12
12.1 Objectifs
2
12.2 Fonctions polynômes 3
Objectif : L’objectif de ce chapitre est d’étudier les principales propriétés d’un objet, plus
général, appelé polynôme et défini par une expression de la forme
n
X
a jX j
j=0
où n ∈ N et (a0 , a1 , . . . , an ) ∈ K n+1
avec K = R ou C et où X sera appelée l’indéterminée.
Dans toute la suite, K désignera R ou C.
Définition 12.2.1. On dit qu’une suite (an )n∈N est à support fini s’il existe N ∈ N tel que
pour tout n ∈ N, n ≥ N, an = 0.
En d’autres termes, dire qu’une suite est à support fini signifie qu’elle est nulle à partir d’un
certain rang.
Remarque 2. Si P désigne un polynôme à une indeterminée, on verra, plus loin, qu’on peut
le noter aussi P(X).
Remarque 3. L’expression X 0 désigne le polynôme constant 1.
X
Remarque 4. Soit P un polynôme donné par P = an X n .
n∈N
Comme la suite (an ) est à support fini, il existe N ∈ N tel que an = 0 pour tout entier n dès
lors que n > N.
On a alors P = a0 X 0 + a1 X 1 + . . . + aN X N .
X
Les sommes de ce chapitre sont donc en fait des sommes finies.
n∈N
Remarque 5. On identifie les polynômes constants avec les scalaires : le polynôme aX 0 sera
simplement noté a.
n
X
Remarque 6. On pourra, si besoin, identifier un polynôme P = ak X k avec la fonction
k=0
polynôme associée définie sur K par p(x) = a0 + a1 x + a2 x2 + . . . + an xn .
4 Polynômes
Définition
X 12.2.4
X (Définition de l’égalité de deux polynômes). Deux polynômes A =
ak X k et B = bk X k seront dits égaux si et seulement pour tout k ∈ N, ak = bk .
k∈N k∈N
Deux polynômes sont égaux si et seulement si ils ont les mêmes coefficients d’indice i pour
tout i ∈ N.
Définition 12.2.5
X (Définition Xde l’addition de deux polynômes). Soient deux poly-
nômes A = ak X k et B = bk X k . On appelle somme de A et B, et on note A + B, le
k∈N k∈N
polynôme dont le coefficient d’indice n ∈ N est an + bn .
X
On a donc A + B = (ak + bk )X k .
k∈N
X
On a donc λA = λan X n .
n∈N
Définition 12.2.7
X (Définition X du produit de deux polynômes.). Soient deux poly-
nômes A = an X n et B = bn X n . On appelle produit de A et B, et on note AB,
n∈N n∈N
le polynôme dont le coefficient d’indice n est
Xn X
cn = ak bn−k = ai b j = a0 bn + a1 bn−1 + . . . + an b0 .
k=0 0≤i, j≤n
i+ j=n
X
On a donc AB = cn X n où
n∈N
c0 = a0 b0 , c1 = a0 b1 + a1 b0 , c2 = a0 b2 + a1 b1 + a2 b0 , etc.
Remarque 7. On a AB = BA : le produit des polynômes est commutatif. C’est clair d’après
n
X Xn
la définition du produit puisque cn = ak bn−k = b j an− j .
( j=n−k)
k=0 j=0
m m
Exercice 1. Soient les polynômes A = 1 + mX + 2 X2 + 3 X 3 + . . . + X m et B =
1 + mX + m2 X 2 + m3 X 3 + . . . + X m .
Soit p ∈ N. Exprimer le coefficient d’indice p du produit AB de deux façons.
Quelle identité portant sur les coefficients binômiaux obtient-on ?
Faire de même en considérant, cette fois, B = 1 − mX + m2 X 2 − m3 X 3 + . . . + (−1)m X m .
X
Définition 12.2.8. Soit P un polynôme défini par P = ak X k .
k∈N
— Si P n’est pas le polynôme nul, on appelle degré de P et on note deg(P), le plus
grand des indices des coefficients non nuls de P :
deg(P) = max{k ∈ N|ak , 0}
— Si P est le polynôme nul, on adopte la convention deg(0) = −∞.
n
X
Lorsque P est de degré n, on peut écrire P sous la forme P = ak X k où (a0 , a1 , . . . , an ) ∈
k=0
Kn+1 et an , 0.
n
X
Remarque 9. Lorsque l’on manipule un polynôme P donné sous la forme P = ak X k , il
k=0
ne faut pas affirmer rapidement que deg(P) = n ! On ne peut faire cette dernière affirmation
que si an , 0.
