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1.

Définition de l’architecture

« La définition la plus juste que l’on puisse donner aujourd’hui de l’architecture est celle qui
tient compte de l’espace interne. Sera belle celle dont l’espace interne nous attire, nous élève,
nous subjugue spirituellement ; sera laide celle dont l’espace interne nous fatigue ou nous
repousse. Mais le point fondamental est que tout ce qui ne possède pas d’espace interne n’est
pas de l’architecture. »1 (ZEVI B.)

Bruno ZEVI, auteur du livre Apprendre à voir l’architecture,


naquit à Rome le 22 janvier 1918. Architecte, il s’intéressait à l’histoire
de l’art. De même il fut réputé pour ses critiques d’art italien. Il décédera
le 9 janvier 2000 après avoir publié 8 ouvrages.
1. Photo de Bruno ZEVI

Sur base de cette définition, nous sommes d’accord sur la notion de l’espace interne en
architecture cependant nous pensons qu’il y manque la dimension extérieure.

Tout d’abord, « l’architecture est celle qui tient compte de l’espace interne ». En effet,
elle est la seule discipline artistique qui gère et réfléchit l’espace interne. Par exemple, les
cathédrales étaient pensées comme un monde intérieur richement orné. On retrouve ici
l’attention apportée au traitement de l’espace intérieur dans la création d’architecture. En effet
c’est ici que se trouve la séparation entre le monde de l’architecture et celui de la sculpture.
Dans le sens où une sculpture n’est pas pensée, au départ, pour accueillir l’homme, elle ne se
découvre que par son aspect extérieur. A l’inverse, une architecture propose un espace
extérieur mais surtout intérieur dédié à l’Homme.

1
ZEVI Bruno, Apprendre à voir l’architecture, Coll. « Forces vives », Lonrai (France), Editions de Minuit,
Octobre 2013, pp.15-16

1
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De plus, « Sera belle celle dont l’espace interne nous attire, nous élève, nous subjugue
spirituellement »2. Nous pouvons citer en exemple l’organisation spatiale des musées destinée
à susciter des sensations dans les espaces intérieurs créés par des
architectes. Nous pouvons citer le Musée National, centre d’art
Reina Sofia où est exposé le « Guernica » datant de 1937 et
réalisé par le peintre espagnol Pablo Picasso. Ce tableau choque
d’une part par sa grandeur et d’autre part son thème, la guerre
sous Franco. L’organisation spatiale vient au service de cette
2. Photo de la salle d’exposition
du « Guernica » au Musée volonté de l’artiste. Le tableau, caché au détour d’un couloir,
National Reina Sofia.
place le spectateur en surprise devant lui. De ce fait,
l’architecture est au service de la sensation provoquée par le tableau. Un autre exemple
prenant en compte les sensations créées dans l’espace interne est
le bâtiment de Peter ZUMTHOR (architecte suisse), « Les
thermes de Vals » réalisé entre 1993 et 1996. L’architecte crée
un jeu de question-réponse entre le monde minéral (la pierre) et

l’eau pour exprimer les sensations que cette interaction procure :


3. Photo d’une des salles des
là où l’eau est laiteuse et douce, la pierre est lisse. En prenant bains thermaux de Vals

compte des sensations, on prend conscience de la dimension


humaine de l’architecture, conçue par et pour l’Homme.

Bruno ZEVI met bien en avant l’espace intérieur constitutif de l’architecture.


Cependant il néglige la notion d’extérieur impliquée par un intérieur.

Une architecture doit être conçue en fonction de l’espace extérieur et des relations qui
s’établissent avec celui-ci par les cadrages, les vues ou la lumière. D’ailleurs, pour citer Louis
KAHN, « Les écoles qui n’ont pas de lumière naturelle, sont définitivement non
architecturaux.»3. Cette citation nous montre l’influence non négligeable de l’extérieur avec la
lumière naturelle dans la création d’architecture. Cette interaction se manifeste par exemple
dans « la maison de la cascade » de F.L WRIGHT qui est entièrement pensée pour une
symbiose entre l’intérieur et l’extérieur.

