguistique, le littéraire, bref le comportement langagier impliquant bien sûr des us et
coutumes, des modes de vie. Il va également concerner les cultures cultivées pour ce qui est
des connaissances méthodologiques ou didactiques. Et comme le comportement langagier
renvoie également à des phénomènes appartenant à plusieurs langues et donc à plusieurs
cultures, ce culturel traduit un vécu culturel intermédiaire, l'interculturel.
le préfixe inter qui suggère des interactions, des échanges, des partages, des
complémentarités, des coopérations, des réciprocités,[...], sert à entretenir, dans le meilleur
des cas, des souhaits, des espoirs, un idéal à atteindre : celui d'une coexistence pacifique et
solidaire entre les populations.
Apparemment proche donc des concepts tels que multiculturel, pluriculturel, transculturel,...
l'interculturel implique une réalité située à l'intersection de plusieurs cultures. Il implique par
conséquent le dialogue des cultures. C'est pour cela que tentant de le définir, Marmoz
(2001 :42) l'associe et le renvoie précisément aux
travaux sur les cultures et leurs frontières, [aux] lignes d'évolution de ces cultures, [à]
l'importation / exportation des biens traditionnellement marchands, [aux] idées ou [aux]
pratiques, [aux] conditions et [aux] effets également de la traduction, qu'il s'agisse du
travail habituel ainsi repéré ou de l'écoute, de la compréhension de ce qui vient d'ailleurs .
Sur le plan juridique, la compétence est une aptitude légalement reconnue à une autorité
publique de poser tel ou tel acte dans des conditions déterminées. Elle découle d'une
connaissance approfondie qui confère le droit de juger, d'agir ou de décider dans le domaine
indiqué.
toute compétence est fondamentalement liée à une pratique sociale d'une certaine
complexité. Non pas à un geste précis, mais à l'ensemble des gestes, des postures, des
paroles inscrits dans la pratique qui leur donne sens et continuité [...] Il est donc normal
que toute compétence largement reconnue évoque une pratique professionnelle instituée,
émergente ou virtuelle (2000 :44).
Alors, puisque la compétence est liée aux pratiques sociales et comme la culture au sein de
laquelle se situe le phénomène linguistique est une donnée essentiellement collective et
sociale, il serait intéressant d'associer les deux termes pour en mesurer la portée en contexte
pédagogique ou didactique.
d). La compétence culturelle
la compétence culturelle est la capacité de percevoir les systèmes de classement à l'aide
desquels fonctionne une communauté sociale et, par conséquent, la capacité pour un
étrangerd'anticiper, dans une situation donnée, ce qui va se passer ( c'est-à-dire aussi quels
comportements il convient d'avoir pour entretenir une relation adéquate avec les
protagonistes en situation).
Pourtant et malgré cette évolution, l'inquiétude face aux mutations culturelles de plus en plus
nombreuses et accélérées demeure lancinante et préoccupante. C'est la raison pour laquelle
bien que l'approche de Porcher (1988) soit celle de « la culture en acte par opposition à la
culture objet », Abdallah-Pretceille (1996) pense que la valeur théorique d'une telle
définition ne permet pas de sortir de l'impasse au plan pédagogique. D'où la nécessité
d'envisager une approche interculturelle.
Ainsi, la compréhension anthropologique des faits culturels prend le pas sur leur
connaissance ethnographique. L'étude de faits statiques devient une analyse en termes de
phénomènes qui évoluent et d'interactions langagières entre les hommes. Il faut donc
comprendre que dans cette étude, le phénomène culturel est à la fois langagier et
linguistique. Il est langagier parce que toute production textuelle est une communication qui
vise un destinataire prêt à écouter et à interpréter. Ce fait langagier se veut par ailleurs social
parce qu'il implique plusieurs instances de parole. Enfin, le fait culturel est linguistique parce
qu'il se transmet par et à travers le code fait de sons et de sens qu'est la langue.
Il faudrait dès lors pouvoir distinguer dans le langage ce qui relève de la culture sociale et ce
qui relève de la culture individuelle du locuteur, qu'il s'agisse de « culture cultivée » ou de
« culture médiatisée ». C'est dire qu'il faudrait distinguer ce qui relève du fond culturel
collectif (us et coutumes) de ce qui relève de la créativité ou de la fantaisie personnelle du
sujet parlant. Mais au-delà de toutes ces analyses, il faut reconnaître avec Lê Thành Khôi
(1983 :1) qu'en société, l'interculturel est identifiable à travers « le processus d'interaction
verbal ou non verbal entre membres de cultures différentes » .
Plus simplement, la didactique se ramène à la science qui étudie les méthodes, techniques et
procédés d'enseignement/apprentissage. Et Tsafak (2001 :231) de conclure que
la didactique est donc la discipline dont l'objet est l'étude des différentes méthodes
d'enseignement en général et que l'on nomme didactique générale et des méthodes
d'enseignement spécifiques à chaque matière et que l'on désigne sous le nom de didactique
spéciale.
Cette définition rejoint celle de Plaisance et Vergnaud (1990) qui, cités par Tsafak (2001 :
232), pensent que
En définitive, la didactique est une discipline théorique et pratique qui part de l'élaboration
de postulats vérifiés et établis par leur expérimentation pour leur application en salle de
classe. Et pour ce qui est de cette étude, elle y distingue trois champs d'action que sont la
langue, la méthode et l'enseignement, trois domaines qui fondent sûrement son efficacité.
L'efficacité ou l'efficience est le bon rendement, c'est-à-dire le bon résultat à une épreuve,
résultat exprimé par rapport à des normes reconnues ou à des standards définis et clairement
fixés au départ. En psychologie de l'apprentissage, en psychométrie ou en pédagogie,
l'efficacité (Galisson et Coste, 1976 : 468) se présente comme
L'efficacité de l'action didactique est le bon résultat réalisé au cours ou au terme des activités
d'enseignement / apprentissage. Elle se mesure en terme de résultats obtenus par les élèves et
de pourcentage de réussite. Ces résultats sont la manifestation de la réussite ou de l'échec de
l'enseignant. A ce titre, ils peuvent être révélateurs du degré d'atteinte des objectifs
pédagogiques et partant du degré de maîtrise de la discipline enseignée et des méthodes
pédagogiques par l'enseignant. Pour le cas d'espèce, les résultats de l'action didactique seront
mesurés à travers les performances des élèves aux évaluations.
