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Mathématiques - ECS1

12

Polynômes à une indéterminée


Lycée La Bruyère
30 avenue de Paris
78000 Versailles

c 2017, Polycopié du cours de mathématiques de première année.



12 Polynômes

12.1 Objectifs

Ensemble K[X] des polynômes à coefficients


dans K.
Opérations algébriques.
Degré. Par convention deg(0) = −∞.
Ensembles Kn [X] des polynômes à coefficients
dans K de degré au plus n.
Division euclidienne. Multiples et diviseurs.
Racines, ordre de multiplicité d’une racine.
Caractérisation de la multiplicité par factorisa-
tion d’une puissance de (X − a).
Théorème de d’Alembert-Gauss. Résultat admis.
Exemples simples de factorisation dans C[X]
et R[X] de polynômes de R[X]. Les méthodes
devront être indiquées.

12.2 Fonctions polynômes

A toute liste (a0 , a1 , . . . , an ) d’un nommbre fini de réels, on associe l’application


p : R −→ R
x 7→ a0 + a1 x + a2 x2 + . . . + an xn
La fonction p est appelée fonction polynôme.
Si p, q sont deux fonctions polynômes définies par p : R −→ R, 7→ a0 + a1 x + a2 x2 +
. . . + an xn , et q : R −→ R, x 7→ b0 + b1 x + b2 x2 + . . . + bm xm on peut définir les fonctions
polynômes p + q, pq par
(p + q)(x) = p(x) + q(x), (pq)(x) = p(x) × q(x), x ∈ R
Si par exemple, m ≤ n, on aura pour x ∈ R
(p + q)(x) = (a0 + b0 ) + (a1 + b1 )x + . . . + (am + bm )xm + am+1 xm + an xn
et
(pq)(x) = (a0 b0 )+(a1 b0 +a0 b1 )x+. . .+(ak b0 +ak−1 b1 +. . .+a0 bk )xk +. . .+(an b0 +an−1 b1 +. . .+an−m bm )xn

On obtient donc les coefficients de p + q et pq à partir de ceux de p et q en regroupant les


coefficients des monômes en x de même degré.

Remarque 1. On peut remplacer l’ensemble R par l’ensemble C et définir des fonctions


polynômes complexes.

2
12.2 Fonctions polynômes  3

Objectif : L’objectif de ce chapitre est d’étudier les principales propriétés d’un objet, plus
général, appelé polynôme et défini par une expression de la forme
n
X
a jX j
j=0

où n ∈ N et (a0 , a1 , . . . , an ) ∈ K n+1
avec K = R ou C et où X sera appelée l’indéterminée.
Dans toute la suite, K désignera R ou C.

12.2.1 Suites à support fini.

Définition 12.2.1. On dit qu’une suite (an )n∈N est à support fini s’il existe N ∈ N tel que
pour tout n ∈ N, n ≥ N, an = 0.

En d’autres termes, dire qu’une suite est à support fini signifie qu’elle est nulle à partir d’un
certain rang.

12.2.2 Polynômes à une indeterminée

Définition 12.2.2. Définition d’un polynôme.


• X
On appelle polynôme à une indeterminée sur K toute expression de la forme
an X n où la suite (an )n∈N d’éléments de K est à support fini.
n∈N
X
• L’élément ai s’appelle coefficient d’indice i du polynôme A = an X n .
n∈N
• Le polynôme dont tous les coefficients sont nuls. s’appelle le polynôme nul. On le
note 0.
• L’ensemble des polynômes à une indeterminée sur K est noté K[X].

Remarque 2. Si P désigne un polynôme à une indeterminée, on verra, plus loin, qu’on peut
le noter aussi P(X).
Remarque 3. L’expression X 0 désigne le polynôme constant 1.
X
Remarque 4. Soit P un polynôme donné par P = an X n .
n∈N
Comme la suite (an ) est à support fini, il existe N ∈ N tel que an = 0 pour tout entier n dès
lors que n > N.
On a alors P = a0 X 0 + a1 X 1 + . . . + aN X N .
X
Les sommes de ce chapitre sont donc en fait des sommes finies.
n∈N

Remarque 5. On identifie les polynômes constants avec les scalaires : le polynôme aX 0 sera
simplement noté a.
n
X
Remarque 6. On pourra, si besoin, identifier un polynôme P = ak X k avec la fonction
k=0
polynôme associée définie sur K par p(x) = a0 + a1 x + a2 x2 + . . . + an xn .
4  Polynômes

Définition 12.2.3. On appelle indéterminée, le polynôme noté X, dont le seul coefficient


non nul est le coefficient d’indice 1, qui est égal à 1.

