politiques terminale
Sujet A
Structure
L'épreuve est composée de deux exercices notés chacun sur 10 points :
â une dissertation ;
â une Ă©tude critique d'un (ou deux) document(s).
EXERCICE 1 - Dissertation
Sujet : les grandes mutations de la guerre, de Clausewitz Ă Daech.
Document 1.
« On fait souvent rĂ©fĂ©rence, aussi bien dans le monde politique que scientifique, Ă
lâimpĂ©ratif de limiter la hausse de la tempĂ©rature moyenne de la terre Ă + 2 °C (par rapport Ă
la température moyenne avant la Révolution industrielle) ; au-delà , les risques de
bouleversements climatiques deviendraient trop grands, sâils ne le sont pas dĂ©jĂ [âŠ].
Certains travaux font valoir que + 2 °C est excessif ; [...] lâAccord de Paris invite Ă abaisser ce
seuil à + 1,5 °C. Alors, avec cet objectif en vue, dans quelles limites peut-on encore se
permettre dâĂ©mettre des gaz Ă effet de serre, principalement dioxyde de carbone CO2 et
mĂ©thane CH4, ceux-lĂ mĂȘme dont lâaccumulation dans lâatmosphĂšre provoque les hausses
de température ?
La rĂ©ponse sur laquelle on sâaccorde gĂ©nĂ©ralement est la suivante : le cumul des Ă©missions
ne peut dĂ©sormais pas dĂ©passer 600-700 Gt (gigatonnes, câest-Ă -dire milliards de tonnes) de
CO2 |âŠ]. Ă 35 Gt dâĂ©missions annuelles de CO2, cela donne environ 20 ans de rĂ©pit Ă
lâhumanitĂ©, juste une fraction de seconde de temps gĂ©ologique, et quelques minutes de
temps historique.
Cette sobriĂ©tĂ© ne pourra venir que dâune action collectivement organisĂ©e. Lâaccord obtenu Ă
Paris le 12 dĂ©cembre 2015 peut ĂȘtre le catalyseur dâun effort collectif dans la mesure oĂč il
favorisera la multiplication et la convergence dâinitiatives pour une transition Ă©nergĂ©tique et
Ă©cologique. Ce sera une course dâobstacles et une course contre le temps car comme lâa
dĂ©clarĂ© Martin Luther King dans un discours dâavril 1967 : â tomorrow is today â. Cela est
particuliÚrement vrai dans le cas du réchauffement climatique. »
« Lâaccord de Paris comme rĂ©fĂ©rence, tremplin et instrument de cohĂ©rence », Claude Henry,
dans Revue d'économie politique 2016/4 (Vol. 126), pages 487 à 497.
Document 2.
Les impacts attendus du rĂ©chauffement climatique, dâaprĂšs LâAtlas des minoritĂ©s, hors-sĂ©rie
La Vie/Le Monde, 2011.
Correction
Exercice 1 - Dissertation
Sujet : les grandes mutations de la guerre, de Clausewitz Ă Daech.
La dissertation est le traitement d'un sujet donné, avec une introduction, un développement
en plusieurs parties et une conclusion.
Le candidat doit montrer :
â qu'il maĂźtrise des connaissances et sait les sĂ©lectionner ;
â qu'il sait organiser les connaissances de maniĂšre Ă traiter le sujet ;
â qu'il a acquis des capacitĂ©s d'analyse et de rĂ©flexion.
Pour traiter le sujet, le candidat :
â analyse le sujet et Ă©labore une problĂ©matique ;
â rĂ©dige un texte pertinent comportant une introduction (dĂ©gageant les enjeux du
sujet et un fil conducteur en énonçant une problématique), plusieurs parties
structurées et une conclusion (qui répond à la problématique).
La réalisation d'une illustration en appui du propos (croquis, schéma, etc.) amÚnera une
valorisation de la note.