Pour Saussure (Galisson et Coste, 1976 : 306), la langue est un système spécifique de signes
articulés dont le but principal est de permettre la transmission des messages humains. De
nature sociale, poursuit-il, la langue est partagée par une communauté. Par conséquent, il
(Benveniste, 1974 :47-49) la considère, « en tant que système de signes exprimant les
idées » ,comme étant « le plus complexe et le plus répandu des systèmes d'expression, [...]
le plus caractéristique de tous ». S'il se dégage des passages ci-dessus évoqués que Saussure
indique les critères qui permettent de définir la langue, il le fait encore mieux dans la mise en
relief de la traditionnelle opposition langue / parole. Telle que résumée et présentée dans
plusieurs ouvrages, cette opposition fait de la langue l'objet de la linguistique dont la matière
réelle, mieux l'actualisation est la parole. Il s'en dégage, comme l'ont constaté Ducrot et
Todorov (1972 : 156) que :
La langue française est la langue nationale et officielle de la France. Elle est ainsi le code de
communication commun à la communauté française. Il s'agit d'un code fait de sons
particuliers associés à des sens particuliers qu'utilisent les Français pour communiquer. C'est
ici qu'on parle du français comme langue maternelle (des Français) avec sa norme
hexagonale caractéristique, comme le précise Minyono Nkodo (2003 :37), d' « une langue
homogène obéissant aux exigences métropolitaines »,une norme issue de la langue latine.
En tant que norme standard, Onguéné Essono (2003 : 57) la définit comme étant
la prescription linguistique [...] une convention établie par une autorité institutionnelle,
pour uniformiser et harmoniser les usages et les utilisations des activités discursives de la
société qui accepte de s'y conformer .Dans tous les milieux, on s'accommode de la norme.
Cette norme standard est aussi celle qu'utilisent les Français pour communiquer avec d'autres
peuples, même si au-delà du contexte spécifiquement français, d'« autres
langues françaises » existent hors de la France. C'est le cas au Québec qui est une province
du Canada et même en Suisse. On parle alors du français québécois ou de Suisse. C'est
également le cas de l'Afrique en général et plus précisément celui de l'Afrique francophone
subsaharienne où la langue française se crée de plus en plus une identité spécifique.
Il est question ici de la langue telle qu'elle est utilisée et parlée dans les communications
quotidiennes dans les pays francophones de l'Afrique au sud du Sahara. Il s'agit d'une langue
française qui respecte globalement la norme standard ou hexagonale surtout dans les
occasions et discours officiels, mais aussi d'une langue peu orthodoxe, métissée ou
« frelatée » quand il faut exprimer dans leur complétude les réalités fondamentalement
africaines.
[des] infractions syntaxiques, la désagrégation des structures, bref, toutes les innovations de
langue et de style, qui, seulement après coup, seront reconnues comme un maniement
exceptionnel de la langue.
En effet, les normes endogènes sont une réalité indéniable, une réalité bien différente de la
norme hexagonale standard, ne serait-ce que par les effets de productivité et d'appropriation
linguistiques constatées dans les interactions communicatives quotidiennes en société. Une
telle situation, écrit Manessy (1994 :11-12), est révélatrice du fait que
la langue importée est devenue commune (en droit sinon en fait) à l'ensemble de la
population des pays concernés(...) elle cesse d'être un objet de compétence individuelle pour
devenir un bien de la communauté ; en d'autres termes, elle passe du statut de savoir
spécialisé à celui d'outil langagier et se trouve dès lors incluse dans un réseau diffus de
lignes de force socioculturelles.
Ainsi, l'appropriation du français par les francophones de l'Afrique subsaharienne est passée
de sa phase spécialisée et fonctionnelle permettant « de satisfaire aux exigences d'une
société en mutation socioéconomique et sociopolitique » (Manessy ;1994 :12) à une
appropriation vernaculaire intégrant outre les premières exigences, les besoins langagiers les
plus naturels de ses utilisateurs et partant les paramètres de l'interculturel. L'évolution vers
une option interculturelle se justifie alors, comme le pense si bien Mendo Ze (1999), par le
fait que le français au fil du temps est devenu une « langue africaine ». Et pour les tenants de
cette thèse parmi lesquels Manessy (1994 : 11), ce français local à l'africaine ne serait « ni
sabir, ni créole, ni pidgin mais un français régional, avec ses registres de langues, ses
formes écrites et orales, mais aussi ses néologismes, ses emprunts ».
Voilà totalement décrit le contexte dans lequel « le français langue africaine », le français à
l'africaine, le français africain et plus proche de nous le français camerounais ont vu le jour.
Ce sont les variétés de cette réalité aux multiples facettes qui sont découvertes dans
les nouvelles écritures africaines, réalité dont il faudrait envisager la possibilité de prise en
compte didactique. Il s'agit de la situer au centre des préoccupations pédagogiques et
didactiques fondamentales dont les grands axes demeurent la prise en charge réelle dans les
curricula et les démarches méthodologiques. Une telle démarche permettrait d'en mesurer le
poids au sein de la pensée scientifique.
II.2. LA REVUE DE LA LITTERATURE
Elle consiste à faire le point des travaux de recherche qui se sont intéressés au rapport qui
existerait entre la compétence interculturelle et l'efficacité de l'action didactique. Et comme
une étude associant exactement ces deux paramètres n'a pas pu être trouvée, l'essentiel du
travail dans la revue de la littérature consistera à faire le point des méthodologies, méthodes
et approches didactiques décrivant l'enseignement des langues pour voir dans quelle mesure
elles se sont intéressées à l'interculturel.
un ensemble cohérent de procédés, techniques et méthodes qui s'est révélé capable, sur une
certaine période historique et chez des concepteurs différents, de générer des cours
relativement originaux par rapport aux cours antérieurs et équivalents entre eux quant aux
pratiques d'enseignement /apprentissage induites.
Ainsi, la méthode fait partie de la méthodologie. Et c'est dire, conclut Puren que « parmi les
méthodes, les différentes méthodologies effectuent donc des choix, définissent des
hiérarchisations, organisent des articulations dotées d'une certaine originalité et d'une
certaine cohérence » (1988 :17). Ces ensembles de choix constitués de méthodes spécifiques
vont être examinés à la fois sur les plans diachronique et synchronique.
Les premières méthodologies d'enseignement des langues sont pour les plus anciennes la
traditionnelle, la directe, l'active et l'audiovisuelle, chacune d'elles étant par ailleurs
constituée de méthodes spécifiques.
Le thème est la transposition en langue étrangère d'un texte écrit ou dit en langue maternelle,
alors que la version était la traduction d'un texte de la langue étrangère vers la langue
maternelle. L'étude des faits de civilisation quant à elle, permettait donc de connaître
l'ensemble des caractères propres aux sociétés ou aux peuples dont la langue était étudiée. A
ce titre, il fallait aborder les faits de civilisation en terme de réalités formant le substrat ou la
répartition de la population en catégories active et non active, les manifestations de cette
civilisation étant vécue à travers les comportements des membres de la collectivité, les
concepts instrumentaux dont ils se servent, leur vision du monde, bref à travers leur culture.
ne proposent plus que des exercices entièrement en langue étrangère, limitent la partie
grammaticale à des paradigmes proposés en fin de leçons comme résumés de ce que l'élève
est censé avoir lui-même induit à partir des textes de base, lesquels sont eux-mêmes
fabriqués sur des contenus proches de la vie quotidienne des élèves (en commençant par la
salle de classe, la cour de récréation, l'école, la maison paternelle, le village...).