Définition
X 12.2.4
X (Définition de l’égalité de deux polynômes). Deux polynômes A =
ak X k et B = bk X k seront dits égaux si et seulement pour tout k ∈ N, ak = bk .
k∈N k∈N

Deux polynômes sont égaux si et seulement si ils ont les mêmes coefficients d’indice i pour
tout i ∈ N.

Définition 12.2.5
X (Définition Xde l’addition de deux polynômes). Soient deux poly-
nômes A = ak X k et B = bk X k . On appelle somme de A et B, et on note A + B, le
k∈N k∈N
polynôme dont le coefficient d’indice n ∈ N est an + bn .

X
On a donc A + B = (ak + bk )X k .
k∈N

Définition 12.2.6 (Définition


X du produit d’un polynôme par un scalaire.). Etant don-
nés un polynôme A = an X n et un scalaire λ ∈ K, on appelle produit de A par le
n∈N
scalaire λ, et on note λA, le polynôme dont le coefficient d’indice n ∈ N est λan .

X
On a donc λA = λan X n .
n∈N

Définition 12.2.7
X (Définition X du produit de deux polynômes.). Soient deux poly-
nômes A = an X n et B = bn X n . On appelle produit de A et B, et on note AB,
n∈N n∈N
le polynôme dont le coefficient d’indice n est
Xn X
cn = ak bn−k = ai b j = a0 bn + a1 bn−1 + . . . + an b0 .
k=0 0≤i, j≤n
i+ j=n

X
On a donc AB = cn X n où
n∈N

c0 = a0 b0 , c1 = a0 b1 + a1 b0 , c2 = a0 b2 + a1 b1 + a2 b0 , etc.
Remarque 7. On a AB = BA : le produit des polynômes est commutatif. C’est clair d’après
n
X Xn
la définition du produit puisque cn = ak bn−k = b j an− j .
( j=n−k)
k=0 j=0

Remarque 8. Quels que soient les polynômes A, B et C, on a (AB)C = A(BC) : le produit


des polynômes est associatif.
12.2 Fonctions polynômes  5

Proposition 12.2.1. Quels que soient les polynômes A et B de K[X] et l’entier n ≥ 1,


on a la formule du binôme
n !
X n k n−k
(A + B)n = A B
k=0
k

m m
Exercice 1. Soient les polynômes A = 1 + mX + 2 X2 + 3 X 3 + . . . + X m et B =
   
1 + mX + m2 X 2 + m3 X 3 + . . . + X m .
Soit p ∈ N. Exprimer le coefficient d’indice p du produit AB de deux façons.
Quelle identité portant sur les coefficients binômiaux obtient-on ?
   
Faire de même en considérant, cette fois, B = 1 − mX + m2 X 2 − m3 X 3 + . . . + (−1)m X m .

12.2.3 Degré d’un polynôme

X
Définition 12.2.8. Soit P un polynôme défini par P = ak X k .
k∈N
— Si P n’est pas le polynôme nul, on appelle degré de P et on note deg(P), le plus
grand des indices des coefficients non nuls de P :
deg(P) = max{k ∈ N|ak , 0}
— Si P est le polynôme nul, on adopte la convention deg(0) = −∞.

Définition 12.2.9. Soit P un polynôme non nul de degré n ∈ N. Alors an , 0 et an


est appelé le coefficient dominant de P. Lorsque an = 1, on dit que P est unitaire ou
normalisé.

n
X
Lorsque P est de degré n, on peut écrire P sous la forme P = ak X k où (a0 , a1 , . . . , an ) ∈
k=0
Kn+1 et an , 0.
n
X
Remarque 9. Lorsque l’on manipule un polynôme P donné sous la forme P = ak X k , il
k=0
ne faut pas affirmer rapidement que deg(P) = n ! On ne peut faire cette dernière affirmation
que si an , 0.
Exemple 12.2.1. P = 1 + X + X 3 ∈ R[X] est unitaire de degré 3.
Remarque 10. Soit n ∈ N. L’ensemble des polynômes de degré au plus n est noté Kn [X].

On étend l’addition de N et les relations ≤ et < à N ∪ {−∞} de la façon suivante :


• pour tout n ∈ N, −∞ < n
• pour tout n ∈ N, (−∞) + n = n + (−∞) = −∞,
• −∞ + (−∞) = −∞.
6  Polynômes

Proposition 12.2.2. Quels que soient les polynôme P et Q de K[X], on a


deg(PQ) = deg P + deg Q, deg(P + Q) ≤ max{deg P , deg Q}

Corollaire 12.2.3. Quels que soient les polynômes P et Q de K[X] :

PQ = 0 si et seulement si P = 0 ou Q = 0.

Corollaire 12.2.4. Soit P et Q deux polynômes de K[X].