Exemple 12.2.1. P = 1 + X + X 3 ∈ R[X] est unitaire de degré 3.
Remarque 10. Soit n ∈ N. L’ensemble des polynômes de degré au plus n est noté Kn [X].
PQ = 0 si et seulement si P = 0 ou Q = 0.
X
Définition 12.2.10. Soit P = ak X k et Q deux polynômes de K[X]. On appelle poly-
k∈N
nôme composé de P et Q le poynôme noté P ◦ Q ou P(Q) défini par
X
P◦Q= ak Qk
k∈N
Remarque 11. Cette définition justifie la notation P(X) pour un polynôme puisque le poly-
nôme composé de P et Q = X donne simplement P donc P = P(X).
Proposition 12.2.5. Soient P(X) et Q(X) deux polynômes de K[X] avec deg(Q) ≥ 1.
Alors
deg(P ◦ Q) = deg(P) deg(Q)
Exercice 2. Soit A(X) ∈ C[X] tel que A(X) = A( jX) où j = e2iπ/3 . Montrer qu’il existe
un polynôme P ∈ C[X] tel que A = P(X 3 ).
12.3.1 Définition
12.3 Dérivation dans K[X] 7
X
Définition 12.3.1. Soit P(X) = ak X k un polynôme de K[X]. On appelle polynôme
k∈N
dérivé de P(X) le polynôme noté P0 (X) défini par
X
P0 (X) = (k + 1)ak+1 X k
k∈N
Si P(X) est constant alors P0 (X) = 0 et si P(X) est non constant, en notant d = deg(P) ≥ 1,
on a
d−1
X d
X
P0 (X) = (k + 1)ak+1 X k = kak X k−1 .
k=0 k=1
Définition 12.4.1. On dit que le polynôme B(X) divise le polynôme A(X) ou que A(X)
est un multiple de B(X) ou que B(X) est un diviseur de A(X) s’il existe un polynôme
C(X) tel que A(X) = B(X) · C(X).
Le polynôme C(X) est alors appelé le quotient de A(X) par B(X).
−4X 3 − 3X 2 + X− 4 X +2
3
− (−4X − 8X ) 2
−4X + 5X − 9
2
0 + 5X 2 + X− 4
− (5X 2 + 10X)
0 − 9X − 4
− (− 9X − 18)
14
Exercice 4. Soient λ et µ les restes respectifs des divisions euclidiennes d’un même
polynôme P(x) de K[X] par X − a et X − b avec a , b. Trouvez le reste de la division
euclidienne de P(X) par (X − a)(X − b) en fonction de λ et µ.
12.5 Racines d’un polynôme. Ordre de multiplicité d’une racine. 9
Définition 12.5.1. Soit P(X) un polynôme de K[X] et α ∈ K. On dit que α est racine de
P si P(α) = 0.
Exemple 12.5.1. Le polynôme X 2 + 1 considéré dans R[X] n’a pas de racine. Considéré
dans C[X], X 2 + 1 possède deux racines : i et −i.
Autrement dit, α est d’ordre de multiplicité r si on peut factoriser P(X) par (X − a)r mais
pas par (X − a)r+1 .
√
Exercice 6. √On admet l’irrationalité de√ 2. Soit P un polynôme à coefficients rationnels
tels que P( 2) = 0. Montrer que (− 2) est aussi racine de P avec le même ordre de
multiplicité.
Exercice 7. Soit n ∈ N∗ . Montrer que P(X) = 1 + X + X n n’a que des racines simples.
10 Polynômes
Définition 12.5.3. Soit n ∈ N∗ . Les racines nme de l’unité sont les racines dans C du
polynôme X n − 1.
2i(m−m0 )π
⇐⇒ e n = 1
⇐⇒ il existe ` ∈ Z, m − m0 = `n
Par conséquent, si la différence des indices m − m0 est multiple de n, les nombres complexes
zm , z0m sont égaux.