Au regard des postulats ci-dessus énoncés, les méthodes qui constituent la méthodologie
directe ont des points communs que sont l'utilisation intensive de la langue étrangère et la
priorité à la langue orale. Par ailleurs, précise Puren (1988 : 16),
La méthodologie active, constituée de l'ensemble des méthodes actives, doit beaucoup aux
enseignements de Piaget. Caractérisée par la mise en application des principes et
enseignements de la pédagogie et de la psychologie modernes, elle est axée, - pour la plupart
des méthodes et approches d'enseignement des langues qui s'inspirent d'elle parmi lesquelles
les méthodes directe, orale, active, interrogative, intuitive, imitative et répétitive -, sur le
montage des réflexes verbaux, bases de l'activité et de la participation des élèves lors des
activités d'enseignement/ apprentissage et plus tard dans les interactions langagières en
communauté.
La méthodologie audio-visuelle tient son nom des auxiliaires autour desquels elle réalisera
l'intégration didactique. Centrée sur l'acquisition d'une langue pure, homogène et
monolithique, c'est-à-dire en un seul bloc, et ceci par l'éducation de la perception auditive et
de l'expression orale, elle s'appuie sur le matériel sonore et sur l'image pour sa mise en
oeuvre psychopédagogique. Ainsi, basée sur la compréhension et la production de phrases
correctes, elle a pour héritage les méthodes directe, orale, active, interrogative, intuitive,
imitative et répétitive qu'elle prolonge avec les apports de la linguistique structuraliste et du
behaviorisme comme théories de référence. Elle s'opérationnalise en deux méthodes, à
savoir la méthode audio-orale et la méthode audio-visuelle.
Développée aux Etats - Unis dès 1950 par Rivers (1964) qui s'inspire des travaux de Brooks
(1960) et de Politzer (1961), et dès 1960 en France, la méthode audio-orale dont les théories
de référence sont le distributionnalisme postbloomfieldien et le conditionnement skinnerien
est une réaction par rapport au flou linguistique des méthodes directes. Comme c'est le cas
pour ces dernières, elle donne, précisent Galisson et Coste (1976 : 56), « la priorité à la
langue orale, mais elle privilégie la notion de « modèle » à imiter, dans des exercices dits
« structuraux » ». Ces dispositions méthodologiques répondent ainsi aux exigences de la
segmentation distributionnelle de la chaîne parlée en unités définies par leurs positions et par
leurs fonctions et à celles de l'enseignement programmé skinnerien.
This method emphasizes aural-oral skills. Its original name was in fact the Aural-Oral
Method. As the name implies, listening and speaking are the primary skills. The techniques
of the method rely heavily on the use of dialogue.
The following classroom procedure illustrates the structural aspect of the method. Lexical
units are isolated for practice in carefully controlled structures. The learning material is
introduced in dialogue form, which is then used as a basis for structural drills. Mimicry and
memorization of structural items are typical features of the method. Skills are practised in
the order of listening, speaking, reading, and writing. The control of items is intended to
minimize errors. Correct responses are immediately reinforced.
d.2.). La méthode audio-visuelle
Initiée dès les années 1950 à partir des travaux des équipes de recherche de Zagreb et de
Saint-Cloud, la méthode audio-visuelle s'appuie, sur les considérations et principes selon
lesquels le choix et la sélection des contenus d'enseignement d'une langue sont déterminés
par les impératifs de la communication. Et la démarche méthodologique présentée par
Galisson et Coste (1976 : 59) est la suivante :
- présentation graduelle des divers usages sociolinguistiques, priorité - non primauté - étant
donnée à l'oral ;
- importance accordée :
* au locuteur et aux relations qu'il entretient avec la situation, l'interlocuteur et son propre
message ;
- Au plan pédagogique :
-Refus de la traduction interlinguale (passage par la langue maternelle)
-Accent mis sur une communication véritable (dans la présentation des dialogues, textes et
documents, aussi bien que dans les exercices et activités de classe).
- Au plan technique :
- mémorisation,
- transposition avec réinvestissement des éléments linguistiques acquis dans les phases
précédentes.
Tels sont les grands axes de la didactique des langues des années où par leur caractère
systématique, les méthodes garantissaient l'acquisition d'une langue française pure,
homogène, correcte et étrangère avec sa norme exogène. Et si l'acquisition mécanique d'une
langue déconnectée de toute réalité culturelle ambiante correspond bien aux premières
heures de l'apprentissage d'une langue étrangère dans un milieu donné, il faut dire
qu'aujourd'hui, elle correspond moins à l'Afrique francophone subsaharienne où le français
est sinon presque une langue maternelle, du moins une langue seconde.
Les méthodologies en revanche sont des formations historiques relativement différentes les
unes des autres, parce qu'elles se situent à un niveau supérieur où sont pris en compte des
éléments sujets à des variations historiques déterminantes tels que :
- les objectifs généraux, parmi lesquels dans le cas de l'enseignement scolaire, priorité peut
être donnée à l'objectif pratique, ou au contraire aux objectifs culturels et formatifs ;
- les contenus linguistiques et culturels, où l'on peut par exemple privilégier la langue
parlée ou la langue écrite, la culture artistique ou la culture au sens anthropologique... ;
- et les situations d'enseignement : les rythmes scolaires, le nombre d'années de cours,
d'heures d'enseignement par semaine, d'élèves par classe et l'homogénéité de leur niveau,
leur âge, leurs besoins et leurs motivations, la formation des professeurs, etc, qui peuvent
varier considérablement d'une époque à l'autre.
Une approche profonde des éléments ci-dessus cités montre d'une part l'importance de la
maîtrise de la langue en tant que structure ou ensemble de structures et d'autre part
l'intervention du culturel à tous les niveaux. Véhiculé dans les apprentissages en terme
d'objectifs culturels et perçu tant dans les contenus à caractères artistique ou anthropologique
que dans les descriptions linguistiques, psychologiques et pédagogiques, le culturel permet
de relever et de cerner la dimension totale et efficiente du langage humain.
Développée dès 1975, l'approche communicative est une réaction contre le caractère rigide et
irréaliste de la méthodologie audiovisuelle. Trop systématique, elle laissait peu de place à
l'initiative de l'apprenant dont le rôle était tout simplement d'acquérir les notions qui lui
étaient enseignées et par conséquent de produire des énoncés justes et atomisés. De même,
les dialogues proposés aux apprenants étaient bien loin de la réalité et de la communication
normale, « le type de situation présenté [étant] toujours le même : 2 à 4 personnes qui
parlent à leur tour sans chevauchement, sans hésitation, sans reprise, sans bruits de fond,
sans ratés » (Porcher, 1981 : 25). Ce faisant, le texte utilisé était réductif par le fait même de
l'absence du naturel qui caractérise les interactions langagières entre les hommes, effaçant
par la même occasion leur contenu socioculturel.