Si PQ = 1 alors P et Q sont des polynômes constants non nuls inverses l’un de l’autre.

12.2.4 Composition de deux polynômes

Par convention, pour tout Q ∈ K[X], Q0 désigne le polynôme constant égal à 1.

X
Définition 12.2.10. Soit P = ak X k et Q deux polynômes de K[X]. On appelle poly-
k∈N
nôme composé de P et Q le poynôme noté P ◦ Q ou P(Q) défini par
X
P◦Q= ak Qk
k∈N

Remarque 11. Cette définition justifie la notation P(X) pour un polynôme puisque le poly-
nôme composé de P et Q = X donne simplement P donc P = P(X).

Exemple 12.2.2. Si P(X) = 1 + X et Q(X) = X 2 alors


P ◦ Q(X) = 1 + X 2 , Q ◦ P(X) = (1 + X)2 = 1 + 2X + X 2 , P ◦ P(X) = 2 + X.

Proposition 12.2.5. Soient P(X) et Q(X) deux polynômes de K[X] avec deg(Q) ≥ 1.
Alors
deg(P ◦ Q) = deg(P) deg(Q)

Exercice 2. Soit A(X) ∈ C[X] tel que A(X) = A( jX) où j = e2iπ/3 . Montrer qu’il existe
un polynôme P ∈ C[X] tel que A = P(X 3 ).

12.3 Dérivation dans K[X]

12.3.1 Définition
12.3 Dérivation dans K[X]  7

X
Définition 12.3.1. Soit P(X) = ak X k un polynôme de K[X]. On appelle polynôme
k∈N
dérivé de P(X) le polynôme noté P0 (X) défini par
X
P0 (X) = (k + 1)ak+1 X k
k∈N

Si P(X) est constant alors P0 (X) = 0 et si P(X) est non constant, en notant d = deg(P) ≥ 1,
on a
d−1
X d
X
P0 (X) = (k + 1)ak+1 X k = kak X k−1 .
k=0 k=1

Exemple 12.3.1. Si P(X) = 3X 5 + 4X 2 + X + 7 alors P0 (X) = 15X 4 + 8X + 1.

Proposition 12.3.1. Quels que soient les polynômes P et Q de K[X], et le scalaire λ ∈ K


on a :
(1) (P + Q)0 = P0 + Q0
(2) (λP)0 = λP0
(3) (PQ)0 = P0 Q + PQ0

Proposition 12.3.2. Quels que soient le polynôme P et l’entier n ≥ 1, on a


(Pn )0 = nP0 Pn−1

Proposition 12.3.3. Quels que soient les polynômes P et Q de K[X], on a


(P ◦ Q)0 = Q0 (P0 ◦ Q)

Définition 12.3.2. Soit P un polynôme de K[X] et k ∈ N. On appelle polynôme dérivé


d’ordre k du polynôme P le polynôme noté P(k) défini par récurrence de la manière
suivante :
P(0) = P et ∀k ∈ N∗ , P(k) = (P(k−1) )0

Formule de Leibniz . Soit P et Q deux polynômes de K[X] et n ∈ N∗ .


n !
X n (k) (n−k)
(PQ)(n) = P Q
k=0
k
8  Polynômes

12.4 Division euclidienne dans K[X]

12.4.1 Division euclidienne

Définition 12.4.1. On dit que le polynôme B(X) divise le polynôme A(X) ou que A(X)
est un multiple de B(X) ou que B(X) est un diviseur de A(X) s’il existe un polynôme
C(X) tel que A(X) = B(X) · C(X).
Le polynôme C(X) est alors appelé le quotient de A(X) par B(X).

Exemple 12.4.1. Le polynôme X − 1 divise le polynôme X 3 − 1 car X 3 − 1 = (X − 1)(X 2 +


X + 1).

Exemple 12.4.2. Le polynôme X 2 +1 divise le polyn ome X 4 −1 car X 4 −1 = (X 2 −1)(X 2 +1)

Théorème de la division euclidienne . Soient A(X) et B(X) deux polynômes de K[X]


tel que B ne soit pas le polynôme nul. Il existe un unique couple (Q, R) ∈ K[X]2 tel que
A(X) = B(X) · Q(X) + R(X) et
(
deg(R) < deg(B)
Le polynôme A s’appelle le dividende, B le diviseur, Q le quotient de la division eucli-
dienne de A par B et R le reste de la division euclidienne de A par B.

Pratique de la division euclidienne

−4X 3 − 3X 2 + X− 4 X +2
3
− (−4X − 8X ) 2
−4X + 5X − 9
2

0 + 5X 2 + X− 4
− (5X 2 + 10X)
0 − 9X − 4
− (− 9X − 18)
14

Exercice 3. Faire la division euclidienne de 6X 4 − X 3 + 11X 2 + 5X + 2 par 2X 2 + X + 1.