Exemple de dissertation :
Introduction
En dĂ©clenchant la Global War on Terror aprĂšs les attentats du 11 septembre 2001, les Ătats-
Unis se lançaient dans une guerre dite « asymétrique » contre le terrorisme djihadiste, sans
limite dâespace ni de temps. Les effets sâen font encore sentir vingt ans plus tard, avec la
prĂ©sence des armĂ©es occidentales dans la zone Sahel-Sahara jusquâau Moyen-Orient, et avec
la fréquence des attentats islamistes en Occident.
La guerre est un conflit armé entre deux ou plusieurs protagonistes. Ces derniers peuvent
ĂȘtre des Ătats, ou des acteurs non-Ă©tatiques qui, par le recours Ă la violence collective,
opÚrent des destructions physiques et psychologiques majeures, dans le but de réaliser des
objectifs politiques. Pour Clausewitz, elle est un miroir des sociétés qui dépend de la culture
du temps, et change souvent de nature : en un mot, un « caméléon ».
Justement, comment sâest transformĂ©e la guerre depuis lâĂ©poque du grand stratĂšge
allemand du XIXe siĂšcle ? Si les grands affrontements entre Ătats, caractĂ©ristiques du XIXe et
du dĂ©but du XXe siĂšcle, se sont rarĂ©fiĂ©, la violence guerriĂšre nâa pas disparu : quelles formes
nouvelles prend la guerre Ă lâĂ©poque du terrorisme dâAl-Qaida et Daech ?
I. La guerre a connu une « montĂ©e aux extrĂȘmes » (Clausewitz) entre le XIXe et le XXe
siÚcle, dans le cadre des grands conflits interétatiques.
2. Les deux guerres mondiales rĂ©alisent la « montĂ©e aux extrĂȘmes » thĂ©orisĂ©e par
Clausewitz.
â La PremiĂšre Guerre mondiale, marquĂ©e par le dĂ©chaĂźnement de la violence
dans la « guerre de tranchĂ©es » et lâutilisation dâarmes de destruction
massive. Les civils sont plongĂ©s au cĆur des destructions (artillerie lourde, gaz
moutarde), avec un bilan trĂšs lourd, de 10 millions de morts au bas mot.
â Des sociĂ©tĂ©s durablement marquĂ©es par la guerre dans les annĂ©es 1920 et
1930 : la volonté de revanche des vaincus, la « brutalisation » durable des
sociétés (thÚse de George Mosse), la course aux armements, les coups de
force expansionnistes des dictatures et la guerre civile en Espagne (1936-39).
â Pendant la Seconde Guerre mondiale, on atteint le sommet de lâhorreur
meurtriĂšre (50 Ă 60 millions de morts), avec les campagnes massives de
bombardements, des tueries de masse (génocide des Juifs et Tsiganes),
lâutilisation de nouvelles armes de destruction massive (atome). Les procĂšs de
Nuremberg et Tokyo jugent des crimes de guerres et des crimes contre
lâhumanitĂ©.
II. Depuis la fin de la guerre froide, la guerre entre dans une phase de mutations intenses,
sâĂ©loignant dĂ©finitivement des conceptions clausewitziennes.
1. On assiste à un phénomÚne de raréfaction des grandes guerres interétatiques
(lâAmĂ©ricain John Mueller parle dâune « obsolescence des guerres majeures » dĂšs
1989).
Trois grands types de causes lâexpliquent :
â les valeurs guerriĂšres sont dĂ©passĂ©es (gloire, honneur, courage, patriotisme)
et plus grand monde ne se risquerait Ă faire lâĂ©loge de la guerre comme aux
siÚcles passés ;
â la guerre nâest plus perçue comme une mĂ©thode efficace et rentable : les
coûts et risques encourus sont plus importants que les bénéfices escomptés ;
â la prospĂ©ritĂ© Ă©conomique est devenue le but ultime des Ătats, il nâest
dĂ©sormais plus obligatoire dâobtenir des succĂšs militaires pour rayonner dans
le monde.