Pour Canale et Swain (1980), cette compétence a trois composantes à savoir la compétence
grammaticale (CL), la compétence sociolinguistique (CS) et la compétence stratégique
(CST). La compétence sociolinguistique intègre une composante socioculturelle conçue
comme étant « la connaissance des règles sociales dans un groupe donné » et une
composante discursive qui est « la maîtrise des différentes formes de discours ». Enfin, la
compétence stratégique est entendue comme l'ensemble des stratégies de communication qui
permettent de combler les ratés des échanges entre interlocuteurs en restaurant le naturel qui
caractérise les interactions langagières normales.
Sophie Moirand (1982 :20) quant à elle, identifie quatre éléments qui constituent la
compétence de communication :
La définition de Moirand est plus complète. Elle reconnaît par ailleurs que la compétence
stratégique ne se réalise qu'au moment de l'actualisation des autres compétences à travers les
phénomènes de compensation qui relèvent de « stratégies individuelles de communication ».
- les actes illocutoires, actes dont l'énonciation constitue en elle même un acte qui
transforme les rapports entre les interlocuteurs ;
- les actes perlocutoires, actes dont l'énonciation produit des effets plus ou moins lointains
sur les interlocuteurs (convaincre, rassurer, étonner, embarrasser, contrarier,
impressionner, ...).
Le dernier apport de l'approche communicative (Moirand, 1982) est la prise en compte des
sciences du langage, c'est-à-dire de la sociolinguistique (Labov, 1976 ; Hymes, 1964 ;
Berstein, 1975), de la sémantique (Fillmore, 1975) et de la pragmatique (Austin,
1970 ; Searle, 1972) dans l'analyse du discours à partir de documents authentiques et à des
fins d'hétérogénéité théorique des outils descriptifs de référence.
Voilà les principes qui, participant d'un mouvement de centration de l'apprentissage sur
l'apprenant et procédant par une progression cumulative (acquisition progressive des
structures avec rajout de structures les unes sur les autres), ou en spirale (avec des avancées
et des retours sur des structures déjà présentées), définissent la démarche méthodologique de
l'approche communicative.
* La méthodologie
- La compréhension (négociation);
- L'expression guidée ;
en gros, le constat sera que dans ses développements récents, la didactique s'est révélée plus
sensible à ce que pouvait lui apporter l'étude des actes de parole qu'au parti à tirer de
l'analyse du discours.
- Pour un public d'apprenants avancés, le travail sera surtout centré sur l'écrit, et on aura
recours à l'analyse de discours (Bérard, 1991 : 30).
Voilà les raisons fondamentales qui orientent les recherches en didactique des langues
(linguistique appliquée d'avant) vers les problématiques interculturelles.
II.2.3. La pédagogie interculturelle d'Abdelwaheb Allouche
Introduisant le 30 octobre 1929 une série d'articles sur la crise du français à Genève, Robert
de Traz (Bronckart, 1984 :6) constate, parlant du langage des enfants, qu' « ils parlent un
effroyable charabia, mêlé d'argot genevois, d'argot parisien, de termes impropres, de termes
fabriqués par eux-mêmes ». Pour lui comme pour Abdelwaheb Allouche (1984), les
difficultés d'expression des enfants couvent deux faits fondamentalement liés. D'une part, il
s'agit du malaise de l'enseignement du français qui doit prendre en compte une trop grande
diversité de finalités à la fois vagues et parfois contradictoires parmi lesquelles l'acquisition
de la grammaire traditionnelle, le maintien et la reproduction d'une langue littéraire
stabilisée, le développement du raisonnement logique et l'unification des parlers vers un seul
système orthographique, et d'autre part, le désarroi des locuteurs face à une langue fermée
sur les modèles édictés par la société française.
Pour poser « La problématique de l'enseignement des langues et des cultures d'origine aux
enfants d'immigrés maghrébins : l'exemple de la banlieue parisienne », Abdelwaheb
Allouche part du constat selon lequel
pour que l'idéologie de l'égalité des chances joue sans l'ombre d'un doute, l'école a fait
comme si la seule famille est le système scolaire et que le chronomètre s'est mis à marcher
lorsque l'enfant a porté son tablier ou a pris le chemin de l'école. Les influences
extrascolaires et l'identité première - surtout la langue maternelle - sont mises au vestiaire
car elles sont considérées comme sources d'interférence (1984 : 45) .
Conçue dans l'optique d'un processus qui « essaie de prendre en considération les situations
linguistiques provoquées par la transplantation, et de valoriser les cultures d'origine des
enfants immigrés » (p. 43), la pédagogie interculturelle remet en cause l'une des missions
fondamentales de l'école, la finalité constituée de ses visées uniformisantes. Orientée
vers « la conciliation recherchée avec la socialisation première de l'enfant par la
réappropriation de la langue maternelle et la valorisation identitaire» (p.46), cette visée axe
son action dans deux directions :
- l'apprentissage des langues d'origine dans le cadre d'un cours intégré à l'enseignement
habituel,
Telle que décrite, la pédagogie interculturelle, parce que appliquée ou réservée aux seuls
immigrés portugais et arabes, valorise essentiellement les langues d'origine ou maternelles
qui jouent d'après l'expression de Bouton (Abdelwaheb Allouche, 1984 : 49) le rôle de « lieu
géométrique »[...] de toute les conduites verbales, [ permettant] de corriger les erreurs en
rendant transparentes les interférences ». A partir de là, l'enfant peut facilement distinguer
les codes à travers une pédagogie de la différence et se corriger immédiatement lorsqu'il y a
confusion dans les codes ou des codes.
contrairement à l'enseignement des langues d'origine qui ne s'adresse qu'aux enfants des
migrants, les activités d'animation ont le mérite de valoriser les cultures différentes aux yeux
de tous les enfants. Elles consistent à leur offrir des possibilités d'expression verbale et
corporelle. Les classes éclatent en ateliers de contes, théâtre, marionnettes. Il ne s'agit pas
d'apporter de nouvelles connaissances, mais de mieux se connaître mutuellement par un
travail de simulation (1984 :49).
Proposée dans le cadre d'une pédagogie d'intégration culturelle pour la didactique des
langues, la sémio-didactique de Gourmelin-Berchoud (1996 :152) se situe à contre courant
des préoccupations des tenants de l'utilisation mécanique des méthodes d'enseignement des
langues. Egalement opposée aux préoccupations des spécialistes des démarches
pédagogiques ethno/ego-centristes naturelles, la sémio-didactique est
Par ailleurs, aucune insistance n'est faite sur les contenus d'enseignement, ce qui rend les
leçons à la fois superficielles et autrement aléatoires. Toutes ces lacunes peuvent peut-être se
justifier par le fait que Gourmelin-Berchoud n'a dessiné que des pistes pour une démarche à
affiner et à parfaire plus tard. Peut-être que de telles lacunes pourraient être comblées dans la
démarche plus systématique que propose Amor Séoud.