Exercice 4. Soient λ et µ les restes respectifs des divisions euclidiennes d’un même
polynôme P(x) de K[X] par X − a et X − b avec a , b. Trouvez le reste de la division
euclidienne de P(X) par (X − a)(X − b) en fonction de λ et µ.
12.5 Racines d’un polynôme. Ordre de multiplicité d’une racine.  9

12.5 Racines d’un polynôme. Ordre de multiplicité d’une racine.

12.5.1 Racines d’un polynôme. Caractérisations.

Définition 12.5.1. Soit P(X) un polynôme de K[X] et α ∈ K. On dit que α est racine de
P si P(α) = 0.

Exemple 12.5.1. Le polynôme X 2 + 1 considéré dans R[X] n’a pas de racine. Considéré
dans C[X], X 2 + 1 possède deux racines : i et −i.

Proposition 12.5.1. Soit P(X) un polynôme de K[X] et α ∈ K. Le reste de la division


euclidienne de P par X − α est P(α).

Théorème . Soit P(X) un polynôme et α ∈ K. On a l’équivalence :

P(α) = 0 si et seulement si X − α divise P.

Définition 12.5.2. Soit P(X) un polynôme, r ∈ N∗ et α ∈ K tel que P(α) = 0.


On appelle ordre de multipicité de la racine α l’entier naturel r tel que (X − a)r divise
P(X) mais (X − a)r+1 ne dvise pas P(X).

Autrement dit, α est d’ordre de multiplicité r si on peut factoriser P(X) par (X − a)r mais
pas par (X − a)r+1 .

Théorème . Soit P(X) un polynôme de K[X], r ∈ N∗ et α ∈ K tel que P(α) = 0.


Le scalaire α est racine de P(X) d’ordre de multiplicité r si seulement si il existe Q(X) ∈
K[X] tel que P(X) = (X − a)r Q(X) et Q(α) , 0.

Exercice 5. Soit A(X) = 2X 4 − 4X 3 + 4X − 2. Trouver l’ordre de multiplicité de la racine


1.


Exercice 6. √On admet l’irrationalité de√ 2. Soit P un polynôme à coefficients rationnels
tels que P( 2) = 0. Montrer que (− 2) est aussi racine de P avec le même ordre de
multiplicité.

Exercice 7. Soit n ∈ N∗ . Montrer que P(X) = 1 + X + X n n’a que des racines simples.
10  Polynômes

12.5.2 Racines n-èmes d’un nombre complexe non nul où n ≥ 2.

Définition 12.5.3. Soit n ∈ N∗ . Les racines nme de l’unité sont les racines dans C du
polynôme X n − 1.

Les racines nme de l’unité sont les solutions dans C de l’équation zn = 1.


Si un tel nombre complexe z existe alors nécessairement |z| = 1 et z peut donc se mettre
sous la forme eiθ .
L’équation zn = 1 devient alors einθ = 1.

einθ = 1 ⇐⇒ nθ est de la forme 2kπ où k ∈ Z


2kπ
⇐⇒ θ est de la forme où k ∈ Z
n
2ikπ
Les solutions de l’équation zn = 1 sont donc les nombres complexes de la forme e n où
k ∈ Z.
Voyons maintenant quel est le nombre de solutions au problème. Pour k ∈ Z, posons zk =
2ikπ
e n . A quelle condition deux de ces nombres sont-ils égaux ?
Soient m, m0 deux entiers relatifs :
2imπ 2im0 π
zm = z0m ⇐⇒ e n =e n

2i(m−m0 )π
⇐⇒ e n = 1
⇐⇒ il existe ` ∈ Z, m − m0 = `n
Par conséquent, si la différence des indices m − m0 est multiple de n, les nombres complexes
zm , z0m sont égaux.
Si les deux indices m, m0 sont tels que 0 ≤ m < m0 ≤ n − 1 (c’est à dire tous deux compris
entre 0 et n − 1 mais distincts) il est impossible pour m − m0 d’être un multiple entier de n et
donc zm et z0m sont distincts. Les nombres complexes z0 , z1 , . . . , zn−1 sont donc des solutions
deux à deux distinctes de l’équation zn = a. Il y a donc au moins n solutions.
Soit un indice k ∈ Z. Par division euclidienne, il existe un quotient q ∈ Z et un reste r avec
0 ≤ r ≤ n − 1 tel que k = nq + r. On a alors
2i(nq+r)π
zk = e n
= e n +2iqπ
2irπ

2irπ
=e n
= zr
On vient de montrer que tout nombre complexe solution est égal à l’un des nombres com-
plexes z0 , z1 , . . . , zn−1 et il y a donc au plus n solutions à l’équation zn = 1.
Il y a donc exactement n racines nme de l’unité.