III. Le djihad (guerre sainte) dâAl-Qaida et de Daech est rĂ©vĂ©lateur de nouvelles pratiques
de la guerre, trÚs éloignées du modÚle clausewitzien.
1. Le terrorisme, une stratégie du faible au fort.
â Câest un mode dâaction ancien, qui remonte Ă la fin du XIXe siĂšcle
(anarchistes), mais connaßt une actualité brûlante avec le terrorisme
djihadiste.
â Ce mode dâaction est utilisĂ© par des acteurs faibles qui doivent compenser
lâabsence ou le dĂ©ficit de puissance militaire par des moyens autres que la
confrontation directe sur le champ de bataille.
â Il sâinscrit dans la tradition de la « petite guerre », ou guĂ©rilla, dont il est un
substitut (GĂ©rard Chaliand) : le but est de dĂ©stabiliser lâennemi sur le plan
psychologique.
Conclusion
Bref, le modĂšle clausewitzien de la guerre est mis Ă lâĂ©preuve des guerres asymĂ©triques, en
particulier du terrorisme djihadiste. Les logiques guerriÚres sont différentes, mais la violence
demeure. Face à cela, les réponses militaires des grandes puissances occidentales restent
sans effet dĂ©cisif⊠Sans doute car la rĂ©ponse au terrorisme doit ĂȘtre aussi, et avant surtout,
économique et sociale.
EXERCICE 2 - Ătude critique de documents
Sujet : en vous appuyant sur les documents, montrez que le réchauffement climatique est
un risque global qui nécessite des réponses globales.
Il s'agit d'une étude critique d'un ou deux documents de nature différente. Le candidat doit
montrer :
â qu'il est capable de construire une problĂ©matique Ă partir du sujet indiquĂ© par le titre
et abordé par le (ou les) document(s) ;
â qu'il comprend le sens gĂ©nĂ©ral du (ou des deux) document(s) ;
â qu'il est capable de sĂ©lectionner les informations, de les hiĂ©rarchiser et de les
expliciter ;
â qu'il sait prendre un recul critique en rĂ©ponse Ă sa problĂ©matique, en s'appuyant
d'une part sur le contenu du document et, d'autre part, sur ses connaissances
personnelles.
Pour traiter le sujet, le candidat :
â analyse de maniĂšre critique les documents en prenant appui sur la consigne et
élabore une problématique ;
â rĂ©dige une introduction comportant une problĂ©matique ;
â organise son propos en plusieurs paragraphes ;
â rĂ©dige une conclusion qui comporte une rĂ©ponse Ă la problĂ©matique.
Depuis la rĂ©volution industrielle, la planĂšte sâest sans doute rĂ©chauffĂ©e de 2°C. Le professeur
Claude Henry explique dans le document 1 : « On fait souvent référence, aussi bien dans le
monde politique que scientifique, Ă lâimpĂ©ratif de limiter la hausse de la tempĂ©rature
moyenne de la terre à + 2 °C (par rapport à la température moyenne avant la révolution
industrielle) ; au-delĂ , les risques de bouleversements climatiques deviendraient trop
grands, sâils ne le sont pas dĂ©jĂ (âŠ) ». Il sâagit dâun « risque global » (tel que thĂ©orisĂ© par le
sociologue allemand Ulrich Beck dans les annĂ©es 1980) touchant tous les ĂȘtres vivants, par-
delĂ les frontiĂšres des espĂšces, des Ătats et des continents, avec des effets en retour
inattendus, des phénomÚnes de rétroaction négatifs (« effet-boomerang »). Les derniÚres
projections du GIEC font Ă©tat dâune tempĂ©rature mondiale moyenne en croissance de +2,5 Ă
+7,8 °C dâici la fin du XXIe siĂšcle.
Les effets du réchauffement planétaire se font déjà sentir de maniÚre significative, comme le
montre le document 2.