II.2.5. La démarche interculturelle d'Amor Séoud
La démarche interculturelle est ainsi un passage obligé pour la didactique du texte littéraire
ou du discours à cause de la dimension anthropologique des textes. Cette dernière constitue
une voie d'accès privilégié aux modèles culturels. Une telle démarche concerne à la fois le
fond et la forme des textes et évoque la fonction sociale de la littérature, fonction qui
figure sa dimension représentative des références culturelles d'une communauté et
partant son important rôle intégratif et identitaire. Par ailleurs, Séoud pense que la
complexité des problèmes identitaires au lieu d'entamer l'intérêt didactique qui leur est porté
aujourd'hui, permet plutôt d'établir un lien étroit entre l'école et la vie, un lien qui se joue
dans la réalité. C'est pour cette raison qu'
il faut avoir déjà conscience que l'interculturel est un passage obligé parce qu'aussi, à y
regarder de plus près, tout rapport avec le texte est dans son essence interculturel, en F.L.E.
mais également en F.L.M, compte tenu évidemment de la « pluralité » culturelle, de la
multiplicité des croisements culturels, caractéristiques de la civilisation d'aujourd'hui et
même, par-delà cette pluralité et cette multiplicité (Séoud, 1997 :137).
est par définition interculturelle, puisque même si l'on reste dans une culture de départ, elle
nous invite à rendre visible une mémoire et une identité, enfouies sous l'éphémère identité du
présent (Bertrand , 1993 :53) .
La démarche interculturelle fait de l'Autre un miroir pour soi et de soi un miroir pour
l'Autre. En effet, grâce à sa position d'extériorité (Bakhtine, 1984) que Todorov (1989)
traduit par exotopie, seul l'Autre peut nous voir dans notre totalité, seul l'Autre peut nous
permettre de nous voir dans notre totalité. De la même façon, c'est cette position qui permet
de voir l'Autre dans sa totalité. Ainsi, la culture étrangère a besoin de la culture maternelle
pour s'élucider et vice-versa. Et Bakhtine (1984 : 140) de préciser que
Cette démarche théorique montre à suffisance qu'une situation sociale de métissage culturel
ou une situation sociale multiculturelle entraîne automatiquement une méthodologie
interculturelle. Et Séoud conclut qu' « ainsi la question, sociale, du multiculturel, entraîne la
question, pédagogique de l'interculturel» (1997 :149). Cette méthodologie, au regard de la
civilisation mondiale, mondialisée ou transfrontalière qu `elle implique, permet bien
d'aborder les nouvelles écritures africaines quel que soit leur degré de polyculturalité,
demulticulturalité, de métissage culturel ou de pluralité culturelle.
Dans un premier temps, l'ouvrage met en exergue l'importance de la puissance des uns et des
autres et la complexité des relations culturelles qu'on ne saurait réduire à la langue de
communication ou aux réalités pédagogiques en faisant fi de leur dimension politique. Puis,
il définit les grandes lignes de la recherche interculturelle dont les champs de prédilection
sont clairs : les cultures et leurs frontières, leurs lignes d'évolution, l'importation/exportation
de biens marchands, les idées et pratiques de traduction, la reconnaissance, les rencontres
entre porteurs de codes culturels, ...
Au regard de la synthèse des études menées dans le cadre du Conseil de l'Europe en vue de
définir une citoyenneté européenne et des résultats des travaux menés dans le cadre de la
coopération interuniversitaire France-Portugal et France-Brésil au niveau des programmes
d'échanges, Marmoz conclut que l'interculturel est un marché, ceci à cause des principes
régulateurs de son fonctionnement. Il cite à propos Abdallah-Pretceille (1996 :26) qui dit
que « l'interculturel, c'est la circulation, le partage, l'enrichissement par les
différences » , c'est-à-dire un cadre d'échange caractérisé par des rapports de force et de
domination. Cette idée, Ladmirail et Lipiansky la renforcent quand ils disent que ce
marché, « volontariste dans un monde inégalitaire », régulé par le respect et le droit à la
différence, « définit moins un champ comparatif [...] qu'un champ interactif, où l'on
s'interroge sur les relations qui s'instaurent entre groupes culturellement
identifiés » (1989 :10), un lieu naturel d'échanges où le commerce, mieux la communication
entre partenaires est évidente. Et Camilleri et Vinsonneau de conclure que « l'interculturel
désigne alors une attitude générale : veiller à ce que la différence culturelle, partout où elle
se rencontre, ouvre à la communication au lieu de se convertir en barrière » (1996 :78)
Ensuite, Marmoz (2001) établit dès lors que pour que la communication, l'échange,
l'interaction, la compréhension comme fins du langage et du partage interculturel soient réels
et opérationnels, ils doivent se définir par trois pistes qui constituent simultanément les
lignes forces de l'interrogation de la quête ou de la recherche interculturelle à savoir la
pédagogie, l'exploitation et la co-opération.
la capacité de négociation suppose que l'on considère l'Autre comme un partenaire, c'est-à-
dire comme un égal, un prestataire de services. La transaction est devenue la conduite
quotidienne ordinaire, qui va de soi.
Malheureusement, l'égalité n'étant que pure fiction, la culture dominante prendra toujours le
pas sur la culture dominée, ce qui crée évidemment une situation d'exploitation. Car, comme
le dit si bien Demorgon,
Par ailleurs, il définit sur le plan des grands principes pédagogiques, les concepts
de monoculturalisme et d'assimilationnisme qui correspondent à l'idée qu'il existe une
« culture universelle » qui serait sûrement la culture dominante. Il définit ensuite
le multiculturalisme qui correspond à une situation où chaque groupe culturel affirme son
identité et se cramponne à sa culture qu'il croit différente et irréductible. Dès lors, conclut
Mialaret (2001 :267), « le paysage culturel se présente, dans ce cas, sous l'aspect d'une
mosaïque de cultures aux délimitations nettement dessinées ».
Au regard de toutes les analyses ci-dessus faites, il faut d'emblée louer le caractère presque
encyclopédique de l'ouvrage de Marmoz et Derrij (2001). Néanmoins, il faut reconnaître que
les rapports entre les cultures et les peuples focalisent beaucoup plus l'attention de ses
auteurs. De même, les seuls projets initiés et évoqués sont beaucoup plus inscrits dans le
cadre des programmes d'échanges d'étudiants. Pourtant, au terme de l'analyse des démarches,
pédagogies et méthodologies ici présentées, il serait intéressant de faire une synthèse à
retenir et à expérimenter en situations didactiques. Si une telle tentative ne peut pas se faire
en terme d'étapes pratiques de leçon à mettre en oeuvre, elle peut tout au moins se faire en
termes de principes à adapter au gré des situations pédagogiques.
Les principes de la démarche interculturelle telles que envisagées dans la fiche de lecture de
Clément (2001) sont au nombre de quatre, à savoir se décentrer, se mettre à la place des
autres, coopérer et Comprendre comment l'autre perçoit la réalité et comment l'autre me
perçoit. Ces principes sont ci-dessous explicités.