Théorème et définition . Etant donné un entier n ∈ N∗ , il y a exactement n nombres


complexes z tels que zn = 1.
Ces nombres sont appelés les racines n-èmes de l’unité.
2ikπ
Ce sont les nombres complexes e n où 0 ≤ k ≤ n − 1.
12.5 Racines d’un polynôme. Ordre de multiplicité d’une racine.  11

Exemple 12.5.2. Racines n-èmes de l’unité pour n = 2, 3 et 4.


Pour n = 2, les racines carrées de l’unité sont −1 et 1.
2iπ 4iπ
Pour n = 3, les racines cubiques de l’unité sont 1, j = e 3 et e 3 .
Pour n = 4, les racines quatrièmes de l’unité sont −1, −i, 1, i.

12.5.3 Théorème de D’Alembert-Gauss et factorisations.

Le théorème fondamental suivant est admis.

Théorèm de d’Alembert-Gauss . Tout polynôme non constant de C[X] admet au moins


une racine dans C.

Corollaire 12.5.3. Soit P ∈ C[X] tel que deg(P) = n ≥ 1.


n
Y
Il existe alors λ ∈ C∗ et x1 , x2 , . . . , xn ∈ C tels que P(X) = λ (X − xk ).
k=1

En tenant compte des ordres de multiplicité des racines, tout polynôme non constant de
C[X] s’écrit sous la forme
Ys
P(X) = λ (X − zk )rk
k=1

avec λ ∈ C∗ , z1 , . . . , z s des nombres complexes deux à deux distincts et r1 , . . . , r s des entiers


naturels non nuls tels que r1 + . . . + r s = n. On énonce aussi :

Théorème . Soit n ∈ N∗ . Tout polynôme non constant de C[X] de degré n admet n


racines dans C, si chacune d’elles est comptée avec son ordre de multiplicité.

n−1
Y 2ikπ
Exemple 12.5.3. Soit n ∈ N∗ : X n − 1 = (X − e n )
k=0

Exemple 12.5.4. X 4 − 2X 2 + 1 = (X 2 − 1)2 = (X − 1)2 (X + 1)2

Corollaire 12.5.4. Soit n ∈ N∗ .


Si P ∈ C[X] est un polynôme de degré inférieur ou égal à n ayant au moins n + 1 racines
dans C alors P est le polynôme nul.

Exercice 8. Soient a1 , a2 , . . . , an , b1 , . . . , bn des nombres complexes ou réels.


On forme la matrice n × n dont le coefficient d’indice i, j est ai + b j .
Montrer que si les produits des coefficients de chaque ligne sont égaux alors les produits
des coefficients de chaque colonne sont aussi égaux.
12  Polynômes

Proposition 12.5.5. Soit P(X) un polynôme de C[X].

P(X) ∈ R[X] si et seulement si pour tout z ∈ C, P(z) = P(z)

Proposition 12.5.6. Soit P(X) un polynôme de R[X]. Si P(X) admet a ∈ C pour ra-
cine d’ordre de multiplicité r alors P(X) admet aussi a ∈ C pour racine d’ordre de
multiplicité r.

Proposition 12.5.7. Tout polynôme non constant de R[X] s’écrit sous la forme
Yr s
Y
P(X) = λ (X − xi )αi (X 2 + p j X + q j )β j
i=1 j=1

où x1 , . . . , xr sont les racines réelles distinctes de P, α1 , . . . , αr leur ordre de multiplicité


respectifs, (p1 , q1 ), . . . , (p s , q s ) des couples de réels tels que pour tout j ∈ ~1, s, p2j −
X r Xs
4q j < 0 et β1 , . . . , β s des entiers naturels tels que αi + 2 β j = deg(P)
i=1 j=1

Exercice 9. Soit P(X) ∈ R[X] tel que deg(P) = n ≥ 1. On suppose que, pour tout
1
k ∈ {1, 2, . . . , n + 1}, P(k) = . Calculer P(n + 2).
k

12.5.4 Factorisation du trinôme bicarré

Soient p, q deux réels et le polynôme P(X) = X 4 + pX 2 + q.