La carte rĂ©vĂšle que lâensemble du systĂšme climatique est entrĂ© en dysfonctionnement : la
fonte des glaciers aux pÎles et dans les hautes montagnes, ainsi que du pergélisol dans le
Grand Nord canadien et la Sibérie septentrionale débouchent sur une hausse du niveau des
mers (peut-ĂȘtre jusquâĂ 1 mĂštre), menaçant de grandes rĂ©gions littorales et deltaĂŻques (en
particulier dans les océans Indien et Pacifique). La dégradation des récifs coralliens et des
ressources halieutiques indiqués sur la carte est aussi liée à la surexploitation humaine. Les
cyclones sont plus frĂ©quents et plus dĂ©vastateurs, du fait de la rencontre des masses dâair
chaudes et des masses dâair froides (CaraĂŻbes, ocĂ©an Indien, Asie du Sud-Est). Dâun autre
cÎté, de nombreuses zones sont marquées par la raréfaction des précipitations (Ouest et
Sud des Ătats-Unis, Patagonie argentine et chilienne, espace mĂ©diterranĂ©en, zone sahĂ©lo-
saharienne, Afrique du Sud) ; dâautres, au contraire, sont victimes de lâintensification des
prĂ©cipitations : rĂ©gions septentrionales de lâhĂ©misphĂšre Nord (Canada, Ecosse et
Scandinavie, Russie), certaines régions intertropicales (Caraïbes, Inde occidentale, Asie du
Sud-Est). Les zones en voie de désertification sont davantage menacées par les incendies
(Californie, Méditerranée) et la fragilisation des systÚmes agricoles (Grandes plaines états-
uniennes, Amérique du Sud, Europe du Sud, Inde et Chine intérieures). Le réchauffement
climatique devrait aussi provoquer la rĂ©duction de la biodiversitĂ© et lâextinction de
nombreuses espÚces animales, la réapparition de maladies disparues ou en voie de
disparition, ce que nâĂ©voque pas le document 2.
II. Le réchauffement climatique, en tant que risque global, nécessite une gouvernance
écologique et climatique internationale.
Toutefois, lâaccord de Paris en 2015 peut changer la donne : « lâaccord obtenu Ă Paris
le 12 dĂ©cembre 2015 peut ĂȘtre le catalyseur dâun effort collectif dans la mesure oĂč il
favorisera la multiplication et la convergence dâinitiatives pour une transition Ă©nergĂ©tique et
Ă©cologique ». Câest un accord en effet trĂšs ambitieux : lâobjectif est de rester sous les 2°C de
rĂ©chauffement planĂ©taire au XXIe siĂšcle. Il doit ĂȘtre atteint grĂące Ă la neutralitĂ© carbone et la
sortie des Ă©nergies fossiles. Pour ce faire, des plans dâactions nationaux sur le climat sont
dĂ©cidĂ©s dans chaque pays, avec objectifs chiffrĂ©s. Sâil est politiquement contraignant,
lâaccord ne lâest pas juridiquement et aucune sanction nâest prĂ©vue en cas de dĂ©passement.
Un plancher d'aide climatique aux pays pauvres est fixé à 100 milliards de dollars.
Peu de temps aprĂšs sa signature, lâAccord de Paris est affaibli par le retrait unilatĂ©ral des
Ătats-Unis dĂ©cidĂ© par le prĂ©sident Trump (2017), alors que le pays est le premier pollueur
mondial avec la Chine. Les doutes sur la faisabilitĂ© de lâaccord se renforcent dâautant. Les
COP 24 et 25 en Pologne et Espagne confirment les difficultĂ©s Ă sâentendre sur un accord
prĂ©cis. En lui-mĂȘme, lâaccord est trop vague et ne fixe ni prix mondial du carbone, ni marchĂ©
planĂ©taire des droits dâĂ©mission. Les aides aux pays du sud demeurent insuffisantes ; on sâest
parfois contentĂ© dâĂ©tiqueter en vert des aides au dĂ©veloppement dĂ©jĂ existantes, de surcroĂźt
sous forme de prĂȘts et non de dons.
Conclusion