Se décentrer signifie jeter sur soi et sur son groupe un regard extérieur. L'objectif est
d'apprendre à objectiver son propre système de références, à s'en distancier (sans pour autant
le récuser) et donc à admettre l'existence d'autres perspectives.
Se mettre à la place des autres, c'est développer des capacités empathiques : se mettre à la
place des autres, se projeter dans une autre perspective. Appréhender une culture, c'est
dépasser une vision parcellaire et ne pas la réduire à une énumération de faits et de
caractéristiques culturels, ne pas classer, ne pas généraliser.
Tels sont les principes de la démarche interculturelle que nous vivons déjà quotidiennement,
et cela le plus souvent malgré nous, dans des interactions linguistiques, culturels ou tout
simplement humaines qui nous frustrent, nous aliènent, provoquent des rejets ou des replis
sur soi ou dan le meilleur des cas nous valorisent, mais toujours au détriment d'un autre. Dès
lors, pour tirer le meilleur profit des contacts et échanges interculturels, il serait mieux non
seulement de les circonscrire dans leurs lieux d'incrustation, mais aussi et surtout d'envisager
leur gestion dans les milieux sociaux où ils sont autrement récurrents tels que la classe de
langue. C'est la justesse de ce cadre qui est en effet un des lieux privilégiés d'exploration,
d'expérimentation et d'application de la démarche interculturelle qui fonde les hypothèses
sous-tendant la présente étude.
a) L'hypothèse de recherche n°01
Plus un enseignant est compétent sur le plan interculturel, plus il l'est aussi sur le plan
de la didactique théorique de la langue (c'est-à-dire en ce qui concerne la maîtrise des
connaissances méthodologiques).
Plus un enseignant est compétent sur le plan interculturel, plus il est efficace sur le plan
de la didactique pratique en classe de langue (c'est-à-dire en ce qui concerne la
transmission des connaissances en situation d'enseignement).
Les variables de cette étude sont bien sûr de deux ordres, à savoir la variable indépendante
qui est la compétence interculturelle et la variable dépendante qui est l'efficacité
didactique en classe de langue. Pour une meilleure compréhension des paramètres de
l'étude, les variables doivent être présentées en termes d'indicateurs mesurables avec des
modalités claires pour la faisabilité et l'opérationnalité des enquêtes.
Elle est l'efficacité sur le plan théorique ou plan de la maîtrise des connaissances
méthodologiques avec trois modalités :
(12 questions :
Q 05-Q16)
Variable dépendante Les Grande maîtrise
performances
Efficacité en obtenues au (07 à 09 réponses
didactique théorique questionnaire justes)
de recherche Maîtrise
Moyenne ( 05 et 06
Mesure réponses justes)
Maîtrise insuffisante
Q 05-Q16)
Variable dépendante Les Grande efficacité
performances
Efficacité en obtenues en (Bons résultats :
didactique pratique classe en fin supérieurs à 46 %)
(résultats des élèves) d'année à la Efficacité moyenne
(Résultats moyens :
supérieurs à 30% et
inférieurs ou égaux à
46 %)
dernière Efficacité
séquence insuffisante(Mauvais
résultats :
Mesure inférieurs ou égaux à
30 %)
Ce sont ces hypothèses qui orientent
(01laquestion :
définitionQ26)
de la démarche méthodologique adoptée
pour l'étude.
DEUXIEME PARTIE :
LE CADRE METHODOLOGIQUE
Cette étude est une recherche de type appliqué fondée sur le modèle exploratoire. En effet,
elle explore les voies de résolution d'un problème réel en classe de langue aujourd'hui, celui
de la compétence interculturelle de l'enseignant par rapport à son efficacité didactique. Un tel
problème est bien d'actualité au regard de l`hétérogénéité identitaire, de « l'hétéroculture »
( Marmoz et Derrij, 2001:49) ou métissage culturel, du multiculturalisme et de la
mondialisation qui caractérisent les textes littéraires francophones contemporains.
Cette recherche est de type appliqué parce qu'il ne s'agit pas d'une simple curiosité. Le
chercheur ne voudrait pas juste savoir pour savoir, mais il cherche des solutions à un
problème concret. Il s'agit de voir si la compétence interculturelle de l'enseignant de langue
française a un impact sur sa capacité à exploiter de manière efficiente les textes trop métissés
sur le plan culturel, exploitation devant permettre une meilleure conduite des activités
d'enseignement/apprentissage d'une part et d'autre part une meilleure acquisition
/appropriation des savoirs linguistiques et partant de la langue.
La population de recherche est constituée de tous les enseignants de français exerçant dans la
province de l'Ouest, soit approximativement 410 enseignants recensés dans les secteurs
public et privé.
Légende :
Si les effectifs des enseignants sont clairement arrêtés dans les établissements scolaires du
secteur public, ce n'est pas le cas pour le privé où les choses sont parfois moins précises, à
cause de la suspicion constante qui règne entre les promoteurs et leurs employés pour ce qui
est de leurs droits sociaux. Il s'agit d'un aspect du problème qui concerne prioritairement les
diplômés de l'enseignement supérieur. Néanmoins, au bout du compte, nous avons considéré
les chiffres qui nous ont été donnés.
III.2.2.L'échantillon de recherche
L'échantillon de recherche, partie de la population sur laquelle les enquêtes ont été
effectivement menées, est constitué de 205 sujets, soit la moitié des enseignants de français
exerçant dans la province de l'Ouest. Cet échantillon constitue en effectif les 50 % de la
population. Il est par conséquent assez représentatif des catégories d'enseignants existant au
sein de la population. Ainsi, les Contractuels, les I.E.G., les IPEG, les professeurs diplômés
de l'enseignement supérieur (licenciés, maîtrisards, ...), les PCEG/PENIA (PAENI) et les
PLEG/PENI y sont largement représentés. Il en est de même, pour les huit départements de
la province.
Pour obtenir cet échantillon, un quota a été défini par département, à savoir 35 sujets pour le
départements ayant au moins 50 enseignants et 20 pour ceux des départements ayant moins.
Il s'est agi d'un échantillonnage orienté, démarche que Grawitz (2001 :535)
appelle méthode de sondage par « choix raisonné », des quotas ayant été définis dès le
départ par département afin que la représentativité des diverses catégories au sein de la
population soit effectivement assurée. En effet, précise-t-elle,
le choix dont il est question ne met en jeu qu'un raisonnement empirique,sans aucune
rigueur scientifique.[...] On choisira les individus de l'échantillon de façon à ce que celui-ci
reproduise les caractéristiques de la population totale.
Afin de respecter ces exigences et dans le but d'atteindre effectivement les quotas définis au
départ, la descente dans les centres d'examen a été d'une très grande utilité, même si l'accès
aux correcteurs n'était pas toujours facile. Enfin, au sein des sous-échantillons que
constituent les quotas par département, le choix des sujets a été accidentel. En effet, seule
la présence de l'enseignant dans le centre de correction des examens du secondaire justifiait
qu'il soit retenu dans l'échantillon de l'étude. Et ainsi, dès que le nombre de questionnaires
correspondant au quota défini pour un département était atteint, le choix des sujets s'arrêtait.