Posons T (X) = X 2 + pX + q et ∆ = p2 − 4q, on a donc P(X) = T (X 2 ). La factorisation de P
dépend alors de celle de T :
— si ∆ > 0 alors T possède deux racines réelles distinctes t1 , t2 et T (X) = (X − t1 )(X − t2 )
de sorte que P(X) = (X 2 − t1 )(X 2 − t2 ).
La factorisation complète dépend alors des signes de t1 et t2 .
— si ∆ = 0 alors T possède une racine réelle double t et T (X) = (X − t)2 de sorte que
P(X) = (X 2 − t)2
La factorisation complète dépend alors du signe de t.
√ √
— si ∆ < 0 alors on commence par écrire P(X) = (X 2 + q)2 − (2 q − p)X 2 et on

poursuit avec l’identité remarquable a − b = (a − b)(a + b) puisque 2 q − p > 0.
2 2

Exemple 12.5.5. Considérons T (X) = X 4 + 2X 2 + 5. Le discriminant est ∆ = 4 − 20 =


−16 < 0.
√ √
On applique donc le dernier cas en remarquant que X 4 + 5 = (X 2 + 5)2 − 2 5X 2 de sorte
que
√ √ q √ √ q √ √
! !
T (X) = (X 2 + 5)2 −2( 5−1)X 2 = (X 2 − 2( 5 − 1)X + 5 X 2 + 2( 5 − 1)X + 5

Les √ apparaissant dans la factorisation ont un discriminant ∆ = 2( 5 − 1) −
√ deux trinômes
4 5 = −2(1 + 5) < 0 donc la factorisation dans R[X] s’arrête là.
12.6 Exercices.  13

12.6 Exercices.

 Calculs algébriques.

Exercice 10. Calculer les produits (X 3 + X 2 − X − 1)(X 2 − 2X − 1) et (2X 4 − X 3 + X 2 +


X + 1)(X 2 − 3X + 1)

Exercice 11. Déterminer des polynômes Pn , Qn , Rn tels que


n
X
(X 2 − 2 cos αX + 1) sin(kα)X n−k = Pn (X) sin α + Qn (X) sin(nα) + Rn (X) sin((n + 1)α)
k=1

Exercice 12. Trouver les polynômes P solutions de l’équation


(1 − X)P0 − P = X n

Exercice 13. On pose P0 = 1, P1 = X et pour tout n ∈ N, Pn+2 (X) = XPn+1 (X) −


Pn (X).

(1) Montrer que pour tout n ∈ N


b n2 c !
i n−i
X
Pn (X) = (−1) X n−2i
i=0
i

(2) Quel est le degré de Pn ?


(3) Etudier la parité de Pn .

Exercice 14. Montrer que pour tout réel a, cos 3a + 4 cos 2a + 8 cos a + 5 ≥ 0.

Exercice 15. Soient a, b, c trois nombres complexes de modules deux à deux distincts.
On suppose que pour tout p ∈ {1, 2, 3}, a p + b p + c p ∈ R. Montrer que a, b, c sont réels.

 Division euclidienne, racines, problèmes de factorisation.

Exercice 16. Déterminer le reste de la division euclidienne de


(a) (cos(α) + X sin(α))n par X 2 + 1
(b) (cos(α) + X sin(α))n par (X 2 + 1)2
14  Polynômes

Exercice 17 (Calcul de puissance de matrice). Soit t ∈ C∗ et A la matrice


 0 t t2 
 
A =  t 0 t 
 1 
1 1 
t2 t
0
(1) Exprimer A2 en fonction de A et I3
(2) Soit n ∈ N tel que n ≥ 2. Déterminer le reste dans la division euclidienne de X n par
X 2 − X − 2.
(3) Exprimer alors An en fonction de A et I3 .

Exercice 18 (Calcul de puissance de matrice). Calculer, pour tout entier n, la matrice


An où
 
 3 1 1 
A = −2 0 −2
3 3 5
 

sachant que A2 s’exprime en fonction de A et I3 .

Exercice 19. Pour tout n ∈ N∗ , montrer que le polynôme P(X) = (X − 3)2n + (X − 2)n − 1
est divisible par (X − 3)(X − 2) et former le quotient.

Exercice 20. Soient m, n, p des entiers naturels. Montrer que le polynôme X 3m+2 +
X 3n+1 + X 3p est divisible par X 2 + X + 1.

Exercice 21. Soit P le polynôme P(X) = X 6 − 2X 5 − 3X 4 + 8X 3 + 12X 2 − 32X + 16.

(1) Montrer que 1 est racine double de P puis déterminer le polynôme Q(X) tel que
P(X) = (X − 1)2 Q(X).
(2) Déterminer les racines de Q(X) dans C.
(3) Factoriser le polynôme P(X) dans R[X].

Exercice 22. Factoriser dans C[X] les polynômes X 6 + 27, (X 2 + 1)3 + (X − 1)6 et X 4 +
4X 3 + 4X 2 + 1.

Exercice 23. Sachant que 2+3i est racine du polynôme P(X) = X 4 −2X 3 +6X 2 +22X+13,
factoriser ce polynôme dans R[X].
12.6 Exercices.  15

Exercice 24. Factoriser dans R[X] les polynômes X 4 + 1, X 4 + X 2 + 1, X 8 + X 4 + 1.

Exercice 25. Déterminer tous les polynômes P ∈ R[X] vérifiant P(0) = 0 et P(X 2 + 1) =
P(X)2 + 1. On pourra considérer la suite définie par u0 = 0 et pour tout n ∈ N, un+1 =
u2n + 1.

Exercice 26. Soit l’ensemble E défini par


n o
E = P ∈ R[X]|n(n − 1)P = (X 2 − 1)P00
où n est un entier tel que n ≥ 2.

(1) Montrer que si P ∈ E alors deg P = n.


(2) Déterminer l’ensemble E.

 Quelques exercices sur des polynômes classiques.

Exercice 27 (Polynômes de Lagrange). Soit n un entier supérieur ou égal à 1 et


a1 , . . . , an des réels deux à deux distincts.
(1) Déterminer un polynôme L1 ∈ Rn−1 [X] tel que L1 (a1 ) = 1 et pour tout j ∈
~2, n, L1 (a j ) = 0.
(2) Soient y1 , . . . , yn des nombres réels. Montrer qu’il existe un et un seul polynôme L
de Rn−1 [X] tel que pour tout j ∈ ~1, n, L(a j ) = y j .

Exercice 28 (Polynomes de Bernoulli). Soit n ∈ N∗ et (En ) l’équation


F(x + 1) − F(x) = nxn−1
d’inconnue la fonction F : R 7−→ R.
On confondra dans cet exercice, un polynôme et la fonction polynôme associée.
(1) Montrer que si P est un polynôme solution de (En ) alors deg(P) = n.
(2) Montrer que si P, Q sont deux polynômes solutions de (En ) alors P − Q est constant.
1
(3) Montrer que si P est solution de (En ) alors P0 est solution de (En−1 ).
n
(4) On pose B0 = 1 et on définit, pour tout entier n ≥ 1, Bn par récurrence : Bn est le
polynôme tel que
∀x ∈ R, Bn (x + 1) − Bn (x) = nxn−1 et B0n (x) = nBn−1 (x).
Calculer B1 (x), B2 (x), B3 (x), B4 (x).
Z 1
(5) Soit n ∈ N. Calculer Bn (x)dx.
0
n!
(6) Montrer que pour tout entier k ≥ 1, n (x) =
B(k) Bn−k (x)
(n − k)!
16  Polynômes

(7) Pour k ∈ N, on pose βk = Bk (0). Exprimer, pour tout réel x, Bn (x) en fonction des
βk pour 0 ≤ k ≤ n.
n
n+1
X !
(8) Montrer que βk = 0.
k=0
k
(9) Montrer que, pour tout réel x, Bn (x) = (−1)n Bn (1 − x). En déduire le calcul des
nombres β2p+1 et B2p+1 ( 12 ). pour tout p ∈ N.

12.7 Exercices avancés

Exercice 29. Soit A et B deux matrices 2 × 2 à coefficients dans Z telles que A, A + B, A +


2B, A + 3B et A + 4B soient toutes inversibles et leurs inverses sont à coefficients dans
Z.
Montrer que pour tout réel k, la matrice A + kB est inversible à coefficient dans Z.

n−1 !
Y kπ
Exercice 30 (Produit de sinus). L’objectif est de simplifier le produit sin .
k=1
n
(1) Résoudre dans C l’équation (z + 1)n − 1 = 0
(2) En déduire la factorisation dans C[X] du polynôme (X + 1)n − 1.
(3) En calculant de deux façons le coefficient du terme de degré 1 de (X + 1)n − 1,
n−1 !
Y kπ
simplifier le produit sin
k=1
n

Exercice 31. Pour quels entiers naturels non nuls n le polynôme P(X) = (X−1)n −(X n −1)
a-t-il une racine double ?

Exercice 32. Soit n ∈ N∗ . Factoriser dans C[X] les polynômes X 2n + X n + 1 et 1 + 2X +


2X 2 + . . . + 2X n−1 + X n .

i n  i n
!
1 
Exercice 33. Soit n ∈ N et P(X) = 1+ X − 1− X .
2i n n
Quel est le degré de P ? Montrer que ses coefficients sont réels et que ses racines aussi.
Le factoriser.

c
Exercice 34 (Oral ESCP, 2000). Soit g la fonction dà finie sur R par :
sin x



 si x , 0
g : x 7→ 

x
1 si x = 0



12.7 Exercices avancés  17

(1) Montrer que g est de classe C 1 sur R et dà terminer


c g0 (x) pour tout x réel.
(2) Montrer qu’il existe deux polynômes Pn et Qn tels que pour tout n ≥ 1 et pour tout
x non nul, on ait :
Pn (x) sin(n) (x) + Qn (x) sin(n+1) (x)
g(n) (x) =
xn+1
(k) c
où f (x) dà signe la dérivée k-ème de la fonction f .
(On déterminera une expression de Pn+1 et Qn+1 en fonction de Pn et Qn .)
(3) Montrer que Pn et Qn sont à coefficients dans Z. Préciser le degré, la parité et le
coefficient du terme de plus haut degré de chacun de ces polynômes.
(4) En écrivant que sin(x) = x.g(x), déterminer deux nouvelles relations entre
Pn , Qn , Pn+1 , Qn+1 . En dà duire
c que P0n = Qn .

Exercice 35 (Oral ESCP, 2014). Cet exercice propose de déterminer, par différentes
méthodes, les polynômes réels P tels que P0 divise P.

(1) Déterminer tous les polynômes P ∈ R[X] de degré 2 tels que P0 divise P.
 X de degré n. Montrer que si P divise P, alors il existe α ∈ R tel que :
0
(2) Soit P ∈ R[X]
P(X) = + α P0 (X)
n
(3) Méthode 1. Soit P ∈ R[X] tel que P0 divise P.
(a) Pour k ∈ N, déduire de la question 2. une relation de récurrence entre P(k) et
P(k+1) , où P(k) désigne la dérivée k-ième de la fonction polynomiale identifiée
à P.
(b) En déduire tous les polynômes P ∈ R[X] tels que P0 divise P.
(4) Méthode 2.
(a) Déterminer toutes les fonctions f : R → R dérivables sur R telles que ∀ x ∈
x
R, f (x) = + α f 0 (x)
n
(b) En déduire tous les polynômes P ∈ R[X] tels que P0 divise P.
n
(5) Méthode 3. Soit P(X) = ak X k un polynôme de R[X] de degré n ∈ N∗ , tel que P0
P
k=0
divise P.
(a) Établir une relation de récurrence entre les coefficients de P (on pourra utiliser
la question 2.).
(b) En déduire les polynômes P ∈ R[X] solutions.

Exercice 36. Dans cet exercice, on propose quelques applications de la formule d’inter-
polation à l’aide des polynômes de Lagrange.
X n
Soit P(X) = ak X k un polynôme de C[X], h ∈ C∗ et m ∈ C.
k=0
Y X − m − jh !
On pose Lk (X) = .
0≤ j≤n
(k − j)h
j,k
18  Polynômes

(1) En reprenant l’exercice vu en cours sur les polynômes de Lagrange, montrer que
Xn
P(X) = P(m + kh)Lk (X).
k=0
On dit qu’on a interpolé le polynôme P aux points m, m + h, m + 2h, . . . , m + nh.
(2) En déduire la formule
n !
n−k n
X
(−1) P(m + kh) = n!an hn .
k=0
k
n !
X n p
(3) Utiliser le résultat précédent pour simplifier les sommes s p = (−1)k k pour
k=0
k
p = 0, 1, 2 . . . , n − 1 et n.
(4) En interpolant le polynôme Q(X) = X n aux points 0, 1, 2n , 3n , . . . , nn et à l’aide de
(3), simplifier la somme
n !
k n n+1
X
sn+1 = (−1) k .
k=0
k

Exercice 37 (Oral ESCP, 2007). Une suite (Pn )n∈N de fonctions polynômes réelles est
définie par la donnée de P0 : x 7→ x et la relation de récurrence :

Z x Z 1 !
∀n ∈ N, ∀ x ∈ R, Pn+1 (x) = (n + 1) Pn (t)dt + x 1 − (n + 1) Pn (t) dt
0 0

On confondra dans cet exercice un polynôme et la fonction polynôme associée.

(1) Déterminer les polynômes P1 , P2 , P3 et P4 .


(2) Montrer que, pour tout n, Pn est l’unique polynôme vérifiant les deux conditions :
Pn (0) = 0, et ∀ x ∈ R, Pn (x) − Pn (x − 1) = xn
(Pour la suite donnée dans l’énoncé, on calculera Pn+1 (0), Pn+1 (1) et on calculera
P0n+1 (x) − P0n+1 (x − 1).)

(3) Montrer que, pour tout n ∈ N∗ , le polynôme Pn (X) est divisible par X(X + 1).
Factoriser les polynômes P1 (X), P2 (X) et P3 (X).
(4) Montrer que le polynôme Pn est de degré n + 1 ; calculer son coefficient dominant,
ainsi que le coefficient du terme en X n .
p
(5) Montrer que, pour tout n ∈ N et tout p ∈ N∗ , on a Pn (p) = kn .
P
k=1

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