2
Id.
3
KAHN L. I., Silence et Lumière, Paris (France), Editions du Linteau, 1996, p. 164

2
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De plus, l’aspect extérieur n’est pas négligeable en architecture. En effet certains
bâtiments sont principalement connus pour leur enveloppe comme
le Taj Mahal, les temples de la vallée de rois en Egypte ou le Burj
Khalifa à Dubaï. L’architecture de ces bâtiments se caractérise par leur
extérieur. Bien souvent cet aspect participe à un message architectural
comme la puissance, la richesse, le pouvoir ou une idéologie. On
peut même noter une évolution dans la façon dont un bâtiment
4. Photo du Taj Mahal
traite son extérieur. Ainsi les châteaux forts étaient d’abord
prévus pour montrer la puissance militaire (château de Bouillon) tandis que plus tard, il
démontreront plutôt la richesse des familles (châteaux de la Loire).

Pour conclure, nous pouvons dire que la définition de Bruno ZEVI prend
principalement en compte la dimension sensible de l’architecture c’est-à-dire dans le ressenti
d’un espace intérieur et des sensations qu’il procure. Mais en ce sens, il néglige la dimension
physique de l’architecture qui implique la notion de contexte dans lequel le bâtiment
s’implante, les relations qu’il entretient avec celui-ci et enfin de ce que l’aspect extérieur
suscite et exprime. Cette définition pourrait donc être complétée comme suit :

« L’architecture doit être physique mais aussi spirituelle. En effet, elle existe à travers les
bâtiments. De même, elle doit interagir avec son environnement extérieur. Elle sollicite nos
sens naturels, ce qui nous permet de comprendre leur organisation interne mais elle doit
surtout nous procurer un ressenti personnel à travers son interprétation, en plus de répondre à
des fonctions spécifiques »

2. En quoi l’architecture contribue-t-


elle ou non à l’utopie ?

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A la suite de l’œuvre de Thomas MORE, « Utopia » publié en 1516, l’utopie peut être définie
comme : « Une pensée qui consiste à imaginer une société idéale, indépendamment de toutes
les contraintes de la réalité »4

Afin d’illustrer le concept d’utopie, nous avons choisi de présenter le modèle de la


ville frugale développé par Jean HAENTJENS dans son ouvrage « La ville frugale » publié en
2011. Jean HAENTJENS, économiste et urbaniste français, a publié des ouvrages sur le
thème de la ville durable. Il travaille principalement dans le domaine du développement
durable et anime également des conférences sur ce sujet.

Dans son livre « La ville frugale », il nous démontre l’échec du


concept de la ville passive et propose plusieurs solutions afin de la remettre au
goût du jour notamment au niveau du travail, du partage, du logement 5. Illustration montrant la
première de couverture de
et du déplacement. Il insiste aussi sur l’implication des citoyens à la
l’ouvrage « La ville frugale »
création de ce modèle urbain. D’ailleurs, nous pensons que ce modèle
contient des notions d’utopie puisqu’elle engage une remise en question
complète du modèle contemporain.

L’architecture peut contribuer à la réalisation d’une utopie dans son inscription dans la
société et dans la prise en compte des besoins humains.

Tout d’abord, l’architecture tente de répondre aux attentes de la société. Depuis que
l’Homme existe il tente de se constituer un abri pour se protéger du monde extérieur. Avec le
temps cet espace de protection s’est transformé en un espace de vie voire relationnel. De nos
jours, nombreux sont les projets qui tentent de favoriser les échanges aux moyens d’habitats
partagés. Nous pouvons faire référence à notre projet de fin d’année dont le but est de créer un
logement intergénérationnel et/ou partagé. Cette ambition vient surtout d’un constat sur l’état
de la société actuelle avec une augmentation de l’isolement social de plus en plus important
de certains groupes sociaux ; tels que les personnes âgées seules, les étudiants voire les
familles monoparentales.

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 http://www.etudes-litteraires.com/figures-de-style/utopie.php consulté le 28/04/2016 et mise à jour
non disponible

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De plus, les enjeux de notre siècle sont surtout liés à l’écologie et à l’adaptabilité des
logements due à notre société actuelle qui est de plus en plus mobile. Si nous reprenons notre
projet architectural de fin d’année nous devons aborder la notion d’espaces modulables ;
c’est-à-dire qu’un même endroit peut, au cours du temps, accueillir une autre fonction selon
les besoins de la personne. Ainsi une chambre d’étudiant peut à titre d’exemple devenir un
bureau au départ de l’étudiant. A l’échelle urbaine, Jean HAENTJENS propose également une
modulabilité au niveau de la ville. En effet, il définit la gare comme un pôle dans la ville
autour duquel des bâtiments modulables se développent. Ces derniers, dans les premiers
temps de la ville accueilleraient des logements, et suite au développement économique futur
de la ville, ces logements peuvent être déplacés rapidement (2-3 semaines) pour laisser place à
des pôles de travail à distance et des commerces, les habitations étant déplacées en périphérie.
Ce modèle urbain montre que l’architecture peut contribuer à l’utopie en étant en phase avec
la société et son évolution. Néanmoins, l’architecture ne néglige pas l’héritage passé. De
nombreux bâtiments japonais mélangent techniques contemporaines et une adaptabilité du
logement afin d’inscrire le bâtiment dans son temps tout en laissant place aux traces du passé
et à l’héritage culturel. Nous constatons dès lors que l’architecture permet d’allier innovations
et traditions, deux notions qui semblent pourtant opposées dans l’utopie puisque l’innovation
engendre souvent une destruction du passé

Enfin, une utopie peut se concrétiser à travers l’architecture en proposant de nouveaux


modèles de vie qui peuvent se transformer en des modèles de société. Ils reflètent le système,
la pensée et les attentes de l’époque dans laquelle elle s’inscrit ; à l’exemple du familistère de
Guise fondé par Jean-Baptiste GODIN en 1846. Ce chef d’entreprise a concilié travail et
logement pour ses employés en leur fournissant un habitat et un cadre de vie agréable (théâtre,
piscine, école, droits de la femme), tout en étant orienté vers leur activité professionnelle. Il a
créé une véritable communauté où les besoins de chacun étaient respectés en réunissant
architecture et attentes sociales en un même lieu, c’est donc en ce sens que ce modèle est
utopique.

L’architecture peut être un appui à l’utopie en lui permettant de se réaliser mais elle
peut également avoir des effets néfastes.

L’architecture peut nuire à l’utopie lorsqu’elle ne fournit pas de réponses à tous les
problèmes qu’une société rencontre. Ainsi certains modèles urbains qui se voulaient utopiques

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ont été des échecs sans concrétiser leurs objectifs. Par exemple, les villes passives, soit
faiblement énergivores, ont échoué car elles n’ont pris en compte qu’un aspect des besoins de
l’homme, en l’occurrence, l’énergie. Or pour qu’une utopie fonctionne, elle ne doit pas
oublier tous les autres besoins de l’homme (le travail, le logement, les relations). La ville
passive voulait solutionner tous les problèmes avec uniquement l’énergie durable ; cependant
une multiplicité de problèmes engendrant une multiplicité de solutions, il faut les assembler
pour trouver la solution. La ville frugale, par exemple, se fixe comme priorité d’offrir un
confort de vie à ses habitants en consommant moins de ressources qu’elles soient
énergétiques, financières ou pétrolières.

Comme nous venons de le voir, la ville passive a échoué car elle a omis tous les côtés
humains. Mais nous constatons aussi qu’en rejetant la notion
7. Représentation du Modulor
d’individualité, l’architecture nuit aussi à l’utopie. Prenons l’exemple définit par LE CORBUSIER

de LE CORBUSIER, architecte français du XXe siècle, qui prônait le


côté fonctionnel et collectif selon sa vision d’une habitation conçue
comme une « machine à habiter5 ». Il a donc développé des habitats
standards basés sur le Modulor, un outil qu’il a lui-même mis en
place afin de dimensionner l’Homme par rapport au nombre d’or et
de déterminer la moyenne. On constate que ces bâtiments trop
standardisés n’ont que très peu de temps correspondu aux besoins premiers des habitants.
Nous pensons que son erreur a été de mettre en exergue la généralité au détriment de
0l’individualité. Ainsi puisque l’architecture répond aux besoins de l’Homme, si elle se veut
utopique, elle doit couvrir l’ensemble de ceux-ci sinon elle sera un échec.