Mais, le souhait constant restait d'atteindre le maximum d'enseignants possible. Telle est la
démarche qui a permis de définir l'échantillon de l'étude qui se présente ainsi que nous le
voyons ci-dessous.
La conception de l'instrument de collecte de données dans le cadre de cette étude suit deux
phases principales dont la première est l'élaboration du questionnaire et la seconde sa
validation.
A. L'identité du répondant
Cette partie du questionnaire est constituée de trois groupes de questions correspondant à des
paramètres précis recherchés. Elles sont réparties ainsi qu'il suit :
- 09 portent sur les connaissances méthodologiques (17, 18, 22, 24 et 25) et critiques (19, 20,
21 et 23) du répondant. Elles permettent de mesurer la compétence des répondants en
didactique théorique.
- et 01 (26) porte sur les performances (les résultats de) des élèves et donc sur la compétence
des répondants en didactique pratique.
(5. Coût)
NB : Les données mises entre parenthèses sont celles qui ne correspondent pas de manière
exacte aux visées de la présente étude ou évaluation et encore moins à sa démarche
exploratoire. Par conséquent, le questionnaire de recherche ici utilisé, en tant que instrument
de collecte de données, prend en compte les données mises en gras.
La collecte des données a eu lieu pendant la correction des examens officiels. En effet, les
centres de correction des examens étant des lieux de regroupement d'enseignants, les
contacter devenait plus facile, même si la récupération ne l'était pas autant. Tous les centres
de correction des chefs lieux des huit départements de la Province de l'Ouest ont été
parcourus presque toutes les semaines au cours des mois de Juin et Juillet 2005.
Au niveau de chaque centre de correction d'examens, des personnes relais sûres ont été
contactées pour rester collecter les exemplaires de questionnaire remplis par les répondants.
Généralement, il s'agissait de responsables peu impliqués dans les examens officiels et par
conséquent plus disponibles ou d'enseignants régulièrement présents dans les centres
d'examens sans être trop occupés.
Les enseignants étant aujourd'hui des personnes naturellement difficiles et peu disponibles, il
fallait soit être après eux tous les jours pour leur rappeler qu'ils devaient remettre les
questionnaires remplis, soit mettre des collègues derrière eux pour les récupérer. Seule cette
témérité a permis la récupération de 168 questionnaires plus ou moins bien remplis sur les
205 distribués et dont le mode de traitement est ci-dessous présenté.
Pour des besoins de précision, le traitement des données a été confié à un informaticien
statisticien. Ce dernier a soigneusement fait ce travail au moyen d'un programme de
traitement indiqué à cet effet. Il s'agit du SPSS, c'est-à-dire le Statistical Package for Social
Sciences. Pour ce faire, les données ont d'abord été saisies de manière brute avec un total de
168 sujets sur les 205 qui constituaient l'échantillon de l'étude, soit un pourcentage de
récupération de 81,95 %. Ces données ont été analysées toujours au moyen du même
programme S.P.S.S.
Afin de les analyser, les données ont été re-codifiés. Les questions ont alors subi une
nouvelle organisation permettant d'attribuer des codes chiffrés tant aux réponses justes
qu'aux réponses fausses. Il en découle que les réponses justes sont codifiées par le chiffre 1
et les réponses fausses par le chiffre 0 pour ce qui est des questions qui décrivent les
compétences interculturelle et didactique. Il en découle aussi que pour les questions 5, 7, 13
à 15, 17 à 24, la réponse 3 correspond à 1 et les réponses 1, 2, 4 correspondent à 0. Par
ailleurs, pour les questions 6, 8 et 16, la réponse 4 correspond à 1 et les réponses 1, 2 et 3 à 0.
De même, pour les questions 8, 9, 10 et 25, la réponse 2 correspond à 1 et les réponses 1, 3 et
4 à 0. Enfin, pour la question 11, la réponse 1 correspond à 1 et les réponses 2, 3 et 4
correspondent à 0.
Pour ce qui est des compétences, elles ont été codifiées CIC pour la compétence
interculturelle (Questions n°5 à n°16) et CME pour la compétence méthodologique ou
didactique (Questions n°17 à n°25). Enfin, pour ce qui est de l'efficacité en didactique
pratique, c'est-à-dire les résultats des élèves, le regroupement en trois groupes a été effectué,
à savoir jusqu'à 30 % pour les enseignants les moins efficaces, de 30.01 % à 46 % pour les
moyennement efficaces et à partir de 46.01 % pour les plus compétents. Les compétences
interculturelle et méthodologique ont donc été mesurées selon les dispositions clairement
définies. Toutes les données traitées proviennent des 168 exemplaires de questionnaire
récupérés auprès des sujets de l'échantillon. Autant de données qui devraient être analysées
au moyen d'un outil statistique approprié.
L'outil statistique choisi pour cette étude est constitué d'une part des pourcentages et d'autre
part du test de khi-deux qui permet de voir si le rapport qui existe entre les variables
constituant les hypothèses est significatif, c'est-à-dire plus simplement de vérifier le degré
d'indépendance qui existerait entre les variables explicatives (indépendantes) et les variables
expliquées (dépendantes). La formule de calcul de ce test d'hypothèse est la suivante :
X² = (fo- fe)² / fe
X² = Khi-deux
= somme
fo = fréquence observée
fe = fréquence théorique
Sur la base des valeurs du Khi-deux calculées et lues sur la table conventionnelle par rapport
à un seuil de signification choisi, les conclusions suivantes peuvent être tirées :
- si la valeur calculée du x² est inférieure à sa valeur lue, alors la variable indépendante n'a
pas un effet significatif sur la variable dépendante. Par conséquent, l'hypothèse nulle est
acceptée et l'hypothèse de recherche rejetée.
Les données collectées ont été traitées suivant trois grilles de lecture, à savoir celle de
Pearson, le « Likelihood Ratio » et le « Mantel-Haenszel test for linear association ». Nous
avons prioritairement opté pour celle de Pearson, la première dans l'ordre de présentation des
résultats par le SPSS. Telle est la démarche méthodologique qui permet de synthétiser et de
présenter de manière succincte les résultats des investigations menées sur le terrain.
TROISIEME PARTIE :
Les caractéristiques des sujets sont de quatre ordres, à savoir le sexe, le niveau académique,
le niveau professionnel et l'ancienneté dans l'exercice de la profession. Chaque
caractéristique a été analysée séparément au regard de l'effectif des sujets ayant répondu au
questionnaire.
IV.1.1. Le sexe
Pour ce qui est du sexe des répondants, la configuration se présente telle que nous le voyons
dans le tableau ci-dessous.
Effectif Pourcentage
Sexe / Fréquence
Masculin 127 77
Féminin 38 23
Total 165 100
Sur les 168 sujets qui ont effectivement répondu au questionnaire, 03 n'ont pas donné leur
sexe. Sur les 165 qui l'ont fait, 127 sont de sexe masculin et 38 de sexe féminin. La
population de l'étude est donc en majorité masculine.