Si les deux indices m, m0 sont tels que 0 ≤ m < m0 ≤ n − 1 (c’est à dire tous deux compris
entre 0 et n − 1 mais distincts) il est impossible pour m − m0 d’être un multiple entier de n et
donc zm et z0m sont distincts. Les nombres complexes z0 , z1 , . . . , zn−1 sont donc des solutions
deux à deux distinctes de l’équation zn = a. Il y a donc au moins n solutions.
Soit un indice k ∈ Z. Par division euclidienne, il existe un quotient q ∈ Z et un reste r avec
0 ≤ r ≤ n − 1 tel que k = nq + r. On a alors
2i(nq+r)π
zk = e n
= e n +2iqπ
2irπ
2irπ
=e n
= zr
On vient de montrer que tout nombre complexe solution est égal à l’un des nombres com-
plexes z0 , z1 , . . . , zn−1 et il y a donc au plus n solutions à l’équation zn = 1.
Il y a donc exactement n racines nme de l’unité.
En tenant compte des ordres de multiplicité des racines, tout polynôme non constant de
C[X] s’écrit sous la forme
Ys
P(X) = λ (X − zk )rk
k=1
n−1
Y 2ikπ
Exemple 12.5.3. Soit n ∈ N∗ : X n − 1 = (X − e n )
k=0
Proposition 12.5.6. Soit P(X) un polynôme de R[X]. Si P(X) admet a ∈ C pour ra-
cine d’ordre de multiplicité r alors P(X) admet aussi a ∈ C pour racine d’ordre de
multiplicité r.
Proposition 12.5.7. Tout polynôme non constant de R[X] s’écrit sous la forme
Yr s
Y
P(X) = λ (X − xi )αi (X 2 + p j X + q j )β j
i=1 j=1
Exercice 9. Soit P(X) ∈ R[X] tel que deg(P) = n ≥ 1. On suppose que, pour tout
1
k ∈ {1, 2, . . . , n + 1}, P(k) = . Calculer P(n + 2).
k
12.6 Exercices.
Calculs algébriques.
Exercice 14. Montrer que pour tout réel a, cos 3a + 4 cos 2a + 8 cos a + 5 ≥ 0.
Exercice 15. Soient a, b, c trois nombres complexes de modules deux à deux distincts.
On suppose que pour tout p ∈ {1, 2, 3}, a p + b p + c p ∈ R. Montrer que a, b, c sont réels.
Exercice 19. Pour tout n ∈ N∗ , montrer que le polynôme P(X) = (X − 3)2n + (X − 2)n − 1
est divisible par (X − 3)(X − 2) et former le quotient.
Exercice 20. Soient m, n, p des entiers naturels. Montrer que le polynôme X 3m+2 +
X 3n+1 + X 3p est divisible par X 2 + X + 1.
(1) Montrer que 1 est racine double de P puis déterminer le polynôme Q(X) tel que
P(X) = (X − 1)2 Q(X).
(2) Déterminer les racines de Q(X) dans C.
(3) Factoriser le polynôme P(X) dans R[X].
Exercice 22. Factoriser dans C[X] les polynômes X 6 + 27, (X 2 + 1)3 + (X − 1)6 et X 4 +
4X 3 + 4X 2 + 1.
Exercice 23. Sachant que 2+3i est racine du polynôme P(X) = X 4 −2X 3 +6X 2 +22X+13,
factoriser ce polynôme dans R[X].
12.6 Exercices. 15
Exercice 25. Déterminer tous les polynômes P ∈ R[X] vérifiant P(0) = 0 et P(X 2 + 1) =
P(X)2 + 1. On pourra considérer la suite définie par u0 = 0 et pour tout n ∈ N, un+1 =
u2n + 1.
(7) Pour k ∈ N, on pose βk = Bk (0). Exprimer, pour tout réel x, Bn (x) en fonction des
βk pour 0 ≤ k ≤ n.
n
n+1
X !
(8) Montrer que βk = 0.
k=0
k
(9) Montrer que, pour tout réel x, Bn (x) = (−1)n Bn (1 − x). En déduire le calcul des
nombres β2p+1 et B2p+1 ( 12 ). pour tout p ∈ N.
n−1 !
Y kπ
Exercice 30 (Produit de sinus). L’objectif est de simplifier le produit sin .
k=1
n
(1) Résoudre dans C l’équation (z + 1)n − 1 = 0
(2) En déduire la factorisation dans C[X] du polynôme (X + 1)n − 1.
(3) En calculant de deux façons le coefficient du terme de degré 1 de (X + 1)n − 1,
n−1 !
Y kπ
simplifier le produit sin
k=1
n
Exercice 31. Pour quels entiers naturels non nuls n le polynôme P(X) = (X−1)n −(X n −1)
a-t-il une racine double ?
i n i n
!
1
Exercice 33. Soit n ∈ N et P(X) = 1+ X − 1− X .
2i n n
Quel est le degré de P ? Montrer que ses coefficients sont réels et que ses racines aussi.
Le factoriser.
c
Exercice 34 (Oral ESCP, 2000). Soit g la fonction dÃ
finie sur R par :
sin x
si x , 0
g : x 7→
x
1 si x = 0
12.7 Exercices avancés 17
Exercice 35 (Oral ESCP, 2014). Cet exercice propose de déterminer, par différentes
méthodes, les polynômes réels P tels que P0 divise P.
(1) Déterminer tous les polynômes P ∈ R[X] de degré 2 tels que P0 divise P.
X de degré n. Montrer que si P divise P, alors il existe α ∈ R tel que :
0
(2) Soit P ∈ R[X]
P(X) = + α P0 (X)
n
(3) Méthode 1. Soit P ∈ R[X] tel que P0 divise P.
(a) Pour k ∈ N, déduire de la question 2. une relation de récurrence entre P(k) et
P(k+1) , où P(k) désigne la dérivée k-ième de la fonction polynomiale identifiée
à P.
(b) En déduire tous les polynômes P ∈ R[X] tels que P0 divise P.
(4) Méthode 2.
(a) Déterminer toutes les fonctions f : R → R dérivables sur R telles que ∀ x ∈
x
R, f (x) = + α f 0 (x)
n
(b) En déduire tous les polynômes P ∈ R[X] tels que P0 divise P.
n
(5) Méthode 3. Soit P(X) = ak X k un polynôme de R[X] de degré n ∈ N∗ , tel que P0
P
k=0
divise P.
(a) Établir une relation de récurrence entre les coefficients de P (on pourra utiliser
la question 2.).
(b) En déduire les polynômes P ∈ R[X] solutions.
Exercice 36. Dans cet exercice, on propose quelques applications de la formule d’inter-
polation à l’aide des polynômes de Lagrange.
X n
Soit P(X) = ak X k un polynôme de C[X], h ∈ C∗ et m ∈ C.
k=0
Y X − m − jh !
On pose Lk (X) = .
0≤ j≤n
(k − j)h
j,k
18 Polynômes
(1) En reprenant l’exercice vu en cours sur les polynômes de Lagrange, montrer que
Xn
P(X) = P(m + kh)Lk (X).
k=0
On dit qu’on a interpolé le polynôme P aux points m, m + h, m + 2h, . . . , m + nh.
(2) En déduire la formule
n !
n−k n
X
(−1) P(m + kh) = n!an hn .
k=0
k
n !
X n p
(3) Utiliser le résultat précédent pour simplifier les sommes s p = (−1)k k pour
k=0
k
p = 0, 1, 2 . . . , n − 1 et n.
(4) En interpolant le polynôme Q(X) = X n aux points 0, 1, 2n , 3n , . . . , nn et à l’aide de
(3), simplifier la somme
n !
k n n+1
X
sn+1 = (−1) k .
k=0
k
Exercice 37 (Oral ESCP, 2007). Une suite (Pn )n∈N de fonctions polynômes réelles est
définie par la donnée de P0 : x 7→ x et la relation de récurrence :
Z x Z 1 !
∀n ∈ N, ∀ x ∈ R, Pn+1 (x) = (n + 1) Pn (t)dt + x 1 − (n + 1) Pn (t) dt
0 0
(3) Montrer que, pour tout n ∈ N∗ , le polynôme Pn (X) est divisible par X(X + 1).
Factoriser les polynômes P1 (X), P2 (X) et P3 (X).
(4) Montrer que le polynôme Pn est de degré n + 1 ; calculer son coefficient dominant,
ainsi que le coefficient du terme en X n .
p
(5) Montrer que, pour tout n ∈ N et tout p ∈ N∗ , on a Pn (p) = kn .
P
k=1