Dans une approche plus philosophique, l’architecture nuit à l’utopie quand celle-ci se
déplace trop en dehors de la réalité. En effet, à l’image de la distinction que Platon créait entre
les idées et la matière, il arrive qu’un concept architectural se développe uniquement dans la
pensée et dans l’idée, s’éloignant ainsi du concret et de la réalité physique. En comparaison
de l’histoire de la philosophie, en se perdant dans des concepts purement théoriques,
l’architecture ne trouve plus d’écho dans le réel et ne répond plus aux attentes d’une société
qui s’inscrit dans le concret. Il se produit alors une scission entre la réalité et les concepts
architecturaux et les habitants ne trouvent plus de réponses à leurs attentes. Si une architecture

5
LE CORBUSIER, Urbanisme, Paris, Crès, 1925, p. 219

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se veut utopique, elle doit donc s’inscrire dans le réel avec les moyens et les techniques dont
elle dispose et c’est son ancrage dans cette réalité qui lui donnera sa viabilité et sa durabilité.

Pour conclure, l’architecture et l’utopie possèdent un aspect évolutif lié à des


phénomènes de société et la prise en compte de l’humain dans toutes ses dimensions afin que
celles-ci soient des réussites sur le long terme. Une utopie doit s’inscrire dans le réel pour
exister, ainsi l’architecture étant une activité concrète, elle contribue à sa réalisation.
Aujourd’hui l’équilibre entre utopie, architecture et société en pleine mutation fait émerger de
nouveaux modèles chargés de promesses pour les générations à venir.

3. Bibliographie et iconographie
Bibliographie

 https://fr.wikipedia.org/wiki/Bruno_Zevi site consulté le 28/04/2016 et mise à jour le 5/03/2016.

 https://fr.wikipedia.org/wiki/Guernica_(Picasso) consulté le 28/04/2016 et mise à jour le 04/05/2016.

 http://e-cours-arts-plastiques.com/analyse-doeuvre-guernica-de-pablo-picasso/ réalisé par Sylvia Ladic


le 27/03/2013. Site consulté le 28/04/2016 et mise à jour non disponible.

 https://arzadesign.wordpress.com/2013/04/22/les-thermes-de-pierre-bains-nes-de-la-montagne/ site
consulté le 28/04/2016 et mise à jour non disponible

 http://www.etudes-litteraires.com/figures-de-style/utopie.php consulté le 28/04/16 et mise à jour non


disponible

 http://www.etudes-litteraires.com/figures-de-style/utopie.php consulté le 28/04/2016 et mise à jour non


disponible

 http://www.lavillefrugale.com/ site consulté le 28/04/2016 et mise a jour non disponible

 https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Ha%C3%ABntjens site consulté le 28/04/2016 et mise à jour le


29/11/2015

 http://www.fypeditions.com/la-ville-frugale-un-modele-pour-preparer-lapres-petrole/ site consulté le


28/04/2016 et mise à jour non disponible

 http://www.slate.fr/story/99517/reze-le-corbusier site consulté le 28/04/2016 et mise à jour non


disponible

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 http://www.implications-philosophiques.org/Habitat/Zuppinger1.html site consulté le 07/05/2016 et
mise à jour non disponible

Iconographie

1. Photo issue du site internet https://en.wikipedia.org/wiki/Bruno_Zevi consulté le 28/04/2016 et mise à


jour le 15/03/2016.

2. Photo réalisée par Isabeaux11 le 09/08/2009 issue du site internet


http://www.spaintravelguide.com/viewing-guernica-at-madrids-reina-sofia-museum.html consulté le
28/04/2016 et mise à jour non disponible

3. Photo issue du site internet https://arzadesign.wordpress.com/2013/04/22/les-thermes-de-pierre-bains-


nes-de-la-montagne/ consulté le 28/04/2016 et mise a jour non disponible

4. http://artic.over-blog.com/2015/12/la-maison-sur-la-cascade-franck-loyd-wright.html consulté le
28/04/2016 et mise à jour non disponible

5. http://metro.co.uk/2015/09/19/tourist-dies-after-falling-down-steps-of-taj-mahal-trying-to-take-a-selfie-
5399365/ consulté le 28/04/2016 et mise à jour non disponible

6. Image issue du site internet http://internetactu.blog.lemonde.fr/files/2012/07/9782916571676.jpg


consulté le 28/04/16 et mise à jour non disponible

7. Image issue du site internet http://projetopographie.blogspot.be/2015/04/modulor-lhomme-mesure-


de-toutes-choses.html consulté le 28/04/2016 et mise à jour non disponible

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