Pour ce qui est du niveau académique des répondants, seul le niveau de formation
académique permet de le définir. Au regard des critères choisis, la distribution des sujets se
présente telle que nous le voyons dans le tableau ci-dessous.
Effectif Pourcentage
Niveau académique / Fréquence
Moins de la licence 36 22.8
Licence et plus 122 77.2
Total 158 100.0
Sur un total de 168 sujets ayant effectivement répondu au questionnaire, 10 sujets n'ont pas
donné leur niveau académique. Sur les 158 qui l'ont fait, 36 ont moins de la licence et 122
ont au moins la licence.
La répartition des sujets selon leur niveau professionnel se présente ainsi que nous le voyons
dans le tableau ci-dessous.
Effectif Pourcentage
Niveau professionnel / Fréquence
CAPI ou équivalent 42 28.6
DIPES I et II ou équivalent 105 71.4
Total 147 100.0
Sur un total de 168 sujets ayant effectivement répondu au questionnaire, 21 sujets n'ont pas
donné leur niveau professionnel. Sur les 147 qui l'ont fait, 42 ont le CAPI ou son équivalent
et 105 ont le DIPES I et II ou leur équivalent (DIPEN I / DIPEN II).
La répartition des sujets selon leur ancienneté au service se présente ainsi que nous le voyons
dans le tableau ci-dessous.
Sur un total de 168 sujets ayant effectivement répondu au questionnaire, 04 sujets n'ont pas
donné leur ancienneté professionnelle. Sur les 164 qui l'ont fait, 58 ont moins de 10 ans de
service et 106 ont au moins 10 ans de service, c'est-à-dire 10 ans et plus.
Tableau n° 09 : Répartition des sujets d'après le nombre de réponses justes obtenues
A l'analyse du tableau n°09, on constate qu'un seul sujet n'a absolument rien trouvé, qu'aucun
sujet n'a obtenu 11 ou 12 réponses justes 03 et que les sujets sont beaucoup plus concentrés
entre 04 et 07 réponses justes.
interculturelle
Les sujets ont été regroupés en trois groupes distincts pour figurer les niveaux de
compétence : les enseignants à la compétence insuffisante, ceux qui ont une compétence
moyenne et ceux qui ont une grande compétence.
Tableau n° 10 : Regroupement des sujets d'après les niveaux de compétence interculturelle
Effectif Pourcentage
Fréquence
ou Niveaux de compétence
00 à 04 50 29.8
(Compétence insuffisante)
05 à 06 56 33.3
(Compétence moyenne)
07 à 12 62 36.9
(Grande compétence)
Total 168 100.0
Tableau n° 11 : Répartition des sujets d'après le nombre de réponses justes obtenues
A l'analyse du tableau n°11, on constate qu'aucun sujet n'a obtenu zéro réponse juste, que
trois sujets ont obtenu une seule réponse juste, que les sujets sont beaucoup plus concentrés
entre 02 et 08 réponses justes et 02 sujets ont obtenu 09 réponses justes sur 09.
connaissances méthodologiques
Les sujets ont été regroupés en trois catégories distinctes pour figurer les niveaux de
compétence méthodologique, à savoir la grande maîtrise, la maîtrise moyenne et la maîtrise
insuffisante des connaissances. Le programme statistique a d'ailleurs procédé à une re-
codification des données pour les équilibrer dans les regroupements.
Effectif Pourcentage
Fréquence
(Maîtrise moyenne)
07 à 09 40 23.8
(Grande maîtrise)
Total 168 100.0
Les résultats des élèves qui sont révélateurs du niveau d'acquisition des connaissances par les
élèves peuvent impliquer un certain degré d'efficacité de l'enseignant dans la transmission
des connaissances. Ces résultats vont d'abord être décrits et présentés de manière brute. Puis,
des regroupements vont être opérés à partir des niveaux d'efficacité.
Obtenus à partir du traitement de la question 26, les résultats des élèves correspondent aux
pourcentages de réussite obtenus par les enseignants dans une classe de leur choix au cours
de l'examen de sixième séquence de l'année scolaire 2004/2005. Le choix de cette séquence
relève du fait qu'elle correspond à l'évaluation de fin d'année, donc à l'évaluation sommative
annuelle.
Le regroupement se fait par rapport aux niveaux d'efficacité. C'est dire que les enseignants
qui ont les mêmes résultats se retrouvent dans la même catégorie.
Effectif Pourcentage
Niveaux d'efficacité / Fréquence
Efficacité insuffisante (Résultats inférieurs ou égaux à 30 %) 57 34.5
Efficacité moyenne (Résultats supérieurs à 30 % et égaux à 46 %) 50 30.3
Grande efficacité 50 35.2
(Résultats supérieurs à 46 %)
Total 165 100.0
Au regard des données du tableau n°13, on peut constater que le programme statistique a
équilibré les effectifs des cases pour une bonne vérification des hypothèses et une meilleure
interprétation des résultats. Néanmoins, on devrait observer que les 64.8 % des résultats,
constituant la somme des données des deux premières cases (efficacité insuffisante et
moyenne), sont inférieurs ou égaux à 46 %. Il s'agit des résultats des élèves de plus de la
moitié des sujets. Une telle situation donne à réfléchir d'une part sur le niveau des élèves et
d'autre part sur les rapports qui pourraient exister entre leurs performances et la capacité des
enseignants à leur transmettre les connaissances de manière efficace. On ne peut en avoir une
idée claire qu'en procédant à la vérification des hypothèses de recherche.
La vérification des hypothèses de recherche est le processus par lequel ces dernières,
préalablement formulées au niveau du cadre théorique de l'étude, sont confirmées ou
infirmées. Ici, ces hypothèses qui découlent de l'hypothèse générale selon laquelle « La
compétence interculturelle de l'enseignant a un impact significatif sur son efficacité
didactique en classe de langue » vont être vérifiées au moyen des différents calculs
statistiques faits dans le même programme statistique qui a permis de traiter les données, à
savoir le statistical package for social sciences. A la suite de la vérification des hypothèses,
les implications des résultats vont être dégagées, les limites et les perspectives de l'étude
relevées et des suggestions et recommandations faites dans le but de résoudre le problème
posé par l'étude et par conséquent d'améliorer la situation étudiée.
Les deux hypothèses de recherche vont être vérifiées au moyen d'un test d'hypothèse
approprié aux associations linéaires, à savoir le khi-carré de Pearson. Ce dernier a été choisi
même comme la vérification a été également faite avec le test de Mantel-Haenszel et le
Likelihood ratio. A cet effet, le seuil de signification choisi est de 0.00000 et le nombre de
degrés de liberté de 4. Voilà les paramètres qui vont nous permettre de procéder à
l'association des variables et puis à l'interprétation des résultats obtenus au niveau de chaque
hypothèse.
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES